Fulcran Vigouroux
Dictionnaire de la Bible
Letouzey et Ané, (Volume II,p.407-408-779-780).
CÈNE (δείπνον; Vulgate: cæna), dernier repas fait par Notre-Seigneur avec ses Apôtres et dans lequel il institua le sacrement de l’Eucharistie. Joa., xiii, 2, 4; xxi, 20;I Cor., xi, 20. Cf. Matth., xxvi, 26; Luc, xxii, 20. Le mot latin cœna, d’où vient cène, signifie «souper» en général; mais la langue française a réservé exclusivement le mot qu’elle en a tiré pour désigner le repas où le Sauveur se donna lui-même en nourriture à ses disciples. Comme ce jour-là Jésus célébra également la Pâque, les évangélistes appellent aussi la dernière Cène Pâque. Matth., xxvi, 17, 18, 19; Marc, xiv, 12, 14, 16; Luc,xxn, 8, 12, 13, 15; Joa., xviii, 28.
I. Jour ou fut célébrée la Cène.
Jésus la célébra un jeudi; car tous les évangélistes s’accordent à la placer la veille de sa mort. Matth., xxvi, 20; Marc, xiv, 17;Luc., xxii, 14; Joa., xiii, 1. Or cette mort eut lieu un vendredi. Matth., xxvii, 62; xxviii, 1; Marc, xv, 42; Luc,xxm, 54; Joa., xix, 31, 42. Mais la difficulté est de déterminer si ce jeudi coïncide avec la veille de la Pâque juive, c’est-à-dire le 14 Nisan, ou avec l’avant-veille,c’est-à-dire le 13 Nisan. Dans le premier cas, Jésus aurait célébré la Pâque en même temps que les Juifs; dans le
second, il les aurait devancés d’un jour. On sait qued’après la loi, Exod., xii, 6; Lev., xxiii, 15; Num., xxviii, 10, l’agneau pascal devait être immolé dans l’après-midi du
14 Nisan, avant que le coucher du soleil ne commençâtla journée du 15 Nisan, selon la manière de compter desJuifs. Mais c’est aux premières heures de cette nuit du
15 qu’on le mangeait; on ne devait alors, et pendantles sept jours de la fête pascale, faire usage que de painsazymes. D’après la coutume, dès le 14 Nisan on s’abstenaitde manger tout ce qui était fermenté, de sorte qu’onregardait quelquefois ce jour comme le premier desazymes. Voir Azymes, t. i, col. 1314. À ne considérerque les synoptiques, la dernière Cène aurait eu lieu «le premier jour des azymes, jour où l’on devait immolerla Pàque», c’est-à-dire après le coucher du soleil quimettait fin au 14 Nisan, dans les premières heures dela nuit qui commençait le 15. Matth., xxvi, 17; Marc, xiy, 12; Luc, xxii, 7. D’après saint Jean, au contraire, xili, 1; xviii, 28; xix, 14, il semble évident que, lapassion ayant eu lieu «le jour de la préparation dela Pàque, avant que les Juifs eussent célébré la fête», la dernière Cène doit être placée «avant la fête de Pâque», c’est-à-dire après la fin du 13 Nisan, aux premièresheures de la nuit qui commençait le quatorzième jour.Cette apparente contradiction soulève un problème auquelon a donné diverses solutions; mais aucune n’est encoredéfinitive, faute de renseignements précis et certainssur les usages juifs touchant la célébration de la Pàqueau temps de JésusChrist. Les nombreux systèmes imaginésse ramènent à trois principaux: le premier entreprendd’accorder les expressions de saint Jean avec lesens clair des synoptiques; le deuxième, au contraire, explique les synoptiques d’après saint Jean; le troisièmeenfin, laissant aux deux récits leur sens obvie et propre, cherche la solution ailleurs que dans leur combinaison.
1° Première opinion. — NotreSeigneur célébra laPàque en même temps que les Juifs, dans la nuit quisuivit le 14 Nisan, comme il ressort du récit des synoptiques.Si saint Jean, xiii, 1, place la Cène «avant lat’éte de Pâque», c’est qu’il distingue entre la Pâque etla fête ou solennité de Pâque; ou bien, comptant à la manièregrecque et romaine, qui ne commence les joursqu’à minuit, il rapporte à la veille ce qui était pour lesJuifs le commencement du jour. De plus, l’expressionTtapauxEuri toû niaxx, Joa., xix, 14, appliquée au jourde la passion, semble indiquer la veille de la Pâque, mais peut aussi avoir un autre sens. Car le mot irapzaxEu/idésigne communément la préparation ou veille du sabbat, c’est-à-dire le vendredi. La irapï<rxeuï] toû iria-^aest tout simplement le vendredi dans l’octave pascale.Enfin la locution «manger la pâque», dans Joa., xviii, 28, ne doit pas être restreinte à l’agneau pascal, mais s’appliqueencore aux autres victimes qu’on immolait pendantla journée du 15, la chagigah. Deut., xvi, 2; II Par., xxx, 22-24; xxxv, 8-9. Il suit de là que si les Juifsrefusent d’entrer dans le prétoire le matin du vendredi, «de peur de se souiller et de ne pouvoir plus manger lapâque», cela doit s’entendre non de l’agneau pascal, mais des autres victimes offertes dans cette fête. Lesprincipaux partisans de cette opinion sont: S. Jérôme, In Matlh., 26, t. xxvi, col. 193; S. Augustin, Epist.xxxvi, 13, t. xxiii, col. 150; Luc de Bruges, In sacr. J. C.Evangelia comm., m*f°, Anvers, 1606, p. 447-450; Tolet, In sacr. Joa. Evangel. comm., in-4°, Cologne, 1611, t. ii, p. 5-18; Cornélius a Lapide, In Matth-, xxvi, 17, édit. Vives, t. XV, p. 549-550; F. X. Patrizi, De Evangeliislibri III, diss. L, in-4°, Fribourg, 1853, p. 458-515; J. Corluy, Commentarius in Evang^ S. Joannis, in-8°, Gand, 1880, p. 318; A. C. Fillion, Évangile selon saintMatthieu, p. 498-501; Bochart, Hierozoiçon, part. i, lib. ii, c. 50, Opéra omnia, 3 in-f°, Leyde, 1692, t. ii, p. 557-572; Reland, Antiquit. sacrse vet. Hebrseor., IV, iv, 7-8, in-8°, Utrecht, 1708, p. 226-228; Langen,
Die letzten Lebenstage Jesu, in-8°, Fribourg-en-Brisgau, 1864, p. 57, etc.
2° Seconde opinion. — Le Sauveur fit la Cène vingt-quatreheures plus tôt que les Juifs; après les dernièresheures du 13 de Nisan. Tous les évangélistes s’accordentà appeler le jour du crucifiement la Parascève, c’est-à-direle jour de «la préparation», Matth., xxvii, 62; Marc, xv, 42; Luc, xxiii, 54; Joa., xix, 31, en d’autrestermes la veille du sabbat ou vendredi. Mais cette foisla veille du sabbat avait un caractère particulier, carsaint Jean, xix, 14, l’appelle la Parascève delà Pâque.Nul doute qu’il ne faille entendre par là un vendrediprécédant immédiatement la solennité pascale. Aussisaint Jean, xix, 31, remarque-til que cette année lejour du sabbat était grand: grand sans doute par sacoïncidence avec le jour de la Pàque. D’ailleurs il eût étéétrange d’appeler le grand jour de la fête de Pâque simplement «la préparation de la Pâque». C’est donc le14 Nisan, veille de Pâque et du sabbat, qu’on doit placerle jour du crucifiement. Il suit de là que Jésus, expirantau moment où les agneaux de la Pâque étaient immolés, a du faire le repas légal vingt-quatre heures plus tôt queles autres Israélites. Cette conclusion s’accorde parfaitementavec le langage des évangélistes. La dernière cèneeut lieu «avant la fête de Pàque», dit saint Jean, xiii, 1.Or, si le repas avait été au soir du 14 au 15 Nisan, commeil se faisait aux premières heures de la nuit qui commençaitle quinzième jour, il aurait eu lieu le jour de la fêtede Pàque. <c Avant la fête de Pàque,» Joa., xiii, 1, correspond donc au soir du 13 au 14 Nisan. Qu’on nedise pas que saint Jean comptait à la manière grecqueou romaine: car plus loin, xix, 31, il suit la coutumejuive en faisant commencer le sabbat le vendredi soir.De plus, le lendemain matin, saint Jean, xviii, 28, nousmontre les sanhédrites évitant de pénétrer dans le prétoirepour ne point se souiller, «afin de pouvoir mangerla pâque.» Or le sens naturel de cette expression est «manger l’agneau pascal». L’application qu’on a vouluen faire aux autres victimes immolées le 15 Nisan etsurtout à la chagigah, ni>in, repose sur deux textes, Deut., xvi, 2; II Par., xxx, 22, mal compris. R. Cornely, Introductio in Novi Testamenti libros, 1886, p. 271. Le témoignage des synoptiques n’est pas enréalité contraire aux textes de saint Jean. Le premierjour des azymes, où on immolait l’agneau, s’entendaitsouvent non pas seulement des dernières heures du14 Nisan, mais de toute cette journée, Josèphe, Bel.jud., V, iii, 1, qui commençait en réalité la veille, aucoucher du soleil; c’est précisément à ce moment, entre six et sept heures du soir, qu’on allumait leslampes pour fouiller les coins les plus obscurs de lamaison, et faire disparaître les moindres parcelles delevain; aux dernières heures de ce même jour, d’aprèsla manière juive de compter, on immolait l’agneau.Les évangélistes semblent donc désigner le soir du 13au 14 pour la célébration de la Cène. (Par leur expression «le premier jour des pains sans levain», ils nedistinguent pas entre le premier et le second soir dece jour.) Car si Notre -Seigneur l’avait célébrée le 14 ausoir, ou plus précisément au commencement du 15, lessynoptiques n’auraient pu appeler ce jour «le jour où ouimmolait la Pâque», l’agneau devant être immolé dansl’après-midi du 14. Il suffit du reste d’étudier l’ensemblede leur récit pour reconnaître que la Cène de Jésus nefut pas la Pâque légale. Ce n’est pas le malin du 14 seulementque les Apôtres se seraient préoccupés du lieu oùil fallait préparer la Pàque. Luc, xxii, 7. L’affluence étaittrop considérable à Jérusalem dans cette fête pour qu’ondifférât jusqu’au matin du jour où devait se faire le repaspascal le soin de retenir un local. De plus, Notre -Seigneurfait dire à l’hôte qui doit le recevoir: «Mon tempsest proche; que je fasse la Pàque chez toi avec mes disciples.» Matth., xxvi, 18. Il n’y a de rapport entre ces
deux membres de phrase que si Jésus a voulu dire: L’heure de ma mort approche; il faut se hâter, demainil serait trop tard; prépare donc ce qu’il faut pour queje célèbre aujourd’hui la Pàque chez toi avec mes disciples.Pour les synoptiques, aussi bien que pour saintJean, le repas de Jésus précéda donc de vingt-quatreheures celui des autres Juifs. La suite de leur récit s’accordeparfaitement avec cette hypothèse. L’arrestationde Jésus, la réunion du sanhédrin pour le procès, lesallées et venues chez Pilate et chez Hérode, l’épisode deSimon le Cyrénéen, les achats d’un suaire par Josephd’Arimathie, de parfums par Nicodème et les saintesfemmes: tout cela est incompatible avec le repos dugrand jour de la Pàque. Sans doute le repos était moinsstrict que pour le sabbat: on pouvait acheter et préparerles aliments nécessaires; mais c’est la seule différencequ’établit la Loi. Exod., xii, 167 Lev., xxiii, 7: «Vousn’y ferez aucune œuvre servile, excepté en ce qui regardela nourriture.» Quant aux jugements et exécutions, sion pouvait les faire pendant l’octave de la Pàque, on n’ajamais prouvé qu’on put s’en occuper le premier jourou grand jour de la solennité. Tout semble donc exclurele jour de la fête et s’accorde très bien, au contraire, avec le jour de la préparation.
D’après cette opinion, Notre -Seigneur, devançant devingtquatre heures le repas légal, ne fit pas la Pàquejuive, mais institua la Pàque chrétienne, l’Eucharistie.Il accomplit, il est vrai, tous les autres rites du festinpascal, sauf la manducation de l’agneau; mais le véritableAgneau de Dieu, celui qui était immolé en figure dansla Loi, était présent. Quelle fin plus sublime donner à laPàque légale, abrogée pour toujours: Jésus substituantla vérité à l’ombre! — Que Jésus fît la dernière Cène lesoir du 13 au 14 Nisan, c’est la pensée des anciens Pères, d’Apollinaire, évêque d’Hiérapolis, t. v, col. 1298; de saintHippolyte de Porto, t. x, col. 870; de Clément d’Alexandrie, t. ix, col. 758; de saint Irénée, t. iv, col.’10; de saint Pierred’Alexandrie, t. xcii, col. 78; de Tertullien, t. ii, col. 973.Ces témoignages expriment le sentiment de nombreuseset célèbres Églises, et sont confirmés par les traditionsjuives, qui placent la mort de Jésus au 14 de Nisan. Talmud, Sanhédrin, ꝟ. 43 a, 67 a. Parmi les modernes, c’est lesentiment de Calmet, Commentaire littéral, in-4o, Paris, 1715, S. Matthieu, p. cxlv-clxi; Sepp, Vie de Jésus, trad. Charles de Saint-Foi, Paris, 1854, t. i[, p. 90-102; H. Wallon, L’autorité de l’Évangile, in- 12, Paris, 1887, p. 392-401; P. Godet, Commentaire sur l’Evangile desaint Jean, 1877, p. 538-558, etc.
3o Troisième opinion. — Les affirmations des synoptiquesd’une part, de saint Jean de l’autre, paraissent sicatégoriques, que certains exégètes ou chronologistesrenoncent à les fondre ensemble pour les ramener aumême sens. Ils cherchent ailleurs la conciliation, en. s’efforçant de prouver avec plus ou moins de succèsqu’on pouvait célébrer la Pàque le soir du 13 au 14 aussibien que le soir du 14 au 15 Nisan. Jésus aurait fait laPàque le 13-14 Nisan, et c’est ce que marquent lessynoptiques, tandis que les Juifs l’ont célébrée le 14-15, un jour plus tard que le Sauveur, comme le témoignesaint Jean. (Selon quelques-uns, Notre -Seigneur auraitcélébré la Pàque le soir du 14, et les Juifs l’auraientfait le 15, c’est-à-dire le soir du 15 au 16 de Nisan, l’expression des synoptiques: «premier jour des azymes,» leur paraissant plus naturelle dans cette hypothèse.) Lespartisans de cette troisième opinion apportent les mêmesraisons que ceux de la seconde pour montrer que Jésusfit la dernière cène un jour avant les Juifs; mais ilsveulent de plus prouver que ce dernier repas fut cependantun repas légal, une vraie pâque, comme paraissentbien l’indiquer les synoptiques. À ce dessein, plusieurshypothèses plus ou moins fondées ont été avancées. —D’après C. lken, Dissertationes theol. philolog., 1770, t. ii, p. 337, il y avait divergence entre les Juifs sur la
manière de déterminer la nouvelle lune, les uns la fixantd’après le calcul astronomique, les autres par l’observationempirique des phases de la planète; il pouvaity avoir par certains temps nuageux une erreur d’un jourdans cette constatation: de là un retard pour la célébrationde la Pâque. Mais Maimonide, Conslitut. de sanct.novilun., dans Ugolini, Thésaurus, t. xvii, col. cclviii.nous apprend que ce double mode d’observation commençaseulement après la ruine du Temple et la dissolutiondu sanhédrin. — Selon d’autres, les Juifs du dehorspouvaient manger la pàque le 13-14 Nisan, tandis queles Juifs de Jérusalem la mangeaient le 14-15. Malheureusementc’est là une pure hypothèse, qui n’est appuyéesur aucun document. On fait remarquer seulement l’impossibilitématérielle d’immoler en trois heures de tempsenviron, si tout le monde faisait la Pàque le même jour, les deux cent cinquante mille agneaux au moins, Josèphe, Bell. jud., VI, ix, 3, nécessaires pour la multitudedes pèlerins: ce qui ferait plus de deux mille àsacrifier par minute. — On a proposé une solution plussatisfaisante en s’appuyant sur les inconvénients qu’entraînaitpour les pharisiens, stricts observateurs du repossabbatique, l’occurrence de la Pàque avec un vendredi.Une des cérémonies du soir de cette fête consistaità aller hors de Jérusalem couper le’ômér oula gerbe sacrée, prémices de la moisson nouvelle. Orl’on attendait pour cela que le jour de la fête fût expiré; et on moissonnait alors assez d’épis pour faire une gerbepouvant donner trois sata de grain. Lorsque la fêtetombait un vendredi, il fallait donc en plein sabbat fairela moisson. Comment un pharisien l’auraitil souffert, lui qui regardait comme un crime de rompre quelquesépis en un tel jour? On ne pouvait éviter cette fâcheuseoccurrence qu’en transférant la fête à un autre jour, duvendredi au samedi; or c’est précisément ce que nousvoyons autorisé dans le calendrier juif (Surenhusius, Mischna, de Syned., part, iv, p. 210), par la règleBadu, laquelle prescrit, lorsque la Pâque tombe unvendredi, de retarder d’un jour le 1er du mois. Sousle second Hillcl, cette règle était reçue par toute la nation, sauf par les anti-talmudistes. Il esta croire qu’ellen’a pas été décrétée tout d’un coup; elle s’est introduitepeu à peu par l’influence du pharisaïsme; cet ascendantétant déjà considérable au temps de Jésus-Christ, onpeut présumer que la loi, elle aussi, était en vigueur.Ideler, Handbuch dermath. Chronologie, Berlin, 1825, t. i, p. 519; Jlémain, La connaissance des temps évangéliques, in-8o, 1886, p. 482-480. Par suite de cettetranslation, on célébrait en réalité la fête le 16; mais cejour portait, pour les partisans de cette mutation, le nomde quinzième jour, car le changement se faisait en retardantd’un jour le 1er du mois. Notre-Seigneur et tousles Juifs qui n’admettaient pas encore les exagérationspharisaïques sur le sabbat, auraient suivi le vrai calendrieret célébré la Pâque au jour où elle tombait régulièrement.— Reste une difficulté à résoudre. Si Jésus fit laPàque un jour plus tôt que les Juifs, comment les Apôtrespurent-ils se procurer avant le temps l’agneau que laLoi prescrivait de sacrifier dans le Temple au soir duquatorzième jour? La Loi, Deut., xvi, 2, 5, 6, prescritd’immoler l’agneau pascal dans Jérusalem, mais nondans le Temple. Ce n’est qu’à partir de Josias que cetteobligation nouvelle fut imposée à tous. Jésus, excommuniépar les prêtres, put revenir à la pratique ancienne, d’aprèslaquelle l’agneau était immolé dans chaque maison. Phi-Ion, De vita Mos., 3, Opéra, édit. de 1742, p. 686; DeDecal., p. 766, suppose même que tout Israélite pouvaitle faire, quand la multitude des pèlerins était trop considérable.— Les principaux partisans de cette opinion sont: Paul de Burgos, Addit. ad Lyran., In Matlh., 20, in-f°, Venise, 1588, p. 82; A. Salmeron, In Evangel. historiamcomment., in-f», Cologne, 1613, t. ix, tr. 4, p. 23-31; Jansénius de Gand, Comm. in concordiam, cap. cxxviii,
in-f», Lyon, 1681, p. 856-858; Maldonat, Cotnm. in quatuorevangelistas, in-fo, Pont-à-JIousson, 1596, col. 586-597et 615; Petau, Doctrina temporum, xii, 15 et 16, in-f°, Anvers, 1703, t. ii, p. 240-244; Tillemont, Mémoirespour servir à l’histoire ecclésiastique, in-4°, 1693, t. i, p. 467; R. Cornely, Introductio in N. T. libros, 1886, p. 169-273; J. Knabenbauer, Conirn. in Evangel. sec.Matthœum, 1893, t. ii, p. 405-418; H. J. Coleridge, Lavie de notre vie, trad. franc., in-12, Paris, 1876, t. xvi, p. 5 1; Le Camus, Vie de N.- SJ-- G., 2e édit., in-8°, t. iii, p. 166; Grimm, Einheit dev vier Evangelien, Beilage iii, in-8°, Ratisbonne, 1868, p. 755-788. — Sur toute cettequestion, on peut voir, outre les ouvrages cités plushaut: Schùrer, De controversiis paschalibus, in-8°, 1869; Edw. Robinson, Harmony of the four Gospels, in-8°, Boston, 1845, p. 212-223; H. Alf. Alford, The GreekTestament, in-8°, Londres, 1894, 1. 1, p. 261-264; Greswell, Dissertation on the Harmony of the Gospels, Oxford, 1837, t. iii, p. 168; H. Lutteroth, Le jour de la préparation, lettre sur la chronologie pascale, in-8°, Paris, 1855; Wieseler, Chronologische Synopsis der vier Evangelien, Hambourg, 1843, p. 334; dans le Thésaurus theologicophilologicus, in-f", Amsterdam, 1702, t. ii, les dissertationsde J. Frischmuth, p. 189-194, et de J. Sauberti, p. 194-196; et dans le Thésaurus novus theol.-philolog., t. ii, Leyde, 1732, la dissertation de J. Ch. Harenberg, p. 538-549; dans Ugolini, Thésaurus antiquitaltim, t. xvii, Codex de Paschate et additamenta ad Codicem, col. dcxx-dccccxliv; De Ritibus in Cœna Domini, col. mcxxvii-mcxxxiii. — Quant à l’année et au jour dumois où a été célébrée la dernière Cène, selon notre manièrede compter, voir Jésus-Christ.
II. Rituel judaïque de la Paque observé dans la Cène.
— Avant de raconter le repas où pour la dernière foisJésus célébra la Pâque, il convient d’en rappeler les ritessymboliques; car le Seigneur y fit de fréquentes allusions, qui ne peuvent être comprises que des lecteurs initiésaux coutumes des Hébreux. — La grande fête d’Israëln’avait plus alors la simplicité des premiers âges. Vainementy chercherionsnous la famille juive, debout, lebâton à la main, les reins ceints, les sandales aux pieds, mangeant à la hâte l’agneau entouré d’herbes amères etle pain sans levain. Ces anciennes coutumes étaient-ellesdéjà changées avant la captivité? Le furent-elles seulementdurant le séjour des Juifs à Babylone? Nous l’ignorons; mais on ne peut douter que les écoles des scribes, si nombreuses depuis le retour, n’aient exercé sur les ritesde la Pâque, comme sur les autres institutions mosaïques, une profonde influence. Sous couleur de recueillir lesantiques usages, ils les défigurèrent et en firent desrègles inflexibles. C’est à ce formalisme étroit que noilsdevons de retrouver aujourd’hui encore, dans le Talmudet ses commentaires, une image de la Pâque telle queJésus l’a célébrée.
Au soir du quatorzième jour de Nisan, les familles seréunissaient pour prendre le repas légal. L’agneau, cuitdans le four, devait conserver une forme dont la significationprophétique est manifeste. Il était attaché à deuxbranches de grenadier, bois moins sensible que toutautre à l’action de la chaleur, Pesach., vii, 1, dontl’une le traversait tout entier, tandis que l’autre, pluscourte, tenait les pieds de devant étendus en croix. S. Justin, Dial. cuni Tryph., 40, t. vi, col. 566. Ces apprêtsétaient l’objet de scrupuleuses précautions, car il fallaitse garder de briser aucun os, Exod., xii, 46; la moindreinfraction à cette loi était punie de quarante coups defouet. Pesachim, vii, 11. — La nuit venue, les convives, dont le nombre allait de dix à vingt; Josèphe, Bell, jud., VI, ix, 3, s’étendaient sur des lits peu élevés, le bras gauche appuyé sur un coussin, la main droiteà portée de saisir les mets. Se coucher pendant le repasétait le privilège des hommes libres; il convenait qu’àl’anniversaire de sa délivrance, Israël parût comme un
peuple affranchi de toute servitude. Le père de familleprenait d’abord une coupe de vin mêlée d’un peu d’eau: «Béni soit le Seigneur, disait-il, qui a créé le fruit de lavigne!» et chaque convive à son tour buvait à cettecoupe.C’est celle-là sans doute que saint Luc, xxii, 17, nous montre bénie par Jésus au commencement de laCène. Un bassin plein d’eau et une serviette passaientaussitôt après dans l’assemblée pour purifier toutes lesmains; le lavement des pieds raconté par saint Jean serattache probablement à ce rite. Les ablutions terminées, on approchait la table au milieu des convives. — Elleétait chargée de divers mets: à côté de l’agneau, desherbes amères, telles que le cresson et le persil, souvenirdes peines de l’Egypte, Maimonide, De fermento et azymo, vu, 13, dans Crenius, Opuscula, fasc. vii, p. 889; puis lepain azyme, mince et sans saveur, comme la pâte que lelevain n’eut pas le temps de fermenter lors de la fuite précipitéed’Israël. Un dernier mets symbolique complétaitle repas, c’était le charoseth, mélange de divers fruits, de pommes, de figues, de citrons cuits dans le vinaigre; à l’aide de cannelle et d’autres épices, on lui donnait lateinte des briques: cette couleur et la forme allongée duplat rappelaient le mortier de Pithom et de Ramessès.Maimonide, Pesachim, vii, 11, dans Opuscula, fasc. vii, p. 889; Exod., i, 11. Parfois on y ajoutait des viandes préparéeset bénies en même temps que l’agneau; c’était, selon le commandement du Deutéronome, xvi, 2, duchevreau ou du mouton rôti, qui devint plus tard leHàgîgâh (de hàgag, «fêter.» Voir Chagigah, i, 6; Pesaxhim, vi, 3); mais le plus souvent on réservait cesacrifice pour le quinzième de Nisan et les jours suivants.Le maître de la maison, dès que les plats étaient devantlui, prenait les herbes, les trempait dans le charoseth enremerciant Dieu d’avoir créé les biens de la terre, et tousen mangeaient au moins la grosseur d’une olive.
Une seconde coupe était alors versée, et le plus jeunedes convives demandait au père de famille l’explicationde ces rites. Celui-ci, donnant à sa réponse une formesolennelle, élevait successivement devant tous les yeuxles mets du repas, et rappelait quel souvenir s’attachaità chacun: l’agneau immolé pour fléchir le courroux duciel et l’ange de la mort passant (Pâque signifie «passage», Exod., xii, 27) sur Israël sans le frapper; le paind’angoisse mangé dans les terreurs de la fuite, Deut., xvi, 3; les herbes, amères comme la servitude dont ilsétaient sortis triomphants. «C’est pour ces prodiges, ajoutait-il, qu’il nous faut louer et exalter Celui qui a changénos larmes en joie, nos ténèbres en lumière; c’est à luiseul qu’il nous faut chanter: Alléluia!» Et tous lesconvives entonnaient le Hallèl ( «louange», nom donnéà une suite de psaumes [cxii-cxvii] commençant par haïrlelu-yah, «louez Jéhovah»; voir IÏallel, t. iii, col. 404):
Louez, serviteurs de Jéhovah,
Louez le nom de votre Dieu.
Que son nom soit béni
Maintenant et dans l’éternité!
Qu’il soit béni de l’aurore au couchant! Ps. cxii, 1-3.
Ils le continuaient jusqu’à la fin du psaume suivant, chant de triomphe sur la sortie d’Egypte:
O mer, pourquoi fuis-tu?
Et toi, Jourdain, pourquoi remonter en arrière?
Montagnes, pourquoi bondir comme les chevreaux,
Et vous, collines, comme les jeunes brebis?
Sous le regard du Seigneur, tremble, ô terre,
Sous le regard du Dieu de Jacob;
Car il change les rochers en fontaines
Et les pierres en sources d’eau vive. Ps. cxiii, 5-8.
Au milieu de ces cantiques on buvait la seconde coupe.
i Le père de famille prenait alors les azymes, les rompait
I avant de les bénir et de les distribuer. Afin que tous se
souvinssent que c’était là un pain de misère, on n’en
1 mangeait qu’un morceau, entouré d’herbes et trempé
dans le ckaroseth. Puis venait le tour de l’agneau: coupé, distribué à chaque convive, il devait disparaître toutentier, et nul mets n’était plus servi.
Le père de famille versait alors une troisième coupe, «le calice de bénédiction» ( voir Lightfoot, Horse hebraicæ, in Matth., xxvi, 27), celui-là probablement que le Christchangea en sang divin. Dès qu’elle était bue, on entonnaitles derniers hymnes de l’Hallel, où la reconnaissanceéclate en transports de joie: «Ce n’est pas à nous, Seigneur, ce n’est pas à nous, c’est à ton nom qu’appartientla gloire, ô source de miséricorde et de vérité! Que lesnations viennent nous dire maintenant: Où est votreDieu? Notre Dieu, il est dans les cieux: ce qu’il veut, ille fait… Et que rendrai-je à Jéhovah pour tous ses bienfaits?j’élèverai cette coupe de salut, et j’invoquerai sonnom. Oui, Jéhovah, je suis ton esclave, ton esclave et lefils de ta servante. Tu as brisé mes chaînes, je veux t’offrirun sacrifice de louanges.» Et s’adressant au mondeentier, Israël, dans une sainte ivresse, cherchait à l’entraînervers son Dieu: «vous tous, peuples, louez Jéhovah, nations, exaltez-le! Car son amour est puissant surnous, et la vérité de Jéhovah demeure éternelle! Alléluia!» Une quatrième coupe passait alors de main enmain et marquait la fin du repas. — Telle était la Pâquejuive, lorsque Jésus la célébra pour la dernière fois. VoirMisclina, Pesachim, et les commentaires de Maimonides.
III. Le festin pascal. — Le mercredi, Jésus n’avaitparu ni dans le Temple ni dans Jérusalem. Dès le matindu jeudi, les Apôtres lui demandèrent en quel lieu ilsmangeraient la pâque, car «on était au premier jour desazymes». Matth., xxvi, 17. Laissant de côté Judas, chargéordinairement de la dépense, le Sauveur appela Pierreet Jean: «Allez, leur dit-il, préparez tout ce qu’il faut.
— Où voulez-vous que nous l’apprêtions?» demandèrentles disciples, Luc, xxii, 8-9, car ils savaient Jérusalempleine de périls. Jésus répondit: «Allez à la ville; en yarrivant, vous rencontrerez un homme portant une cruched’eau, vous le suivrez, et, entrant dans la maison où ilira, vous direz au maître du logis: Voici ce que dit notreMaître: Mon temps est proche; je viens faire la Pâquechez vous avec mes disciples. Où est le lieu (xaTiXujia, hospitium, «l’appartement réservé aux hôtes,» correspondà l’hébreu màlûn) où je dois la manger? Et lui-mêmevous montrera une salle haute (àviyaiov, «étage supérieurd’une maison» ), grande, ornée de lits et disposéeà l’avance (voir Cénacle). Préparez-y tout ce qu’il faudra.» Marc, xiv, 13-16; Matth., xxvi, 18. Pierre et Jeanobéirent: aux portes de la ville, ils rencontrèrent un deshommes qui montaient l’eau puisée à la fontaine deSiloé, et suivant ses pas ils trouvèrent l’hôte indiqué.C’était quelque disciple inconnu des Apôtres. Tout le faitsupposer, et l’assurance avec laquelle Jésus adresse sonmessage, et le nom de Maître qu’il prend, et l’empressementde l’hôte à le satisfaire. Au temps de la Pâque, lesmaisons de Jérusalem cessaient, pour ainsi dire, d’êtreune propriété privée pour devenir celle de Jéhovah. Aussi, pendant la fête, l’hospitalité s’exerçait-elle gratuitement.(J. H. Friedlieb, Archâologie der Leidensgeschic/Ue, in-8°, Bonn, 1843, p. 50.) Le Sauveur, se voyant contraintà prévenir l’heure de la Pâque, avait averti cedisciple de tenir sa demeure préparée.
Le cénacle était vraisemblablement alors, à en jugerpar ce que nous savons des maisons juives, une salle auxmurs blancs; . au centre était placée une table basse, peinte de vives couleurs, dont un côté restait libre pourle service, tandis que les autres étaient garnis de lits. Lesoir où Jésus y entra, les douze le suivaient, Matth., xxvi, 20, et prirent place autour de lui. Jean, couché àsa droite, n’avait qu’à renverser la tête pour reposer sur |le sein du Maître. Pierre était à côté du bien-aimé, et! Judas non loin de Jésus. Avant d’instituer l’Eucharistie,! Jésus dit clairement à Judas: «C’est toi qui me trahiras,» |Matth, , xxvi, 25, et cependant nous voyons qu’après la i
communion les Apôtres ignoraient encore qui devaitcommettre le crime. Luc, xxii, 23; Joa., xiii, 24, 25. Ilfaut donc croire que le Sauveur était près de Judas etl’avertit sans être entendu des autres convives.
L’heure était venue, et le cœur de Jésus en tressaillaitde joie: «J’ai désiré d’un grand désir, dit-il, mangercette pâque avec vous avant que de souffrir.» Luc, xxii, 15. Toutefois, pour faire entendre aux Apôtres que cen’était point le rite figuratif qu’il souhaitait, mais l’accomplissementd’un sacrifice réel dans l’Eucharistie, ilajouta: «En vérité je vous le dis: Je ne mangerai pluscette pâque jusqu’à ce que le mystère en soit accomplidans le royaume de Dieu, s Par delà la Pâque de la nouvellealliance, Jésus contemplait déjà la grande Pâque duciel, car il en parla aussitôt après.
La coupe qui marquait le commencement du repasavait été préparée; Jésus, la prenant des mains de sesdisciples, prononça sur elle la bénédiction accoutumée, Luc, xxii, 17-18, y trempa ses lèvres, comme le faisaittout père de famille, et la présenta aux Apôtres: «Prenez, dit-il, partagez-la entre vous, car pour moi je ne boiraiplus du fruit de la vigne jusqu’à ce que le royaume deDieu vienne.» Ce n’était plus de l’Eucharistie que Jésusparlait ici, mais de la béatitude céleste. Jansénius de Gand, Comment, in Concord. evangelic, cap. cxxxi, p. 876-898.
La pensée des pâques éternelles n’absorbait pas tantle Sauveur, qu’il oubliât ceux qu’il laissait sur la terre: «Sachant que son heure était venue de passer de cemonde à son Père, Joa., xiii, 1-3. Comme il avait aiméles siens qui étaient dans le monde, il les aima jusqu’àla fin, et demanda à sa toute-puissance un prodige decharité qui ravît à jamais les cœurs. Les circonstancesétaient solennelles; saint Jean se plaît à les rappeler: lefestin pascal commençait (la leçon Ssravou yivo|Uvou, adoptée par Tischendorf et Tregelles, d’après les manuscritsdu Sinaï et du Vatican, signifie que le repas commençait.Le texte reçu,-yevoijivou, cœna facta [Vulgate], ne peut être traduit par «après le repas»; nous voyons, en effet, que, le lavement des pieds terminé, Jésus seremit à table et continua le festin. Joa., xiii, 12. Ce participeaoriste doit donc être traduit ainsi: «Le repas étaitcommencé, se poursuivait.» Cf. Matth., xxvi, 6; Marc, vi, 2; Joa., xxi, 4), Satan était là, maître de Judas Iscarioth; au-dessus du cénacle, le ciel s’ouvrait pour Jésus; il y voyait «que tout lui était remis en main par sonPère»; ce «tout» bienheureux de l’Église marqué dusceau des élus; «il savait qu’il était sorti de Dieu etqu’il retournait à Dieu:» il n’avait plus qu’à donner auxhommes le gage suprême de son amour. Mais auparavantil voulut s’humilier devant eux, pour montrer par quelanéantissement il s’était incarné et s’allait donner ennourriture. Au moment où le rite de la fête commandaitaux convives de se purifier les mains, Joa., xiii, 4-20, Jésus, se levant de table, déposa ses vêtements, prit unlinge et se ceignit les reins; puis, versant de l’eau dansun bassin, il se mit à laver les pieds de ses disciples, età les essuyer avec le linge qui lui servait de ceinture.Cette ablution était un symbole, l’image de la Rédemptionqui lave en nous le péché. Voir Lavement des pieds.L’ablution achevée, Jésus reprit ses vêtements et s’étenditde nouveau sur le lit de repos. Il annonça alors à sesApôtres la trahison de Judas. Voir Judas Iscabiote.
IV. Institution de l’Eucharistie. — Le repas touchaità sa fin. «Comme ils mangeaient encore, Jésus prit undes pains azymes, et, ayant rendu grâces, il le bénit.» Malth., xxvi, 26; Marc, xiv, 22; I Cor., xi, 24. Les ritesdu festin pascal exigeaient que tout pain fût brisé avantqu’on le mangeât. Jésus rompit donc celui qui était entreses mains et en présenta les fragments aux Apôtres: «Prenez, mangez, dit-il, ceci est mon corps, livré, rompupour vous, froissé, brisé sous les coups.» L’Évangile etî’Êpitre aux Corinthiens donnent aux expressions de Jésusune forme diverse: «Livré pour vous,» dit saint Luc,
S18q|ievov; «mis en pièces,» ajoute saint Paul, to vitkpûpiwv 9pu7rr6u.£vov (leçon du manuscrit de Bèze), ou encore, d’après une variante conservée dans ce même manuscritet dans ceux du Sinaï et d’Éphrem: xXwjievov, «rompu, brisé.» «On réduisait autrefois la victime et lesgâteaux qu’on offrait à Dieu en petits morceaux, et c’étaitune marque de l’aflliction et du sacrifice qu’on faisait auSeigneur. C’est en ce sens que la fraction du pain sacré, soit qu’on la fasse pour la distribution ou pour toute autreraison mystique, fait partie du sacrifice en représentantJésus-Christ sous les coups, et son corps rompu et percé: ce que les Grecs désignent encore par une cérémonieplus particulière, en perçant le pain consacré avec uneespèce de lancette, et en récitant en. même temps cesparoles de l’Évangile: «Un des soldats perça son côté «avec une lance, et le reste.» Bossuet, Explication desprières de la messe, xvil.
Les azymes rompus et changés au corps de Jésus reposaientsur un plat de la table. Les termes dont se serventles évangélistes: «il donna, prenez, mangez,» semblentindiquer, en effet, que Jésus ne donna pas à chacun desApôtres le pain consacré, mais qu’il en déposa les fragmentssur un plat qui passa de main en main. Tous enprirent leur part.. Jésus venait de se donner tout entier, et il le marqua en ajoutant, sans attendre la consécrationde la coupe: «Faites ceci en mémoire de moi.» Luc, xxii, 19. Il lui restait néanmoins à présenter une pluscomplète expression de sa mort, en montrant après sachair immolée son sang répandu. Voici comment il le fit:
Le repas était terminé; la troisième coupe, Luc, xxii, 20, «le calice de bénédiction,» qu’on buvait avant les dernierschants, venait d’être versée. Jésus la prit, la bénit, et la présenta aux Apôtres: «Buvez-en tous, dit-il, ceciest mon sang, le sang du sacrifice qui consacre la nouvellealliance, le sang qui sera répandu pour plusieursen rémission des péchés,» paroles dont saint Luc, xxii, 20, resserre toute la substance: «Cette coupe est le nouveautestament dans mon sang qui sera versé pour vous.» 11y avait donc dans cette coupe un sang qui devait bientôtcouler et consommer l’alliance nouvelle: plein de cespensées, Jésus ne voyait que mort autour de lui et netrouvait pour consacrer le vin du sacrifice que les parolesde Moïse scellant aussi dans le sang l’antique alliance.Mais en même temps il offrait aux siens dans ce caliceune source de vie éternelle: «En vérité, je ne boirai plusde ce fruit de la vigne jusqu’au jour où je le boirai nouveauavec vous dans le royaume de mon Père. Pour vous, toutes les fois que vous le boirez, faites-le en mémoirede moi.» La Cène se termina, selon l’usage, par unhymne d’actions de grâces. Matth., xxvi, 30.
C. Fouard.
- CÉNÉRETH##
CÉNÉRETH, nom d’une ville et d’un lac de la Galilée.Hébreu: Kinnérét; Septante: KevepsB; Codex Alexandrinus: XsvepiS. Ce nom se trouve écrit, dans Jos., xi, 2: Kinnârôt; Septante: KeveptiO, et Vulgate: Ceneroth; dans Jos., xii, 3 (et III Reg., xv, 20): Kinnerût; Septante: XevvepiÔ; Vulgate: Cénéroth; dans Deut., iii, 17, les Septante transcrivent en conservant la particule a, me, «de,» qui précède le nom en hébreu: Ma^aveoÉO; CodexAlexandrinus: Ma-^îvepl6.
1. CÉNÉRETH. Ville forte de la tribu de Nephthali.Jos., XIX, 35. Cette ville se trouve citée presque dans
dans
la même forme, Kennaratou, *—-> k. VJ.
la liste de Karnak des villes de la Syrie conquises parThothmés III. Cénéreth et Cénéroth sont assez généralementconsidérés comme des formes ou dérivationsde Kinnôr, «harpe,» pluriel Kinnôrôt. Cette ville s’appelaitainsi, suivant le Talmud de Babylone, Megillah, 6, a, parce que «ses fruits étaient doux comme le sond’une harpe». Cf. A. Neubauer, Géographie du Tal
mud, in-8o, Paris, 1868, p. 214. — Origêne, Lexiconnominum hebraicorum, dans la Pair, lai., t. xxiii, col. 1231-1232, propose d’abord la même étymologie: «Kinyra, écrit-il, harpe» (Kivùpa, xc9àpa), et ajoute: «ou science de la lumière» (r, èr.iyvtomz oazôz). Il sembleprendre pour racines qânâh, «acquérir,» et’ô>, «lumière.» Saint Jérôme, ibid., considérant sans doute que Kinnérét, s’écrivant avec d, ne peut dériver d’un mot s’écrivantavec p, remplace, dans sa traduction, l’interprétationd’Origène par celle-ci: «ou bien comme des flambeaux,» aut quasi lucemse, faisant évidemment dériver Cénéroth
de la particule: , «comme,» et nêrôt, pluriel de nêr, «lumière.» Ces interprétations sont des conjectures sansfondement; il se pourrait que le nom fût purement chananéen.Dans les Talmuds, cette ville est appelée Ginôsar.Cf. A. Neubauer, Géographie du Talmud, p. 214. À cenom a succédé celui de Génésar, grec: Vvivi, aâp, I Mach., xi, 07, et Josèphe, Bell. jud., III, x, 7, etc., et celui deGénésareth, Tev/yio-apér, dans les Evangiles. Voir Génésaret Génésareth.
La ville de Cénéreth est citée, Jos., xix, 35, entre lesvilles de Nephthali, Assedim, Ser, Émath et Reccath, d’une part; Édema, Arama et Asor, d’autre part. Ainsique toutes ces localités, elle devait certainement se trouverdans le territoire qui borde, du côté occidental du Jourdain, le lac de Tibériade, l’antique mer de Cénéreth; maisles palestinologues ne sont point d’accord sur sa situation.Selon le Talmud, Megillah, i, 1, Cénéreth devrait êtrecherchée au sud de Tibériade, près de Bêt-Iérah (trèsprobablement la Tarichée de Josèphe) et près de Sennabri( Sennabris et Gennabris du même historien): ceslocalités auraient servi de remparts et de forts à Cénéreth.Le Midrasch ne distingue pas Cénéreth de ces deuxvilles. Voici ses paroles: «Cénéreth. R. Éliézer dit: [c’est] lérah; R. Samuel bar Nahman dit: [c’est] Bêt-Iérah; R. lehoudah bar Simon dit: [c’est] Sennabri etBêt-Iérah.» Cf. A. Neubauer, Géographie du Talmud, p. 214 et 215. Le nom revvaëpi; ou 2ewa6pt5, plus voisindu mot Cénéreth que Génésareth, pourrait être, en effet, une dérivation de l’antique dénomination biblique. Dansla transcription des noms hébreux en grec, la lettre Ss’est souvent unie à la lettre p: ainsi les Septante écriventconstamment Au.opi pour Amri, et Zafiëpi’pour Zamri.Les populations de la Palestine d’ailleurs donnent à lalettre ^ = zz= k un son qui tient du g, du ï; (s) et dutf (s). Josèphe, Bell. jud., III, IX, 7, place Sennabris àtrente stades (5 kilomètres 600 mètres environ), au sudde Tibériade; la Grande Plaine (Méya ireSi’ov), ou vallée.du Jourdain, commence au village de Gennabrin (Tevvaëpfv) et se termine au lac Asphaltite. Bell. jud., IV, viii, 2.Or, si de l’extrémité sud des ruines de l’ancienne Tibériade, qui touchent presque aux bains actuels, on s’avance, dans la même direction, à un peu plus de cinqkilomètres et demi, on rencontre un tertre appelé par lesArabes Sennen - Nibrah et Senn-Nibrah. Son sommetest jonché de ruines à moitié recouvertes par d’épaissesbroussailles. On y remarque les traces d’un mur d’enceinte.Au-dessous, à l’est, le lac s’arrondit en une joliepetite baie tout environnée de lauriers-roses et d’agnuscastus.Au sud de cette baie et au sud-est du tertre commencela longue ruine qui s’étend jusqu’à l’extrémité dulac et à l’endroit où en sort le Jourdain. Elle est connuesous le nom de Kérak. Ce nom est considéré par plusieurscomme une corruption de Bétlérah et de Tarichée.Senn-Nibrah semble n’avoir été qu’une partie, unquartier de Kérak. Les ruines de Kérak couvrent unesuite de collines qui se succèdent sur la rive du lac surune longueur d’un kilomètre. Çà et là on rencontre desrestes de fortifications. Le Jourdain, à sa sortie du lacremontant vers le nord sur le côté occidental des ruines, faisait une presqu’île de cette localité. Josèphe, Vit., 32, dit que Tarichée, ainsi que Sennabris, est à trente stades
II. — U
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CENERETH
420
de Tibériade, sans en indiquer l’orientation; mais Pline, H. N., v, 15, la place au midi. Il semble que, commeles Talmuds, Josèphe fait de Gennabris et de Tarichéeune seule localité. Ce qui ne me paraît pas douteux, c’est que Senn-Nibrah et Kérak nous offrent les débrisdes villes nommées par les Talmuds Sennabri et Bètlérah.D’après l’état des ruines, on peut conjecturerque Gennabris et Bèt - Iérah ou Tarichée étaient dansle commencement deux localités différentes, mais peuéloignées; qu’elles ont fini par se joindre et former commeune seule ville appelée tantôt d’un nom, tantôt de l’autre.Immédiatement après les ruines de Kérak commence leGhôr ou vallée du Jourdain, la Grande Plaine de Josèphe.Moïse, Deut., iii, 17, et Josué, xi, 2, font aussi commencerl’Arabah et le territoire de Gad au sud de Cénéreth.L’identification de Cénéreth avec Sennabris etSenn-Nibrah et Kérak pourrait paraître à peu près incontestable, s’il était certain que ces deux auteurs sacrésdésignent ici la ville de Cénéreth, non le lac du mêmenom. Voir Cénéreth 2.
Dans le Talmud de Babylone, Cénéreth n’est pas toujoursidentifiée avec Sennabri; elle l’est quelquefois avecTibériade. Cf. A. Neubauer, Géographie du Talmud, p. 208. Saint Jérôme, Liber de situ et nom. hébr., t. xxiii, col. 889, au mot Chinnereth, présente la même identificationcomme une opinion ayant des partisans à son époque: «La bourgade, dit-il, appelée plus tard par Hérode, roide Judée, Tibériade, en l’honneur de Tibère César, s’appelaitd’abord, dit-on (ferunt), de ce nom.» Ce sentimenta été suivi presque généralement par les voyageursdu moyen âge. Cf. Jean de Wurzbourg, Descriptio TerrxSanctse, c. vi, t. clv, col. 1071; Theodoricus, Libellusde Locis Sanctis, édit. Titus Tobler, Saint -Gall, 1865, p. 102; Thietmar, Peregrinatio, 2e édit. Laurent, Hambourg, 1857, p. 6; Burkard du Mont-Sion, DescriptioTerrx Sanctse, 2e édit. Laurent, Leipzig, 1873, p. 45; Odoricus de Foro-Julio, De Terra Sancta, ibid., p. 147, etc.De nos jours, le docteur Rich. von Riess, Bibelvtlas, 2e édit., 1887, propose également Tibériade, mais avecun point d’interrogation, et cela avec raison, car on netrouve aucun fondement pour appuyer ce sentiment, etil y a plusieurs motifs de le rejeter.
Bonfrère, Onomasticon urbiuni et locorum SacrseScripturse, édit. Le Clerc, in-f°, Amsterdam, 1707, p. 52, prétend que Cénéreth pourrait n’être pas différente deCapharnaùm, que du moins elle ne devait pas en êtreéloignée. Luigi Marucci, dans son Abrégé de VOnomasticon, in-18, Lucques, 1705, p. 57, reproduit la mêmeassertion. Pour ces auteurs, Capharnaùm étant sur leslimites de Nephthali et de Zabulon, Cénéreth ne peut êtreéloignée de cette ville. Ils donnent à la parole de saintMatthieu, iv, 13, un sens strict qui est contestable.
Scewulf (1102), Relatio de situ Jérusalem, dans leRecueil des Voyages et mémoires de la Société géographique, in-4°, Paris, 1839, t. iv, p. 851, indique la villede Génésareth à deux milles environ vers l’occident dela montagne de la multiplication des cinq pains et du lieuappelé Tabula Domini, c’est-à-dire à trois kilomètresà l’ouest de Tabagha. Cette indication pourrait désignerle Khirbet Miniéh, situé à l’extrémité est du Ghoueîr, aupied du mont appelé’Oreiméh, qui sépare la plaine deTabagha du Ghoueîr. Le’Oreiméh est couvert de ruinesparmi lesquelles on distingue des restes de tours et defortifications. La montagne au nord du’Oreiméh portele nom de Djébel-etKhanazir, dans lequel des écrivainsmodernes ont cru reconnaître une dérivation deGénésar. Cf. Gralz, Schauplatz der heiligen Sclirift, Ratisbonne (1858), p. 417. Ce nom, signifiant «mont desPorcs» ou «des Sangliers», me paraît plutôt un nomarabe donné à l’endroit à cause de ces derniers animauxqui y abondent.
F. de Saulcy croit reconnaître, Dictionnaire topographiqueabrégé de la Terre Sainte, in-12, Paris, 1872,
p. 100, Cénéreth dans Abou-Choucliéh. V. Guérin, Galilée, t. i, p. 209-212, défend cette identification. Selonces savants, Cénéreth = Génésar devait se trouver dansla plaine à laquelle elle avait donné son nom, ou sur sesconfins. Cette plaine est certainement identique avec leGhoueîr actuel, qui s’étend au nord du lac de Tibériade, entre Medjel et le Khan-Miniéh. C’est sur sa limite nord, à trois kilomètres et demi de Medjel, à cinq de Tibériade, à deux de ï Aïn-Medaouâréh, que se trouve Abou-Chouchéh.Ce village est ainsi appelé du nom d’un santonenseveli en ce lieu, et qui a un monument à blanchecoupole parmi les tombes des habitants de la région. Ilse compose d’une douzaine de mauvaises masures bâtiesde pierres de basalte brutes, liées par de la terre, deboutau milieu de monceaux de décombres formés des débrisd’habitations renversées du même genre. On n’y observeaucune trace de construction ancienne ni d’enceinte; «mais, dit V. Guérin, combien de villes importantes etautrefois fortifiées n’ont pas laissé d’ailleurs en Palestinedes traces plus considérables que celles qui existent àAbou-Chouchéh!» Abou-Chouchéh est bâti sur le sommetd’une colline d’où le regard peut contempler la plaine duGhoueîr dans toute son étendue; au delà la nappe azuréedu lac de Tibériade et les montagnes du Djaulan qui lebordent à l’est. Sur le flanc de la colline qui s’abaissevers le Ghoueîr, un moulin est mis en mouvement parles eaux abondantes qui y sont amenées de l’ouadi Rabadiéhet s’écoulent ensuite vers le lac, à travers le Ghoueîr.Mejdel étant très certainement, observe V. Guérin, l’antiqueMagdala ou Magedan, Khan-Miniéh devant être, suivant lui, la Bethsaïde occidentale, il ne reste aux alentoursdu Ghoueîr, pour l’emplacement de Cénéreth, quecelui d’Abou-Chouchéh.
Ceux qui adoptent l’opinion des Talmuds identifiantCénéreth avec Sennabris font de leur côté une autre remarque.Le nom de Génésar a du être donné à la plainede la ville qui l’a porté la première; mais il n’est pasimpossible qu’il lui soit arrivé par l’intermédiaire du lac.Ils observent en outre que, quoique Cénéreth et Génésarsoient tenus pour des noms identiques, il ne serait pasimprobable qu’il n’y ait eu aucun rapport entre les deux.Il n’est pas nécessaire, par conséquent, de chercher Cénérethaux abords de cette plaine. Voir Génésar. Armstrong, "Wilson et Conder, Names and Places in the Old Testament, in-8°, Londres, 1881, p. 43, au mot Chinnereth, neproposent aucune identification.
Devant ces opinions contradictoires, on peut faire lesobservations suivantes: Deux de ces opinions sont appuyéesd’arguments sérieux. 1° Celle qui cherche Cénérethaux confins de la plaine de Génésar. Si Génésardérive de Cénéreth, il est naturel que la ville ait donnédirectement son nom à la plaine plutôt qu’à la mer.
— 2° Celle qui voit Cénéreth dans Sennabris. Elle estfondée sur l’autorité du Talmud de Jérusalem, en partierédigé à Tihériade, par des Juifs à même de connaîtrele site de Génésar ou Cénéreth; il n’est pas improbablenon plus que le nom de Sennabris ait pu dériver de Cénéreth.Cette dernière opinion pourrait paraître plus forteque la première. L. Heidet.
2. CÉNÉRETH (MER DE) (hébreu, Nurn., XXXIV, 11, et Jos., xiii, 27: yâm-Kinnérét; Jos., XII, 3: yâm-Kinnârôt; Septante: e^Xâcraïi XevepéÔ; Codex Alexandrinus: 6aXâff<rri XswEpéÔ; Codex Sinailicus, Num., xxxiv, 11: OaXôddi-, Xsvapi), lac de la Galilée. Parmi les commentateurs, un grand nombre soutiennent que son nom luivient de sa forme, qui est celle, disent-ils, d’une guitareou d’une harpe, en hébreu kinnôr, pluriel kinnorôf.Plusieurs critiques contestent cette interprétation. Laforme de ce lac, suivant eux, lui est commune avec laplupart des lacs, et l’usage le plus constant est de lesnommer d’une des villes bâties sur leur rivage: aussipensent - ils qu’il a été nommé Cénéreth de la ville de ce
nom bâtie sur ses bords. Cf. Matth. Polus, Synopsis criticorumet aliorum commenlalorum, 5 in-f°, Francfortsur-le-Main, 1712, t. i, col. 688 et 954. La mer de Cénérethest citée, Num., xxxiv, 11, après Riblah et la fontaine[de Daphnis], avant le Jourdain, comme devantformer, à l’orient, la limite de la terre d’Israël. En Josué, xii, 3, elle est donnée comme limite du royaume amorrhéende Séhon; xiii, 27, elle est désignée à la fois commeborne de ce royaume et de la tribu de Gad. La plupartdes commentateurs et des critiques croient que les nomsde Cénéreth et Cénéroth, employés seuls, Deut., iii, 17, et Jos., xi, 2, se rapportent également à la mer. Cénérethest donné en ces endroits comme terme nord dela’Arâbâh ou vallée du Jourdain. La similitude de cesderniers passages avec les précédents donne lieu de lepenser. On peut se demander toutefois si les auteurssacrés ne voudraient pas parler de la ville du mêmenom; car on peut supposer que, s’ils eussent voulu parlerde la mer, ils l’eussent désignée comme ils le font Num., xxxiv, 11; Jos., xii, 3, et xiii, 27.
Le nom de mer de Cénéreth se transforma dans lasuite en celui de mer de Génésar, mer de Ginosar, etmer de Génésareth, ou fut remplacé par eux. Voir cesdivers noms. C’est ainsi que nous la trouvons désignéedans les livres des Machabées, les Talmuds, les Evangileset les ouvrages de l’historien Josèphe. Nous la trouvonsaussi indiquée sous le nom de mer de Galilée et mer deTibériade. Voir Tibériade (Lac de). C’est sous ces diversnoms qu’elle est célèbre dans l’histoire, surtout à causedes faits évangéliques qui s’accomplirent sur ses rivagesou dans ses ondes. Suivant Pline, H. N., v, 15, on l’auraitappelée quelquefois mer de Tarichée. L. Heidet.
CÉNÉROTH. Voir Cennéroth.
- CÉNEZ##
CÉNEZ (hébreu: Qénéz; Septante: KevcÇ), nom detrois personnages.
1. CÉNEZ, cinquième fils d’Éliphaz, le premier-néd’Ésaù. Il fut chef de tribu, ’allûf, en Idumée. Gen., xxxvi, 11, 15, 42; I Par., i, 36, 53. Ce nom, après avoirété un nom de personne, est devenu vraisemblablementun nom de lieu ou de tribu, Gen., xxxvi, 42, commecela est arrivé pour Théman, le premier fils d’Éliphaz.
2. CÉNEZ, père d’Othoniel, Jos., xv, 17; Jud., i, 13; in, 9, 11; I Par., iv, 13, et de Saraïa. I Par., iv, 13.Comme Othoniel, juge d’Israël, était frère de Galeb, lefils de Jeplioné, Cénez, n’était pas le père d’Othoniel ausens strict, mais son grand-père ou son ancêtre.
3. CÉNEZ, fils d’Éla et petit-fils de Caleb. I Par., iv, 15.Le texte hébreu porte: «Et les fils d’Ela et Cénez;» lesSeptante: xjcI u: oi’A8à * Kïvé’, et la Vulgate: Filiiquoque Ela: Cenez. Il y a évidemment un nom tombéentre et les fils d’Éla… et Cenez, puisque le mot «fils» est au pluriel et que Cénez est nommé seul.
- CÉNÉZÉENS##
CÉNÉZÉENS (hébreu: haq-Qenizzî, au singulier etavec l’article; Septante: o Keve: <z: oi), un des peuples quihabitaient le pays promis par Dieu à la postérité d’Abraham.Gen., xv, 19. Le territoire qu’il occupait nous estinconnu. Il est à remarquer qu’on ne le trouve pas mentionnéparmi les autres tribus vaincues et dépossédéespar les Israélites. Cf. Exod., iii, 8; Jos., iii, 10; Jud., m, 5. Faut-il croire, avec Bochart, Phaleg, iv, 36, Cæn, 1646, p. 348, qu’il avait disparu d’Abraham à Josué, ouque, s’il appartenait aux contrées promises «depuis lelleuve d’Egypte jusqu’au grand fleuve de l’Euphrate», Gen., xv, 18, il était en dehors des limites de la premièreconquête? Nous sommes ici dans le domaine des conjectures.— Le mot Cénézéens se retrouve dans trois autresendroits de la Bible, Num., xxxii, 12; Jos., xiv, 6, 14,
comme nom patronymique de Caleb, fils de Jéphoné. Il correspondà «fils de Cénez», qu’on rencontre ailleurs, Jos., xv, 17; Jud., i, 13; iii, 9, 11, appliqué à Othoniel, le plusjeune frère de Caleb. Il n’a aucun rapport avec le peuplede la Genèse, malgré la trop ingénieuse opinion d’Ewald, Geschichle des Volkes Israël, Gœttingue, 1864, t. i, p. 361-362, et de Bertheau, dans le Bibél - Lexicon deSchenkel, Leipzig, 1871, p. 521, qui l’expliquent par uneprétendue alliance du chef israélite avec une partie decette tribu, établie dans le sud de Chanaan, pendantqu’une autre partie habitait le pays d’Édom.
A. Legendre.
CÉNI, CENIEN (Vulgate: Ceni), nom que notre versionlatine, I Reg., xxvii, 10; xxx, 29, donne au peuplequ’elle appelle ailleurs Cinéen. Voir Ciséens.
- CENNÉROTH##
CENNÉROTH (hébreu: Kol-Kinnerôt, sous-entendusans doute’érés, «terre, pays;» Septante: n&aiv irv[v^v] XewEpéO), région au nord du royaume d’Israël, dansla tribu de Nephthali. III Reg., xv, 20. Le roi d’Israël Baasas’étant emparé de Rama de Juda, Asa, roi de Juda, envoyades présents à Bénadad, roi de Damas, en lui demandantd’attaquer Baasa. «Bénadad, accueillant la demande duroi Asa, envoya les chefs de son armée contre les villesd’Israël; ils s’emparèrent d’Ahion, Dan, Abel-Beth-Maachaet de tout [le pays] de Cennéroth, c’est-à-dire de toute laterre de Nephthali.» III Reg., xv, 17-20. L’expression «toutCennéroth», rmas-bs, ne peut s’entendre de la ville seule
de Cennéroth, ni du lac, mais désigne évidemment toutun territoire ou une région. Cette région est-elle identiqueà celle appelée dans les Évangiles, Matth., xiv, 34, «terre de Génésar» ou «de Génésareth», et à la plainede Gennésar dont parle Josèphe, Bell. jud., III, x, 8?Dans les trois cas, il s’agit évidemment d’une région situéeprès du lac des mêmes noms. La plaine de Gennésar deJosèphe est certainement le Ghoueir actuel; on croitgénéralement que la «terre de Génésar» de l’Évangilele désigne aussi; l’expression «tout Cennéroth» comprendsans doute le territoire appelé aujourd’hui le Ghoueir, rien ne permet de le contester; mais ne comprend-elleque lui? Armstrong, Wilson et Conder, Names and Placesin Ihe Old Testament and apocrypha, Londres, 1887, p. 44, se contentent de désigner le Ghoueir comme identificationmoderne de Cennéroth et de remarquer que cenom désigne le district appelé plus tard «terre de Génésareth». Il est à croire cependant que cette expressionne doit pas signifier seulement ce territoire, dont la plusgrande longueur n’atteint pas cinq kilomètres, et dont laplus grande largeur n’a pas trois kilomètres; mais qu’ellea une signification plus étendue, embrassant très probablementtout le territoire aux alentours de la mer de Cennérothappartenant à Nephthali et au royaume d’Israël.VoirCénéreth, Génésar, Génésareth et Nephthali.
L. Heidet.
CENS. La Vulgate emploie le mot census, «cens,» dans plusieurs significations différentes. — 1o DansII Esdras, vii, 5, le mot census traduit l’hébreu liay-yal.iai; «généalogies,» expression que les Septante rendent par<T’j-; oôîa, «rassemblement.» De même au ꝟ. 64. VoirRecensement. — 2o Dans l’Ecclésiastique, xxx, 15, le motcensus traduit le mot grec oXëoç, «trésor,» et, au y. 16, le mot grec u/.oûto; , «richesse.» Les deux versets signifient: le premier, qu’un cœur vaillant vaut mieux que laplus grande richesse; le second, qu’il n’est pas de richessepréférable à la santé. — 3o Dans le Nouveau Testament, le mot «cens» est employé deux fois pour désigner uneforme d’impôt. Quand les percepteurs du didrachmedemandent à Simon Pierre si Jésus ne paye pas cetimpôt, le Sauveur pose à Pierre cette question: «Simon, que te semble-t-il? De qui les rois de la terre reçoivent-ilsle tribut ou le cens (tributum vel censura, teXt]î) xïjvitgv)? Est-ce de leurs lils ou des étrangers?»
Matth., xvii, 24. Voir Capitation. — Dans un autre passage, ce mot désigne proprement un des impôts payésau gouvernement romain. Des hérodiens, envoyés parles pharisiens, interrogent Jésus: «Dis-nous que tesemble-t-il? Est-il permis de payer le cens (x.ipaov, censum) à César, ou non? Jésus, connaissant leur malice, leur dit: Pourquoi me tentez-vous, hypocrites? Montrez-moila monnaie du cens (numisma census, vô]xi(T[j.ïtoû xr, vorou). Et ils lui présentèrent un denier. Jésus leurdit: De qui est cette image et cette inscription? Ils luidirent: De César. Il leur dit alors: Rendez à César cequi est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu.» Matth., xxii, 17-22. Dans certaines provinces de l’empire romain, les habitants avaient à payer pour leur personne un tribtitumcapitis (qipoi au>i.âwi). Pour ceux qui possédaientdes propriétés, cet impôt était proportionnel àleurs revenus; pour ceux qui ne possédaient rien, ilétait fixé à tant par tête. C’est ce que Tertullien exprimepar ces mots: «Hominum capita stipendio censa.» Apol., 13, t. i, col. 346. Ceux qui étaient ainsi taxésétaient, selon son expression, «capita ignobiliora.» Ibid.Le texte de saint Matthieu nous montre qu’en Judée lataxe perçue était d’un denier, et, selon Appien, Syr., 50, les Juifs étaient ceux qui payaient le tributum capitisle plus élevé. Les Romains n’avaient fait, du reste, quemaintenir à leur profit un tribut imposé aux Juifs parles Ptolémées et les Séleucides. Josèphe, Ant. jud., XII, iv, 1.
La pièce de monnaie qu’on montre à NotreSeigneurest un denier romain, probablement à l’effigie de Tibère.Voir Denier. Ce denier portpit donc au droit l’image de
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134. — Denier d’argent de Tibère.
TI[6erta] CAESAR DITI AVG-CusM] P[ «i «s] ATGVSTVS. Têtedladéinée de Tibère. — Ci. PONTIFfe: c] MAXIMqus]. Femme
l’empereur avec son nom et ses titres, et au revers uneimage avec ou sans inscription. Nous donnons ici untype de cette monnaie (fig. 134). Ces deniers ne pouvaientêtre employés qu’au payement de l’impôt ou auxtransactions commerciales. Il était interdit de s’en servirdans le Temple, précisément à cause des images qui yétaient gravées. Voir J. Marquardt, De l’organisationfinancière des Romains (Manuel des antiquités romainesde Mommsen et J. Marquardt, trad. franc., in-8°, Paris, 1888, t. x), p. 249-256. E. Beurlier.
CENTAURÉE. 1° Hébreu: dardar; Septante: ?pl60lor, Vulgate: tribulus, Gen., iii, 18; Ose., x, 8. — 2° Hébreu: galgal, Ps. lxxxii, 14; Is., xvii, 13; Septante:-zpoyhi; Vulgate: rota, Ps. lxxxiii, 14; Septante: xoviopTÔv xpo-Xo-j; Vulgate: lurbo, Is., xvii, 13.
I. Description. — Ce genre de plantes, aux espècestrès nombreuses (plus de trois cent cinquante) et trèsvariées, appartient à la famille des composées, tribu descynaroïdées. Ce sont des herbes ordinairement vivaces, à tiges ramifiées, aux feuilles entières ou diversementdécoupées, aux fleurs toutes semblables ou de couleursvariées: les unes, à la circonférence, stériles; les autres, au centre, fertiles, dont les capitules ont l’involucre forméd’écaillés imbriquées souvent épineuses. Voici d’aprèsE. Boissier, Flora orientalis, 5 in-8°, Genève, 1807-1884, t. iii, p. 689-694, et H. B. Tristram, The Fauna and Floraof Palestine, dans The Swvey of Western Palestine, m-4°, Londres, 1884, p. 338-340, les principales espèces
épineuses qui croissent en Palestine et en Syrie. — 1° Centaureacalcitrapa, vulgairementchardon étoile ou chaussetrape, plante de trente à quarante centimètres, à tigetrès rameuse formant buisson, aux feuilles vertes, pubescentes, sessiles, pennatilobées, dont les capitules ovoïdes, solitaires, ont un involucre à écailles pourvues de cinqà sept épines, dont la terminale est large et forte. On latrouve dans les plaines de Moab, sur le mont de la Quarantaine.— L’espèce ou variété Iberica se trouve plusfréquemment en Palestine que la Calcitrapa. Elle endiffère par son port plus robuste, plus élevé, ses capitulesfloraux plus grands; ses fleurs sont roses et sesgraines surmontées d’une aigrette blanche. Les variétésMeryonis et Hermonis habitent, la première, sur le littoralet dans le Liban; la seconde, sur le mont Hermonet dans l’Anti-Liban. La Centaurea Meryonis a les feuillesde la tige presque entières, les écailles florales largementbordées de blanc et terminées par une épine robuste; toute la plante est recouverte d’un duvet blanc. La CentaureaHermonis se reconnaît à ses feuilles étroitementdécoupées, à ses capitules floraux petits, garnis de longueset fines épines aux fleurons d’un rose pâle. — 2° Centaureapallescens, aux feuilles radicales profondément pinnatifides, étroites, à divisions crénelées, aux feuilles desrameaux lancéolées ou linéaires, aux fleurs d’un jaunepâle, dont le calice globuleux est formé d’écaillés munies
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135. — Ccnîanrea hyalolcpis.
D’après un pied cueilli sur le mont Sion. — À gauche, tige et
racine; à droite, rameau aveo fleurs et fruits.
d’une longue épine terminale, à la base de laquelle, dechaque côté, naissent deux courtes épines. La variétéhyalolepis (fig. 135) a les capitules blanchâtres, à épinesplus faibles, et la graine surmontée d’une longue aigrette.Ces deux centaurées se rencontrent dans toute la Palestine, sauf dans les montagnes du nord. La Centaureaaraneosa diûere de cette dernière espèce par le duvetgrisâtre et frisé qui la recouvre, par ses involucres munisde filaments blanchâtres ressemblant à une toile d’araignée.Elle croit dans les plaines du bord de la mer, auCarmel et à Gaza. — 3° Centaurea verutum, qui, d’aprèsLinné, Àmœnitates academicas, 10 in-8°, Erlangen, 1787-1790, 3e édit., t. iv, p. 292, est une grande planteatteignant de deux à quatre pieds de hauteur, à tige àpeine rameuse, portant des ailes latéralement; ses feuillessont allongées, terminées en pointes; les capitules florauxsont espacés vers le sommet de la tige, gros comme unenoix, sphériques, blanchâtres; leurs écailles sont arméesd’une épine atteignant un centimètre et demi de longueur, jaune à la base, noirâtre au sommet; les fleurssont jaunes, la graine pubescente et surmontée d’une
longue aigrette. On la trouve dans les plaines d’Esdrelon, de Génésareth, etc. — 4° Centaurea crocodylium, qu’onrencontre aussi dans la plaine d’Esdrelon, en Galilée, àBanias, est une belle plante annuelle, atteignant parfoisplus d’un mètre de hauteur, aux feuilles oblongues, découpéesen forme de lyre, aux capitules larges portantdes écailles d’un blanc transparent, aux fleurons roses etallongés. — 5° Centaurea solstitialis, répandue dans toutela Palestine, est une herbe bisannuelle, à tige droite, trèsrameuse, anguleuse, couverte, ainsi que les feuilles, d’unduvet blanc cotonneux; les feuilles inférieures sont découpées, les supérieures linéaires, entières, et forment uneaile sur la tige; les capitules floraux ont les écailles terminéespar une épine de couleur jaune-paille. — 6° Centaureasinaica, sur les collines des bords de la mer Morte, à Saint-Sabas, etc., est une herbe annuelle recouverte égalementd’un duvet grisâtre; aux feuilles découpées en lobes; auxcapitules solitaires, assez gros, jaunâtres, à épines robustes, ciliées; aux Heurs de couleur carnée, à graine surmontéed’une aigrette brune. — 7° Centaurea procurrens, plantecouverte de papilles, à rameaux portant un à trois capitulesde grosseur médiocre, ovales, presque glabres; les feuillessont linéaires, les inférieures découpées, les supérieuresdentées; les capitules sont formés d’écaillés membraneuses, blanches sur les bords et terminées par cinq àsept épines étalées en éventail. On la trouve dans lesplaines de Saron et du pays des Philistins, dans les désertsdu sud. — 8° Centaurea hololeuca, croît dans la région descèdres du Liban. C’est une herbe vivace, grêle, hauted’un pied, blanchâtre; la tige ne porte qu’un seul capituleovale conique, tronqué à la base, formé d’écaillésjaunâtres, bordées d’épines étalées en éventail; les feuillessont oblongues-lancéolées, presque entières, formant uneaile sur la tige; les fleurs sont jaunes. — 9° Centaurea
136, — Centaurea myrioceptiala,
myriocephala ( fig. 136), dont la tige se subdivise dès labase en nombreux rameaux divariqués, d’égalos longueuret grosseur, aux feuilles radicales en forme de lyre, auxfeuilles des rameaux oblongues-lancéolées, aux capitulesterminaux petits et portés sur des pédoncules presquesans folioles, aux écailles de l’involucre se terminant enune épine jaunâtre, aux fleurs couleur jaune-paille. Onla trouve dans les plaines d’Alep et de Damas, dans leHauran, le pays de Moab et la Mésopotamie.
M. Gandoger.
II. Exégèse. — 1° Le dardar se trouve deux fois mentionnédans le texte hébreu, associé chaque fois à qôs: danstien., iii, 18, au sujet de la malédiction portée contre laterre à cause du péché d’Adam: «Le sol produira pour toiJe qôs et le dardar;» et dans Osée, x, 8, à propos de ladestruction des autels idolâtriques d’Israël: «Le qôs etle dardar croîtront sur leurs autels.» Dardar est unnom collectif rendu par tpioovoi dans les Septante, et
tribulus, tribuli, dans la Vulgafe. Tout le monde s’accordeà l’entendre d’une plante épineuse, nuisible à laculture, d’une croissance facile et poussant aussi dans lesruines: ce que les Grecs et les Latins entendaient parTpt’ëoXoç, tribulus. Les Septante et la Vulgate auraientdonc bien rendu notre mot dardar. — Le-cplêolos se présentedeux fois dans le Nouveau Testament, Matth., vii, 16, et Hebr., "i, 8. Saint Paul, faisant allusion à Gen., m, 18, emploie comme équivalent du dardar le termeTpfêoXot. Il est à remarquer que le syriaque, dans cetteépître, rend ïp; 20/.o; par darderê’. — Mais les opinions sedivisent quand il s’agit de déterminer ce que les anciensentendaient par le tribulus. Selon les uns, ce serait uneplante de la famille des zygophyllées, le Tribulus terrestresou la Fagonia arabica, Celsius, Hierobotanicon, t. ii, p. 128; E. F. K. Rosenmùller, Handbuch derbiblischen Alterthumskunde, t. iv, X" partie, p. 194. Maisplus communément on identifie le dardar ou tribulusavec une ou plusieurs espèces de centaurée (les anciensdevant comprendre sous un même nom plusieurs des espècessi nombreuses de ce genre, qui infestent les champsdes contrées orientales aussi bien que ceux de l’Occident).H. B. Tristram, Tlie natural History of the Bible, p. 425. D’après lbn et Beîlhar, Traité des simples, n° 2106, dans Notices et extraits des manuscrits de la BibliothèqueNationale, t. xxvi, i™ partie, p. 305, la Centaureacalcitrapa, appelée par les Arabes morrâr, est connuedes habitants du Diàr Bekr sous le nom de derdcriya.De même, en Palestine, les fellahin appellent dardar lacentaurea iberica. Voir Palestine Exploration Fund, Quarterly Statement, 1892, p. 161.
2° Galgal, qui veut dire «chose roulante», et de là «une roue», a, dans Ps. lxxxiii, 14, et Is., xvii, 13, unsens spécial qui n’a pas été saisi en général. Priant Dieucontre les ennemis de son peuple, le Psalmiste s’exprimeainsi:
Mon Dieu, traite-les comme le galgal,
Comme là paille au souffle du vent.
Dans une image semblable, Isaïe, xvii, 13, annonce quela multitude des ennemis d’Israël
Sera dissipée comme la paille sur les montagnes au souffle du vent, Et comme te galgal par un tourbillon.
Les Septante, dans Ps. lxxxii, 14, traduisent par Tpo-/ov, et dans Is., xvii, 13, par xoviopTÔv rpo-/o-j. La Vulgate arota dans ce Psaume, et turbo dans Isaïe. Les traducteursont donc vu dans ce mot galgal un tourbillon. Maisgalgal, étant mis en parallèle avec la paille ou la ballede blé, doit être une chose correspondante, emportéeégalement par le vent, plutôt que le tourbillon lui-même.Et d’ailleurs un tourbillon n’est pas emporté parle vent; c’est le tourbillon de vent qui emporte la poussièreou la paille qu’il trouve sur son chemin. Le sensde galgal, «chose roulante,» convient admirablement àla tige desséchée de la centaurée à dix mille têtes, Centaureamyriocephala, «espèce insigne dans la floreorientale, dit Boissier, Flora orientalis, t. iii, p. 682, dontles touffes sèches, larges d’un pied ou deux, roulent auvent dans les plaines.» Quand la tige, très ramifiée, a étédesséchée par le soleil, elle se détache au ras de terre etest emportée au gré du vent. On voit bondir ces boulesd’herbes par centaines dans toutes les directions, avecun bruit de feuilles sèches qui épouvante les chevaux.En automne, ces boules roulantes abondent dans lesplaines de la Syrie, dans le Hauran, le pays de Galaad.W. M. Thomson, The Land and the Book, Londres, 1876, p. 563-564. Rien n’exprime mieux la comparaison duprophète:
Dissipée comme la paille sur les montagnes au souffle du vent, Comme Yherbe roulante par un tourbillon.
Le Galgal comprend peut-être aussi plusieurs espècesd’Eryngium, assez abondantes en Palestine. En France,
YEryngium campestre s’appelle vulgairement «chardonà cent têtes» et «chardon roulant». Il roule en effet auvent d’automne comme la Centaurea myriocephala. C’est, il est vrai, une ombellifère et non une composée, mais àpremière vue elle a de grands rapports avec les chardonset les centaurées. E. Levesque.
- CENTURION##
CENTURION (grec: txaTovTâp)oç; Vulgate: centurio), commandant d’une troupe de cent hommes.
I. Centurions dans l’Ancien Testament. — Il y avait, dans l’armée juive, des «chefs de cent hommes» (hébreu: sârê mê’ôt), et les Septante et la Vulgate latine lesont souvent désignés sous le nom de éxaTovTip-/» ii, etcenturio, «centurion,» même dans l’Ancien Testament.Quand Moïse, sur l’ordre de Dieu, organisa les Israélitesdans le désert, il "les divisa en troupes de mille hommes, subdivisés en groupes de cent, de cinquante et de dix.Les sârê mê’ôt ou chefs de cent hommes doivent êtreChoisis parmi les hommes les plus vertueux et juger lesaffaires de peu d’importance, en réservant les grandesau jugementde Moïse. Exod., xviii, 21, 22, 25, 26; Deut., i, 15-17. Ce sont donc des magistrats analogues à nosjuges de paix. — Ils sont en même temps des chefs militaires, car dans les Nombres, xxxi, 14, 48, 52, ils conduisentleurs hommes au combat. — Quand Samuel annonceau peuple les malheurs qui suivront l’établissementde la royauté, il prédit au peuple que le roi prendrases fils pour en faire des chefs de cinquante hommesd’après le texte hébreu, des centurions d’après les Septanteet la Vulgate. I Reg., viii, 12. — Saùl, pour détournerses serviteurs de suivre David, leur fait remarquer quecelui-ci ne pourra pas faire d’eux des centurions. I Reg., xxii, 7. — Les centurions figurent comme chefs militairesdans l’armée de David, II Reg., xviii, 1, et le roi lesconsulte avant de livrer combat. I Par., xiii, 1. Il les consulteaussi sur le dessein qu’il a de bâtir un temple auSeigneur. I Par., xxviii, 1. Les dépouilles prises par euxsur les ennemis avaient été offertes en ex-voto et conservéesdans le trésor sacré. I Par., xxvi, 26. Ils offrentaussi de l’or et de l’argent pour le service de la maisonde Dieu. I Par., xxix, 0-7. Les centurions servaient àtour de rôle, pendant un mois, en même temps que lecontingent auquel ils appartenaient. I Par., xxvii, 1. —Il est encore question des centurions sous le roi Salomon, II Par., i, 2, sous Joas, II Par., xxiii, 1, 9, 14, 20, lorsque le grand prêtre Joïada leur donne pour armes leslances et les boucliers consacrés par le roi David, et sousAmasias. II Par., xxv, 5. — Judas Machabée, quand ilorganise son armée, institue également des centurions.I Mach., iii, 55.
II. Centurions romains. — Les centurions de l’arméeromaine sont souvent mentionnés dans le Nouveau Testament.Un centurion aborde Notre -Seigneur à Capharnaiimpour lui demander la guérison de son serviteur, etmérite de lui cet éloge, qu’il n’a pas trouvé une foi pareilleen Israël. Malth., viii, 5-15; Luc, vii, 1-11. — Un centurioncommande la troupe qui conduit le Sauveur au supplice, et rend témoignage à sa divinité. Matth., xxvii, 54; Marc, XV, 39; Luc, xxiii, 47. — Le premier gentil converti est lecenturion Corneille. Act., x, 1-48. Voir Corneille. — Il estégalement question de centurions dans le récit de l’arrestationde saint Paul à Jérusalem, Act., xxi, 32; uncenturion préside à la flagellation de l’Apôtre, xxii, 25-26, d’autres sont chargés de le garder, xxiii, 17; xxiv, 23; de le conduire à Césarée, xxiii, 23; de le mener à Rome, xxvir, 1, 6, 11, 31, 43. Voir Julius.
Les centurions tiraient leur nom du nombre d’hommesauxquels ils commandaient. Nonius, p. 520 M; Varron, De lingua latina, v, 88. Sous l’empire, il y avait soixantecenturions par légion. Aulu-Gelle, xvi, 4, 6. Chaquegroupe de deux centuries formait un manipule commandépar le premier des deux centurions, et six centuries unecohorte, commandée par le premier des six centurions, i
Les centurions commençaient par les postes inférieurs ets’élevaient par degrés jusqu’aux premiers, sauf les exceptionsfaites en faveur de ceux qui se signalaient par desmérites exceptionnels. Les premiers d’entre les centurionsétaient appelés à faire partie des conseils de guerre, onles appelait primi ordines ou ordinarii. Tacite, Hist. rn, 89; Velleius Paterculus, ii, 112, 6; Corpus inscript, latin., t. v, 952 et 8275; t. viii, 2532. Le premier des centurionsétait celui de la première centurie de la premièrecohorte. On le désignait sous le nom de primus pilus ouprimipilus. Corpus inscript, latin., t. v, 4373; t. x, 1711.Ce titre était généralement le couronnement de la carrièredu centurion. Le primipile avait la garde de l’aigle légionnaire.Valère Maxime, I, 6, 11; Tacite, Hist., iii, 22; Juvénal, Sat., xiv, v. 97; Corpus inscript, latin., t. viii, 2644.Tous les centurions portaient comme insigne de leur
137.
Centurion romain. Bas-relief du tombeau de QuintusPublius Festus, centurion de la xie légion.
grade le cep de vigne, vitis, dont ils se servaient pourfrapper les soldats. Pline, H. N., xiv, 19; Juvénal, Sat., vin, 247; Tacite, Annal., i, 23. Aussi dans le langageusuel le mot vitis désigne-t-il le centurionat. Juvénal, Sat., xiv, 193; Spartien, Hadr., x, 6. Le cep avait la formed’une canne recourbée en haut. E. Ilùbner, Archseol.Epigr. Mittheilungen, t. v, p. 206, note 11. Les centurionssont aussi les seuls que les monuments de l’époqueimpériale nous montrent portant des jambières (fig. 137).E. Hûbner, ibid., note 13.
Quand ils avaient terminé leur temps de service, lescenturions rentraient la plupart du temps dans la vie privée, et, grâce surtout aux concessions de terrains qui leurétaient faites dans les colonies, ils jouissaient d’une certaineaisance. Les anciens primipiles, prmi ipilares, étaientparticulièrement renommés par leurs richesses. Souventils entraient dans l’ordre des chevaliers. Corpus inscript, latin., t. viii, 9290; t. x, 5064, etc. Exceptionnellementle centurionat était le point de départ d’une carrière plusélevée, c’était principalement pour les jeunes gens defamille que l’empereur autorisait à débuter dans la carrièremilitaire par le grade de centurion.
Les cohortes auxiliaires avaient également des centurionsde rang inférieur aux centurions légionnaires. Lescenturions qui figurent dans le Nouveau Testament appartenaientà ces cohortes. Quand elles étaient composéesde cavalerie et d’infanterie, les centurions commandaientles cavaliers comme les fantassins. C’est ainsi que deuxcenturions commandent deux cents fantassins et soixante-dixcavaliers. Act., xxiir, 23. De même Josèphe mentionneun centurion commandant un détachement de cinquantecavaliers. Bell. jud., III, iv, 2.
III. Bibliographie. — J. Marquardt, De l’organisation imilitaire chez les Romains (Manuel des antiquités romainesde Th. Mommsen et J. Marquardt, trad. franc., t. xi), Paris, 1891, p. 65-77; A. Millier, Die Rangordnungund das Avancement der Centurionen in der rômischenLégion, dans le Philologus, 1879, p. 126-149; Th. Mommsen, Nomina et gradus centurionum, dansYEphemeris epigraphica, t. iv (1879), p. 226-245; H. Karbe, De centurionibus romanorum qusestionesepigraphicse, dans les Dissert, philolog. Halenses, t. IV(1880), p. 387-434; E. Desjardins, Les centurions, dansles Mélanges Graux, 1884, p. 676-679; Gellens Wilford, Observations sur les prinxipiles, ibid., p. 683, 687; A. Bouché -Leclercq, Manuel des antiquités romaines, Paris, 1886, p. 327. E. Beurlier.
- CÉPHAS##
CÉPHAS (Krjçôéî, de l’araméen NS>3, kêfà’, qui
signifie «pierre» ). Surnom donné par Notre -Seigneur àSimon, prince des Apôtres, comme nous l’apprend saintJean, i, 42 (texte grec, 43): «Tu es Simon, fils de Jonas; tu seras appelé Céphas (ce qui est interprété: Pierre).» Ce nom de Céphas ne se lit sous cette forme araméennedans aucun autre évangéliste. Il est partout ailleurs, dansles quatre Évangiles, appelé «Pierre» (flÉ-rpo; ) ou «SimonPierre», «Simon surnommé Pierre.» Matin., iv, 18; x, 2, etc. Saint Matthieu, xvi, 18, nous explique pourquoi leSauveur changea le nom du chef de ses disciples, ennous rapportant ces paroles de Jésus: «Tu es Pierre, etsur cette pierre je bâtirai mon Église.» Voir Pierre. Danstout le reste du Nouveau Testament, saint Paul est le seulécrivain sacré qui désigne saint Pierre par le nom deCéphas. I Cor., i, 12; iii, 22; IX, 5; xv, 5; Gal., ii, 9.(Dans le texte reçu [grec et Vulgate], il le nomme Pierre, Gal., i, 18; ii, 8; [dans le grec seul, la Vulgate portantCéphas]; Gal., ii, 9, 11, 14. Les éditions critiques de Lachmann, de Tischendorf et d’Oscar de Gebhart, etc., substituentKviçâç au lléxpot du texlus receptus, Gal., i, 18; n, Il et 14.)
L’histoire de l’apôtre saint Pierre sera traitée à l’articlePierre; nous avons seulement à examiner ici s’il y a deuxCéphas ou un seul dans le Nouveau Testament. -^1o Uncertain nombre d’interprètes admettent que, dans l’Épîtreaux Galates, le Céphas dont parle saint Paul, ii, 11-14, n’est pas Simon Pierre, mais un disciple des Apôtres.Saint Jérôme mentionne déjà cette opinion pour la combattre.In Gal., ii, 11, t. xxvi, col. 340-341. Elle avait étésoutenue par Clément d’Alexandrie, d’après Eusèbe, H. E., i, 12, t. xx, col. 117. Le Pseudo-Dorothée lui donnade la consistance en écrivant dans son catalogue apocryphedes disciples de Jésus: «Céphas, surnommé Pierre, avecqui discuta saint Paul sur le judaïsme.» Migne, Patr.gr., t. xcii, col. 521. Ce Céphas occupe le troisième rangparmi les soixante-douze disciples. L’opinion de Clémentd’Alexandrie et du PseudoDorothée ne rencontra aucunpartisan jusqu’à la naissance du protestantisme. À partirde cette époque, plusieurs catholiques, afin de répondreaux arguments que les sectateurs de Luther voulaienttirer, contre l’autorité du Pape, de l’Épître aux Galates, distinguèrent Céphas l’apôtre et Céphas le disciple. Paul, disaient les protestants, «a résisté en face» à Pierre, «parce qu’il était îépréheusible,» Gal., ii, 11; par conséquent, concluaientils, le pape, successeur de Pierre, peut se tromper, et nous ne sommes pas tenus de luiobéir. — Cet exemple ne prouve rien, répondirent quelquesapologistes catholiques, parce que celui à qui saint Paulrésista était un homme sans importance, et non le chefde l’Église. — Le nombre des défenseurs de ce sentimenta augmenté de nos jours; on ne peut cependant historiquementle soutenir.
2o Le Céphas de l’Épître aux Galates est le chef desApôtres: 1o Parce que saint Paul, dans le texte originalde ses Épitres, appelle régulièrement de ce nom Simon
Pierre. (Un seul passage fait exception, Gal., ii, 7-8. Letextus receptus a substitué lli-zo; à Kr, ç5; dans les passagesen litige, Gal., ii, Il et 14, de même que i, 18; maisil faut lire «Céphas», comme le portent les éditions critiques, et comme nous le lisons dans la Vulgate, Gal., ii, Il et 14.) Puisque saint Paul appelle le chef de l’ÉgliseCéphas, il ne peut désigner que lui, dans le passage oùil raconte le conflit d’Antioche, puisqu’il n’ajoute aucunmot pour distinguer le Céphas dont il parle de celui qu’ila nommé un peu plus haut, Gal., i, 18; ii, 9, et qui estcertainement saint Pierre. — 2o L’importance que l’auteurde l’Épître aux Galates attache à cet épisode montreque le Céphas à qui il a résisté était un personnage degrande autorité; car, s’il s’était agi d’un simple disciple, il n’aurait pas cité sa résistance comme un acte de courage.— La discussion des deux Apôtres, loin de fournirune preuve contre la primauté de saint Pierre, est, aucontraire, un argument en faveur du pouvoir qui estreconnu par le fait même à saint Pierre: c’est un inférieurqui fait des remontrances à un supérieur. — La questionqui est en jeu n’est pas d’ailleurs une question dedoctrine, où l’infaillibilité du Souverain Pontife soit intéressée; le débat portait seulement sur la conduite à tenirà propos des observances mosaïques. Le chef des Apôtres, en arrivant à Antioche, y avait vécu avec les chrétiensincirconcis, contrairement aux usages judaïques. Desjudéo-chrétiens de Palestine étant survenus, saint Pierre, pour ne pas les offenser, cessa ses rapports avec les Gentilsconvertis et observa de nouveau les rites légaux. Ilen avait incontestablement le droit; aucun point de foin’était en cause; mais saint Paul jugea qu’il n’avait paspris le parti le meilleur et, sans méconnaître en aucunefaçon son autorité, il lui reprocha son changement deconduite, parce qu’il pouvait par là induire à penser queles cérémonies légales demeuraient obligatoires pour lesJuifs et n’étaient pas simplement facultatives. L’Apôtre desGentils voulut prévenir le mal qu’il prévoyait. L’influencequ’il attribue à la conduite de Céphas montre bien quece n’était pas un disciple inconnu, mais un personnagedont l’exemple faisait loi. Le chef de l’Église reconnut lajustesse de la réclamation de saint Paul, et ainsi fut terminéle conflit. — 3o C’est là l’interprétation à peu prèsunanime de la tradition jusqu’au xvie siècle. Tous lesPères, à l’exception de Clément d’Alexandrie et du Pseudo-Dorothée, ont admis l’identité de Céphas et de saintPierre. Il y eut, au sujet de ce passage de l’Épître auxGalates, une discussion célèbre entre saint Augustin etsaint Jérôme; mais elle porta sur l’explication du fait, non sur le personnage même de Céphas, qui, de l’aveudes deux illustres docteurs, est le chef des Apôtres. Lesscolastiques admirent tous aussi, sans exception, l’identitéde saint Pierre et du Céphas de l’Épître aux Galates! Suareztraite «d’expédient frivole» (frivola evasio), De leg., 1. ix, c. xv, n° 7, la distinction entre les deux Céphasimaginée pour éluder les difficultés que les hérétiquesont essayé de tirer du conflit d’Antioche. — Les principauxtémoignages de la tradition relatifs à la question sontcités dans F. Vigouroux, Les Livres Saints et la critiquerationaliste, 4e édit., t. v, p. 456-476. Voir aussi Calmet, Dissertation où l’on examine si Céphas repris par saintPaul à Antioche est le même que saint Pierre, dans sonCommentaire littéral, Épîtres de saint Paul, t. ii, 1716, p. v-xxv; Pesch, Ueber die Person des Kephas, dansla Zeilschrift fur katholische Théologie, t. vii, 1883, p. 456-490. — Pour la distinction des deux Céphas, voir A. F. James, Dissertation où il est irréfragablementprouvé que Céphas, repris par saint Paul, n’est pasle même que le prince des Apôtres, Paris, 1846; Th. H.Mande! , Kephas der Evangelist, in-8o, Leipzig, 1889.
F. Vigourolx.
CEPHIRA. Nom, dans la Vulgate, I Esdr., ii, 25; II Esdr., vii, 29, de la ville appelée Caphira, Jos. ix, 17, et Caphara, Jos., xviii, 26. Voir Caphara.
CEPS (hébreu: sad, Job, un, 27; xxxiii, 11, mahepëkét, Jer., xx, 2, 3; xxix, 26; II Par., xvi, 10; maitêmâh, Osée, ix, 7, 8; Septante: £û).ov, xw), j|jia; Vulgate: lignuni, nervus). Les ceps sont un instrumentde supplice composé d’au moins deux morceaux debois échancrés de telle sorte, qu’en les réunissant onpeut enfermer et fixer dans une position extrêmementgênante les membres d’un prisonnier. Cet instrumentétait en bois, d’où son nom de EJÀov en grec et delignuni en latin. Le mot «ceps» vient lui-même decippus, «palissade» formée de gros morceaux de bois.En chaldéen, l’instrument se nomme kiftâh, de kâfaf, «courber,» de même qu’en grec on l’appelle aussi
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138. — Supplice des ceps.
x-jçwv, de xOjitw, «courber,» à cause de là positiontoute contournée que les ceps indigent au patient (fig. 138).Chez les anciens, le ÇoXov était tantôt le carcan, analogueà la cangue chinoise, qui retenait le cou (Aristophane, Nubes, 592), et s’appelait aussi xiîcpwv (Aristophane, Plutus, 476, 606; Aristote, Politic, 5, 6, 15); tantôt la double pièce de bois qui enserrait les pieds(Hérodote, vi, 75; Aristophane, Equit., 367, 394, 705); tantôt enfin la machine à cinq trous pour fixer à la foisle cou, les mains et les pieds. Aristophane, Equit., 1049.Ainsi assujetti par l’instrument que retenaient verticalementde solides montants, le malheureux ne pouvait quese coucher ou s’asseoir dans la plus effroyableposition.Les ceps n’apparaissent que tardivement chez les. Israélites. L’auteur de Job est le premier à les mentionner, mais il n’en parle qu’au figuré. Il est seul d’ailleursà se servir du mot sad. Par deux fois, , Tob, xiii, 27: xxxm, 11, dit au Seigneur:
Mes pieds sont enclavés dans les ceps, Tu te rends maître de tous mes pas.
Par la maladie dont il est frappé, comme du reste par leseul effet de la condition humaine, Job est aux mains deDieu comme un prisonnier retenu par les ceps. — À l’époquedu roi Asa, ’il existait à Jérusalem une bêt hammahepékét, une «maison des ceps», une prison où cettetorture était inlligée. Ce prince y soumit le prophèteHanani. II Par., xvi, 10. — Osée, ix, 7, 8, parle deux foisde maitêmâh. Le sens de ce mot reste discutable. Beaucouple traduisent par «haine» ou «ruine». Gesenius, Thésaurus, p. 1327, le rattache à la racine iâtam, «dresserdes embûches,» en syriaque: «mettre des entraves,» etil y voit le nom d’un appareil destiné à retenir les pieds.Dans les deux versets consécutifs d’Osée, le parallélismesemble autoriser à prendre le mot d’abord dans le sensde «haine», et ensuite dans celui de «ceps». Il y auraitclans ce passage un jeu de mots comme on en trouve detemps en temps chez les écrivains hébreux. Osée dit donc: O Israël, prends garde, «à cause de la grandeur de toniniquité, et parce que grande est la haine» que Dieu teporte ou que tu portes à tes frères. Puis il ajoute: Lefaux prophète est «un filet tendu sur tous les chemins, et un maitêmâh (des ceps) dans la maison de Dieu»,
c’est-à-dire il est une cause de ruine pour ceux qui l’écoutent.Les versions traduisent le mot par (j.avîa, anierctia, insania «folie». — Jérémie, xx, 2, 3, est mis dansles ceps par Phassur, un des intendants du temple. Plustard, il dit à Séméias que le Seigneur l’a établi pontifepour mettre les faux prophètes «dans les ceps et dans leschaînes». Jer., xxix (Septante: xxxvi), 20. Dans ces passages, les Septante traduisent mahepékét. par xaxappâxTT, ç, «égout» ou prison souterraine, et Symmaque, avec plusd’exactitude, par pacravLo-r^piov et arptêXiarripim, «machineà torturer.» — Enfin, à Philippes, saint Paul etSilas sont mis en prison et leurs pieds sont serrés dansles ceps, le Çû), ov. Act., xvi, 24. Dans tous ces passagesbibliques, il n’est formellement question que de cepsentravant les pieds. Les engins de torture enserrant lesquatre membres et le cou ne paraissent jamais avoir été
en usage parmi les Israélites.
H. Lesêtre.
- CÉRASTE##
CÉRASTE (hébreu: sefîfôn; Vulgate: cérastes. LesSeptante traduisent d’après le samaritain: «celui qui setient en embuscade.» Dans les Targums: le basilic). Lecéraste est un ophidien de la famille des vipéridés, lecérastes hasselquistii ou vipera cérastes des naturalistes, le siffon des Arabes. Son nom hébreu signifie probable-.ment «celui qui rampe», d’après le syriaque. Il n’estparlé du céraste que dans la prophétie de Jacob, quicaractérise Dan par ces paroles: «Que Dan soit un nâhâis(serpent) sur le chemin, un sefifôn sur le sentier, quimord les talons du cheval, et le cavalier tombe en arrière.» Gen., xlix, 17. Ces paroles supposent que les mœursdu céraste étaient parfaitement connues du patriarche.Le nom de céraste ou «serpent à cornes» a été donné à cereptile parce que chacune de ses paupières est surmontéed’une petite corne pointue (fig. 139). Il a de trenteà cinquante centimètres de longueur, est de la mêmecouleur que le sable, quelquefois brun pale ou noirâtre, avec des taches irrégulières. Il se trouve fréquemmentdans les déserts du nord de l’Afrique et dans l’Arabie
1-iJ — Le céraste
Pétrée. Son venin est tellement dangereux, qu’il peut fairepérir un homme en une demi-heure. On le regarde commeplus redoutable que le cobra. Voir Aspic. Le céraste senourrit habituellement de gerboises; mais il s’attaque àtoutes sortes d’animaux. Il se cache au fond des creuxque laissent dans le sable les pieds des chameaux, parconséquent sur la route même des caravanes, comme lesuppose le texte sacré. Il se dissimule dans le sable, nefaisant dépasser que ses petites cornes, continuellementen mouvement pour attirer certaines proies sur lesquellesil se jette inopinément. Le céraste se meut avec une agilitéextrême, et non seulement en ligne droite, comme lesautres serpenls, mais dans toutes les directions, en avant, en arrière et de côté. Elien, Hist. animal., xv, 13; Bochart, Hierozoicon, Leyde, 1792, t. iii, p. 416-420. Il est doncà même de se jeter facilement sur tout ce qui approchede son embuscade. Il inspire une grande frayeur auxchevaux. «J’ai vu le mien, pendant un voyage dans leSahara, écrit Tristram, tressaillir subitement, se cabrer, tremblant et transpirant de tous ses membres, sans que
rien pût le décider à avancer. J’étais tout à fait hors d’étatde nï expliquer cette terreur, jusqu’à ce que je m’aperçusqu’un céraste était caché dans un trou, à deux ou troispas en avant, avec ses yeux de basilic fixement dardéssur nous. Sans nul doute il se préparait à sauter quandle cheval passerait.» The natural history of the Bible, Londres, 1889, p. 274. On comprend qu’une fois mordule cheval désarçonne subitement son cavalier, et que celui-cidevienne à son tour la victime du venimeux reptile.
— La comparaison employée par Jacob, à propos de Dan, a été amplement justifiée par l’expédition des Danitescontre Laïs, Jud., xviii, ’27-’29, et surtout par les exploitsde Samson, qui appartenait à cette tribu. Jud., xiir, 2.
H. Lesêtre.
- CERCUEIL##
CERCUEIL, caisse ouverte ou fermée dont on se
les coucher sans cercueil, sur une natte imprégnée debitume, dans un tombeau plus ou moins rudimen taire.Mais assez souvent ce tombeau n’était lui-même autrechose qu’un véritable cercueil de terre cuite, soit unsimple pot dans lequel on accroupissait le cadavre, soitun assemblage de deux énormes jarres cylindriques danslesquelles on retendait. On lutait ensuite au bitume lesdeux parties du vase, et ordinairement on le perçait d’unpetit trou à l’une des extrémités, pour faciliter l’échappementdes gaz (fig. 143). Maspero, Histoire anciennedes peuples de l’Orient, Taris, 1893, t. i, p. 686. Lespatriarches suivirent les coutumes de leur pays d’origine; mais, passant d’une contrée humide à une contréerocheuse où abondaient les excavations, ils durent abandonnerl’usage d’ensevelir leurs morts dans des jarres, et
HO. — Égyptien défunt transporté dans un cercueil. D’après la Description de l’Egypte, Antiquités, t. i, pi. 70.
servait pour porter un mort (fig. 140) et le déposer dansson tombeau (fig. 141 et 142). La langue hébraïque nepossède pas de mot spécial pour désigner le cercueil;
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141. — Cercueil athénien fermé.
D’après Guhl et Koner, Lebcn der Griechen imd Romcr,
Berlin, 1893, fig. 218.
elle emploie en ce sens les mots’àrôn, «arche;» miskàbet mittàh, «lit;» Septante: copéî, x).£vi, j Yulgate: loculus, feretrum..
142. — Cercueil athénien ouvert.D’après Guhl et Koner, Leben der Griechen und Rbmer, fig. 219.
1° À l’époque patriarcale. — Les Chaldéens se contentaientd’habiller et de parfumer leurs morts et ensuite de
se contentèrent de les coucher sans cercueil dans les caverneschoisies pour servir de sépulcres. En parlant de lasépulture de Sara, d’Abraham, de Rachel et d’Isaac, laGenèse, xxiii, 19; xxv, 10; xxxv, 19, 29, ne fait aucunemention de cercueils. — Jacob mourut en Egypte, futembaumé à la manière du pays et ensuite transportédans la terre de Chanaan pour être enseveli dans la cavernede Makpélah. Gen., L, 1-13. À son tour, Josephmourut, fut embaumé et enfermé dans un cercueil, ’àrôn, en attendant le jour où les Hébreux pourraient le transporteren Chanaan. Gen., L, 25. En Egypte, les corps desgrands personnages étaient placés, après l’embaumement,
143. — Cercueil de terre cuite.D’après Taylor, Notes on the ruins of Abu-Shahrein and Tel clLahm, dans le Journal of the Royal Asiatic Society, t. xv, p. 414.
quelquefois dans un sarcophage en pierre, plus souventdans un coffre en bois qui tantôt reproduisait extérieurementla forme générale du corps (fig. 144), tantôt avaitla forme d’une caisse oblongue (fig. 145). Le bois employéà cet usage était ordinairement le sycomore, parfoisle cèdre, comme on le voit par les débris du cercueil deMykerinos, conservé au Musée britannique. Maspero, Histoire ancienne, t. i, p. 376. Trois ou quatre de cescercueils étaient souvent emboîtés l’un dans l’autre etornés de sujets religieux On les dressait debout le long.do la muraille des hypogées destinés à la sépulture communede plusieurs défunts. Le cercueil de Joseph, commecelui de son. père, fut un’àrôn, une caisse quadrangulaireet assez élevée, comme celles qu’on trouve repré
sentées sur les monuments figurés. Du reste, le mothébreu employé pour désigner cet objet est caractéristique; c’est le même que celui qui sert pour l’arched’alliance. Le cercueil égyptien de Joseph était donc un
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144. — Cercueil égyptien reproduisant la (orme du corps.
Thèbes. D’après Champollion, Monuments de l’Egypte et de la
Nubie, t. ii, pi. 178.
coffre, naturellement fort orné. Malgré sa richesse, il
dut être assez portatif pour que les Hébreux pussent
l’emmener avec eux dans leur fuite et à travers le désert.
2° À l’époque royale. — David suit le cercueil d’Abner.
Des bâtons servaient à le porter sur les épaules, ce quiconstituait un véritable brancard. La Bible emploie troisfois le mot miskâb, «lit, couche» en général, pour désignerle lit d’apparat sur lequel reposait le mort, et donton se servait pour le transporter au tombeau. II Par., xvi, 14; Is., lvii, 2; Ezech., xxxii, 25. MiSkâb est donc, ou à peu prèSj un synonyme de mitlâh. Gesenius, Thésaurus, p. 878, 1403.
3° À l’époque évangélique. — Le fils de la veuve deNuïin est porté dans un <yjp 6; , Luc, vii, 14, cercueil sanscouvercle dans lequel est étendu le cadavre. Au commandementdu Sauveur, le mort se met aussitôt sur son séant.Il était donc couché, mais non enfermé. Le cercueil neservait vraisemblablement pas à l’usage exclusif d’un seuldéfunt. On en retirait le cadavre enveloppé de bandelettespour le placer dans son tombeau, et on remportait lecercueil ou brancard commun aux habitants d’un mêmevillage. — Il n’est pas question de cercueil dans le tombeaude Lazare. — Pour la sépulture de Notre -Seigneur, on ne s’en sert certainement pas et l’on ne se préoccupenullement de s’en procurer un. — Le tragique épisoded’Ananie et de Saphire, Act., v, 6, 10, montre qu’à Jérusalemon pouvait enterrer des morts sans cercueil. Toutau plus enfermait-on dans une bière les corps qu’on inhumaithors d’un monument, dans le sol même. Maisl’usage de la bière était assez rare, et l’on était obligé deprotéger les tombes avec des pierres ou des épines, pourempêcher les chacals et les hyènes de venir déterrer lescadavres afin de les dévorer. Les corps enfermés dansun cercueil solide eussent été habituellement à l’abri destentatives de ces animaux. — Les grands personnagesétaient enterrés dans des sarcophages en pierre, décorésd’ornements géométriques ou végétaux. On en a retrouvéquelques-uns dans les environs de Jérusalem, entreautres dans le tombeau connu sous le nom de tombeaudes rois. Quelques-uns d’entre eux sont maintenant conservésau Louvre (fig. 146). Cf. F. de Saulcy, Voyage autourde la mer Morte, 2 in-8° Paris, 1853, t. ii, p. 219281; Id., Histoire de l’art judaïque, in-8°, Paris, 1858, p. 255-201. — Aujourd’hui, en Palestine, le corps du dé145.
Cercueil du roi Amenhotep I". Musée de Ghizéh. D’après les Mémoires de la mission archéologique du Caire, t. i, Momies royales, pi. iv B.
II Reg., iii, 31. Ce cercueil est appelé mitlâh, mot quisignifie «lit», et par extension «bière» pour transporterun mort; il n’est employé en ce sens qu’en ce seulendroit de la Bible. Ce cercueil n’était pas une caissefermée, mais bien plus probablement une sorte de coffreouvert, dans lequel le mort reposait comme dans un lit.
funt, enveloppé dans un linceul, est porté dans un cercueilouvert qui n’est autre chose qu’une civière debois. Trois ou quatre amis du mort la chargent sur leursépaules. La civière est recouverte de plusieurs châles decachemire et terminée à l’avant par un poteau auquelon attache différents objets ayant appartenu au défunt.
437
CERCUEIL — CÉRÉMONIES
438
Quand le cortège est arrivé à la tombe, on extrait le corpsde la civière et on l’enterre. Jusqu’à ces derniers temps, les morts étaient souvent enterrés sans bière. Stapfer, La Palestine au temps de Jésus-Christ, 3e édit., Paris, 1885, p. 161; Liévin, Guide de la Terre Sainte, 3e édit., Jérusalem, 1887, t. i, p. 69; Chauvet et Isambert, Syrie, Palestine, Paris, 1890, p. 167, 168; E. Feydeau, Histoiredes usages funèbres et des sépultures des peuples anmots plus précis: ’âbodàh, de’âbàd, «servir,» le servicede Dieu, le culte; Septante: ), a-peîa; Vulgate: cultus, ministerium, officium; Num., iii, 7, 8; iv, 23-24; xvi, 9, etc., et surtout mismârôt, de sârnar, «observer,» les observances, les prescriptions positives concernantl’honneur à rendre à Dieu. Gen., xxvi, 5; Num., i, 53; Lev., xviii, 30; Deut., xi, 1; Jos., xxii, 3; Zach., iii, 7; Mal., iii, 14, etc. Les versions traduisent ce
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146. — Sarcophage juif. Musée Judaïque du Louvre.
ciens, 2 in-4°, Paris, 1856-1858, t. i, p. 102, 459; t. ii,
p. 53.
H. Lesêtre.
- CÉRÉALES##
CÉRÉALES, plantes de la famille des graminées, dont les grains farineux servent à la nourriture del’homme sous forme de pain, de gâteaux, etc. Ce termes’emploie aussi pour les grains eux-mêmes. Parmi lescéréales, la Sainte Écriture ne mentionne que le fromentou blé, l’épeautre, l’orge, le millet et peut-être lesorgho ou doura. Quant au seigle et à l’avoine, la Palestinecomme l’Egypte ne les a pas connus. Le termegénéral pour les céréales et les grains est dâgân (collectif, employé trente-six fois). Le mot bâr, grain séparéde la paille, convient à l’orge et à l’épeautre aussi bienqu’au blé, quoiqu’il désigne plus spécialement ce dernier.Cf. t. i, col. 1814. Les deux céréales mentionnéesle plus fréquemment sont le blé et l’orge: la Palestineest appelée la terre du blé et de l’orge. Deut., viii, 8.Voir Blé, Épeautre, Orge, Millet, Sorgho.
E. Levesque.
- CÉRÉMONIES##
CÉRÉMONIES, actes extérieurs prescrits par la loipour le culte du Seigneur.
I. Leur nom. — La loi mosaïque comprenait deuxsortes de prescriptions religieuses: les lois morales, naturellesou positives, et les lois rituelles. Ces dernièresavaient pour objet le culte extérieur de Dieu. Très souventles auteurs sacrés, surtout dans le Pentateuque, parlent de ces différentes lois en les désignant par desnoms dont le sens est à peu près identique, noms quel’auteur du Ps. cxviii s’est plu à répéter, au nombre dedix, dans les cent soixante-seize versets de son cantique.Les plus usités sont les suivants: huqqîm, de hâqaq, «décréter;» mispâtîm, de sdfat, «décider;» saddiqim, de sàdaq, «être droit;» ’êdût, de’ûd, «témoigner.» Quand deux ou plusieurs de ces noms se suivent, l’und’eux se rapporte ordinairement aux lois rituelles, et lesversions le traduisent, les Septante par des termes généraux, S! xaiû^.xTX, xpî|iaTX, [jiaprjpca, irpoiTTaYjjLaTa, vofit^a, x, t. X., et la Vulgate ordinairement, dans les livres historiqueset dans Ézéchiel, par cseremoniss. Quelquefoiscependant les écrivains hébreux emploient deux autres
mot par l’un ou l’autre des termes cités précédemment, et quelquefois trop littéralement par ç'j>ax7], custodia, excubise, termes qui désignent la «garde» perpétuelle, leservice de jour et de nuit auprès du. sanctuaire.
IL Leur nécessité..— 1° En général, les cérémoniesextérieures sont le complément nécessaire de la religion.L’homme est à la fois âme et corps; de plus il vit aumilieu de ses semblables. Il est donc nécessaire que, parla pratique de rites extérieurs, il associe son corps auculte de Dieu et en même temps s’unisse d’une manièresensible à ses frères, avec lesquels il partage solidairementle devoir social d’honorer Dieu publiquement. —2° Les cérémonies extérieures servent à la fois à exprimeret à entretenir le sentiment intérieur de la religion. —3° Pour les Hébreux en particulier, il fallait des cérémoniespompeuses et expressives, capables de frapper leuresprit grossier, et de rivaliser avantageusement avec lesmagnificences des cultes étrangers. L’incident du veaud’or, Exod., xxxii, 1-6, montre avec quelle facilité ils seseraient portés aux cérémonies idolâtriques dont ils avaientété témoins en Egypte, si on ne leur eût imposé uneliturgie qui pût saisir leurs sens et leur esprit. Pendantla captivité, le souvenir des magnificences du temple contribuaà les préserver des séductions du culte babylonien.Ps. cxxxvi, 1-6.
III. Leurs différentes espèces. — Les prescriptionsrelatives aux cérémonies sont consignées dans les quatrederniers livres du Pentateuque. Elles concernent: 1° lespersonnes: le grand prêtre, Exod., xxviii, 1-xxxix, 36; les prêtres, Lev., xxi, 1-24; Num., iv, 1-49, et leur consécration, Num., viii, 5-26; les nazirs ou «nazaréens» et leur consécration, Num., vi, 1-21; — 2° les choses.~l’autel, Exod., xx, 24-26; Deut., xxvii, 1-7; le tabernacleet son mobilier, Exod., xxv, 8-xxvii, 21; xxx, 1-38; — 3° les actes sacrés: les sacrifices, Exod., xxix, 37-46; Lev., i, 1-17; iii, 1-vn, 38; xiv, 1-33; xvii, 1-16; xxil, 18-33; Num., xxviii, 1-xxix, 39; Deut., xii, 13-27; les offrandes, Lev., ii, 1-16; xxiv, 1-9; lesdîmes et les prémices, Exod., xiii, 2; xxv, 2-7; Num., xviii, ’8-32; Deut., xii, 6, 7; xxvi, 1-19; les purifications, Num., xix, 1-22; les bénédictions, Num., vi,
22-27; — 4° les institutions: les fêtes en généra], Lev., xxiii, 1-44; Deut., xvi, 1-17; la Pàque, Exod., xii, 1-28; Num., ix, 1-14; la fête des Expiations. Lev., xvi, 1-34.Toutes les prescriptions qui précèdent sont d’originemosaïque. Cependant le sacrifice lui-même date de l’originemême de l’humanité, Gen., iv, 4, et la circoncisionest un autre rit d’institution positive qui remonte àl’époque d’Abraham. Gen., xvii, 10. Pour le détail detoutes ces cérémonies, voir les articles consacrés à chaquemot.
IV. Leur caractère obligatoire. — 1° Les lois cérémoniellessont placées, au point de vue de l’obligation, au même rang que les lois morales. Elles rentrent, aussibien que ces dernières, dans la tôràh, la «loi» en général.C’est ce qui ressort de l’usage que les écrivains sacrésfont des mêmes termes pour désigner les différentes partiesde la Loi. Outre les recommandations générales qu’onrencontre d’un bout à l’autre des Écritures sur l’obéissanceà la Loi, certains passages visent particulièrement la partiecérémonielle. Elle est obligatoire. Exod., xii, 25; Num., xviii, 4; Deut., vi, 17; viii, 11; xi, 1, 32; 1Il Reg., ii, 3; vin, 58. Ceux qui l’observent plaisent à Dieu, Lev., x, 19, et attirent sa bénédiction. Deut., x, 13; xxvi, 17-19. —Celui qui transgresse, par simple inadvertance, les prescriptionsconcernant les rites sacrés, doit expier son délitpar l’offrande d’un bélier. Lev., v, 15. — Pour avoir oséexercer une fonction sacerdotale, Saül est rejeté par leSeigneur. I Reg., xiii, 9-14. — Oza est frappé de mortpour avoir seulement touché l’arche d’alliance. Il Reg., vi, 6, 7. — Il est à remarquer que les prescriptions liturgiquessemblent placées intentionnellement par Moïse surle même rang que les prescriptions morales. Il ne s’ensuitnullement qu’elles soient de môme valeur, et nultexte ne donne à supposer, même de loin, que les observancescérémonielles puissent tenir lieu de vertus morales.Seulement Moïse s’adresse à un peuple sensuel etgrossier, auquel il doit rendre pratique l’ordre formulépar le Seigneur: «Soyez saints, parce que je suis saint.» Lev., xix, 2. Les Hébreux n’auraient presque rien comprisà l’idée de la sainteté de Dieu et au commandementde pureté morale qui en était pour eux la conséquence, si des prescriptions sensibles n’avaient été jointes auxenseignements du dogme et du décalogue. Les lois cérémoniellescontribuaient puissamment à assouplir leursvolontés, et à pénétrer leur esprit du sentiment très vifdo la majesté divine. — 2° Le caractère obligatoire de laloi cérémonielle cessa au moment de l’abolition du eultemosaïque. Saint Paul, en particulier, revient à plusieursreprises sur ce point, et prouve que la loi cérémonielle aperdu toute valeur et toute raison d’être, à dater de l’avènementde la loi évangélique. Rom., ii, 1-29; Gal., IV, 1-11. Voir Loi MOSAÏQUE.
V. Leur excellence. — «La Loi n’a rien mené à laperfection,» dit saint Paul. Hebr., vii, 19. Il ne faut doncpas s’attendre à trouver dans les cérémonies de l’ancienculte la même excellence que dans celles du nouveau. Iln’en est pas moins vrai qu’elles portent le cachet de l’institutiondivine. — 1° Au point de vue de la raison, elles neprésentent rien qui puisse l’offenser. Alors que les cultespaïens sont irrationnels, formalistes, basés sur cette idéeque le rite extérieur est par lui-même efficace, les cérémoniesmosaïques, même dans les plus minutieuses observances, ne s’écartent jamais de ce principe: honorer Dieupar des rites qui soient à la fois praticables et profitablesaux hommes d’une race, d’une contrée et d’une époquedonnées. Sans doute, les Hébreux, comme tous leurs voisins, avaient une grande propension à interpréter les loiscérémonielles dans le sens d’un ritualisme étroit. LesPharisiens donneront dans ce grossier travers et attribuerontà l’acte matériel plus d’importance qu’à l’acte moral.
. Matth., xxiii, 23-31. Moïse a posé des principes qui vont àrencontre de ces interprétations serviles. Il impose desrites, non pas à cause de leur efficacité propre, qui est
nulle, mais parce que telle est la volonté de Dieu. Les loisrituelles, tout comme les lois morales, en ce que celles-ciont de positif, découlent de ce fait rappelé à chaque pagede la Loi: «Je suis Jéhovah votre Dieu, s La raison d’êtredes cérémonies mosaïques ne vient donc ni de leur valeurintrinsèque ni de leur symbolisme, mais seulement de lavolonté de Dieu qui les prescrit. C’est le grand principeque formulera Samuel, I Reg., xv, 22, et que le Sauveurdaignera répéter: «L’obéissance vaut mieux que les victimes.» Matth., ix, 13; xii, 7. — 2° Au point de vue dela conscience, la pureté du rituel mosaïque est irréprochable.Il exclut les débauches, les obscénités et les puérilitésqui souillaient les cultes païens dans le mondeentier. Aussi dépasse-t-il de très haut ce qu’il y a de plusvanté dans les cérémonies du paganisme. Au lieu d’asservirles intelligences par de honteuses superstitions, iltend à les élever à une idée de plus en plus pure de lasainteté divine et du devoir moral qui en est la conséquence.C’est la pensée de cette excellence qui inspire àMoïse ce cri d’enthousiasme: «Quelle nation est assezgrande pour avoir des dieux qui approchent d’elle commele fait Jéhovah notre Dieu à tous nos appels? Quellenation est assez grande pour avoir des lois (huqqlm), des préceptes (miSpâtim), des règles (saddiqim = descérémonies) comme toute cette législation que je placesous vos yeux aujourd’hui?» Deut., iv, 7, 8.
VI. Leur signification. — Les cérémonies de l’ancienneloi avaient un double but: pourvoir au culte deDieu dans le présent et préparer le culte parfait del’avenir. Leur valeur était donc à la fois réelle et figurative.
1° Leur valeur réelle. — 1° Ces cérémonies servaienttout d’abord à faire rendre à Dieu le culte qui lui est dû.Exod., xviii, 19-20. Les unes inculquaient dans l’esprit desHébreux l’idée de la majesté divine, de la puissance, dela sainteté de Dieu; les autres rappelaient ses bienfaits.
— 2° Elles contribuaient à exciter dans les âmes les sentimentsreligieux qui conviennent au culte de Dieu. Voilàpourquoi les institutions liturgiques de l’ancienne loiétaient combinées de manière à frapper vivement les senset l’imagination, et à faire naître dans les cœurs les sentimentsd’adoration, de crainte, de reconnaissance, etc.Ces dispositions n’étaient pas produites ex opère operato, comme les effets qui résultent de la réception des sacrementsde la loi nouvelle; mais elles étaient excitées etdéveloppées, non sans un certain concours de grâce. —3° Elles détournaient les Hébreux des cérémonies païennesauxquelles se livraient les peuples voisins. Moïse le donneclairement à penser. Deut., xii, 29-31. De là vient queles cérémonies des Hébreux ont la plupart du temps uncaractère diamétralement opposé à celui des cultes païens.Tacite, Hist., v, 4, était frappé de cette opposition. «Moïse, dit-il, pour se rendre à jamais le maître de sa nation, leurimposa de nouveaux rites contraires à ceux des autresmortels. Là on tient pour profane tout ce qui est sacréchez nous; par contre, on permet chez eux ce que nousavons en abomination.» L’historien raille ensuite les pratiquesdu culte juif, les sacrifices, les abstinences, lesabbat, etc. Tous ces rites extérieurs ont contribué puissammentà séparer les Israélites des autres peuples, concurremmentdu reste avec leur dogme et leur morale.
2° Leur valeur figurative. — Saint Paul dit que lesobservances juives étaient «une ombre des choses à venir».Col., ii, 17. Sans doute il serait puéril de vouloir chercherun sens symbolique à tous les détails du cérémonial mosaïque.Certaines pratiques peuvent être soit une accommodationà l’esprit du temps et de la nation, soit uneimitation de certains rites étrangers auxquels le prophète, inspiré de Dieu, attachait un sens plus pur et plus sublime.Mais il est contraire aux paroles de saint Paul de prétendreque le sens symbolique n’existe que là où Moïse l’a clairementindiqué lui-même, comme l’affirme Munk, Palestine, Paris, 1881, p. 152-154, et à plus forte raison de
soutenir qu’en toutes ces prescriptions rituelles, Moïse n’aguère été qu’un simple imitateur, comme l’a prétenduSpencer, De legibus Hebrœorum ritualibus et eorumralionibus, 1. III, Cambridge, 1685. On a souvent tentéd’établir le caractère symbolique des cultes païens. Cettethèse est soutenable dans certaines limites; mais on doitavouer que «le culte mosaïque serait au-dessous et nonpas au-dessus de tous les cultes païens, si seul il faisaitune exception et si les hommages qu’on y rend à la divinitén’étaient autre chose qu’une pompe extérieure, unaliment pour les sens grossiers du vulgaire, un plaisirdes yeux. Bien au contraire, nous avons dans le mosaïsmeun motif de plus qui nous oblige à attribuer uncaractère figuré à la forme matérielle de son culte…Ainsi donc, de ce que l’objet du culte mosaïque estun Dieu immatériel, invisible, spirituel, il suit que laforme matérielle de ce culte ne saurait être en elle-mêmeun but, mais seulement l’image et la représentationd’un rapport spirituel». Bàhr, Symbolik desmosaischen Cullus, Heidelberg, 1837, t. i, p. 13-14.Observons toutefois que le symbole ne porte pas seulementsur les réalités invisibles de l’Ancien Testament; le culte extérieur de l’ancienne loi est encore figuratifde la vérité future qui sera manifestée dans la patriecéleste, et aussi du Christ, qui est la voie par laquelle onatteint cette vérité de la patrie. S. Thomas, Summ. theol., l a II*, q. 101, a. 2. — Sous le sens symbolique de chaquecérémonie, voir les articles particuliers. Sur l’ensemblede la question, S. Thomas, Summ. theol., I a 11*, q. 101103; C. Chr. W. F. Bâhr, Symbolik des mosaischenQuitus, zweite umgearbeitete Auflage, t. i, in-8°, Heidelberg, 1874; Munk, Palestine, p. 150-154; H. Zschokke, Historia sacra, Vienne, 1888, p. 103; de Broglie, Conférencessur l’idée de Dieu dans l’Ancien Testament, Paris, 1892, 6 8 conf, Les lois cérémonielles de Moïse,
p. 197-223.
H. Lesêtre.
- CÉRÉTHÉENS##
CÉRÉTHÉENS, CÉRÉTHIENS (hébreu: hak-Kerëtï, au singulier avec l’article, I Reg., xxx, 14;
II Reg., viii, 18; xv, 18; xx, 7; III Reg., i, 38, 44; I Par., xvin, 17; hak-Kârî, IV Reg., xi, 19; hak-Kerêi, au ketibde II Reg., xx, 23; au pluriel, Kerêtim, Ezech., xxv, 16; Soph., ii, 5; Septante: à Xepeôî, II Reg., xx, 7, 23;
III Reg., i, 38, 44; I Par., xviii, 17; à Xzliïi, I Reg., xxx, 14; II Reg., .vin, 18; xv, 18; 5 Xoppi, IV Reg., xi, 19; Kpyjrai, Ezech., xxv, 16; Soph., Il, 5; Vulgate: Cerethi, I Reg., xxx, 14; II Reg., viii, 18; xv, 18; xx, 7; III Reg., i, 38, 44; IV Reg., xi, 19; I Par., xviii, 17; Cerethssi, II Reg., xx, 23; interfectores, Ezech., xxv, 16; perditi, Soph., ii, 5), nom d’un district ou d’une tribudes Philistins et d’une partie des gardes du corps deDavid:
1° Le négéb hak-Kerêfi, le «sud du Céréthien», t Reg., xxx, 14, indique la contrée sud-ouest de la TerreSainte ou le pays des Philistins; aussi croit-on généralementque le mot qui nous occupe désigne une tribu dece dernier peuple. Le pluriel Kerêtim, qu’on trouve dansdeux passages prophétiques, semble confirmer cette opinion, malgré les difficultés du texte. On lit dans Ézéchiel, xxv, 16:
J’étendrai ma main sur les Philistins, Et je tuerai les Kerêtim.
Il y a dans l’hébreu une paronomase, hikrafi éf-Kerêtîm, que saint Jérôme a essayé de rendre, dans la Vulgate, par interficiam interfectores, «je tuerai ceux qui tuent.» Le saint docteur a donc vu ici un participe de kàrat, «couper, détruire, exterminer,» caractérisant la cruautéde la nation contre laquelle est dirigée la prophétie. À part jSymmaque, qui traduit par JXeSpfou; , les versions anjciennes ou reproduisent le mot original: Aquila, XspeQjQ’.sîv; Théodotion, Kap’.6î: fi, ou donnent un nom propre: .Septante, Kpr.-ji, «les Cretois;» syriaque, «les Crétéens.» — Sophonie, ii, 5, parlant contre le mêmepeuple, dit:
italheur à vous qui habitez la côte de la mer, nation des Kerêtim; La parole du Seigneur [va tomber] sur vous, Chanaan, terre desPhilistins.
Saint Jérôme a expliqué gôi Kerêtim par gens perditorum, «nation de perdus,» parce que, dit-il, «ceux quihabitent près de la mer périront.» Comment, in Soph., t. xxv, col. 1360. On peut se demander pourquoi le grandinterprète n’a pas été plus conséquent avec lui-mêmeen donnant au mot, qu’il lit chorethim dans les deuxendroits, la même signification. Citant les anciennes versionsgrecques, il fait justement remarquer que la traductiondes Septante, uâpoixoi Kpr, Ttôv, advense Cretensium, suppose la lecture gar, «étranger,» au lieu de gôi, «nation,» avec le nom de l’île de Crète. Aquila, enmettant eOvoç ôXéÔpiov; Théodotion, =6vo; èÀéÔpt’a; ; Symmaque, ô), s6p£vi<S|iEvov, sont d’accord avec lui. Le chaldéensemble suivre la même étymologie; mais le syriaque porte «Creta», comme les Septante.
En somme, nous ne voyons aucune difficulté d’admettreque Kerêtim est ici, en vertu du parallélismepoétique des prophètes, synonyme de Philistins, ou toutau moins désigne une fraction de ce peuple, quelle quesoit d’ailleurs son origine. Il est ensuite permis, malgrél’autorité de la Vulgate, de regarder ce mot, non commeun participe, mais comme le pluriel de Kerêti, que lamême version, d’accord avec les Septante, a rendu parle nom propre Céréthien. Enfin le seul texte de I Reg., xxx, 14, suffit pour nous montrer une tribu de ce nomdans le sud-ouest de la Palestine.
2° Le mot Kerêti est uni à Pelêtî dans plusieursendroits des livres historiques pour désigner les gardesdu corps de David, II Reg., viii, 18; xv, 18; xx, 7, 23; III Reg., i, 38, 44; IV Reg., xi, 19 (hébreu: hak-Kâri); I Par., xviii, 17. Gesenius, Thésaurus, p. 719, ici encore leraltache à la racine kârat, et lui donne le sens de carnifex, «bourreau,» de même qu’il explique Pelêtî par cursores, «coureurs, courriers.» Les soldats qui formaient la gardedu saint roi, ceux que Josèphe, Ant. jud., VII, v, 4, appelle (rwnsToç-jXaxeç, auraient ainsi tiré leur nom deleurs fonctions, ceux-ci étant chargés de porter les messagesroyaux, ceux-là d’exécuter les sentences capitales: nous voyons, en effet, Banaias, fils de Joïada, leur chef, mettre à mort, par ordre de Salomon, Adonias, III Reg., il, 25, et Joab, . ^. 34; tel était aussi en Egypte le rôlede Putiphar, Gen., xxxvii, 36, et en Chaldée celuid’Arioeh, officier de Nabuehodonosor. Dan., ii, 14. LesSeptante ont, comme la Vulgate, gardé le mot hébreu, Xeptôî, XsXtOc; mais la paraphrase chaldaïque a fait desdeux noms des substantifs communs: archers et frondeurs, expressions qu’on trouve de même dans la versionsyriaque, avec celles de nobles et soldats. Keil, DieBûcher Samuels, Leipzig, 1875, p. 287, qui partagel’opinion de Gesenius, ajoute que, dans la suite, ondésigna la garde royale par les mots hak-kârî vehârâsîm, «les bourreaux et les coureurs,» IV Reg., xi, 4, 19, et qu’on trouve déjà, II Reg., xx, 23, hak-kârîpour hak-kerê(i (kàri venant de kûr, «percer, transpercer» ); ce qui confirme l’explication donnée. — Onoppose cependant plusieurs difficultés à cette manièrede voir. Pourquoi d’abord les deux mots en questionn’ontils pas la forme plurielle usitée pour les nomscommuns? Ensuite, quand même les gardes du corpsauraient à l’occasion exécuté les sentences de mort ouporté les messages royaux, il n’est guère vraisemblablequ’ils aient tiré leur nom de là; d’autant moins quePelêtî, à le prendre dans son sens propre, ne signifiepas, comme Rasïm, simplement «coureur», mais plutôt «fuyard, déserteur»; singulière appellation, on en conviendra, pour une garde royale. Enfin la forme Kerêti, Pelêfî, est usuelle en hébreu pour les noms de peuples,
et la tribu des Céréthiens est déjà mentionnée I Reg., -XXX, 14. Cf. Baur, dans Riehm, Handwôrterbuch desEiblischen Altertums, Leipzig, 1884, t. i, p. 241.
La plupart des modernes, à la suite d’Ewald, KritischeGrammatik der hebràischen Sprache, Leipzig, 1827, p. 297; Geschichte des Volkes Israël, Gœltingue, 1864, t. i, p. 353, expliquent Kerêti et Pelêti par des noms depeuples. Les Céréthiens sont les Philistins comme originairesde Crète; le mot Pelêti serait une abréviation populairepour Pelisti, «Philistin.» Les Céréthiens et les Phéléthiensétaient des soldats mercenaires comme le furentplus tard les Germains qui servirent de gardes du corpsaux empereurs romains, et les Suisses qui devinrentgardes du corps des rois de France. Après David, la garderoyale put conserver le même nom, quoiqu’elle ne futplus composée de Philistins, de même que certainesgardes suisses purent être composées de soldats quin’étaient pas originaires des cantons helvétiques. — Ence qui concerne Kerêfl, cette opinion, au point de vuestrictement exégétique, s’appuie principalement suri Reg., XXX, 14; Ezech., xxv, 16; Soph., ii, 5. Quant à l’originedes deux noms, voici comment on l’explique au point devue historique. On distingue une double émigration desPhilistins en Palestine. La première colonie vint de lacôte égyptienne, où elle s’était d’abord arrêtée, en quittantCaphtor ou l’Ile de Crète. Elle fut faible jusqu’àl’époque des patriarches, mais prit peu à peu de la forcependant le séjour des Hébreux en Egypte. La secondearriva immédiatement de Crète, vers la seconde moitiéde la période des Juges, et donna à la puissance dupeuple philistin cet essor subit qu’indique le livre desJuges à partir du chap. xm. Selon toute vraisemblance, le nom de Pelêti ou Pelisti désigna primitivement laplus ancienne, et celui de Kerêti la plus récente; et cettedouble dénomination, s’appliquant à tout l’ensemble dela population, passa aux gardes du corps que David pritdans la nation vaincue. Comment se fait-il maintenantque le saint roi prit ces troupes à son service? Cela s’expliquenon seulement par ses anciens rapports d’amitiéavec les Philistins, I Reg., xxvii; mais encore par lanature même de ce dernien État. Celui-ci, en effet, uneespèce de Pays-Bas de l’ancien monde, ne pouvait, dansles limites étroites où il était resserré, arriver à un certaindéveloppement de puissance qu’en appelant desmercenaires de l’ancienne patrie, et ces soldats à gage, suivant leur coutume, se mirent au service de leur nouveaumaître, après la défaite des Philistins, aussi volontiersqu’ils l’avaient fait pour les anciens. Cf. Riehm, Handwôrterbuch, p. 241.
On a soulevé contre cette opinion les objections suivantes: 1° Kerêti n’indique pas plus les Cretois quePelêti ne représente les Philistins. Donner, en effet, cedernier mot comme une corruption de Pelis(im est uneassertion sans fondement, un fait inconnu des languessémitiques. — 2° Cette alliance de deux noms synonymespour désigner la garde royale est tout à fait singulière; c’est comme qui dirait les Anglais et les Bretons enparlant des habitants de la Grande-Bretagne. — 3° Lesgardes du roi furent appelés plus tard hak-kàri ve-hàrâsim, IV Reg., xr, 4, 19, hak-kâri correspondant à hakkerêti, comme II Reg., xx, 23, et hâ-râsim à happelêfi; ce dernier mot n’est donc pas plus un nom depeuple que râsim, «coureurs;» et il en est de mêmepour les deux autres. — 4° L’hypothèse de l’émigrationdes Philistins de l’Ile de Crète s’appuie simplement surles vagues données de Tacite, Hist., v, 3, 2: JudseosCreta insula profugos novissima Libyse insedisse memorant, et d’Etienne de Byzance, qui rapporte que laville de Gaza s’appelait autrefois Minoa, de Minos, roide Crète: assertions qu’on a justement traitées de fables, surtout en regard des témoignages historiques de l’AncienTestament, Deut., ii, 23; Am., ix, 7, qui font vejnir les Philistins de Caphtor. — 5° Enfin il est tout à j
fait invraisemblable qu’un patriote comme David, qu’unpieux roi attaché comme lui au culte du vrai Dieu, aitentouré sa personne d’étrangers et de païens. Cf. Gesenius, Thésaurus, p. 719; Keil, Samuel, p. 287-288, notes.
On peut répondre à ces difficultés: 1° Quelle que soitl’origine des Kerêtim, ils sont certainement donnés,
I Reg., xxx, 14, comme une tribu du sud-ouest de laPalestine, et probablement, Ezech., xxv, 16; Soph., ii, 5, comme synonymes de Philistins. Quant au mot Pelêtl, plusieurs auteurs admettent qu’il peut être une corruptionpopulaire de Pelistim, destinée à mettre sa prononciationd’accord avec celle de Kerêti. Voir Phéléthiens.
— 2° L’alliance des deux noms synonymes s’explique parleur origine historique, que nous avons mentionnée plushaut, de même que les dénominations d’Anglais et deBretons supposent dans un même pays différentes couchesde peuples. — 3° Les gardes du corps pouvaient s’appelerrâsim en raison de leur fonction de «messagers», et Pelêti en raison de leur origine, comme en Francenous disons «Suisses» et «portiers». Cf. F. de Hummelauer, Comment, in libros Samuelis, Paris, 1886, p. 333. Quoique plusieurs auteurs prennent Kârî pour lenom des Cariens, qui auraient également fait partie dela garde royale, il est possible aussi que ce mot soit unefaute de copiste pour Kerêti, par la simple omission dun, thav, t-s, >rro, comme au ketïb de II Reg., xx, 23.
Dans ce dernier passage, les massorètes ont ponctué H3,
Kerêî; mais les Septante et la Vulgate ont bien lu Xepeôi, Céréthiens; et la version latine a lu de même. IV Reg., xi, 19. — 4° Malgré l’obscurité qui entoure l’origine desPhilistins, bon nombre d’auteurs les font venir de Crète.Cf. Maspero, Histoire ancienne des peuples de l’Orient, 4e édit., Paris, 1886, p. 312; Vigouroux, La Bible et lesdécouvertes modernes, 5e édit., Paris, 1889, t. iii, p. 338.Voir Philistins. — 5° Qui nous dit que les Céréthiensne devinrent point prosélytes, en s’attachant à la personnede David? Les janissaires turcs étaient de jeunescaptifs, nés de parents chrétiens, qu’on élevait dans l’islamisme.D’un autre côté, le saint roi ne crut jamais manquerau patriotisme en choisissant des héros étrangers, comme Éthaï le Géthéen, II Reg., xv, 19, 22; xviii, 2; Sélec l’Ammonite, xxiii, 37; Urie l’Héthéen, xxiii, 39; Igaal de Soba, xxiii, 36, et les six cents Géthéens, xv, 18.
II suivit en cela l’exemple de Saùl, qui, «dès qu’il voyaitun homme vaillant et apte à la guerre, se l’attachait,» I Reg., xtv, 52, ce qui n’exclut pas le choix des étrangère, mais le suppose plutôt. Cf. F. de Hummelauer, Comment, in lïb. Sam., p. 333. C’est, du reste, un usagequi a été assez fréquent chez les rois orientaux. Le khalifede Bagdad, par exemple, fut obligé, depuis le IXe siècle, de prendre à son service des soldats turcs, parce qu’aucunArabe ne voulait se prêter à emprisonner un Arabe, encore moins à le mettre à mort. Cf. F. Hitzig, Vrgeschichteund Mythologie der Philistàer, in-8°, Leipzig, 1845, p. 17-28.
Les Céréthiens et les Phéléthiens avaient pour chef, non point un des leurs, mais un Israélite de la plusgrande distinction et de la meilleure naissance, Banaias, fils du grand prêtre Joïada. II Reg., viii, 18; xx, 23; I Par., xviii, 17. Ils marchaient devant David quand ils’enfuit de Jérusalem, au moment de la révolte d’Absalom.II Reg., xv, 18. Ils poursuivirent, avec les vaillantsd’Israël, un autre révolté, Séba. Il Reg., xx, 7. Opposéségalement aux tentatives d’Adonias, ils prirent part ausacre de Salomon. III Reg., i, 38, 44. La Vulgate les mentionneencore dans l’histoire d’Athalie et de Joas. IV Reg., xi, 19; mais nous avons vu que le texte original donneune leçon qui prête matière à difficultés. Telle est enrésumé toute l’histoire de cette troupe d’élite. — VoirJ.-B. Carpzov, Dissertatio de Crethi et Phlelhi, dansUgolini, Thésaurus, t. xxvii, col. ccccxrv - ccccu;
H. Opitz, Dissertatio de Crethi et Phlethi Davidis etSalomonis salellitio, ibid., col. cccclii-cccclxxi.
A. Legendre.
CÉRÉTHITES. Voir Céréthiens.
CERF ( hébreu: 'ayyâl, «le cerf,» et parfois l’animalen général, mâle ou femelle; 'ayyâlâh, «la biche.» Lenom paraît dérivé de 'ayîl, «bélier,» ce qui indiqueraitque pour les premiers Hébreux le cerf était une espècede grand bélier. Septante: ËXccpo; ; Vulgate: cervus, cerva). Le cerf (fig. 147) est un mammifère, de l’ordredes bisulques ruminants et de la famille des cervidés, remarquable par l'élégance de ses formes et son agilitéà la course. Son pelage est d’un brun fauve, excepté à
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147. — Le cerf.
la croupe et à la queue, qui sont d’une couleur pluspâle. Il vit ordinairement par troupes, se nourrit d’herbages, de feuilles et au besoin d'écorce d’arbres, et selient dans les bois et les forêts, à proximité des lacs ou
année, la dague se ramifie et devient bois; la tige principale ou merrain produit des ramifications qu’on appellecornillons ou andouillers. Ces bois sont caducs; ils tombentchaque année au printemps pour reparaître en automne.Le cerf abondait autrefois en Palestine. Deux villes etune vallée y portaient le nom d’Aïalon, dérivé du nommême du cerf. Voir t. i, col. 296-298. L’espèce était celledu cervus elaphus, originaire de Perse, et encore commune dans toute l’Europe. On en a retrouvé les ossementsdans les cavernes et dans les brèches du Liban. Le cerfest devenu rare aujourd’hui en Palestine, à cause del’aridité du sol. Il a totalement disparu de l’Egypte, où ilétait connu autrefois, comme l’attestent les monumentsfigurés (fig. 148). Le cervus barbarus, race très peu différente de la première, qui occupe aujourd’hui le Maroc, l’Algérie et la Tunisie, s'étendait probablement autrefois
l13. — La biche et son faon.
dans tout le nord de l’Afrique, et atteignait la partie méridionale de la Palestine. Tristram, The natural historyof the Bible, Londres, 1889, p. 101; Id., Fauna andFlora of Palestine, Londres, 1884, p. 4.
La Sainte Écriture mentionne le cerf ou la biche vingtet une fois dans la Vulgate (dans le texte hébreu: lecerf, dix fois, la biche, dix fois); la Vulgate a traduit enplus par «cerf,» Ps. cm (Civ), 18, le mot ye’elim qui
US. — Chasse au cerf en Egypt?. Tombeau de Béni -Hassan. D’après Percy E. Newberry, Beni-Easan, t. ii, pi. Iv.
des cours d’eau. Le cerf est d’un naturel doux et timide; mais en automne, quand il recherche la biche, ilest agressif et même féroce. Il se met alors à bramer, en poussant un cri rauque et sauvage. La biche portehuit mois. Son petit prend d’abord le nom de faon, etensuite celui de daguet jusqu'à l'âge de trois ans. Cequi distingue surtout le cerf, ce sont les bois qui ornentsa tête et en même temps lui servent d’armes offensiveset défensives. Le mâle seul en est pourvu. Quand l’animal arrive à l'âge de six mois, deux petites éminencesse produisent de chaque côté de l’os frontal, dont ellessont le prolongement. Une peau velue les recouvre. Elless’allongent bientôt en pointes ou dagues. À la troisième
désigne le bouc sauvage, ibex. Elle fait allusion à sonélégance, à sa rapidité, à quelques particularités desmœurs de l’animal, mais jamais à sa ramure. Dans lelivre de Job, xxxix, 1-4, le Seigneur parle en ces termesde la naissance du faon:
As-tu observé l’enfantement des biches,
As-tu compté les mois de leur portée,
Sais-tu l'époque où elles mettent bas?
Elles se courbent pour faonner
Et se délivrent de leurs douleurs.
Leurs petits se fortifient, grandissent au désert,
S’en vont et ne reviennent plus vers elles.
Les cerfs aiment à se cacher dans les fourrés les plus
épais et ils fuient dès qu’on les approche, d’où la difficultéd’observer leurs mœurs. Néanmoins la connaissancedes détails dont parle le livre de Job n’est pas impossibleà l’homme; le Seigneur parle donc ici, non de cettescience humaine qui constate les effets, mais de la sciencedivine qui crée et gouverne les causes. — Comme les petitsdes autres animaux les faons abandonnent leur mère dèsqu’ils peuvent se suffire à eux-mêmes (fig. 149). La mère, au contraire, chérit ses petits, et pour qu’elle cessât d’enprendre soin, il faudrait que la détresse fut extrême, jer., xiv, 5. — La biche est timide, et la «voix du Seigneur», c’est-à-dire le bruit de la tempête et de l’orage, la fait faonner avant terme. Ps. xxviii, 9; Aristote, Hist.
Il y a là sans doute une allusion prophétique à cette illustrefemme de la tribu de Nephthali, Débora, qui persuada àBarac de livrer bataille à Sisara, et ensuite chanta simagnifiquement la victoire. Jud., iv, v. — «Le cerf soupireaprès les sources d’eau.» Ps. xli, 2. Il s’y rend detrès loin pour se désaltérer. — La grande sécheresse, quidétruit les pâturages, l’exténue et le rend incapable defuir. Lam., 1, 6. — La chair du cerf est succulente. LesHébreux pouvaient en manger, Deut., xii, 15; xiv, 5; xv, 22, et la table de Salomon en était abondammentpourvue. III Reg., iv, 23. Cependant le cerf ne figure pasparmi les animaux qu’on pouvait offrir dans les sacrifices.
— On lit dans le titre hébreu du psaume xxi: ’al’ayyélét
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150. — Chasse au cerf en Assyrie. Bas-relief de Koyoundjik, British Muséum.
anim., ix, 3; Plutarque, Sijmpos., 4; Pline, H. N., vin, 47. — L’agilité du cerf à la course fournit matière àplusieurs comparaisons. Quand l’animal est poursuivià la chasse, il n’est pas rare qu’il coure sans interruptionl’espace de cinquante ou soixante kilomètres, et leschiens les plus agiles ne le mettent aux abois que grâceà de nombreux relais (fig.’150). David remercie le Seigneurde lui avoir donné, pour se dérober à ses ennemis, des pieds agiles comme ceux du cerf. Ps. xvii, 31; II Reg., xxii, 34. Habacuc, iii, 19, se sert de la mêmecomparaison. — L’animal fait des bonds énormes. Autemps du Messie, «le boiteux bondira comme le cerf,» Is., xxxv, 6, métaphore qui se rapporte à la fois auxguérisons physiques opérées par le Sauveur et à l’élanque sa grâce communiquera aux hommes pour les fairemarcher dans la voie du salut. — Rien de gracieuxcomme la biche et le faon, avec leur œil vif, leur légèreallure, leurs formes délicates, leur timidité même.Salomon compare l’épouse de la jeunesse à «une bichebien-aimée», Prov., v, 19, et l’époux du Cantique au «jeune faon des biches». Cant., ii, 9, 17; viii, 14. —Dans ce dernier livre, l’époux adjure les compagnes del’épouse «au nom des biches de la campagne», Cant., n, 7; iii, 5, parce que la scène décrite dans le Cantiquese passe en grande partie dans les champs dont lesbiches sont les hôtes les plus gracieux, et aussi parceque l’épouse est comme une biche délicate et timide quele moindre bruit pourrait éveiller. — Jacob mourant ditde Nephthali:
Nephthali est une biche en liberté,
II fait entendre de belles paroles. Gen., xux, 21.
haSsahar, «sur la biche de l’aurore.» Voir’Ayyéléthassahar. — Sur le rôle du cerf dans le symbolismechrétien, surtout à raison du texte Ps. xli, 2, voir Martigny, Dictionnaire des antiquités chrétiennes, 1877, p. 158. II. Lesètre.
- CERMELLI Augustin##
CERMELLI Augustin, dominicain lombard et inquisiteurgénéral en Lombardie, mourut en 1677. Il étaitoriginaire d’Alexandrie en Piémont. Il a laissé un ouvrageassez important, sous le titre de Catena in Job ex SS. PatrumScriptorumque ecclesiasticorum sententiis concinnata, in-f", Gênes, 1636. — Voir Échard, .. Scriptores ordinis
Prœdicatorum, t. ii, p. 669.
B. Heurtebize.
- CÉROS##
CÉROS (hébreu: Qêrôs; Septante: KâS7]; , I Esdr., H, 44; Kipiç, II Esdr., vii, 48; Codex Alexandrinus: Kr, paoî et Keipâ; ), Nathinéen, dont les fils revinrent dela captivité de Babylone avec Zorobabel.
CERVEAU. Le texte hébreu de la Bible ne nommenulle part le cerveau. La Vulgate emploie cependantdeux fois le mot cerebrum. Elle raconte que Jahel entrasecrètement dans la tente de Sisara, «plaça un clousur la tempe de sa tête, et, le frappant avec un marteau, l’enfonça dans son cerveau jusqu’à terre.» Jud. riv, 21. En hébreu et en grec, on lit seulement: «Eten frappant elle enfonça un clou dans sa tempe (raqqàh, xpÔToeço: , lempus), et il descendit jusqu’à terre.» Plus loin, Jud., ix, 53, la Vulgate dit encore qu’unefemme «jeta d’en haut un fragment de meule qui frappala tête d’Abimélech et lui brisa le cerveau». En hc
breu, le mot employé est gulgolét, «crâne,» et en grecxpavfov, qui a le même sens. — Il est à remarquer quele mot raqqâh, reproduit dans le cantique de Débora, Jud., v, 26, y est traduit plus exactement par tempus
dans la Vulgate.
H. Lesêtre.
- CÉSAR##
CÉSAR (grec: Kaïaocp). Nom générique pris pour lapremière fois par Octave, fils adoptif de Jules César, etadopté par les empereurs romains de sa race. L’emploide ce tilre pour désigner l’empereur régnant devint général, à ce point qu’on omettait le plus souvent d’y ajouCésar, qui fut dès lors porté par les héritiers présomptifsde la couronne. Sous le Bas-Empire, il fut appliquécomme titre honorifique à tous les enfants mâles de l’empereur
régnant.
P. Renard.
- CÉSARÉE##
CÉSARÉE (Kamâpeia). Plusieurs villes Ont porté cenom dans les contrées où s’étendit la domination romaine.A propos d’Auguste, Suétone dit: «Reges amici, atquesocii, et singuli in suo quoque regno, CæsareES urbescondiderunt.» Octav., 60. Deux Césarées, situées c n Palestine, sont mentionnées dans le Nouveau Testament.
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181. — Banias vue de l’ouest. D’après une photogra; hie
ter le nom propre de chaque souverain. Joa., xix, 15; Act., xvii, 7. Cette manière de parler fut adoptée par lesauteurs du Nouveau Testament à cause de la souverainetéque les empereurs romains exerçaient sur la Palestine.Les Césars mentionnés soit par leur nom propre, soitpar le terme de César, dans le Nouveau Testament, sont1° Auguste, Luc, H, 1; 2° Tibère, Luc, iii, 1; xx, 22; 3° Claude, Act., xi, 28, et 4° Néron, Act., xxv, 8. Voirchacun de ces noms. Caligula, qui succéda à Tibère, n’est pas mentionné. Les monnaies en usage portaientl’effigie du césar. Matth., xxii, 21. Voir fig. 134, col. 423.C’est à lui que les Juifs payaient le tribut, Matth., xxii, 17; Luc, xx, 22; xxiii, 2, devoir que Notre-Seigneur consacraen déclarant qu’il fallait rendre à César ce qui étaità César. Matth., xxii, 21. Voir Cens. Les Juifs, qui avaientle titre de citoyens romains, pouvaient en appeler à Césardans les causes criminelles, Act., xxv, 10-12; xxvi, 32; xxviii, 19, et dans ce cas ils étaient conduits à Rome, pourêtre jugés au tribunal de l’empereur. Act., xxv, 12, 21.Le titre de César fut ainsi porté par les empereurs romainsjusqu’à Néron inclusivement. Après lui Galba, ayant adopté Pison, lui donna en même temps le titre deIlICT. DE LA BIBLE.
4. CÉSARÉE DE PHILIPPE (Kaidàpeia 7) *iXiWou), ville de Palestine, la Banias actuelle (fig. 151), probable152. — Monnaie de Césarée de Philippe.AYT KM. Buste radié et cuirassé d’Héliogabale. — il KAI.IIAN. SE. A1YL. Pan dans une grotte fermée par unebalustrade. Dans le champ (i.K)A, c’est-adire l’an 221 dePanéas, correspondant a l’an 198 de no: re ère; c’ejc la datede l’avènement d’Héliogabale.
ment appelée Baalgad dans l’Ancien Testament, voir t. i, col. 1337, reçut son nom nouveau parce que le télrarque PI iII. - 15
451
CÉSARÉE DE PHILIPPE
452
lippe la restaura, l’embellit et la dédia à Tibère César, sonprotecteur. Ant. jud., XVIII, ii, 1; Bell. jud., II, ix, 1. Elleest plus connue sous le nom de Césarée Panéas (fig. 152), Kaicripsia flavEoiç, ou Ilaviâ; , Ant. jud: , XVIII, II, 3; Pline, H. N., v, 15, 15; Ptoléraée, v, 15, 21, et enfin simplementPanéas, Ant. jud., XV, x, 3, parce qu’elle était consacréeau dieu Pan. Elle se trouve mentionnée dans l’Évangile, Matth., xvi, 13; Marc, viii, 27, comme le point verslequel Jésus, fuyant la persécution qui s’organisait àCapharnaûm, résolut de se diriger. C’est dans ce voyage, et aux environs de Césarée de Philippe, que Pierre, répondantà la question du Maître, prononça le Tu es Chriavait bâti nn temple en l’honneur d’Auguste son bienfaiteur.Ant. jud., XV, x, 3; Bell. jud., i, xxi, 3. Son fils Philippe, à qui il légua cette ville avec le district du mêmenom, Ant. jud., XVII, viii, 1, 7, la transforma en y multipliantdes monuments de plus en plus en harmonie avecles mœurs païennes. Agrippa le Jeune en fit autant et luidonna le nom de Néronias, en l’honneur de Néron. Ant.jud., XX, ix, 4. On y voyait non seulement des templesavec leurs idoles, mais tout ce qui devait se trouver dansune ville grécoromaine, et jusqu’à un amphithéâtre, oùTitus, après son triomphe définitif sur la nation juive, putoffrir à la multitude des jeux publics, obligeant les pri
- £: *-.?? vfrsfe* & «£* - - "
- Vf.72to.S’--^
t’Jffl … -,
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o= £*-- -153. — Buines du temple de Pan, à Banias. D’après une photographie.
stus qui lui valut, comme récompense, le Tu es Petrus.Matth., xvi, 16-18. Voir notre Vie de Notre-Seigneur Jésus-Christ, 3e édit., t. ii, p. 136 et suiv. Il n’est pas dit, et il n’estpas probable, Marc, viii, 27, que le Sauveur soit entrédans Césarée. Visiter ces grands centres, plus païens quejuifs, n’entrait pas dans le plan de son ministère évangélique.Or Césarée de Philippe était un centre importantet à peu prés païen. Josèphe, Vit., 13, nous apprend queles Juifs s’y trouvaient peu nombreux et entourés deGentils auxquels ils devaient s’adresser pour acheter del’huile. Ils ne le faisaient qu’avec répugnance, cette huileleur paraissant impure et peu ce; ; forme par sa préparationaux exigences de la loi. Au reste, le nom même de la villeindiquait son origine païenne. On y vénérait dans unegrotte célèbre le dieu Pan et les nymphes ou les satyres, son cortège ordinaire. Les Hérodes, par des embellissementssuccessifs, n’avaient fait qu’accentuer ce caractèreabsolument païen de la cité. Le premier de la dynastie y
sonniers à s’entretuer ou à lutter contre des bêtes féroces, pour amuser les spectateurs.
De l’antique Césarée, il ne reste à peu près rien que lagrotte de Pan (fig. 153), les ruines du château fort, dontune partie paraît antérieure aux croisades, et beaucoupde colonnes semées un peu partout, les unes à traverschamps, les autres dans les constructions modernes queles paysans se sont édifiées. C’est en avril 1888 que nousavons visité, avec M. Vigouroux, le site de Panéas ouCésarée de Philippe. — On y arrive de la vallée duJourdain supérieur, en gravissant, sans trop s’en apercevoir, une série de petits plateaux superposés jusqu’à400 mètres d’altitude. Déjà à Tell-el-Qadi, l’antique Laïs, devenue plus tard la ville des fils de Dan, les eaux vivesbouillonnent de tous côtés. À mesure qu’on se rapprochedes sources du Jourdain, la verdure devient luxuriante, la fraîcheur commence, les arbres se montrent pargroupes. On oublie les sites arides de la Palestine et on CÉSARÉE DE PHILIPPE
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marche joyeusement vers les grandes montagnes d’oùdescendent les rivières, en se disant qu’il y aura là commeun petit paysage de Suisse où l’on pourra se reposer avecplaisir. Et, en effet, après avoir franchi de nombreuxruisseaux bondissant à travers les pierres, on finit paratteindre des massifs de figuiers, de saules, de térébinthes, de lauriers - roses, de peupliers, d’amandiers: là se trouve Banias, l’ancienne Panéas. L’eau, si raredans toute la Palestine, court ici dans tous les jardins etinonde même le petit sentier encombré de ruines et depierres basaltiques par lequel nous arrivons. De jolischapiteaux doriques et corinthiens sont plantés çà et là,
trois supports tiennent en l’air. C’est le système qu’ils ontimaginé pour se garantir des scorpions et des insectesqui abondent dans le pays.
Le seul souvenir de l’antique Panéas qui subsiste âBanias moderne, c’est, en dehors du nom même de laville, la fameuse grotte de Pan, dont Josèphe nous a faitla description, et qui, par le culte qu’on y rendait audieu des troupeaux et des pâturages, avait donné naissanceà la cité de Panéas. Cette caverne se trouve au norddu village, ouverte sous les derniers contreforts de l’Hermon.On y arrive à travers des ruisseaux sans passerelleset des jardins mal cultivés. Les habitants du pays l’ap154. — Source du Jourdain, à Banias. D’après une photographie.
comme bornes, pour délimiter les propriétés particulières.Les maisons de Panéas sont de terre, mais desuperbes blocs de marbre se trouvent souvent enchâssésdans ces misérables murs de pisé. Des sarcophages, remarquablescomme sculptures, et, autant qu’il nousa paru, tous de l’époque grécoromaine, servent d’augeaux troupeaux. L’ancienne ville, absolument détruite, aété transformée en champs de blé et en jardins. Seulela forteresse a résisté en partie à l’injure du temps, etc’est dans son quadrilatère que sept ou huit cents habitantsont édifié leur triste village. À notre grande déception, nous n’avons pas trouvé un seul chrétien à Banias.Heureusement que le vieux scheikhvrkhaoui, un excellentvieillard, nous offrit chez lui la plus patriarcale hospitalité.En dehors de l’appartement qui sert de mosquée, à l’entrée de sa demeure, et où il nous installa, il eûtété impossible de trouver dans tout le village un asileacceptable. Les habitants désertent la nuit leur habitationordinaire pour aller se blottir sur leurs terrasses, dansdes réduits construits avec des branches d’arbres et que
pellent Merharet Ras en-Nebah, «Caverne de la télé dela source.» Du temps de Josèphe, une nappe d’eau immobile, mais dont la profondeur était jugée insondable, s’étendait sous la grande voûte rocheuse. Du pied de lacaverne, dit l’historien juif, Bell. jud., i, xxi, 3, sortait enbouillonnant une des sources du Jourdain (fig. 154). Aujourd’huila nappe d’eau n’est plus visible. D’énormes blocsde rocher se sont détachés de la montagne et ont combléune grande partie de la grotte. Les eaux jaillissent toujoursà la partie basse, à dix mètres environ au-dessous deséboulements et de l’entrée actuelle. La grotte, jadis pleinede poésie, est devenue une étable d’une saleté repoussante.Les bergers successeurs de Pan y laissent s’accumuler lesordures de leurs troupeaux, et les insectes de toute sortey pullulent. Plusieurs niches, dont les unes se trouvent, par suite de l’exhaussement du terrain, à fleur de terre, et d’autres cachées sous le sol, ont des inscriptions enl’honneur de Pan et des nymphes. Dans l’état actuel deslieux, il n’est pas possible de trouver, entre la grotte etla rivière, une assiette convenable pour le fameux temple
de marbre blanc qu’Hérode érigea, près du Panion, enl’honneur d’Auguste. Bell. jud., i, xxi, 23. Le chercherau flanc de la montagne, là où fut bâtie, au moyen âge, la petite chapelle de Saint-Georges, Mâr Djiris, est encoreplus difficile. Et cependant le chapiteau corinthien qu’onvoit sur une colonne du petit oratoire, et dont les pareilsse retrouvent dans les jardins au delà de l’ouadi, firenttrès probablement partie de l’Augustéum. Les donnéeshistoriques et topographiques sur l’ancienne ville sonttrop insuffisantes pour essayer une reconstitution. Desarceaux aux trois quarts ensevelis dans un jardin, maisqui se développent sur une assez longue étendue, marquent-ilsla place du forum? C’est possible. Pour avoirune idée générale du site de Panéas, il faut se transporter
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155. — Porte et pont de Baillas.
au delà de l’ouadi Zaaréh, vers le sud. On passe devantun tombeau de santon couvert d’ex-voto et embaumé desparfums qu’on y brûle, puis on franchit une double porte, jadis surmontée d’une tour carrée. Une inscription arabedit que la porte a été faite par un sultan mamelouk, maisles plus basses assises sont certainement plus anciennesque les croisades. Ces assises se continuent avec le reinpartvers le levant jusqu’à l’habitation du scheikh, etmarquent très probablement une partie du périmètre dela place forte gréco-romaine. On franchit l’ouadi sur unpont (fig. 155) d’origine en partie musulmane, comme laporte. On a employé des frugmcnls de frises et des linteaux, ramassés parmiles ruines et la plupart finement scul. ptés pour construire ses parapets. Sous l’arche ogivale, letorrent se précipite en bouillonnant à travers les rochesgrisâtres et des îlots couverts de lauriers-rôses. À mesurequ’on gravit la colline méridionale, le panoramase déroule très pittoresque à nos pieds et absolumentmajestueux sur nos têtes. Les contreforts de l’Hermoiise superposent en assises tantôt abruptes, tantôt arrondies, jusqu’à 3000 mètres d’altitude, et la superbe montagne, couverte de neige, brille de mille reflets, comme si ellerenvoyait au soleil les feux dont il la couvre. De grandsaigles volent dans le ciel bleu, allant des roches del’Hermon aux vieilles murailles du château de Soubeybéh, qui, sur un pic surplombant de 300 mètres la vallée dePanéas, semble dire dans sa ruine qu’après avoir été detout temps la forteresse imprenable, il na capitulé quequand les hommes l’ont délaissé. En bas. Banias modernegroupe ses pauvres habitations au milieu des débris deCésarée dressant çà et là la tête sous forme de colonnes, de sarcophages, d’arceaux, de remparts à moitié détruits.Par delà les jardins, en face, attaché au liane de la montagne, Mâr - Djiris ou Saint - Georges, devenu l’ouali’el-Khader des musulmans, donne la note religieuse aupaysage. Au-dessous, la grotte de Pan, derrière de grandsbouquets d’arbres, laisse entrevoir sa sombre ouverture, et remplit par le bruit de ses eaux bouillonnantes tout levallon d’un long et délicieux murmure. Sur laquelle deces pentes de l’Hermon, qui s’inclinent gracieusementvers la vallée, Notre-Seigneura-t-il prié? Sur lequel de cessommets amena-t-il Pierre, Jacques et Jean, pour en faireles témoins de sa transfiguration? Il n’est pas possibledele soupçonner, la tradition étant restée, dans ces payspeu chrétiens, d’un mutisme désespérant. C’est cependantlà sans doute le vallon qui a entendu le cri du ciel surla tête de Jésus: «Celui-ci est mon Fils bien-aimé, écoutez-le.» Ce sont là les roches qui ont vu le Maîtrebrillant comme la lumière converser avec Élie et Moïse, et il n’y a pas un signe qui fixe notre foi et console notreamour. Dans ces chemins sinueux qui montent et descendentdans la vallée, il a erré avec ses disciples, leurrévélant sa fin prochaine, et c’est peut-être en regardantsur son cône abrupt, entouré de ravins, le château deSoubeybéh, qu’il évoqua la belle image de son Église, «bâtie sur la pierre,» imprenable, inaccessible et éternellementvictorieuse, et qu’il donna à Pierre les clefs duroyaume des cieux. Matth., xvi, 18-19.
Le seul souvenir biblique que la tradition ait placédans la ville même de Césarée se rapporte à l’hémorroïssede l’Évangile. Matth., ix, 19-22; Marc, v, 25-34; Luc, viii, 43-48. Voir Hémorroisse. D’après Eusèbe, E.E., vu, 17, t. xx, col. 680, Glycas, Annal., IVe partie, t. clviii, col. 476, et Théophane, Chronograph., t. cvni, col. 157, la femme guérie par Notre-Seigneur d’un flux de sang avaitfait ériger devant sa maison, à Panéas, la statue de sonbienfaiteur. Le monument de bronze la représentait supplianteaux pieds du Maître, qui, le manteau rejeté surl’épaule, étendait la main vers elle pour lui donner la certitudeque par sa foi elle avait mérité sa guérison. Julienl’Aposlat aurait fai 1 enlever cette statue, parce que le peupleattribuait à une plante poussant près de son piédestal lepouvoir d’opérer des cures merveilleuses. La statue ^profanéeparles païens, aurait été pieusement recueillie parles fidèles, et placée dans une église. Julien, ayant substituésa. propre statue à celle du Sauveur, le feu du cieldétruisit bientôt l’image du sacrilège empereur. — Cf.aussi Sozomène, v, 21, t. lxvii, col. 1280; Pholius, Codex271, t. civ, col. 224.— Voir Wilson, Lands of the Bible, 1847, t. ii, p. 175 et sniv.; Thomson, The Land and theBook, iS16, p. 228-231; V. Guérin, Galilée, t. ii, p. 308et suiv., et notre Voyage aux pays bibliques, 3 in-12, Paris, 1890, t. ii, p. 274 et suiv. E. Le Camds.
2. CÉSARÉE DU BORD DE LA MER, KaicripEia ^apa),: ^ç, Josèphe, Bell. jud., III, ix, 1, ou-f) ln SaXctTTi-., ibid., VII, i, 3, ou encore SeÔxstï; , Ant.jud., XVI, v, 1 (fig. 156). Elleestappelée simplement Césarée dans les Actes, viii, 40, etc., parce que, résidence officielle des procurateurs romains, elle prima définitivement l’autre Césarée, qui était aussi enPalestine, mais que l’on distinguait en l’appelant régulièrementCésarée de Philippe, ou plus communément Panéas.Césarée fut bâtie par Hérode le Grand sur l’anciennetour de Straton. Pline, H. A, v, 14, en fait l’historiqueen deux lignes: «La tour de Straton, la même que Césarée, bâtie par le roi Hérode, est maintenant la colonia, prima Flavia, établie par l’empereur Vespasien.» Josèphe, Ant.jud., XV, ix, 6, et Bell. jud., i, XXI, 5 et suiv., racontelonguement, et avec quelque exagération, tout ceque fit Hérode pour transformer en un passable port demer et en une belle ville ce site jusqu’alors à peu prèsdésert, où un aventurier grec, du nom de Straton, avaitpensé à établir une tour de refuge. On sait que toute lacôte palestinienne est tellement tourmentée par le ventdu sud-ouest, l’africus, qu’elle est à peu près inaboridable aux navires. Ils ne peuvent que mouiller au large, I tant la mer s’y trouve perpétuellement agitée par le res
sac des lames revenant sur elles-mêmes. Que de fois lespaquebots de nationalités diverses, qui font aujourd’huiJe service de la côte, doivent s’abstenir de débarquer àJaffa non seulement les voyageurs, mais encore la poste, tant la violence des vagues rend l’abordage difficile, etil n’est pas d’année où des accidents déplorables ne surviennentpar l’imprudence de ceux qui, malgré la mauvaisemer, veulent se faire conduire à terre. Hérode, jaloux desemer un peu partout des villes nouvelles et des constructionsgrandioses, remarqua l’anse naturelle formée parles terres rocheuses qui supportaient la tour de Straton, et résolut d’y construire un port où les navires, allant dePhénicie en Egypte, trouveraient un mouillage excellent.Ayant admiré ailleurs les entreprises gigantesques des Romains, il voulut les imiter ici, et, à en juger par un énormebloc de syénite que l’on voit encore au milieu des flots, et qui fit partie du môle construit par lui, son œuvre futxéellement prodigieuse (fig. 157). Josèphe assure qu’il fit
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156. — Monnaie de Césarée.
AIA. Tête de femme voilée et tourelée. L’an 14 (IA) d’Augusteest la date même de l’inauguration du port et de la ville deCésarée. — ii; . EEBAETOS, dans une couronne. Sébastosétait le nom du port de Césarée.
jeter dans la mer, à une profondeur de vingt brasses, des pierres dont plusieurs avaient plus de quinze mètresde long et trois de large. Ainsi il prolongea vers l’ouestla jetée naturelle qui formait promontoire au sud dei’anse et portait la vieille tour de Straton. Le port étaitouvert au nord-nord-ouest, point d’où le vent n’arrivejamais très violent sur la côte. Des statues colossales, dressées sur une tour pleine, ou sur d’énormes blocs depierres aussi grands que la tour, décoraient, à gauche et àdroite, l’entrée de ce port, que Josèphe, avec son exagérationordinaire, compare comme proportions à celui duPirée. Après le brise-lames se dressait un mur, couranttout autour du port et flanqué de tours, dont une s’appelaitDrusia, du nom de Drusus, beau-fils d’Auguste.Des magasins voûtés, dans le genre de ceux qu’on voitencore assez bien conservés à Ostie, et qu’on retrouveruinés à Genchrées, recevaient les marchandises ou servaientd’abri aux marins, tandis que les habitants de laville se divertissaient sur les quais disposés en forme depromenade. Bâtie en amphithéâtre, Césarée, ville païenneplus que juive, étalait ses temples, ses palais, ses statuescolossales, ses monuments de toute sorte, parmi lesblanches maisons qui bordaient ses rues tirées au cordeauet aboutissant régulièrement au port. Quand onsonge qu’une si importante cité sortit de terre en douzeans, Josèphe, Ant.jud., Hy, IX, 6, il n’y a pas lieu d’exalternos procédés modernes de construction et d’architectureau-dessus de ceux de l’antiquité. Dn théâtre, un amphithéâtre, des aqueducs venant du nord pour amener leseaux prises au fleuve des Crocodiles ou sur les pentes duCarmel, des égouts portant les immondices à la mer, untemple splendide, consacré à Auguste, où se dressaientdeux statues colossales, celle de l’empereur et celle deRome, nullement inférieures, dit Josèphe, à celle duJupiter d’Olympie ou de la Junon d’Argos, faisaient deCésarée la plus jolie ville de Palestine. Dans ces conditions, elle parut à Hérode digne de porter le nom dumaître de Rome, qui était son puissant bienfaiteur. Il ladédia avec une grande solennité, et le port lui-même reçutle nom de Sébastos (Auguste). Au double point de vue civilet militaire, Césarée fut dès lors la capitale de la Judée.
Tout le monde sait qu’elle a joué un rôle importantdans l’histoire primitive du christianisme. Le diacre Philippel’évangélise. Act., viii, 40. Pierre vient y baptiserle centurion Corneille et sa famille, prémices de la gentilité.Act., x, 1; xi, 11. Hérode Agrippa y est frappé dela main de Dieu. Act., xii, 19-24. C’est de Césarée quePaul, obligé de quitter Jérusalem pour sauver sa vie, estdirigé sur Tarse. Act., IX, 30. C’est à Césarée qu’il débarqueà son retour de Grèce. Act., xviii, 22. Plus tard, ily revient encore après son troisième voyage apostolique, Act., xxi, 8, et il y descend chez le diacre Philippe, qui
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157. — Plan de Césarée du bord de la nie.-.
y habitait avec ses quatre filles les prophétesses. De là, malgré les prédictions d’Agabus et les supplications desfidèles, il monte à Jérusalem. Act., xxi, S- 16. C’est àCésarée enfin qu’il est conduit prisonnier, pour êtredirigé, après un séjour de deux ans dans cette ville, Act., xxm, 23-33; xxv, 1, i, 6, 13, sur Rome, où il a demandéd’être jugé par César. Act., xxv, 11-12. Ces grands souvenirsde l’époque apostolique ne contribuèrent pas médiocrementà faire de l’Église de Césarée une des plus illustresde Palestine. La population, moitié juive, moitié syrienne, y était fort remuante, et les deux races en vinrent plusd’une fois à de sanglants combats. Le dernier mot demeuraaux Syriens, qui d’abord par l’influence de Burrhusfirent retirer aux Juifs de Césarée le droit de cité, etensuite, à l’instigation de Florus, finirent par les massacreren masse, ce qui provoqua la guerre désastreuse oùsombra définitivement la nationalité juive. La prépondérancede l’élément gréco-syrien sur l’élément juif fut sansdoute une des causes du développement rapide de l’Églisede Césarée. Les chrétiens y apparaissent de bonne heuretrès nombreux et les évêques puissants. Un concile s’ytient, à propos de la Pàque, dès la fin du IIe siècle. Versle commencement du me, Origène s’y réfugie, et il ypoursuit, sous le patronage de l’évêque, ses travaux dethéologie et d’exégèse. Au commencement du ive, Eusèbe, le premier historien de l’Église et le premier géographede Palestine, y est archevêque. Après cela, comment sefaitil que Césarée, un des sites les plus vénérables dePalestine, ait été jusqu’à ce jour l’un des moins visités?C’est probablement parce qu’il n’est pas sur la route ordi
naire des pèlerins, et qu’on n’y arrive ni sans fatigue nisans danger.
C’est au mois d’avril 1894, qu’avec M. Vigouroux, nousnous sommes rendus à Kaïssariyéh. Le récit des Actes, X, 30, constatant qu’il fallut aux émissaires de Corneillequatre jours pour aller de Césarée à Joppé et ramenerPierre, est parfaitement exact. Il y a, en effet, un grandjour et demi de marche entre ces deux villes. C’est letemps que nous y avons mis nous-mêmes. Partis de Jaffaà six heures du matin, et ayant couché en rase campagne, faute d’asile, au delà de Kakoun, nous sommesarrivés à Césarée le lendemain à trois heures du soir, àpeu près comme Pierre et son escorte. Après avoir franchi,
quement à Paul sa captivité prochaine, et où il est possibleque saint Luc ait recueilli des documents pour écrireson Évangile, nous nous dirigeons vers le point centralde l’antique cité, occupé plus tard par la ville des croisés, et aujourd’hui par quelques maisons couvertes detuiles rouges, indice ordinaire de quelque colonie européennetransplantée dans le pays. Ce sont, en effet, desBosniaques qui ont été autorisés par le sultan de Constantinopleà s’établir sur les ruines de Césarée, en 1884.Ces braves gens ont conservé le fond de droiture et debonté qui distingue les races d’Europe des races de l’Orient.Un grand mur, jadis muni de nombreuses tours, aujourd’hui absolument ruiné, marque le parallélogramme
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136. — liJiULa u. i.i luui du Césarée. Serai actuel. Tue du nord. D’après un. Hi’U'-, r i.i.’li_.
non sans peine, une série de ruisseaux formant de détestablesmarécages, nous avons abordé les grandes dunesde sable qui montent graduellement vers l’ouest. Qnatteint Césarée par une sorte de chemin élevé en formede chaussée, et que les pierres des édifices ruinés rendentimpraticable. Le pourtour de l’antique cité se déroule aussitôt, parfaitement reconnaissable aux décombres qui y sontamonceléssur un espace desixkilomètresenviron(fig. 157).De vastes carrés dont on a en partie enlevé les pierres, mais que des pans de murs délimitent encore, sont ensemencésd’orge ou de blé. À notre gauche, en marchantvers la mer, on voit les restes d’un cirque, au milieuduquel se dressent encore quelques pierres marquant laspina. Un superbe obélisque de quinze mi.res de longgît à terre. Il n’; pas d’inscription. On l’a scié en plusieursfragments sans parvenir à l’enlever, tant les blocssont considérables.
En continuant notre route à travers ces ruines où ilest impossible de reconnaître les rues droites dont parleJosèphe, foulant peut-être aux pieds la maison de Philippeet de ses filles, là où Agabus prophétisa symboliqui enferma la ville de saint Louis. Celle-ci n’a en réalitéaucun rapport avec la géographie biblique. Disons mêmeque comme architecture elle offre peu d’intérêt, quandon a visité Athlit; mais c’est dans son enceinte qu’il fautpeut-être chercher plusieurs sites indiqués dans l’histoireapostolique.
Trois points y sont en saillie, un au nord, l’autre ausud, et le troisième vers le couchant au milieu des flots.Le premier est actuellement couvert par les habitationsdes Bosniaques. Ces habitations modernes reposent à peuprès toutes sur des substructions antiques et de fort belappareil. Il est impossible de rien reconstituer à traverscet amalgame de maisons, bâties sans ordre, çà et là; mais la position particulièrement pittoresque comme pointde vue, excellente comme salubrité, enfin naturellementindiquée par son élévation pour servir d’assiette à undes édifices de la ville, nous porterait à croire que là futpeut-être le palais d’Hérode, devenu plus tard la maisondes procurateurs romains. Si cette hypothèse était fondée, il ne serait pas impossible que les caves voûtées, aujourd’huiremplies de sable, mais jadis dépendances d’une
construction monumentale dont elles supportent encoreles premières assises, n’eussent servi de prison à saintPaul. Act., xxiii, 35. Dans une des salles de ce palaisauraient été subis les fameux interrogatoires où l’Apôtreétonna ses juges par l’énergie de son caractère et la vivacitéde sa foi. On comprend que de la terrasse couronnantl’édifice situé sur cette hauteur (év-jvv^ù 5(d|utT?&>), Ajjrippa mourant put voir le peuple prosterné dans lesrues de la ville et demandant au ciel de sauver son roi.Josèphe, Ant. jud., XIX, viii, 2. Vis-à-vis de cet exhaussementde terrain et vers le sud, il s’en trouve un autre
tout temps supporter un château fort. Aujourd’hui elleest encore occupée par le serai, où les représentants del’autorité turque, derrière des volets bleus, fument tranquillementleurs narghilés au bruit monotone des vagues(fig. 158 et 159). L’aspect du vieux port, entièrement ruiné, est des plus pittoresques. D’énormes blocs de pierre et desdents de rocher, ayant jadis supporté des constructionsimportantes, dressent encore çà et là leurs têtes superbesau milieu des flots qui les heurtent en lançant au cielde longs flocons d’écume. D’innombrables colonnes sontcouchées dans les eaux transparentes. On dirait même
Le serai de Césarée. Vue du and. D’après une photographie.
couvert par les ruines, d’une vieille église. La partieinférieure de trois absides serai - circulaires est encoredebout, et les contreforts de la façade occidentale ontrésisté à l’injure du temps. Une crypte de bel appareils’étendait sous l’édifice, qui mesurait vingt-quatre mètresde long sur neuf de large. L’église détruite que nousvoyons peut bien n’avoir été que l’œuvre des croisés, mais ceux-ci l’avaient sûrement bâtie sur un sanctuaireplus ancien, et ce sanctuaire lui-même marquait très probablementla place du fameux temple d’Auguste, qui, d’après Josèphe, était sur un point élevé (iiù y^^ôiyo’j, Bell. jud., i, xxi, 7; xoXojvô; ti; , Ant. jud., XV, ix, 6)et s’offrait à l’admiration des navigateurs dès qu’ils entraientdans le port. Nous ne faisons pas ici une suppositionabsolument gratuite. Guillaume de Tyr l’autorisedans un passage où il raconte l’horrible massacre dontse rendirent coupables, en 1101, les soldats de Baudouin.Guill. de Tyr, x, 16, t. CCI, col. 469. Là fut sans doute lacathédrale où, sinon Origène, du moins Eusèbe prêcha.Enfin la troisième éminence est celle qui s’avance dansla mer, formant l’abri méridional du port. Elle a dû de
qu’une partie a été jetée bas par un vaste mouvement deterrain et sous une impulsion uniforme. C’est sans doutela colonnade qu’Hérode avait fait élever sur les quais. Ellerappelle celle dont ce prince avait embelli Samarie. Lesfûts y sont à peu près de la même dimension et du mêmegranit gris. Un tremblement de terre a dû renverser toutcela d’un seul coup. Du môle antique il reste à peine lessoubassements et en quelques endroits seulement. La partiesupérieure, refaite par les croisés, a été presque toutereprise avec de vieux matériaux. Des fûts de colonnes degranit rose et de marbre, provenant des grands édifices del’ancienne cité, y sont engagés avec assez d’art. Ils formentsaillie pour briser les vagues. Quelques pavés de mosaïque, vers l’extrémité occidentale, remontent peut-être au tempsd’Hérode. La conformation du rocher sur ce point laissecroire que dès l’origine on dut établir là un château fort, ou une tour dans le genre de l’Antonia à Jérusalem, peut-être cette Drusia dont parle Josèphe, substituée àla tour de Straton. Si cette hypothèse, très vraisemblabled’ailleurs, était fondée, on serait autorisé à croire que làhabita le centurion Corneille, et que, sur cette roche où
des débris de mosaïque marquent encore la place desConstructions romaines, se passa la scène si touchante desa conversion et du baptême administré par Pierre àl’honnête officier et à toute sa famille.
En remontant vers la jetée du nord, que nous trouvons’complètement ruinée, mais où l’on voit encore, couchéessous 1 eau, les colonnes qui la transformaient en un longportique, on retrouve des dalles qui marquent la directiondes anciens quais. Elles ont vu très certainementarriver et partir Paul, ainsi que la plupart des personnagesles plus célèbres de l’âge apostolique. Près de ces
le récit de Josèphe, le roi étant au milieu de la scènesur le berna qu’on y avait dressé, recevait en plein, versles neut heures du matin, les rayons du soleil sur leslames d’argent dont il avait orné ses vêtements, pour fairecroire à une transfiguration préludant à son apothéose. Latopographie confirme ici le dire de l’historien. Des gradinsdu théâtre il ne reste plus rien. Quelques fragments d’arceauxémergent encore vers le sommet. Le mur du sudest en partie debout. La cavea, taillée entièrement dansle tuf, est exactement conservée. Elle mesure cent mètresde pourtour à la partie haute. À l’endroit de la scène
ICO. — Ruines des remparts de Césarée. D’après une photographie.
dalles sont amoncelées des pierres d’assez bel appareil, que les barques, à la saison où les vents sont favorables, viennent charger pour les transporter soit à Jaffa, soit àCaïpha et jusqu’à Saint-Jean-d’Acre. On les extrait journellementdes ruines de la vieille ville, et on les vend, d’après ce que nous dit le bachi-bouzouk surveillant cetteexportation, un medjidié le cent, soit moins de quatrecentimes l’une.
Il reste encore de la ville d’Hérode une partie deségouts, quelques arceaux d’aqueducs ensevelis sous lesable abordant la ville au nord, et enfin le théâtre. Celuiciest un des sites les plus authentiques et les plus intéressantsque les voyageurs trouvent en Palestine. C’esten grande partie pour le voir que nous avons entreprisle voyage de Césarée. On sait que Josèphe, Ant. jud., XIX, viii, 2, complétant le récit des Actes, xii, 19-23, raconte que la fameuse scène où Hérode Agrippa voulutse faire acclamer dieu par les Tyriens et les Phéniciens, venus en ambassade pour demander la paix, se passa authéâtre de Césarée. C’est là que la colère du ciel frappamortellement le prince insensé et sacrilège. Le théâtreétait orienté du levant au couchant, en sorte que, selon
gisent encore des restes de colonnes en granit rose. Cesvieux débris ont entendu un peuple d’adulateurs crierà un des rois les plus corrompus que mentionne l’histoire: «Ce n’est pas un homme qui parle, c’est un dieu! Hérode Agrippa, fais-nous grâce; si jusqu’à cette heurenous ne t’avons respecté que comme un homme, désormaisnous te traiterons comme un dieu! i> Cinq joursaprès, le faux dieu, frappé par une main invisible maisjuste, mourait dévoré par les vers. Comme point de vue, le théâtre était heureusement situé. Par-dessus la scèneles spectateurs voyaient à droite le môle avec ses toursde défense, plus près les belles maisons, régulièrementdisposées le long du rivage, autour de l’anse méridionalequi servait peut-être de refuge aux plus petites embarcations; en face, une bulte que couronnait sans doutequelque splendide monument; et au loin les flots de lamer bleue perpétuellement sillonnés de longues et capricieusestraînées d’écume. Il est surprenant que le bruitassourdissant des vagues n’ait pas été un dérangement pourles acteurs. C’est dans ce même théâtre qu’Agrippa donnaà un casuiste juif, le rabbi Simon, rigoriste qui blâmaitpubliquement la facilité sceptique avec laquelle le roi
allait du temple de Jéhovah au théâtre des Gentils, unepiquante et spirituelle leçon. Ant. jud., XIX, vii, 4. Voirl’Œuvre des Apôtres, t. i, p. 301.
De l’amphithéâtre, que Josèphe place au sud du port, ayant vue sur la mer, et par conséquent dans la directiondu théâtre, il ne nous a été possible de rien retrouver. Unvaste enfoncement au nord-est de la colline même duthéâtre se dessine bien en ovale et aurait certainementcontenu la multitude de spectateurs dont parle l’historienjuif, mais de cet enfoncement on ne peut voir la mer.Peut-être l’amphithéâtre ne fut-il que le cirque en ruinesdont nous avons déjà parlé; seulement il n’aurait pas étéau sud du port. Titus condamna deux mille cinq centsJuifs, les uns à s’y entre-tuer comme de vils gladiateurs, les autres à y être dévorés par des bêtes fauves, ou mêmeà être brûlés vifs. Il fêta ainsi sa victoire et la ruine deJérusalem. — Voir A. Prokereh, Reise ins heilige Land, in-12, Vienne, 1831, p. 28-34; Wilson, Lands of iheBible, 1847, t. ii, p. 250-253; R. Traill, The JewishWar of FI. Josephus, in-8°, Londres, 1851, p. xlix; Y. Guérin, Samarie, t. ii, p. 321 et suiv.; Discoveries atCœsarea, dans le Palestine Exploration Fund, QuarterlyStatement, 1888, p. 134-138; Id., The Surveyof Western Palestine, Memoirs, t. ii, 1882, p. 13-39.
E. Le Camus.
- CÉSÉLETHTHABOR##
CÉSÉLETHTHABOR, nom, dans Josué, xix, 12, dela ville qui est appelée par abréviation Casaloth dansJosué, xix, 18. Voir Casaloth.
- CÉSIL##
CÉSIL, forme défectueuse du nom de la ville de Béthul, dans Josué, xv, 30. Voir Béthul.
- CÉSION##
CÉSION, nom, dans Josué, xix, 20, et xxi, 28, de laville d’Issachar, donnée aux Lévites. Elle est appeléeCédés dans I Par., vi, 72. Voir Cédés 3.
- CÉTACÉS##
CÉTACÉS, mammifères pisciformes, dont le corpssouvent gigantesque est conformé pour la vie au sein desmers. Ces animaux n’ont pas de membres postérieurs; leurs membres thoraciques sont transformés en nageoires.Leur queue diffère de celle des poissons en ce qu’elle estdisposée horizontalement, au lieu d’étendre son éventaildans l’axe de l’épine dorsale. Les cétacés vivent dansl’eau, d’où ils ne sortent jamais. N’ayant pas de branchies, comme les poissons, pour absorber l’air contenudans l’eau, ils sont obligés de remonter de temps entemps à la surface afin de respirer l’air libre, à la manièredes autres mammifères. Ils remontent égalementpour allaiter leurs petits. La plupart des cétacés se nourrissentde substances animales, petits poissons, mollusques, crustacés, etc.; pourtant quelques espèces sontherbivores. Les premiers se divisent en cétodontes, oucétacés pourvus de dents, parmi lesquels on range lecachalot, le dauphin, le marsouin, etc., et en mysticètes, chez lesquels les dents sont remplacées par des fanons, sortes de lames cornées qui permettent à ces animaux defaire de leur bouche une véritable nasse pour retenirleur proie avant de l’engloutir. La principale espèce demysticètes est la baleine. Une conformation spéciale desnarines empêche l’eau de s’introduire dans les voiesaériennes des cétacés. Plusieurs espèces sont pourvuesà l’arrière - bouche de trous ou évents par lesquels l’eauengloutie est rejetée avec force au dehors. Parmi lescétacés herbivores ou sirénides, on compte le dugong, lelamantin, etc. — La Bible ne parle des cétacés que d’unemanière générale, sous la dénomination de tannin, Gen., I, 21 (Septante: -/.r,-r t; Vulgate: cete]; Job, vii, 12 (Septante: Spxxuv; Vulgate: cetus); Ps. cxlviii, 7 (Septante: Spixovre; ; Vulgate: draccnes), et de v.r, -^ ( Vulgate: eete). Dan., iii, 79; ilatth., xii, 40. Tannin désigne enhébreu tous les grands animaux qui rampent ou nagent.Il est certain que les Israélites ont pu parfois apercevoirdes cétacés vivants ou en trouver d’échoués sur le rivage
de la Méditerranée. Voir Baleine, Cachalot. Dans lamer Rouge, ils ont connu le dugong, que l’on croitêtre le tahaS hébreu. Exod., xxv, 5, etc. Voir Dugong.
H. Lesêtre.
- CETEEN##
CETEEN (grec: Kltiewv). Dans I Mach., viii, 5, Persée, roi de Macédoine, est appelé roi des Cétéens, c’est-à-diredes Grecs. Cf. I Mach., i, 1. Voir Céthim, col. 471.
CÉTHÉEN. Ézéchiel, xvi, 3, 45, pour reprocher àJérusalem ses infidélités, lui dit que son père est unAmorrhéen et sa mère une Héthéenne. Dans cet endroit, la Vulgate écrit Cethœa, «Céthéenne,» quoique partoutailleurs elle rende l’hébreu Hittîm par Hethsei, «Héthéens.» Voir Héthéen.
CÉTHIM. Hébreu: Kiffitn, Gen., x, 4; Num., xxiv, 24; Is., xxiii, 1; I Par., i, 7; Kiffiim, Is., xxiii, 12; Jer., ii, 10; Ezech., xxvii, 6; — grec: Kiytioi, Gen., x, 4; Kf-riot, I Par., i, 7; Dan., xi, 30; Kmaïoi, Is., xxiii, 1; KiTTiaîot, Num., xxiv, 24; XETTisfjj., Jer., ii, 10; I Mach., i, 1; Ketiei’fi, Ezech., xxvii, 6; Ki-rctet; , I Mach., viii, 5;
— Vulgate: Cethim, Gen., x, 4; I Par., i, 7; Is., xxiii, 1et 12; Jer., ii, 10; I Mach., i, 18; Italia, Num., xxiv, 24; Ezech., xxvii, 6; Romani, Dan., xi, 30; Cetei, I Mach., vin, 5. Nom d’un fils de Javan et nom de pays.
1. CÉTHIM, fils de Javan. Gen., x, 4; I Par., i, 7.Les habitants de l’île de Chypre portèrent son nom, quiest peut-être d’ailleurs un simple nom ethnique, car ila la forme plurielle. Voir Céthim 2.
2. CÉTHIM, nom de lieu, donné par l’Écriture à l’îlede Chypre, et par extension aux pays situés à l’ouest dela Palestine.
I. CÉTHIM DÉSIGNANT L’ÎLE DE CHYPRE. — Céthim est
un des iils de Javan. Gen., x, 4; I Par., i, 7. Ainsi quenous le verrons plus loin, le même mot désigne dans laBible l’île de Chypre. D’après le texte sacré, l’île de Chyprea donc été peuplée par des descendants de Javan, c’est-à-direpar des peuplades grecques; car Javan est dansl’Écriture le père des Ioniens, c’est-à-dire des Grecs. VoirJavan. C’est pourquoi les Septante traduisent Kittini parKr|Tioi ou Kréioi dans ces deux endroits. Josèphe indiquenettement la tradition juive sur ce point: «Chethim, dit-il, posséda l’île de Chethima, qui s’appelle aujourd’huiCypre.» Ant. jud., i, vi, 1. Cf. S. Épiphane, Adv.hieres., i, 2, hœr. 25, t. xli, col. 448. Il n’y a du resteaucun doute sur cette identification, qui est admise partous les commentateurs.
Le nom de Céthim s’est particulièrement attaché àcelui de la ville de Cition. La parenté des deux noms estclairement démontrée par une inscription bilingue trouvéeà Athènes, et où un personnage du nom de Nouméniosest appelé en phénicien «homme de Iutti», et engrec xitieû; . Corpus Inscript, semit., n° 117. Cition étaitle grand entrepôt du commerce entre la Phénicie etChypre; il est donc naturel que les étrangers aient désignésous son nom, non seulement la population phénicienne, mais la population tout entière de l’île. L’île deChypre était, en effet, un pays où les races étaient extrêmementmélangées. Il y avait un grand nombre de colonsphéniciens, surtout dans les parties sud et sud-ouest del’île, celles où étaient situées les villes de Salamine, deCition, d’Amathonte, de Courion et de Paphos. Cicéronattribue en particulier l’origine de Cition aux Phéniciens.De finibus, iv, 20; Diog. Lært., vii, Zenon, 1. Mais lescolons grecs n’étaient pas moins nombreux dans l’île.Les traditions, qui se sont traduites par les généalogieshéroïques, attribuent la fondation de Salamine à l’AchéenTeucer; celle d’Aipéia, première position de la ville deSoloi, aux Théséides Démophon et Aeamas; celle de Courionà des colons argiens; enfin l’armée d’Agamemnon, en revenant de Troie, aurait occupé l’île tout entière.
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CETHIM
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Hérodote, v, 113; Théopompe, fragm. lil, Fragmentahistorié, grxc, édit. Mùller, t. i, p. 295; Strabon, xvi, 6, 3; Phitarque, Solon, 26; Pausanias, vii, 5, 2. Hérodote, vu, 90, en parlant de Chypre, dit que les peupladesqui habitent cette île sont originaires les unesde diverses villes grecques, les autres de Phénicie etles autres d’Ethiopie, et il invoque sur ce point le témoignagedes Cypriotes eux-mêmes. Servius, dans son commentairede Virgile, parle de la venue à Chypre des troisfrères Épivios, Astérius et Yon, et appelle un de leursfils Cetes. Servius, Ad Virgil. Eclog., x, 8. La même traditionse retrouve dans le scholiaste de Denys le Périégète, au vers 509. Parmi les populations d’origine grecque, les unes sont venues postérieurement à la conquête phénicienne, les autres ont probablement précédé les Phéniciens. «Que l’on fasse remonter la première immigrationà des Grecs d’Europe ou bien à des éléments demême race attardés en Asie, dit M. Heuzey, l’ensemblede ces traditions n’en forme pas moins un témoignagehistorique dont on a trop diminué la valeur.» Cataloguedes figurines antiques de terre cuite du musée du Louvre, in-12, Paris, 1882, t. i, p. 115. Le même auteur ajouteque les traditions grecques admettaient la première occupationde l’Ile par une population asiatique. Le nom légendairequi personnifie ces Asiatiques était celui du roiCinyras, célèbre par ses merveilleuses inventions. Théopompe, fragm. 111, Fragmenta hist. grœc, édit. Mùller, t. i, p. 295; Homère, Iliad., xi, 20; Pline, H. N., vii, 57, 4. Mais cette population asiatique elle-même qu’était-elle?Cinyras est, d’après les traditions grecques, filsd’Apollon, Smyrne est une de ses tilles. Pindare, Pyth., Il, 26; Tacite et Apollodore le font venir de Cilicie. Tacite, loc. cit.; Apollodore, iii, 14, 3. D’après d’autres traditions, il promet d’assister Agamemnon au siège de Troie, et estpuni par Apollon parce qu’il manque à sa parole. Homère, Iliad., xi, 20, et les notes d’Eustathe à ce passage. Parsuite de la difficulté où l’on est de tirer au clair ces légendesde provenances diverses, des hypothèses dénatureopposée ont été émises par les historiens sur les originesdes populations grecques de File. Les uns, commeE. Meyer, Geschichte des Allerthums, 2 in-8o, Stuttgart, 1885-1893, t. ii, § 79, p. 125, pensent que ces populationsvinrent d’Occident. D’autres, au contraire, comme E. Curtiuset A. Holm, croient qu’elles vinrent d’Asie Mineure.Ce sont les populations qui portent chez les Grecs le nomd’Ioniens, de Cariens ou de Lëlèges; à’Iouna ou Iaounachez les Perses, d’Ouni chez les Égyptiens, de Yavandans la Bible, qui du littoral de l’Asie Mineure se répandirentsur les îles. E. Curtius, Ionier von der ionischenWanderwng, in-8o, 1855, p. 6; Id., Histoire grecque, trad. franc., 1880, t. i, p. 53-59; A. Holm, GriechischeGeschichte, Berlin, 1886, t. i, ch. vii, . note 12, p. 93; trad.angl. revue par l’auteur, 1894, p. 74. Comme ces Grecsétaient établis au milieu de colonies de Phéniciens, onput appliquer souvent aux héros fondateurs de villes età ceux qui les accompagnaient le nom de Phéniciens. Delà est née la confusion qu’on constate dans les légendesgrecques. E. Curtius, Histoire grecque, trad. franc., t. i, p. 57; E. Renan, Histoire générale des langues sémitiques, ¥ édit., 1864, t. i, p. 44-49.
Parmi les découvertes récentes qui démontrent l’importanceet l’antiquité de la population préhellénique, c’est-à-dire des descendants de.Tavan établis dans l’îlede Chypre, il faut signaler celle des inscriptions et dudialecte cypriotes. «À côté des inscriptions grecques etphéniciennes, les voyageurs, dit M. Heuzey, ont signalésur les monuments et les monnaies l’existence d’uneécriture d’un type particulier. Ces traits compliqués, analoguesà ceux des écritures cunéiformes et de certainesletlres de l’alphabet lycien, conservaient sans doutequelques restes de l’ancienne langue cypriote, que lesorientalistes supposaient volontiers être un idiome asiatique.Un savant anglais, M. G. Smith, est parvenu à
établir le premier, par l’étude des inscriptions bilingues, que cette langue n’était autre chose qu’un dialecte grecd’une forme antique et rude, ce qui ne permet pas dedouter que le fond de la population ne fût aussi en grandepartie et très anciennement de race grecque.» Heuzey, Catalogue des figurines antiques de terre cuite du musétdu Louvre, t. i, p. 113. Cet alphabet paraît originaired’Asie Mineure et semble avoir précédé de plusieurssiècles celui de l’alphabet phénicien. On a retrouvé dansles ruines d’Hissarlik de courtes inscriptions écrites avecles mêmes caractères et. certainement de beaucoup antérieuresaux plus anciennes inscriptions cypriotes connues.G. Perrot, Histoire de l’art dans l’antiquité, t. iii, 1885, p. 496; H. Sehliemann, Ilios, trad. franc., 1885, p. 901-917.Un exemple montrera la nature des caractères et du dialectecypriotes. C’est une inscription bilingue en phénicienet en cypriote. Le texte phénicien est ainsi conçu:
i fv tfW^m www» f
Au jour xvi du mois de faalot, en l’annéexvil… du roi Melekyaton, roi de Citionet d’Idalion: c’est ici la statue qu’a donnée Absasam, fils de [Pala]s, à son seigneur Rescf Eléhitès; vœu qu’il avait fait, parce qu’il a entendusa voix. Qu’il le bénisse.
La seconde partie de l’inscription, à parlir des motsc’est ici, etc., est traduite en dialecte cypriote; en voicile texte:
a-ti-ri-a-se o-nu to-ne-to
ke-ne a-pa-sa-ino-se o sama-fo-se to-i a-po-lo-ni to-i
a-la-hi-o-ta-i in tu--/_a-i’A(v)S’jîià; o ïiv j’Swxsv’A4*i<7<Jû(j19; à —i[A3cFo; TCÎH’AftÔAOlVl TCOt’A'/.z.tïi’.0Ll.’Iv T’J/ït
Philippe Berger, Histoire de l’écriture, 1891, p. 86; Comptes rendus de l’Académie des inscriptions, 1887, p. 187 -201. «Il est très curieux, dit M. Heuzey, de voir ces Grecs de Chypre, malgré la supériorité de l’alphabetphénicien, qui s’était imposé aux autres Grecs, resterattachés jusque sous la domination perse à une écritureà part, originaire aussi sans doute de l’Asie, mais dontle système primitif conservait une valeur syllaWque auxcaractères et, par l’absence de consonnes douces ou aspirées, ne s’adaptait que très imparfaitement à la prononciationde leur langue. Rien que ce fait suffirait à prouverque, doués d’un certain esprit d’isolement et d’indépendance, ils s’étaient laissé entamer moins complètementqu’on ne le croyait par l’ascendant des Phéniciens auxquelsils étaient mêlés, et qui occupaient de longue dateplusieurs positions importantes sur les côtes de l’île.» L. Heuzey, Catalogue des figurines antiques de terrecuite du musée du Louvre, 1. 1, p. 114. L’écriture cyprioteest celle des aborigènes, antérieurs à la venue des colonsphéniciens et des colons grecs de la seconde émigration, c’est-à-dire d’une des populations préhelléniques que lesanciens ont confondues sous le nom de Pélasges. La languede ces inscriptions est le dialecte éolien, avec des formesgrammaticales se rapprochant beaucoup de l’arcadien.Philippe Berger, Histoire de l’écriture dans l’antiquité, 1891, p. 85-69 et 111-113; Transactions of the Society ofBiblical archseology, mémoires de MM. Hamilton Lang, G. Smith et S. Birch, t. i, 1872, p. 116-128, 129-144, 145-172; Journal des savants, articles de M. MichelBréal, août et septembre 1877, p. 503 et 551; G. Perrot, Histoire de l’art dans l’antiquité, t. iii, p. 497. On acherché l’origine de cette écriture dans le système cunéiformeet dans le système héthéen; mais jusqu’à présenton en est encore réduit à des conjectures. P. Berger, ouvr. cit., p. 88 et 112; W. Deecke, Der Ursprung desKyprischen Sylbenschrift, in-8°, Strasbourg, 1877; jBessenberger’sBeitràge zur Kunde der Indogerm. Sprachen, t. IX, 1884, p. 250 et 251; W. Wright, The Empireof the Hittites, 2e édit, in-8°, Londres, 1866, p. 177-198.On peut dire, en tout cas, que de la ressemblance desalphabets il ne faut pas conclure à l’identité d’originedes deux peuples, et que, dans l’état actuel de la science, l’assimilation entre les Kittim et les Héthéens n’est aucunementprouvée. E. Schrader, Keilinschriften und Geschiehtsforschung, 1878, p. 236.
Le nom de Cition, Kathian, figure, au XIIIe siècle avantJ.-C, dans la liste des villes de Chypre soumises parRamsès III. J. Dûmichen, Historische Inschriften altàgyptischerDenkmàler, dans le Recueil de monumentségyptiens de H. Brugsch et J. Dûmichen, 5e partie, Leipzig, 1885, pi. xii; S. Birch, Records of the Past, t. VI, p. 17. Au contraire, le nom de ses rois ne figure pas dansla liste des rois’de Chypre soumis à Assaraddon. Le paysavait été cependant conquis par Sargon, qui éleva en souvenirde sa victoire un monument que l’on a retrouvé àLarnaca, sur l’emplacement même où se trouvait Cition, et qui est conservé aujourd’hui au musée de Berlin.Menant, Annales des rois d’Assyrie, p. 208 et 249; Halévy, dans la Revue des études juives, t. ii, 1881, p. 2-6, 12-14; cf. Oppert, inscription des Taureaux deKhorsabad, 1. 36, dans Botta, Monuments de Ninive.Inscr., pi. xii; E. Schrader, Keilinschriften und Geschichtsforschung, p. 243. Cette absence s’explique par unfait que rapporte l’historien Ménandre, cité par Josèphe, Ant. jud., IX, xiv, 12; cf. VIII, v, 3, et Contr. Apion., i, 18. Les habitants de Cition étaient alors soumis auroi de Tyr, il n’y avait donc pas à cette époque de roisindépendants à Cition. E. Schrader, Die Keilinschriftenund Geschichtsforchung, p. 80 et 245; F. Lenormant, Les origines de l’histoire, t. ii, 2e partie, 1884, p. 49.Par la suite, Cition eut des rois indépendants, et leursnoms figurent dans les inscriptions phéniciennes à côtéde celui des rois d’Idalie. Ces rois ont tous des noms phéniciens.Corpus Inscriptionum semilic., n os 10, II, 13, 14, 16, 89, 90, 91, 92. Parfois cependant Cition et Tyr setrouvèrent de nouveau réunies sous un seul roi, qui porte
le nom de roi de Cition et de Tyr. C’est le titre qui estmentionné sur certaines monnaies du Ve siècle à légendephénicienne. De Luynes, Essai sur la numismatique dessatrapies, 1846, p. 72, 82, 83, pi. xm et xiv; Six, Du classementdes monnaies cypriotes, 1883, p. 256. Au tempsdes Ptolémées, nous voyons mentionnée une ère particulière, dite ère des Ciliens. Corpus Inscr. Semilic, t. r, part, i, n os 93, 94. Cf. Revue archéologique, 1874, l re part., p. 90.
Le mot Kittim désigne l’île de Chypre dans le passaged’Isaïe où le prophète annonce les malheurs qui sévirontsur Tyr. Is., xXm, 1. (Septante: Kmaïoi; Vulgate: Céthim.) Les navires marchands qui reviennent de Tharsisapprennent par les habitants de Céthim que la flotte aété détruite. Un peu plus loin, le même prophète inviteles Sidoniens à se réfugier à Céthim. Is., xxiii, 12. (Septante: KiTieîs; Vulgate: Céthim.) Ce texte trouve soncommentaire dans l’inscription de Sennachérib sur lestaureaux de Koyoundjick, 1. 18-19. Cuneiform Inscriptionsof the Western Asia, t. iii, pi. 12; cf. t. i, pi. 43.
II. Céthim désignant les pays de l’Occident. — Dansd’autres passages, le mot Kittim désigne par extensionles îles de la Méditerranée en général et même tous lespays d’Occident. Quand Balaam, Num., xxiv, 24, annonceles défaites des Assyriens et des Hébreux, il dit que desnavires viendront deKittim (Septante; Kitraïoi; Vulgate: ltalia). Ce mot désigne d’une manière générale les paysd’Occident. D’après F. Lenormant, cette prophétie s’appliqueraità des événements du règne de Nabuchodonûsor, qui sont racontés par les historiens et mentionnésdans les inscriptions. Hérodote, II, 161; Diodore de Sicile, i, 68; Josèphe, Ant. jud., X, ix, 7; Zeitschrift fur àgyptischeSpràche, S~8, p. 87-89; 1879, p. 45; Transactionsof the Society of Biblical Archseology, t. vii, p. 210-225; F. Lenormant, Les origines de l’histoire, t. ii, 2e part., p. 63. Jérémie, ii, 10, quand il demande aux Juifs dejeter les yeux à l’occident et à l’orient, pour constater queles nations n’ont point abandonné leurs dieux, qui cependantsont de faux dieux, désigne l’occident sous le nomd’îles de Kittim (Septante: vf, <j-ot XiTTcei^; Vulgate: insulseCéthim). De même dans Ézéchiel, xxvii, 6, le pays desKittim (Septante: vyjtoi twv Xetie£(i; Vulgate: insulseItalise) est celui où les Tyriens prennent le buis dontils se servent pour leurs navires. Il s’agit ici du buis provenantdes îles et des pays occidentaux en général. Ily avait cependant à Chypre des bois précieux, notammentdu buis, qui servait à l’ornementation des naviresphéniciens, ce qui pourrait donnera penser que l’île estparticulièrement désignée dans ce passage du prophète.
La même extension est donnée au mot Kittim dansDaniel, xr, 30. (Septante: Kîtioi; Vulgate: trières et Romani.) Dans ce passage, le prophète annonce la défaitedu roi du Nord, c’est-à-dire d’Antiochus IV Épiphane.Le roi de Syrie fut, en effet, battu par Ptolémée Philométor, soutenu par les Romains. Popilius Lenas vint ausecours du roi d’Egypte avec une flotte et obligea Antiochusà rentrer dans ses États au moment où il allaits’emparer d’Alexandrie. Polybe, xxix, 11; Appien, Syriaca, 66; Tite Live, xiv, 11-13. Il est donc naturel detraduire ou plutôt de commenter comme saint Jérôme: .trières et Romani. Ce Père ne faisait, du reste, que suivreici l’interprétation des Juifs. Le Targum de Jérusalemtraduit, en effet, le mot Kittim par Italie dans Gen., x, 4, et I Par., i, 7. Dans Ézéchiel, xxvii, 6, là où saint Jérômfrtraduit par ltalia, le Targum traduit par Apulie. Cf. Hieronym.ad Jeremiam, I, 2, 10, t. xxiv, col. 690. Cette traditiona été recueillie par les Byzantins, G. Syncelle, édit.de Bonn, t. i, p. 49; Chronic. pascale, même édit., t. i, p. 47, et par les exégètes juifs du moyen âge. Il faut remarquercependant que d’après Polybe, xix, 11, et TiteLive, xlv, 13, la flotte romaine touche à Chypre. Le motKittim est donc exact, même si on l’entend strictementde l’île.
471
CÉTHIM
CETURA
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Enfin dans le livre des Machabées il est dit qu’Alexandre, roi de Macédoine, vient de la terre de Chettiim. I Mach., I, 1. (Grec: ex t?,; y^; X—tiîî’u; Vulgate: de terra Cethim.) Le mot Chettiim désigne ici la Grèce et plus spécialementla Macédoine. Cf. Épiphane, Adv. hœr., ii, 2, hær. 25, t. xli, col. 443. Quelques interprètes ont penséqu’il s’agissait de la Cilicie par laquelle passa Alexandre, parce que Ptolémée, v, 8, 6, désigne sous le nom de Cétisune région de la Cilicie. Cf. Numismatic chronicle, t. viii, p. 5. Mais cette supposition n’est pas vraisemblable. C’estdans le même sens que Persée est appelé roi des CétéensI Mach/, viii, 5. (Grec: Kittieïç; Vulgate: Cetei.) Quelquescommentateurs ont pensé que dans ces deux endroits ilétait fait allusion à la ville macédonienne de Citium, prèsde laquelle, selon Tite Live, xliii, 51, Persée passa enrevue son armée avant d’entrer en Thessalie; mais ilparaît plus probable qu’il s’agit ici, comme dans les autrespassages cités plus haut, tout simplement de l’occidentpris en général.
Bibliographie. — A. Knobel, Die Vôlkertafeln derGenesis, in-8o, Giessen, 1850, p. 95-104; W. H. Engel, Kypros, in-8o, Berlin, 1841, t. i, 1. I, ch. i, p. 11-13et 165-179; F. Lenormant, Les origines de l’histoire, in-8o, Paris, 1880-1884, t. ii, 2 «part., p. 48-86; L. Heuzey, Catalogue des figurines antiques de terre cuite du muséedu Louvre, in-18, Paris, 1882, t. i, p. 113-117; G. Perrot, Histoire de l’art dans l’antiquité, in-4o, Paris, 1885, t. iii, p. 490-506; P. Berger, Histoire de l’écriture dansl’antiquité, in-8o, Paris, 1891, p. 84-90 et 111-113.
E. Beurlier.
- CETHLIS##
CETHLIS ( hébreu: Kitlis; Septante: Maoc/w; ; Codex Alexandrinus: Xa8).û; ), ville de la tribu de Juda, mentionnée une seule fois dans l’Écriture. Jos., xv, 40.Elle fait partie du second groupe des cités «de la plaine» ou de la Séphéla, dans lequel on distingue Magdalgad(El-Medjdel), Lachis (Oumm Lâqis) et Églon (Khirbet’Adjlân). C’est dans ces parages qu’il faudrait la chercher; mais elle est restée jusqu’ici inconnue.
A. Legendre.
- CÉTRON##
CÉTRON (hébreu: Qitrôn; Septante: Kéôowv; CodexAlexandrinus: Xeêptiv), ville de la tribu de Zabulon, dont les Israélites ne détruisirent pas les habitants. Jud., 1, 30. Comme elle n’est pas mentionnée dans la liste deJosué, xix, 10-16, et qu’elle est citée ici avec Xaalol, dontle nom se trouve, Jos., xix, 15, précédé de celui de Cathed{Cateth dans certaines éditions de la Vulgate), on a voulul’assimiler à cette dernière localité, le changement pouvantd’ailleurs s’expliquer entre les deux mots hébreux, Qitrôn et Qattât. Cf. Keil, Josua, Leipzig, 1874, p. 153; F. de Hummelauer, Commentarius in libros Judicum etRuth, Paris, 1888, p. 53. C’est une simple conjecture, etl’argument ne paraît pas suffisant. Il peut en être deCétron comme d’Accho (SiintJean-d’Acre), dont il estquestion au verset suivant, 31, et dont Josué ne parlepas dans l’énumération des villes d’Aser. Jos., xix, 24-31.
— R. J. Sehvvarz, Das heilige Land, Francfort-sur-le-Main, 1852, p. 137, croit, d’après un passage du Talmud, que Cétron est Sippori, aujourd’hui Seffouriyéh, au nordde Nazareth. «Mais, dit A. Neubauer, La géographie duTalmud, Paris, 1868, p. 191, contre cette identificationon élève l’objection suivante (Talmud de Babylone, Meguillah, 6 et): La tradition rapporte que Zabulon se plaignaitde n’avoir reçu en partage que des montagnes etdes côtes, tandis que Nephthali possédait des vignes etdes champs fertiles. Si Qitrôn était Sippori, et par conséquentune ville des possessions de Zabulon, quel sujetde récriminations celui-ci aurait-il eu? les environs deSippori sont très fertiles à une distance de seize millescarrés, et il y coule du lait et du miel. Qitrôn est, eneffet, mentionné sous ce dernier nom dans le Midrasch(Bereschith rabba, ch. 8) comme ville natale d’un certainSiméon.» — Inutile aussi de penser à Tell Kurthaniou Kourdanéh pour Cétron comme pour Cathed (cf. Van
de Velde, Reise durch Syrien und Palâstina, Leipzig, 1855, t. i, p. 218); ce tell, situé au sud de Saint-Jeand’Acre, appartient à la tribu d’Aser. A. Legexdre.
- CETURA##
CETURA (hébreu: Qelûrâh; Septante: X—zoûpa), femme d’Abraham. Gen., xxv, 1. Le chaldéen a écritAgar au lieu de Cétura, et quelques auteurs ont cru, àla suite des rabbins, qu’il s’agit, Gen., xxv, 1, d’Agar, qu’Abraham aurait rappelée après la mort de Sara. Maiscette opinion ne saurait prévaloir contre le texte biblique, qui nomme expressément Agar et Cétura comme deuxpersonnes parfaitement distinctes. De plus, il parle aupluriel des «autres épouses secondaires» d’Abraham, Gen., xxv, 6, ce qui montre que, outre Agar, le patriarcheavait eu une autre femme de second rang comme elle; cette femme était Cétura, dont les six fils, les mêmes queceux de Gen., xxv, 2, sont énumérés I Par., i, 32, commedistincts de la postérité d’Ismaël, le fils d’Agar. Céturadevait être une Chananéenne.
Il n’est guère possible de déterminer si elle entra dansla famille d’Abraham avant ou après la mort de Sara.Cette mort arriva vers la cent trente-septième annéed’Abraham, Gen., xxiii, 1; cf. Gen., xvii, 17; il faudraitdonc, si le mariage avec Cétura a eu lieu après, dire, comme saint Augustin serait disposé à l’admettre, Cont.Julian., iii, 85, t. xiv, col. 1283, que Dieu avait conservéjusqu’alors au vieux patriarche une fécondité déjà regardéecomme merveilleuse alors qu’il était encore à peinecentenaire. Gen., xvii, 17; Rom., iv, 19; Hebr., xi, 12.Plusieurs ont révoqué en doute une telle prolongation decette sorte de rajeunissement, et ils veulent par conséquentqu’Abraham ait épousé Cétura du vivant de Sara.Ils font valoir à l’appui de leur sentiment une difficultéassez sérieuse que présente l’opinion contraire. Si l’onveut, disent-ils, que les événements se soient succédéen réalité dans l’ordre même où ils sont racontés, il faudradire qu’à l’époque où Abraham épousa Cétura, il avaitcent quarante ans, puisque son mariage est raconté aprèscelui d’Isaac, qui se maria à quarante ans et qui était nélorsque son père était âgé de cent ans. Gen., xvii, 17, comparé avec Gen., xxv, 20. Abraham n’aurait vécu ensuiteque trente-cinq ans, car il mourut à cent soixante-quinzeans. Dans ce court espace de temps, les six enfantsde Cétura se seraient tous établis et auraient tous étécapables de se suffire en pays étranger. Gen., xxv, 0.Dans un temps où les hommes se mariaient assez tard, Gen., xxv, 20, cela paraît difficile à admettre, surtout ence qui regarde les plus jeunes de ces fils. La difficulténe serait guère diminuée si l’on plaçait le dernier mariaged’Abraham trois ans plus tôt, c’est-à-dire immédiatementaprès la mort de Sara. Gen., xxiii, 1. Le seulmotif pour reculer l’union d’Abraham et de Cétura si loindans la vie du patriarche, c’est la place qu’elle occupedans le récit sacré. Mais on sait que souvent la Biblene s’astreint pas à raconter les événements dans l’ordrerigoureusement chronologique. Nous pouvons donc croirequ’il en a été ainsi dans cette partie de la Genèse.
Cétura donna à son mari six fils: Zamram, Jacsan, Madan, Madian, Jesboc et Sué (voir ces noms), qui devinrentla souche de divers peuples, dont les Madianitessont les plus connus. Avant de mourir, Abraham accomplitun acte de sage prévoyance en éloignant les fils deCétura de la terre de Chanaan, où Isaac, l’héritier despromesses divines, devait seul rester. Les enfants de Céturaet Ismaël reçurent de leur père «des présents», et allèrent, d’après ses ordres, demeurer vers l’orient, Gen., xxv, 6, c’est-à-dire dans la direction de l’Arabie, à l’est et au sudestde Gérare et de Bersabée; car c’est dans ces régionsqu’il passa la dernière partie de sa vie. Voir Calmet, Comment, littéral, Gen., xxv, 6, Paris, 1707, t. i, p. 515.Il assurait par là à la race choisie un isolement salutaireet mettait sa foi et ses mœurs à l’abri d’une corruptioninévitable. Établis en dehors de Chanaan, les des
cendants de Cétura et d’Agar ne songeraient pas à disputerplus tard à ceux d’Isaac la possession de la Terrequi avait été promise en héritage au seul fils d’Abrahamet de Sara. E. Palis.
- CHABERT Paul##
CHABERT Paul, jésuite français, né à Gardanne(Bouches-du-Rhône) le 18 juin 1812, mort au séminairede Romans le 80 juin 1880. Il entra chez les Jésuitesle 10 septembre 1836, fut d’abord appliqué au saintministère, puis devint vice-recteur du collège d’Oran, etenseigna ensuite plusieurs années l’hébreu, l’histoireecclésiastique, la théologie morale et l’Écriture Sainte augrand séminaire de Romans (diocèse de Valence). On a delui: Jésus-Christ dans les Psaumes offert à l’amour deschrétiens, ou les Psaumes traduits en français, avecdes explications allégoriques tirées de saint Augustinet des autres Pères et docteurs insérées dans le texte, Lyon, 1875, in-12. C. Sommervogel.
- CHABRI##
CHABRI (Septante: XaSpiç, Judith, viii, 9; x, 6; ’A6pî; , vi, 15; Codex Alexandrinus: X16p£t; ), anciendu peuple, auquel Judith se plaignit de ce qu’Ozias avaitpromis de rendre Béthulie dans cinq jours. Judith, viii, 9(Septante, viii, 10). Les Septante le nomment dans deuxautres endroits, vi, 15, et x, 6. Ils en font le fils de Golhoniel, Judith, vi, 15, et non seulement un des anciens, TipeaSuTÉpoi, mais un des trois chefs, ïpymiz; , de la villede Béthulie, vi, 11-15. Son nom manque dans la Vulgate, vi, 11, par suite probablement d’une lacune dans le texte, qui n’a conservé que le nom de son père Gothoniel ( voirCiiarmi 3), ainsi que x, 6, où il est compris parmi «lesanciens», mais sans que son nom soit exprimé.
E. Levesque.
- CHABUL##
CHABUL (TERRE DE) (hébreu: ’érés Kâbûl: Septante: "Opiov), nom donné par Hiram, roi de ïyr, auxvingt villes de Galilée qu’il avait reçues de Salomon enéchange de ses services pour la construction du templeet des palais royaux. III Reg., ix, 13. Quoi qu’en diseBochart, Chanaan, lib. ii, cap. iv, Cæn, 1646, p. 794, le contexte semble bien nous montrer ici une appellationironique. «Et Hiram vint de Tyr pourvoir ces villes queSaloinon lui avait données, mais elles ne lui plurent pas; et il dit: Sont-ce là, mon frère, les villes que vousm’avez données? Et il les appela terre de Chabul, [comme, elles s’appellent] encore aujourd’hui.» ꝟ. 12-13.Quelle est maintenant l’exacte signification de ce mot?On ne l’a pas encore trouvée. Parmi les hypothèses émisesjusqu’ici, il y en a de plus ou moins vraisemblables, comme il y en a d’absolument fantaisistes. Si nous consultonsles versions anciennes, nous trouvons l’expressionhébraïque conservée dans le Targum, la Vulgate etle syriaque, qui écrit Kabûlî; l’arabe traduit par «terred’épines». Le terme des Septante, "Opiov, «limite,» faitvoir qu’ils ont lu vdî, gebûl, au lieu de bws, Kâbûl.
Bochart, Chanaan, p. 794, admet cette interprétation, qu’il cherche à justifier par la permutation fréquente ducaph et du ghimel dans les langues sémitiques, et parla position du territoire de Chabul, qui formait la limitede la Galilée vers Ptolémaïde. On ne voit pas bien larelation de ce sens avec le contexte. Josèphe, Ant. jud., VIII, v, 8, appelle cette terre XaSotî.ùv, et, Cont. Apion., i, 17, Xccêoivwv, dénomination qui, d’après lui, signifie, dans la langue phénicienne, «ce qui ne plaît pas,» oùxàfêaxov. Nous ne savons si c’est une supposition qu’il afaite d’après le récit sacré, ou si le mot qu’il emploien’est autre chose que la transcription du phénicien p2u,
habâlôn, «corruption, inutilité.» Cf. J. Fùrst, Hebràischesund chaldâisches Handu’ôrterbuch, Leipzig, 1876, t. i, p. 571. — Saint Jérôme, parlant de ces villes dans sonCommentaire sur Amos, t. xxv, col. 999, les place enBasan, ce qui peut étonner de la part d’un docteur aussifamiliarisé avec l’histoire et la géographie bibliques; puis
il donne comme motif du refus d’Hiram «qu’elles étaientpleines d’herbe». Il semble donc décomposer Kâbûl enke, «comme,» et bûl, «récolte.» Cette opinion, quoiquesingulière, l’est encore moins que celle des auteurs juifs, Kimchi et d’autres, qui prétendent que la contrée futainsi appelée parce que le pied y enfonçait, y était commelié (nbn: : ) dans, la boue, ou y pénétrait dans le sablejusqu’au talon’( «’-as). — Parmi les modernes, un bonnombre voient dans Kâbûl uue contraction de b’zns,
ke-hâbûl, «comme ce qui s’évanouit, comme un rien;» cf. Gesenius, Thésaurus, p. 656; Reland, Palœstina, Utrecht, 1714, t. ir, p. 701; Keil, Die Bûcher der Kônige, Leipzig, 1876, p. 112; ou l’expliquent par ka-bal, «commerien;» cf. Ewald, Geschichte des Volkes Israël, Gœttingue, 1866, t. iii, p. 400. C’est une hypothèse qui a aumoins le mérite d’être plus conforme à l’ensemble durécit sacré. Pour d’autres cependant, Kâbûl serait identiqueà hâbûl, ce qui est «reçu en gage» [d’amitié], ouindiquerait la position d’un pays «enfermé».
Où se trouvaient ces vingt villes? «Dans la terre deGâlil,» nous dit l’Écriture, III Reg., ix, 11; dans le voisinagede Tyr, suivant Josèphe, Ant. jud., VIII, v, 3.Gâlil désigne la partie septentrionale de ce qui fut plustard la Galilée, un district qui comprenait entre autresl’importante ville de Cédés de Nephthali (aujourd’huiQad’es), au nord-ouest du lac Houléh. Jos., xx, 7; xxi, 32; IV Reg., xv, 29. Isaïe, rx, 1, l’appelait «Galilée des nations», parce qu’elle était habitée par un grand nombred’étrangers et de païens. On peut donc placer la «terrede Chabul» dans le nord des tribus de Nephthali etd’Aser. Le village de Cabul, situé sur la frontière de celledernière tribu, Jos., xix, 27, au sud-est de Ptolémaïde, n’aurait donc pas appartenu au territoire concédé à Hiramet ne lui aurait pas donné son nom; au moins rien n’indiquele contraire. Voir Cabul, t. ii, col. 5, et Aser, tribuet carte, 1. 1, col. 1084. Pourquoi ces villes déplurent-ellesau roi de Tyr? Est-ce à cause de leur mauvais état oude leur situation dans les montagnes, le monarque phénicienayant préféré des cités maritimes? Les différentessuppositions qu’on peut faire ne sauraient trouver d’appuidans la Bible, qui garde le silence sur les motifs dumécontentement royal. Il y a aussi lieu de s’étonner queSalomon ait ainsi sacrifié une portion, quoique minime, du sol sacré, cession peu conforme à l’esprit de la loi.Lev., xxv, 13-34. Mais il eut soin de la prendre dans lacontrée où les païens abondaient. Cf. Fillion, La SainteBible, Paris, 1890, t. ir, p. 491. Plusieurs commentateurscroient, d’après II Par., viii, 2, qu’Hiram rendit ces villesà Salomon, qui les rebâtit ensuite en partie et les peuplade nouveau d’Israélites. C’est ce qu’avait compris Josèphe
lui-même, Ant. jud., VIII, v, 3.
A. Legendre.
CHACAL. Hébreu: 1° sû’âl, de sa’al, «creuser,» terme qui désigne le chacal au point de vue de sonséjour habituel, Jud., xv, 4; Ps. lxiii (lxii), 11, mais quis’applique aussi au renard, soit parce que celui-ci ressembleau chacal, soit parce qu’il habite aussi les cavernes, Cant., ii, 15; Lam., v, 18; Ezech., xiii, 4; II Esdr., iv, 3(hébreu, iii, 35); — 2°’iyyîm, «clameur,» nom qui viseles chacals en qualité de hurleurs, Is., xiii, 22; xxxiv, 14; Jer., L, 39; ce nom ne s’emploie qu’au pluriel et ne s’appliquequ’aux seuls chacals; — 3° tan, de tânan, «s’allonger, s’étendre» pour courir, terme qui désigne en hébreuplusieurs animaux sauvages, et entre autres le chacal. Is., xm, 22; xxxiv, 13; xliii, 20; Jer., ix, 11 (hébreu, 10); x, 22; xlix, 33; li, 34, 37; Ps.xliv (hébreu), 20; Mal., i, 3.Voir Gesenius, Thésaurus, p. 1511. On ignore quelledifférence mettaient les Israélites entre sû’âl, ’iyyîm et(annim. Les versions rendent très diversement les troissubstantifs de l’hébreu, sans doute parce que le grec et lelatin mar.quent de termes usuels pour désigner le chacal, étranger aux contrées européennes même les plus méridionales.Septante: àXtimjÇ, «renard,» Jud., xv, 4.
Ps. lxii, 11; Jpixtov, «serpent,» Jer., rx, 11; xxviii(hébreu, li), 34; è-/?voç, «hérisson,» Is., xiir, 22; <TTpou6ôç, «autruche,» Is., xxxiv, 13; xliii, 20; Jer., X, 22; xxx (hébreu, xlix), 33; 6vo-/ivTccjpo; , Is., xiii, 22; xxxiv, 14, et ueipïîv, Is., xliii, 20; Jer., xxvii (hébreu, l), 39, deux noms d’animaux fabuleux. Vulgate: vùlpes, Jud., xv, 4; Ps. lxii, 11; draco, Is., xiii, 21; xxxiv, 13; xliii, 20; Jer., ix, 11; x, 22; xlix, 33; li, 37; Mal., i, 3; fauni, Jer., l, 39; lamia, Is., xxxiv, 14; onocenlaurus, Is., xxxiv, 14; sirènes, ls., xiii, 22; ulula, Is., xiii, 22.I. Description et histoire du chacal. — 1o Le chacalest ua carnassier du genre chien, tenant le milieu entrele loup et le renard (fig. 161). Il ressemble beaucoup parses caractères au premier de ces animaux. Les deuxespèces s’unissent même souvent ensemble, et bonnombre de naturalistes pensent aujourd’hui que toutesnos races de chiens proviennent du chæa 1 Le chacal
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161. — Chacal.
est plus haut sur jambes que le renard. Sa queue estbeaucoup moins fournie. Son pelage gris-jaune, foncéen dessus et blanchâtre en dessous, lui a fait donner lenom de canis aureus, «chien doré.» Aristotc, Hisl.anim., ii, 17, et Pline, H. N., Vin, 52, le mentionnentsous le nom de 9w; , thos. Les Persans l’appellent schagal, dérivé de Sà'âl, et d’où vient le nom français duchacal. L’animal est d’une voracité extrême; il se nourritde petites proies, mais va jusqu'à déterrer les cadavres.Aussi est-on obligé de protéger les lombes contre sesatteintes en les recouvrant d'épines ou de grosses pierres.Il ne paraît pas redouter l’homme, et pourtant ne s’attaque jamais à lui. Il exhale une odeur fort désagréable.Quand on le prend jeune, on peut parvenir à l’apprivoiser. Aujourd’hui encore, on rencontre quelquefois, chezles habitants de l’Egypte ou de la Syrie, des chacals quiont été capturés tout jeunes et demeurent apprivoisés.Fr. Lenormant, Premières civilisations, Paris, 1874, t. i, p. 349, 350. Mais ce fait ne se produit que par exception. Les chacals chassent par bandes nombreuses, à ladifférence des renards, qui cherchent leur proie individuellement.
2o Le canis aureus abonde dans toutes les régions del’ancien monde à partir de la Méditerranée, dans toutel’Afrique et dans l’Asie centrale et méridionale. Tristram, Fauna and Flora of Palestine, Londres, 1884, p. 31. Ilpullulait dans l’ancienne Egypte. Sous le premier empirethébain, l’un des nomes du Fayoum y portait même lenom de «nome du chacal». La prédilection de cet animalpour les réduits souterrains l’avait fait choisir comme lesymbole du dieu Anubis, qui présidait à l’ensevelissementdes morts et veillait sur le corps momifié. Anubis, enforme de chacal, servait de couvercle aux boites funéraires qui renfermaient les viscères du mort (fig. 162). Ornéd’une lête de chacal, on le voit allonger la momie surson lit funèbre, et ensuite la recevoir à la porte du tombeau (fig. 144, col. 435). Cf. t. i, fig. 423, col. 1405. Pendant leur séjour en Egypte, les Hébreux furent témoins
du culte idolâtrique rendu au chacal Anubis. À l'époquegrécoromaine, les Égyptiens représentaient leurs dieuxavec des pieds en forme de lêtes de chacal, pour marquer leur agilité. Maspero, Histoire ancienne des peuplesde l’Orient, Paris, 1895, t. i, p. 113, 149, 179, 180. —En Palestine, les chacals étaient si nombreux dès les anciens temps, qu’ils ont donné leur nom à plusieurs localités: Salebim ou Salaboni, sa’albim ou sa'âlabin,» demeure des chacals,» Jos., xix, 42; Jud., i, 35; II Reg., xxui, 32; III Reg., iv, 9. et Salim, Sa'âlim, «pays deschacals.» I Reg., ix, 4.
II. Le chacal dans la Bible. — Les écrivains sacrésfont des allusions fréquentes au chacal et aux particularités
162. — Chacal sur un coffret funéraire égyptien en bois.Musée du Louvre.
qui le caractérisent. 1o Le chacal habite les lieux déserts.— De là lui vient son nom principal de sû'dl. Gesonius, Thésaurus, p. 1457. Quand ils prédisent la ruine d’uneville ou d’une contrée, les prophètes ajoutent qu’elle deviendra le repaire des chacals. C’est ainsi qu’Isaïe écrit, à propos de Babylone: «Les 'iyyîm se répandront dansses palais, et les tannim dans ses maisons de délices.» Is., xiii, 22. À son tour, Sion sera «la demeure destannîm, . les bêtes sauvages s’y rencontreront avec les'iyyîm». Is., xxxiv, 13, 14. Au temps du Messie, lestannîm glorifieront le Seigneur d’avoir fertilisé le désert, c’est-à-dire que les païens béniront Dieu de leur avoirenvoyé la grâce. Is., xliii, 20. Jérémie annonce de soncôté qu’on verra les tannîm faire leur séjour à Jérusalem, Jer., ix, 10 (Vulgate, 11), dans les villes de Juda, Jer., x, 22, à Asor, Jer., xlix, 33, et à Babylone, Jer., li, 37, encompagnie des 'iyyîm, Jer., L, 39. Lui-même se désoleen contemplant les Sû'âlîm qui errent sur les ruines deSion, Lam., v, 18, et «les tannîm qui découvrent leursmamelles pour allaiter leurs petits» à l’endroit où s'élevait Jérusalem. Lam., iv, 3. Un psalmiste s’adresse auSeigneur en ces termes: «Tu nous refoules dans la retraite des tannîm, tu nous enveloppes de l’ombre de lamort.» Ps. xuv (hébreu), 20. Enfin Malachie, I, 3, parlede l’héritage d'Ésaù, abandonné aux tannôf du désert, probablement aux femelles des chacals. Cf. II Esdr., iv, 3(hébreu, iii, 35). Il est à remarquer que dans ces textesles sû'âlim, les tannîm et les 'iyyîm sont juxtaposés envertu du parallélisme synonymique, et nullement pourdésigner des êtres différant entre eux. Il se pourrait cependant que les tannîm des Lamentations, iv, 3, désignassentd’autres mammifères. Voir Cachalot, col. 6. — Ces comparaisons prophétiques font allusion aux mœurs des chacals, qui habitent, en effet, les cavernes, les creux des ro
chers et les ruines; ils y restent blottis pendant la journéeet ne sortent habituellement que la nuit, bien que leurpupille, ne soit pas spécialement conformée pour la visionnocturne. «Les bandes de chacals se cachent par centainesdans les ruines de Baalbek.» On les voit aussi «traverser en courant les ravins désolés de la mer Morte, et se réfugier dans les grottes d’ermites à Jéricho».Tristram, The natural History of the Bible, Londres, 1889, p. 111.
2° Le chacal pousse des cris sauvages. — Tous les voyageursont parlé de ces cris, qui ont mérité aux chacalsle nom de 'iyyim, «hurleurs;» en arabe: ce fils du hur-Jement.» — «Cet animal n’est guère moins grand qu’unloup, dit un voyageur du xvi" siècle. Et quand il est nuitclose, il abboye comme un chien. Il ne va jamais seul, mais en compagnie: jusques à estie quelquefois deuxcents en sa trouppe. Parquoy allants en compagnie, fontun cri l’un après l’autre, comme fait un chien quand ildit hau, hau. Nous les oyions abboyer toutes les nuicts.» Pierre Belon, Observations de plusieurs singularités etchoses mémorables trouvées en Grèce, etc., Paris, 1553, liv. ii, ch. cviii, fol. 162. Cf. Vigouroux, La Bible et lesdécouvertes modernes, 5e édit., t..m, p. 349. «La nuitétait venue, écrit Mgr Mislin, lorsque les chacals vinrent. nous donner le plus désharmonieux concert que j’aieentendu de ma vie. Ces hurlements, qui sortent de toutesles cavernes, de toutes les fentes de rochers, qui ne sefont entendre que pendant la nuit et dans les plusaffreuses solitudes, produisent une étrange sensation.» Les Saints Lieux, 1858, t. ii, p. 156. Cf. Thomson, TheLand and the Book, i, ch. viii, édit. de 1863, p. 93. Jobpense à ces hurlements du chacal, quand il dit: «Je neme lève dans l’assemblée que pour pousser des cris, jesuis le frère des chacals et le compagnon des autruches.» Job, xxx, 28, 29. À la vue du châtiment qui frappe sonpeuple, Michée, i, 8, «pousse des hurlements comme lechacal et des cris comme l’autruche.» Ézéchiel, xiii, 4, compare les faux prophètes aux 'sû'àliin du désert, peut-êtreà cause de leurs cris discordants et sauvages.. 3° Le chacal est un animal vorace. — Pour donnerune idée de l’aridité du sol maudit par le Seigneur, Jérémie, xiv, 6, dit que «les ânes sauvages se tiennentsur les rochers et aspirent l’air comme des lannîm, lesyeux sans force, parce qu’il n’y a pas d’herbe». Quelquesauteurs pensent que les tannim sont ici des monstresmarins, qui aspirent l’air avec force; mais il peut êtreaussi question de chacals, qui Haïrent leur proie de loin.Le chacal est si vorace et «si larron, qu’il vient la nuitjusques aux gens qui dorment, et emporte ce qu’il peulttrouver, comme chapeaux, bottes, brides, souliers etautres hardes». (P. Belon, cité plus haut.) Tous les voyageurscontemporains témoignent dans les mêmes termesde cette voracité. Les chacals de Palestine rendent ainsià la campagne le service que les chiens rendent à laville: ils font disparaître la presque totalité des détritusqui traînent sur le sol. David, Ps. lxiii (hébreu), 11, ditde ses ennemis:
On les livrera aux mains du glaive,
Ils seront la proie des chacals.
Ils ne seront pas dévorés vivants, puisque le chacal nes’attaque pas à l’homme; mais leurs cadavres, percés parle glaive, resteront gisants à terre et serviront de pâtureaux chacals.
4° Les «sù'âlim» de Samson. — Le livre des Juges, xv, i, 5, raconte que, pour se venger des Philistins, Samson «s’en alla, prit trois cents Sû'dlim, les lia deux à deuxpar la queue et attacha des torches entre eux. Quand illes eut allumées, il chassa les animaux pour qu’ils courussentçà et là. Ceux-ci s'élancèrent aussitôt dans lesmoissons des Philistins». Les animaux en question sontcertainement des chacals, et non des renards. Ces derniers, relativement peu nombreux et vivant isolés, n’auraientpu être pris qu’avec beaucoup de temps et de difficultés.Il n’est pas impossible, au contraire, de prendreau piège trois cents chacals en une nuit ou deux, surtoutquand on disposait, comme Samson, de beaucoup decompagnons. Rosenmûller, Scholia, Judices, Leipzig, 1835, p. 327, convient que Samson et ses compagnonsn’eurent aucune peine à se saisir de trois cents chacals.C’est au piège qu’on les prit, comme le marque expressémentle verbe lâkad, «prendre au piège,» qu’emploiele texte hébreu des Juges. Une pareille chasse n’offraitaucune difficulté, dans une région où pullulaient ces animaux.Du reste, «il n’est pas nécessaire d’admettre queles trois cents furent pris à la fois, ni ensuite lâchés à lamême place. Après les avoir pris, Samson dut plutôt leslâcher à différents endroits, de manière à produire centcinquante foyers d’incendie, et à causer le plus de dommagepossible aux moissons encore sur pied des Philistins.» Tristram, The nat. hist., p. 87. Il s’agissait pourSamson de châtier ses ennemis, en brûlant leurs moissonsde la riche plaine de Séphéla, et en préparant poureux la famine. «L’idée d’attacher des chacals deux àdeux par la queue était certainement un moyen très efficaced’obtenir le résultat cherché, comme le témoigneraquiconque a tenté l’expérience. Un animal isolé, portantun brandon, l'éteindra rapidement. Deux, au contraire, sont entravés dans leur marche et, de plus, ne peuventtrouver de terrier assez large pour y pénétrer ensemble.Us sont donc forcés de continuer à courir furieux à traverschamps, mettant le feu aux gerbes et aux épis nonencore coupés, ainsi qu’aux vignes et aux oliviers. D’autrepart, les Philistins étaient dans l’impossibilité de saisirles auteurs du méfait. Les torches consistaient indubitablementen brandons de pins résineux du. pays, lesquelsune fois allumés ne s'éteignent que difficilement.» VanLennep, Bible Lands, Londres, 1875, t. i, p. 280. Herderremarque, sur ce trait de la vie de Samson, que 1' «histoiredes trois cents chacals et des tisons allumés sousleurs queues est tout à fait dans son caractère; et le ridiculedont on a cherché à la couvrir ne vaut pas la peined'être réfuté». Histoire de la poésie des Hébreux, trad.Carlowitz, Paris, 1851, p. 439. Cf. Vigûuroux, La Bibleet les découvertes modernes, 5e édit., t. iii, p. 352. L’acteaccompli par Samson est loin d'être sans exemple. Ovideparle de renards à la queue desquels on attachait destorches allumées, et qu’on faisait courir dans le cirque, à Rome, pour la fête des Cerealia. Ils périssaient ainsipar le feu, en souvenir d’un renard qui aurait incendiédes moissons à Casséole. Fast., iv, 681, 704-713. Anniballâchait à travers la campagne des bœufs ayant aux cornesdes torches enflammées. Tite-Live, xxii, 16. On rapporteaussi qu’en Perse, d’après un ancien usage, les rois etd’autres chefs mettaient le feu à un paquet de broussaillessèches et l’attachaient à des animaux sauvagesqu’ils relâchaient ensuite. Ceux-ci cherchaient naturellementun refuge dans les forêts, que l’incendie ne tardaitpas à envahir. Rosenmûller, Das alte und neueMorgenland, Leipzig, 1818, t. iii, p. 50, 185.
H. Lesêtre.
- CHAFIR##
CHAFIR (hébreu: sdfîr), nom de lieu, Mien., i, 11, que la Vulgate a traduit par pulchra (habitatio). L’Onomasticond’Eusèbe l’a rendu par Saphir. Voir Saphir.
- CHAGIS Moïse ben Jacob##
CHAGIS Moïse ben Jacob, né à Jérusalem dans laseconde moitié du xviie siècle, séjourna dans diversesvilles d’Europe, Venise, Amsterdam, etc., et, en 1738, seretira près de Sidon, où il mourut quelques années après, à l'âge de quatre-vingt-dix ans environ. On a de lui uncommentaire exégétique, cabalistique et homilétique surDaniel, intitulé Fêrûrê pat haqqémal), «Morceaux depain de pure farine,» in-f°, Wandsbeck, 1727.
E. Levesque,
CHAÏM. Voir Chayim.
1. CHAÎNE, assemblage d’anneaux en métal pouvantservir de support ou de lien. La Sainte Écriture parle dedeux sortes de chaînes, celles qu’on employait pour l’ornementationou la toilette, et celles dont on chargeait lesprisonniers.
I. Chaises servant d’orkemext et de parure. — Le
ma’àêêh sarSerôt, «œuvre de chaînes.» III Reg., vii, 17.D’autres chaînes d’or, appelées rattôq, de râtaq, «lier,» servaient à maintenir les lambris de cèdre qui entouraientle Saint des saints. III Reg., vi, 21. Les fabricants
163. — Femme étrusque, ornée de chaînes. Musée du Louvre.— Elle porte autour du cou une chaîne formant collier; del’épaule droite descend une chaîne plate, à plusieurs rangs detresses et bordée de perles, elle est posée en travers sur la poitrine: une autre chaîne serre la taille comme uue ceinture, et estornée, au milieu de la poitrine, d’une rosace qui sert sans doutede fermoir; enfin une dernière chaîne, formant comme un x, part de chaque épaule et se relève en bas a droite et à gauche.
pectoral du grand prêtre était retenu par des chaînes d’orappelées sarserâh, Exod., xxviii, ’14; xxxix, 15, ou sarsâh, Exod., xxviii, 22, du radical sârar, «contourner;» Septante: xp-jijo-ôç, xpoaawtôv, «frange;» Vulgate: catena.
16-i. — Chaînes égyptiennes. ITusée du Louvre. Salle civile.
Dans l’ornementation du Temple, Salomon fit entrer desimitations de chaînes portant le même nom, qui couraientle long des murs. II Par., iii, 5; Septante: yuXaazi., «cordages détendus;» Vulgate: catenuls. Les deuxgrandes colonnes du Temple, Jachin et Booz, eurentleurs chapiteaux décorés d’un entrelacement de chaînes,
165. — Femme de Jérusalem portant les chaine: tes.D’après une photographie.
d’idoles leur donnaient pour parure des chaînes [retuqôt; Vulgate: laminx), Is., xl, 19. — Les chaînes étaient trèsrecherchées par les femmes comme bijoux (fig.163 et 164).Dans la toilette des Juives figuraient la sërâh, chaînettequ’on portait aux mainsen guise de bracelet, wrnilla, Is., iii, 19; la’es’âdâh, autre chaînettequi se mettait au-dessus ducoude, Num., xxxi, 50; II Reg., i, 10, voir t. i, col. 1907, et la se’âdàh, petite chaîne pour les pieds, de sa’ad, «marcher,» Septante: -/liSiiv; Vulgate: periscelis. Is., iii, 20. Cettedernière n’était pas unsimple anneau entourantla cheville, comme l’ontcru les versions; mais unechaîne qu’on se mettaitaux pieds pour s’obliger àmarcher à petits pas, cequi passait alors pour unemarque de distinction. Is., ni, 16. Voir PÉRISCÉLIDE.En arabe, meça’ad désignetantôt les chaînes qu’onmettait aux pieds des captifs, tantôt celles que portentles femmes pour danseret marcher à pas égaux.Cf. Talmud, Schabbath,
ꝟ. 63 b. — Pour les chaînes de cou, voir Collier.Il y avait une autre espèce de chaîne que les Hébreuxappelaient tôrim, Cant. i, 10, 11. C’était une parureattachée à la hauteur des tempes, descendant le long desjoues des deux côtés du visage, et passant sous le mentonou tombant sur la poitrine. Elle était formée de petits.
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166. — Prisonnier assyrien
enchaîné. D’après Botta,
Monument de Ninive, 1. 1, pi. 82.
anneaux de métal, ornés de globules d’or et d’argent, oude perles et de pierres précieuses. Les tôrîm destinésà l’épouse des Cantiques, i, 11, se composaient de chaînettesd’or marquetées de points d’argent. Cette parureencadrait le visage et en faisait ressortir la beauté, i, 10.
Tes joues sont belles entre les tôrîm
Et ton cou au milieu des colliers de perles.
. Les Septante et la Vulgate ont traduit par Tpuyi&v, turtur, Cant., i, 9; ils ont confondu {ôr avec un motsemblable signifiant «tourterelle», et ont pris le z, b, «entre», qui précède fôrîm, pour s, ii, «comme».
Mais infidèles à eux-mêmes, au verset suivant où
le même mot se présente,
ils le traduisent différemment; les Septante par
ofjiottifjiaTct, c’est-à-dire «images», la Vulgate par
murenulas, «chaînes de
cou, collier.» Cet ornement se porte encore en
Orient. John Wilson, iands
of the Bible, 2 in-8°,
Edimbourg, 1847, t. ii, p. 84,
remarque cette coutume
chez les femmes de Djéni
(iingannim). Seulementles
plaques de métal précieux
ou les globules d’or attachés aux anneaux, sont
remplacés par des sequins
ou d’autres pièces de monnaie enfilées. On rencontre
le même usage à Bethléhem, à Jérusalem (fig. 165)
et en diverses parties de la
Palestine; on le trouve
aussi en Perse, en Arabie,
dans l’Egypte moderne.
Burder, Oriental literature, t. ii, p. 84-85. Voir
A. Th. Hartmann, Die
Hebràerin am Putztische
und als Braut, t. iii,
p. 208.
II. Chaînes des prisonniers. — 1° Ancien Testament. — Ézéchiel, vii, 23,
reçoit l’ordre de faire une chaîne qui symbolisera lacaptivité du peuple. Cette chaîne s’appelle caffôg. Septante: çOpixo’; , «mélange;» Vulgate: conclusio. Ps. Civ(cv), 18, il est dit que le «fer», barzel, c’est-à-dire sansdoute «une chaîne de fer», et les mauvais traitementsque Joseph dut subir dans sa prison mirent sa vie enpéril. Cf. Ps. cxlix, 8. Partout ailleurs, la chaîne tireson nom de nehosét, «airain,» indiquant la matièredont elle est fabriquée. Elle s’appelle nehustaîm, motau duel qui implique le sens de double chaire pour lesmains et pour les pieds. II Reg., iii, 34. C’est avec deschaînes de ce genre que les rois de Ninive et de Babyloneattachaient leurs prisonniers (fig. 106). Septante: 8z<jy.6z, itËBïi; Vulgate: catena, compedes. Jud., xvi, 21; II Reg., m, 34; IV Reg., xxv, 7; II Par., xx.xiii, 11; xxxvi, 6; Jer., xxxix, 7; lii, 11. On a retrouvé des débris de ceschaînes en Assyrie (fig. 167). Métaphoriquement l’auteurde la Sagesse, xvii, 17, donne le nom de chaîne ( en grec: IôIOïio-ocv, «furent liés» ) aux ténèbres qui enveloppèrent lesEgyptiens pendant la neuvième piaie. L’orgueil est comparédans l’Écriture à une chaîne qui tient les hommes «n son pouvoir. Ps. lxxii (lxxiii), 6. — Dans plusieurs
D1CT. DE LA BIBLE.
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167. — Chaîne assyrienne.
D’après Place, Ninive, t. iii, pi. 70.
autres passages, les versions parlent de chaînes là où ilest question de joug, Lev., xxvi, 13; Is., . lyiii, 9; Jer., xxvii, 2; xxviii, 10, 12, 13; Ezech., xxxiv, 27; de ceps, Job, xxxvi, 8; .1er., xl, 1, 4; d’anneaux, Ezech., xix, 4, 9.Voir ces différents mots.
2° Nouveau Testament. — On liait avec des chaînesles possédés dont on voulait se rendre maître. Marc, v, 3, 4; Luc, viii, 29. — À Jérusalem, saint Pierre futchargé de deux chaînes dans la prison où l’avait enferméHérode. C’était l’usage des Romains d’attacher par unechaîne le prisonnier au soldat qui le gardait. Sénèque, Epist.y, Pline, Epist., x, 65; Josèphe, Ant. jud., XVIII, vi, 7. Pendant la nuit, pour plus de sûreté, l’Apôtre futattaché par deux chaînes à deux de ses gardiens. À lavoix de l’ange, les chaînes tombèrent d’elles-mêmes.1 Act., xit, 6, 7. L’Apôtre fut plus tard enchaîné à Rome, sous Néron, avant son martyre. Sur les chaînes de saintPierre, conservées à Rome, dans la basilique de Saint-Pierrein Vincoli, voir Duchesne, Origines du culte chrê-Itien, Paris, 1889, p. 269. — Saint Paul fut égalementi lié avec deux chaînes à Jérusalem, Act., xxi, 33. Il faitallusion à ses liens dans son discours à Césarée, Act., xxvi, 29; dans son entretien avec les Juifs de Rome, Act., xxviii, 20; dans son Épître aux Éphésiens, vi, 20.Pendant, son séjour de deux ans dans une maison delouage, à Rome, il resta enchaîné au bras d’un soldat.Act., xxviii, 30. Dans sa seconde Épître à Timothée, i, 16, il parle des chaînes qui le lièrent pendant sa secondecaptivité à Rome. — Dans l’Apocalypse, xx, 1, un angedescend du ciel avec une grande chaîne, et il lie ledémon pour mille ans. Cette chaîne symbolique représentela puissance de Dieu, qui arrête l’activité du démon
quand il lui plaît.
H. Lesêtre.
2. CHAÎNES BIBLIQUES. Ce mot de «chaîne», catena, est un terme bibliographique moderne, qui n’estrépandu que depuis la Renaissance, pour désigner uneédition du texte de la Bible dans les marges de laquelleon a transcrit, en guise de commentaire perpétuel, descitations des saints Pères, chaque citation précédée dela mention du nom de l’auteur à qui elle est prise. Cettelittérature a surtout fleuri chez les Byzantins, grandsamateurs de florilèges ou’ExXoyaf. Le moyen âge latinn’a rien connu de pareil; il a eu à dater de l’époquecarolingienne des textes bibliques glosés, ainsi la Glossaordinaria de Walafrid Strabon, ainsi les Postilla deNicolas de Lyra. Voyez Gloses et Postilla. Mais ni lesgloses ni les postilles ne constituent une chaîne. On acoutume d’attribuer à saint Thomas d’Aquin la premièrevéritable chaîne latine; en effet, saint Thomas est l’auteurd’un commentaire sur les quatre Évangiles fait de citationsdes Pères grecs et latins; toutefois ce commentaireportait à l’origine le titre de Glossa continuata, et cen’est que dans les premières éditions imprimées (1484 etsuiy.) que le nom de Catena lui a été donné, puis deCatena aurea, sous lequel il est aujourd’hui exclusivementconnu. Voir Thomas d’Aquin. En soi, le terme de «chaîne» n’a d’autre sens que de comparer les citations à une suited’anneaux, image dont la justesse n’est pas saisissante.Il n’est du reste pas d’origine grecque, les Grecs n’ayantpoint utilisé le mot azipi pour désigner ce que nousappelons une «chaîne», mais se servant de périphrasescomme’ExXoyai épixrjveifôv, ’EçViyoai; ôtayoptiiv, ’E^Y]y/]xtxcovix), oyfi>v imTou, ï). «Les Grecs, écrivait RichardSimon, ont un grand nombre de ces sortes de recueilssur la plupart des livres de la Bible, et l’on en trouvebeaucoup dans les bibliothèques qui n’ont point encoreété imprimés. Il ne serait pas même nécessaire de publierces compilations entières, puisque nous avons les auteursd’où elles ont été prises; mais il serait à désirer qu’ondonnât seulement au public ce qui s’y trouve de singulieret qui n’a point encore été publié.» Histoire critiquedu Vieux Testament, Rotterdam, 1685, p. 412. Le désir
II. - 16
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CHAINES BIBLIQUES
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exprimé par Richard Simon a été en partie réalisé: ona de nos jours beaucoup fait pour tirer des chaînes cequ’elles pouvaient receler d’inédit; mais on ne s’est passoucié de dresser un inventaire descriptif des chaînesexistantes, moins encore une classification chronologiqueou généalogique: celui qui entreprendrait d’étudier méthodiquementles chaînes pour elles-mêmes entreprendraitun travail presque intact.
Les premières chaînes durent apparaître dans la littératuregrecque quand fut close la série des grands commentateurscomme saint Cyrille d’Alexandrie ou Théodorede Mopsuestë. Il semble que cette forme de commentairesvariorum ait été inaugurée par l’école de Gaza, en Syrie. À notre connaissance, en effet, la plus ancienneentreprise qui puisse être qualifiée de «Chaîne» est celleque s’attribue Procope de Gaza (465-528): «Nous avons, écrit- ii, compilé des interprétations sur l’Octateuque, tirées des Pères et autres écrivains, choisies dans leurstraités ou autres œuvres; nous avons cité sans y rienchanger les textes mêmes de nos auteurs, soit qu’ilsfussent d’accord, soit qu’ils ne le fussent point: notrecompilation s’est développée tellement, qu’elle a forméune masse immense.» Procope s’est donc vu amené àréduire sa compilation, à fondre ces citations en un commentairesuivi, impersonnel, sans indication de sources, c’est le Copunentaire sur l’Octateuque, qui existe encorede lui et dans le prologue duquel on lit le passage quenous venons de citer. Patr. gr., t. lxxxvii, col. 21. Auix «siècle, Photius, Cod. 106, t. ciii, col. 676, a eu enmains des Scolies explicatives sur l’Octateuque, sur lesliois et sur les Paralipomènes; mais ce qu’en dit Photiusfait voir que ces scolies sont le commentaire susdit, et non la chaîne primitive de Procope. Le cardinal Maiassurait que cette chaîne existait en manuscrits: «Procopiilucubratio in mss. bibliothecis exstare videtur;» cependant ni lui, ni personne depuis, n’en a signaléd’exemplaire authentique. Et la chaîne, car c’est bien unechaîne, que l’on a publiée sur le Cantique des cantiqueset sous le nom de Procope, ne paraît pas être son œuvre.F. Fritzsche, Exegetische Sammlungen, dans PlittetHerzog, RealEncyclopédie, Leipzig, t. iv, 1879, p. 449. —Certaines chaînes portent des noms historiques, mais quisont ou supposés ou improprement attribués. Une chaînesur saint Marc est attribuée par nombre de manuscritsà Victor d’Antioche ( v= siècle); la même est attribuée àCyrille d’Alexandrie. Une chaîne ou plutôt un commentairesur saint Luc est attribué à Titus de Bostra (ive siècle), et c’est une œuvre qui ne peut lui être que postérieure aumoins d’un siècle. Bardenhewer, Patrologie, Fribourgen-Brisgau, 1894, p. 620. Dans le manuscrit Paris, gr. 187(XIe siècle), nous avons relevé une chaîne sur saint Marc; dans le manuscrit Paris, gr. 186 (xie siècle), une chaînesur saint Jean, attribuées semblablement à Titus de Bostra; nombre de manuscrits parlent de chaînes de saint JeanChrysostome. Cela tient à ce que Titus de Bostra y est citéeu première ligne, ou que les citations sont toutes prisesà saint Jean Chrysostome, et non pas à ce que ces auteursy aient mis la main. — Les catalogues ont quelquefoisappelé «chaînes» des œuvres qui n’en sont pas de véritables.Les commentaires d’Œcuménius (xe siècle), d’Arétas(x a siècle), de Théophylacte, archevêque de Bulgarie(XIe siècle), d’Euthyinius de Zigabène (xiie siècle), nesont pas à mettre dans la catégorie des chaînes. Voyezcependant Richard Simon, Histoire critique des principauxcommentateurs, Rotterdam, 1693, p. 408. — L’auteurpour ainsi dire classique est Nicétas. Ce Nicétasavait commencé par être diacre de la «grande Église» de Constantinople; il mourut évêque métropolitain d’Héracléeen Thrace; entre temps il avait été évêque deSerræ siège suffragant de Thessalonique. Il appartientà la seconde moitié du XIe siècle. Le cardinal Pitra luiattribue la chaîne sur Job publiée par Junius, la chaînesur saint Matthieu publiée par Possin, la chaîne sur saint
Luc publiée par Mai, la chaîne sur la première auxCorinthiens publiée par Lami, Patr. gr., t. cxxvii, col. 542; la chaîne sur les Psaumes étudiée par Mai, aut. m de sa Nova Patrum bibliotheca, Rome, 1852-1854.Il faut y joindre, sur la foi des manuscrits, une chaînesur l’Ecclésiaste, sur le Cantique des cantiques, sur lesdouze petits prophètes, sur les quatre Évangiles, sur les.Actes, sur les Épîtres paulines, sur les Épîtres catholiques.Ibid., col. 534. Cf. Mai, Classic. auctor., Rome, 1828-1838, t. vi et îx. L’absence dans l’œuvre de Nicétasde toute chaîne sur l’Octateuque ou sur les grands prophètesdoit donner à penser qu’il en existait déjà avantlui sur ces livres. — Après Nicétas, on ne trouve plusque quelques noms sans grand relief. Fabricius mentionneune chaîne sur le Cantique des cantiques quiaurait pour auteur un certain «Néophyte moine», qu’ilpropose d’identifier avec un moine du XIIe siècle, dumême nom, dont on a diverses homélies, l’une entreautres sur la prise de Chypre par les Anglais, en 1191.Biblioth. gr., t. viii, p. 661. Le même Fabricius parled’une chaîne sur Isaïe, qui aurait pour auteur un certain «Jean Droungarias», et dont il existerait un manuscritdu Xe siècle. Ibid., p. 662-664. «André le prêtre» seraitl’auteur d’une chaîne sur les Proverbes et sur Isaïe; ilserait un compilateur du xm a siècle, si le manuscrit datéde 1241 qui renferme sa chaîne sur Isaïe et la souscriptionde cet André est un manuscrit original. Ibid. Il fautmentionner enfin un compilateur du xive siècle, évêquede Philadelphie, Macarius Chrysocéphale, dont on signaleen manuscrit une chaîne sur la Genèse et une chaîne sursaint Matthieu: Fabricius a donné la préface de cettedernière. Ibid., p. 677.
Les manuscrits de chaînes grecques sont très nombreux, nous l’avons marqué déjà; on trouvera un inventairetrop succinct desdits manuscrits dans Harnack, Geschichte der allchristlichen Litteratur, Leipzig, 1893, p. 835-842. Un petit nombre de ces manuscrits remonteau Xe siècle, la majorité- au xi a et suivants. Pour Job seulon a des manuscrits plus anciens: Patmensis 171, duviie-vm «siècle; Vatican, gr. 749, du vnp siècle. Quelquesunesdes chaînes sur Job sont accompagnées de figurespeintes, qui appelleraient une étude spéciale. — Leschaînes imprimées sont cataloguées par Harnack, ibid.Nous signalerons d’après lui: les chaînes sur saint Matthieuet saint Marc, éditées par Possin (Toulouse, 1646), Cordier (Toulouse, 1647) et Cramer, ce dernier dans songrand recueil Catenss grsecorum Patrum in NovumTestamentum (Oxford, 1840); la chaîne sur saint Marcéditée par Peltanus ( Ingolstadt, 1580) et par Matthæi(Moscou, 1775); les chaînes sur saint Luc publiées parCordier (Anvers, 1628), par Lami (Florence, 1738), parMai ( t. ix de la Script, vet. collect. Vatican.) et parCramer; les chaînes sur saint Jean publiées par Cordier(Anvers, 1630) et par Cramer; les chaînes sur les Actes, sur les Épîtres catholiques, sur les Épîtres pauliniennes, données par Cramer; la chaîne sur la première Épître auxCorinthiens mentionnée ci-dessus (Florence, 1738). Onn’a rien imprimé sur l’Apocalypse. Pour l’Ancien Testament, signalons: la chaîne sur l’Octateuque publiée parNikephoros (Leipzig, 1772), qui, selon Harnack, auraitpour base les’ExXoTfal eî; ’OxidT£u-/ov de Procope, conjecturepeu motivée; la chaîne sur le Pentateuque éditéepar Zephyrus (Florence, 1547), la chaîne sur la Genèse etsur l’Exode donnée par Lipomannus (Paris, 1546, 1550); la chaîne. sur les Psaumes de Cordier (Anvers, 1643) etcelle de Barbaro (Venise, 1564); la chaîne sur les Proverbesde Peltanus (Anvers, 1614); la chaîne sur Job deJunius (Londres, 1636) et celle de Comitolo (Lyon, 1585);
! la chaîne sur le Cantique des cantiques de Meursius
| (Leyde, 1617); la chaîne sur Jérémie et Baruch de Ghis| lerius (Lyon, 1623); la chaîne sur Ézéchiel de Villalpan! dus (Rome, 1604). Aux diverses publications signaléesj par Harnack, joignez: la chaîne sur Daniel éditée par
Mai, au t. Il de ses Script, vet. collect. Vatican. (Rome, 1825-1838); la chaîne sur les Psaumes signalée par Mai, Nova Patrum bibliotheca, t. iii, p. 139.
Les Pères qui ont fourni la matière des chaînes grecquessont principalement saint Jean Chrysostome, saint Basile, saint Cyrille d’Alexandrie, Eusèbe de Césarée, Origène, Sévérien de Cabale, Sévère d’Antioche, Théodoret; etencore Didyme, Olympiodore, Grégoire de Nysse et deNazianze, Victor d’Antioche, saint Isidore de Péluse, etc.Certains auteurs, qui ont disparu des bibliothèques à partirdu Xe siècle, se trouvent cités parfois copieusement: Apollinairede Laodicée, Diodore de Tarse, Théodore de Mopsueste, Théodore d’Héraclée, Hippolyte, Polychronius, Titus de Bostra, Acacius de Césarée. D’autres plus ancienssemblent avoir été cités de seconde main: Théophiled’Antioche, Irénée, Sabellius, Saturnin, Paul de Samosate, Papias, Marcion, Cérinthe, Basilide, Justin, etc.Mentionnons enfin les anciennes versions grecques del’Ancien Testament: Aquila, Symmaque, Théodotion.Quelquefois la chaîne se réfère au texte hébraïque lui-même: ainsi la chaîne sur Jérémie de Ghislerius, ainsila chaîne sur les Psaumes de Cordier. Parmi les auteursnon chrétiens, Philon et Josèphe ont fourni beaucoup, mais ils sont les seuls, et les profanes, ol é’Çw, ne sontreprésentés que par quelques mots attribués à Pythagore, à Socrate. — Voir P. Wendland, Neu entdeckte FragmentePhilo’s, Berlin, 1891, et L. Cohn, Zur indirectenVeberlieferung Philo’s und der àlteren Kirchenvàter, dans les Jahrbûcher fur protestantische Théologie, 1892, p. 475 et suiv.
En dehors de la littérature byzantine, c’est dans la littératuresyriaque que nous pourrons trouver des chaînesà l’imitation des chaînes grecques. Mais elles sont en fortpetit nombre dans nos bibliothèques. Comme spécimen, le manuscrit Add. 12144 du British Muséum, copié, dit lasouscription, «au monastère de la Mère de Dieu qui està Gazarta, proche d’Alexandrie la Grande,» et achevé «le25 du mois d’Adar de l’année 1392 selon les Grecs», c’est-à-direen 1081 de notre ère. Il contient une chaîne surla Genèse, les Rois, les douze petits prophètes, Ézéchiel, Jérémie, le Cantique, Daniel, Isaïe, les Proverbes, l’Ecclésiaste, les Épîtres pauliniennes, saint Matthieu, saintJean. L’auteur principalement cité dans la chaîne est saintÉphrem pour l’Ancien Testament, saint Jean Chrysostomepour le Nouveau; à la suite saint Athanase, saint Basile, saint Cyrille d’Alexandrie, Daniel de Salach, saint Denysl’Aréopagite, saint Épiphane, Eusèbe de Césarée, Georges, «évêque des Arabes,» saint Grégoire de Nazianze, saintHippolyte, Isidore de Péluse, Jacques d’Édesse, Jean leMoine, Maruthas de Tagrit, Philoxène de Maboug, Phocasd’Édesse, Sévère d’Antioche. Le compilateur de cette chaînesyriaque, dont on a un second exemplaire, Assemani, Bibliotheca orienlalis, t. i, p. 63 et 607, est un moined’Édesse, nommé Sévère, et l’on a la date de son travail, l’an 861 de notre ère. W. Wright, Catalogue of Syriacmanuscripts in the British Muséum, t. il (Londres, 1871), p. 908-914. La chaîne de Sévère d’Édesse n’estsûrement pas unique, témoin le manuscrit Add. 12168, lequel est du vine-ixe siècle, et contient une chaîne différente, anonyme, sur le Pentateuque, Job, les Juges, lesRois, les Paralipomènes, Esdras I et II, les Proverbes, l’Ecclésiastique, les Psaumes, l’Ecclésiaste, le Cantique, la Sagesse, les douze petits prophètes, Jérémie, Ezéchiel, Daniel, Isaïe, saint Paul, les Évangiles. Les auteurs citéssont: saint Cyrille dvlexandrie, saint Éphrem, saintGrégoire de Nazianze et saint Grégoire de Nysse, Sévèred’Antioche, saint Jean Chrysostome, Olympiodored’Alexandrie, Proclus, Isaac d’Antioche, Jean bar Aphtunaya, abbé de Kinnesrin. L’auteur anonyme de la chaînea du la compiler dans la première moitié du vne siècle, car il se sert des Septante traduits par Paul de Telia, traductionqui date de 617; et une note de lui, au fol. 67 b, suppose qu’il écrit avant la mort de Yezdijrd, le dernier
des Sassanides († 651). Wright, ouvr. cit., p. 905. Lec< Commentaire» sur l’Ancien et le Nouveau Testament «tiré de tous les ouviages exégétiques et mis en abrégé», de Jacques Bar-Salibi, évêque d’Amid (xiie siècle), estmoins une chaîne qu’un commentaire proprement dit.H. Zotenberg, Catalogue des manuscrits syriaques dela Bibliothèque Nationale, Paris, 1874, p. 33 et suiv.
La littérature arménienne elle aussi a ses chaînes. Unenote, que nous devons à l’obligeance du R. P. Basile Sargisean, méchitariste, nous signale «une chaîne sur Job, sur les Psaumes, sur le Cantique des cantiques, portantle nom de Vardam, une chaîne sur Daniel; une chaînesur Isaïe, portant le nom de Georges; une chaîne surles Épîtres catholiques par S. Nerses Claïensis; enfin deschaînes anonymes sur les Actes des Apôtres»;
Comme spécimen de chaînes arabes on peut signalerle manuscrit arabe n° 17 de la Bibliothèque Nationale, manuscrit copié en 1631 et renfermant le texte arabe duPentateuque traduit du syriaque (Peschito): les citationsqui font la chaîne sont tirées de saint Jean Chrysostome, saint Ephrem, saint Basile, saint Hippolyte, Jacquesd’Edesse, Jacques de Saroug, Jacques Bar-Salibi. Lesn° s 55 (xviie siècle) et 59 (xve siècle), de la même bibliothèque, contiennent une chaîne sur les Evangiles. DeSlane, Catalogue des manuscrits arabes de la BibliothèqueNationale, Pans, 1883-1895, p. 5, 12, 14. Oupeut signaler encore le fragment de chaîne syriaque surle Nouveau Testament en caractère carschouni, décritpar Payne Smith, Catal. codd. mss. Biblioth. Bodl., Oxford, 1884, p. 467-468. M. Ignace Guidi, à qui nou"sommes redevable de ces dernières indications, noufécrit: «Dans les manuscrits arabes de la BibliothèqueVaticane se trouvent aussi des chaînes, que le cataloguede Mai confond avec les commentaires en général. Cetteétude des chaînes arabes permettrait l’étude des chaîneséthiopiennes qui en dérivent… Il faudrait étudier tout legroupe des chaînes coptes, arabes, éthiopiennes pourpouvoir dire quelque chose de sur de toute cette littérature, et pareille étude n’est pas encore faite».
On trouvera une chaîne éthiopienne sur saint Matthieu, tirée de Chrysostome, Cyrille d’Alexandrie, Sévère, lesGrégoire, Basile, Clément, Athanase, Benjamin, patriarched’Alexandrie (vne siècle), Épiphane, Siméon le Stylite, Eusèbe, dans le manuscrit Add. 16220 du British Muséum, manuscrit du XVIIe siècle. Une chaîne éthiopienne sur lesquatre Évangiles, dans les manuscrits Orient. 731-736du British Muséum, XVIIe et xviiie siècles; cette chaîneest elle-même une traduction faite, au XVIe siècle, d’unechaîne arabe du XIe siècle. W. Wright, Catalogue of theEthiopie manuscripts in the British Muséum, Londres, 1877, p. 199-203. Le manuscrit Add. 16248 du BritishMuséum, copié de nos jours en Abyssinie par les soinsdu Rev. Krapf, est la copie d’une chaîne éthiopienne sursaint Matthieu, traduite de l’arabe, d’origine monophysitc, et dont les éléments sont tirés de saint Jean Chrysostome, saint Athanase, saint Cyrille d’Alexandrie, saint Grégoirede Nysse, Philoxène de Maboug, Jacques de Saroug, etc.Dillmann, Catalogus codd. mss. Orientalium ihiszciBritannici, Londres, 1847, part, iii, p. 11.
M. de Lagarde a publié une chaîne copte sar lesquatre Évangiles, d’après un manuscrit appartenant à lordZouch, rapporté d’Egypte, en 1838, par Curzon, manuscritdu IX" siècle. La chaîne est fournie principalementpar Chrysostome, Cyrille d’Alexandrie, Sévère, subsidiairementpar Apollinaire, Athanase, Basile, Clément, Cyrillede Jérusalem, Didyme, Épiphane, Eusèbe, les Grégoire, Hippolyte, Irénée, Sévérien de Gabala, Titus de Bostra, etc.P. de Lagarde, Catenæ in Evangelia œgyptiæse quiasupersunt, Gœttingue, 1886.
Il ne saurait être question de chercher des chaînes dansla littérature hébraïque du moyen âge. — Nous manquonsde toute information sur ce qui peut exister dochaînes dans l’ancienne littérature slave.
Sur les chaînes grecques, consultez Fabricius - Harles, <
Bibliotheca grœca, Hambourg, 1802, t. viii, p. 638-700; :
Harnack, Geschichte der altckristlichen Litteratur, Leipj
zig, 1693, p. 835-842. P. Batiffol. j
1. CHAIR (hébreu: bâèâr; Septante: aipÇ; Vulgate: ; caro). Ce mot se prend dans les Saintes Écritures enplusieurs acceptions diverses. Il peut désigner:
1o Le corps tout entier, dont la chair est la partie laplus notable et la plus visible. Ps. XV, 9. C’est en ce sensque «le Verbe s’est fait chair», c’est-à-dire a pris uncorps, Joa., i, 14, et que Jésus-Christ donne sa chair, c’est-à-direson corps, à manger. Joa., vi, 52-57. Dans ces passagesde l’Évangile de saint Jean, la chair désigne le corps jtout entier, etl’àme elle-même par concomitance. Cf. IJoa., [IV, 2; Il Joa., 7. L’hébreu n’a pas, comme nous, de motparticulier pour distinguer le corps et la chair; bâsârréunit ces deux significations.
2o La chair proprement dite, c’est-à-dire tout ce qui jdans le corps n’est ni os ni sang. Gen., ii, 21; xvii, 11-14; 4xl, 19; Exod., xxx, 32; Lev., xiii, 2; xv, 3; Deut., xxviii, 53; IV Reg., iv, 34; v, 10, 14; ix, 36; Job, ii, 5; vi, 12; x, 11; xxxin, 21, 25; Prov., v, 11; xiv, 30; Sap., vii, 1; Eccli., xiv, 18; Ezech., xxxvii, 6; Luc, xxiv, 39, etc. Les prophètesannoncent aux Juifs, comme une calamité effroyable, la nécessité à laquelle ils seront réduits un jour de mangerla chair de leurs propres enfants. Deut., xxviii, 53, 55; Lev., xxvi, 29; Jer., xix, 9; Bar., ii, 3. La prophétie s’estréalisée en particulier au siège de Jérusalem par Titus.Josèphe, Bell. jud., VI, iii, 4. — Métaphoriquement, «mangerla chair de quelqu’un,» c’est le calomnier ou le persécuter.Job, xix, 22, se plaint que ses ennemis nesoient pas «rassasiés de sa chair», c’est-à-dire ne cessentpas de le calomnier. Dans un autre passage, Job, xxxi, 31, où la Vulgate reproduit la même locution, il y a en hébreu: «Qui donnera quelqu’un qui ne soit pas rassasiéde sa chair,» c’est-à-dire de la chair des animaux qu’ilsert à sa table? Les méchants entourent David pour «mangerses chairs», le persécuter. Ps. xxvl, 2. De même, lesennemis «mangent la chair du peuple» de Dieu, en l’affligeantde toutes manières. Mioh., iii, 3; Zach., xi, 9, 16.Là où la Vulgate dit que les Chaldéens «accusent» lesJuifs ou Daniel, le texte chaldéen porte qu’ils «mangentdes morceaux» des Juifs ou de Daniel. Dan., iii, 8; vi, 25.Cette expression métaphorique est commune en arabe. Enaraméen, le démon, l’accusateur, est appelé «mangeurde chair». Cf. Wiseman, Conférences sur les doctrinesde l’Église catholique, trad. Jarlit, Paris, 1854, t. ii, p. 302; Gesenius, Thésaurus lingual hebrieæ 1835, p. 90, 91; Buxtorf, Lexicon chaldaicum, talmudicum et rabbinicum, Leipzig, 1869, p. 46.
3o La parenté ou l’union très étroite entre diversespersonnes. Les époux sont «deux en une seule chair».Gcn., ii, 23, 24; Matth., xix, 5; Marc, x, 8; I Cor., vi, 16.Les parents font partie de la «même chair». Gen., xxix, 14; xxxvii, 27; Lev., xviii, 12, 13, 17; Jud., ix, 2. Les membresd’une même race disent aussi de leurs compatriotes: «Ilssont notre chair.» II Reg., v, 1; xix, 12, 13. En parlantdu pauvre, Isaïe, lviii, 7, emploie cette expression toutévangélique: «Si tu le vois nu, couvre-le et ne méprisepas ta chair.»
4o L’ensemble de l’humanité. «Toute chair» est unelocution qui désigne la généralité des hommes. Elle seretrouve fréquemment dans l’Ancien et dans le NouveauTestament. Gen., vi, 12, 13; Deut., v, 26; Judith, vii, 16; Job, xii, 10; xxxiv, 15; Ps. lxiv, 3; cxliv, 21; Eccli., xviii, 12; Is., XL, 5; xlix, 26; Jer., xii, 12; xxv, 31; Ezech., xx, 48; xxi, 4, 5; Joël, ii, 28; Zach., ii, 13; Matth., xxiv, 22; Luc, iii, 6; Act., ii, 17; Rom., iii, 20; I Cor., I, 29; I Petr., i, 21.
5o L’homme considéré au point devue de sa faiblessemorale, de ses appétits inférieurs, de ses passions mauvaiseset de ses péchés. — 1. Dans l’Ancien Testament,
la chair est nommée surtout pour caractériser la faiblessemorale de l’homme. En tant que chair, l’homme estimpuissant, Ps. lv, 5; lxxvii, 39; Jer., xvii, 5; éphémère, Is., xl, 6; porté au mal, Gen., vi, 3; Eccle^, xi, 10; Eccli., xxv, 36. Pourtant la chair elle-même, c’est-à-dire la naturefaible et corrompue, peut être élevée à des sentimentsd’ordre supérieur, que le concours de la grâce rend surnaturels.La chair s’unit alors à l’âme pour désirer Dieu.Ps. lxii, 2; lxxxiii, 3. Elle est pénétrée par le sentimentde la crainte du Seigneur. Ps. cxviii, 120. — 2. Dansl’Évangile, la «chair» marque l’impuissance absolue dela nature déchue dans l’ordre surnaturel, et même sonincapacité en face des devoirs difficiles de l’ordre naturel. «La chair est faible,» Matth., xxvi, 41, et ne peut résisterà la. tentation sans le secours divin qu’appelle la prière. «La chair ne sert de rien,» Joa., vi, 64, quand il s’agitde croire les vérités ou de pratiquer les vertus de l’ordresurnaturel. Aussi est-elle radicalement inhabile à découvrirou à «révéler» les mystères, Matth., xvi, 17, à engendrerl’homme à la vraie vie, Joa., i, 13; iii, 6, à jugersainement les choses de Dieu. Joa., viii, 15. — 3. Dansles Épîtres de saint Paul et des autres Apôtres, la «chair» désigne plus habituellement l’homme naturel, corrompupar le péché, le vieil Adam, en opposition avec le nouvelAdam, l’homme surnaturel relevé par la grâce. Non seulementla chair est infirme et ordinairement incapable debien, Rom., VI, 19; Ephes., vi, 12, mais c’est le péchémême qui habite en elle. Rom., vii, 18, 25. En conséquence, elle est pour le juste une cause de tentation etde souffrance, II Cor., xii, 7, une source de mauvaisdésirs et le foyer même de la concupiscence. Gal., v, 16, 17, 24; Ephes., ii, 3; I Petr., ii, 11; II Petr., ii, 10, 18; I Joa., ii, 16. Elle a son sens particulier, Col., ii, 18, saprudence et sa sagesse en contradiction avec l’ordre divin.Rom., viii, 6-9; II Cor., i, 12. Aussi ne peut-elle posséderle royaume de Dieu. I Cor., xv, 50. Ce qui vientd’elle est donc détestable. Jud., 23; Gal., i, 16. Céder àson influence, c’est être «charnel», I Cor., iii, 1-3, c’est o vivre selon la chair». Rom., viii, 1, 4, 12; I Cor., i, 26; II Cor., 1, 17; x, 2, 3; Gal., IV, 29.— Notons cependantque l’expression «selon la chair» se rapporte parfoisà l’ordre purement naturel dans ce qu’il a de légitime.Rom., i, 3; iv, 1; ix, 3, 5; Hebr., vii, 16. Cf. II Cor., v, 16.
Des différents passages où il est question des «désirsde la chair», Gal., v, 16; Ephes., ii, 3, des «volontés dela chair», Ephes., ii, 3, de «la chair qui convoite contrel’esprit», Gal., v, 17, il ne faut pas conclure que, dansla pensée de saint Paul, la chair possède une sorte d’âmeinférieure qui puisse être opposée à l’âme spirituelle. «Nous devons nous souvenir que la scolastique distingue, au sujet du lieu de la concupiscence, d’abord lesmotus primo-primi, qui se produisent instantanémentet précèdent l’exercice de la volonté libre, ensuite lesmotus secundi, qui procèdent directement de la volontélibre, et en troisième lieu les motus secundo-primi, parlesquels la volonté libre se laisse elle-même entraîner.» Les motus primo-primi sont les seuls que l’Apôtre attribueà la chair. «On en a conscience. mais ils échappentà la personnalité libre, et ne sont par conséquent ni coupablesni dirigeables.» Frz. Delitzsch, System der biblischenPsychologie, Leipzig, 1861, p. 375. Cf. Ame, t. i, col. 459. La chair, à laquelle l’âme sert de principe vital, ne représente donc dans ces passages que l’influence mauvaiseexercée sur la volonté libre par la concupiscenceoriginelle, en sorte que la chair est plutôt le théâtre que
le principe de cette opposition à l’esprit.
H. Lesêtre.
2. CHAIR DES ANIMAUX. Dans cet article, il ne s’agitde la chair des animaux qu’au point de vue de l’abstinence.L’ordre et la logique nous obligent à parler aussi, sous ce même rapport, du sang des animaux.
I. Chair des animaux es général. — 1o Avant le déluge.
— D’après plusieurs commentateurs juifs, la chair des animauxétait défendue avant le déluge; ils en trouvent lapreuve dans la comparaison des deux textes, Gen., i, 29-30, et ix, 2-3. Dans le premier, Dieu assigne à Adam sa nourriture, et il n’y est question que des fruits de la terre etdes arbres; dans le second, Dieu assigne la nourrituredes Noachides, disant expressément: & Tout ce qui a vieet mouvement sera votre nourriture; je vous abandonnetout cela comme l’herbe verte, keyéréq’êséb.» Cettedernière expression mérite d’être remarquée. Dieu avaitdéjà permis à Adam les fruits de la terre; afin de faire biencomprendre à Noé qu’il lui permettait aussi la chair desanimaux, il dit: «Je vous abandonne tout cela comme jevous ai abandonné les fruits de la terre;» ce qui suppose, d’après ces interprètes, qu’avant cette dernière permission, c’est-à-dire avant le déluge, les fruits de la terreseuls étaient permis aux enfants d’Adam. Cf. Selden, DeJure naturali, Wittenberg, 1770, p. 829-830. Cette interprétationdes Juifs a été suivie par Lightfoot, dans saChronica temporum, ad Gen., ix, Opéra omnia, Utrecht, 1699, t. i, p. 9. Parmi les catholiques qui ont suivi cetteopinion, Cornélius à Lapide, Gen., i, 29 et ix, 3, édit.Vives, p. 73, 153, cite Nicolas de Lyra, Alphonse Tostatet Denys le Chartreux (tous trois, ad Gen., i, 29). Leurraison est la même que celle des commentateurs juifs. Latradition païenne semble aussi favoriser cette opinion.
At vêtus illa œtas, cui fecimus Aurea nomen, Fcttibus avboreis, et, quas humus educat, herbisFortunatà fuit, nec polluit ora cruore,
dit Ovide, Metnm., xv, 96-98, édit. Lemaire, Paris, 1822, t. iv, p. 502; cf. Metam., i, 89-106, ibid., t. iii, p. 56-60. Virgile, Georg., i, 125-128, édit. Lemaire, t. i, p. 268; Varron, De re rust., II, i, Opéra qux supersunt, édit. Henri Estienne, 1581, p. 58; Plutarque, Ilep’i <rap--/.oyxft’a; , ii, 3, 4, édit. Didot, p. 1220-1221; Porphyre, llepi ànoxiiç (De abstinentia), iv, 2, 15, édit. Didot, p. 68, 78-79, et saint Jérôme, Contra Jovin., ii, 13, t. xxiii, col. 302, constatent aussi cette tradition païenne.Néanmoins nous regardons comme plus probable l’opiniond’après laquelle, même avant le déluge, la chairdes animaux était permise. Cette opinion est beaucoupplus commune parmi les commentateurs chrétiens, catholiquesou autres. Elle est soutenue par Cajetan, Gen., iv, 2, et ix, 2-3, Opéra, 3 in-f°, Lyon, 1639, t. i, p. 32, 51; Dom. Sotô, De justifia et jure, lib. v, q. 1, art. i; Pererius, In Gen., Lyon, 1610, t. ii, p. 319-325; Cornélius à Lapide, Gen., ix, 2-3, p. 153; Leydekker, DeKepublica Hebrseorum, Amsterdam, 1704, p. 28. Pourprouver cette opinion, quelques auteurs traduisent ainsi, Gen., i, les fy. 29 et 30: «Voici que je vous ai donné toutesles plantes…, et tous les fruits des arbres…, afin qu’ilssoient votre nourriture, avec tous les animaux de la terre, et avec toutes les herbes vertes…»; comme si Dieu, dèsle commencement du monde, assignait aux hommes, comme nourriture: 1. les plantes et les fruits des arbres; 2. les animaux de la terre; 3. les herbes vertes. — Il estévident que, si cette interprétation est admise, il n’y aplus de discussion, et que la seconde opinion est la seulevraie. Mais cette interprétation ne peut pas se soutenir; car: 1. Les mots qui commencent le ꝟ. 30, ûlekol hayyatha-’ârés, doivent, à cause du’>, le, se traduire par ledatif «et à tous les animaux de la terre,» et non pas «avec tous les animaux de la terre», le i ayant très difficilementce dernier sens. — 2. Ces auteurs supposent, dans le y. 30, un ii, vav, avant les mots’et kol yéréq, de manière qu’ils puissent traduire: «et avec toutesles herbes, etc.»; mais ce i, indispensable à leur opinion, ne se trouve que dans un très petit nombre d’exemplairesde la Genèse. — 3. Dans le j. 29, Dieu assigne àl’homme les plantes, ’êséb, comme une partie de sa nourriture; pourquoi, dans le y. 30, rëpète-t-il la mêmechose, et dans les mêmes termes? Cf. Rosenmuller,
In Gen., i, 30, Leipzig, 1821, t. i, p. 87-88. Il faut doncrejeter cette interprétation, et admettre, avec l’universalitémorale des commentateurs, que dans le ꝟ. 29, Dieuassigne la nourriture de l’homme, et, dans le ꝟ. 30, celledes animaux: «Voici que je vous ai donné toutes lesplantes, et tous les fruits des arbres, afin qu’ils soientvotre nourriture, et (j’ai donné) à tous les animaux déla terre… l’herbe verte pour nourriture.»
Mais nous n’avons pas besoin de faire subir ces contorsionsaux yy. 29 et 30 du premier chapitre de la Genèse, pour prouver que la chair des animaux était permiseavant le déluge. Il nous suffit, pour cela, de faire l’argumentsuivant. Quand un acte est autorisé par le droitnaturel, il faut, pour que cet acte devienne interdit, unprécepte clair et formel émanant de l’autorité législative.C’est ainsi que, le droit naturel permettant à Adamde manger du fruit de tous les arbres du paradis terrestre, il a fallu, pour lui interdire le fruit d’un de ces arbres, un commandement divin, clair et précis. La chair desanimaux étant permise par le droit naturel, il aurait fallu, pour que cet aliment fut interdit à l’homme avant ledéluge, un commandement de Dieu, exprès, clair et précis.Or, de ce commandement, nous ne trouvons tracenulle part. Les seuls textes apportés par les adversairespour prouver l’existence de ce commandement, ce sont, nous l’avons dit, les textes rapprochés et comparés, Gen., i, 29-30 et ix, 2-3. Mais il est impossible d’y voir uncommandement formel, imposé à l’homme, de s’abstenirde la chair des animaux; que l’on compare ces textesaux yꝟ. 16 et 17, Gen., ii, où Dieu imposa à Adam unvéritable précepte, et l’on touchera du doigt la différence.Que fait donc Dieu dans les versets, Gen., i, 29-30, etix, 2-3? Il indique à l’homme quelle sera sa meilleurenourriture suivant les temps et les lieux, semblable à unpère de famille qui abandonne à ses enfants d’abondantesprovisions, mais qui, par prudence, leur indique les alimentsqui leur seront plus profitables. Dieu, d’une part, abandonne à l’homme toute sa création: «Remplissez laterre, assujettissez-la, et dominez sur les poissons dela mer, sur les oiseaux du ciel, etc.,» Gen., i, 28, et puisil signale les aliments qui seront pour lui, en ce tempslà, les meilleurs, y. 29. Après le déluge, à cause, sansdoute, de l’appauvrissement du sol et de l’affaiblissementde la constitution physique de l’homme, il signale, deplus, à Noé, comme nourriture, la chair des animaux.Gen., ix, 3. Telle est, croyons-nous, l’explication la plussimple et la plus naturelle des textes cités; ils ne renfermentpas un commandement, mais une simple indication, et, tout au plus, un désir, un conseil de Dieu. C’estce désir et ce conseil qu’ont suivis les hommes les plusjustes et les plus religieux de cette époque, comme Sethet sa postérité, et c’est ce qui a pu donner lieu aux traditionspoétiques, et probablement un peu historiques del’âge d’or.
2o À partir du déluge. — Dieu, Gen., ix, 3, déclare auxNoachides que la chair des animaux leur est permise; mais il ajoute, y. 4: «Excepté que vous ne mangerez pasla chair mêlée avec le sang.» Quel est le sens de cette restriction?Pour la bien comprendre, il faut avoir sous lesyeux le texte hébraïque: V-^Nn nS id~’ïï ?323 i™; —; s, ’afebàsàrbenafëô dàmô lô" (o’kêlû. La traduction littérale estcelle-ci: «Excepté que vous ne mangerez pas la chair dans(ou avec) son àme, son sang.» Les mots «son sang» sontajoutés, par une sorte d’apposition, aux mots «son âme».Le sens direct et immédiat est donc: «Vous ne mangerezpas d’une chair encore animée de son sang.» Les Septanteont traduit: n).r, v xpéx; èv ocIu.aTi ç - J"/î; ; o-j ?ày£a6s, «excepté que vous ne mangerez pas la chair avec le sangde l’âme, c’est-à-dire avec le sang de la vie, le sangvital.» Aquila: Il).r ( v zçla; èv ^’J/^ aùrot a*p.a a-j-uoO o’iziyEcbî. Symmaque: II).r, v y.psi; o-j cJv livr/ij aïv.z iùtoC, etc. La Vulgate: Excepto quod camem cum sanguinenon comedeiis. On le voit, d’après toutes ces ver
sions, la défense proprement dite porte directement surla chair animée de son sang; ce qui était donc directementdéfendu aux Noachides, c’était de couper à un animalvivant un membre, un organe, ou une partie quelconquede sa chair pour s’en repaître. Aussi les commentateursjuifs et ceux qui les ont suivis énoncent-ils cettedéfense par une des formules suivantes: Interdiction demembro animalis viventis; — Non tollendum membrumde animali viventi; — Non abscindendum membrum devivo animali; — Ne membrum vivo animali amputatumcomederet Noachus. Voir ces formules dans Selden, De jure naturali, i, 10, p. 116-126. D’après les rabbins, ce précepte est un des sept qui furent imposés aux Noachides.Cf. Maimonide, De Regibus Hebrœorum, IX, 1, traduction Leydekker, dans les Opuscida de Crenius, Rotterdam, 1690; t. ix, 7, p. 133. Plusieurs commentateurschrétiens ont suivi cette manière de parler, entre autres, Genebrard, Chronologia Hebrœorum major, Bàle, 1580, ad an., mundi, 1656, et Selden qui, dans l’ouvrage citéplus haut, De jure naturali, donne en sept livres unlong et très savant commentaire des sept préceptes imposésaux Noachides; dans le septième livre, il expose leprécepte De membro animalis viventis non comedendo.
— Pourquoi ce précepte imposé aux enfants de Noé?Maimonide, More Nebochim, part, iii, c. 48, édit. Buxtorf, p. 496, en donne deux raisons principales: «Il aété défendu, dit-il, de manger un membre d’un animalvivant, c’est-à-dire un membre coupé sur un animalvivant, soit parce que c’est un signe de cruauté, soit parceque, à cette époque, les rois païens avaient coutumed’agir ainsi, et cela par idolâtrie; ils saisissaient un animalilui coupaient un membre, et le mangeaient.» Depareilles cruautés sur des animaux vivants sont signaléeschez les païens, par Clément d’Alexandrie, Cohortatioad Génies, ii, t. viii, col. 72, et par Arnobe, Adv. Gent., v, 19, t. v, col. 1118-1122. Ce qui se faisait dans cestemps anciens, se faisait encore, quoique peut-être paspar idolâtrie, dans des temps beaucoup plus rapprochésde nous, vers la fin du siècle dernier, en Abyssinie, comme on peut le voir dans Burder, Oriental Custonis, t. i, n» 8, Londres, 1822, p. 7-11. C’est cette cruautéque Dieu a défendue aux enfants de Noé, au momentmême où il leur assignait comme nourriture la chair desanimaux; cette sage prescription avait le double avantageet d’adoucir leurs mœurs, et de les détourner de pratiquesidolâtriques. — La prohibition dont nous parlonscomprenaitelle la défense de manger ou boire le sangdes animaux, nous allons le dire dans le paragraphe suivant.
IL Sang des animaux. — 1° Défense de manger ouboire le sang des animaux. — Les auteurs ne s’accordentpas sur l’origine historique de cette défense, les unsaffirmant qu’elle était comprise dans la prohibition faitepar Dieu aux enfants de Noé, dans le texte expliqué ci-dessus, Gen., ix, 4, les autres soutenant que Moïse estle premier qui ait porté cette défense. Cette seconde opinionest de beaucoup la plus commune parmi les commentateursjuifs qui disent, en conséquence, qu’il étaitpermis aux Noachides de boire le sang des animaux.C’est l’enseignement formel de la Ghemara de Babylone, qui donne cette doctrine comme la «tradition des Sages», et n’attribue l’opinion contraire qu’à un seul rabbin, Chanina ben Gamaliel; voir Ghemara Babyl., traitéSanhédrin, vii, traduction latine d’Ugolini, dans sonThésaurus anliquit. Sacr., Venise, 1762, t. xxv, col. 706.C’est aussi l’enseignement de Maimonide, De liegibus, ix, 10, traduction citée, p. 148. Cf. Selden, De jure naturali, p. 82. L’interprétation juive a été suivie par Cajetan, In Gen., ix, Opéra, t. i, p. 51, et quelques autrescommentateurs chrétiens. — La plupart des exégèteschrétiens enseignent l’opinion contraire, qui fait remonterjusqu’à Xoé la prohibition de manger le sang desanimaux, et croient la trouver dans le texte Gen., ix, 4.
Pererius, In Genesim, Lyon, 1610, t. ii, p. 332; Cornéliusà Lapide, In Gen., ix, 4, t. i, p. 154; Rosenmiïller, In Gen., ix, 4, t. i, Leipzig, 1821, p. 183-181.L’historien Josèphe, par la manière dont il expose leprécepte Gen., ix, 4, semble abandonner sur ce pointl’opinion de ses compatriotes et regarder le sang commedétendu aux Noachides: «Je vous ai faits maîtres (ditDieu aux enfants de Noé) de tous les animaux tantterrestres que volatiles et aquatiques, à l’exception dusang, car en lui est la vie, x^P^’ï aiixato; , èv to-jtù) yapIg-ïj r] J/u-jpii Antiq. jud., i, iii, 8. — L’opinion de laGhemara paraît plus conforme au texte sacré; d’après lepassage de Gen., ix, 4, et les versions citées plus haut, onvoit qu’il s’agit, dans la défense imposée aux Noachides, non pas de la chair ou du sang, mais de la chair avecou dans le sang. Les partisans de l’opinion contrairesemblent avoir confondu le précepte de la Genèse avecles lois spéciales qui furent imposées plus tard, non plusaux Noachides, mais aux enfants d’Israël. — La défensede boire ou de manger le sang des animaux est répétéedans le Lévitique et le Deutéronome jusqu’à sept fois.Lev., iii, 17; vii, 26-27; xvii, 10-14; xix, 26; Deut., xii, 16; 23-24; xv, 23. Le législateur y met une insistanceinaccoutumée, comme on le voit dans ces passages.La défense est imposée non seulement aux enfants d’Israël, mais encore à l’étranger qui vit parmi eux; Lev., xvii, 10. Remarquons qu’il ne s’agit que du sang desanimaux qui vivent sur la terre, et des oiseaux; le sangdes poissons n’est pas interdit, comme on le voit Lev., vu, 26; xvii, 13.
2° Sanction de cette défense. — Elle est exprimée en troisendroits: «Tout homme qui aura mangé du sang périradu milieu de son peuple.» Lev., vii, 27; xvii, 14. Dansun troisième texte, Lev., xvii, 10, Dieu semble se chargerlui-même d’exécuter la vengeance: «Si un hommemange du sang, je poserai ma face contre lui, et je leperdrai du milieu de son peuple.» Dans ces trois passages, l’hébreu emploie le mot kârat, «extirper, couper;» lesSeptante ont traduit par è|o>t>6peu6?|<7eTat, ànoXtXzai, àno).<5, et la Vulgate par interibit, peribit, disperdam. On nesait pas exactement en quoi consistait la peine expriméepar le mot kârat. Ce mot qui est employé environ trente-sixou trentesept fois dans le Pentateuque comme pénalitésanctionnant différentes lois, signifie quelquefoisla peine de mort, par exemple, Ex., xxxi, 14; Lev., xvii, 4, et probablement Lev., xviii, 29, et ailleurs. Maison ne pourrait l’affirmer, d’une manière générale, pourtous les cas, en sorte que, dans le cas présent, nous nepouvons pas dire si le coupable était toujours puni de lapeine de mort. Michælis, Mosaisches Recht, § 237, 1780, t. v, p. 37-43; Gesenius, Thésaurus, p. 718. D’aprèsl’interprétation juive, appuyée, ce semble, sur le passage, Lev., xvii, 10, rapporté ci-dessus, le mot kârat signifieraitla peine d’une mort prématurée, infligée ou plutôtménagée par Dieu lui-même, par les voies secrètes desa providence. D’après les interprètes chrétiens, catholiquesou protestants, ce serait tantôt la peine de mort, prononcée par le juge humain, tantôt une sorte d’excommunication.Voir Bannissement.
3° Motifs de cette défense. — Ils peuvent se ramener auxtrois suivants: — 1. Le législateur a d’abord voulu détournerson peuple de toute effusion de sang humain. — Celaest évident par la combinaison des textes. Cf. Gen. ix, 4, et Lev., vii, 26; xvii, 10-14. Il est certain, par l’histoire, que les peuples accoutumés à boire le sang des animauxont été ordinairement très cruels, et sont arrivés à neplus faire aucune différence entre le meurtre d’un animalet celui d’un homme. C’est pour écarter le danger mêmeéloigné de cette barbarie que Moïse défend aux Israélitesde boire ou de manger le sang des animaux. S. JeanChrysostome, In Genesim, Hom. xxvii, 5-6, t. lui, col. 2K-247; Théodoret, In Deut., q. xi, t. lxxx, col. 420; S. Thomas, 1° 2*, q. 102, art. 3. - Bien plus, afin de
leur faire observer cette défense avec plus de fidélité etpar des vues plus élevées, Moïse prétend leur inspirerpour le sang un certain respect religieux, soit en les assurantque Dieu lui-même se réserve le sang comme uneoffrande expiatoire pour leurs péchés, soit en leur répétant, sous toutes les formes, que le sang c’est la viemême des animaux. Lev., xvii, 14; Deut., xii, 23. Cf.Rosenmùller, In Lev., xvii, 11, Leipzig, 1824, t. ii, p. 108. Cette dernière pensée était familière aux écrivainssacrés, on sait que les anciens mettaient dans le sang lesiège de la vie. Voir Virgile, JEn., i, 116-119; ix, 349; etc.
— 2. Un passage du Lévitique, xix, 26: «Vous ne mangerezrien avec le sang, vous n’userez pas d’augures, vous n’observerez pas les songes,» nous fait entrevoir un. autre motif d’interdire l’usage du sang aux Israélites.C’est que le sang, à cette époque, était employé à despratiques magiques, superstitieuses et idolâtriques; boirele sang était unepratique du culte des idoles. C’étaitune croyance répandue dans les premiers siècles de notreère, et qui venait évidemment d’une tradition très antique, que le sang était la nourriture des dieux ou des démons.Nous avons, comme témoins de cette croyance, des auteursextrêmement graves. Origène dit ces paroles remarquables: «Quant à ce qui regarde les chairs étouffées, comme le sang n’en est pas exprimé, et que le sang, dit - on, est la nourriture des démons, qui se repaissentdes parties qui s’en exhalent, l’Écriture nous interdit lesang, afin que nous ne nous nourrissions pas de la nourrituredes démons. Car peut-être, si nous mangions deschairs étouffées, quelques-uns de ces esprits en mangeraientavec nous; voilà aussi pourquoi nous nous abstenonsdu sang». Conl. Cels., viii, 30, t. xi, col. 1559. Etle savant docteur ne dit pas cela une fois en passant, ille répète en beaucoup d’autres endroits. Cont. Cels., IV, 32, t. xi, col. 1075; vii, 5, col. 1417; viii, 60, col. 1607; vin, 62, col. 1610; viii, 63, col. 1611; Exkort. adMartyr., 45, t. xi, col. 622-623. Comme on le voit par ce dernierpassage, et par d’autres, par exemple, De PHncip., Proœm., 8, t. xr, col. 120, Origène pensait que les démons, c’est-à-dire les faux dieux des païens, ont uncorps aérien, et que, pour soutenir ce corps, ils ont besoind’une certaine nourriture. Or, d’après l’opinion dont ilest le témoin, cette nourriture consiste surtout dans lesexhalaisons qui s’échappent du sang des victimes. Lamême opinion est rapportée par Tertullien, Apolog., 22, 23, t. i, col. 407, 415; Athénagore, Légat, pro christ., 26-27, t. vi, col. 952-953, et plusieurs autres; cf. Wetstenius, note sur Origène, dans Migne, t. xi, col. 621-625.Ces auteurs avaient emprunté cette opinion aux païens, chez qui elle était commune; leurs sages l’enseignaient, au témoignage de Celse, dans Origène, Cont. Cels., viii, 60, t. xi, col. 1607. C’est ce qui excitait la bonne humeur deLucien, De Sacrificiis, Opéra, Paris, 1615, p. 185. DansHomère, non seulement les dieux, mais encore les âmesdes défunts, aspiraient et buvaient le sang des victimes, comme on peut le voir Odyss., x, 35 et suiv. Maimonide, parlant des Zabiens, partisans du mazdéisme, dit qu’ilsboivent le sang des animaux, parce que, selon eux, c’estla nourriture des dieux. More Nebochim, iii, 46, traductionBuxtorf, p. 484. Voilà pourquoi, dans les sacrificesdes païens, on versait en abondance le sang desvictimes, afin d’apaiser et de satisfaire les dieux, en lesrégalant; voilà pourquoi aussi les païens buvaient le sangdes victimes, afin, pour ainsi dire, de partager la nourriturede leurs dieux, et de témoigner par là une unionplus étroite et plus intime avec eux. D’après llichælis, Mosaisches Recht, 206, t. iv, p. 220-221, c’était unecoutume, chez les nations païennes de l’Asie, de boiredu sang des animaux dans les sacrifices offerts aux idoleset dans la prestation des serments. En Perse, particulièrement, l’usage du sang comme boisson dans les sacrificesétait tellement reçu que, dans les temps de persécution, on forçait les chrétiens d? ce pays à boire du
sang, comme on les forçait ailleurs à brûler de l’encens; l’un et l’autre étaient également des signes d’apostasie.On buvait aussi également le sang des victimes dans lestemples de la Grèce et de Rome. Valère Maxime, V, yi, 3, édit. Lemaire, 1822, t. i, p. 395; Acta Fratrum Arvalium, édit. Henzen, Berlin, 1874, p. 21, 23-24; Prudence, Perist., x, 1011-1040, t. lx, col. 520-523. Tous lesauteurs s’accordent à signaler l’existence de ce rite idolâtriquechez les nations païennes. Kuinoel, In ActaApostolorum, xv, 20, Leipzig, 1827, p. 520; Spencer, DeLegibus Hebrseorum Ritualibus, La Haye, 1686, p. 450-451.
— Dès lors l’obligation de s’abstenir du sang, pour lesIsraélites, s’éclaire d’un nouveau jour. Tout le mondesait qu’un des buts principaux de Moïse, dans ses lois, c’était d’écarter à tout prix l’idolâtrie de son peuple; afind’atteindre cette fin plus sûrement, il-ni défend, et avecune grande sévérité, non seulement l’idolâtrie proprementdite, mais encore les pratiques qui, quoique permisesabsolument par le droit naturel, faisaient cependantpartie du culte idolâtrique chez les nations païennes, voisinesd’Israël. Tel était l’usage de boire le sang des animaux.Voilà pourquoi Moïse défend cette pratique avectant de rigueur, et c’est là ce qui explique, soit l’insistanceavec laquelle il intime cette défense, soit la gravitédes peines dont il menace les délinquants, soit le caractèreuniversel de cette loi, qui atteignait non seulementles Juifs proprement dits, mais encore, à la différencede beaucoup d’autres lois, les étrangers qui vivaient parmiles Juifs. Aussi plusieurs auteurs disent que le motif quenous exposons fut la raison principale qui fit défendreaux Israélites l’usage du sang. Maimonide, cité plus haut, fait même cette remarque, que Dieu n’a prononcé quedeux fois ces terribles paroles: «Je poserai ma facecontre lui;» une fois contre le père qui immole son filsà Moloch, Lev., xx, 3; l’autre fois contre celui qui boiraitdu sang, Lev., xvii, 10. More Nebochim, endroitcité, p. 484. — 3. Un troisième motif, qui n’est pas leprincipal, et qui n’est pas indiqué dans le texte, maisqui certainement n’a pas échappé au législateur, c’est lepoint de vue hygiénique. Ce motif est signalé par d’ancienscommentateurs, par exemple, Pererius, In Genesim, Lyon, 1610, t. 2, p. 335-336, et même par saintJean Chrysostome: «Le sang des animaux, dit ce Père, est lourd, terrestre, mélancolique, et le principe d’ungrand nombre de maladies; c’est pourquoi Moïse l’a interdit.» In Genesim, Hom. xxvii, 5, t. lui, col. 246.Notre langage est différent aujourd’hui, mais le fond estle même. Parlant de ces prohibitions de Moïse, le docteurGuéneau de Mussy s’exprime ainsi: «C’est dans lesang que circulent les germes d’un grand nombre demaladies infectieuses; les animaux doivent (d’après la loide Moïse) être saignés, avant d’être appelés pour servirà l’alimentation.» Étude sur l’hygiène de Moïse, in-8°, Paris, 1885, p. 8-9, dans F. Vigoureux, Les Livres Saints, 1887, t. iii, p. 617. Il n’est personne qui ne reconnaissela sagesse de cette loi mosaïque, au point de vue hygiéniqueen général, et plus spécialement pour l’Orient, oùla question de l’alimentation réclame des soins très particuliers.D’après plusieurs auteurs, c’est même là lemotif pour lequel Moïse a écarté absolument, même duculte du vrai Dieu, l’usage de boire du sang dans les sacrifices.En effet, Moïse, dans ses prescriptions liturgiques, a adopté certains rites en usage chez les païens, en lesrapportant et en les consacrant au culte de Jéhovah. Pourquoin’aurait-il pas fait de même pour l’usage du sang?C’est que cet usage paraît contraire au sentiment naturelde l’homme, qu’il peut avoir une influence fâcheusemême sur le moral, et que, spécialement, au point devue de la santé, il peut être nuisible, et même, danscertains cas, mortel. Michælis, Mosaisches Recht, § 206, t. iv, p. 221-223. — Tels sont les trois motifs qui ontengagé le législateurhébreu à faire cette prohibitionsévère; et l’on ne’peut s’empêcher d’admirer avec quelle
sagesse et quelle habileté, dans un. seul point de sa législation, Moïse a su satisfaire, et du même coup, tous lesintérêts, religieux, politiques, hygiéniques et moraux deson peuple, le maintenir dans le culte du vrai Dieu, procurerson bien physique, et, en même temps, le dirigerdans la voie de la civilisation. — Nous retrouvons cetteprohibition chez quelques autres peuples: par exemple, chez les Arabes. Cf. Sale, Observations sur le mahométisme, Section v, dans Pauthier, Les Livres sacrés del’Orient, Paris, 1843, p. 514. Mahomet l’a conservée dansle Koran, ii, 168; v, 4, etc., traduction Kasimirski, Paris, 1891, p. 25, 85. Les Arabes sont restés fidèles àcette loi, comme nous le voyons, pour le siècle dernier, par Niebuhr, Description de l’Arabie, traduction française, in-4°, Paris, 1779, t. i, p. 250.
4° Observation de cette défense. — Dans tous les temps, et même après leur dispersion dans le monde, nous voyonsles Juifs très fidèles à observer cette prohibition mosaïque.Elle est consignée dans la Mischna, traité Kerithouth, v, édit. Surenhusius, t. v, p. 257, et, parmi les trente-sixexcommunications qui sont portées (dans ce même traité, i)contre différents délits, la vingtquatrième frappe ceuxqui mangent du sang. Les auteurs qui ont écrit sur leslois ou coutumes juives s’accordent à reconnaître que lesJuifs sont fidèles à la prescription de Moïse sur ce point.C’est le témoignage que leur rendent Buxtorf, SynagogaJudseorum, Bàle, 1641, xxvii, p. 399; Michælis, MosaischesRecht, § 206, t. iv, p. 220; Saalschùtz, DosMosaische Redit, Berlin, 1853, k. xxix, p. 262; Léonde Modène, Cérémonies et coutumes des Juifs, ii, 7, Paris, 1081, p. 66-69.
5° Cette défense sous la Nouveau Testament. — Ladéfense de boire le sang des animaux fut renouvelée parles Apôtres au concile de Jérusalem (année 51 ou 52), etétendue aux Gentils convertis à la foi. Act., xv, 20. Cefut une époque mémorable dans l’histoire de l’Églisenaissante. Avant le concile, plusieurs judéo-chrétiens, zélés pour la loi de Moïse, disaient aux Gentils qu’ils nepouvaient espérer de salut sans la circoncision, Act. xv, 1, et, par suite, sans l’observation de toute la loi à laquelleon s’engageait en recevant la circoncision. Act., xv, 5., Les Apôtres et les Anciens se réunirent pour délibérersur cette grave question, qui suscita de grands débats.Act., xv, 7. Les uns prétendaient qu’il fallait imposer auxGentils le joug de la loi de Moïse; Pierre fut d’un autreavis, alléguant la conversion de Corneille, qui avait reçule don du Saint-Esprit, indépendamment de la loi de Moïse.Jacques, évêque de Jérusalem, proposa, entre les deuxextrêmes, un moyen terme. Il appuya le principe posépar Pierre, mais il opina qu’il était à propos d’interdire auxGentils devenus chrétiens les viandes immolées aux idoles, le sang, les viandes étouffées et la fornication. Toutel’assemblée adopta cet avis, et, en conséquence, elle écrivitaux Gentils convertis d’Antioche, de Syrie et de Cilicie, ces paroles: «Il a paru bon au Saint-Esprit et à nous, de ne pas vous imposer d’autre fardeau que celui-ci, quiest indispensable, de vous abstenir des mets immolés auxidoles, du sang, des viandes étouffées et de la fornication.» Act., xv, 28. Ainsi fut étendue à tous les membresde l’Église la défense de boire le sang des animaux. Pourquoi, dans le naufrage de toutes les observances mo-: saïques, cette loi spéciale fut-elle maintenue avec uneou deux autres seulement? La raison en est évidente, après ce que nous avons dit des motifs de cette loi. Commel’usage de boire le sang des animaux était, chez lespaïens, une pratique idolâtrique, il était très opportun, pour ne pas dire nécessaire, de l’interdire aux chrétiens, tant qu’ils vivaient au milieu des païens, soit afin d’écariter pour eux le plus possible le danger de l’idolâtrie, soitafin de protester contre cette injure faite au vrai Dieu.Telle est la raison que donnent, du décret apostolique, Spencer. De Legibus Hebrseorum rituahbus, La Haye, ’1686, p. 449-472; Michælis, Mcsaisches Recht, § 206, i
t. iv, p. 224; Kuinoel, In Act. Apost., xv. 20, Leipzig, 1827, p. 520. Aussi nous voyons le décret du concile deJérusalem, sur le point qui nous occupe, observé parleschrétiens, et, au besoin, rappelé par les premiers pasteurs, tant que le paganisme fut debout; Canon 62 desApôtres; Canon 2 du concile deGangres’vers 362), dans-Mansi, Concilia, Florence, 1759. t. ii, col. 1101; Clémentd’Alexandrie, Pœdag., iii, 3, t. viii, col. 592^sainte Byblias, martyre, dans Eusèbe, H. £., v, 1, t. xx, col. 417; Tertullien, Apolog., ix, t. i, col. 323-324-MinuciusFélix, Octavius, xxx, t. iii, col. 335; S. Augustin, Contra Faustum, xxxii, 13, t. xlii, col. 504. Ilsurvécut quelque temps à la chute du paganisme, aumoins dans quelques pays; au VIIe siècle, il fut renouvelépar le concile in Trullo (692 <, can. 69; au IXe, par l’empereurLéon le philosophe (886-911), Nou. -58. Cf. NoëlAlexandre, Historia ecclesiastica, Bingen, 1786, t. iv, p. 318-3-25.
III. Chairs étouffées. — 1° Notion et prohibition.
— Les mots «chairs étouffées» ne se trouvent pas dansl’Ancien Testament; nous trouvons seulement le verbehânaq, au pihel et au nipltal, signifiant «étrangler, étouffer». Nahum, ii, 13; II Sam. (Reg.), xvii, 23. LesSeptante, Nahum, ii, 13, ont traduit ce mot parle verben-nym; c’est aussi le mot correspondant dans le NouveauTestament; nous le trouvons Matth., xiii, 7, où il est ditdes épines, qui «étouffent» le bon grain; xviii, 28, oùil est dit du méchant serviteur qui «serre» la gorge àson débiteur; Marc, v, 13, où il est dit des animaux quipérissent «étouffés» dans la mer. De ce verbe est dérivél’adjectif uvixtov, Act. xv, 20, 29; xxi, 25, que l’on traduitordinairement par «viandes étouffées». — On entendpar «viandes étouffées» les chairs des animaux tués parlefait de l’homme sans effusion de sang. La légitimitédecette définition résultera de tout ce que nous dironsdans ce paragraphe. Il ne s’agit donc pas des animauxqui sont, morts ou de leur mort naturelle ou déchirés parles bêtes, mais des animaux tués par l’homme directementou indirectement, autrement que par l’effusion dusang. La loi qui concerne ces «viandes étouffées» estrenfermée Lev., xvii, 13-14. Il y est strictement défendude manger la chair des animaux ou oiseaux pris ou tuésà la chasse, si l’on n’a point préalablement versé le sang, de ces animaux, et si on ne l’a pas enfoui dans la terre.Ce qui est ordonné ici spécialement des animaux ou oiseauxpris à la chasse, est étendu ensuite indistinctementà tous les animaux. Deut., xii, 1$1-$26; 23-24; xv, 23. Quand on veut manger leur chair, il faut les tuerpar l’effusion du sang; ou, s’ils ont été tués autrement, il faut verser leur sang, et répandre ce sang sur la terre «comme de l’eau». C’est ce que fit exécuter Saùl, I Reg., xiv, 32-34.
Telle est la loi portée par Moïse; elle est le développementet l’extension de la précédente qui concerne le sangdes animaux. Moïse ne veut pas que les Israélites mangentou boivent le sang, soit séparé de la chair, soit renferméencore dans les veines de l’animal; il veut qu’on versece sang, et qu’on le répande sur le sol. Cette loi ne.remonte pas au delà de Moïse; le précepte contenuGen., ix, 4, regarde seulement, comme nous l’avonsexpliqué, la chair «avec son âme ou sa vie», c’est-à-direla chair encore vivante; la manducation des «chairsétouffées» ne fut défendue que plus tard et aux seulsIsraélites. Nous croyons donc fausse l’opinion de saintJean Chrysostome, d’après lequel manger «la chair avecle sang», ce qui est défendu Gen., ix, 4, ce serait mangerdes «viandes étouffées». S. Jean Chrysostome, InGen., Hom. xxvii, 5-6, t. i.m. col. 246-247.
Afin d’observer plus fidèlement la loi de Moïse, prohibantles «chairs étouffées», les Israélites ont perfectionnél’art de tuer les animaux, afin que le sang s’écoulâtplus complètement et qu’il n’en restât que le moinspossible dans la chair de l’animal. Les prescriptions rab
biniques qui concernent ce point sont renfermées dans laMischna, traité Kôlin, dont les douze chapitres traitent laquestion sous toutes ses faces. De plus, à l’usage desbouchers israélites, les maîtres ont composé des manuelsqui, joints à l’expérience, pouvaient apprendre aux aspirantsl’art de tuer. Buxtorf, Synagoga Judseorum, Bâle, 1641, c. 27, p. 400, donne un aperçu de ces manuels; ilnous apprend que, de son temps, les rabbins délivraientdes diplômes qui conféraient aux candidats le droitd’exercer les fonctions de boucher; il donne même le texted’un de ces diplômes, qu’il a eu sous les yeux. Maimonide, More Nebochim, iii, 48, p. 496, fait observer que, dansles prescriptions dont nous parlons, les rabbins se sontproposé, non seulement de verser le sang plus complètement, mais aussi de rendre aux animaux la mort leplus douce ou plutôt le moins cruelle possible. — Noustrouvons la même loi sur les «chairs étouffées» chezles Arabes; Mahomet l’a consignée dans le Koran, v, 4.D’après Niebuhr, Description de l’Arabie, Paris, 1779, t. i, p. 249, cette loi est encore parfaitement observéechez eux.
2° Sanction de cette loi. — C’est la même que pour laloi qui défend de boire ou de manger le sang des animaux.Moïse, ayant défendu, Lev., xvii, 13, de mangerles animaux tués sans elfusion de sang, ajoute, .J. 14, laraison et la sanction: «Car la vie de toute chair estdans son sang; c’est pourquoi j’ai dit aux enfants d’Israël: Vous ne mangerez pas le sang des animaux, car leur vieest dans leur sang; quiconque le mangera, périra.» Cedernier mot traduit le verbe hébreu kârat, «extirper, couper». La peine est donc la même que nous avonsexpliquée au paragraphe précédent, c’est-à-dire peut-êtrela peine de mort, dans tous les cas une peine très grave, une sorte d’excommunication.
3° Motifs de cette loi. — Ce sont les mêmes encore, proportiongardée, que pour la défense de boire ou de mangerle sang des animaux. Nous signalons surtout les deuxsuivants: — 1. Le premier nous est indiqué par le textemême que nous venons de citer, Lev., xvii, 14 et parDeut., xii, 23-24: «Car leur sang, c’est leur vie, et ainsivous ne devez pas le manger avec leur chair.» Dieu veutdétourner les Israélites de l’effusion du sang humain; pour les éloigner de la pensée de commettre ce crime, il leur inspire une sorte de respect religieux, même pourle sang des animaux; sans doute, ils pourront le verser, mais ils ne pourront jamais le boire, ni séparé de la chairde l’animal, ni encore mêlé à cette chair. Pourquoi?parce que ce sang, c’est la vie; or ce serait une chosecruelle, barbare, de boire ou manger la vie des animaux.— 2. Le second motif se rapporte au but principalque s’est proposé Moïse dans l’ensemble de sa législation, qui était d’éloigner à tout prix le peuple de Dieu, non seulement de l’idolâtrie proprement dite, mais encorede toutes les pratiques idolùtriques, et de tout ce quipourrait, de près ou de loin, les faim tomber dans cecrime. Nous renvoyons ici aux textes d’Origène cités ouindiqués plus haut, col. 493, qui regardent à la fois les «chairs étouffées» et le sang. D’après ces textes, témoinsde toute une tradition païenne, le sang, si appétissantpour les démons, n’était pas seulement le sang séparé dela chair de l’animal, mais encore celui qui est renfermédans ses veines; voilà pourquoi, dit Origène, «afin dene pas participer à la table des démons, nous nous abstenons, non seulement de boire le sang des animaux, mais encore de manger la chair des animaux tués parsuffocation,» c’est-à-dire autrement que par l’effusiondu sang. Aussi, pour les chrétiens, le sang des animaux, même renfermé dans leurs veines et mêlé à leur chair, était un aliment impur. Voir aussi Tertullieu, Apolog., t. i, col. 323-324. — Cette tradition païenne était plusque suffisante pour autoriser et même obliger Moïse àdéfendre à son peuple les «viandes étouffées»; mais, deplus, chez plusieurs peuples païens, l’usage était d’immoler aux dieux les victimes, non pas en répandantleur sang, mais en les étouffant. Je ne sais si cet usageétait en vigueur chez les peuples au milieu desquelsvivaient ou devaient vivre les Israélites; mais Strabonnous apprend qu’il était pratiqué chez les Indiens.Strabon, XV, I, 54, édit. Didot, p. 604. Voilà pourquoiGuillaume de Paris, De Legibus, c. 8, Opéra omnia, Rouen, 1674, t. i, p. 38-39, dit que la suffocation étaitun mode d’immolation aux démons, par lequel on croyaitleur sacrifier l’âme même des animaux. Aussi plusieursauteurs, dont parle Alexandre de Halès, Sumnia theologica, part, iii, q. 15, assurent-ils que la raison principalepour laquelle Moïse défendit à son peuple les «chairsétouffées,» c’est précisément que la suffocation était, chezplusieurs peuples païens, un des rites sacrés par lesquelson immolait aux démons.
4° Détail particulier dans l’accomplissement de cetteloi. — Un mot du Lévitique reste à expliquer. Dans le chapitrexvii, 13, après avoir ordonné aux Israélites derépandre le sang de tous les animaux qu’ils voulaientmanger, Moïse leur commande «d’enfouir ce sang sousterre.» Ici encore, le législateur hébreu veut détournerson peuple d’une pratique idolâtrique. C’était un usagechez les païens de se réunir autour du sang répandu, comme si c’était un objet sacré, et presque une divinité.Nous voyons dans Homère les âmes des morts se réunirautour du sang des animaux qu’Ulysse avait immolés.Odys., xi, 36-37. Cf. Guillaume de Paris, à l’endroitcité. Afin d’empêcher les Israélites de se réunir autourdu sang qu’ils avaient versé, ou de lui rendre quelqueautre marque extérieure du culte idolâtrique, il veutqu’ils le fassent disparaître en l’enfouissant sous terre.Cette explication nous est donnée par Maimonide, MoreNebochim, iii, 46, p. 485. Elle a été acceptée par Spencer, De Legibus Hebrseorurn Ritualibus, i, 6, p. 106.
5° Les. chairs étouffées, dans le Nouveau Testament. —La défense de manger des «chairs étouffées» fut renouveléepar les Apôtres au concile de Jérusalem, et étendueaux Gentils convertis, Act. xv, 20, 29; elle fut renouveléepour les mêmes motifs et dans le même texte de loique la défense de boire le sang des animaux. S. Jérôme, In Ezech., xliv, 3, t. xxv, col. 444, nous montre les «chairs étouffées» encore prohibées de son temps, aumoins en Orient, où il écrivait alors; mais d’après saintAugustin, Cont. Faust., xxxii, 13, t. xlii, eol. 504, laprohibition était tombée en désuétude, en Afrique, dansla première moitié du v siècle. Du reste, les deux défensesconcernant le sang des animaux et les «viandes étouffées», étaient indissolublement unies, et ont passé parles mêmes phases historiques pour l’origine, le développementet la décadence.
IV. Chairs des animaux morts d’eux-mêmes ou déchiréspar les bêtes. — Les animaux morts de maladie ontaussi attiré l’attention du législateur hébreu; leur chair (hébreu: nebêlàh; Vulgate: morticinum) est interdite commenourriture. Sur la même ligne sont placés les animauxmorts déchirés par une bête, soit qu’ils aient été tuéspar cette béte, soit que, étant morts autrement, ils aientété entamés par elle. Les lois qui concernent ces deuxcatégories d’animaux se trouvent Exod., xxii, 31; Lev., xvii, 15-16 (cf. xi, 39-40; xxii, 8); Deut., xiv, 21. Moïse, dans ces textes, défend strictement aux Hébreux de mangerla chair de ces animaux. Évidemment il ne s’agit, dans ces passages, que des animaux «purs»; car pourles «impurs», s’ils sont souillés étant vivants, à plus
; forte raison lorsqu’ils sont morts. La sanction de cette’loi, c’est une «impureté légale», encourue par le délin; quant, en vertu de laquelle il est déclaré «impur» pendant
une journée entière, et obligé de se laver le corps
: et les vêtements, sous peine de châtiments plus sévères.
Lev., xvii, 15-16. — Quelques auteurs confondent, sousle rapport de l’abstinence, la chair des animaux mortsi d’eux-mêmes, morticina, avec les «viandes étouffées»,
dont il a été question plus haut; ils comprennent lesmorticina parmi les carnes suffocatse, sous prétexte quele sang des animaux reste dans leur cadavre, quand ilssont morts d’eux-mêmes ou déchirés par les bêtes, commelorsqu’ils ont péri par la suffocation. Cette confusion aconduit ces auteurs à donner une extension beaucouptrop grande au décret du concile de Jérusalem, Act. xv, 20, 29; ce décret défendant les «chairs étouffées», cesauteurs prétendent qu’il défend par là même les morticina.— C’est une erreur; dans la législation mosaïque, les deux défenses sont tout à fait distinctes; elles diffèrentquant à la sanction; la loi qui défend «les chairs étouffées» a pour sanction la peine spéciale du kàrat, c’est-à-direla mort ou l’excommunication, Lev., xvii, 13-14; la loi qui défend les «chairs mortes» a pour sanctionune simple impureté légale. Lev., xvii, 15-16. Les deuxlois diffèrent aussi quant au sujet: la première oblige nonseulement les Hébreux proprement dits, mais même lesétrangers qui habitent dans le pays d’Israël, Lev., xvii, 13-14; la seconde n’oblige que les Hébreux et permetformellement les morlicina aux étrangers. Deut., xiv, 21.Aussi appelait-on les étrangers «mangeurs de chairsmortes». Spencer, De Legibus Bébrœorum Ritualibus, p. 440; Selden, De jure naturali, vii, 1, Wittenberg, 1770, p. 828. Ces lois diffèrent quant aux motifs qui lesont fait porter; les motifs de la loi contre les «chairsmortes» sont la propreté et l’hygiène; dans l’autre loi, Moïse s’est proposé des motifs d’un ordre moral et biensupérieur, ceux surtout de détourner les Juifs de l’effusiondu sang humain et de l’idolâtrie. Enfin les deux loisdiffèrent quant à la rigueur de l’obligation: la loi concertnant les «viandes étouffées» est très grave, à cause deson but, et l’on ne voit nulle part qu’elle dût céder dansaucune circonstance; la loi contre les «chairs mortes» cédait, soit dans le cas où les soldats hébreux passaientsur un territoire étranger, comme l’enseigne Maimonide, De Regibus, traduction de Leydekker, 1098, c. 8, n. 1, soit généralement dans le cas de nécessité, comme le ditGrotius, De jure belli, I, iv, § 7, n» 1, La Haye, 1680, p. 97.
Nous venons d’insinuer les motifs de la loi qui défendla chair des animaux morts d’eux-mêmes ou déchiréspar les bêtes; ils se ramènent à deux principaux. — 1. Lepremier, c’est la vileté et l’impureté de cette nourriture; elle ne mérite que d’être jetée aux chiens, Exod., xxii, 31; ce serait se souiller que de la prendre. Lev., xxii, 8.L’idée que Moïse donne de cette nourriture est tellementconforme à celle qu’en ont tous les peuples civilisés, qu’il suffit de l’énoncer pour la comprendre et l’accepter.Dieu voulait ainsi peu à peu purifier et élever les mœursde son peuple; bien plus, il voulait les sanctifier; carc’est sous forme de précepte religieux qu’il propose cetteloi. Deut., xiv, 21; Lev., xxii, 8. — 2. Le second motif, c’est l’hygiène. La chair des animaux morts d’eux-mêmesest insalubre; la maladie qui les a fait mourir peut secommuniquer par la manducation à ceux qui s’en nourriraient; il en est de même des animaux déchirés par lesbétes; leurs chairs ont été exposées, pendant plus oumoins longtemps, aux piqûres et aux morsures des insectes, reptiles, oiseaux de proie, etc.; elles sont doncdangereuses, surtout dans les pays chauds, où les chairsse décomposent plus proinptement. Maimonide a signalél’insalubrité de ces chairs, More Nebochim, iii, 48, p. 495. — En raison de ces deux motifs, nous trouvonsles mêmes prescriptions dans plusieurs pays orientaux.Mahomet les a empruntées aux Hébreux, Koran, ii, 168; v, 4, 6, traduction Kasimirski, p. 25, 85. Elles sont encoreobservées par les Arabes, d’après Niebuhr, Descriptionde l’Arabie, t. i, p. 249. Pythagore recommandait aussicette abstinence; il dit que la pureté du corps consiste, entre autres choses, à s’abstenir des chairs déjà mangées(par les bêtes), ou des animaux morts d’eux-mêmes.Dans Diogène Lærce, De Vilis phil-, viii, Pythagoras,
33. édit. Didot, p. 212. Cf. Rosenmùller, In Exod., xxii, 30, t. ii, p. 387.
V. Autres cas particuliers d’abstinence. — En terminantce qui concerne la chair des animaux au pointde vue de l’abstinence, signalons quelques prohibitionsparticulières de la loi mosaïque qu’il suffit d’indiquer oudont il sera traité plus à fond dans les articles spéciaux.
— 1. Les hommes «souillés», c’est-à-dire frappés d’unedes impuretés légales établies par Moïse (Voir Impuretélégale), ne peuvent manger de la chair des hosties pacifiquesoffertes au Seigneur. Lev., vii, 20-21. Ce délit estfrappé de la peine du kâraf, dont il a été plusieurs foisparlé. On sait que, dans la plupart des sacrifices, uneportion de la chair des victimes revenait à ceux qui lesavaient offertes. — 2. La chair des victimes offertes auSeigneur, qui avait touché quelque chose d’ «impur», ne pouvait être mangée, mais devait être brûlée. Lev., vu, 19. — 3. La chair des victimes offertes au Seigneurne pouvait être mangée que le jour même du sacrifice, ou le lendemain, jamais le troisième jour; s’il restequelque chose le troisième jour, il faut le brûler. Lev., vu, 16-18. Ici, la raison de la loi, c’est l’hygiène; nousavons déjà remarqué qu’en Orient la chair des animauxmorts ou tués subit une décomposition rapide. — 4. Siun bœuf frappe de sa corne un homme ou une femme, et que la mort s’ensuive, le bœuf sera lapidé, et sa chairinterdite. Exod., xxi, 28. C’est le respect pour la viehumaine qui a dicté cette prescription. — 5. Tout vase, sur lequel tombe un insecte ou un reptile mort, estsouillé; l’eau qu’il renferme est souillée et interdite; tout aliment sur lequel tomberait cette eau serait égalementsouillé et interdit, Lev., xi, 31-35; cf. Num., xix, 15. Les commentateurs admirent ici les soins attentifset presque minutieux que prend Moïse pour maintenirla propreté et écarter tout danger d’empoisonnement.Cf. Michælis, Mosaisches Recht, § 205, t. iv, p. 207-208.
— 6. La loi de Moïse reproduit jusqu’à trois fois cettedéfense spéciale: «Vous ne ferez pas cuire un chevreaudans le lait de sa mère.» Exod., xxiii, 19; xxxiv, 26; Deut., xiv, 21. Voir Chevreau. — 7. Le vœu du Nazaréatobligeait aussi à une abstinence particulière. VoirNazaréen. — 8. La graisse des animaux est aussi l’objetde prohibitions spéciales au point de vue de l’abstinence.Voir Graisse. — 9. Les viandes immolées aux idoles sontégalement frappées d’une interdiction sévère. Voir Idoles.
S. Many.
CHAIRE. Ce mot vient du grec xaôsSpa, de xarâ eté’Spct, «siège» (qui dérive lui-même de É£ou.ai’, i s’asseoir» ), par l’entremise du latin cathedra.
I. Signification du mot. — 1° Catliedra, dans les auteursclassiques, désigne proprement une chaise sans bras, mais à dossier, comme celles dont se servaient les femmes(fig. 168). Horace, Soi., i, 10, 91; Martial, Ep., iii, 63, 7; xii, 38; Properce, iv, 5, 37; Phèdre, Fab., iii, 8, 4; Calpurnius, vii, 26, par opposition à sella. Voir Siège.Cf. Daremberg et Saglio, Dictionnaire des antiquités, t. i, 1877, p. 970. — 2° Cathedra désigne aussi le siègesur lequel s’asseyaient les philosophes et les maîtres derhétorique (fig. 169) pour faire leurs leçons (Juvénal, vi, 90; Sénèque, De brev. vit., 10; Martial, i, 77, 14; Philostrate, Soph., ii, 2; Sidoine Apollinaire, Carrn., vu, 9, t. lviii, col. 678; Ausone, Epigr. 46), de sorte quece mot devint comme un terme consacré pour signifierla chaise du professeur ou, en général, de celui quienseigne. Par extension, elle devint également commele symbole ou l’emblème de l’autorité enseignante. C’estdans ce sens qu’elle est passée dans le langage ecclésiastique, où elle s’entend, au sens propre, du siège surlequel s’asseyait le pape ou l’évêque pour présider l’assembléedes fidèles, les instruire et remplir ses fonctionssacrées, et, au sens figuré, de l’autorité pontificaleet épiscopale elle-même (Chaire de saint Pierre, le Saint-Siège, etc.). De là aussi l’église principale d’un SOI
CHAIRE
502
diocèse, dans laquelle est placée la cathedra de l'évêque, a pris le nom de «cathédrale». À cause de cette signification symbolique, les premiers chrétiens représentèrentDieu le Père, NotreSeigneur (fig. 170, et t. i, fig. 187,
168. — Jeune Grecque assise sur une cathedra, avec une esclavequi tient un éventail. D’après W. Hamilton, Collection of vases.mostly of pure Greeclc workmanshïp, 3 in-f°, Nàples, 1791-1795.
col. 787) et la Sainte Vierge (t. i, fig. 161, col. 654) commeles pontifes, assis sur une cathedra.
11. Emploi du mot cathedra daxs les versions de.l'Écriture. — Les Septante se sont servis plusieurs fois
109. — Professeur assis sur sa chaire. Peinture du columbariumde la villa PanBli. D’après les AbUandlungcn àer baierischenAltadewve âer Wissenschafben, Philologische Klasse, t. viii, pi. v.
du mot y.aBiôpa dans l’Ancien Testament, I Reg., xx, 18, 2j, etc. Saint Matthieu, xxi, 12; xxiii, 2, et saint Marc, xi, 15, en ont fait usage à leur tour dans le Nouveau.( Les Évangélistes emploient de plus irpwTOxaBîôpi’a, Matth., xxiii, 6; Marc, xii, 39; Luc, xi, 43; xx, 46.)De même la Vulgate.
1° Dans l’Ancien Testament. — La version latine emploiele mot cathedra: 1. une fois pour désigner le siège royal(appelé communément thronus), en parlant de Saûl,
I Reg., xx, 25 (hébreu: môsâb); — 2. plusieurs fois pourdésigner «un siège d’honneur», Eccli., vii, 4 (-/.aOé&pa865c,; ); xii, 12; Job, xxix, 7 (môsâb); Ps. evi (cvn), 32.Dans ce dernier passage, cathedra seniorum (hébreu: môsab zekênîm) signifie le lieu où les anciens du peuple
1 70. — Fond de verre représentant Notre-Seigneur sur une cathedra.D’après GarrucCi, Vetri ornati di figure in oro, pi. xviii, 4.
s’assemblent et s’asseoient pour délibérer. — 3. Dans lePsaume i, 1, cathedra pest-ilentise (hébreu: môsab lêsim, «le siège des moqueurs, de ceux qui tournent la vertuen ridicule» )e ?t pris dans un sens figuré pour exprimerle lieu où se rassemblent les méchants, et où par conséquent on les fréquente et vit dans leur société. — 4. DansÉzéchiel, xxviii, 2, cathedra signifie «demeure, résidence». Le prophète, au nom du Seigneur, met ces paroles dans la bouche du prince de Tyr: «Je suis dieu{'êl), et je suis assis sur le siège des dieux (môsab'élôhîm; Vulgate: in cathedra Dei) au cœur de la mer.» L'île de Tyr est appelée le siège ou la demeure des dieux,
171. — Chaire de saint Pierre.D’après Kraus, RealEncyMopaûle. t. ii, p. 157.
par allusion aux croyances mythologiques de ses habitants, qui attribuaient au dieu Melqart la fondation deleur ville, et disaient que les dieux y avaient établi leurrésidence. Movers, Die Phônizier, Bonn et Berlin, 1841, t. î, p. 258; t. ii, part, i, p. 125.
2° Dans le Nouveau Testament. — Notre version latinea conservé le mot cathedra partout où se trouvait le grecxaOiopa (et 7: pw: o-/.aÇ)îSp; a). — 1. Dans Matth., xxi, 12, et Marc, xi, 15, cathedra signifie simplement les sièges
des vendeurs de colombes dans le Temple de Jérusalem.
— 2. Dans Matth., xxiii, 6; Marc, xii, 39; Luc, xi, 43; xx, 46, il s’agit des places d’honneur dans les synagogues, c’est-à-dire des sièges particuliers réservés aux ancienset aux personnages de marque près du coffré où l’onconservait un exemplaire de la loi de Moïse. — 3. Notre-Seigneur, en saint Matthieu, xxiii, 2-3, dit au peuple: «Les scribes et les pharisiens sont assis sur la chairede Moïse; gardez donc et faites tout ce qu’ils vous disentde faire; mais n’imitez pas leurs exemples, car ils disentet ne font pas.» Dans ce passage, la cathedra de Moïseest le symbole de son autorité. Les scribes et lés docteursétaient les successeurs de Moïse dans l’enseignement etl’explication de la Loi, et chez les Juifs, à cette époque, on avait coutume de dire de celui qui succédait à undocteur de la loi qu’il «était assis sur son siège», yav isD3. _1: y. Voir Vitringa, De synagoga veteri, Franekère, 1696, p. 271. Les rabbis, qui enseignaient la Loi, la lisaient d’abord debout, et l’expliquaient ensuite assis.Celui qui succédait à un maître après sa mort héritait deson siège comme de son autorité. C’est surtout à causede ces paroles de Notre -Seigneur que la chaire est devenuedans l’Église chrétienne la marque et le symbolede l’autorité. Saint Pierre, d’après la tradition, enseignasur une cathedra dans la maison du sénateur Pudens.Elle est conservée au fond de l’abside de l’église Saint-Pierreau Vatican (fig. 171). Sa forme est celle des chaisescurules des anciens Romains; elle est en bois de chêneet d’acacia, avec des ornements en ivoire sur lesquelssont représentés les fabuleux travaux d’Hercule et diversesautres scènes. — Voir Martigny, Dictionnaire des antiquitéschrétiennes, 2e édit., 1877, art. Chaire, p.’159-162; H. Kraus, Real-Encyklopàdie der christlichen Alterthûmer, 2 in-8°, Fribourg, 1882-1886, t. ii, p. 153-161; P. Allard, Rome souterraine, in-8°, Paris, 1874, p. 536-550.
F. Vigouroux.
CHAISE. Voir Siège.
- CHAIX Charles Pierre##
CHAIX Charles Pierre, théologien calviniste, né àGenève en janvier 1701, mort à la Haye en 1785. Il futreçu pasteur de cette ville en 1728. Dans ses ouvrages, il eut souvent recours aux écrits de Thomas Stackouse.Nous avons de Ch. Chaix: Le sens littéral de l’ÉcritureSainte, 3 in-8°, la Haye, 1738; La Sainte Bible avec uncommentaire littéral composé de notes choisies et tiréesde divers auteurs anglais, 6 in-8°, la Haye, 1742-1777.
— Voir Quérard, La France littéraire, t. ii, p. 112.
B. Heurtebize.
- CHALAL##
CHALAL (hébreu: Kelâl; Septante: Xx).-^X), un desfils ou descendants de Phahath-Moab. Au retour de lacaptivité de Babylone, il renvoya la femme qu’il avaitépousée contre la loi. 1 Esdr., x, 30.
CHALANÉ. Amos, vi, 2. Voir Chalanne.
- CHALANNÉ##
CHALANNÉ (hébreu: Kalnéh, Gen., x, 10; Amos, VI, 2; Kalnô, Is., x, 10; Septante: XaÀâvw], Gen., x, 10; XsXivï], Is., x, 9; omis dans Amos; Vulgate: Chalanne, Gen., x, 10; Chalane, Amos, vi, 2; Calano, Is., x, 9). On croit généralement que Kalnéh et Kalnôdésignent non pas deux localités, mais une seule. Onvoit du reste que les divergences dans l’hébreu sontbeaucoup moins considérables que dans les Septante etdans la Vulgate: tout se réduit à la désinence du mot, qui est n (hé) dans la première série et ^ (vav) dans laseconde. Or la confusion entre ces deux lettres est aisée, et partant fréquente dans la transcription du texte hébreu.
— De plus, le contexte semble lui-même conduire à l’identification.La ville mentionnée par Amos paraît être lamême que celle de la Genèse. Or Amos et Isaïe offrentune ressemblance frappante: pour effrayer Samarie etJérusalem, ces deux prophètes mentionnent plusieursvilles autrement fortes et qui ont été prises cependant
j par les Assyriens, parmi lesquelles se trouvent des deux
: côtés Émath et Calneh ou Calno. Puis Amos ajoute: : «Êtes-vous meilleurs, c’est-à-dire plus forts, que ces
royaumes? (et il semble qu’on doit lire le vers suivant;
: Et vos frontières sont-elles plus étendues que leurs
frontières?)» texte rendu dans la Vulgate par ces mots: ’et ad optima quseque régna horum. Dans Isaïe, c’est le’roi assyrien Sennachérib qui rappelle à Jérusalem la| chute d’Émath et de Calnô, et il y ajoute une réflexionanalogue à la précédente: «Comme ma main a atteintces royaumes…, et cependant leurs dieux étaient plus
! nombreux que ceux de Samarie et de Jérusalem…, ainsi
ferai-je de Jérusalem et de ses dieux.» — La plupart
! admettent l’identité de Chalanne et de Calno, comme le! faisait déjà Calmet, Commentaire littéral, Isaïe, 1714,
| x, 9, p. 125; Les XII petits prophètes, 1715, Amos, j vi, 2, p. 240. Schrader-Whitehouse, The Cuneiform| Inscriptions and tlie Old Testament, 1885-1888, t. ii, p. 78 et 143-144; Riehm, Handwôrlerbuch des BiblischenAltertums, t. i, p. 214, art. Calne. Néanmoinsquelques savants, comme M. Pinches, dans Smith, Dictionaryof the Bible, t. i, 2e édit. p. 487, croient que laChalané d’Amos est la Kullani ou Kulnia de Syrie, mentionnéedans les listes assyriennes de tributs et prise, en 738, par Théglathphalasar III. Cette Kullanu pourraitêtre la Kullanhu moderne, dont les ruines se trouventà une dizaine de kilomètres de celles d’Arpad. Schrader, dans KeiUnschriftliche Bibliothek, t. i, p. 212, à l’année738, et Schrader-Whitehouse, The Cuneiform Inscriptionsand the Old Testament, 1885-1882, t. ii, p. 195, lisent ce nom Gullanî. L’argument qu’on peutalléguer en faveur de cette opinion, c’est que quelques-unesdes villes qui sont nommées avec Calano, Is., x, 9, et Chalané, Amos, vi, 2, sont des villes syriennes. —Ezéchiel, xxvii, 23, nomme une ville de Kannêh (Vulgate: Chené) qu’ont croit communément être la mêmeque Chalanne. Voir Chené.
D’après la Genèse, x, 10, Chalanne est la quatrièmeville de la tétrapole méridionale de la Mésopotamie, dansla terre de Sennaar; d’après une glose des Septante ajoutéeà Isaïe, x, 9, ce serait à Chalanne que fut construitela tour de Babel: nu & 7t’jpYo; ù>y.oôoi.rfi-r]. Saint Basile, t. xxx, col. 529; saint Cyrille, t. lxx, col. 281; saintGrégoire de Nazianze, t. xxxvi, col. 586, suivent cette- opinion. Le Talmud place Chalanne à Niffar; maisc’est sans raison, car les textes cunéiformes désignenttoujours cette dernière localité par la forme sémitiqueKipuru. Le Targum chaldéen la place à Ctésiphon, dont
: Pline, M. N., vi, 26, fait la capitale de la Chalonitis. Cette
ressemblance des noms’a conduit Eusèbe et saint Jérôme, t. xxv, col. 1059; saint Éphrem, 6 in-f°, Rome, 1737, syr.et lat., t. i, p. 154, et plus tard Bochart, Phaleg., 1681, p. 270, à embrasser cette opinion. Mais Isidore de Charax, Geographi grseci minores, édit. Didot, 1855, t. i, p. 250, place la Chalonitis plus au nord, entre le Tigre et la Médie, dont elle est séparée par le Zagros, et lui donne pour capitaleChalach ou la Chalé assyrienne. Vigouroux, La Bible et.les découvertes modernes, 6e édit., 1. 1, p. 350; Schrader-Whitehouse, The Cuneiform Inscriptions and the OldTestament, 1885-1888, t. i, p. 78; Fr. Delitzsch, Wo lagdas Paradies, p. 225.
Les textes cunéiformes mentionnent assez fréquemmentune ville dont le nom sémitique est Zari-lab ou Zir-lab, et dont le nom sumérien se lit Kul-unu. Cuneiform Inscriptionsof Western Asia, t. iv, pi. 38, 1. 9, a. M. Oppert, Expédition en Mésopotamie, t. i, p. 269, croit qu’ellecorrespond à la Zerghoul actuelle, sur la rive orientaledu Shat-el-Hai. Voir aussi Boscawen, dans les Transactionsof the Society of Biblical Archæology, t. vi, 1878, p. 276-277. Quoi qu’il en soit de cette identification, Kulunuétait dans la Babylonie méridionale ou la Chaldée, comme la Chalanne de la Genèse. Sargon, roi d’Assyrie, s’en empara en même temps que d’Ur et d’Arach; il est
remarquable que ce même roi ravagea aussi les paysd’Émath, de Damas, et prit Samarie, ce qui paraît biense rapporter au texte d’Isaïe, x, 9. Schrader, KeilinschriftlicheBibliothek, t. ii, p. 52-53, 72-73; Schrader-"Whitehouse, op. cit., t. i, p. 263-271; Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 5e édit., t. iv, p. 156, "166. Chalanné fut aussi probablement prise parSennachérib, fils de Sargon, avec les quatre-vingt-neufvilles de la Chaldée dont il s’empara et dont leshabitants furent transplantés au loin suivant la coutumeassyrienne: on comprend qu’il menace d’un sort semblableles habitants de Jérusalem. Schrader, ouvr. cit, t. ii, p. 84-85; Schrader -Whitehouse, ouvr. cit., t. ii, p. 30-32; Vigouroux, ouvr. cit., t. iv, p. 206. — Quantà Amos, qui prophétisa sous Ozias et Jéroboam II, et parconséquent au plus tard du temps de Théglathphalasar, arrière-prédécesseur de Sargon d’Assyrie, il doit faireallusion à des faits antérieurs à ceux que mentionne Isaïe.Les annales de Théglathphalasar ne nous sont parvenuesque fort incomplètes; nous y voyons néanmoins à plusieursreprises qu’il ruina Damas et envahit la Syrie, spécialementaussi la ville d’Émath, et qu’il dévasta la Chaldéeet se l’assujettit. Menant, Annales des rois d’Assyrie, p. 139, 1. 5-15; p. 141, 1. 12-18, 1. 16-29; p. 146-147; Schrader, Keilinschriftliche Bibliothek, 1. 1, p. 212-213; t. ii, p. 6-7, 12-13, 20-21, 26-27; Vigouroux, ouvr.cit., t. iv, p. 115-120, 126; Schrader -Whitehouse, ouvr.cit., t. i, p. 2Il et suiv., 224-226, 241-249. C’est durantces guerres qu’il put s’emparer de Kul-unu, si c’est uneville chaldéenne. Schrader et Bickell, loc. cit., inclinentcependant à admettre que ce verset est une remarque, une sorte de glose ajoutée au temps des conquêtes de Sargon, et qui de la marge aurait passé dans ie texte. Cettehypothèse n’est pas absolument nécessaire, et les faitsallégués suffisent à rendre vraisemblable l’assimilation dela Kul-unu des textes cunéiformes avec la Chalanné de
Nemrod. et la Calno d’Isaïe.
E. Pannier.
- CHALCHAL##
CHALCHAL (hébreu: Kalkôl; Septante: XaXy.âX), fils ou descendant de Zara, de la tribu de Juda. I Par., H, 6. Il est appelé ailleurs Chalcol. Voir Chalcol.
- CHALCOL##
CHALCOL (hébreu: Kalkôl; Septante: XaXxiS), undes quatre personnages renommés pour leur sagesse autemps de Salomon, qui les surpassait tous. Il était filsde Mahol. III Reg., iv, 31 (hébreu, v, 11). Quelquesexégètes ont voulu voir dans Mâhôl un nom commun, «danse bu chœur de danse,» et en expliquant benêmahôl, «fils de la danse,» dans le sens d’ «habile à conduireles chœurs». Mais il est plus probable qu’il s’agitd’un nom propre. Les quatre sages, ’Êtân, Hêmân, Kalkôl et Darda’, ont été identifiés par un grand nombred’exégètes avec’Êtân, Hêmân, Kalkôl et Dâra’ouDarda’de I Par., ii, 6. Sur cette question, voir Éthan.Pour Chalcol, ce ne serait pas une difficulté qu’il soit ditfils de Mahol, III Reg., iv, 31, et fils de Zara, I Par., n, 6; car dans ce dernier cas il faut plutôt prendre le’mot fils dans le sens de descendant. Dans 1 Par., ii, 6, laVulgate modifie un peu son nom Chalchal; en hébreu, <; ’est le même nom. Voir Chalchal. E. Levesque.
CHALDÉE. Hébreu: Kasdim ou’étés Kasdim; Septante: XaXSaïoi, XïXSocia; Vulgate: Chaldmi et terraChaldxorum; textes cunéiformes: Kaldâ’a, Kaldû; matKaldu. Remarquer le changement de la sifflante en liquidedevant une dentale, , Kaldû, Kasdim, fréquent dans l’assyro-babylonien. Remarquer aussi que le terme hébreuKasdim, signifiant proprement «les Chaldéens», ’est luimèrnetraité comme un véritable nom de localité. Jer., L, 10; Li, 24, 35; Ezech., xi, 24; xxiii, 16.
I. Géographie. — La Chaldée désigne la portion de laMésopotamie comprise entre la Babylonie au nord et legolfe Persique au sud: souvent même les inscriptions
la restreignent encore davantage, en lui enlevant toute lacôte du golfe Persique, terrains marécageux et alluvionsauxquels elles réservent le nom spécial de Bit-Yakin.Plus tard, au contraire, à partir du roi assyrien Rammannirar(810-781), le nom de Chaldée s’applique à la foisau nord et au sud, jusques et y compris la Babylonie proprementdite. Parallèlement, ce nom est pris par la Bibleau sens restreint dans la Genèse xi, 28, 31, et au senslarge, eu y comprenant la Babylonie, presque partoutailleurs. Jér. li, 24, etc. Quant aux auteurs grecs, ilsconfondent généralement les noms de Chaldée, de Babylonieet même d’Assyrie. — Il suffira donc d’ajouter pour laChaldée quelques développements ou quelques détailsparticuliers à ce qui a été dit à l’article Babylonie.
II. Histoire primitive. — La Chaldée proprement diteparaît avoir été le berceau de la civilisation mésopotamienne: c’est là que se trouvaient les villes d’Uruh, actuellement Warka, l’Arach de Nemrod, Gen., x, 10; Uru, Ur Kasdim, Ur Chaldœorum, la patrie d’Abraham; Larsa, la capitale d’Arioch, Gen., xiv, 1 (hébreu: ’Ellâsâr), actuellement Senkéréh; Eridu, actuellementAbou-Sharein; Sirpurla [?] ou Lagasp], dont les ruinesforment l’amas spécialement nommé Tell-Loh; et quantitéd’autres dont les ruines encore inexplorées formentles collines ou tells de tout le bas Euphrate. C’est là qu’ondécouvre généralement les inscriptions les plus anciennes.
Les noms de Chaldée et de Chaldéens sont employéspar la Bible, par les textes cunéiformes assyriens, et mêmepar l’historien babylonien Bérose: toutefois les textescunéiformes jusqu’à présent connus, émanant de la Babylonieet de la Chaldée, n’emploient jamais ni l’un ni l’autrede ces noms. Sayce les fait dériver de la racine assyriennecasadu, «conquérir,» et voit dans ces conquérants de laMésopotamie méridionale des tribus sémites, casadu étantemprunté à un idiome sémitique. Lectures upon theAssyrian language and syllabary, 1877, p. 135, cité dansF. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 5e édit., t. i, p. 395. Frd. Delitzseh les décompose, aucontraire, en Kas et Dà, ce dernier mot signifiant «district», et le premier étant le nom d’un peuple, les Kassu, de la race de Kûs, descendant de Cliam, qui s’implantaen Babylonie, et dont on retrouve les vestiges dans lesCosséens ou Cissiens des auteurs grecs. Wo lag das Paradies, p. 128-129; voir aussi SchraderWhitehouse, The cuneiform Inscriptions and the Old Testament, t. i, p. 118. Ces étymologies de noms que les inscriptionsbabyloniennes ou chaldéennes n’ont pas encore misau jour sont naturellement fort problématiques, et sontfort peu décisives au point de vue ethnographique. Sousce dernier rapport, on peut s’en tenir aux renseignementsfournis par la Genèse, x, 10; xi, 31, qui placeen Chaldée à la fois des Chamites et des Sémites. À lavérité les anciennes inscriptions sont toutes rédigées enproto-chaldéen ou suméro-accadien (voir Babylonie), indice d’une population chamite; mais plusieurs offrentdès lors les traces de l’influence d’un dialecte sémitique(E. Schrader, Keilinschriftliche Bibliothek, t. iii, partie i, p. 2-5; 94, n. 4, 1. 6, etc.): l’élément chamite l’emportedurant la période des origines, cf. Genèse, x, 8-12; maisplus tard les noms royaux sont tous sémites. Quant à ladescendance aryenne, soutenue de fausses étymologiespar Gesenius, Heeren et Niebuhr, les inscriptions luidonnent le démenti le plus formel. G. Rawlinson, TheFive great monarchies of the Eastern World, 1879, t. i, p. 57.
Josèphe, Ant. jud., i, vi, 4, les rattache au patriarcheArphaxad de la table ethnographique; mais jusqu’iciaucune donnée scientifique n’est venue corroborer sonaffirmation. Voir Arphaxad. — Us n’ont rien de communnon plus avec d’autres Chaldéens, mentionnés par lesanciens comme habitant l’Arménie: ces derniers, de raceindo-européenne et par conséquent japhétique, sont nommésaussi Chalybes et Chadurques, et paraissent être les
ancêtres des Kurdes actuels. Schrader-Whitehouse, thecuneiform Inscriptions and the Old Testament, 1885, t. i, p. 110-119. Voir Strabon, xir, 549: «On nommaitautrefois Chalybes ceux qu’on nomme aujourd’hui Chaldéens.»
Il n’est pas encore possible de donner d’une manièresuivie l’histoire des origines de la Chaldée. Les inscriptionsprimitives tirées des tells chaldéens sont déjà enfort grand nombre; maispresques toutes ne contiennentautre chose que le nom d’un roi ou d’un prince vassal, patesi, quelquefois celui de son père, le nom de la localitéqu’il gouverne, celui du dieu auquel il consacra telou tel temple. D’autre part, on n’a pas retrouvé, pour cesanciens souverains, les listes royales analogues à cellesde la Babylonie et de l’Assyrie. La position des inscriptionsaux fondations ou aux étages supérieurs d’un édifice, le caractère plus ou moins primitif des caractères dontces inscriptions se composent, le plus ou moins de iinides sculptures, donnent assez peu de lumière pour établirdes groupements et des listes absolument certains.
Chacune des principales localités chaldéennes, à l’origine, a son prince, soit indépendant, soit vassal de quelqueautre: Ur et Tell-Loh nous apparaissent avec deux dynastiescontemporaines (Records of the Past, nouv. sér., t. i, p. 52; t. ii, p. 108, 109; Schrader, K eilinschriftlicheBibiothek, t. iii, part, i, p. 70-71, cf. p. 80-81, n. 10; Académie des inscriptions et belles-lettres, Comptesrendus, t. xxiii, 1895, p. 211): d’abord indépendants, les princes de Tell-Loh finissent par reconnaître la suprématiede ceux d"Ur. Pour Tell-Loh, on a pu retrouverles noms d’une douzaine de ces princes, dont jusqu’àprésent le plus célèbre est Gudèa [?]; d’Ur, on enconnaît huit (cf. Schrader, Keilinschriftliche Bibliothek, p. m et iv), surtout Ur-Bagïs [?] ou Ur-Gur [?], donton a donné aussi la lecture provisoire Ur-Kham, en souvenirdu Pater Orchamus, connu des classiques commefondateur du royaume chaldéen et comme grand constructeur: les temples bâtis par lui se retrouvent à Ur, à Arach, à Larsa et même au delà de la Chaldée, dansla Babylonie proprement dite. Les inscriptions laissententrevoir qu’à cette époque, bien antérieure à Abraham, les relations de peuple à peuple, soit pacifiques, soit à main armée, étaient déjà asse# étendues. Goudéaporte ses armes jusque dans le pays d’Élam; l’Arabie etla péninsule sinaïtique [?] lui fournissaient des matériauxpour ses édifices; du mont Amanus, en Syrie, il tiraitdu bois de construction et des cèdres; peut-être mêmeétait-il en relations commerciales avec l’Egypte. Le palaisde Goudéa. dont les ruines ont été explorées récemmentpar M. de Sarzec, contient déjà le plan des palais assyrienset babyloniens, tels que ceux d’Assurbanipal et deNabuchodonosor: élevé sur un tertre artificiel, il renferme, comme les palais orientaux actuels, un harem, un sérail(appartements d’état) et un khan (dépendances). L’unedes cours renfermait aussi sa pyramide à étages, quiservait à la fois de temple et d’observatoire. Les statuesmutilées, trouvées dans le palais de Tell-Loh par M. deSarzec, et maintenant au Musée du Louvre, nous reportentbien loin des hésitations et des incorrections du premierâge; le ciseau s’attaque à la pierre la plus dure, le diorite, avec vigueur et succès: la main de l’artiste est expérimentéeet sure d’elle-même. Le type reproduit n’est pasle type sémite; les personnages sont généralement petitset trapus, ont le nez assez court et épaté, les lèvresépaisses, le visage complètement imberbe, la tête rasée, quelquefois couverte d’une sorte de calotte munie d’unfort rebord retroussé tout autour. E. Babelon, Manueld’archéologie orientale, in-12, Paris, 1888, p. 16-60. Lespetits cylindres de pierre fine qui servaient à la fois d’amuletteet de cachet, et marqués au nom de plusieursprinces de cette époque, sont généralement fort bien dessinéset fort bien gravés, comme on peut en juger parcelui du roi dont on lit provisoirement le nom Ur-Bagas [.?].
Cette période est souvent désignée, d’une façon assez peu.exacte, sous le nom de premier empire chaldéen. La languede ces inscriptions est celle qui porte les différents nomsde sumérien, accadien ou protochaldéen; l’écriture emploiegénéralement le caractère cunéiforme imparfait, surtoutdans les plus anciennes inscriptions, qui sont presqueexclusivement linéaires. Voir Babylone. II. Ethnographie, langage.
III. Religion primitive. — La plupart des textes decette époque sont des textes religieux, des dédidaces ouinscriptions votives aux dieux du panthéon chaldéen. Lalecture des noms divins qu’ils renferment est encore trèsincertaine, non pas toujours au point de vue du sens, mais au point de vue de la prononciation. Plus tard, cesdieux furent identifiés tant bien que mal avec ceux desSémites babyloniens, chaldéens ou assyriens. Ana estl’Anu assyrien, l’esprit du ciel; En-lil-a (ou, comme litA. Sayce, Lectures on the origin and growth of religionas illustrated by the religion of the ancient Babylonians, 1887, p. 553, Mul-lil-a), l’esprit du monde, devient Bel l’ancien; En-ki-a ou Ea est l’esprit desabîmes de la terre. De ces dieux et de leurs épouses ennaissent beaucoup d’autres: les plus célèbres sont En-zu, fils de En-lil-a, qui devient le Sin des Sémites, le dieu-Lune; Nina ou Nana, fille d’Éa, est identifiée avec Istar-Vénus; Nin-girsu se confond avec Nergal ou aussi avecAdar; Babar est le Soleil, fils du dieu -Lune, le Samassémitique, etc. Le panthéon chaldéen comprend donc àla fois l’adoration des astres et celle des esprits des élémentsde l’univers. Chaque ville avait généralement undieu particulier, mais dont le culte n’excluait pas celuides autres dieux: Ur adorait spécialement En-zu; Tell-Loh, Nin-girsu et son épouse Bau; Arach, la déesseNana. — Les légendes et les récits traditionnels sur lesorigines du monde, la création, l’arbre de vie, le déluge, etc., avaient la Chaldée pour pays d’origine; c’est de làqu’ils passèrent en Babylonie et en Assyrie, ainsi que lesrudiments des études mathématiques, astronomiques ouastrologiques, juridiques, etc.; la langue de la Chaldéeresta même la langue savante de Babylone et de Ninive; cf. Dan., i, 4, 5, 17, où le prophète et ses compagnonssont instruits dans «la langue et les lettres des Chaldéens». Le mot «chaldéen» du texte sacré ne signifiepas encore, comme il le signifiera plus tard dans la littératureclassique, un adepte des pratiques divinatoires; ilsignifie plus généralement tout homme versé dans lessciences, juridiques, mathématiques, astrologiques, quis’enseignaient dans l’ancien idiome de la Chaldée. C’estpourquoi Nabuchodonosor choisit parmi eux des gouverneursde villes ou de provinces. Les Babyloniens les désignaient90us le nom de am.il mamuktam, au temps deSennachérib ( Schrader - Whitehouse, The cuneiformInscriptions and the Old Testament, 1885-1888, t. ii, p. 31 et 35), c’est-à-dire «homme de profondeur», desagesse. Hérodote, i, 181, suivi par Diodore de Sicile, H, 21, prétend que les Babyloniens donnaient le nom deChaldéens tout particulièrement aux prêtres de Bel-JIardouk; plus tard les représentants dégénérés de la vieillescience chaldéenne n’en retinrent plus que la partie astrologiqueou superstitieuse, qu’ils colportèrent dans toutl’Occident, et le terme de «chaldéen» ne signifia plusautre chose que devin ou astrologue.
IV. Suite de l’histoire de la Chaldée. — L’état de’choses désigné sous le terme de premier empire chaldéenprit fin à l’époque d’une invasion des Elamites, qui, ayant d’abord ravagé la Chaldée, poussèrent leursconquêtes jusqu’en Palestine, et tinrent toute l’Asie occidentalesous leur joug durant de longues années. Lesinscriptions cunéiformes et la Bible nous donnent les principauxévénements de l’occupation élamite: vers l’an 2285, la Chaldée est pillée par Kudur-na-{n)-hundi, roi d’Élam; au temps d’Abraham, les rois chananéens de la Pentapoleessayent de secouer le joug élamite et se font battre
par Chodorlahomor (Kudur-lagamar) et ses vassaux; mais Abraham les surprend et les oblige à une honteuseretraite. Un autre roi d’Élam, Kudur - Mabug, prendencore le titre de roi de toute la Syrie dans ses inscriptions; mais bientôt son propre fils et son vassal (E)-rim-Aku, roi de Larsa, se voit expulsé de la Chaldée parBîammurabi ([?] 2307-2252), roi de Babylone, qui s’emparede ses États, et réunit sous son sceptre toute laBabylonie jusqu’au golfe Persique. Voir Chodorlahomor.A cette époque, l’élément sémitique l’emporte désormaisdans toute la Chaldée, qui paraît dès lors partager à peuprès toutes les vicissitudes de la Babylonie.
Dans la longue lutte de Babylonie contre l’Assyrie, lesprinces chaldéens nous apparaissent généralement commealliés, sinon vassaux, des rois de Kar-Dunias, c’est-à-direde Babylonie. Les listes royales babyloniennes mentionnentmême, parmi les souverains de Babylone, plusieursrois «fils de la mer», ou originaires des régionsvoisines du golfe Persique, par conséquent Chaldéens: de ceux-ci le plus célèbre fut Mérodach-baladan (Mardukabla-iddin) (721-702), défenseur contre Sargon et Sennachérib, rois de Ninive, de l’indépendance babylonienne, et allié d’Ézéchias. La Bible, en employant toujours lenom de Chaldéens pour désigner soit les princes, soitl’armée, soit les sujets de la dynastie fondée par Nabopolassaret illustrée par Nabuchodonosor, indique ou bienla prépondérance à Babylone de l’élément chaldéen, oubien même l’origine chaldéenne de cette nouvelle dynastie.Les inscriptions cunéiformes, fort peu nombreusespour la partie historique de cette époque, ne nous ontpas encore renseignés sur ce point. Voir Babylonie, IV.Histoire, les progrès et la chute de ce nouvel empirechaldéen.
Dans un passage connu, on a pensé qu’Isaïe, xxiii, 13, désignait les Chaldéens comme un peuple nouveau, fondépar Assur: le texte hébreu est par trop concis, assezobscur même, et la Vulgate l’a traduit peu exactement: F.cce terra Chaldseorum, talis populus non fuit, Assurfundavit eam; les Septante donnent un sens préférable, quoiqu’ils ne suivent pas exactement l’hébreu: «Mêmesi tu vas, [ô Tyr], dans le pays des Chaldéens, ce paysa été ruiné par les Assyriens, tu n’y trouveras pas derepos, car son mur est tombé.» La Genèse montre queles Chaldéens n’étaient pas un peuple nouveau, puisqueAbraham en sortait; elle dit aussi, Gen., x, 11-12, que lesvilles assyriennes sont une colonie de latétrapole babylonienneet chaldéenne de Nemrod. — Le texte d’Isaïe faitdonc simplement allusion aux défaites des Chaldéens parles Assyriens et aux transplantations des villes vaincues, soit babyloniennes, soit chaldéennes, qui en furent lasuite dès les règnes de Théglathphalasar, de Sargon etde Sennachérib: ce dernier vainquit et détrôna mêmeMérodach-baladan, l’allié d’Ézéchias, roi chaldéen deBabylone. Il n’est donc pas nécessaire de lire, avec Schrader-Whitehouseet Ewald, «les Chananéens» au lieudes «Chaldéens», et il faut traduire le texte hébreu: «Vois la terre des Chaldéens: c’est cette même nationqui a cessé d’exister, car Assur l’a transplantée dansdes régions désertes, etc.» D’ailleurs dans ce passage, comme dans presque tous ceux des prophètes et desderniers chapitres des Bois et des Paralipomèues, lemot de Chaldéen désigne non pas exclusivement leshabitants de la Chaldée proprement dite, mais toute laBabylonie en général, comme nous l’avons déjà faitobserver. — Voir les références des auteurs et des textesaux articles Assyrie et Babylonie. E. Paknier.
1. CHALDÉEN (hébreu: Kasdim; Septante: XiXix~.m), nom ethnique désignant 1o les habitants de laCUaldée. IV Reg., xxiv, 2; Job. i, 17, Ezech., xxiii, 14-15, etc.
— 2o La patrie d’Abraham est appelée Ur Kasdim, c’est-à-dire «la ville des Chaldéens», pour la distinguer desautres «villes» habitées par d’autres peuples. Gen., xi, 28,
31; xv, 7. — 3o Dans le livre de Daniel, le nom de Chaldéenest aussi employé dans le sens ethnique, i, 4; v, 30, rx, 1; mais il a de plus une signification plus restreinte, , désignant les savants babyloniens; prêtres, astronomes, astrologues et magiciens formaient une sorte de caste.Dan., ii, 2, 4, 10; iii, 8, 48; iv, 4; v, 7, 11. Voir Chaldée, col. 508.
2. CHALDÉENNE (LANGUE). — 1o Ce nom, Dan., i, 4, .désigne la langue que nous appelons assyrienne et quiest écrite en caractères cunéiformes. Voir Assyrienne(Langue), t. i, col. 1179. — 2o On appelle souvent, d’unemanière impropre, dans le langage ordinaire, langue chaldéenneou chaldaïque la langue araméenne ou syriaque.Voir Syriaque (Langue).
- CHALE##
CHALE (hébreu: Kélah, à la pause Kâlah; Septante: Xalây’, textes cunéiformes: Kalhu et Kalah), actuellement Nimroud, ville située sur la rive gauche duTigre, au-dessus de sa jonction avec le grand Zab ou Zabsupérieur, à environ trente kilomètres au sud de Mossoul.La Genèse, x, 11-12, mentionne cette ville commeappartenant à la tétrapole septentrionale de la Mésopotamie, et en rattache la fondation soit à Nemrod, soit àAssur, selon la double interprétation qu’on peut donnerau ꝟ. Il; quel que soit le sens qu’on admette, ces mêmesversets indiquent clairement pour cette ville une originebabylonienne ou chaldéenne. C’est, en effet, à la Chaldéeou à la Babylonie que l’Assyrie dut son existence et sacivilisation. Assurnasirpal (883-858), roi d’Assyrie, latrouva déjà en ruines et entreprit de la rebâtir; il la choisitmême pour capitale, au lieu de la ville d’Assur, tropexposée aux attaques du côté de l’ouest et de la Babylonie; il ajoute, dans ses inscriptions, que Chalé avait étébâtie par son prédécesseur, Salmanuussir ou SalmanasarIer (vers 1300). Menant, Annales des rois d’Assyrie, p. 27, 92; Schrader, Keilinschriftliche Bibliothek, t. i, p. 116-117; Schrader-Whitehouse, The Cuneiform Inscriptionsand Ihe Old Testament, t. i, p. 80-82; Vigou-.roux, La Bible et les découvertes modernes, 5 6 édit., t. i, p. 325. Ce texte n’indique nullement que cette villen’ait pas existé avant Salmanasar, mais seulement quece roi l’agrandit, ou l’entoura de remparts, ou bien encorey construisit son palais et la cité royale. Il est probableque la destruction à laquelle Assurnasirpal fait allusioneut pour cause les invasions babyloniennes. Tout ce qu’ona exhumé de ses ruines ne remonte pas au delà d’Assurnasirpal.Ce prince y bâtit son palais, et un bon nombrede ses successeurs y bâtirent le leur auprès du sien: ona retrouvé ceux de Belnirar, d’Asarhaddon, des Salmanasaret Théglathphalasar bibliques, de Samsi-Rammanet de Sargon. Plus tard, Sargon et ses successeurs entirèrent des matériaux pour leurs propres constructionsàKhorsabad et à Ninive; ils semblent même s’être acharnésà faire disparaître tout ce qui portait les noms deThéglathphalasar et Salmanasar. Presque à la fin de lamonarchie assyrienne, Assur-edil-ilani y construisit untemple: bientôt après la ville disparut, sans doute dansla même invasion qui détruisit Ninive et mit fin à l’empireassyrien, vers 606. Depuis Assurnasirpal, Chalé avaitpartagé avec Ninive l’honneur d’être la résidence royale, ainsi que nous l’apprennent les inscriptions das palaisen ruines. C’est ce qui explique que le livre de Tobie etcelui de Jonas, bien qu’appartenant par leur sujet à cettepériode, donnent à Ninive le rang de capitale. Xénophon, lors de la retraite des Dix mille, Anabas., iii, 4e édit., Didot, p. 236, la trouva en ruines. — Les murs de laville forment un quadrilatère orienté non par ses angles, mais par ses faces, la plus grande largeur étant d’est enouest; ils sont encore assez complets au nord et à l’est.Dans l’angle sud-ouest se trouve la cité royale, renfermantun bon nombre de palais construits sur des tertresartificiels. Le Tigre longeait autrefois la ville de ce côté; . 511
CI1ALÉ — CHALI
512
mais il s’est déplacé vers l’ouest, laissant à sec son ancienlit. Au nord-ouest de la cité royale se trouvent lesrestes d’une pyramide à étages déjà remarquée par Xénophon, et que plusieurs pensent avoir servi de tombeauaux rois assyriens. A. Layard découvrit et explora cetteville de 1845 à 1847. On a exhumé de la cité royale ungrand nombre d’inscriptions cunéiformes et de basreliefsd’albâtre qui servaient de revêtement à la partieinférieure des murs des palais, et sur lesquels est figuréel’histoire de chaque règne, guerres, envois de tributs, sièges des villes ennemies, chasses au lion, etc. Menant, Annales, p. 57 et suiv.; Rawlinson, The five grealmonarchies, Londres, 1879, t. i, p. 200-203; t. ii, p. 57, 73, 91, 196, 230; A. Layard, Nineveh and its remains, 21n-8°, Londres, 1849, t. i, p. 4, 7, 26, 64, 330, 365; t.n, p. 193, 197; Id., Nineveh and Babylon, in-8°, Londres, 1853, p. 123, 347-359; G. Smith, Assyrian Discoveries,
in-8°, Londres, 1875, p. 48, 70-85.
E. Pannier.
CHALEF. Hébreu: ’es sémén, «arbre à huile;» Septante: Ç-J), a /.JKapîofftva, II Esdr., viii, 15, et (CodexAlexandrinus) III Reg., vi, 23; Aa àpxsvGcva, III Reg., VI, 31; |j).a TteOxiva, III Reg., VI, 32; omis dans Is., xli, 19; Vulgate: lignum olivse, III Reg, vi, 23, 31, 32, 33; Is., xli, 19; lignum pulcherrimum, II Esdr., viii, 15.
I. Description. — Les chalefs (de l’arabe khalef,
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172. — Elseagnus angustifolius.
Rameau; fleur; fruit.
halef, «saule,» à cause de leur ressemblance avec le sauleblanc) sont des arbustes ou des arbres de quatre à cinqmètres, appartenant à la famille des élceagnées. Le plusconnu, le chalef à feuilles étroites, VElœagnus angustifolius(iig. 172), est un petit arbre aux rameaux dressés, au feuillage blanchâtre et luisant, qui rappelle assez l’aspectde l’olivier: de là le nom d’olivier de Bohême, souslequel il est connu en Europe. Ses feuilles, alternes, simples, lancéolées, sont couvertes, surtout à la faceinférieure, d’une sorte de duvet écailleux, argenté. Lesfleurs, jaunes, d’une odeur forte et agréable, sont réuniesau nombre de trois à l’aisselle des feuilles supérieures: celle du milieu, plus longue, est seule hermaphroditeet fertile: les deux autres sont stériles. Le calice, adhérent à l’ovaire, est tubuleux dans sa partie inférieure, évasé au sommet et divisé en quatre ou cinq parties. Lefruit est une baie d’un vert foncé, légèrement charnue, qui ressemble à une petite olive; on en extrait une huilede médiocre qualité. Boissier, Flora orientalis, t. IV,
p. 1056, après avoir décrit l’espèce Elsagnus hortensis, y fait rentrer VElœagnus angustifolius et VElœagnusorientalis, à titre de simples variétés. L’Urientalis a lesfeuilles plus larges et les rameaux sans épines, tandisque V Angustifolius est souvent épineux; le fruit deY Orientalis est aussi plus comestible: on le mange danscertaines parties de l’Orient, comme la Perse, où onnomme cet arbre sindschid. Le bois du chalef est duret peut se prêter aux travaux de menuiserie. VElœagnusangustifolius, aussi bien que la variété Orientalis, estabondant dans toutes les parties de la Palestine. H. B. Tristram, Fauna and Flora of Palestine, in-8°, 1884, p. 404.
II. Exégèse. — Le’es sémén est mentionné dans letexte hébreu seulement en trois circonstances: 1° III Reg., vi, 23, 31, 32, 33, raconte que Salomon fit faire en’essémén les deux chérubins du Saint des saints, ꝟ. 23; laporte à deux battants du Saint des saints, ꝟ. 31, 32, etles poteaux de la porte du Saint, ꝟ. 33; 2° Isaïe, xli, 19, dépeint la prospérité messianique sous l’image du désertqui se couvre de beaux arbres, parmi lesquels figure le’es sémén; 3° enfin dans II Esdr., viii, 15, Néhémie, àl’approche de la fête des Tabernacles, prescrit aux enfantsd’Israël d’aller dans la montagne couper des branchesd’olivier, des branches de’es sémén, etc., pour se fairedes tentes de feuillage. Les Septante et la Vulgate ne sontpas bien fixés sur le sens de ce mot; ils le rendent dediverses manières. En face de cette indécision, et paranalogie avec les expressions’es hddâr, «arbre d’ornement,» et’es’âbôt, «arbre au feuillage épais,» du Lévitique, xxiii, 40, texte parallèle à II Esdr., viii, 15, Celsius, Hierobotanicon, in-12, Amsterdam, 1748, 1. 1, p. 309, regarde’es sémén comme un terme général désignanttous les arbres résineux. Mais le contexte des passagescités demande un arbre particulier; et, d’après II Esdr., vin, 15, un arbre distinct de l’olivier. Ce doit être un belarbre, Is., xli, 19, au beau feuillage, II Esdr., viii, 15, au bois dur et précieux, III Reg., vi, 23-33. Or le chalefou Elœagnus angustifolius est un bel arbre, au feuillageargenté, assez abondant en Palestine pour avoir pu servirà la fête des Tabernacles. Quoiqu’il donne une quantitéd’huile peu abondante et de qualité inférieure, il peutcependant mériter le nom d’arbre à huile, ’es sémén. Sonbois est dur et peut se prêter aux travaux de menuiserieet de sculpture comme ceux auxquels le fit servir Salomon.III Reg., VI, 23, 31, 32, 33. Toutefois il reste desdoutes à ce sujet. — On a plusieurs fois confondu VElseagnusavec le zaqqum des Arabes; mais ce dernier est leBalanites œgyptiaca. "Voir Balanite, t. i, col. 1407.
E. Levesque.
CHALEUR EN PALESTINE. Voir Palestine (TempératureDE LA).
- CHALI##
CHALI (hébreu: Hall, «collier;» Septante: ’Pù.i$; Codex Alexandrinus: ’Oo).sf), ville de la tribu d’Aser, mentionnée entre Halcath et Béten, et citée une seulefois par l’Écriture, dans l’énumération des villes qui furentdonnées aux enfants d’Aser lois du partage de la TerrePromise. Jos., xix, 25. Quelques auteurs ont voulu lareconnaître dans le village actuel de Djoulis, à l’estd’Akka ( SaintJean-d’Acre). Cf. Keil, Josua, Leipzig, 1874, p. 155. M. V. Guérin, Description de la Palestine, Galilée, Paris, 1880, t. ii, p. 62, en la plaçant à Khirbet’Alla, plus au nord, exprime une opinion plus conformeaux lois de la philologie. L’arabe UJie, ’Alla, peut parfaitementreprésenter l’hébreu >': -, Hâlî. La permutationentre les deux gutturales heth et’aïn s’expliquefacilement, et nous en avons plus d’un exemple dans lacomparaison des noms anciens avec les noms actuelsde la Palestine; c’est ainsi que j’-.n r>2, But Hôrôn,
est devenu, _^s C-u^, Beit’Our. Cf. G. Kampflmeyer, Alte Xamen im heutigen Palâslina and Syrien, dans
la Zeitschrift des deutschen Patâs tina-Ve reins, Leipzig, t. xv, 1892, p. 25. La position convient égalementbien. Voir Aser, tribu et carte, t. i, col. 1084. La différencede signification (’alla = «supérieur»., «placehaute» ), n’est pas un obstacle, la tradition ayant retenula consonnance plutôt que le sens des noms.
V. Guérin, Galilée, t. ii, p. 62, décrit ainsi Khirbet’Alïa: «Là, sur une colline dont les différentes platesformessuccessives sont maintenant cultivées et ont étédébarrassées des matériaux provenant d’habitations démoliesqui les jonchaient, lesquels ont été ensuite amoncelésen gros tas réguliers comme des murs, avait étéjadis construite une ville depuis longtemps sans doutecomplètement rasée. Il n’en subsiste plus actuellementque les assises inférieures d’une tour carrée, mesurantonze mètres sur chaque face et bâtie avec de magnifiquesblocs parfaitement équarris et reposant sans ciment lesuns sur les autres; l’intérieur en est envahi par desfiguiers et des grenadiers. En outre, plusieurs citerneset un certain nombre de tombeaux sont assez bien conservés.Parmi ces tombeaux, les uns sont creusés dansle roc comme des fosses rectangulaires, que fermait ungros bloc monolithe servant de couvercle; les autres sontdes grottes sépulcrales, dans lesquelles on descendait parplusieurs degrés et consistant en une seule chambre, oùtrois arcosolia cintrés surmontaient chacun deux augesfunéraires contiguës. À côté de l’un de ces caveaux mortuaires, je remarque quelques petits cubes de mosaïque
épars sur le sol.»
A. Legendre.
- CHALLÉKETH##
CHALLÉKETH, nom hébreu (Sallékét) d’une desportes du Temple. Vulgate: porta quse ducit (ad viamascensionis). 1 Par., xxvi, 16. Voir Schalléketh.
1. CHAM (hébreu: Ifâm; Septante: Xi[i), un des filsde Noé, très probablement le second, puisque la Genèsele place constamment entre Sem et Japhet. Gen., v, 31; vi, 10; vii, 13; x, 1; I Par., i, 4. Voir S. Augustin, Decivit. Dei, xvi, t. xii, col. 477. Plusieurs ont pensé qu’ilétait le plus jeune des trois, d’après Gen., IX, 24, où laVulgate l’appelle minor; mais l’hébreu dit: «petit,» cequi ne décide rien; cf. dans l’hébreu, Gen., 1, 16. En tenantdonc compte du rang intermédiaire qu’occupe toujoursle nom de Cham, il faut entendre le minor de la Vulgatedans le sens que l’adjectif «cadet» a quelquefois en français, c’est-à-dire le second des enfants, quel que soit leurnombre.
L’écrivain sacré fait observer par deux fois que Chamétait le père de Chanaan, Gen., ix, 18, 22, soit pour préparerce qui va suivre, soit pour attirer l’attention desHébreux sur l’ancêtre de ceux qui occupaient en ce momentla terre promise aux enfants de Sem et d’Abraham.Il ne nous rapporte qu’un fait de l’histoire deCham: c’est un trait d’odieuse irrévérence envers sonpère Noé, qui, après s’être laissé surprendre par le viii, était resté étendu nu dans sa tente. Cham s’empressa desortir pour aller raconter à ses frères ce qu’il avait vu.Gen., îx, 21, 22. Noé apprit à son réveil la conduite deCham, et il s’écria: «Maudit soit Chanaan! Il sera àl’égard de ses frères l’esclave des esclaves,» c’est-à-direle plus vil des esclaves. Gen., ix, 24-25. Noé donna encoreplus de force à cette malédiction en conférant successivementà Sem et à Japhet une bénédiction spéciale, suivied’une malédiction asservissaut Chanaan à chacun d’eux.Gen., ix, 26-27.
Les Pères et les commentateurs se sont demandé pourquoiNoé a fait tomber cette triple malédiction non surCham, mais sur Chanaan, un des enfants du coupable; car c’est bien Chanaan qu’il faut lire avec l’hébreu ettoutes les versions, sauf l’arabe, qui porte: «le père deChanaan.» et quelques exemplaires des Septante, quilisent «Charn». Les uns estiment que Noé donna de préférencesa malédiction à Chanaan, parce que celui-ci,
ayant le premier aperçu son aïeul en état d’ivresse, enaurait aussitôt informé son père et aurait ainsi provoquél’irrévérence de ce dernier. Les autres ont pensé que, n’osant pas maudire Cham, parce qu’il avait été l’objetde la bénédiction divine après le déluge, Noé jeta samalédiction sur un de ses fils, ce qui ne devait pas d’ailleursêtre moins sensible au père, le vrai coupable. Celuici, du reste, se trouvait implicitement maudit dans la personnede son fils, et l’on voit, en effet, un indice assezclair de cette malédiction dans ce fait, que Noé bénitnommément Sem et Japhet, tandis qu’il garda le silencesur Cham. Le premier de ces deux sentiments est fondésur une tradition dépourvue de toute preuve historique.Le second, le plus commun, a le défaut de ne pas expliquerpourquoi Noé maudit un seul de tous les enfants deCham, et pourquoi Chanaan de préférence aux autres. Ilfaut probablement chercher cette explication dans le caractèredes paroles de Noé, qui étaient, d’après les Pères, une prophétie plutôt qu’une malédiction. S. Augustin, Qusest. xrn in Gènes., t. xxxiv, col. 551; S. Jean Chrysostome, Hom. xxix in Gènes., t. lui, col 271. Le patriarcheprédit que la race de Cham sera vouée à l’esclavage, parce qu’elle imitera la conduite de son chef. Etpour exprimer sa prophétie d’une manière plus frappante, il se sert du nom de Chanaan, dont la signification devientainsi prophétique; car Chanaan vient de kân’a, «être bas.» Cf. Jud., iv, 23. C’est un procédé littérairefort usité dans la Bible, cf. Gen., v, 29; xli, 8, 16, 19, 22, et dont Noé se sert encore, deux versets plus loin, dans la bénédiction de Japhet. Gen., ix, 27. De mêmedonc qu’il prédit l’expansion de la race de Japhet, «ledilaté,» ainsi prédit-il l’asservissement de la postérité deCham, représentée par Chanaan, «le soumis». Ajoutonsque si Noé nomme ici Chanaan seul entre ses frères etde préférence à tout autre, on peut en donner cette raison, que l’esprit prophétique qui l’animait devait lui fairevoir dans les descendants de Chanaan les premiers peut-êtredes Chamites sur lesquels tomberait sa malédiction, etassurément ceux qu’elle atteindrait le plus complètement.Les Chananéens devaient être asservis aux Hébreux enPalestine. Voir Chananéens et Gabaonites.
Le souvenir de Cham paraît s’être conservé d’une manièreplus ou moins reconnaissable dans les traditionsnationales de différents peuples. Voir H. Luken, Les trarditions de l’humanité, Paris, 1862, t. ii, liv. ii, ch. iii, p. 33-58; 1. 1, liv. i, ch. VI, p. 200-201. Mais la Bible nenous dit plus rien de Cham après le récit de sa faute et dela malédiction qu’elle lui attira; elle se tait sur la contréequ’il habita comme sur celles que durent habiter ses deuxfrères. Quatre fois, il est vrai, elle appelle l’Egypte «terrede Cham». Ps. lxxviii, 51; cv (Vulgate, civ), 23, 27, cvi (cv), 22. Mais peut-on conclure de là, comme l’ontfait quelques commentateurs, que Cham était venu sefixer en Egypte? Pour confirmer cette opinion, ils invoquentl’antériorité de la civilisation égyptienne par rapportà celle des autres contrées chamitiques, et l’appellationde Chemi, appliquée à l’Egypte dans les inscriptions desantiques monuments de la vallée du Nil. Mais il fautobserver que, quand même le nom de Chemi aurait uneétymologie patronymique, on n’en pourrait conclure, —non plus que de la locution biblique «terre de Cham»,
— que Cham habita lui-même l’Egypte; il pourrait n’yavoir dans l’une et l’autre dénomination qu’un simplesouvenir de l’origine chamitique des Égyptiens, si l’on nedoit pas même interpréter d’une autre manière le nomde Cham dans les Psaumes.
Cham eut quatre fils: Chus, Mesraïm, Phuth et Chanaan(voir ces noms). Ils s’éloignèrent avant les autrespetits-fils de Noé du berceau de l’humanité renouveléeaprès le déluge. On peut donc dire d’une manière généraleque les Chamites occupèrent le midi de l’anciencontinent. Mais tôt ou tard ils furent rejetés par les filsde Sem et de Japhet hors des pays où ils s’étaient fixés,
II. - 17
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CHAM — CHAMBRE À COUCHER
516
ou bien, restant dans ces pays, ils y furent asservis plusou moins complètement. La malédiction de Noé contreleur père les a suivis partout, et partout la prophétie dupatriarche s’est accomplie sur eux, à cause de la corruptionqui accompagnait toujours leur brillante civilisatron.Cf. I Par., iv, 40. Voir Gador, t. iii, col. 34.
Les Chamites précédèrent les enfants de Sem et deJaphet dans les voies de la civilisation. Les plus anciensempires, à commencer par celui de Nemrod à Babylone, furent fondés par eux. Ils inventèrent l’écriture. VoirAlphabet, 1. 1, col. 402-404. Le génie inventif des enfantsde Cham et leurs heureuses aptitudes se manifestèrentpresque partout d’une manière frappante. Ils s’adonnèrentau commerce et à l’industrie, et l’antiquité n’offre riende comparable à ce que réalisèrent en ce genre les Phénicienset les Carthaginois. Quant aux arts, les richessesrecueillies à Boulaq et dans les grands musées de l’Europedisent assez à quelle perfection ils avaient été portés, principalement en Egypte. Si tous les autres peuples chamitesne furent pas aussi avancés dans les arts, il est unpoint du moins qui leur est commun à tous en fait d’architecture: c’est un cachet de grandeur dans le plan etde puissance dans les moyens d’exécution, qu’ils ont suimprimer sur les monuments construits par leurs architectes.On a sans doute attribué aux Chamites une troplarge part dans les constructions cyclopéennes de diverspays (voir La Science catholique, novembre 1892, p. 15501552); mais les monuments de l’Egypte, de la Phénicie, dela Babylonie, du sud de l’Arabie, suffisent pour nousdonner la plus haute idée de leur habileté comme constructeurset des forces qu’ils surent mettre en œuvre- pour remuer ces blocs énormes, les transporter au loinet les élever à des hauteurs prodigieuses.- Ces grands ouvragesencore debout donnent l’idée d’une race forte, conformément à ce que l’Écriture nous dit de Nemrod.Gen., x, 8-9. Mais c’était surtout la force au serviced’une civilisation toute matérielle, au sein de laquellerégnait le plus grand désordre moral. Le paganisme antique, dans son ensemble, a été profondément corrompu; mais, en règle générale, les Chamites l’emportent en cepoint sur les autres, et leurs dieux mêmes, ainsi queleur culte, offrent un caractère d’obscénité plus.révoltantque partout ailleurs. Voir Fr. Lenormant, Histoire anciennede l’Orient, 9e édit., t. i, p. 279-280; E. Lefébure, Le Cham et l’Adam égyptiens, dans les Transactionsof the Society of Biblieal Archœology, t. ix, 1887, p. 167-181. Et c’est ce qui explique comment, malgréleur vigueur originelle, ils ont du finir par devenir lesesclaves ou les sujets des races issues de Sem ou de Japhet.Cham était un homme aux instincts luxurieux; illes transmit avec le sarig à ses descendants, qui parleur immoralité allèrent, pour ainsi dire, au-devantde la malédiction prononcée contre Cham, parce qu’ilsla méritaient aussi bien que lui. De la sorte ils travaillèrenteux-mêmes à l’accomplissement de la prophétiede Noé, et à mesure que par la mollesse et la luxure ilsarrivèrent à un degré suffisant d’énervement, ils devinrenttour à tour «les esclaves de Sem» ou «lesesclaves de Japhet». Gen., ix, 26, 27. E. Palis.
2. CHAM (hébreu: Hàm; Septante: Xâ[i)> nom poétiquede l’Egypte dans les Psaumes, lxxvii (Lxxvin), 51; civ (cv), 23, 27; cv (evi), 22. Ce pays est sans douteappelé ainsi parce qu’il fut peuplé par Mesraïm, fils deCham, Gen., x, 6, 13-14, et probablement par allusionà l’un des noms que les Égyptiens donnaient à leur pays,
celui de Ketni, ~H V /çx, terre «noire». Cf. A. Wiedemann, Sammlung altâgyptischen Wôrter, in-8°, Leipzig, 1883, p. 44, 45. «Les Égyptiens, dit Plutarque (DeIs. et Osir., 33, édit. Parthey, in-8°, Berlin, 1850, p. 58), dont le témoignage est confirmé par les monuments, appellent l’Egypte Chemi (Xr, [ji ?av), parce que la terre
en est très noire, comme le noir de l’œil.» Voir F. Vigoureux, La Bible et les découvertes modernes, 6 8 édit., 1896, t. i, p. 338-339.
CHAMAAL (hébreu: Bimhâl; Septante: B «[icoïX), un des fils de Jéphlat, de la tribu d’Aser. I Par. vii, 33.La Vulgate a lu un; , k, au lieu d’un j., b, pour la premièrelettre de ce nom.
1. CHAMAAM (hébreu: Kimhâm; Septante: Xaiiaili), fils de Berzellaï de Galaad, II Reg., six, 37, etIII Reg., ii, 7. Après la défaite d’Absalom, il suivit Davidà Jérusalem. En considération des services que Berzellaïson père lui avait rendus dans sa fuite, le roi combla debiens Chamaam et le recommanda en mourant à son filsSalomon. II Reg., xix, 37, 38, 40 (hébreu, 38, 39, 41); 1Il Reg., ii, 7. Dans le texte hébreu de II Reg., xix, 41, on lit Kimhân au lieu de Kimhâm, par erreur de copiste.Cf. Josèphe, Ant.jud., VII, xi, i, qui l’appelle’A^t’iiavo; . Peut-être existe-t-il une relation entre Chamaam, le fils de Berzellaï, et le caravansérail de Chamaam, situé près de Bethléhem, sur la route de Jérusalem enEgypte. Jer., xli, 17. Voir Chamaam 2. E. Levesque.
2. CHAMAAM (hébreu: Kemôhâm, au ketib; Septante: r<x6?)p)( «! Aâc<; Codex Sinaiticus: r^ëoc/ipioyana)indique, d’après la Vulgate, une localité située près deBethléhem, et où s’arrêtèrent les Juifs qui, pour éviterla colère des Chaldéens après le meurtre de Godolias, sedécidèrent à émigrer en Egypte. Jer., xli, 17. Il est trèsprobable cependant qu’il faut voir ici un nom d’hommeplutôt qu’un nom de lieu. Si, dans le texte original, leketib porte DniD2, Kemôhâm, un bon nombre de manuscritsdonnent onoD, Kimhâm (cf. B. Kennicott, Vet.Testant, héb., Oxford, 1776-1780, t. ii, p. 151), et c’estainsi que s’appelait le fils de Berzellaï, dont il est questionII Reg., xix, 37, 38, 40. Les versions anciennes ontadoptécette leçon: Septante, xay.&x ou -/a^aip., uni aumot précédent; syriaque, Kemham; Vulgate, Chamaam, .et la paraphrase chaldaïque, Jer., xli, 17, applique soninterprétation au personnage du livre des Rois, en disantque les Juifs s’arrêtèrent «dans le caravansérail que David
; avait donné à Kimhâm, fils de Barzillai de Galaad». Le mot hébreu employé par Jérémie et traduit dans la Vulgate
par peregrïnanles, gêrûf, est un olkclZ lEyoi.E-im qui vd’après son étymologie, gûr, «être pèlerin, étranger,» signifie diversorium, hospitium, ce qu’on appelle aujourd’huien Orient un khan ou caravansérail. Le gérâtKimhâm aurait donc été un de ces khans bâti pour lesvoyageurs par le fils de Berzellaï près de Bethléhem. Onsuppose que David, par reconnaissance, lui avait donnéi une propriété près de la ville, et une hôtellerie de ce
! genre était très utilement placée sur la route des caravanes qui allaient de Palestine en Egypte. Telle est l’opinion de beaucoup de commentateurs. Quelques-uns
cependant veulent à gêrûf substituer gedêrôt, «parc àtroupeaux.» Josèphe, en effet, Ant. jud., X, IX, 5, donne
: au lieu en question le nom de MdivSpa, qui a le même sens,
i La première partie du mot composé des Septante, ra6r, pw-/au.âa, fait présumer une lecture semblable. Aquila, traduit par iv toî; cppaYtioîç, «dans les clôtures.» Mais
: on peut se demander à bon droit pourquoi on aurait
ainsi remplacé un nom connu par un mot qu’on ne trouveplus ailleurs. Il faut dire ensuite que la version grecqueoffre de nombreuses variantes: on peut les voir dans
: H. B. Swete, The Old Testament in Greek, Cambridge,
, t. iii, 1894, p. 339. Voir Bethléhem, t. i, col. 1690.i A. Legexdre.
CHAMBRE À COUCHER. Hébreu: l.iédér ou hâdar ham-mittôt, II (IV) Reg., xi, 2; II Par., xxii, 11; hâdar miskâb, Exod., viii, 3; II Sam. (Reg.), iv, 7; i II (IV) Reg., vi, 12; Ecclo., x, 20; Septante: -/oitoW, .
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CHAMBRE À COUCHER
>18
Tajieïov; Vulgate: conclave, cubicnlum. La premièremention des chambres à coucher, dans la Bible, se rapporteà celles des Égyptiens. Les grenouilles de la secondeplaie envahirent jusqu’aux chambres à coucher et auxlits des habitants. Exod., viii, 3 (hébreu: vii, 28). Dansce pays, les maisons des pauvres se composaient d’uneunique pièce servant à tous les usages. Les maisons plusriches comprenaient plusieurs chambres, ordinairementvoûtées. Pendant l’été, on dormait sur la terrasse supérieurede la maison, sans souci des maux d’yeux ou d’entrailles.L’hiver, toute la famille s’entassait dans une oudeux pièces. On n’y trouvait pas de lits montés, mais seulementdes cadres s’élevant à peine au-dessus du sol, ou
à coucher du roi de Perse devait comporter tous les raffinementsdu luxe. Esth., ii, 13, 16 (fig. 173). Enfin il estparlé plusieurs fois de la chambre nuptiale, Cant., iii, 4(hédér), Tob., vi, 13, 16 (18); vii, 18 (vo|xçwv); viii, 15(La[i.£ïov; Vulgate: cubiculum), d’où il faut sortir dans lestemps de pénitence. Joël, ii, 16 (hédér). — En Palestine, les chambres à coucher ressemblaient assez à ce’les desÉgyptiens (fig. 174). L’unique pièce de la maison des pauvresabritait le repos de la nuit. On y voyait, commedans les habitations des paysans syriens d’aujourd’hui, quelques nattes et Ses couvertures, qui servaient pour lecoucher de la nuit, qu’on roulait le jour et qu’on plaçaitdans des espèces d’étagères pratiquées dans le mur. Dans
173. — Chambre à coucher du palais de Sargon à Khorsabad.D’apris Place, Kinlve et l’Assyrie, pi. 25.
de simples nattes sur lesquelles on s’étendait tout habillépendant la nuit, et qu’on roulait dans un coin pour lajournée. Maspero, Histoire ancienne des peuples del’Orient, Paris, 1895, t. i, p. 317-319. Cf. FI. Pétrie, Tellelvmarna, in-4°, Londres, 1894, p. 8-9. — La SainteÉcriture mentionne ensuite la chambre à coucher dela femme de Samson, Jud.; xv, 1; celle où Rechab etBaana tuèrent Isboseth, couché sur son lit, IIReg., iv, 7; celle dans laquelle Ammon était malade et fit venir sasœur Thamar avec des desseins criminels, II Reg., xiir, 10(hédér); celle de David, III Reg., i, 15 [hédér); celledans laquelle Josabeth cache le jeune Joas avec sa nourrice, II Par., xxii, 11; IV Reg., xi, 2; celle que la Sunamitefit faire pour le prophète Elisée (’âlyyaf-qîr; Vulgate: cœnaculum); elle était meublée d’un lit, d’unetable, d’un siège et d’une lampe, IV Reg., iv, 10, Am., in, 12. La chambre dans laquelle Judith mit à mort Holopherneétait plutôt une tente spacieuse et relativementconfortable. Judith, xiii, 1, 3, 5; xiv, 9, 10, 13. La chambre
1J4. — Divan égyptien servant de chambre à coucher.
D’après Lane, Manners and customs of the modem Egyptians,
in-8°, Londres, 1895, p, 36.
les demeures plus aisées, on employait d’ailleurs auxusages les plus divers le local où l’on couchait. Rechabet Baana entrent chez Isboseth sous prétexte d’y prendredu blé. II Reg., iv, 7. Les maisons plus importantesétaient pourvues d’une cour plus ou moins spacieuse surlaquelle ouvraient la salle de réception, les chambresaux provisions et les chambres à coucher, ordinairementfort petites. Quand NotreSeigneur est appelé auprès dela fille de Jaïre, il arrive «dans la maison» du chef dola synagogue, c’est-à-dire dans la cour intérieure, Matth., IX, 23; il en fait sortir les joueurs de flûte et les pleureuses, et ensuite seulement «il entre dans le lieu oùgisait la jeune fille», par conséquent dans sa chambreà coucher, ne prenant avec lui que trois apôtres et lepère et la mère de la défunte, sans doute à cause del’exiguïté du local. Marc, v, 40. Dans la belle saison, onpréférait coucher sur le toit de la maison. On y avait plusde fraîcheur et l’on y élait plus à l’abri des insectes. I Reg., ix, 25-26. Peut-être Notre-Seigneur fait-il allusionà cet usage quand, parlant de la grande calamité future, il recommande à celui qui est sur le toit de ne pas descendre dans sa maison pour y prendre quoi que ce soit. Matth., xxiv, 17. Il devait fuir au plus tôt par l’escalier extérieur. Aujourd’hui «les choses ont peuchangé, écrit le P. Jullien, L’Égypte, in-8°, Lille, 1891, p. 256. Je devais partir de Tibériade avant le jour; le frère du couvent me pria de le réveiller, et, pour’m’indiquer sa chambre, il me conduisit sur la terrasse au-dessus du couvent. «Vous me trouverez couché dans ce «coin, me dit-il; n’allez pas de l’autre côté, vous réveillerezle Père.» C’était toute la communauté. Il eut même la bonté de m’offrir une place. Chaque famille de la ville a sur sa terrasse une petite enceinte de roseaux en claire-voie, couverte de branchages, où elle dort tout l’été à l’abri des regards et de la rosée.»
H. Lesêtre.
CHAMEAU (hébreu: gâmâl; bêkér, le jeune chameau déjà propre à porter un fardeau, Is., lx, 6; bikrâh, la jeune chamelle, Jer., ii, 23; kirkârôṭ, le chameau coureur, Is., lxvi, 20. Ces trois derniers noms ne sont employés chacun qu’une fois dans la Bible.
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175. — Chameau à une bosse.
Septante: κάμηλος; Vulgate: camelus, dromedarius). Le nom ordinaire du chameau, gâmâl, signifierait «le rancunier», d’après Bochart, Hierôzoicon, t. i, p. 73, ou «le porteur», d’après Gesenius, Thesaurus, p. 293. Ces deux sons peuvent dériver, en effet, du verbe gâmal. Le nom sémitique de l’animal est passé dans la plupart des langues de l’Occident.
I. Histoire naturelle et mœurs du chameau. — 1° Le chameau est un ruminant de l’ordre des bisulques. Il se sépare pourtant des autres animaux de cet ordre par un grand nombre de particularités; il occuperait plutôt une place intermédiaire entre les pachydermes etles ruminants. Il a le pied bifurqué, comme ces derniers; mais les doigts sont protégés en dessous par une sorte de semelle cornée qui est d’une seule pièce, et permet la marche facile et rapide sur les sables sans consistance; par contre, cette semelle est un inconvénient sur les terrains glissants. La tête du chameau est petite, fortement arquée et terminée par une lèvre supérieure trèsdéveloppée. Cette lèvre est fendue par le milieu, et les deux parties peuvent se mouvoir séparément; elle est pour 1 animal l’instrument tactile par excellence. La vue semble excellente, l’ouïe est très exercée et attentive au moindre bruit, l’odorat d’une extrême finesse. Le poil est laineux, mêlé de quelques soies et ordinairement de couleur brune. Enfin Je chameau porte, aux articulations inférieuresdes membres, des callosités qui lui permettent de rester agenouillé à terre. Le chameau est originaire de la haute Asie. Il était inconnu dans la Chaldée primitive, et n’y fut introduit qu’à la suite de razzias opérées sur les Bédouins du désert. Dans les textes assyriens, son nom, comme celui du cheval, est un composé dans lequel entrele mot «âne», ce qui montre que l’animal ne fut désigné que par comparaison avec un autre plus ancien que lui dans le pays. Maspero, Histoire ancienne des peuples de l’Orient, Paris, 1895, t. i, p. 560. — 2° On distingue deux espèces de chameaux: le chameau à une bosse, ou camelus dromadarius (fig. 175), et le chameau à deux bosses, ou camelus bactrianus (fig. 176). Ce dernier a les allures plus lourdes que le premier. Son poil, brun marron, n’est long que sur les bosses et sur le cou; il tombe en longues mèches autour des jambes de devant et les environne comme de fanons. Ce chameau est représenté sur les monuments assyriens (fig. 177), mais il n’en est pas question expressément dans la Sainte Écriture;
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176. — Chameau à deux bosses.
les Juifs n’ont dû le connaître qu’à l’époque des rois, au moment des invasions chaldéennes. Le chameau à une seule bosse, ou dromadaire, a des formes plus légères que l’autre. Son poil peut aller du brun aublanc. Cette espèce se divise en un grand nombre de variétés, analogues à celles du cheval. Ces variétés se rattachent à deux races principales, qui ne semblent différer que par suite des habitudes contractées au cours de l’éducation primitive. Dans la première, destinée à porter des fardeaux, on recherche surtout la force, àlaquelle on a sacrifié la légèreté d’allure. Dans la seconde, au contraire, on s’est appliqué à développer la rapidité de la marche. Les dromadaires coureurs (fig. 178) ou maharis ont la taille un peu moins élevée que les porteurs; mais leurs formes plus sveltes et l’entraînement auquel on soumet les individus permettent à ces animauxde franchir les sables brûlants du désert avec une vitesse qui atteint parfois, sans arrêt, de cent soixante à deux cents kilomètres en un jour.
Le chameau porteur commence à être appliqué au travailà l’âge de quatre ans, et il vit de quarante à cinquanteans. À l’état normal, il porte une charge de six cents kilogrammes, au train de quarante à cinquante kilomètres par jour. Le chameau est ordinairement formé à marcher ou à courir l’amble, c’est-à-dire en avançant à la fois les deux pattes d’un même côté. Sa constitution lui permet de franchir de vastes espaces sans eau, ce que ne peut faire le cheval ni l’âne. C’est ce qui lui mérite le surnom de «vaisseau du désert» que lui donnent les Arabes.
177. — Chameaux à deux bosses. Obélisque de Nimroud, de Salmanasar II. D’après le fac-similé du musée assyrien du Louvre.
La légende porte: Tribut du pays de Musrl: chameaux à deux dos, etc.
Aujourd’hui on ne se sert, en Palestine, que du chameau à une seule bosse. Il abonde dans les plaines de Moab et au sud de la Judée. On ne pourrait du reste l’employer dans les régions accidentées du pays. À l’est du Jourdain, il constitue la grande source de richesses des Bédouins. Tristram, Fauna and Flora of Palestine, Londres, 1884, p. 3.
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178, — Chameau de course monté par des Arabes. Bas-relief de Koyoundjik. D’après Place, Ninive et l’Assyrie, t. iii, pl. 55.
— 3° La sobriété du chameau est légendaire. Quand cet animal parcourt à pleine charge une quarantaine de kilomètres par jour, il n’a souvent pour tout aliment qu’une poignée de grains, quelques dattes et une petite boule de pâte de maïs. Il se nourrit alors aux dépens de la masse adipeuse qui constitue sa bosse; celle-ci diminue peu à peu, si bien qu’après un long jeune l’animal est tout amaigri et que la peau de sa bosse retombe sur son dos comme une poche vide. On le met au pâturage pour qu’il refasse ses forces et renouvelle sa provision de graisse.
Le chameau peut aussi passer de huit à dix jours sans boire. Si, au bout de ce temps, il arrive à proximité d’une mare, il la sent d’une demi-lieue et court s’y désaltérer pour le passé et pour l’avenir. Du reste, il sécrète lui-même l’eau indispensable au fonctionnement de ses organes et, même après la plus longue disette, on trouve toujours une petite réserve d’eau claire dans une de ses panses. Quand ils sont en danger de mourir eux-mêmes de soif, les voyageurs sacrifient leur monture et sauvent leur vie en utilisant cette eau. Le chameau a besoin d’une éducation spéciale pour en arriver à supporter de pareilles privations. On l’y accoutume quand il est jeune, en diminuant insensiblement la quantité de ses rations et en espaçant de plus en plus les distributions de vivres et d’eau. — 4° Le caractère du chameau est assez singulier. «À certains égards, les chameaux ne diffèrent pas des brebis. Ce sont des animaux pacifiques, timides, allant par troupes. En cas d’alarme, ils courent tous ensemble pêle-mêle comme les brebis. On les représente habituellement comme patients; mais leur patience est celle de la stupidité. Ils sont plutôt excessivement impatients; ils font entendre un bruyant cri d’indignation quand ils reçoivent leur charge, et même assez souvent quand on les fait agenouiller. En outre, ils sont obstinés et fréquemmentvicieux.» Robinson, Biblical Researches, Londres, 1867, t. ii, p. 209. Au printemps, le chameaudevient particulièrement intraitable. Jérémie, ii, 23 (hébreu) compare la passion de Jérusalem pour l’idolâtrie aux désirs furieux «de la jeune chamelle légère qui court les chemins».
179. — Chargement d’un chameau.
D’après Layard, Nineveh and Babylon, p. 582.
«Le chameau, dit Tristram, ne peut passer pour un animal aimable. Son propriétaire ne paraît concevoir aucun attachement pour cette bête, et de son côté l’animal ne montre aucune trace d’affection. Je n’aijamais rencontré un chameau qu’on estimât plus que soncompagnon pour son intelligence ou son affection. Unvoyageur trouve toujours un ami dans son cheval, plussûrement dans son âne, parfois dans son mulet, maisjamais dans son chameau. J’ai voyagé en Afrique avecles mêmes chameaux pendant trois mois; jamais je n’airéussi à provoquer de l’un d’eux la moindre marque dereconnaissance, la moindre disposition amicale pour labienveillance qu’on lui témoignait.» The natural History of the Bible, Londres, 1889, p. 62. — 5° Les caravanes se composent de chameaux qui se suivent à la file. Voir fig. 74, col. 247. Avant le départ, on fait agenouiller chaque animal et on met sur son dos la charge qu’il aura à porter (fig. 179). Si le fardeau est excessif, l’animal sait le faire comprendre par ses grognements, et refuse de se relever. On ne met pas de mors aux chameaux, mais on les mène avec un simple licou attaché autour de la tête à la hauteur du nez. L’animal suit assez docilement l’homme qui le mène ou un autre animal, ordinairement un âne, qui marche devant lui. Les chameaux sont attachés par une corde les uns à la suite des autres au nombre de dix à douze. Le dernier de la bande porte au cou une clochette (fig. 180). Voir Clochette. Si la corde vient à se rompre, tous ceux qui sont placés après l’endroit où s’est rompue la corde, s’arrêtent sur-le-champ. Celui qui ferme la marché s’arrête donc toujours dans ce cas, et n’agite plus sa sonnette. Le chamelier est averti, par la cessation du bruit, de l’accident qui vient de se produire et s’empresse de le réparer. — 6° Le chameau estencore précieux pour l’Oriental par son lait, qui estabondant et excellent; par son poil, avec lequel onfabrique de grossières étoffes pour les tentes, les voiles, voir Cilice, et le vêtement, Matth., iii, 4; Marc, i, C; enfin par sa chair même, qui peut servir de nourriture. «La chair du chameau est mangée par tous les peuplesde l’Orient. Elle est grossière, sèche et très inférieure à celle du bœuf. En Syrie, elle est moins estimée qu’en Arabie et en Afrique, et elle n’est employée que par les plus pauvres.» Tristram, Nat. Hist., p. 65. La loi de Moïse la prohibait, comme celle des ruminants qui n’ont pas le pied fendu. Deut., xiv, 7. Enfin, dans les pays habités, le chameau est utilisé comme bête de trait: on l’attelle au chariot ou à la charrue, en lui donnant parfois pourcompagnon le bœuf ou l’âne.
180. — Chameau avec une sonnette.
Bas-relief trouvé à Alesandria Troas.
D’après Lechevalier,Voyage de la Troade, Paris, 1802, Atlas, pl. xi.
La loi de Moïse prohiba parmi les Israélites l’usage d’attacher ensemble deux animaux d’espèce et par conséquent de force différente. Deut., xxii, 10. À raison des multiples services que rend le chameau, Buffon a pu écrire: «L’or et la soie ne sont pas les vraies richesses de l’Orient; c’est le chameau quiest le trésor de l’Asie. Le chameau vaut non seulementmieux que l’éléphant, mais peut-être vaut-il autant quele cheval, l’âne et le bœuf tous réunis ensemble.» Œuvres, Paris, 1845, t. iv, p. 389.
II. Les chameaux dans la Sainte Écriture. — 1° Les grands propriétaires de chameaux. — Quand Abrahamalla en Egypte, le pharaon lui offrit différentes sortesd’animaux, entre autres des chameaux. Gen., xil, 16. Le chameau n’apparaît que rarement (fig. 181), et seulement à partir de l’époque saïte (xxie dynastie), sur les monuments figurés des Égyptiens, qui appelaient cet animal kamaal. Mais d’autres animaux, communs en Egypte, les poules, les chats, ne sont guère représentés non plus. «On ne peut donc pas conclure de la rareté du chameau sur les monuments qu’il n’existait pas en Egypte. Il y existait certainement du temps des Ptolémées et pendant la période romaine. Athénée, Deipnosophistæ, v, 5, nous apprend
que des chameaux attelés à des chariots figurèrent dansla grande fête donnée par Ptolémée Philadelphc, etcependant on ne les voit pas alors non plus sur les monuments.Il était d’ailleurs impossible que les Égyptiensne connussent point depuis de longs siècles un animaltrès commun chez leurs voisins, les Arabes, et sanslequel les déserts de l’Afrique du nord seraient inhabitables.Aussi est-il certain que l’Egypte employait le chameaudès la plus haute antiquité. D’anciens textes nousapprennent qu’on le dressait à danser, kenken, et qu’onlui faisait porter les marchandises. L’Exode, ix, 3, enparle comme d’un animal domestique de l’Egypte. Enfinla géologie confirme d’une façon irréfragable l’antiquitédu chameau dans la vallée du Nil: Hekekyan-Bey, dansles fouilles qu’il a exécutées en ce pays, a découvert, à
^r.’-fiMfC
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181. — Vase égyptien en forme de chameau. Musée de Ghizéh.
une très grande profondeur, des ossements de dromadaires, au milieu de restes d’autres quadrupèdes. Il y avaitdonc des chameaux en Egypte à l’époque du voyaged’Abraham, et il était naturel que le roi lui offrît la monturequi devait lui être la plus utile pour son retour dansla terre de Chanaan.» Vigouroux, La Bible et les découvertesmodernes, 5e édit., t. i, p. 445. Cf. Chabas, Etudessur l’antiquité historique, p. 408-419; Ebers, Aegyptenund die Bûcher Mose’s, Leipzig, 1868, t. i, p. 267; Lyell, L’ancienneté de l’homme prouvée par la géologie, trad. Chaper, 2e édit., Paris, 1870, p. 41; Maspero, Histoire ancienne, p. 32. Par la suite, Abraham élevades troupeaux de chameaux dans la terre de Chanaan, Gen., xxiv, 10, 35; Isaac en posséda à son tour, Gen., xxx, 43, et après lui, son fils Jacob. Gen., xxxii, 7, 15.Job eut d’abord trois mille, puis six mille chameaux.Job, i, 3; xlii, 12. Ces nombres n’ont rien d’excessif.Aristote, Hist. animal., IX, IV. 5, édit. Didot, t. iii, p. 208, témoigne que, dans l’Asie supérieure, il y avaitdes propriétaires qui possédaient jusqu’à trois mille chamelles.Des chameaux figurèrent plus tard dans la dotde Sara, femme de Tobie, Tob., x, 10; xi, 18, et l’arméeassyrienne d’Holopherne en comptait une multitude.Judith, ii, 8; iii, 3. Ces derniers étaient sans doute deschameaux à deux bosses.
2° Le soin des chameaux. — Un chamelier était quelquefoispréposé à la garde et à la conduite des chameaux.David confia à un de ses officiers, l’Ismaélite Ubil, lacharge de grand chamelier. I Par., xxvii, 30. On préparaitdes écuries pour y abriter les chameaux. Gen. xxiv, 31.Au besoin, des ruines quelconques servaient à cet usage.Ezech., xxv, 5. Les chameaux trouvaient eux-mêmesleur nourriture dans les champs; mais il fallait leur procurerl’eau qu’ils ne pouvaient chercher dans les puitsprofonds. Le chapitre xxiv de la Genèse trace un gra’cieux tableau de cette opération. On y voit Éliezer sepréoccuper de désaltérer ses chameaux, 14, Rébeccadonner à boire à ces animaux, 19, 20, et le serviteurd’Abraham reconnaître à ce service rendu celle qui doitêtre l’épouse 4’Isaac, 44, 46. — Autrefois, comme aujourd’huiencore, on suspendait divers ornements au cou des
: chameaux; c’étaient des éahârônîm, de petites lunes de
métal, Jud., viii, 21, comme les femmes elles-mêmesen portaient, Is., iii, 18, ou des’ândqôt, Jud., viii, 26, espèces de colliers. Aux haltes, on faisait agenouiller leschameaux, pour qu’ils pussent se reposer. Gen. xxiv, 11.
i Voir fig. 4, col. 16.
! 3° Les services rendus par les chameaux. — 1. Us
servaient de monture. Rébecca et ses servantes étaientmontées sur des chameaux. <ïen., xxiv, 61. Jacob faisaitvoyager ses enfants et ses femmes dans le même équipage.Gen., xxxi, 17. En pareil cas, on plaçait sur le dosde l’animal un kar, sorte de palanquin dans lequel lesfemmes pouvaient s’asseoir à l’abri du soleil. C’est dansun kar que Rachel cacha les idoles de Laban. Gen., xxxi, 34. — Quatre cents Amalécites purent échapperà David, grâce à la vitesse de leurs chameaux. I Reg., xxx, 17. — Raphaël prit quatre serviteurs de Raguel etdeux chameaux pour se rendre rapidement d’Ecbataneà Rages. Tob., ix, 6. — Enfin Isaïe, xxi, 7, parle ausside soldats perses montés sur des chameaux. — 2. Ilsportaient les fardeaux. À Sichem, les fils de Jacob virentarriver les Ismaélites conduisant une caravane de chameauxchargés de marchandises, et ils vendirent leurfrère Joseph à ces étrangers. Gen., xxxvii, 25. — Lespartisans de David fugitif lui apportaient des provisionssur des chameaux, I Par., xii, 40. — La reine de Sabase servait de ces animaux pour porter ses trésors, quandelle vint visiter Sulomon. Il Par., rx, 1; III Reg., x, 2.
— L’officier du roi de Syrie, Hazaël, amenait avec lui.quarante chameaux chargés de présents, quand il vintdemander à Elisée la guérison de son maître Bénadad.IV Heg., viii, 9. —Isaïe, xxx, 6, menace lesJuifs qui vont réclamer le secours des Égyptiens, enleur portant des trésors sur le dos de leurs chameaux, etil prédit qu’au temps du Messie, «les chameaux et lesdromadaires de Madian et d’Épha se répandront commeune inondation a sur Jérusalem. 1s., lx, 6. — 3. À laguerre, on tuait parfois les chameaux de l’ennemi; Saùlreçut l’ordre de traiter ainsi ceux des Amalécites, I Reg., xv, 3; mais, en général, on préférait s’en emparer. Lesgens de Ruben, de Gad et de la demi-tribu de Manasséen prirent cinquante mille aux Agaréens, I Par., v, 21.David s’empara de ceux des Amalécites, I Reg., xxvii, 9, et Asa de ceux des Éthiopiens. II Par., xiv, 15. Despillards chaldéens avaient enlevé ceux de Job. Job, i, 17.Jérémie, xlix, 29, 32, prédit aux populations de Cédaret d’Asor que le roi de Babylone leur ravira leurs chameaux.Zacharie, xiv, 15, annonce aussi que tous lesanimaux des ennemis de Jérusalem, entre autres les chameaux, tomberont au pouvoir du peuple de Dieu.
4° Le chameau dans l’Evangile. — Notre-Seigneur ditun jour en parlant des riches: «II est plus facile à unchameau de passer par le trou d’une aiguille, qu’à unriche d’entrer dans le royaume des cieux.» Matth., xix, 24.Quelques auteurs anciens ont trouvé la comparaison unpeu forte et ont cherché à l’atténuer. S. Cyrille d’Alexandrie, Fragm. in Matth., t. lxxii, col. 430, et Théophylacte, In Evang. Matth., t. cxxiii, col. 355, ont dit qu’il nes’agissait pas ici de chameau, mais de câble. De fait, sixpetits manuscrits lisent dans ce passage xâ|u).ov au lieu dev.i
{ko-/, cf. Griesbach, Nov. Testam. grxce, Halle, 1796, p. 87, et d’après Suidas et un scholiaste d’Aristophane, qui seuls connaissent ce mot, y.i|it).o; désignerait unegrosse corde. Mais on ne peut justifier sérieusement nila grécité de ce mot, ni sa substitution à v.iy.rjo; dansle texte évangélique. Ce dernier substantif ne sauraitd’ailleurs en aucun cas avoir le sens de «câble», et l’eût
il que l’impossibilité indiquée par Notre -Seigneur ne seraitguère atténuée. — D’autres ont cru trouver la solutionde la prétendue difficulté dans le second terme de la comparaison, et ont déclaré que le «trou de l’aiguille» étaitune petite porte de Jérusalem par laquelle les animauxne pouvaient passer qu’en s’agenouillant et en s’inclinanttrès bas. Dans certains pays, dans la vallée du Nil enparticulier, on accède dans les enclos par des portestrès basses, et il n’est pas rare de voir les chameaux setraîner sur les genoux et incliner le cou en avant pourpouvoir passer. L. de Laborde, Commentaire géographiquesur l’Exode et les Nombres, Paris, 1841, p. 36, dit à ce sujet: «La docilité de cet animal est complète.J’en ai vu mettre plusieurs dans une écurie où l’on avaitl’habitude de garder des ânes, et dont la porte n’avaitpas trois pieds de hauteur. Voici comment on s’y prenait: on les faisait asseoir, puis on les obligeait à marcher surles genoux et sur la rotule de derrière, de manière à avancersans s’élever.» «Hier, écrit aussi lady Dulf Gordon, j’ai vu un chameau qui se glissait par un trou d’aiguille.On appelle ainsi, en effet, la petite ouverture d’un enclos.L’animal doit glisser sur les genoux et courber la têtepour y pénétrer.» Letters from Egypt, Londres, 1865, p. 133. Cette explication, qui fait du trou de l’aiguilleune petite porte, date du moyen âge; mais elle manquede base. Nulle part, dans toute la Syrie, on ne donneà une porte le nom de trou d’aiguille, et, dans les paysoù l’on emploie aujourd’hui cette expression, c’est trèsprobablement par pure application du proverbe évangélique.Cf. Socin, Zeitschrift des deutschen Palâstina, Vereins, 1891, p. 30. Ce proverbe, du reste, n’est pasisolé. Notre -Seigneur en emploie un autre tout aussihyperbolique quand il dit que les pharisiens «filtrent lemoucheron et avalent le chameau», Matth., xxiii, 24, c’est-à-dire se font scrupule de fautes insignifianteset commettent sans broncher les plus graves transgressions.Le Talmud contient plusieurs locutions tout àfait analogues. On dit à quelqu’un qui raconte unechose incroyable: «Tu es donc de Pum-Beditha, oùl’on fait passer un éléphant par le trou d’une aiguille?» Baba Metzia, fol. 38, 2. «On ne voit nulle part ni palmeen or, ni éléphant passer par le trou d’une aiguille.» Berachoth, fol. 55, 2. On lit encore dans le Midrasch surle Cantique des cantiques, fol. 25, 1: «Dieu dit auxIsraélites: Ouvrez-moi la porte du repentir grande commeun trou d’aiguille, et je vous ouvrirai la porte du royaumecéleste de telle sorte que vous y entrerez sur un charà quatre chevaux.» Enfin, dans le Koran, surate vii, 39, il est écrit: «Les infidèles n’entreront dans le paradisque quand un chameau passera par le trou d’une aiguille.» Il est curieux de remarquer que plusieurs commentateursdu Koran ont aussi cherché à remplacer gemel, «chameau,» par geml, «câble». Ces exemples prouventque l’expression employée par Notre -Seigneur était proverbialeet que, sous une forme hyperbolique familièreaux Orientaux, elle marquait la grande difficulté de réussirdans une entreprise. Voir Aiguille, t. i. col. 306. Cf.Wiseman, Mélanges religieux, Paris, 1859, p. 17; Million, Évangile selon saint Matthieu, Paris, 1878, p. 381; Knabenbauer, Comment. inEvang. sec. Matth., Paris, 1893, t. ii, p. 161. Remarquons en terminant que, même enfrançais, nous nous servons d’hyperboles tout aussi fortes.Quand nous lisons dans la Fontaine, Fables, viii, 25:
Si j’apprenais l’hébreu, les sciences, l’histoire! Tout cela, c’est la mer à boire,
cette locution: «la mer à boire,» ne nous choque nullement.Nous l’employons couramment pour parler d’unechose de difficile exécution, et personne n’a jamais songéà la prendre à la lettre. L’hyperbole y est pourtant plusaccusée encore que dans les proverbes évangéliques. —Voir J. von.Hammer-Purgstall, Dos Kamel, in-4°, Vienne, lSJi, II. Lesltre.
CHAMOIS. C’est une sorte d’antilope, Antilope rupicapra, qui a la taille d’une forte chèvre, et qui vit entroupes peu nombreuses dans les hautes montagnescomme les Alpes et les Pyrénées. Dans ces dernières, ilporte aussi le nom d’isard. Il n’y a aucune trace de chamoisen Palestine à l’époque actuelle, et rien absolumentn’autorise à penser qu’il en ait existé autrefois dans cepays. On ne peut donc identifier cet animal avec le zémér, Deut., xiv, 5, ainsi que l’ont fait quelques auteurs. Lezémér est «l’animal qui saute», il est vrai; mais cecaractère peut convenir à beaucoup d’autres qu’au chamois.
Voir Caméléopard, Mouflon.
H. Lesêtre.
- CHAMOS##
CHAMOS (hébreu: KemûS; Septante: Xajjuic), dieude Moab et d’Ammon. Il apparaît comme dieu d’Ammonen une circonstance unique, lors du message adressé parJephté au roi des Ammonites, où il réclame comme siensles pays conquis par Jéhovah, le Dieu d’Israël, au mêmetitre que lui revendique les possessions de Chamos, sondieu. Jud., xi, 2’t. Le dieu national des Ammonites étaitMoloch, «le roi.» I (III) Reg., xi, 7; II (IV) Reg., xxm, 13; Il Sam. (II Reg.), xii, 30; Jer., xlix, 1. Chamosest ici nommé comme dieu d’Ammon, sans douteparce que les Ammonites honoraient à la fois Chamos etMoloch, comme plus tard Salomon adora Chamos, Molochet Astarté en même temps que Jéhovah. III Reg., xi, 5, 7, 33. — En dehors de cette circonstance, Chamosapparaît partout ailleurs comme dieu de Moab. Moab estappelé «le peuple de Chamos», Num., xxi, 29; Jer., xlviii, 46; les prêtres et les princes de Moab sont désignéscomme «ses prêlres et ses princes». Jer., xlviii, 7.Chamos «a laissé ses fils prendre la fuite et ses fillesdevenir captives de Séhon, le roi amorrhéen», Num., xxi, 29; «il doit être lui-même emmené en exil avec sesprêtres et ses princes; il sera une cause de confusionpour Moab, qui a mis en lui sa confiance; car ses fils etses filles ont été pris captifs.» Jer., xlviii, 7, 13, 46. —Salomon introduisit son culte dans sa capitale; il «élevaun bâmâh (lieu haut) à Chamos, idole de Moab, sur lamontagne qui est contre Jérusalem et l’adora». I (III) Reg., xi, 7, 33. Plus tard, Josias «profana les bâmôf (hautslieux) qui se dressaient contre Jérusalem, à la droite dela montagne du Scandale, et que Salomon avait élevésen l’honneur de Chamos, idole de Moab, et d’autresdieux étrangers». II (IV) Reg., xxiii, 13.
Un monument moabite, la stèle de Mésa, découverteen 1869 et actuellement au musée
judaïque du Louvre, parle comme
l’Écriture du dieu Chamos. Il est seulnommé dans l’inscription, mais associé une fois à la déesse Astarté, appelée’Aslar - Kamos, 1. 17. Moabest désigné comme «sa terre», 1. 5.Nous ignorons comment ou le représentait. Voir Mésa. — Les découvertesépigraphiques modernes ne
nous ont pas fourni jusqu’ici d’autresrenseignements sur le dieu Chamos.
On a retrouvé seulement son nom
dans certains noms propres, tels queChamos [gad (?)], sur la stèle de
Mésa; Kamusunadbi, dans une inscription assyrienne; Kamosihï (cf. hébreu: Yehî’êl, I Par., xv, 18), sur unegemme (fig. 182) reproduite dans de Vogué, Mélangesd’archéologie orientale, p. 89. Peut-être ce nom se retrouve-t-ilaussi dans le nom de Charcamis, qui, d’aprèsLauth, Ilion und Helena, dans l’Allgemeine Zeitung, juillet 1875, Beilage, n° 191, p. 3009, signifie «ville deChamos». — Sur la vraie nature de ce dieu on a émisdiverses hypothèses. Les uns, comme saint Jérôme, In7s., xv, 2, t. xxiv, col. 168, l’identifient à Béelphégor etfixent à Dibon le centre de son culte, — la découvertedelà stèle de Mésa semble confirmer ce dernier point; —
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182. — Sceau de
Chaniosihi.
Collection de Clercq.
les autres l’assimilent à Béelzébub; d’autres enûn en fontune sorte de Mars, dieu de la guerre. Cf. Gesenius, Thésaurus, p. 693. Toutes ces opinions manquent de vraisemblance.On s’accorde assez généralement aujourd’huià voir dans Chamos une des formes multiples du dieuBaal, la grande divinité chananéenne, à la fois mâle etfemelle ( cf. plus haut’Astar-Kamos), qui personnifiaitla nature et le soleil. Sur les dieux chananéens engénéral, voir Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., Paris, 1896, t. iii, p. 80, 85. Sur le dieuChamos en particulier, voir Scholz, Gôtzendienst undZauberwesen, in-8o, Ratisbonne, 1877, p. 176-182.
J. Sauveplane.
1. CHAMP DE BOOZ. À l’est de Bethléhem setrouve sur le chemin qui conduit à la grotte des Bergersune petite plaine fertile à laquelle on a donné cenom (voir Bethléhem 1, t. i, col. 1695), parce qu’onsuppose que c’est le champ, fiuth, ii, 2, qui appartenaità cet ancêtre de David et où alla glaner Ruth. Voir Booz, t. i, col. 1849.
2. CHAMP DES ÉPIS, champ de blé que traversaientNotre -Seigneur et ses Apôtres un jour de sabbat. Matth., xil, 1; Marc, ii, 23; Luc, vi, 1. Le blé était déjà en épis, et les disciples du Sauveur, ayant faim, cueillirent desépis et en mangèrent le grain, comme le font souvent lesOrientaux. Les pharisiens en furent scandalisés, non pasparce que les disciples avaient fait une chose défendueen soi, car elle était autorisée expressément par la loimosaïque, Deut., xxiii, 25; mais parce que, d’après eux, ils avaient par là violé le repos du sabbat. Jésus justifieses Apôtres en rappelant l’exemple de David, qui avaitmangé des pains de proposition parce qu’il avait faim, quoiqu’il ne fût pas prêtre, ce qui ne peut s’excuser quepar le besoin dans lequel il se trouvait, I Reg., XXI, 1-6, et il déclare que lui-même, le Fils de l’homme, est lemaître du sabbat. Ce champ des épis se trouvait sur lechemin de Capharnaùm à Cana. Il y a encore aujourd’huisur cette route de vastes champs de blé, mais il estimpossible de déterminer exactement à quel endroit seproduisit le fait dont le souvenir nous a été conservé parles évangélistes. F. Vigouroux.
3. CHAMP DU FOULON (hébreu: sedêh kôbês; Septante: àYpô{ toO yvaçico; , IV Reg., xviii, 17; àypô; toOv.Ma ?éa>; , ls., vii, 3; xxxvi, 2; Vulgate: ager fullonis), champ situe près de Jérusalem, et mentionné incidemmentdans trois passages de l’Écriture, IV Reg., xviii, 17; ls., vii, 3; xxxvi, 2, comme donnant son nom à uneroute (hébreu: mesillâh) qui y conduisait et qui passaitprès de «l’aqueduc de l’étang supérieur». C’est sur cechemin que le prophète Isaïe fut envoyé par Dieu à larencontre du roi Achaz et qu’il fit entendre la fameuseprédiction de l’Emmanuel, ls., vii, 3; c’est là aussi que, sous Ézéchias, s’arrêtèrent les troupes de Sennachérib.IV Reg., xviii, 17; ls., xxxvi, 2. Cette route devait longerles murailles de la ville, comme le prouve le colloquedu Rabsacès assyrien avec les officiers du roi de Juda.IV Reg., xviii, 20; ls., xxxvi, 11. Mais de quel côté setrouvait-elle? Où était le champ lui-même? La questionest très discutée et dépend de l’emplacement qu’on assigneà la «piscine supérieure». — Jusqu’ici la plupart desauteurs ont placé les deux scènes bibliques en questionà l’ouest de Jérusalem, près de l’aqueduc qui conduisaitles eaux du Birket Mamillah à la piscine d’Ezéchias, aujourd’hui Birket Hammam et Bâtrak, «l’étang duBain du Patriarche,» dans la direction de l’est. «Le chemindu champ du foulon» serait ainsi la route actuellede Jaffa, près de laquelle, à proximité de certains réservoirs, aurait été l’endroit où les foulons exerçaient leurindustrie. Cf. Frz. Delitzsch, Dos Buch Jesaia, Leipzig, 1389, p. 135-136; J. Knabenbauer, Comment, in Isaiamprophetam, Paris, 1887, t. i, p. 152. D’autres cependant
préfèrent la partie septentrionale de la ville, et tracentla voie dont nous parlons parallèlement à l’aqueduc quientrait dans l’intérieur de la cité, non loin de la porteactuelle de Damas. Cf. R. von Riess, Biblische Géographie, Fribourg-en-Brisgau, 1872, p. 76-78; Bïbelvtlas, 2e édit., Fribourg-en-Brisgau, 1887, p. 23; feuille vin.Le «monument du foulon» signalé par Josèphe, Bell, jud., V, iv, 2, au nord-est du troisième mur, a-t-ilquelque rapport avec le champ dont nous parlons?Quelques-uns le croient. Enfin une opinion récente placel’aqueduc d’Ézéchias sur la colline orientale qui estcomme le prolongement méridional de la colline duTemple et se trouve resserrée entre la vallée de Tyropœonà l’ouest et celle du Cédron à l’est. Ce canal seraitdonc le conduit souterrain qui amène les eaux de la Fontainede la Vierge (Ain Oumm ed-Daradj) à la piscine deSiloé. Cf. Lagrange, Topographie de Jérusalem, dans laRevue biblique, Paris, 1892, p. 33-34. Le «chemin du champdu foulon» aurait ainsi longé le côté est de la ville sainte; mais rien ne nous dit que le champ lui-même fût prèsde la piscine supérieure; rien ne nous révèle non plusdans quelle direction il se trouvait. Cependant, si à lamention du monument indiqué par Josèphe on joint lerécit de la mort de saint Jacques, on peut supposerque l’endroit en question n’était pas loin du Temple. Lesaint évêque de Jérusalem, en effet, précipité du pinacledu Temple, puis lapidé après sa chute, reçut le derniercoup de la part d’un foulon, qui le frappa à la tête avecl’instrument dont il se servait. Cf. Eusèbe, H. E., ii, 23, t. xx, col. 201. La topographie de l’ancienne Jérusalemest en ce moment l’objet d’études sérieuses; peut-êtreles discussions et les fouilles amènerontelles la solutionde problèmes aussi difficiles qu’intéressants. Voir Jérusalem, Piscine supérieure, Foulon. On peut lire aussisur ce sujet Palestine Exploration Fund, Quarterly
Statement, 1891, p. 189-190, 254-256.
A. Legendre.
4. CHAMP DU SANG, traduction, Matth: , xxvii, 8; Act., ii, 19, du nom syro-chaldaïque d’IIæelduma, donnéau champ qui fut acheté avec les trente deniers pourlesquels Judas avait trahi son maître. Voir Hacéldama.
- CHAMPON Régis##
CHAMPON Régis, jésuite français, né à Saint-Étienne- de - Saint - Geoirs (Isère) le 16 juillet 1821, mort à Marseille le 8 décembre 1883. Il entra chez lesJésuites le 13 octobre 1841, enseigna la philosophie, l’hébreu, l’Écriture Sainte et la théologie au grand séminaired’Aire ( Landes), l’Écriture Sainte et l’hébreu auscolasticat de Lyon, passa quelques années en Syrie, oùil professa à Ghazir les humanités, le droit canon, l’histoireecclésiastique et l’Écriture Sainte, revint en Franceet continua ses cours d’hébreu et d’Écriture Sainte auxscolasticats de Lyon, d’Aix et de Vais. On a de lui: 1° Épopée christologique des psaumes: exégèse isagogiquedes psaumes. I. Études préparatoires à l’intelligencedes psaumes. II. Les psaumes d’après les poètesfrançais de toutes les époques, 2 in-8o, Paris, 1876. —2° Essai sur la littérature biblique, in-8o, Paris, 1876.(Ce volume est anonyme.) C. Som.mervogel.
- CHAMPSNEUFS##
CHAMPSNEUFS (Pierre des), jésuite français, néà Nantes le 20 mai 1602, mort à Paris le 20 mai 1675. Ilentra chez les Jésuites le 8 octobre 1621, professa la rhétoriqueet la philosophie et fut préfet des études inférieuresau collège de Paris. Son véritable nom seraitBariau ou Bourriot. Il a laissé: 1° Maximes évamjéliquesrecueillies des livres canoniques du Nouveau Testament, Paris, 1647, 1652; Vannes, 1691. Les éditionsde Paris sont anonymes. L’ouvrage reparut avec le nomde l’auteur sous le titre: Pratique de la véritable dévotionconforme aux maximes évangéliques recueillies detout le Nouveau Testament, in-8o, Paris, 1652.— 2° PsahniDavidici et sacra Cantica quai Br. Rom. occurrunt.
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CHAMPSNEUFS — CHANAAN
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Cum brevi, accurata et litîerali obscuriorum verborum<ic sententiarum explanatione, in-8°, Paris, 1648. —S" Davidis suspiria, in-12, Paris, 1659; in-24, Cologne, 1673; in-18, Avignon, 1837. Traduit en espagnol, enfrançais et en polonais. — 4° Axiomata evangelica ChristiDomini et Aposlolorum verbis concepta, in-12, Paris, 1659.
C. SOMMERVOGEL.
CHANAAN. Hébreu: Kena’an; Septante: Xavaiv.Ce nom apparaît comme nom de pays deux siècles avantl’Exode, sous la forme de Kinahhi, dans une dépêche deBournabouriâs, roi de Babylone, adressée au roi d’EgypteAménophis IV, et retrouvée parmi les tablettes de Tellel-Amarna. Voir H. Winckler, Der Thontafelfund vonEl-Amarna, in-4°, Berlin, 1889, t. i, p. 7, lett. viii, lignes 15, 17; J. Halévy, La correspondance d’AménophisIII et d’Aménophis IV, dans le Journal asiatique, septembre-octobre 1890, p. 325. Dans la Bible, il est employécomme nom d’homme et comme nom de pays; —mais, dans ce dernier cas, on dit presque toujours: «lepays de Chanaan.» De ce nom est dérivé aussi le mot «Chananéen», Kena’ânî, Xavavaïo; , — et comme lesChananéens de la Phénicie étaient les grands commerçantsde l’ancien monde, Chananéen, outre sa significationordinaire, a pris encore celle de «marchand, trafiquant», par exemple, Job, xl, 30 (Vulgate, 25).Même, par un retour assez bizarre, ce même sens s’estcommuniqué ensuite au nom primitif de Kena’an, parexemple, 1s., xxiii, 8. — On ne saurait douter que lemot ne soit une dérivation de la racine kâna’, quiévidemment signifiait: «se courber, s’incliner, s’abaisser,» signification que le mot a encore en arabe, et àlaquelle correspondent ea hébreu les formes dérivéesniphal et hiphil, les seules que la Bible nous ait conservées.Il est donc assez naturel que dans le «pays de Chanaan» on ait voulu trouver soit un «pays subjugué ou assujetti» par des conquérants quelconques, soit plus communémentun «pays bas et enfoncé». Voir Amorrhéens, t. i, p. 505. Toutefois cette manière de voir rencontre desdifficultés. Le pays qui, selon l’usage biblique, s’appelle «le pays de Chanaan», est en général plutôt un pays demontagnes. Pour soutenir la signification de «pays bas», on a supposé que ce nom avait été donné par comparaisonavec les montagnes plus élevées du Liban et du GrandHermon, ou même avec les plateaux beaucoup trop éloignésdu pays araméen, — ou bien l’on admet qu’à l’origineil ne désignait qu’une petite partie de la Palestine, naturellement la plus basse, le long de la côte. — VoirDillmann, dans Schenkel’s BibelLexikon, art. Kenaan, t. iii, p. 513. Il est vrai que dans Isaie, xxiii, 11, le noms’applique au pays phénicien, et dans Sophonie, ii, 5, àcelui des Philistins; mais c’est longtemps après la conquêteisraélite, par laquelle le reste de la Palestine étaitdevenu la terre d’Israël. Il est vrai encore que dans lePentateuque ces «pays bas» sont habités par le «Chananéen» dans le sens le plus strict du mot (voir ci-dessous), et qu’une ou deux fois, Gen., x, 19 [?]; Deut., i, 7; xi, 30, ils s’appellent «la terre du Chananéen»; maisdans les mêmes livres le «pays de Chanaan» a constammentun sens plus large. Il semble donc que le peuplea plutôt donné son nom aux pays bas de la côte que viceversa. Et dans ce cas le peuple (aussi bien que le «paysde Chanaan» ) tire le sien du petit-fils de Noé, dont ildescendait. On est d’autant plus autorisé à chercher l’étymologiedu pays dans un nom d’homme, que le mot seretrouve ailleurs comme tel dans la forme Kena’ânâhou Kèna’nâh. I Par., vii, 10; II Par., xviii, 10. Voir Chanaanaet Chanana. Ajoutons que d’après Furst, Handwôrterbuch, 3e édit., cette dernière forme serait la plusprimitive, et que les anciens Phéniciens connaissaientaussi un personnage du nom de Xvô comme un de leursancêtres, dont le surnom Plténix se serait perpétué dansla Phénicie. Voir Sanchoniaton, dans Eusèbe, Prsep.Evang., 1, x, 26, t. xxi, col. 81. Le nom peut donc signifier soit le «courbé», soit l’ «humble», le «vil» ou quelquechose d’analogue. La dernière signification serait bienappropriée au caractère du fils de Cham. Aussi est-elledonnée déjà par saint Augustin, Enarr. in Ps. civ, 7, t. xxxvii, col. 1394, et par saint Jérôme, De nomin. hebr., t. xxiii, col. 777.
1. CHANAAN, fils de Cham, père des tribus chananéennes.L’histoire sacrée ne nous donne que peu derenseignements sur Chanaan. Il n’en est question quedans les passages suivants: Gen., ix, 18 et 22, où Chamest appelé le «père de Chanaan»; Gen., IX, 25-27, où selit la célèbre malédiction de Noé à l’adresse de Chanaan; Gen., x, 6, où sont énumérés les fils de Cham, et Gen., x, 15-18, qui porte: «Chanaan engendra Sidon son premierna, et Heth, et le Jébuséen…,» avec plusieurs autresnoms de tribus chananéennes. Dans les deux dernierspassages, l’auteur, sous le nom de Chanaan, semble plutôtdésigner sa descendance que l’individu lui-même. Card’abord la plus grande partie du chap. x est évidemmentethnographique, et au jL 6, parmi les quatre «fils» deCham, il y a le nom de Mesraïm, dont la forme duellene convient guère à un individu, mais convient parfaitementaux deux parties de l’Egypte, la haute et la basse.Ainsi, à cause de la nature différente des documents conservésdans les chap. ix et x, on ne peut conclure de cedernier passage que Chanaan était le plus jeune des quatrefils de Cham. L’auteur du chap. x ne semble parler quedes peuples issus de Chanaan, et il ne les met à la dernièreplace qu’à cause de leur proximité; car dans sonénumération des peuples il suit généralement un ordregéographique, en commençant par les plus éloignés et ense rapprochant toujours de la Palestine. Voir Fr. Lenormant, Les origines de l’histoire, t. ii, 2e partie, p. 252^
Au chap. ix, au contraire, nous trouvons bien un individu, fils de Cham, quoique considéré encore en relationavec sa descendance. Les «fils de Noé» qui avec leurpère sortent de l’arche, ꝟ. 18, ne peuvent être que troisindividus. Et après leurs noms, Sem, Cham et Japheth, il est ajouté immédiatement: «Et Cham fut le père deChanaan.» La même relation entre Cham et Chanaan estrépétée au ꝟ. 22, où l’historien sacré raconte le péché deCham, probablement pour insinuer quelque participationdu fils dans le crime du père, ou du moins quelque ressemblancede caractère et de mœurs. Car en dehors decette hypothèse on ne conçoit guère pourquoi, dans lamalédiction prononcée par Noé, Chanaan semble prendrela place de son père. «Lorsque Noé se réveilla et appritce que son fils cadet lui avait fait, il dit: Maudit soit Chanaan! qu’il soit le serviteur des serviteurs de ses frères.» Et après la bénédiction ou plutôt la prophétie messianiqueregardant Sem et Japheth, la même sentence serépète à l’adresse de Chanaan: «Béni soit Jéhovah, Dieude Sem, et que Chanaan soit son serviteur. Que Dieudilate Japheth, et qu’il habite dans les tentes de Sem, etque Chanaan soit son serviteur.» Nous n’avons pas ici àexpliquer cette prophétie, qui contient en germe l’histoiredu monde. Remarquons seulement que Chanaan y estmis sur la même ligne que Sem et Japheth, ses «frères» (dans le sens large qu’on connaît au mot hébreu), présentsdevant Noé. Si l’on suppose que Chanaan n’estqu’une tribu qui se formera longtemps après Noé et tirerason nom d’une partie basse de la Palestine, la prophétiede Noé n’a plus de sens pour ses auditeurs immédiats.Ce n’est pas à dire toutefois qu’il ne s’agit pas en premierlieu des descendants de Chanaan, comme de ceux.de Senri et de Japheth; mais ces descendants supposentles ancêtres dont ils tirent leurs noms, et qui seuls entendirentles paroles prophétiques du second père de l’humanité.
Sur la raison pour laquelle la malédiction méritée parCham frappe son fils Chanaan, voir Cham, col. 513. LaGenèse ne nous dit pas comment la prédiction de Noé
se vérifia par rapport à Chanaan lui-même. Quant à sapostérité, on sait comment elle fut en partie détruite, enpartie subjuguée par les Israélites, et comment les peupleschananéens ont fini par disparaître de la scène de l’histoire.
2. CHANAAN (PAYS DE). On est naturellement tentéde croire que ce terme géographique comprend toutesles contrées habitées par les descendants de Chanaan, c’est-à-dire le pays des Chananéens dans le sens le pluslarge. Néanmoins, parmi les peuples chananéens mentionnésGen., x, 15-18, il yen a qui, d’après toutes lesdonnées de l’histoire, ont toujours eu leur siège hors deslimites assignées au pays de Chanaan. Ailleurs, au contraire, le nom de «Chananéens» est pris dans un sensbeaucoup plus restreint, ne comprenant qu’une petitepartie des descendants de Chanaan. Voir, par exemple, Gen., xv, 21; Exod., xxiii, 23, 28, etc. Et en prenant lenom dans ce sens restreint, le territoire «des Chananéens» ne comprenait que la moindre partie du pays «deChanaan», c’est-à-dire la côte de la Méditerranée de Gazaà Sidon et la vallée du Jourdain. Cf. Gen., x, 19; Num., xill, 30 (hébreu, 29); xiv, 25; Deut., i, 7; Jos., xi, 3.L’étude des textes où il est question du «pays de Chanaan» montre que cette expression désigne la Palestineoccidentale ou cisjordanienne, avec le pays compris entrele cours supérieur du Jourdain et le Nahr er-Rouqqâdou le Djaulan occidental.
Le pays de Chanaan est d’abord la terre où habitaientles patriarches, Gen., xi, 31; xii, 5; xvii, 8; laterre promise à leur postérité, Gen., xvii, 8; Lev., xiv, 34; xxv, 38; Num., xiii, 3; xxxiv, 2, 29, et que les Israélitesont conquise sous Josué. Ps. civ (hébreu, cv), 11. Elle està l’ouest du Jourdain. Num., xxxiii, 51; cf. xxxiv, 2, 12, et Ezech., xlvii, 18. Le pays de Chanaan, où la mannecessa de tomber, Exod., xvi, 35; Jos., v, 12, commence auJourdain; car Moïse a vu le pays du mont Nébo, Deut., xxxii, 49, sans pouvoir y entrer, Deut., xxxii, 52; cf.Num., xiv, 30; xx, 12; Deut., xxxii, 49. C’est pourquoi il est opposéau pays transjordanien, Num., xxxii, 32; xxxiii, 51; xxxiv, 2, 15; xxxv, 14, ou pays de Galaad, Jos., xxii, 9-15, comme au cercle (kikkar) de la Pentapole, Gen., xm, 12, et à la montagne de.Séir. Gen., xxxvi, 5-8. Ilcomprend Béthel et Haï, Gen., xiii, 3, cꝟ. 12; xxxv, 6; Ilébron, Gen., xvï, 3; cf. xiv, 13; xxxvii, 1, cꝟ. 14; Num., xm, 23, 30; Salem, ville des Sichémites, Gen., xxxiii, 18; Arad, dans le midi de la Palestine, Num., xxxiii, 40(hébreu); les montagnes de Garizim et d’Hébal, Deut., xi, 30; la ville de Silo. Jos., xxii, 9; Jud., xxi, 12. Ils’étend enfin «du désert de Sin au midi jusqu’à Rohobà l’entrée d’Émath». Num., xiii, 3, 17, cꝟ. 22. Nous neconnaissons qu’un seul texte qui pourrait faire croire unmoment que le pays de Galaad était compris dans laterre promise aux patriarches. Deut., xxxiv, 2-4, sur lemont Nébo, Dieu montre à Moïse «toute la terre deGalaad jusqu’à Dan», la terre de Nephthali, d’Éphraïm, de Manassé et de Juda jusqu’à la Méditerranée, y comprisle Négeb et la plaine de Jéricho jusqu’à Ségor, en disant: «Voilà le pays que j’ai juré à Abraham, à Isaac et à Jacobde donner à leur postérité.» Néanmoins ces dernièresparoles ne s’appliquent pas au pays transjordanien, où setrouvait Moïse, et qu’il venait de conquérir sur les roisd’Hésébon et de Basan, Num., xxi; Deut., n-m; car, quant à la Terre Promise, Dieu ajoute immédiatement: «Je vous l’ai fait voir de vos yeux, mais vous n’y entrerezpas.» Il est tout naturel cependant que le pays deGalaad soit nommé au ^.2, dans la description du panoramavu du mont Nébo, dont il faisait la partie la plusrapprochée. Une description détaillée des «frontières sdu pays de Chanaan se lit au chap. xxxiv des Nombres, 3-12, et au chap. xlvii d’Ézéchiel, 15-20. Il est vrai quedans ce dernier passage le nom de «Chanaan» n’apparaîtpas: il s’agit de la terre, qui, d’après une vision prophétique, devait être distribuée de nouveau entre les douzetribus d’Israël; mais on ne saurait douter de l’identitédes deux lignes de frontières.
Il est hors de doute encore que dans le Pentateuqueet dans Ézéchiel la Méditerranée limite le pays versl’ouest, tandis que le cours inférieur du Jourdain et lamer Morte forment en grande partie la limite orientale.La frontière du midi est déterminée dans les Nombrespar les localités suivantes, en allant de l’est vers l’ouest: le désert de Sin, à côté d’Édom; la montée à"Aqrabbîm(Vulgate: ascensus Scorpionis); Sin (Vulgate: Senna); Cadèsbarné; Ifâfar-Addâr (Vulgate: villa nomine Adar); Asémona; le torrent d’Egypte. Ézéchiel ne mentionneque «Thamar, Cadès = Cadèsbarné et le torrent». Maistoutes les localités des Nombres se retrouvent dans Josué, xv, 1-4, sur les limites méridionales de la tribu de Juda.Ici encore deux villes sont ajoutées: Esron à l’est, etCarcaa à l’ouest d’Adar. Il résulte donc de ce passage deJosué que le pays de Chanaan promis à Moïse, Num., xxxiv, ne s’étend pas plus loin vers le midi que le territoireoccupé de fait par les Israélites sous Josué. Ce pointmérite d’être constaté. Du reste, nous n’avons pas à entrerdans le détail des identifications proposées, qui en grandepartie sont encore peu certaines. Voir les articles spéciaux.Disons seulement ici que Cadèsbarné semble êtreretrouvé dans’Ain Qadîs, à 30° 33’latitude nord, et qu’onpeut par conséquent étendre jusque-là la limite méridionalede la terre de Chanaan.
Du côté du nord on rencontre des difficultés plus. sérieuses. L’opinion commune ne voit dans les frontièresseptentrionales des Nombres et d’Ézéchiel que des frontières «idéales» ou «prophétiques», allant vers le nordet vers l’est à une distance considérable au delà des frontièresréelles du pays occupé par Josué. Et de fait pasune seule des localités nommées dans ces deux livres surles frontières du pays de Chanaan ne se retrouve dansla description des deux tribus septentrionales (Aser etNephthali) dans le livre de Josué, xix, 24-39. Nouscroyons néanmoins que la différence entre les frontières «idéales» et les frontières réelles du pays d’Israël, sidifférence il y a, se réduit à très peu de chose. Voici leslocalités données par les Nombres, en partant de laMéditerranée: Hôr hà-hâr (Vulgate: mons allissitnus.L’expression hébraïque pourrait signifier s Hor de lamontagne», mais on comprend ordinairement «le montHor a); Bô’flâmât (Vulgate: a quo venient in Ernath); Sedada; Zephrona; ffasar’Ênân (Vulgate: villa Enan).
— Le texte d’Ézéchiel, xlviii, 1-28, est un peu plusdéveloppé; on y rencontre, en allant également de l’ouestà l’est: le chemin d’Héthalon; Bô’Sedâdâh (Vulgate: venientibus Sedada); Émath (nous croyons, d’aprèsxlviii, 1, qu’il faudra lire avec les Septante: Bô’Cernât, Sedâd, etc.); Bérotha; Sabarim, entre le territoirade Damas et celui d’Émath; Ifâ^êr hat-tikôn (= Ifâçêrdu milieu; Vulgate: domus Tichon), sur la frontière duIJaurân (Vulgate: juxta terminum Auran); Hâ$ar’Ênônou IJàsar’Ênân, Ezech., xlviii, 1 (Vulgate: atriumEnan). Le texte ajoute: «sur la frontière de Damas.»
— La frontière orientale, d’après les deux textes, partde Jfâ$ar’Ênân et parvient au Jourdain pour le suivrejusqu’à la mer Morte. Mais les Nombres ajoutent d’autresdétails: «Vous vous marquerez la frontière à l’est deIfâsar’Ênân jusqu’à Sephama. Et la frontière descendde Sephama jusqu’à Rebla (mais d’après les Septante, quiont Ap8tj), i£, on pourrait lire Harbèl), à l’est de’Ayin(Vulgate: contra fontem Daphnin). Et la frontière descendet touche à l’épaule de la mer de Cennéreth, versl’est, et descend au Jourdain…»
L’opinion la plus récente et la moins invraisemblableque nous trouvons chez les savants modernes à proposde ces frontières est celle de Furrer (Antike Stâdte imLibanongebiete, dans la Zeitschrift des Deutschen Palâstina-Vereins, t. viii, année 1885, p. 27-34), adoptée CHANAAN
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auasi avec une légère modification par von Riess (Bibel-Atlas, 2e édit.). Voici en peu de mots les identificationsproposées par ces savants: Héthalon est Heitelâ, au nordde Tripoli, entre le Nahr’Akkâr et le Nahr el-Kebîr.(Le mont Hor désigne conséquemment les derniers contrefortsseptentrionaux du Liban.) — L’entrée d’Émath, d’après Furrer, est le commencement de la vallée deHamàh proprement dite, près i’Er-Restân; d’après vonRiess: la vallée du Nahr el-Kebîr, qui conduit de Tripolià Homs et Hamah. — Zefrôna est Safraneh (d’aprèsRobinson: Ez-za’feràrieh), à l’est-sud-est d’Er-Restân.
— Sedâd est Sadad, au sud-est de Homs, au nord-estde Nebq. — Bérôlha est Bereitdn, au sud de Baalbek.
— Sabarim est Sômerîyeh, à l’est du lac de Homs. —Haurân est Hawwârîn, au nord-est de Sadad. — Jfâsêrhat-likôn est Mâhîn, à deux kilomètres et demi au sud deHawwârîn. — Hàsar’Ênân est Qiryatein, sur le cheminde Damas à Palmyre. — Sefâm est inconnu; Furrer proposede le chercher à’Atnî, à quarante-six kilomètres ausud-sud-est de Qiryatein. — Harbêl est’Arbîn, à cinq kilomètresau nord-est de Damas. Ceux qui lisent Hâ-Riblâhl’identifient avec Rebleh, à l’est de l’Oronte, entre Baalbeket Homs.
Pour les difficultés de détail que présentent ces identifications, voir les articles spéciaux. L’objection généraleà laquelle elles donnent lieu, c’est que ces frontièress’étendent à cent soixante-dix ou cent quatre-vingts kilomètresau nord du pays que les Israélites ont occupé defait. Aussi croyons-nous pouvoir tracer avec plus de vraisemblancela ligne des frontières septentrionales le longdu Liban méridional (ou du Nahr el-Qâsimîyeh) et du’Grand Hermon, et la ligne orientale le long du Rouqqâdet du Scherî’at el-Menâdireh (l’ancien Yarmouk) jusqu’àson embouchure dans le Jourdain. Dans un mémoirerécent: La frontière septentrionale de la Terre Promise, présenté au Congrès scientifique des catholiques, à Bruxelles (1894), et publié dans la Revue biblique, 1895, p. 23-36, et dans le Compte rendu du Congrès, 2e sect., p. 124-136, nous avons proposé les identificationssuivantes: Heflôn =’Adloûn, à une lieue et demie aunord du Qâsimîyeh, sur le chemin de Tyr à Sidon. —Le mont Hor = le Liban méridional. — L’entrée d’Émath= la Merdj’Ayoûn, la plaine ouverte qui sépare le Libandes contreforts occidentaux du Grand Hermon. — Sedâd(lisez: Serâd, avec le texte samaritain et la version samaritaineet le texte grec des Nombres) = KhirbetSerâdâ, à l’est de la Merdj’Ayoûn. — Bêrôtâh pourraitêtre Bârîs. — Zifrôn = Sarifâ [?] ou Fouroûn [?] (Cestrois villages se trouvent au midi du Qâsimîyeh.) Il estpossible aussi que Zifrôn ne soit qu’une corruption dunom suivant. — Sibrayim = Khirbet Senbarîyeh, surle Hasbânî, au sud-sud-est de la Khirbet Serâdâ. —tfâfêr ha{ - tikôn = Hazoûreh, au nord - est de Bâniyâs.
— Jfàsar-’Êndn — el-Hadr, au delà du Nahr Mougannieh, au pied sud-est du Grand Hermon. — Sefâm=’Ofâni, au sud d’el-Hadr. De ce point la frontière «descend» réellement jusqu’au Jourdain. —’Ayin =’Ayoûn, dans le midi du Djaulan. — HâRiblâh semble avoir laissé une trace de son nom dansle Zôr Ramliyéh, contrefort du plateau du Djaulan surle Yarmouk, à l’est à" Ayoûn. On pourrait encore lireHâ Abilàh, et comprendre la célèbre ville de ce nom, qui est, elle aussi, exactement à l’est d" Ayoûn. Endescendant le long du Yarmouk la frontière «touchait àl’épaule de la mer de Kinnèrèf (c’est-à-dire aux hauleursqui dominent le lac de Tibériade) vers l’est».
Avouons que l’identification de Bérotha avec Bàris, à 20 kilomètres à l’ouest de la Khirbet Serâdâ, est assezprécaire. En remarquant que les Septante au lieu deBêrôtâh Sibrayim donnent MaiêG7jpi(ç *E6paij….) (B)ou MauTST; pà(; ’Espaji…) (A), on pourrait supposerune faute de copiste et penser à la Khirbet Bouqueiréh(Survey Map, Planche H Ob; Memoirs, . i, p. 91), qui
n’est qu’à quatre ou cinq kilomètres de la même ruine.Ne discutons pas trop sur le Béroth du second livre desRois (II Sam.), rai, 8. Il peut être identique à celuid’Ézéchiel, mais le nom y est encore plus douteux, le passage parallèle des Paralipomènes, les Septante etJosèphe présentant trois autres leçons. Voir Biïroth 3, t. i, col. 1625-1627. Il nous suffit de constater que surBéroth nous ne savons rien d’assez certain pour abandonnernotre hypothèse au sujet de la direction généralede la frontière.
D’après cet exposé, les limites de la Terre Promise desNombres et d’Ézéchiel se confondent (ou à peu près)avec celles du pays conquis par Josué et habité encorepar les Israélites aux temps de David, I Par., xiii, 5, deSalomon, III Reg., viii, 65; II Par., vii, 8, et de JéroboamII, fils de Joas. IV Reg., xiv, 25; Amos, vi, 15.Alors, d’après tous ces passages, l’entrée d’Émath marquaitla frontière «réelle» du territoire israélite, — commeailleurs du reste elle est mentionnée avec Rohob, Num., xm, 22, ville d’Aser, Jos., xix, 28, 30; Jud., i, 31, et avecBaalgad sous le mont Hermon, Jos., xiii, 5, Jud., iii, 3, qui semble être identique à Bâniyâs. — Voir Baalgad.Cette manière de voir est confirmée encore par deux passagesde la Mischna, Challâh, iv, 8; Schebiith, vi, 1, oùle pays occupé par les Israélites «venus de l’Egypte» estdécrit comme allant «jusqu’au fleuve et à VAmânâh».Ce dernier nom, employé dans les Targums pour lemont Hor, ne peut désigner que le Liban méridional, tandis que «le fleuve» doit être le Nahr el-Qâsimîyeh.
Ajoutons que notre hypothèse seule rend compte d’undétail très remarquable du chap. xlviii d’Ézéchiel. Ici leprophète, en allant du nord au midi, divise la terre d’Israël, décrite au chapitre précédent, sur sa largeur entièreen douze bandes égales, assignées aux douze tribus, —sans compter une zone plus large, qu’il appelle la Terournâh, «l’offrande,» et qui est considérée comme le partagedes prêtres et des lévites. Elle consiste principalementdans Un carré de 25000 cannes (150000 aunes saintes)de côté, au milieu duquel, ou à peu près, est placé le «sanctuaire de Jéhovah», tandis que «la ville» saintesemble être à peu de distance, vers le midi. Ce qui resteà l’ouest et à l’est du carré est appelé la terre du Prince.On s’attend à voir cette Teroumâh placée au centre dupays; mais Ézéchiel la place plus loin vers le midi, entrela septième et la huitième tribu. Si l’on demande laraison de cet arrangement, on n’en trouve pas d’autreque celle qui est donnée par Keil, Ezéchiel, Leipzig, 1868, p. 188, savoir: que «la ville» et son territoire (nous dirionsplutôt: le sanctuaire, comme centre religieux) devaitrester dans les environs de l’ancienne Jérusalem, — cequi convient du reste avec la circonstance que la Teroumâhest placée entre les deux tribus de Juda et de Benjamin.
Malheureusement, si Ézéchiel, au chapitre précédent, étendait la Terre Sainte jusqu’à Er-Reslàn, toute laTeroumâh resterait à une distance très considérable aunord de Jérusalem. Et Keil lui-même, ouvrage cité, planche IV, n’échappe pas à cet inconvénient, quoiqu’iln’étende la frontière septentrionale que jusqu’à la AïnLeboueh, au nord de Baalbek. Dans notre hypothèse, aucontraire, le «sanctuaire de Jéhovah» reste exactementà la latitude du temple de Jérusalem. La distance de cetteville au Nahr el-Qâsimîyeh, en ligne droite et en chiffresronds, est de cent soixante-dix kilomètres; celle de Jérusalemà la frontière méridionale (’Aïn Qadis, 30° 33’latitudenord) est de cent trente kilomètres. En tenant compte<les diverses opinions sur la longueur de l’aune sainte(voir Keil, ouvr. cité, p. 492; Trochon, Ézéchiel, p. 278; Schegg, Bibl. archœol., p. 298), on peut évaluer les vingt-cinqmille cannes de la Teroumâh à environ soixante-dixkilomètres; mais, mesurées selon les accidents d’un terrainmontagneux, elles ne prendraient pas plus de soixante
kilomètres sur la carte^ La Teroumàh s’étendrait donc àtrente kilomètres au nord et au midi du «sanctuaire»: ce qui laisse une distance de cent kilomètres (le tiers dela longueur totale du pays) pour les cinq tribus du midi, et cent quarante kilomètres pour les sept tribus du nord.Chaque tribu prend ainsi un quinzième de la longueurtotale (vingt kilomètres), la Teroumàh un cinquième(soixante kilomètres). Ce résultat nous semble une confirmationremarquable de notre opinion.
Le «pays de Chanaan» comprenait donc la Palestineoccidentale depuis 30° 33’jusqu’à 33° 18’latitude nord, avec le Djaulan occidental ( entre le Jourdain et le Rouqqâd).Ici encore le pays de Galaad (la Pérée) en resteexclu. D’après le texte d’Ézéchiel, la terre d’Israël étaitbornée par le territoire d’Émath au nord, par celui deDamas au nord-est, par le Hauran et le pays de Galaadà l’est. Voir Auran.
Voilà les renseignements que nous trouvons dans laBible sur l’étendue du «pays de Chanaan». Faut-il comprendredans le même sens «la frontière du Chananéen» mentionnée Gen., x, 19? «La frontière du Chananéenest de Sidon vers Gérare jusqu’à Gaza, vers Sodome, etGomorrhe, et Adama, et Séboïm jusqu’à Lésa (hébreu: Lésa’).» C’est la frontière ouest de la Palestine, la côtede la mer, de Sidon vers le midi (direction de Gérare)jusqu’à Gaza; et la frontière sud-est est formée par laPentapole. Sur Lésa’il y a deux opinions: d’après les uns, il est identique à Callirhoé, à l’est de la mer Morte; d’après les autres, il faudrait lire un hé au lieu du’aïnfinal, et comprendre Lais, ville près de la frontièrenord-est de Chanaan, qui après la conquête des Danites, Jos., xix, 47; Jud., xviii, 27-29, reçut le nom de Dan.Ce n’est que dans cette dernière hypothèse que le textetrace vers l’orient une ligne de démarcation complète.Nous avons dans ce cas les quatre angles d’un parallélogramme: Sidon au nord-ouest, Gaza au sud-ouest, laPentapole au sud-est et Laïs au nord-est. Ce parallélogrammen’est pas bien loin de répondre au pays deChanaan, décrit plus haut. Et «le Chananéen», d’aprèscette exposition, comprendrait toutes les tribus qui occupaientle pays avant les Israélites, et qui souvent sontdésignées en bloc sous le même nom. Néanmoins, dansbeaucoup d’autres passages, «le Chananéen» ne désignequ’une seule tribu, ou du moins un groupe des tribuspalestiniennes, habitant la’Arâbâh, le long du Jourdain, Deut., xi, 29-30, et la côte de la Méditerranée, Jos., v, 1; xm, 3; Deut., i, 7; cf. II Sam. (Reg.), xxiv, 7; en d’autrestermes, les «pays bas» de la Palestine, Num., xiv, 25, à l’est et à l’ouest des montagnes, Num., xiii, 30; Jos., XI, 3. Voir Chananéen 1. Dans les temps des prophètes, quand les Chananéens avaient disparu du pays des Hébreux, le nom désignait encore les Phéniciens, Abd., 20, et le nom de «Chanaan» tout court est employé pourle pays phénicien, Is., xxiii, 11, ou philistin, Soph., h, 5. Dans ce sens, l’emploi de ces mots s’est perpétuéjusqu’à l’époque du Nouveau Testament: la femme «syrophénicienne» de Marc, vii, 26, est une «Chananéenne» chez saint Matthieu, xv, 22. Voir Chananéenne. Etiennede Byzance connaît le mot Xvâ comme le nom anciende la Phénicie, et d’après saint Augustin, In Rom., vin, 13, t. xxxv, col. 2096, les Pœni de son temps s’appelaientencore Chanani. Cet usage plus récent expliqueaussi l’erreur des Septante, qui parfois ont traduit «lepays de Chanaan» par tj «Êoivixr, ou f, yûçix râv «Êoivîxmv, même dans des passages où il s’agit de la partieorientale du pays de Chanaan, de la vallée du Jourdain.Exod., xvi, 35; Jos., v, 12. Il est même probable qu’enmême temps le nom restait en usage soit pour la valléedu Jourdain supérieur, près du lac El-Hoûleh, soitpour un de ses affluents occidentaux. Du moins versl’an 1000 de notre ère, le géographe arabe El-Moqaddasimentionne un Ouâdî Kan’ân faisant partie du districtdu Jourdain, et situé, à ce qu’il paraît, entre
Tibériade et Bâniâs. Voir Gildemeister, Zeitschrift desdeutschen Palâsïma-Vereins, année 1884, t. tu, p. 144, 153, 223. Il s’agit peut-être de VOuâdi el-taurâhin, «vallée des moulins,» avec un courant d’eau assez important, qui descend de Meiroun vers le Jourdain, et qui, à l’est de Safed, est dominé par le Djebel Kan’ân, montagnede 1050 mètres de hauteur. Voir Survey of WesternPalestine, Memoirs, t. i, p. 194-209. Cette applicationspéciale du nom de «Chananéen» nous semble enfinconvenir mieux au texte cité de Gen., x, 19: dans cesens, le «Chananéen» habitait la côte entre Sidon etGaza, et la vallée du Jourdain, (deLaïs-Dan [?]) jusqu’àla Pentapole.
Mais après tout le passage entier n’est que d’une authenticitédouteuse. Dans le texte samaritain, il est remplacépar un autre tout différent, et qui semble être mieuxen rapport avec le verset précédent, où sont énuméréstous les peuples descendant de Chanaan, dont plusieursavaient leurs sièges bien loin au nord du «pays de Chanaan». Les Héthéens nommément s’étendaient jusqu’àl’Euphrate. Cf. Gen., xv, 18; Jos., i, 4. Et le texte samaritain, au lieu du passage cité plus haut, a ces paroles-ci: «Et la frontière du Chananéen ( comprenez: de tous lesdescendants de Chanaan, énumérés au ꝟ. 18) s’étend dufleuve de l’Egypte jusqu’au grand fleuve, le fleuve de l’Euphrate, et [de l’Euphrate] jusqu’à la mer postérieure (ouoccidentale, la Méditerranée).» C’est le seul passage géographiqueoù «le pays» ou «la frontière du Chananéen» comprend tous les pays occupés par les descendants deChanaan; mais évidemment ce sens est ici à sa placeaprès le ^. 18, dont les derniers mots mentionnent ladispersion des familles chananéennes. Aussi sommes-nousbien tenté de l’admettre comme authentique. Plustard, croyons - nous, quand l’expression «pays du Chananéen» avait un sens beaucoup plus restreint, on n’aplus compris ce verset, et une main audacieuse se serapermis de refondre le texte selon la signification plusrécente de l’expression. Ce qui est certain, c’est que l’acceptionla plus large du «pays du Chananéen» apparaîtici dans le texte samaritain. Il y a d’autres passages, Gen., xv, 18; Deut., i, 7; xi, 21; Jos., i, 4, où tous lespays en deçà de l’Euphrate sont promis aux Israélites, —promesse qui ne s’est vérifiée que sous David et Salomon, — mais ils n’y sont pas appelés «pays du Chananéen» ou «pays de Chanaan». — Il n’y a que les documentscunéiformes, plus anciens que le Pentateuque, quisont mieux d’accord avec le texte samaritain. Leur malKi-na-ah-hi, «pays de Chanaan,» semble comprendrela Phénicie septentrionale, le pays A’Amourra, aussibien que la Phénicie méridionale, avec la vallée d’Akka.Voir A. J. Delattre dans les Proceedings of the Societyof biblical Archxology, 1891, t. xiii, p. 223, 234.
Pour la description du pays, voir Palestine; pour les
I habitants, voir Chananéen 1. J. van Kasteren.
i
| 3. CHANAAN (LANGUE DE). Isaïe, Xix, 18, appelleI ainsi la langue hébraïque. La langue parlée par les Chananéensproprement dits était pour le fond l’hébreu. VoirHébreu.
- CHANAANA##
CHANAANA (hébreu: Kena’ànâh; variante: Kena’nâh; Septante: Xavaavi). Ce nom semble avoir lasignification «bas, humble, vil», comme le nom «Chanaan» (Kena’an), où la terminaison est rejetée (cf. Chanaanet Chanana), II Par., xviii, 10, où il est donné aupère d’un certain Sedecias, un des faux prophètes quipromettaient à Achab et à Josaphat la victoire sur lesSyriens. J. van Kasteren.
- CHANANA##
CHANANA (hébreu: Kena’ànâh; Septante: Xavavdcv; B: Xavavdc), nom d’un Israélite de la tribu daBenjamin, mentionné I Par., vii, 10. Il descendait deBenjamin par Jadihel et Balan. — Sur l’origine et la signi
fication du nom (bas, humble, vil), voir Chanaan. Enhébreu, le même nom est encore donné à un autre personnage, Il Par., xviii, 10; mais là il est rendu dans laVulgate par Chanaana. Voir cet article.
J. VAN KASTEREN.
1. CHANANÉEN (hébreu: Kena’anî; Septante: XavavaTo?, une fois «toiviÇ, Exod., VI, 15; Vulgate: Chananseus), 1o descendant de Chanaan, fils de Cham, Gen., x, 18, etc. Voir Chanaan 1.
I. Diverses tribus chananéennes. — L’Écriture désignesous le nom général de Chananéens les diverspeuples qui habitaient la terre de Chanaan, Gen., xii, G; xxiv, 3, 37; xxxiv, 30; Exod., xiii, 11; mais elle énumèreen particulier six tribus établies dans le pays et quidevaient être expulsées par les Hébreux de la Terre Promise: 1o les Chananéens proprement dits; 2o les Héthéens; 3o les Amorrhéens; 4o les Phérézéens; 5o lesIlévéens; 6o les Jébuséens. Exod., iii, 8, 17; xxiii, 23 (28); xxxiii, 2; xxxiv, 11; Deut., xx, 17; Jos., ix, 1; xii, 8; Jud., iii, 5. Les Phérézéens sont omis Exod., xiii, 5.Cf. I Esdr., ix, 1; II Esdr., ix, 8. — 7o Les Gergéséens sontajoutés, Gen., x, 16; xv, 21; Deut., vii, 1; Jos., iii, 10; xxiv, 11. Cf. I Par., L, 13; II Esdr., ix, 8; — Gen., xv, 19-21, contient quatre noms de plus: 8o les Cinéens; 9o les Cénézéens; 10o les Cedmonéens; 11o les Raphaïm.Elle omet les Hévéens. — La Genèse, x, 15-18, et le passageparallèle, I Par., i, 15-16, énumérent comme descendantsde Chanaan les Sidoniens, les Iléthéens, les Jébuséens, les Amorrhéens, les Gergéséens, les Hévéêns, les Aracéens, les Sinéens, les Aradéens, les Samaréenset les Amathéens ou Hamathéens. Les Amathéens sont leshabitants d’Émalh. Les quatre avant-derniers ne sont, nommés nulle autre part dans l’Écriture, à part les Aradéensdont il est question dans Ezéchiel, xxvli, 8, 11.Voir chacun de ces mots.
2o Le mot Chananéen est employé comme synonymede «marchand», Job, xl, 30 (Vulgate, 25: negotialores); Prov., xxxi, 24; Zach., xiv, 21 (Vulgate: mercator), parce que les Chananéens, en particulier les Phéniciens, s’adonnaient beaucoup au commerce.
3o La tribu qui portait spécialement le nom de Chananéens, à l’exclusion des autres descendants de Chanaan, Gen., xiii, 7; xv, 21; Exod., m; 8, 17; xiii, 5; xxiii, 23, 26; xxxiii, 2; xxxiv, 11, habitait «près de la mer(Méditerranée) et sur les bords du Jourdain», Num., xm, 30 (29), ainsi que «dans les vallées» avec les Amalécites.Num., xiv, 25, cꝟ. 43. L’auteur sacré appelle sansdoute Chananéens, dans ce sens restreint, les descendantsde Chanaan qui n’appartenaient pas à quelqu’unedes autres tribus énumérées avec eux sous un nom particulierdans les passages cités.
IL Histoire générale des tribus chananéennes. —Nous avons peu de détails sur leur histoire. Elles occupaientdéjà le pays qui portait leur nom quand Abrahamy arriva. Gen., xv, 19-21. Dieu, à cause de leur idolâtrieet de leurs crimes, donna leurs possessions aux enfantsd’Israël, qui les soumirent sous Moïse et Josué, et entuèrent ou chassèrent la majeure partie. La conquêteavait été commencée du temps de Moïse par une premièrevictoire remportée sur le roi chananéen Arad, au sud dela Palestine. Num., xxi, 1-3. Séhon, roi des Amorrhéens, et Og, roi de Basan, furent ensuite battus, et leursroyaumes, situés à l’est du"jourdain, devinrent le partagedes tribus de Ruben et de Gad et de la moitié dela tribu de Manassé. Num., xxi, 21-35; xxxii; Deut., ii, 30; iii, 17. Josué, après avoir battu les Chananéens dusud près de Gabaon, Jos., x, et ceux du nord au lac Mérom, Jos., xi, passa ensuite le Jourdain et conquit toutela Palestine. Si Ton pouvait en croire Procope, Bell.Vand., ii, 10, édit. de Bonn, 1. 1, p. 450, une partie desChaiianéens vaincus aurait alors émigré en Afrique, maisson témoignage, datant du ve siècle de notre ère, estde peu d autorité, quoiqu’il prétende l’appuyer sur une
inscription. — Il resta cependant encore des Chananéensen Palestine. Jud., i, 21, 27-35; II Reg., v, 6; I Par., xi, 41. Ils furent même assez forts, du temps des Juges, pour asservir les tribus du nord, jusqu’à ce que Décoraet Barac les eussent vaincus, Jud., iv-v. Salomonimposa un tribut à ceux qui existaient encore de sontemps. lit Reg., xi, 20-21. On voit dans I Esdr., ix, 1-2, qu’il y avait encore après la captivité de Babylonedes Chananéens avec qui les Israélites s’étaient alliés pardes mariages illicites. Les Nathinéens, qui étaient vouésau service du Temple, I Par., ix, 2; Esd, ii, 43, etc., étaient, au moins en partie, des Chananéens. Voir Nathinéens.Pour la Chananéenne de l’Évangile, Matth., xv, 22’, voir Chananéenne. F. Vigouroux.
2. CHANANÉEN (Kavavixi)ç; Chananseus), surnomdonné, Matth., x, 4; Marc, iii, 18, à l’apôtre saint Simon, frère de l’apôtre saint Jude, pour le distinguer de plusieursautres Simon, nommés dans le Nouveau Testament, en particulier de Simon-Pierre et de Simon, «frèrede Jésus.» Matth., xiii, 55; Marc, vi, 3. Ce surnom nedésigne pas la nationalité de l’apôtre; il vient de l’adjectifaraméén ywp, Qan’ân, KavavÎTr,; , et non de l’ethnique>2y23, Kena’anî, Xavavaîo; . Ces deux mots sont
complètement différents dans le texte original, quoique laVulgate transcrive l’un et l’autre de la même manière.Chananseus. Saint Luc nous a appris quel était le véritablesens du surnom de l’apôtre en le traduisant engrec par ÇrjWriî <; ; Vulgate: Zelotes, Luc, vi, 15; Act., i, 13, c’est-à-dire «plein de zèle» pour la religion, soitque Simon appartînt à la secte juive connue sous le nomde Zélotes, Josèphe, Bell. jud., IV, iii, 9, etc.; soit qu’ilse fut fait simplement remarquer par sa piété et sa ferveurpour la cause de Dieu. Voir Simon i.e Chananéen etZélote. F. Vigouroux.
- CHANANÉENNE##
CHANANÉENNE (Xavavafa). C’est par ce nom ethLa Chananéenne. Sarcophage du cimetière du Vatican.D’après Bosio, Rotna sotterranea, p. 65.
nique grec que saint Matthieu, xv, 22, désigne la femmequi vint au-devant du Seigneur, aux confins de la Phénicie, lui demandant la guérison de sa fille possédée dudémon (fig. 183). Celte femme, qui était de la race desChananéens, est appelée en saint Marc, vii, 20, ’EXXrçvi’; , 51l
CHANANÉENNE — CHANDELIER
542 «païenne» (de religion), et Supo? oiviuaa tû y^’^'i «syrophéniciennede nation.» À cette époque, en effet, laPhénicie était réunie à la province romaine de Syrie.La Chananéenne avait sans doute appris quelque chosede l’attente messianique; elle savait par les Juifs que legrand prophète devait être de la race de David, et peut-êtrele lui avait-on désigné par la dénomination de filsde David. C’est ainsi qu’elle l’appelle, Matth., xv, 22, quand elle se prosterne à ses pieds. Marc, vii, 25. Elleavait commencé à supplier Jésus sur le chemin, elle lesuivit dans la maison où il entra pour se soustraire auximportunités de la foule. Marc, vii, 24. Le silence calculéde Jésus, et son double refus, ne la découragèrent pas, mais plutôt lui fournirent l’occasion de manifester safoi. Car non seulement elle persista dans sa demande, Matth., xv, 26, mais son humilité lui inspira une admirableréponse. Notre - Seigneur, en effet, lui avait déclaréqu’il n’était pas venu pour les païens, mais seulement pourles brebis perdues de la maison d’Israël, Matth., xv, 24; il avait dit qu’il n’était pas bon que le pain fût soustraitaux enfants pour être donné aux chiens. Matth., xv, 26; Marc., vii, 27. La Chananéenne repartit que les chiensétaient bien admis à se nourrir des miettes tombées dela table de leur maître. Matth., xv, 27; Marc, vii, 28.Cette réponse pleine de foi lui valut l’éloge du Sauveur, Matth., xv, 28, et obtint la guérison de sa fille, qu’elletrouva, à son retour, tranquille sur sa couche et délivréedu démon. Marc, vii, 30. P. Renard.
CH AN AN EL ben Chuschiel, ou plus exactementIîananêl ben Husiêl, célèbre rabbin, né à Kairouan, enTunisie, vers 990, et mort vers 1050. Tosaphiste remarquablepar sa science talmudique, et adversaire des caraïtes, il se fit connaître aussi par ses travaux d’exégèse, notamment par un commentaire sur le Pentateuque, dontil ne reste plus que des fragments. S. L. Rapaport apuhlié une leçon de ce commentaire dans sa biographiede Hananel, Tôledôt rabbênû Hananêl, in-8o, Vienne, 1831-1832. E. Levesque.
- CHANANI##
CHANANI (hébreu: Keuâni, abréviation de Kânanyâhû, «Dieu protège;» Septante: Xwvsvi; CodexAlexandrinus: Xavavi), un des lévites qui, après avoirconfessé publiquement les péchés du peuple et lu la Loi, renouvelèrent l’alliance avec le Seigneur sur l’ordre d’Esdras.II Esdr., ix, 4. Les Septante ont uni le nom propreprécédent, Bani, avec Chanani, en l’interprétant commes’il y avait Benê, «. les fils de,» ulol Xwvevî.
- CHANATH##
CHANATH, Nom., xxxii, 42, ville à l’est du Jourdain, dont le nom est écrit Canath I Par., ii, 23. VoirCanath.
CHANCELIER. On traduit par ce mot impropre, dans plusieurs versions françaises de la Bible, l’hébreuntazklr, qui signifie littéralement, non celui qui garde etappose les sceaux, comme notre expression chancelier; mais <i celui qui fait souvenir», c’est-à-dire celui quiest chargé de conserver la mémoire des événements, lerédacteur des annales royales (diberê hay-yâmin; Vulgate: verba dierum) ou l’historiographe officiel (Septante: âva|ju|ivir]<jx(ov; Vulgate: a commentariis). VoirHistoriographe.
- CHANDELIER##
CHANDELIER (hébreu: menôrâh, cf. nêr, «lampe;» Septante: vyyia; Vulgate: candelabrum) au sens strictdésigne aujourd’hui un ustensile supportant la chandelleou flambeau composé d’une mèche enduite d’une substancecombustible enroulée autour. Dans l’Ancien Testamentet dans les Évangiles, il s’entend toujours d’unsupport portant une ou plusieurs lampes. Le mot «candélabre», qui a la même, étymologie, s’applique ordinairementen français au chandelier à haute tige ou à plusieurs branches; mais, dans la Vulgate, candelabrums’employe seulement pour exprimer un porte-lampes.
I. Chandelier a sept branches. — 1o Description. —Il y eut d’abord dans le Tabernacle, puis dans le Temple, de Jérusalem, un candélabre célèbre, qu’on appelle ordinairementle chandelier à sept branches, à cause des septlampes qu’il portait. On l’appelait aussi, à cause de sa matière, «chandelier d’or,» menôrat zâhâb, Exod., xxv, 31, , et, à cause de son usage saint, le «chandelier pur», Lev., xxiv, 4; le «chandelier sacré». Eccli., xxvi, 22. Ilavait été fait sur l’ordre de Dieu, selon le modèle queMoïse avait vu au Sinaï. Exod., xxv, 40; Num., viii, i.La Sainte Écriture le décrit assez en détail. Exod., xxv, 31-39; xxxvii, 17-24. Il repose sur un pied, yérék, Exod., xxv, 31; xxxvii, 17, ou base, pâo-tç, Josèphe, Ant. jud., III, VI, 7, dont le texte sacré ne nous fait pas connaître laforme; selon la tradition juive, la base, convexe en dessuset concave en dessous, aurait été soutenue par trois pieds.H. Opitz, Disquisitio de candelabri mosaici structura, in-4o, Iéna, 1708, p. 10-11. De la base monte une tigetoute droite, qâneh, Exod., xxv, 31; xxxvii, 17; de chaquecôté de cette tige, à égale distance, partent sur un mêmeplan vertical trois branches parallèles, qânim, Exod., xxv, 32; xxxvii, 18. Ces six branches, en se recourbant, comme en éventail, atteignent par leur extrémité la mêmehauteur que le sommet de la tige centrale. La tige et.les branches, assez minces, Xerc-rof, Josèphe, Bell. jud., VII, v, 5, comme des roseaux, qânéh, sont ornées de diversmotifs de décoration, non surajoutés, mais ne formantavec le candélabre qu’un seul tout. Exod., xxv, 31. Ce sont, des coupes, des boutons ( de fleurs) et des fleurs épanouies.Exod., xxv, 33-34; xxxvii, 19-20. Les coupes (hébreu: gebî’im; Septante: xparripe; ; Vulgate: scyphi), au nombrede trois sur chaque branche et de quatre sur la tige cen.traie, Exod., xxv, 33-34, ressemblaient, dit Maimonide, De domo selecta, iii, 8, dans Crenii Opuscula, fasc. vi, p. 23, à des coupes d’Alexandrie aux bords larges et au, fond étroit. Les coupes étaient mesuqqâdîm, Exod., xxv, 33-34, c’est-à-dire en forme de fleur d’amandier, cequirépond assez bien à la description précédente. Selonid’autres auteurs, elles étaient en forme de fruit d’amandier, quand les amandes sont encore jeunes, Maimonide, domo selecta, iii, 2, dans Crenius, p. 22, ou découpées eniplusieurs parties rappelant chacune la forme d’amande.Reland, De spoliis Templi, in-12, Utrecht, 1775, p. 106.In modv.ni nucis de la Vulgate est la traduction de èx-rs--TU7cto|X£vot xapuc<r/ouç des Septante, qui s’entend de la.noix grecque ou amande. Gesenius, Thésaurus, p. 1473.Les boutons (hébreu: kaftôrîm; Septante: cçaipwrîjps; ; Vulgate: spheerulse) étaient de forme un peu oblongueovoïde. Maimonide, De domo selecta, va, 9, dans Crenius, p. 23. La décpration était complétée par des fleurs, (hébreu: ferâhîm; Septante: xpiva; Vulgate: lilia), qu’on regarde généralement comme des lis, d’après lesSeptante et le Targum; ou au moins des fleurs aux pétales, lancéolés et recourbés. Maimonide, De domo selecta, p. 24. Les interprètes ne s’entendent pas sur le nombredes boutons et des fleurs et sur la place de ces ornements.D’après le texte, Exod., xxv, 35, il y avait un bouton sur latige centrale aux trois endroits d’où partaient les branches; mais il ne paraît y avoir eu qu’un bouton et une fleursur chaque branche. Exod., xxv, 33. Aussi les rabbinscomptent-ilsgénéralement vingt-deux coupes, onze boutonset neuf fleurs pour le tout. Ugolini, Thésaurus, t. xr, col. dccccxxvi. Le nombre de soixante-dix, que Josèphe, Ant. jud., III, vi, 7, donne comme le nombre total de cesornements, est difficile à justifier. Il est vrai qu’il signaleun ornement de plus que la description biblique, po; <rxoiç, «des grenades;» mais qui pourrait bien n’être que latraduction de mesuqqâdîm. Tous ces ornements étaient enor, comme le candélabre lui-même. La tige, les branchesavec leurs ornements, tout était en or pur, Exod., xxv, 31; xxxvii, 17; Num., viii, 4, ciselé au tour, miqsah; ce fut.
l’œuvre du célèbre Bézéléel, aidé d’Ooliab et d’habilesartisans, Exod., xxxi, 2; xxxvii, 1, 17. Le poids de l’oremployé pour le candélabre et ses accessoires était d’untalent. Exod., xxv, 39; xxxvii, 24. L’Écriture ne nousdonne nulle part ses dimensions; selon les rabbins, ilaurait eu trois coudées ou dix-huit palmes de haut surdeux coudées ou douze palmes de large, Menachoth, ꝟ. 28 b: ce qui donne l m 575 sur’l m 05.
Ce candélabre portait sept lampes mobiles en or, Exod., xxxv, 14, qu’un prêtre préparait matin et soir, à l’heureoù l’on brûlait l’encens sur l’autel des parfums. Exod., xxx, 7-8. Il se servait pour cela de pincettes d’or, et c’estdans un vase d’or qu’il jetait les débris. Exod., xxv, 38.On employait l’huile d’olive la plus pure, Exod., xxvir, 20; Lev., xxiv, 2, un demi-Zog, 0, 15, par lampe. Selon Ja plupartdes commentateurs, elles ne brûlaient que la nuit; et le texte sacré paraît l’indiquer, Exod., xxvii, 21, endisant qu’elles brûlaient jusqu’au matin. La préparationdes lampes matin et soir, Exod., xxx, 7-8, consistait doncà les garnir, à les allumer ou à les éteindre. D’après Josèphe, Ant.jud., III, viii, 3, toutes les lampes auraientété allumées pendant la nuit, et trois seulement durantle jour. D’après Reland, Antiq. sacres, i, v, 9, in-12, 1717, p. 39, la lampe placée sur la tige centrale auraitbrûlé nuit et jour dans le second Temple.
Le candélabre était placé, non dans le Saint des saints, mais en avant du voile, Exod., XX vii, 21, dans la partiedu tabernacle appelée Saint, Exod., XL, 22; Hebr., ix, 2, sur la gauche, c’est-à-dire du côté de la paroi méridionale, Exod., xxvi, 35; xl, 22 (hébreu, 24); Num., viii, 2, les lampes tournées du côté de l’orient, c’est-à-dire versle Saint des saints. Num., viii, 2 (hébreu). D’après letexte actuel de la Vulgate, les lampes auraient regardéle mur septentrional, le long duquel était placée la tabledes pains de proposition. Mais toute la seconde partie dece verset, qui manque dans l’hébreu, les Septante etles anciens manuscrits de la Vulgate, paraît bien être uneglose introduite vers le IXe siècle. Heyse, Biblia sacralatina, in-8o, Leipzig, 1873, p. 129.
2o Chandelier du Tabernacle. — Le candélabre d’or, don des enfants d’Israël, Exod., xxxix, 36, fut placé dansle Tabernacle, le premier jour du premier mois, un anaprès la sortie d’Egypte. Exod., XL, 2, 4, 22 (hébreu, 24).Avant de s’en servir, on le consacra par l’onction del’huile sainte. Exod., xxx, 27; XL, 9. Les Caathites, chargésde veiller sur l’arche et les vases sacrés, eurent lagarde du chandelier d’or. Num., iii, 31. Quand on levaitle camp, ils le couvraient d’une couverture en étoffe decouleur hyacinthe et d’une peau de dugong. Num., iv, 9.3o Chandelier du Temple de Salomon. — Dans leTemple bâti par Salomon, au lieu d’un seul candélabre, on en plaça dix devant le Saint des saints, dans le Saint, cinq à droite et cinq à gauche. III Reg., vii, 49; II Par., iv, 7. Les rabbins disent qu’on les mit à côté du chandelierà sept branches du Tabernacle, mais ils ne sont pasd’accord sur la question de savoir si les dix candélabresétaient placés à droite et à gauche du Saint, commesemble le dire le texte sacré, ou bien à droite et à gauchedu candélabre de Moïse (cf. II Par., xiii, 11), et tous surla gauche du Saint. Scheqalim, vi, 3, trad. Schwab, 1882, t. v, p. 307, et Babyl. Menachoth, 90 b; cf. A. JehudaLéo, In descriptione Templi, lib. ii, cap. xxii, 26 b, dansH. Opitz, Disquisit. de candelab., p. 54, 55. Ils furent faitssur le modèle du candélabre mosaïque, comme il ressortde l’expression kemispatùm, «selon les prescriptions quiles concernent,» II Par., iv, 7, allusion à la Loi de Moïse.Exod., xxv, 31-39. Aussi le troisième livre des Rois et ledeuxième des Paralipomènes n’en donnent pas une descriptiondétaillée; ils font seulement mention des fleursou corolles qui terminaient la tige et les branches, et aussides lampes, des mouchettes et des plateaux, le tout en orpur, comme il est prescrit dans la Loi. III Reg., vii, 49; II Par., iv, 20-21. Tous ces objets furent exécutés sous la
direction d’un habile artisan, Hiramabi ou Hiram, de Tyr, 11J Reg., vii, 13, selon le plan indiqué à Salomon par David, qui le tenait d’une révélation divine, et avec l’or que leroi-prophète avait mis en réserve. I Par., xxviii, 15. Ilest question dans ce plan de candélabres d’argent, I Par., xxviii, 15; mais comme il n’en est pas fait mention dansles travaux exécutés par Salomon ni nulle part ailleurs, il est à croire qu’ils n’ont jamais été fabriqués. D’ailleursles dix candélabres d’or, ajoutés pour augmenter la magnificencedu Saint agrandi, ne paraissent pas avoir eule caractère sacré du candélabre mosaïque, qui demeuraittoujours, au temps d’Abia, «le candélabre d’or, garnide lampes, qu’on doit allumer chaque soir, selon la loi duSeigneur.» II Par., xiii, 11. À la prise de Jérusalem par
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184. — Chandelier à sept branches de l’arc de triomphe de Titus.
Nabuchodonosor, les candélabres furent enlevés avec lesautres vases sacrés et transportés à Babylone. Jer., lii, 19; cf. IIReg., xxv, 15; II Par., xxxvi, 6, " 10, 18.
4o Chandelier du second Temple et du Temple d’Hérode.— Dans le second Temple on ne plaça qu’un seulcandélabre d’or, construit toujours sur le même modèle.Il fut enlevé et brisé par Antiochus IV Épiphane, I Mach., I, 23; mais Judas Machabée le rétablit. I Mach., IV, 49; II Mach., i, 8; x, 3. L’auteur de l’Ecclésiastique, xxvi, 22, y fait allusion dans une de ses comparaisons:
La beauté du visage dans l’âge mûr,
C’est la lampe brillante sur le chandelier sacré.
Il fut conservé dans le Temple restauré par Hérode. Lestalmudistes, Yoma, ꝟ. 39 b, rapportent que vers la quarantièmeannée avant la destruction de Jérusalem (époquede la prédication et de la mort de Jésus-Christ), la lampeplacée au milieu du chandelier à sept branches s’éteignit, ce qui fut considéré comme un présage de la ruinedu Temple. À la prise de Jérusalem par Titus, le candélabresacré fut enlevé et emporté à Rome pour letriomphe du vainqueur. Josèphe, Bell. jud., VII, v, 5.Il figure sur un des bas-reliefs de l’arc de triomphe deTitus (fig. 184). L’artiste qui l’a sculpté n’a pas reproduitl’original avec une rigoureuse exactitude. L’ensemblerépond bien à l’idée que donne la description de Moïse, mais il en diffère notablement pour certains détails. La 5 £5
CHANDELIER
546
principale différence consiste dans les figures d’animauxchimériques sculptées sur la base: ce qui est incompatibleavec l’esprit de la loi mosaïque et les coutumesjuives. H. Reland, De spoliis Templi, p. 49-126. Aprèsie triomphe, Vespasien le déposa dans le temple de laPaix. Josèphe, Bell. jud., VII, v, 7. Il ne périt pas dansl’incendie de ce temple, sous Commode. Hérodien, i, 14.S’il est vrai que, suivant une tradition mal autorisée, W. Smith, Dictionary of the Bible, t. i, 2= édit., p. 498, Maxence le fit jeter dans le Tibre, lors de sa défaite aupont de Milvius, Constantin l’en aura fait retirer et déposéau palais impérial. En 455, quand Rome fut pilléeparGenséric, les dépouilles du Temple de Jérusalem furentemportées à Carthage. Anastase le Bibliothécaire, Chronologia, t. cxxvii, col. 707. Bélisaire, vainqueur des Vandales, en 534, les emporta avec lui à Constantinople, où
185. — Chandelier à sept branches de Nebratein. D’après raies-UneExploration Fund. Tiuenty-one years’work m the EolyLand, Londres, 1886, p. 42.
ils figurèrent à son triomphe. Procope, Bell. Vandal., ii, 9, édit. de Bonn, t. i, p. 440; cf. Anastase, Chronologia, col. 760. Mais, sur les représentations d’un juif de Constantinople, Justinien renvoya ces dépouilles à Jérusalem.Procope, ibid., ii, 9, p. 416. À partir de cette époqueon en perd la trace; peut-être le candélabre sacré fut-ildétruit ou emporté par Chosroës II, roi de Perse, lorsque, en 614, il prit et pilla Jérusalem. H. Reland, De spoliisTempli, c. xiii, p. 192-202; Salomon Reinach, L’arc deTitus et les dépouilles du Temple de Jérusalem, in-8o, Paris, 1890, p. 22-26.
Le candélabre à sept branches a été souvent représentédans ses traits généraux, sur les murs des synagoguesantiques, comme à Tabariéh (de Saulcy, Voyage autourde la mer Morte, atlas, pi. xlvi), à Nebratein (fig. 185), sur des lampes (fig. 186), des fonds de verres ou sur destombeaux juifs, en Palestine, dans les ruines du Carmel, Palestine Exploration Fund, 1884, p. 41; à Carthage, dans les cimetières d’Italie de l’époque romaine. Martigny, Dictionnaire des antiquités chrétiennes, 1877, p. 113; Bosio, Roma sotterranea, p. 143; Perret, Catacombes deBorne, t. IV, pi. 24, fig. 23, 29; pi. 28, fig. 61. «Il y paraitcomme le symbole de leur foi et de leur espérance, commeune allusion au Temple détruit, qu’ils comptent voir serelever un jour.» G. Perrot, Histoire de l’art, t. IV, p. 312.
5o Signification symbolique du chandelier à septbranches. — Josèphe, Bell. jud., VII, v, 5, dit que lessept branches symbolisaient la sainteté de la semainejuive; ailleurs, Ant. jud., III, VI, 7, Josèphe et Philon,
DICT. I)E LA BIBLE.
De Yita Mosis, 1. iii, in-f°, Paris, 1640, p. 669, y voientà tort le symbole des sept planètes. Sur les significationsdiverses, cf. Cornélius a Lapide, Comment, inExoduni, édit. Vives, t. i, p. 650; Ribera, De Ternplo, 1. ii, c. xiii, in-4o, Lyon, 1593, p. 112. Quoi qu’il ensoit des interprétations variées et plus ou moins arbitraires, il est certain que le nombre sept est dans l’AncienTestament un nombre sacré, et qu’avec l’or pur, employé pour le candélabre sacré, il a ici une significationsymbolique manifeste. Cf. Josèphe, Bell. jud., VII, v, 5. — Voir Ch. L. Schlichter, De lychnucho sacroejusque mysterio, in-4o, Halle, 1740; H. Opitz, Disquisitiohistorico-philologica de candelabri mosaici admirabilistructura, ejusdemque positu in sancto, in-4o, Iéna, 1708; M. Dœderlein, Exercitatio de candelabris.
186. — Lampe Juive antique représentant le chandelier à septbranches. D’après Twenly-one years’work, etc., p. 54.
Judxorum f-acris, dans Ugolini, Thésaurus, t. xi, col. dccclxxxv-dcccciv, et Bl. Ugolini, Dissertatio decandelabro, t. xi, col. dccccv-mcx. Dans ce dernier ouvrage, col. dccccxxv, et dans Reland, De spoliis Templi, p. 85, on trouve différents essais de restitution du chandelierd’or.
II. Chandelier ordinaire. — Le chandelier faisaitpartie du mobilier des plus simples maisons orientales.Dans la petite chambre haute que la pauvre Sunamiteprépare pour le prophète Elisée, elle place un lit, unetable, un siège et un menôrâh, ccindelabrum. IV Reg., iv, 10. Notre-Seigneur, qui prend ordinairement ses comparaisonsdans les objets familiers à ses auditeurs, compareau chandelier ou porte-lampe,-jyv: .x, le prédicateur del’Évangile, qui doit faire resplendir la vérité. «On n’allumepas une lampe pour la mettre sous le boisseau, maison la met sur le chandelier, afin qu’elle éclaire tous ceuxqui sont dans la maison.» Matth., v, 15; Marc, iv, 21; Luc, viii, 16; xi, 33. Voir Boisseau. De là est venu leproverbe a être sur le chandelier», pour désigner «êtreen vue, être dans une haule position». Pour éclairerainsi tout l’appartement, il fallait un chandelier à tigeélevée, semblable probablement à ces chandeliers destyle phénicien, figurés sur des monuments de Carthage(fig. 187), Corpus inscriptionum semiticarum, part, i, t. i, fasc. ii, p. 179, et sur un bas-relief égypto-phénicien, trouvé à Damdjné. Renan, Mission de Phénicie, p. 654.Ils portent, il est vrai, des vases à feu et non des lampes; mais le support ou candélabre était semblable. Les chaiiII. — 18
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CHANDELIER
CHANGEURS DE MONNAIE
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deliers des pauvres devaient être en bois ou en terre; chez les riches, ils étaient de métal plus ou moins précieux, et prenaient les formes les plus diverses. — Endehors des usages sacrés, il n: est plus fait dans la Biblemention expresse d’un candélabre, si ce n’est dans lerécit du fameux festin de Balthasar. «Au même instantapparurent des doigts d’une main d’homme, et ils écrivaientvis-à-vis du candélabre, sur l’enduit de chaux dumur du palais.» Le mot chaldéen nébrastâ, qui ne se lit
qu’en cet endroit de la
Bible, peut désigner un
candélabre placé sur la
table à laquelle le roi était
assis, ou suspendu audessus de sa tête. Les
monuments nous ont conservé peu de candélabres
qui puissent nous donner
une idée de l’art assyrien
ou babylonien en ce genre.
Dans un bas-relief de
l’obélisque de Nimroud,
près d’un autel chargé
d’offrandes, on peut voir
une sorte de grand candélabre. Voir t. i, fig. 320,
col. 1159. Cf. Rawlinson,
The five great monarchies, t. ii, p. 35, Mais
si le texte sacré.fait peu
souvent mention expresse
des candélabres, il les
suppose plusieurs autres
fois, comme, par exemple,
dans le récit des Actes,
qui nous montre saint
Paul dans la chambre
haute d’une maison de
187. — Candélabre carthaginois. Troas, prolongeant jus-D’aprèsle Corpus Inscript, semit, qu’au milieu de la nuitpart, i, t. i, p. 179. son discours. «Les nombreuses lampes,» Act.,
XX, 8, qui éclairaient la salle, étaient évidemment supportéespar des candélabres de style grec. Cf. Job, xviii, 6; xxix, 3.
III. Candélabres de la fête des Tabernacles. —D’après les talmudistes, Soucca, v, 2, trad. franc, deSchwab, t. vi, p. 43, pendant la fête des Tabernacles, ondressait dans le parvis des Femmes deux candélabresd’une grande élévation, portant des lampes énormes, qu’onne pouvait atteindre qu’au moyen d’échelles. On peutvoir un essai de reproduction dans Surenhusius, Mischna, part, ii, p. 260. Ils avaient quatre ou cinq branches, etnon sept, ce qui était interdit. Rosch Haschanna, ꝟ. 25 a, et Gem. Abodah Zarah, ꝟ. 43 a. Quant à y voir des candélabrestout en or, de cinquante coudées de haut, supportantdes vases qui contenaient chacun cent vingt logd’huile, et éclairant toute la ville de Jérusalem, Soucca, ꝟ. 52 b, ce sont des circonstances merveilleuses ajoutéespar l’imagination exubérante des talmudistes. Par cescandélabres, Israël voulait rappeler la colonne lumineusequi avait accompagné ses pères à travers le désert. On apensé que Notre -Seigneur, parlant dans le Temple pendantla solennité des Tabernacles, y fait allusion quandil dit, Joa., viii, 12: «Je suis la lumière du monde; celuiqui me suit ne marchera pas dans les ténèbres, mais ilaura la lumière de vie.» Ce qui donne un certain poidsà ce rapprochement, c’est que dans les mêmes circonstances, Joa., vii, 37, 38, le Sauveur se compare à l’eauvive, allusion à une autre cérémonie de la même fête, par laquelle Israël, voulait rappeler le rocher changé parMoïse en source d’eau. Un prêtre allait solennellementremplir un vase d’eau à la fontaine de Siloé, et venait la
répandre en libation sur l’autel au milieu des acclamationsde la foule remerciant Dieu d’avoir abreuvé sonpeuple au désert. Stanley, Sinai and Palestine, in-8°, 1877, p. 428.
IV. Candélabres dans les visions prophétiques. —1° Zacharie, dans une vision, iv, 2-12, voit apparaître devantlui un candélabre tout en Or, dont la tige porte unvase et dont les branches soutiennent sept lampes avecsept canaux pour faire couler l’huile dans chacune de ceslampes, et près du candélabre deux oliviers, l’un à droitedu vase, l’autre à gauche, et laissant couler l’huile dansdeux canaux en or, qui la conduisaient au vase ou réservoircentral servant à alimenter les lampes. On ne peutreconnaître ici le chandelier à sept branches, qui n’avaitpas de réservoir central et dont les lampes étaient garniesd’huile chaque jour. Dans ce candélabre prophétique, les sept lampes devaient être rangées en cercleautour de la tige centrale, pour s’alimenter facilementau réservoir commun. Cornélius a Lapide, édit. Vives, Comment, in Zachariam, t. xiv, p. 396. Si l’on place leslampes comme sur le candélabre mosaïque, il faut alorsmettre la lampe centrale en avant du réservoir d’huile, comme le fait H.Wright, Zeckariah and his prophecies, in-8°, Londres, 1879, p. 84, dans la restitution qu’il propose.Cf. dom Calmet, Dictionnaire historique de la Bible, in-f°, Paris, 1728, t. iii, p. 140. Ce candélabre représentela restauration de la théocratie, grâce au secours divindonné à Israël par les deux instruments du sacerdoce etdu pouvoir gouvernemental, représentés alors par Jésuset Zorobabel.
2° Au début de sa vision, à Patmos, saint Jean entenditderrière lui une grande voix qui lui ordonnait d’écrireaux sept Églises d’Asie. Il se retourna pour voir et aperçutsept candélabres d’or, Apoc, I, 12-13, symboles dessept Églises, et au milieu le Fils de l’homme, c’est-à-direJésus-Christ. Ces sept candélabres ressemblaient-ilsau chandelier à sept branches du Temple, ou aux candélabresgrecs à une seule tige? l’Apôtre ne le dit pas.Le lieu où il se trouve, les Églises auxquelles il s’adresse, donnent plutôt à penser à cette dernière hypothèse. Cependantplus loin, Apoc, xi, 4, les deux oliviers et lesdeux candélabres rappellent la vision de Zacharie, iv, 2-12, et feraient croire que saint Jean a en vue le candélabrejuif. E. Levesque.
- CHANDLER Samuel##
CHANDLER Samuel, ministre dissident de Londres, né à Hungerford (Berkshire), en 1693, mort à Londresle 8 mai 1766. Il acheva ses études à Leyde et devint undes défenseurs du rationalisme en Angleterre. Il penchaitvers l’arianisme et publia plusieurs ouvrages contre lecatholicisme. On a de lui sur les Saintes Écritures: A Paraphrase and critical Commentary on the Prophecyof Joël, in-4°, Londres, 1735; À critical Historyof the Life of David in which the principal eventsare rangea in order of titne; the chief objections ofMr. Bayle and others against the character of thisprince, and the Scripture account of him, and theoccurrences of his reign, are examined and refuled, and the Psalms which refer to him are explained, 2 in-8°, Londres, 1766 (ouvrage le plus important et leplus estimé de l’auteur); À Paraphrase and Notes onthe Epistles of St Paul to the Galatians and Ephesians; with doctrinal and practical Observations; together with a critical and practical Commentary onthe two Epistles of St Paul to the Thessalonians, in-4°, Londres, 1777 (œuvre posthume, publiée par NathanielWhite). — Voir W. Orme, Bïbliotheca biblica, 1824, p. 95-97. F. Vigolrolx.
CHANGEURS DE MONNAIE. Grec: v.ou^azai, Matth., xxi, 12; Marc, si, 15; Joa., ii, 15; xep[iaxi<jTaî, Joa., Il, 14; Vulgate: numularii. Les changeurs demonnaie ne sont nommés que dans les Evangiles. Saint
Matthieu, xxi, 12; saint Marc, xi, 15, et saint Jean, ii, 15, racontent que NotreSeigneur chassa du Temple, enmême temps que les marchands de victimes pour lessacrifices, les changeurs de monnaie, et qu’il renversales tables de ces derniers. Simon Machabée avait obtenu, en l’an 138 avant J.- C. d’Antiochus VII Sidètes le droitde battre monnaie. I Mach., xv, 6. C’est probablement àpartir de cette époque que le change commença à existeren Judée. Dès ce moment devait circuler dans le paysla monnaie des Séleucides et des Ptolémées, sur laquelleétaient représentées les têtes de ces princes et les imagesdes divinités païennes. Plus tard, les Romains introduisirentà leur tour leur propre monnaie. Or l’impôt d’un demisicleque les Juifs devaient au Temple ne devait être payépar eux régulièrement qu’en monnaie juive. De là vint lanécessité d’avoir recours à des changeurs. Du 15 au 25 dumois d’Adar, époque pendant laquelle l’impôt était recueillià travers le pays (voir Capitation), les changeurs accomJ/
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188. — Changeur de monnaie. Bas-relief du Musée du Vatican.
pagnaient les collecteurs dans les villes et dans les villages.A dater du 25 Adar, l’impôt n’était plus perçu qu’àJérusalem, sur les indigènes et sur les étrangers quivenaient dans cette ville pour les fêtes de la Pâque; leschangeurs s’installaient alors dans la cour des Païens.En agissant ainsi, ils violaient le respect dû au Temple, et leur présence à l’intérieur du parvis, quoiqu’elle fûttolérée en pratique, était un abus. Mischna, Berakhoth, IX, 5; Talmud de Babylone, Yebamoth, fol. 6 b. Cf. E. Stapfer, La Palestine au temps de JésusChrist, 6e édit., in-8°, Paris, 1893, p. 394. Les Israélites zélés furent doncheureux de voir Notre -Seigneur rappeler sévèrement leschangeurs et les marchands à l’observation des règlements.
L’agio payé pour le change de la monnaie s’appelaiten grec xô).), ’jëoç. Ce mot se trouve déjà dans Aristophane, Pax, 1200; cf. Schol., ad Pacem, 1176, pour désignerune petite pièce de monnaie; il est probablementd’origine phénicienne, et la Mischna le donne sous laforme rra’ip. Surenhusius, Schekalim, i, 6, t. ii, p. 179; Buxtorf, Lexicon chaldaicum, p. 2032. Cicéron l’emploieégalement, en le latinisant, pour désigner l’agio en général.In Verreni ad., Il, iii, 78, 180; Epist. ad Atlic, xii, 6. Son dérivé xoX>.yêio~riit, «changeur,» est employépar Lysias. Pollux, Onomasticon, vii, 33.
D’après le Talmud, le xôXVjëo; payé pour le change d’undemi-sicle équivalait à une obole d’argent, soit environà quinze centimes de notre monnaie. Comme chacundevait payer un demi-sicle, si deux personnes payaientun sicle pour leur impôt collectif, elles devaient donnerle change en plus. Maimonide, De siclis, iii, pars I, ꝟ. 268.Cf. Buxtorf, Lexic. chaldaic, p. 2032; Othon, Lexic. rabbinic, p. 411; Lightfoot, Horsehebraicæ, p. 411. Les changeursne bornaient pas leurs opérations au change nécessaireà l’impôt du demi-sicle, ils fournissaient aussi dela petite monnaie ou des pièces de plus grande valeur, suivant les besoins du commerce. Ils faisaient aussi la
banque en prêtant de l’argent à intérêt, comme nous levoyons dans la parabole des talents, où saint Matthieu, xxv, 27, les appelle TpaTteÇiVai, numularii. Saint Luc, xix, 23, dit que c’est «donner son argent à la banque», xpâiteÇa. Plusieurs anciens Pères attribuent à Notre-Seigneuret citent souvent une parole qui ne se lit pasdans le Nouveau Testament: «Soyez de bons banquiers.» rîvc<r6e êe 50v.tfj.oi TpaiteÇitai. Clément d’Alexandrie, Strom., i, 28, t. viii, col. 924, etc. Voir toutes les citationsréunies dans A. Resch, Agrapha, in-8°, Leipzig, 1889, p. 116-127.
Il n’existait de changeurs m chez les Égyptiens nichez les Assyriens, du moins ni les textes ni les mo189.
D’après Boldetti, Osi
— Autre changeur de monnaie.
rrazionl lopra)’cimelcri, Borne, 1720, p. 212.
numents n’en parlent. Leur absence s’explique d’ellemême, puisque ces peuples n’avaient pas de monnaie.Au contraire, les Grecs connurent les changeurs dèsl’époque classique. 1) en est souvent fait mention dansles auteurs sous le nom de xpaiteÇiTou. Lysias, Frag., 2, 2; Démosthène, édit. Baiter, p. 1180, 7. Polybe, xxxii, 13. Cf. Plaute, Asin., ii, 4, 30-34; Curcul, v, 2, 20.Ce nom leur venait de ce qu’ils s’installaient sur les placespubliques, assis à une table (xpiitEÇot, Matin., xxi, 12; Marc, xi, 15; Luc, Xix, 23; Joa., Il, 15), sur laquelleils plaçaient leurs pièces d’or et d’argent, comme ils lefont encore aujourd’hui dans les villes d’Orient au coindes rues ou sur les places publiques. Aussi les auteursgrecs appellent-ils leur métier «le métier de la table», t) èpfairia y) ttj; TpanéÇ/iç. Démosthène, édit. Backer, p. 946, 4; 895, 15, etc.; Isoerate, ibid., p. 358, 6. Plustard, on leur donna le nom de x£pfj.aTiaTai, du motx£pu.a, qui signifie petite pièce de monnaie. Maxime deTyr, édit. Reiske, Diss. ii, n. 13. Cf. Athénée, Deipnosoph., p. 533 a, 568 f, etc.; Antholog., xi, 271. C’est leterme par lequel saint Jean, ii, 14, désigne la menuemonnaie qui est sur la table des changeurs de Jérusalem.Les changeurs apparaissent pour la première fois à Romevers l’an 309, sous le nom i’argentarii. Tite Live, ix, 40, 16.Ils faisaient le change des monnaies d’argent du sud del’Italie et de l’Etrurie contre du bronze romain. Ils sontencore désignés sous le nom de numidarii et de mensariiou mensularii. Suétone, Oclav., 4. Rs faisaient nonseulement le change, mais toutes les opérations finan
cières: payement, encaissement des sommes dues, placementsde toute nature, etc. Il semble cependant qu’autemps d’Auguste le nom de numularii (c’est le mot qu’emploiela Vulgate, Matth., xxi, 12; xxv, 27; Marc, xi, 15; Joa., ii, 14, 15) était plutôt donné aux changeurs, etcelui d’argentarii aux banquiers. Certains numulariiétaient des employés de la monnaie, vérificateurs despièces nouvelles. Ils avaient une mensa où ils échangeaientces pièces contre de vieilles pièces ou contredes monnaies étrangères, d’après le cours fixé au forum.
1° L’Écriture, indépendamment des chants composéspour célébrer de grands événements historiques, commele passage de la mer Rouge, la victoire de Barac sur Sisara, etc., mentionne un certain nombre de chants profanes, rythmés, qu’on devait chanter sur des airs composésexprès ou déjà connus, ainsi que le supposentles litres d’un certain nombre de Psaumes qui, d’aprèsl’explication commune, indiquent l’air sur lequel ilsdevaient être chantés. Ps. IX, 1; XXI (hébreu, xxii), 1; Ps. xirv (xl), 1 (?); lv (lvi), 1; lvi (lvii), 1; lvii
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190. — Joueur de flûte et chanteur excitant les moissonneurs au travail. Tombeau de Ti, à Saqqara. Musée Guiræt.
Corpus Inscr. latin., t. vi, n» s 298, 8461, 8463; t. x, n°Cicéron, Pro Quinctio, 4, 17; Apulée, Métam., x, 9.D’autres étaient dé simples particuliers. Les inscriptionsdésignent souvent leurs boutiques par le nom du monu-’ment auprès duquel elles sont établies. Corpus Inscr, latin., t. vi, n «9173, 9178, 9181, 9182, 9709, 9711, 9712, etc.; Tite-Live, xxvi, 11; Plaute, Asin., i, i, 103-113; Curcul., iv, 2, 21; Térence, Phormio, v, 7, 28, etc.
Les tables sur lesquelles étaient installés les changeurss’appelaient mensse argenlarise. Digeste, ii, 13, 4. On neconnaît pas de monuments grecs représentant des changeurs.Les changeurs romains, au contraire, sont représentéssur plusieurs monuments antiques. Un bas-reliefdu Vatican (fig. 188) nous montre un changeur assisderrière sa table, au-dessus de laquelle on remarque uncompartiment grillé, semblable à ceux qu’on voit encoreaujourd’hui devant les bureaux des caissiers. Près de luiest un monceau d’argent. La tête du changeur est tournéevers un personnage qui apporte un sac. Un fond deverre peint (fig. 189) représente un autre changeur. Il estassis derrière sa mensa, «table» (Matth., xxi, 12), couvertede pièces de monnaie. Un homme debout lui présentedes pièces sur une tablette. Derrière lui sont dessacs remplis d’argent avec un chiffre marquant leur contenu, cccxx, cclv. Au bas est écrit: SACVLV.
E. Beurlier.
- CHANSON##
CHANSON (hébreu: Sir; Septante: àsy.*; I s i xxiii, 15), chant profane, par opposition à cantique ou chantsacré, le chant a toujours été une des expressions naturellesde la joie et un accompagnement des fêtes, enparticulier en Orient. Tous ceux qui ont visité ce pays, etspécialement l’Egypte, ont remarqué que tous les ouvriersaccompagnent de chant leur travail, surtout quand ilsexécutent quelque chose de fatigant et de pénible. Cetusage remonte à la plus haute antiquité (fig. 190; . Champollion, dans son voyage en Egypte, en 1828, retrouvasur un tombeau d’Eiléthya (aujourd’hui El-Kab), laChanson des Bœufs, qu’on chantait pendant le dépiquagedu blé. Lettres écrites d’Egypte, lett. xii, in-8°, Paris, 1833, p. 195-196. Cf. la chanson des bergers etcelle des âniers, G. Maspero, Études égyptiennes, t. ii, fasc. i, 1888, p. 73, 89; Id., Histoire ancienne del’Orient, 1895, t. i, p. 340-342. Aussi les monumentsfigurés nous montrentils souvent des chanteurs et deschanteuses (fig. 191), accompagnant leur chant de battementsde mains. Cf. G. Maspero, Éludes, ibid., p. 81.
(lviii), 1; lix (lx), 1; lxvih (lxix), 1 (?); lxxiv(lxxv), 1; lxxix (lxxx), 1. Quelques-uns des chantsque rappellent ces titres pouvaient être des chants sacrés; mais il est probable que quelques-uns au moins étaientdes chants profanes, à en juger par les premiers moisqui en sont rapportés, de même que les airs qui sont indiquésdans nos collections de cantiques.
191. — Musiciens, chanteuses et chanteurs égyptiens.D’après E. Newberry, BéniHassan, 1893, t. i, pi. 12, t. ii, pi. 4.
2° Quoi qu’il en soit, l’usage du chant dans les festinset les réjouissances profanes, comme dans les fêtes religieuses, est mentionné dans l’Ecriture. Il est probableque le chant accompagnait ordinairement comme aujourd’huila musique, quoiqu’il ne soit expressément questionque de celle-ci en plusieurs endroits, Is., y, 12; Eccli., xxxii, 5, 7-8; xlix, 2. Le chant est expressémentnommé dans Isaïe, xxiv, 9, lorsqu’il dit qu’on ne boiraplus le vin en chantant, lorsque Dieu frappera son peuple.
553
CHANSON — CHANT SACRÉ
554
Notre -Seigneur a fait lui-même allusion aux chants desenfants qu’on entend encore aujourd’hui en Palestinecomme dans tous les pays du monde. Matth., xi, 17; Luc, vii, 32. C’est le plus souvent dans les festins quel’on chanle, comme dans le grand repas que donne lepère de l’enfant prodigue pour célébrer le retour de sonfils. Luc, xv, 25. C’est aussi aux mariages, Jer., vii, 31; Ezéch., xxvi, 13; et dans les grandes réjouissances publiques, principalement après une victoire, II Par., xx, 27-28; Is., ix, 3; on improvise alors un chant sur l’événementqui vient de se produire, Jud., xv, 16-17; I Reg., xvin, 7; xxviii, 11, ou bien on le célèbre par un poèmedéjà connu. II Par., xx, 21. Le cérémonial des funéraillescomportait des chants élégiaques ou des lamentations, usités encore aujourd’hui en Palestine, et faisant l’élogedu mort, comme nous en avons entendu, par exemple, à Nazareth. II Par., xxxv, 25; Eccle., xii, 5; Jer., ix, 17, 20; Amos, v, 16; Luc, vii, 32; Marc, v, 38; Luc, viii, 32; cf. Matth., ix, 23; II Reg., i, 19 27; iii, 33-34. On chantaitégalement lorsqu’on dansait, I Reg., xviii, 6; xxi, 11; Luc, xv, 35, etc.; pendant la moisson, ls., îx, 3, lesvendanges et lorsqu’on foulait les raisins pour faire levin. Jud., IX, 27; Is., xvi, 10; xxv, 6; Jer., xxxi, 4-5; Xlviii, 33. Dans toutes ces circonstances, une partie aumoins de ces chants étaient des chansons profanes.
3o Il nous est resté dans l’Écriture quelques débris dechants profanes. Il faut ranger sans doute dans cette catégoriele chant de Lamech, le plus ancien de tous. Gen., IV, 23. — Nous avons des morceaux de chants militairessur les victoires remportées contre les Moabites, Num., xxi, 14-15; sur la défaite de Séhon, roi d’Hésébon, Num., xxi, 27-30; l’acclamation à David, vainqueur deGoliath. I Reg., xviii, 7. — Le livre des Nombres, xxi, 17-18, nous a conservé sans doute un de ces chants quechantaient les. Israélites en travaillant au creusementd’un puits. — L’Ecclésiastique, ix, 4, fait une allusionaux chanteuses des rues. Isaïe fait de même, xxiii, 1516, et il cite dans ce passage, ꝟ. 16, quelques vers d’unechanson tyrienne. — Pour le chant religieux, voir Chantsacré, Chantres du Temple, Chef des chantres.
F. Vigouroux.
CHANT SACRÉ. Le chant et le jeu des instruments, jouissance indispensable des peuples de l’Orient, ont servide tout temps. à rehausser l’éclat des’cérémonies religieuses, des sacrifices, des fêtes publiques et privées, des festins, des funérailles. Voir Fr. Chabas, VEgyptologie, juillet 1874, p. 49. Cf. Photius, Biblioth., ccxxxix, t. ciii, col. 1200-1208. Il en fut de même dans l’antiquitéhébraïque. Le chant se joignait à toutes les fêtes (voirChanson), mais principalement aux solennités de lareligion; et dés le séjour dans le désert il fit partie duculte sacré. Exod., xv, 20; Num., x, 10. Cf. Jud., xxi, 21.
Les anciennes nations suppléaient aux monuments écritspar des traditions orales et chantées. Deut., xxxi, 19.Aussi le chant fut-il cultivé dans les écoles des prophètes.
I Reg., x, 5; xvx, 20; IV Reg., iii, 15; Eccli., xliv, 5.Targum sur I Par., xv, 22, 27. Eusèbe, Prsep. Evang., xi, 5, t. xxi, col. 852, nous apprend que ces sages de lanation instruisaient leurs disciples au moyen de sentences, d’énigmes, de récits rythmés, de chants et derefrains mesurés en vers. Aussi dans le langage de laBible les termes de «voyant ou prophète» et Ceux de «musicien ou chantre» sont-ils souvent pris l’un pourl’autre. I Par., vi, 33; xxv, 2, 3, 5. Cf. Quintilien, Insiit. orat., x, 9, 10. C’est dans ce sens que Clémentd’Alexandrie, Strom., vi, 11, t. IX, col. 309, appelle David «musicien et prophète», àiW.tùv y.ai îrpo ?r; -£j<i)v. Desécoles prophétiques, les traditions musicales passèrentaux ministres du culte, lorsque David, en préparant laconstruction du Temple, organisa les offices des lévites.
II recueillit, nous dit Josèphe, Ant. jud., VII, xii, 3, les hymnes anciens, en même temps qu’il en composa denouveaux (voir Psaumes), et il établit l’ordre des chants
sacrés pour les fêtes et les cérémonies religieuses, I Par., xxill, 5, 30; Eccli., xlvii, 9-12. Les titres des cantiques, le contexte, ou encore le témoignage des autres livresde l’Écriture, déterminent l’usage liturgique de certainspsaumes. Par exemple, le Psaume xxiv (Vulgate, xxiii), qui fut composé vraisemblablement pour le transport del’arche, est un chant de procession; les Psaumes xevi (xcv)et cv (civ) paraissent se rapporter à l’établissement del’arche dans le Tabernacle, I Par., xvi, 8-34; le Psaumelxviii (lxvii), à la prise de Rabbath, II Reg., xii, 26; lePsaume xxx (xxix), à l’inauguration de l’emplacementdu Temple. II Reg., xxiv, 25. On voit également que lesPsaumes iv, xx (xix), lxvi (lxv) se joignaient à l’offrandedes sacrifices. D’ailleurs il ne se faisait pas dansle Temple la moindre oblation qui ne fut accompagnéedu chant des Lévites. 1 Par., xxiii, 30, 31. Le Psaumecxli (cxl) était réservé pour l’offrande du soir, lePsaume xci (xc) et le Psaume m font encore partie dela prière du soir au rituel juif. Enfin sept psaumesétaient assignés à chacun des jours de la semaine pourêtre chantés au sacrifice du matin. C’étaient pour lepremier jour le Tsaume xxiv (xxm), pour le deuxièmejour le Psaume xlviii (xlvii), pour le troisième jourle Psaume lxxxii (lxxxi), pour le quatrième jour lePsaume xciv (xcm), pour le cinquième jour le Psaumelxxxi (lxxx), pour la veille du sabbat le Psaume xcm(xcii), et pour le jour du sabbat le Psaume xcii (xci).Thamid, 7, 4. Voir Mousaph, ou Prière additionnelledu sabbat, fin. Les titres attribués à ces psaumes par lesSeptante, en dehors du texte hébreu, confirment exactementles indications des livres juifs. Le Psaume xxxviii(xxxvii) est pareillement affecté par les Septante au jourdu sabbat. Les Juifs emploient encore le Psaume lxxxi(lxxx) pour le premier jour de l’année (RoS haSanah), et les psaumes du Hallel, Cxm (cxii)-cxviii (cxvii), auxfêtes de Pâques, de la Pentecôte, de la Dédicace, desTabernacles et aux néoménies; mais, avant de faire partiedu Hallel, le Psaume cxvi (cxiv-cxv) était destiné àservir uniquement au repas de l’Agneau pascal, et lePsaume cxviii (cxvii) devait servir spécialement a lafête des Tabernacles. Plusieurs des psaumes sus-mentionnéssont postérieurs à David; au surplus, les indicationsfournies par les titres grecs ou hébreux ne sontque d’une antiquité relative. Quoi qu’il en soit, le servicequotidien établi par David dura dans son ensemble jusqu’àla captivité, II Par., xxxv, 15; Nébémie le reconstituapour le second temple, I Esdr., iii, 10; vii, 7; II Esdr., vil, 45; xii, 45, et le même ordre persévéra dansle temple d’Hérode. Le chant des hymnes sacrés eut laprincipale place dans les cérémonies de la religion d’Israël; le culte du vrai Dieu ne le céda pas en cela aux religionsétrangères.
Le peuple prenait part au chant en répondant auxstrophes par le «refrain», ou en poussant des acclamations, ferû’âh, Ps. xxxm (xxxii), 2, 3; lxxxix(lxxxviii), 15, prises en dehors du texte chanté, tellesque l’Amen ou l’Alleluia (voir ces mots, t. i, col. 369et 475). I Par., xvi, 36; Ps. evi (cv), exi (cx)-cxviii(cxvii), cxxxv (cxxxiv), cxlv (cxliv)-cl, titre. Cf. Eusèbe, Comment, in Psahnos, t. xxiii, col. 66-75. II fautindiquer aussi le refrain ou l’acclamation "non c¥.yb’3,
Quoniam in seternuni misericordia ejus, du Psaumecxxxvi (cxxxv); cf. I Par., xvi, 41; II Par., v, 13; vii, 6; XX, 21; I Esdr., iii, 11; le iy.înz y.ai ûnep’j^ovre a-jrôve! ; . to’jç aîûva; , Laudate et superexaltate eum in sœcula, du cantique des Enfants, Dan., iii, 57-88; le Quoniamsanclus est, N’.n n/iip’2, du Psaume xCix (xcvm). Enfin
le chant était accompagné d’une manière analogue à cellequi est représentée sur les monuments antiques (fig. 192), par le jeu bruyant des instruments de musique, les claquementsdes mains et les divers mouvements de la dansereligieuse. Voir Danse.
CHANT
CHANTRES DU TEMPLE
556
La terminologie musicale dans le vocabulaire hébreuest fort restreinte. Le mot sir désigne le «chant», aussi bien le texte destiné à être chanté que le jeu desinstruments (kelé sir, II Par., xxxiv, 12). Niggên, «toucher avec la main, palper,» et zammêr, «couper, tailler,» d’où «diviser les sons» sur les cordes de laharpe ou avec la voix, «moduler,» appliqués d’abordau jeu des instruments à cordes, comme le grec" J/iXXtn, signifièrent également le chant lui-même et les paroleschantées, iti).u.o; . Hnmôn et hémyâh signifient le «bruit» de l’instrument, la «vibration» des cordes, ^>bz: mDTi îj’Hiî ï*nn, «le bruit de tes chants et le son
de tes harpes.» Amos, v, 23. Voir Is., xvi, 11. Terû’âh, le «bruit», les clameurs, les cris de joie, est chez lesjuifs modernes le nom d’une sonnerie particulière de latrompette. Voir Trompette. Tegî’àh s’applique au sonprolongé des trompettes et des instruments à vent (voirMusica vet. Rébrxorum, c. i, dans Ugolini, Thésaurus,
neté des diverses sortes de chants dont ils usent de nosjours ne peut être prouvée. J. Parisot.
CHANTEURS. Voir Chant sacré, Chanson, ChantresDU TEMPLE.
CHANTRES DU TEMPLE. Le service musicaldans les cérémonies religieuses du peuple juif fut organisésous le règne de David. Jusqu’à cette époque, il neparaît pas que le chant religieux eût reçu de réglementation.En distribuant les offices des ministres sacrés, David établit vingt-quatre classes de musiciens, sous ladirection des chefs de chœur Àsaph, Héman, Idithun(Éthan). I Par., xv, 16, 22; xvi, 4-42; xxiii, 5, 30; xxv.L’auteur des Paralipomènes porte à deux cent quatrevingt-huitle nombre des maîtres musiciens, choisis entrequatre mille chanteurs. I Par., xxv, 7, et xxiii, 5. Davidlui-même les formait au chant sacré, d’après Josèphe,
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192. — Chanteurs susiens précédés do musiciens. D’après Layard, Monuments of Nineveh, t. II, pi. 49.
t. xxxii, col. ix-xi), et sebdrîm, dans l’hébreu moderne, aux sons détachés bu «brisés,» trilles. Pârat, Amos, vi, 5, signifie, comme plus haut zammêr, «distinguer» les sons, «moduler». Qôl, la «voix», s’emploie, de lamême manière que le syriaque qàlàh, pour désigner le «ton», la «note» musicale. Voir Siltê haggibôrim, dansUgolini, Thésaurus, t. xxxii, col. x, xi. On emploie encoredans le sens de «chanter» hasmiâ’, «faire entendre,» donner de la voix, Ps. xxvi (xxv), 7; II Esdr., xii, 42; ’ânâh, «élever la voix, répondre,» et rânan, «retentir, pousser des cris». Dans l’hébreu rabbinique, on trouveniggûn, dérivé de naggén (ci-dessus), «musique»; ne’imâh, «chant, mélodie,» sens dérivé probablementde l’expression niTDT am, «agréable par ses chants».
II Reg., xxiii, 1. Voir Musique.
Vraisemblablement il n’exista dans l’antiquité hébraïqueni notation, ni nomenclature musicale, ni enseignementthéorique. Les mélodies se transmettaient par la seulevoie de la pratique ou de la routine, les signes musicaux, qui apparurent chez les Grecs plusieurs siècles avant J.-C, n’ayant commencé à être adoptés par les diverses nationsorientales que vers le IVe siècle de notre ère. Aussi ladestruction du Temple et la dispersion du peuple juifamenèrent - elles l’anéantissement des traditions musicalesdes lévites. Des instruments de musique, non plusque du mobilier du Temple, il ne resta rien, si ce n’estquelques représentations fournies par les bas-reliefs del’arc de Titus ou les peintures sur verre des catacombes.Les émigrés juifs emportèrent cependant partout où ilss’établirent les pratiques de leur culte, la lecture deslivres sacrés et leurs formules de prières; mais l’ancienAnt. jud., VII, xi, 3. L’influence de Samuel ne fut peut-êtrepas étrangère à cette organisation. Cf. I Reg., x, 5; xix, 20; Ps. xcix (xcvni), 6; I Par., ix, 22. Le prophèteavait pu la préparer; toujours est - il que ses fils et sesdisciples y eurent un rôle prépondérant. Samuel fut, eneffet, l’aïeul du chantre et psalmiste Héman, que l’auteurdes Paralipomènes appelle «le premier prophète du roipour le chant des hymnes sacrés», I Par., vi, 33; xxv, 4, 5; et sur le nombre des vingt-quatre chefs musiciensinstitués par David, nous trouvons quatorze fils d’Héman.I Par., xxv, 4, 5.
Vêtus comme les prêtres de tuniques de liii, I Par., xv, 27; II Par., v, 12; Josèphe, Ant. jud., VIII, ii, leschantres occupaient dans la cour intérieure du Temple, ou cour des Prêtres, un lieu élevé, — si l’on peut interpréteren ce sens le texte de Néhémie, II Esdr., ix, 4 (latradition juive dit une «estrade», jdit, dûkân), — en
face du tabernacle, I Par., vi, 32, à l’orient de l’auteldes holocaustes, II Par., v, 12; Eccli., XL vii, 11, près dela porte qui séparait la cour des Prêtres du parvis duPeuple, ou parvis d’Israël. Selon d’autres textes rabbiniques, ce lieu élevé attribué aux chantres était soit laplate-forme située au haut de l’escalier qui du parvis d’Israëldonnait accès à la cour des Prêtres, soit encore leperron placé devant les portes extérieures. L’une et l’autretradition peuvent se concilier. Il est possible que leslévites musiciens, qui devaient se tenir près de l’auteldurant l’offrande des sacrifices, sortissent de l’enceinteréservée aux prêtres lorsque les cérémonies se déployaientà l’extérieur et que le peuple devait prendre part auchant. Les chantres de service avaient leur habitation,
lésukkôt, I Par., IX, 33, en face de celle des prêtres sacrificateurs, dans la cour intérieure, du côté nord. Ezech., XL, 44. C’est là que se conservaient les instruments demusique et les vêtements que les chantres et les exécutantsportaient durant les cérémonies.
Nul texte ne détermine le nombre des musiciens employésdans les cérémonies du Temple. Les traditionsrabbiniques fixent seulement un minimum de douzechantres pour l’office quotidien. Tr. Erachin, ii, 6. Leslévites n’étaient admis à chanter auprès de l’autel qu’àl’âge de vingt ans accomplis, I Par., xxiii, 27-30, et ilfallait avant d’entrer en charge qu’ils se fussent exercésdurant cinq années sous la direction de leurs anciens, silté haggibbôrim. Ugolini, Thésaurus, t. xxxil, col. v.Cependant de jeunes lévites se joignaient aux prêtrespour fournir les voix aiguës, mais seulement lorsque lechœur se tenait dans les cours extérieures; l’accès duparvis des Prêtres n’était permis régulièrement qu’auxlévites remplissant leurs fonctions. Quant aux femmes, elles n’étaient pas admises, selon les rabbins, à chanterdans les cérémonies du culte. Voir Naumbourg, dit* utin
Recueil de chants religieux et populaires des Israélites’, précédé d’une étude historique, Paris, 1874, p. m. Un certainnombre d’auteurs cependant, voir Calmet, Z) issertationsur la musique, dans la Bible de Vence, t. ix, p. 451453, croient que les femmes chantaient dans le Temple. Ilsapportent en preuve, sinon le texte de I Par., xxv, 5, —qui n’est qu’une parenthèse dans le dénombrement desmusiciens fait par David, — du moins les témoignagesd’Esdras et de Néhémie, qui comptent à la reconstructiondu Temple, le premier <c deux cents», l’autre «deuxcent quarantecinq chanteurs et chanteuses» (la leçonrYn"Wa étant supposée exacte). I Esdr., ii, 65; II Esdr.,
vu, 67. On allègue aussi l’autorité des Targums surl’Ecclésiaste, qui rapporte au service du Temple ce queSalomon dit des splendeurs de son palais et paraphraseainsi, Eccle., ii, 8: «J’ai fait dans la maison du sanctuairedes instruments de musique pour les chanteurset les chanteuses;» et encore le texte de Philon, Vit.contempl., c. xr, fin, édit. Mangey, 485, 486, qui témoignede l’usage où étaient les thérapeutes d’alterner leurschants, composés selon les traditions antiques, entre deschœurs d’hommes et de femmes. Mais de tous ces témoignagesil ne résulte nullement que les chanteuses aientpris part aux fonctions du sanctuaire. Si elles apparaissentdans les cérémonies religieuses, Exod., xv, 20, 21; Ps. lxviii (lxvii), 12, 26; Jud., xxi, 21; II Par., xxxv, 25, c’est toujours en dehors du Temple. On sait d’ailleursque les femmes ne pouvaient franchir l’enceinte du parvisdes Israélites. Quant à l’expression nin^y, ’âlàmôt, qu’on
peut à la rigueur prendre au sens obvie dans les textesmusicaux (comme si elle désignait les chanteuses, lechœur des jeunes filles. Voir’Almiôt, t. i, col. 333), ilest préférable de l’appliquer soit aux cordes «aiguës» des harpes, soit aux sons «élevés» des flûtes, par analogieavec l’acuité de la voix de femme (c’est de la mêmemanière que les Grecs appelaient a-5Xô; îtapôlvio; uneespèce particulière de flûte de très petite dimension etd’une sonorité aiguë. Voir Athénée, ûeipnos., c. xxiii, xxiv); plus simplement on peut, en rapprochant le terme’âlàmôt de la racine by, ’al, le traduire par «voix hautes».Ce sens s’explique bien par l’expression du livre desParalipomènes, rihya 1; Vns Vpz: «Les lévites chantaient
à voix haute, en élevant le ton,» II Par., xx, 19, expressionque la langue syriaque rend exactement par l^i Il n- >beqâlà ràmâ. La version des Septante transcrit ici le mot’âlàmôt sans le traduire: ètù à).ai|xw9.
Dans tout l’Orient, les femmes prenaient part aux cérémoniesdu culte. En Egypte, dès le temps de l’AncienEmpire, des musiciennes étaient attachées à presquetous les temples. Fr. Leuormant, Histoire ancienne de
l’Orient, 9e édit., t. iii, p. 9. Les femmes juives, endehors des fonctions religieuses, chantaient et jouaientdes instruments dans toutes les réjouissances. Jud., xi, 34; Judith, xv, 15; 1 Reg., xviii, 6. Salomon, commetous les rois de l’Orient, entretenait dans son palais destroupes de chanteurs et de musiciennes. Eccl., ii, 8. Davidlui-même eut des chanteuses à son service. II Reg., xix, 35.
J. Parisot.
- CHAOS##
CHAOS, état de l’univers et de la terre en particulier, avant que le Créateur n’en eût ordonné les éléments.
— Dans la Genèse, i, 2, cet état est exprimé par les deuxmots tôhû bôhû, qui sont passés dans la langue françaisepour caractériser le désordre et la confusion. Le mot tôhûvient d’un radical tâhâh, en chaldéen feliâ’, «être vasteet désert;» bôhû se rattache au radical arabe bâhàh, quia les deux sens corrélatifs de «être pur et net» et <c êtrevide». Les Chaldéens faisaient du désordre primordialune déesse Bahu. Voir F. Vigouroux, La Bible et lesdécouvertes modernes, 6e édit., 1896, t. i, p. 208. Endisant que la terre était tôhû vâbôhû, l’auteur sacré veutdonc marquer qu’elle se trouvait alors à l’état d’immensitédéserte et vide, dépourvue par conséquent de ce quia constitué depuis sa physionomie, les reliefs orographiques, les cours d’eau sillonnant des continents, lavégétation, les animaux, etc., et de plus la lumière éclairanttoute sa surface. Les versions traduisent équivalemmentce sens de l’hébreu. Septante: la terre était iôpiro; y.a’t àxaTaaxsOaaroç, «invisible et sans préparation,» par conséquent à l’état obscur et informe; Aquila: xévwpiaxal où8; v, «un espace vide et rien;» Symmaque: àpyôvxai àSiàxpiTov, «quelque chose d’inactif et sans ordre;» Théodotion: xsvbv xal oÙShv, «le vide et rien;» Vulgate: inanis et vacua, «sans consistance et vide.» Cette dernièretraduction et celle des Septante rendent le mieuxle sens de l’hébreu. Le mot tôhû se retrouve dans la Biblepour désigner tantôt ce qui est vaste et désert, Deut., xxxii, 10; Job, vi, 18; xii, 24; xxvi, 7; Ps. cvn (evi), 40; tantôt la dévastation, Is., xxiv, 10; la vanité, I Reg., xii, 21; Is., xxix, 21; xii, 29; lix, 4, et ce qui n’est «rien», Is., xiiv, 9; xlix, 4. Les deux mots réunis selisent encore dans Jérémie, iv, 23: «Si je regarde laterre, elle est tôhû vâbôhû,» c’est-à-dire toute en désordre.Isaïe, xxxiv, 11, reproduit l’expression de laGenèse et l’applique au pays des Iduméens, frappé parle châtiment divin: «On étendra sur lui le cordeau detôhû et le fil à plomb de bôhû.» Le sens des deux motsn’est donc pas douteux: il implique désordre, confusion, solitude, obscurité, en un mot l’état de la matière informeau début de l’œuvre organisatrice de la puissance divine.Les Grecs donnaient à la matière primordiale le nom de-/io; . Ils personnifiaient même le chaos et en faisaientun dieu précédant tous les autres êtres. Hésiode, Theog., 116; Aristophane, Aves, 693; Platon, Conv., 178 b.Cf. Ovide, Metam., i, 5. Les Pères se sont servis dumot chaos pour traduire l’idée représentée par le fô/iûvâbôhû de la Genèse; mais jamais ils n’ont attaché à ceterme le sens que lui prêtaient les philosophes grecs. Ilsse sont contentés d’appeler chaos l’état de la matièreprimordiale créée par Dieu, comme l’enseigne le premierverset de la Genèse, et déjà soumise à l’action des loisgénérales posées par lui. Voir S. Bonaventure, Sentent., lib. ii, dist. xii, art. i, q. 3, édit. Vives, t. ii, p. 532; Pétau, De theolog. dogmat., de mund. opificio, I. ii, 1-10; iii, 1-4, édit. de 1868, t. iv, p. 237-244; F. Vigouroux, La cosmogonie mosaïque, Paris, 1882, p. 67-68.Les partisans du concordisme entre le récit de la Genèseet les systèmes eosmogoniques modernes pensent que letôhû vâbôhû marque l’état de la terre pendant la condensationde la nébuleuse primitive, telle que la décritLaplace dans l’exposé de sa célèbre hypothèse. Voir Cosmogonie, et Motais, Origine du monde, Paris, 1888, p. 58-61. — Dans la parabole du mauvais riche, Abrahamdit à celui-ci, qui est enseveli dans l’enfer: «Entre D59
CHAOS — CHAPITRES DE LA BIBLE
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nous et vous, un grand chaos a été établi, de sorte queceux qui voudraient passer d’ici à vous ne le pourraient, pas plus que traverser de là-bas jusqu’ici.» Luc, xvi, 26.Ce que la Vulgate appelle chaos est nommé en grec-/i<Tfi.a, «abîme, gouffre, grand espace béant.» Cet abîme «a été établi», èoT^pixTai, a été creusé irrévocablementpar Dieu, et il est infranchissable. Par conséquent, ledamné ne pourra jamais passer de l’enfer au ciel.
CHAPITEAU DES COLONNES DU TEMPLE.
Voir Colonnes du temple.
CHAPITRES DE LA BIBLE. Ce sont des divisionsplus ou moins étendues, qui ont été établies au cours dessiècles dans les textes manuscrits ou imprimés de la Biblepour en faciliter la lecture. Différents systèmes de sectionnementont précédé la «capitulation» universellementemployée aujourd’hui. Nous distinguerons donc les chapitresanciens des chapitres modernes.
I. Chapitres anciens. — Autres sont ceux des textesoriginaux, autres ceux des anciennes versions. Leur histoiredétaillée présente plus qu’un intérêt de curiosité; elle a une importance critique et sert à classer les manuscritset à fixer le texte lui-même.
I. Chapitres des textes orioin aux. — On ignore siles plus anciens manuscrits hébraïques étaient partagésen sections. Plusieurs critiques pensent que le texte étaittranscrit d’une façon continue, sans séparation de paragrapheset d’alinéas. Les premières divisions connuessont les sections, appelées sedarîm (pluriel de sedér, «ordre, série, section» ), que les massorètes adoptèrentpour leurs études grammaticales et critiques. Le Pentateuqueen comprenait 156 (la Genèse 42, l’Exode 29, leLévitique 23, les Nombres 32, le Deutéronome 27), Josué 14, les Juges 14, les deux livres de Samuel 34, lesdeux livres des Rois 35, Isaïe 26, Jérémie 31, Ezéchiel29, les petits prophètes 21, les Proverbes 8, les Psaumes 19, Job 8, l’Ecclésiaste 4, Esther 5, Daniel 7, Esdras et NéhémielO, les Chroniques 25; au total, 443. Ruth, le Cantiqueet les Lamentations n’en avaient pas. Cf. de Voisin, Observationes ad proœmium Pugionis fidei, Leipzig, 1687, p. 102-103 et 137-140. — On ignore aussi quand, commentet par qui le texte grec du Nouveau Testament futsectionné pour la première fois. Clément d’Alexandrie, Stromat., vii, 14; t. ix, col. 517, appelle ^ii(jxr t i mptxotit, -; une partie de I Cor., vj. Tertullien, Ad uxorem, il, 2, t. i, col. 1290, désigne I Cor., vii, 12-14, commeun capitulum particulier. Ailleurs, de Pudicitia, 16, t. ii, col. 1012, il blâme les hérétiques qui condamnent toutun livre sacré à cause d’un capitulum douteux. Denysd’Alexandrie, cité par Eusèbe, H. E., vii, 25, t. xx, col. 697, nous apprend que quelques anciens discutaientl’Apocalypse chapitre par chapitre, xa6’é’xaaTov xe ?a-Xjiov.Il y a là un indice certain d’un sectionnementdéterminé; mais, dans l’état actuel de nos connaissances, il est impossible de dire s’il s’agit de sections liturgiquesou simplement de passages cités ou commentés par cesPères. — Les sectionnements connus des livres du NouveauTestament se ramènent à quatre groupes, ceux desÉvangiles, des Actes des Apôtres et des Épîtres catholiques, des Épîtres de saint Paul et de l’Apocalypse.
1o Chapitres des Évangiles. — 1o Le plus ancien sectionnementdes Évangiles se trouve dans les deux manuscritsonciaux B (Vaticanus 1209) et S (Zacynthius). Ilcomprend: Matth. 170 sections, Marc. 62, Luc. 152, Joa. 80. Ces sections sont d’inégale longueur; ainsi la136e de saint Matthieu correspond à xxiv, 1 et 2; la 137eà xxiv, 3-35; la 138e à xxiv, 36-41, et la 139e à xxiv, 45-51. — 2o Une autre division, presque aussi ancienne, compte: Matth. 68 chapitres, Marc. 48, Luc. 83, Joa. 18o On la trouve dans les onciaux ACXRZ. Elle est souventd’accord avec la précédente. Chaque chapitre, xeçâXxtov, a un titre, ti’tXo; , qui résume son contenu; le 1er chapitre de saint Matthieu est intitulé ne.p tôv ^iy<av, «desmages;» le 2o, rcepi x&v àvatpcôévxùv 71aiSîwv, «des enfantsoccis.» Dans ANZ, les titres sont placés à la partiesupérieure ou inférieure des pages, à coté de la sectioncorrespondante; dans ACR, leur liste est écrite en têlede chaque Évangile. Leur étendue varie notablement; ainsi le chapitre 55o de saint Matthieu correspond à xxii, 41-46, ’et le 56e à xxiii, 1-xxiv, 2. Le début de chaqueÉvangile n’a pas de titre. La l re section de saint Matthieucommence donc à ii, 1; celle de saint Marc à i, 23; cellede saint Luc à ii, 1, et celle de saint Jean aussi à ii, 1.Mill attribuait cette absence de titre à une omission despremiers copistes; Griesbach pensait que le titre généralde l’Évangile servait à désigner le début; Gregory considèrece commencement comme une section préliminaire, un avant-propos, qui n’était pas numéroté. On a attribué, mais sans raison suffisante, cette division à Tatien; l’abbéPaulin Martin la rapportait à Ammonius d’Alexandrie.Ces titres ont passé dans toutes les anciennes versions; ils ont subi des retouches. Les Arméniens et les Copiesont remanié complètement ceux de l’Évangile de saintJean. Cf. R. Simon, Histoire critique du Nouveau Testament, 1689, p. 424-427; Mill, Novum Testamentumgrs, ce, édit. Kuster, 1710, p. 39; Griesbach, Commentariuscriticus in textum grsecum N. T., pars 2 a, léna, 1811, p. 50; Gregory, N. T. græce, prolegomena, t. iii, p. 141-142; J. P. P. Martin, Introduction à la critiquetextuelle du N. T., partie théorique, 1882-1883, p. 554-569. Sur les titres latins, voir Patr. lat., t. clxv, col. 63-70. — Si on veut désigner les Tf-rXot sous le nomde xeçâXaia, il faut les appeler xEçâXaia majeurs, pourles distinguer des xsipâXaia proprement dits ou sectionsammoniennes (voir ce mot, t. i, col. 493-494), que l’ondénommera alors xEçiXaia mineurs. Ceux-ci sont moinsétendus et plus nombreux que les précédents: 355 ensaint Matthieu, 235 en saint Marc, 343 en saint Luc et232 en saint Jean. Cf. R. Simon, op. cit., p. 427-429; J. P. P. Martin, ouvr. cit., p. 569-614; Gregory, loc. cit., p. 143-153; G william, The Ammonian Sections, EusebianCanons and Harmonizing Tables in the SyriacTetrævangelium, dans les Studia biblica et ecclesiastica, t. ii, Oxford, 1890, p. 241-272.
2o Chapitres des Actes et des Épîtres catholiques. —La plus ancienne division connue de ces livres est reproduitedans le Vaticanus À et comprend: Act. 36 chapitres, Jac. 9, I Petr. 8, I Joa. 11, Il Joa. 1, III Joa. 1, Jud. 2; la seconde épître de saint Pierre n’a pas de sections.31 chapitres des Actes correspondent à l’exOsutç -/Eçakîiovd’Euthalius. Ce diacre d’Alexandrie, sur la demandedu prêtre Athanase, publia, vers 458, une édition stichométriquedes Actes et des Épîtres catholiques et yintroduisit un double sectionnement, le premier de57 leçons ou lectures, àvjyvcîxrEi; , qui paraissent avoir étédestinées à l’usage liturgique, et le second de chapitres, xE ?aXai «: Act. 40, Jac. 6, I Petr. 8, II Petr. 4, I Joa. 7,
II Joa. 1, III Joa. 1, Jud. 4; au total, 71. Beaucoup de ceschapitres avaient des subdivisions, (ispixat ircoSiapéiTEt: , dont la première n’est pas comptée. Leur nombre est: Act. 48, Jac. 9, I Petr. 5, II Petr. 1, I Joa. 8, II Joa. 1,
III Joa. 1, Jud. 1. Cf. Zacagni, Collectanea monumentorumveterum Ecclesix grxcx ac latinse, Rome, 1698, etPatr. gr., t. lxxxv, col. 627-790. Les critiques ne sontpas d’accord sur l’auteur de cette division. Sur la foi duCodex Coislianus, n» 25 (Moutfaucon, Bibliolheca Coisliniana, Paris, 1715, p. 75), on l’a atlribuée au martyrsaint Pamphile. Mais les mots toj rian^o-j semblentavoir été ajoutés à tort par le copiste; Euthalius affirmeseulement qu’il a eollationné le texte sacré sur les exemplairesles plus corrects de la bibliothèque d’Eusèbe Pamphilede Césarée. D’autres en font honneur à Euthalius.Mais Albert Ehrhard, Codex H ad EpUtulas Pauli undEuthalios diaconos, dans le Centralblalt fur Biblioteckswesen, t. viii, Leipzig, 1891, p. 385-411, a prétendu 5C1
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que l’existence d’Euthalius ne peut se démontrer historiquement, et que très vraisemblablement on a pris pourlui le copiste du manuscrit, qui se nomme Evagrius etqui est peut-être Evagrius Ponticus (345-399). Lecodex H serait l’autographe. Cf. Centralblatt, février 1893, et Journal of Philologij, t. xxiii, 1895, p. 241-259. —Le Vaticanus contient une autre division: Act. 69 chapitres, Jac. 5, I Petr. 3, II Petr. 2, I Joa. 3, 1£ Joa. 2.La 3e épître de saint Jean et celle de saint Jude n’ont pasde sections. La division des Actes correspond en partieau sectionnement introduit dans le Sinaiticus par la secondemain. Cf. Tischendorf, N. T. grœcum ex SinaiticoCodice, Leipzig, 1865, p. xxxvi, adn. 1, et N. T. Vaticanum, p. xxx; Westcott et Hort, The New Testament inthe original Greek, introd., 1882, p. 266, n° 349.
3° Chapitres des Épitres de saint Paul. — Dans sonédition de l’Apôtre, Euthalius ou Evagrius a encore reproduit, avec quelques modifications cependant, un sectionnementen chapitres, établi par «un très sage et trèsaimé Père en Dieu». Ce prédécesseur, qu’il ne désignepas autrement, serait, au jugement de plusieurs critiques, Théodore de Mopsueste. Pour M. Ehrard, c’est un écrivainecclésiastique égyptien, peut - être contemporaind’Evagrius. Quoi qu’il en soit, cette division comprend19 chapitres Rom., 9 I Cor., Il ou 10 II Cor., 12 Gal., 10 Eph., 7 Philip., 10 Coloss., 7 I Thess., 6 II Thess., 22.Hebr., 18 I Tim., 9 II Tim., 6 Tit., 2 Philem.; autotal, 148 ou 147. On y remarque quelques subdivisions: 6 Rom., 16 I Cor., 4 II Cor., 1 Coloss., 3 II Thess., 8 Hebr., 2 I Tim.; au total, 40. — Ici encore, le Vaticanusa deux séries de divisions. La plus ancienne traite les14 lettres comme un seul livre et partage le texte commes’il était continu. La seule particularité à noter, c’est quedans cette supputation l’Épitre aux Hébreux suit celleaux Galates, quoique le manuscrit la contienne après laseconde aux Thessaloniciens. Le nombre des chapitresest de 21 Rom., 21 I Cor., Il II Cor., 5 Gal., Il Hebr., 6 Eph., 4 Philip., 6 Coloss., 4 I Thess., 4 II Thess. L’autre, plus récente, ne compte que 8 chapitres Rom., 11 1 Cor., 8 II Cor., 4 Gal., 3 Eph., 2 Philip., 3 Coloss., 2 I Thess., 2 II Thess. On ignore le chiffre des chapitres de l’Épitreaux Hébreux, dont le texte est incomplet.
4° Cfiapitres de l’Apocalypse. — André, archevêquede Césarée en Cappadoce, qui vivait à la fin du v 6 siècle, a partagé l’Apocalypse en 24 Xôyou; , conformément aunombre des vieillards qui siégeaient autour du trône deDieu, Apoc, IV, 4, et en 72 xeçiiaia, obtenus par lamultiplication de 24 par 3, chiffre des éléments constitutifsde la nature humaine. Comment, in Apocalypsim, Patr. gr., t. cvi, col. 220, etc. Cf. Mill, ouvr. cit., p. 62-63, 86-87 et 96; Gregory, op. cit., p. 153-161.
II. Chapitres des anciennes versions, de la versiondes Septante et des versions latines. Ceux des autrestraductions sont moins importants et moins connus.
1° Chapitres de la version des Septante. — Leur histoiren’est pas encore complètement élucidée, parce queles manuscrits n’ont pas été examinés sous ce rapport. Ilest certain cependant que les Grecs étendirent à l’AncienTestament l’usage des ti’tîioi ou résumés des chapitres, qu’ils écrivaient sur les marges des manuscrits de l’Évangile.Bernard de Montfaucon, Præliminaria in HexaplaOrigenis, Patr. gr., t. XV, col. 78-79, et BibliothecaCoisliniana, l a pars, Paris, 1715, c. i, p. 4-31, a tirédu Coislinianus I (aujourd’hui à la Bibliothèque Nationalede Paris, fonds grec, n» 1) deux séries de divisionsmarginales pour les premiers livres de l’Ancien Testament.L’une est accompagnée d’arguments écrits ausommet des pages, l’autre est simplement numérotée etsans titres. La première comprend: Gen. 106 chapitres, Exod. 84, Lev. 54, Num. 50, Deut. 68, I Reg. 53, II Reg. 50. La seconde en a: Gen. 99, Exod. 110, Lev. 61, Num. 51, Deut. 91, I Reg. 73, II Reg. 53. Le total deschapitres du livre de Josué est inconnu, parce que le
manuscrit est mutilé. Dans les Juges, il n’y a pas dedivision; les servitudes des Hébreux et les Juges sontsimplement comptés. Le Coislinianus VIII (aujourd’huià la Bibliothèque Nationale, fonds grec, n° 9) a: I Par.83 chapitres, II Par. 86, Tobie 21, Judith 34, Esther 55.Bibliotheca Coisliniana, p. 45-52. — On a publié dansles Critici sacri, Londres, 1660, t. viii, p. 23-46, cf. Patr.gr., t. xcni, col. 1339-1386, une division d’Isaie et desdouze petits prophètes, intitulée 2ti-/T|PÔv et attribuée auprêtre Hésychius, probablement Hésychius de Jérusalem(† 440). Isaïe a 88 sections, Osée 20, Joël 10, Amos 17, Abdias 3, Jonas 4, Michée 13, Nahum 5, Habacuc 4, Sophonie7, Aggée 5, Zacharie 32 et Malachie 10. Un correcteurdu VIIe siècle a numéroté les sections d’Isaïe dansle manuscrit du Sinaï. h’Aleocandrinus contenait aussiune division de ce prophète. Breitinger, Vêtus Test, exversione Septuaginta, Zurich, 1732, t. iii, p. h 3. Le Chisianuset le Marchalianus gardent des vestiges de deuxsectionnements des prophètes. On les a constatés dans cedernier pour Jérémie, l’épître de Jérémie et Ézéchiel; ces chapitres concordent en grande partie avec ceux duVaticanus, mais ne sont jamais d’accord avec ceux de laversion syriaque hexaplaire, qui ont des rapports avec laSynopsis Sacrse Scriplurse, attribuée à saint Jean Chrysostomeet éditée Patr. gr., t. lvi, col. 313-386. Ceriani, De Codice Marchaliano, Rome, 1890, p. 24-26. Consulterencore Bugatus, Daniel secundum LXX, Milan, 1788, p. 1; H. Middeldorpf, Liber I V Regum, Berlin, 1835, p. iv; Ceriani, Monumenta sacra et profana, t. ii, p. xmet 2.
2° Chapitres des versions latines. — Les plus anciensmanuscrits latins des deux Testaments contiennent diverssystèmes de sectionnements, indistinctement appeléstituli, brèves ou capitula. De soi, ces désignations ontun sens différent; mais, en fait, elles sont appliquées àdes sommaires numérotés, qui reproduisent les.premiersmots ou résument le contenu de la section qu’ils accompagnent.Souvent ces rubriques sont réunies en tête dechaque livre et en forment une sorte d’abrégé ou de tabledes matières. Quoique beaucoup de ces textes aient étépubliés, un classement définitif n’a pas encore été opéré.On ne trouvera donc ici que des indications générales.
Le Pentateuque a plusieurs groupes de sommaires.Notons seulement les trois principaux. Le premier, faitsur l’ancienne version latine et reproduit dans le plusgrand nombre des vieux manuscrits, comprend: Gen.82 sections, Exod. 139, Lev. 89, Num. 74 et Deut. 155.Le second, qui se lit dans la Bible de Théodulphe et qui, sauf pour la Genèse, est d’accord avec VAmiatinus, compte: Gen. 38 chapitres, Exod. 18, Lev. 16, Num. 20et Deut. 20. Le troisième, celui des manuscrits espagnolset méridionaux, a: Gen. 46 sections, Exod. 21, Lev. 16, Num. 20 et Deut. 14. Josué est divisé dans la Vulgate desaint Jérôme en 33, 11, 14, 19, 110, 78 sections; les Jugesen 18, 9, 10, 30, 58 et 14. Le sectionnement de Ruth estdu IXe siècle et semble sortir de l’école de Tours; ilcomprend 10, 8 ou 4 chapitres. Les quatre livres des Roisprésentent deux divisions principales: la premièrea98 sections pour les deux livres de Samuel, et 91 pourles deux livres des Rois; la seconde, 135 dans Samuel et220 dans Rois. Les Paralipomènes étaient respectivementdivisés en 23 et 18, 104 et 74, 24 et 33 sections. Une deces divisions est l’œuvre de Cassiodore. De institutionedivinarum litterarum, c. ii, t. lxx, col. 1114. Les deuxlivres d’Esdras ont des sections très diverses. Tobiecompte 16, 30, 27 ou 9 chapitres; Judith 23, 28, 37, 8; Esther 23, 22 ou 10; Job 28, 29, 36, 21, 33. Une divisiondes livres sapientiaux provient d’une ancienne version; une autre a été faite par Cassiodore, ouvr. cit., c. v; ibid., col. 1117. Pour les grands prophètes, une seule série estancienne et comprend: Isaïe 181 sections, Jérémie 189, Ézéchiel 128 et Daniel 31; il est probable qu’elle provientdu grec. Une autre a des chapitres plus longs; par suite,
leur nombre est moindre: Isaïe 32, Jer. 63, Ezech. 59et Dan. 15. Les pelits prophètes ont aussi une doublesérie de longs et de courts chapitres. Les Machabéessont divisés, le premier en 61 sections, et le seconden 55.
On a conservé un assez grand nombre de sommairesdes Évangiles. Les plus anciens se ramènent à deuxtypes principaux. L’un qui contient: Matth. 73 chapitres, Marc. 46, Luc. 80 et Joa. 35, se rencontre presque uniquementdans les manuscrits de l’ancienne version «européenne» ou dans ceux dont le texte est fortement mêlé.
II est en relation certaine avec la division du manuscritgrec Vaticanus et avec les leçons liturgiques du Cornes.Un autre groupe, emprunté à la même version, se rencontresous deux formes différentes. La plus ancienne a28, 12, 20 et 14 chapitres; la plus récente 28, 13, 21 et 14.Ce second groupe se rapproche en saint Matthieu des33 sections du commentaire de saint Hilaire de Poitiers, Pair, lat., t. ix, col. 915-918. Il est probablement l’œuvrede l’évêque d’Aquilée, Fortunatien. Cf. S. Jérôme, Devh illust., c. 97, t. xxiii, col. 698. D’autres sectionnementsont 73, 46, 80 et 35 chapitres; 28, 51, 88 et 48; 81, 46, 94 et 45. Des divisions des Actes, deux, ayantrespectivement 63 et 74 sections, correspondent à l’ancienneversion et coïncident le plus souvent avec le sectionnementdes plus anciens manuscrits grecs. Deuxautres comptent 63 et 70 sommaires. Les divisions desÉpitres de saint Paul méritent une attention particulière.Celle de l’Épître aux Romains en 51 chapitres, tiréed’une vieille version, ne tient pas compte des deux dernierschapitres actuels, sauf de la doxologie finale, xvi, 24-27. Cf. Hort et Westcott, The New Testament, introd., append, p. 111-112. Les épîtres suivantes présententdeux systèmes. Le plus ancien (I Cor. 25, II Cor. 20, etc.)mentionne simplement les premiers mots de chaqueparagraphe et se rapproche du sectionnement attribuéà Euthalius. Le plus récent comprend: I Cor. 72 chapitres, II Cor. 29, Gai. 37, Eph. 31, Philip. 19, Coloss. 29ou 31, I Thess. 25, II Thess. 9, I Tim. 30, II Tim. 25, Tit. 10, Philem. 4, Hebr. 39. La division la plus répanduedes Épitres catholiques provient d’une ancienne versionet contient: Jac. 20 chapitres, I Petr. 21, IlPetr. 11, I Joa. 20, II Joa. 5, III Joa. 5, Jud. 7. La plus simple, où les chapitres ne sont marqués que par leurs premiersmots, est en accord presque absolu avec la liturgie gallicane: Jac. 12, I Petr. 13, II Pelr. 8, I Joa. 13, II Joa. 3,
III Joa. 4, Jud. 4. Plusieurs divisions de l’Apocalypsedérivent évidemment du grec. Celle qui compte 48 sectionscorrespond en grande partie aux Xô^oi d’André deCésarée. Une autre n’a que 25 chapitres:
Cf. Carus (card. Thomasi), Sacrorum Bibliorum…veteres tituli sive capitula, sectiones et stichometrise, Rome, 1688, ouvrage édité et complété par Vezzosi, Thomasii opéra omnia, Venise, t. i, p. 1-499; Martianay, Vulgata antiqua latina et itala versio Ev. secundumMatthœurn, Paris, 1695, et Prolegomena in divinamS. Hieronymi bibliotkecam, prol. iv, Patr. lat., t. xxviii, col. 101-109; Vallarsi, Opéra S. Hieronymi, Pair, lat., t. xxviii-xxix; Sabatier, Bibliorum sacrorum latinseversiones antiquse, 3 vol.; Bianchini, Evangeliariumquadruplex, Rome, 1719; Tischendorf, Codex Amiatinus, Leipzig, 1851; Abbot, Evangeliorum versio antehieronytnianaex Codice Vsseriano, Dublin, 1884; Belsheim, Codex f 2 Corbeiensis sive quatuor Euangeliaante Hieronymum translata, Christiania, 1887; J.Wordsworth, Tlie Gospel according to St Matthew, Oxford, 1883, et Novum Testamentum D. N. J. C. latine, Oxford, .1889-1895; S. Berger, Histoire de la Vulyale pendantles premiers siècles du moyen âge, Paris, 1893, p. 307-315et 343-362.
II. Chapitres siodernes. — Les anciens sectionnementsde la Bible ont été en usage jusqu’au xii «siècle.Au début du xine siècle, une nouvelle division en chapitres à peu près égaux les supplanta et devint d’unemploi universel. Son auteur est Etienne Langton, professeurà l’Université de Paris, puis archevêque de Cantorbéryet cardinal (-J- 1228). Des écrivains rapprochésde son époque, Nicolas Trivet, Chronicon, année 1228, dans Luc d’Achery, Spicilegium, t. iii, p. 189; Knyghtonde Chester, cité par du Boulay, Hist. Universitalis Parisiensis, 1665, t. iii, p. 711, rapportent qu’il fit ce travailà Paris, par conséquent avant 1206. Le manuscrit487 de la bibliothèque Bodléienne, à Oxford, fol. 110, et un autre, conservé à la bibliothèque municipale deLyon, Sous le n° 340, confirment ces renseignements.L’œuvre de Langton, longtemps ignorée, a été retrouvéedans le manuscrit 14417 de la Bibliothèque Nationale deParis, fol. 125 et 126, et publiée pour la première fois parl’abbé Paulin Martin, Introduction à la critique généralede l’Ancien Testament, Paris, t. ii, 1887-1888, p. 461-474.Le nombre des nouveaux chapitres est: Gen. 50, Exod. 40, Lev. 27, Num. 36, Deut. 24, Jud. 21, Rutli 4, I Reg. 31, II Reg. 24, III Reg. 22, IV Reg. 21, I Par. 13, II Par. 20, Esdras et Néhémie, ne formant qu’un seul livre, 36; Tob. 11, Judith 26, Esth. 22, Job 41, Prov. 31, Eccl. 12, Cant. 8, Sap. 19, Eccli. 51, Is. 66, Jer. 52, Lament. 5, Baruch 4, Ezech. 47, Dan. 14, Ose. 14, Joël 3, Amos 9, Abdias 1, Jonas 4, Mich. 7, Nahum 3, Habac. 3, Soph. 3, Agg. 2, Zach. 14, Malach. 3, I Mach. 16, II Mach. 15; Matth. 28, Marc. 15, Luc 23, Joa. 20, Rom. 16, I Cor. 16, II Cor. 12, Gai. 5, Eph. 6, Philip. 4, Coloss. 4, I Thess. 5
II Thess. 3, I Tim. 6, II Tim. 4, Tit. 3, Philem. 1, Hebr. 13, Jac. 5, I Petr. 5, II Petr. 3, I Joa. 5, II Joa. 1,
III Joa. 1, Jud. 2, Act. 27, Apoc. 22. — Nonobstant denombreuses divergences, ces chapitres sont étroitementapparentés à ceux de nos Bibles imprimées. La division, des Paralipomènos, des livres d’Esdras, de Judith etd’Esther est spéciale et n’a pas été conservée. Nos Biblesont 3 chapitres de plus dans Tobie, 2 dans Haruch, 1 dans le IV* livre des Rois, Job, Ézéchiel, Malachie, Marc, Luc, Jean, Actes, II Cor., Gal., et 1 de moins dansl’Épitre de saint Jude. Des différences moins importantesse remarquent au début de 123 chapitres de Langton; ilscommencent ou finissent quelques mots seulement ou unverset au plus avant les nôtres.
Cette division nouvelle remplaçait avantageusement lesanciens systèmes si variés et si compliqués, et facilitaitles recherches dans les manuscrits aussi bien que lesréférences bibliques. Aussi fut-elle bien accueillie. Lesdocteurs de l’Université de Paris l’adoptèrent, et leslibraires l’introduisirent, vers 1226, dans l’édition de laVulgate qui s’est appelée la Bible parisienne. Recopiéedans les manuscrits, elle obtint une grande vogue. Ellesubit cependant des remaniements, dont les travaux critiquesdu xiiie siècle portent la trace. On est arrivé graduellementà la capitulation moderne, qui finit par deveniruniforme et d’un usage général. Le cardinal Huguesde Saint-Cher, à qui Génébrard, Chronographix libriiv, Cologne, 1581, p. 970 et 972, a fait l’honneur, mais à tort, de cette innovation, a eu sa part dans ce travail de retoucheet de remaniement. Toutefois la division qu’il suitdans ses Postilles diffère à la fois de celle de Langton etde la nôtre. Il n’a donc pas mis la dernière main au sectionnementactuel. Des divergences se remarquent encoredans les premières Bibles latines imprimées. La capitulationmoderne a été introduite dans un petit nombrede manuscrits grecs occidentaux. Les Juifs eux-mêmesl’adoptèrent dans la transcription du texte hébraïque del’Ancien Testament. Les Bibles, imprimées dans toutesles langues, la contiennent sans notables divergences.Cf. Gregory, Prolegomena, p. 164-166; S. Berger, Del’histoire de la Vulgate en France, Paris, 1887, p. 10-12; Denifle, Die Handschriften der Bibel-Correctorien des13 Jahrhunderts, dans l’Archiv fiir Literatur und Kirchengeschichtedes Mitlelalters, Fribourg-en-Brisgau, t. iv, 1888, p. 281-282 et 289-291. - Sur tout l’ensemble <>
de la question, consulter Otto Schmid, Ueber verschiedeneEintheilungen der heiligen Schrift, in-8°, Gratz, 1892.
E. Mangenot.CHAPPELOW Léonard, orientaliste anglais, néd’une famille du comté d’York en 1683, mort le 13 janvier 1768. Il fut professeur d’arabe à l’université de Cambridge. On a de lui, outre quelques publications sur lagrammaire et la littérature arabes, une édition du Delegibus Hebrseoruni de Spencer, 2 in-f>, Cambridge, 1727, et À Commentary on the Book of Job, in which isinserled the Hebrew text and English translation; with a Paraphrase from the third verse of the thirdchapter, where it is supposed the mètre begins, to the
dans la vie ordinaire, les rois et leurs principaux officiers. Le mot rékéb, qui désigne les chars en hébreu, n’indique pas le nombre de chevaux dont ils étaient attelés; il est cependant très probable que les Hébreux nese servirent jamais, comme les autres peuples du reste, que de chars à deux chevaux, soit pour la guerre, soitpour l’usage journalier. Le mot quadriga, «char à quatrechevaux,» dont se sert la Vulgate en plusieurs passages, ne doit pas être pris à la lettre. Les quadriges n’ont existéque chez les Grecs et chez les Romains, encore seulement pour les courses du stade ou pour les fêtes et les.triomphes. Les chars égyptiens n’ont que deux chevaux, et si les chars assyriens et les anciens chars grecs en.
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193. — Coureurs royaux devant le char d’Amenhotep IV. xvrn» dynastie. Tell el-Amarua. D’après Lepsius, Denlemaler,
Abth. iii, Bl. 92.
seventh verse of the forty-second chapter where it ends, 2 in-4°, Cambridge, 1752. Chappelow croit que le livrede Job fut composé d’abord en arabe par Job lui-même, et qu’il fut plus tard traduit en hébreu et disposé danssa forme actuelle par un Israélite. La paraphrase est trèsdiffuse. C’est un disciple de Schultens, auquel il empruntebeaucoup; il abuse des étymologies arabes dans l’explication du texte. — Voir Stanley Lane-Poole, dans L. Stephens, Dictionary of national Biography, t. x, 1887, p. 61. F. Vigouroux.
CHAR (hébreu: rékéb; grec: ap|ia, Gen., xli, 43; xlvi, 29; Jud., v, 28; III Reg., xxii, 35, etc.; I Mach., i, 18; II Mach., ix, 7; AcL, viii, 28, etc.; îmtoç, Jos., xvii, 16 et 18; àvoiêdar,; , Deut., xx, 1; Is., xxi, 7 et 9; xxii, 6, etc.; 'Pv/ïê, Jud., i, 19; hàôaaa; , Ps. cm [Vulgate, civ], 3; Vulgate: currus, Gen., xli, 43; xlvi, 29; L, 9; Exod., xiv, 6, etc.; ascensor, Is., xxi, 7, etc.; biga, Is., xxi, 9; quadriga, Jud., v, 28; I Reg., viii, 11; II Reg., x, 29; IPar., xviii, 4, etc.), véhicule à deux roues, destiné à porter les guerriers sur le champ de bataille, et,
avaient trois, le troisième était un cheval de rechange.W. Helbig, L'épopée homérique, trad. franc., 1895, p. 170.
I. Chars des Hébreux. — L’usage des chars de guerrene paraît avoir commencé chez les Juifs qu'à l'époquedes rois. L’absence des chars était, en effet, la conséquence de la loi qui défendait de multiplier le nombredes chevaux, afin que le peuple comptât avant tout surla protection de Dieu. Deut., xvii, 16. Dans le passageoù Samuel annonce au peuple tous les maux qu’il auraà subir, s’il veut un roi comme en ont les nations voisines, il leur dit: «Il prendra vos fils et les placera surses chars…; il les fera courir devant ses chars…; il enfera des fabricants de chars.» I Reg., viii, 11-12. C’està-dire il introduira tout ce service de coureurs, de conducteurs, de fabricants, qui existait en Egypte et chez lespeuples voisins des Israélites. On ne voit pas cependant queles premiers rois aient eu beaucoup de chars dans leurarmée. Dans sa lutte contre Adarézer, roi de Soba, payssitué entre l’Euphrate et Damas, David fait prisonniers, selon le texte de II Rois, viii, 4, dix-sept cents cavaliers ou
soldats montés sur des chars, ou, selon le texte de I Paralipomènes, xviii, 4, mille chars et sept mille cavaliers, etil fait couper les jarrets de tous les chevaux, à l’exceptionde cent chars qu’il se réserve. Un peu plus loin, il met enfuite l’armée du même roi et fait périr l’attelage de septcents chars et quarante mille cavaliers, sans même enréserver pour lui. II Reg., x, 18; I Par., xix, 18. — Absalom, révolté contre son père, se fait construire des chars; il a des hommes qui les montent et d’autres qui courentdevant. II Reg., xv, 1. Adonias fait de même quand ilveut usurper la royauté. III Reg., i, 5. Le fait d’avoir deschars et des coureurs devant soi est donné dans ces deuxcas et dans Jérémie, xvii, 25; xxii, 4, comme une desprérogatives royales. Sous le règne de Salomon, les charsjouent un rôle important dans la composition de l’arméejuive. Quand il prend possession du trône, le jeune roiréunit immédiatement des chars au nombre de quatorzecents et douze mille cavaliers. III Reg., x, 26; II Par., I, 14. Certaines villes étaient spécialement affectées auxparcs des chars de guerre. III Reg., IX, 19; x, 20; II Par.,
Dans la pompe funèbre de Jacob figurent des chars. Gen., L, 9. Les chars de guerre égyptiens sont nommés aumoment où le pharaon poursuit les Hébreux quittantl’Egypte pour aller vers la Terre Promise. C’est d’abordle char du roi, Exod., xiv, 6 et 9; xv, 4; ce sont ensuiteles chars des guerriers de son armée. Exod., xiv, 7, 9, 17, 18, etc. Tous ces chars, qui étaient au nombre de sixcents, Exod., xiv, 7, sont engloutis dans la mer Rougeavec ceux qui les montaient. Exod., xiv, 23-28; xv, 4, 19; Deut., xi, 4; xx, 1. Le souvenir de cette destruction estsouvent rappelé comme l’événement le plus importantde l’histoire d’Israël. Jos., xxiv, 6. Il est encore questiondes chars égyptiens dans le récit de l’invasion de Sésacsous Roboam. II Par., xii, 3. Les chars de l’Egypte sonttoujours considérés comme une des principales forces deson armée. IV Reg., xviii, 24; Jer., xlvi, 9.
Sur les monuments égyptiens, les chars de guerre apparaissentdès le xviie siècle avant J.-C. Aahmès Ier, quidélivra l’Egypte de la domination des Hyksos, combattaiti sur un char. Chabas, Études sur l’antiquité historique,
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104. — Char cypriote. Eol et sa suite. Sarcophage. D’après G. Rawlinson, History oj Phenida, p. 206.
I, 14; viii, 6; IX, 25. Quand Jéroboam se révolta contreRoboam, ce dernier s’enfuit vers Jérusalem sur son char.
III Reg., xii, 18; II Par., x, 18. Les livres des Rois mentionnentencore le char du roi Achab, III Reg., xviii, 44; II Par., xviii, 34; celui du roi Josaphat, III Reg., xxii, 32, 35, 38; ceux de Joram, d’Ochozias, de Jéhu. IV Reg., IX, 21, 24, 27, 28. Un second char suivait celui du roi.II Par., xxxv, 24. Le préposé du temple, Is., xxii, 18, et les principaux officiers avaient également des chars,
IV Reg., ix, 25; x, 2, 15, 16; Jer., xxii, 4, ainsi que leséclaireurs. IV Reg., ix, 17, 18, 19. Deux personnes prenaientplace sur le char. IV Reg., x, 16. Il n’est questiond’un corps de guerriers montés sur des chars que dansdeux passages, IV Reg., xiii, 7, et xix, 23. Dans ce dernierendroit, Dieu reproche aux Israélites d’avoir trop deconfiance dans la multitude de leurs chars. Ce reprochen’est pas sans ironie, car jamais les Juifs n’en eurentun grand nombre, excepté au temps de Salomon. Davidoppose à la confiance que les étrangers ont dans leurschars celle que les Israélites ont dans le Seigneur. Ps. xix(hébreu, xx), 8. Aussi quand les Syriens sont effrayéspar un bruit de chars qu’ils entendent la nuit, ils enconcluent que le roi d’Israël amène avec lui les rois desHéthéens et des Égyptiens. IV Reg., vii, 6. C’est d’Egypteque Salomon faisait venir ses chars, qu’il payait au prixde six cents pièces d’argent. III Reg., x, 29. Il en fournissaitles rois des Héthéens et les rois de Syrie. Ibid.
II. Chars des Égyptiens. — Les chars égyptiens sontles plus anciens qui soient mentionnés dans la Bible. Lepharaon, pour faire honneur à Joseph, le fait monterdans un char qui suit immédiatement le sien. Gen., xii, 43.Joseph monte dans un char pour aller au-devant de sonpère Jacob, quand il vient en Egypte. Gen., xlvi, 29.
2e édit., p. 422 et 441. Il semble qu’il ait été antérieurementen usage chez les peuples de l’Asie. Brugsch, GeschichleAegyptens, p. 273; Ebers, Aegypten und die BûcherMoses, t. i, p. 221. Cf. Helbig, L’épopée homérique, trad.franc., p. 160. Le char de guerre égyptien contenait deuxpersonnes, le guerrier et le conducteur (t. i, fig. 258, 259, col. 975, 978). Cf. Wilkinson, The manners andcustoms of the ancient Egyptians, t. i, p. 223, fig. 56, 2; p. 224, fig. 57. On voit cependant des chars contenant troispersonnes dans les cortèges triomphaux; alors, avec le conducteur, montaient deux jeunes nobles, portant le sceptreroyal ou les éventails. En campagne, chaque guerrier avaitson char et son conducteur. Pour conduire les chevaux, le cocher était armé d’un fouet à une ou plusieurs lanièresde peau. Voir Cocher, Fouet. Les insignes de sa fonctionétaient fixés derrière le char, et par conséquent lecombattant pouvait librement se servir de ses armes. Wilkinson, Manners, t. i, fig. 57, p. 224. Quand à la villeou à la campagne le maître conduisait lui-même, sesserviteurs couraient devant lui (fig. 193), comme cela sefait encore aujourd’hui en Egypte. Aux moments d’arrêt, ils tenaient les rênes, mais sans monter dans la voiture.Wilkinson, Manners, t. i, fig. 3, p. 33. Les rois sont souventreprésentés seuls dans leur char, tenant les rênesou les ayant passées autour de leur corps (voir t. i, fig. 218, col. 899); mais il est probable qu’en les représentantainsi, l’artiste égyptien a simplement voulu laisserà la figure principale toute son importance, et qu’en réalitéles rois avaient, eux aussi, un conducteur dans leurchar. Cf. Perrot, Histoire de l’art, t. i, p. 23, fig. 13; p. 271, fig. 173; p. 276, fig. 174; F. Lenormant, Histoireancienne de l’Orient, t. ii, p. 230, 231. 245, etc.; cf. p. 227; le roi, descendu He son char, tient à la main les rênes et CHAR
570
un arc. Les chars avaient parfois un siège, placé sur ledevant ou sur le côté. Sur quelques chars, le plancher, c’est-à-dire la partie sur laquelle s’appuyaient les piedsde ceux qui le montaient, était formé par un cadre entourantun treillis de ceurroies ou de cordes, destiné à rendreles secousses moins dures et à remédier à l’absence deressorts.
La matière employée pour la construction des charsétait le bois. Plusieurs bas-reliefs représentent des charronstravaillant le bois pour faire des chars. Wilkinson, Manners, t. i, p. 231, fig. 61. Nous y voyons en particulierla confection du timon. Le corps du char était extrêmementléger; le cadre de bois était simplement orné
de tablier en se relevant en pointe ou en bande jusqu’auhaut du char. Des courroies de peaux reliaient sur lescôtés le haut du cadre, qui formait comme une maincourante, à la pièce inférieure. Les différentes opérationsnécessaires à la confection du char et à la disposition desmorceaux de peau sur le bois sont représentées sur lesmonuments égyptiens. Wilkinson, Manners, t. i, p. 232, fig. 65. Les roues étaient également de bois et avaientgénéralement six rais. Elles étaient maintenues par une.cheville, mais elles seules tournaient. L’essieu restaitimmobile. Aux côtés était attaché extérieurement un carquois.
Les chars de plaisance avaient la même forme que les
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195. — Char royal a trois chevaux. Niinroud. D’après Layard, Monuments of Nineveh, t. i, pi. 21.
et consolidé à l’aide de peau et de métal. Le fond duchar, qu’il fut de bois plein ou formé d’un treillis, s’appuyaitsur l’essieu, auquel était également fixée l’extrémitéinférieure du timon. L’essieu était placé non au centre, mais à l’arrière. Le timon, qui formait une barre horizontalesur laquelle s’appuyait le fond du char, se relevaitensuite par une légère courbe terminée en lignedroite. Il était attaché au haut de l’avant du char par unecourroie partant de la partie relevée, peu après l’endroitoù finissait la courbe. À l’extrémité du timon était fixéun joug qu’on posait sur le cou des chevaux et auquelon les attachait par des sangles passées sous le poitrail.Le poids des chars était supporté par les roues et parles chevaux. Comme un homme pouvait facilement lemanier, il est évident que deux personnes n’étaientpas une charge trop lourde pour les chevaux. Quandle char était dételé, le timon tombait à terre, ou on lesoutenait par un support de bois, qui parfois représentaitun captif. Le char était ouvert à l’arrière. Rares sont lescaisses entièrement fermées sur les côtés. On en voitcependant quelques exemples. Rosellini, Monumenti diEgitto, t. i Monumenti reali, pi. 103. Le plus souventles côtés étaient ouverts. Sur le fond cependant s’élevaitune pièce de bois qui formait ensuite à l’avant une sorte
chars de guerre, mais les côtés étaient souvent fermés.Quelquefois on y fixait un parasol pour garantir du soleil.A la place de chevaux, les Égyptiens se servaient pourtraîner leurs chars de plaisance de bœufs ou de mulets.Voir t. i, fig. 560, col. 1834. Cf. Wilkinson, Manners, t. i, p. 222-237.
III. Chars des Chananéens. — Quand les Hébreuxentrèrent dans la Terre Promise, les Chananéens, contrelesquels ils eurent à lutter, avaient des chars dans leurarmée. Jos., xi, 4. Ces chars sont appelés dans l’hébreurékéb barzél. Jos., xvii, 16 et 18. Les Septante, au ꝟ. 16, traduisent par ïtckoz ètcOiîxto; xa’t <n’5ï]poç, «une cavaleriechoisie et du fer;» mais au ꝟ. 18 ils ont supprimé aifiï]poç.La Vulgate, dans les deux passages, traduit par ferrei, «de fer.» Il est évident qu’il ne s’agit pas de charsfaits entièrement de ce métal; car Dieu dit à Josué, si, 4, de ies brûler. Il ne peut s’agir non plus de simples ornementsde fer; ils n’eussent pas rendu les chars plus redoutables.Il reste donc à supposer que ce sont des charsblindés de fer ou armés de faux. Cette dernière interprétationest adoptée par la Vulgate dans le livre des Juges, 1, 19. «Les Israélites, dit le texte hébreu, ne purent s’emparerdes vallées de la terre de Chanaan, parce que leshabitants avaient des chars de fer.» Les Septante, dans ce
passage, ont supprimé l’épilhète et fait du mot hébreuun nom propre. Ils ont traduit: ôt! ’P^/àë BieareftaTo’o’ItoÎ; , «parce que Réchab leur résista.» La Vulgate traduitpar currus falcati, «des chars armés de faux.» Plusloin, Jud., iv, 3, 13, il est question des neuf cents charsde Jabin, roi des Chananéens. Cf. Jud., iv, 7, 15, 16; v, 11, 28. Les Septante traduisent par âpu.aTa <jt8° ip5, etla Vulgate par currus falcati, Il est fort douteux cepen--dantque cette interprétation soit exacte, car ni chez lesÉgyptiens ni chez les peuplés d’Asie on ne connaît dechars armés de faux à cette époque. On ne les connutdans l’Asie occidentale que du temps de Cyrus. Xénot. i, p. 235, fig. 67; les Héthéens. IV Reg., vii, 6. Leschars des Héthéens sont représentés sur les monumentségyptiens. Ils sont beaucoup moins ornés que ceux d’Egypte.La caisse est fermée sur les côtés. Voir t. i, fig. 582, col. 1882. D’après le poème de Pentaour, qui décrit lescampagnes de Ramsès II contre les Héthéens, les charsformaient une des principales forces de leur armée. Chacunde leurs chars contenait trois personnes, le conducteur, un soldat armé d’une lance et d’un bouclier et unarcher. Records of the past, t. ii, p. 69; Wilkinson, Manners, p. 258, 259, fig. 84, 5; F. Lenormant-Babelon, Histoire ancienne des peuples de l’Orient, t. ii, p. 222.
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196. — Char emporté comme butin. D’après Botta, Monument de Ninive, t. 1, pi.
20.
phon, Cyrop., vi, 1, 27, 30. Les chars des Chananéensdevaient donc être simplement recouverts d’une plaquede fer.— Les monuments phéniciens et cypriotes repré--sententdes chars (fig. 194), mais ils ne sont pas d’uneépoque très ancienne.
IV. Chars des Madianites, des Philistins, desHéthéens, etc. — Les Madianites, Jud., v, 28, et lesPhilistins avaient également des chars de guerre. Dansles combats qu’ils livrent à Saûl, ces derniers mettent enligne, dit le texte hébreu tel que nous le possédons aujourd’hui, trente mille chars. I Reg., xiii, 5. Ce chiffreparaît excessif pour un si petit peuple, aussi la plupartdes commentateurs ont-ils cru à une erreur de copiste; mais on n’a pu trouver jusqu’ici quel devait être le véritablechiffre. Cette leçon est en tout cas très ancienne, caries Septante et Josèphe, Ant. jud., VI, VI, 1, l’ontadoptée. La Bible mentionne encore parmi les peuplesqui avaient des chars: les Syriens, II Reg., viii, 4; III Reg., xx, 1, 21, 25; IV Reg., v, 9, 21, 26; vi, 14, 15, 17; les Iduméens, IV Reg., viii, 21; les Ammonites, I Par., xix, 6; les Éthiopiens, II Par., xiv, 9; d’après lespeintures égyptiennes, les chars éthiopiens avaient lamême forme que les chars d’Egypte. Wilkinson, Manners,
V. Chars des. Assvriens, des Chaldéens et desBabyloniens. — Ils sont mentionnés dans Judith, iv, 13; ix, 9; Jer., iv, 13; l, 37; li, 21; Ezech., xxiii, 24; xxvi, 7, 10. Les monuments assyriens, comme les monumentségyptiens, nous fournissent de nombreuses représentationsdes chars de guerre. Le roi montait toujours sur un char.Les officiers de haut rang faisaient de même. Les charsde guerre assyriens étaient en bois, ouverts par derrière, mais fermés sur le côté et par devant. La caisse du charétait magnifiquement ornée. Les roues étaient au nombrede deux et placées soit tout près de l’arrière, soit à l’arrièremême, de sorte que, comme dans les chars égyptiens, le centre de gravité était à l’avant. La jante de laroue était large et composée généralement de deux cerclesintérieurs plus étroits et d’un troisième extérieur pluslarge, fait d’une ou de plusieurs pièces. Le tout étaitmaintenu par un cercle de métal. Les rais étaient aunombre de six ou huit; ils étaient de grosseur moyenne.Les roues étaient attachées à un essieu fixe sur lequelelles tournaient. La caisse était placée directement surl’essieu et sur le timon, sans être soutenue par des ressorts.Le timon, attaché à l’essieu, soutenait d’abord lacaisse du char en suivant une ligne horizontale; il se
relevait en courbe en avant du char, jusqu’à peu près àla hauteur du sommet du char, puis suivait une lignedroite. Vers l’extrémité était fixé un joug auquel on attachaitles chevaux. L’extrémité elle-même était ornée delèles d’animaux, de bœufs, de chevaux ou même de sujetsplus compliqués. Une ou plusieurs barres, probablementde métal, attachaient le timon au haut de la caisse. ILn’y avait qu’un seul timon. Sur un seul monument publiépar Layard, Monuments of Nineveh, t. ii, pi. 24, on a cruvoir un char à deux timons; mais le dessin représente laperspective de deux chars.
L’attelage était composé de deux ou trois chevaux(lig. 195), jamais de quatre. Deux des chevaux étaient attachésau timon par le joug, le troisième à une corde. Il était
pas de carquois sur les côtés, mais une case destinée àrecevoir les flèches est fixée à l’avant de la caisse. Le toutest couvert d’une ornementation formée de rosaces etd’un entrelacement de lignes dentelées. Les timons sontpleins et sans ornements, sauf la tête qui les termine.A la place de la pièce de tapisserie des chars de la périodeprécédente, ils ont seulement une barre ou même unesimple corde. Il n’y a pas de bouclier suspendu à l’arrière, mais parfois une draperie, ce qui supposerait quela partie supérieure est fermée par une barre. Voir t. ii, fig. 73, col. 225. Cf. G. Rawlinson, Thé fine great monarchies, t. i, p. 407, 413, n° n; p. 414, 416; Layard, Monuments of Nineveh, t. ii, pi. 42, 47, etc.; Botta, Monument de Ninive, t. ii, pL 76; Place, Ninive et
Char perse de Persépolis. British Muséum. D’une photographie.
là en supplément et destiné surtout à remplacer un desdeux autres, en cas d’accident. Les jougs étaient de formestrès variées, tantôt droits, tantôt courbes. Voir Joug. Onrencontre dans les monuments assyriens deux types dechars. Ceux de la période fa plus ancienne sont plus baset plus courts, les roues ont six rais et sont de diamètreplus petit, la caisse est pleine et ornée seulement d’unebordure. Ils sont arrondis sur le devant comme les charségyptiens et les chars grecs; enfin de chaque côté sontsuspendus des carquois. On y voit aussi, à la partie supérieurede l’arrière, une poche pour recevoir la partie inférieurede la lance. Cette poche a souvent la forme d’unetête humaine. Du haut de l’avant de la caisse à l’extrémitédu timon s’étend une ornementation qui sembleêtre une tapisserie tendue sur un cadre de bois. Parfoisaussi on voit un bouclier suspendu à l’arrière de la caisseet formant comme une porte. Voir t. i, fig. 47, col. 305; fig. 229, col. 905; fig. 260, col. 983; fig. 367, col. 1263; t. ii, fig. 37, col. 99. Cf. G. Rawlinson, The five greatmonarchies of the ancient Eastern world, 4e édit., 1879, t. i, p. 412, fig. i; Layard, Monuments of Nineveh, t. i, pi. 14, 22, 27; Botta, Monument de Ninive, t. ii, pi. 100.Les chars de la période plus récente sont plus hauts etplus larges, les roues sont d’un plus grand diamètre etont huit ravons. La caisse est de forme carrée. On ne voit
l’Assyrie, pi. 50, 51; F. Lenormant-Babelon, Histoireancienne des peuples de l’Orient, t. v, p. 54; Perrot, Histoire de l’art, t. III, pi. xii, et p. 625, fig. 307.
Le harnachement des chevaux est le même dans lesdeux périodes. Il consiste essentiellement dans une têtière, un collier et une sangle de poitrine. Le tout était ornéde rosettes d’ivoire, de nacre ou de bronze. Layard, Nineveh and Babylon, p. 177; Perrot, Histoire de l’art, t. ii, p. 767, fig. 440. Les auteurs profanes parlent dansle même sens des chars assyriens. Ctésias, dans Diodorede Sicile, ii, 5, 4; 17, 1; 22, 2; Xénophon, Cyrop., ii, i, 5. Les chars assyriens portaient généralement trois ouquatre personnes. Place, Ninive, pi. 50, 51, 60; Saglio, Dictionnaire des antiquités grecques et romaines, art.Currus, t. i, p. 1634, fig. 2199. D’après le même Ctésias, ibid., les Assyriens auraient eu des chars armés de fauxdès la plus haute antiquité, tandis que Xénophon, Cyrop., vi, i, 30, en attribue l’invention aux Perses. Perrot etChipiez, op. cit., t. ii, p. 162, fig. 211, pi. x.
Les chars des rois assyriens étaient surmontés d’unparasol ou des insignes de la royauté, quand ils s’en servaienten dehors du champ de bataille. Voir t. i, fig. 263, col. 987. Cf. Layard, Monuments, t. i, pi. 21, 22; K. Lenormant-Babelon, Histoire ancienne, t. iv, p. 373. Un basreliefde Khorsabad, qui est au musée du Louvre, repré
sente un char d’une forme toute différente des chars ordinaires(fig. 196). Cf. F. Lenormant-Babelon, Histoireancienne, t. y, p. 40; Perrot, Histoire de l’art, t. ii, p. 100, fig. 23.
VI. Chars des Élamites et des Perses. — Isaïe, xxii, 6, mentionne les chars des Élamites. Dans ce passage, les Septante traduisent le mot hébreu rékéh paràviSdcTai avôpwTtoi è?’îmrotç, «des cavaliers sur des chevaux;» Aquila: èv ap[i.aTi àvOptônwv Smréuv, «un char surlequel sont montés des cavaliers,» et la Vulgate: currumhominis equitis, a le char d’un cavalier.» Au ꝟ. 7, lemême prophète annonce que la vallée de la Vision seraremplie de chars; la Vulgate traduit ce mot par qua’drigx. Les Élamites dont il est question ici sont des
equitum, «un homme qui monte un char de cavalierstraîné à deux chevaux.»
VII. Chars des-Séleucides. — Daniel, xi, 40, prophétisantles victoires du roi de l’aquilon, c’est-à-dire d’AntiochusIV Épiphane, parle des ch’ars de son armée. Le premierlivre des Machabées, i, 18, signale aussi des chars dansl’armée de ce roi qui envahit l’Egypte, et aussi dans celled’Antiochus V Eupator. I Mach., viii, G. Le char royal estnommé à part. II Mach., ix, 7. Les chars de l’armée desSéleucides étaient, comme les chars grecs de cette époque, formés d’une caisse dont les côtés étaient pleins et dont l’arrièreétait ouvert (fig. 198). Le second livre des Machabées, xm, 2, indique dans l’armée du même Antiochus V Eupatorla présence de trois cents chars armés de faux, à’puaTi
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198. — Char de combat grec. Bas-relief en terre cuite. Cabinet des médailles.
peuples d’Asie, associés souvent sur les inscriptions cunéiformesaux Babyloniens. Frd. Delitzsch, Wo lag dus Parodies, in-8°, Leipzig, 1881, p. 237. Dans le chapitre précédent, xxi, 7, Isaïe, prophétisant la chute de Babylone, rapporte ainsi ce que voit la sentinelle: «Elle vit un char, un couple de cavaliers, un chariot traîné par des ânes, un chariot traîné par des chameaux.» Ici encore le mothébreu est rékéb, et les Septante traduisent par «vaêâTaç, Aquila par apy.%, et la Vulgate par: currum duorwmequitum, ascensorem asini et ascensorem camélia Laversion syriaque et la version chaldéenne traduisentcomme la Vulgate. Les peuples qui sont ici désignés etqui doivent détruire Babylone, ce sont les Élamites et lesMédes. Is., xxi. 2. Nous savons par Xénophon que lesMèdes avaient des chars dans leur armée, et que Cyrusinventa, comme nous le dirons plus loin, les chars armésde faux. Xénophon, Cyrop., vi, 1, 29. Dans les chars desMèdes et des Perses, la caisse était assez élevée, les côtésétaient pleins, les roues avaient jusqu’à douze rais, le timonétait rattaché au-devant de la caisse par une tige. Voirlig. 197. Cf. Wilkinson, Manners, t. i, p. 241, fig. 73; Museo Borbonico, t. viii, pi. xxxvi. Hérodote, i, 188; vi, 86, parle de chais traînés par des ânes; mais il n’est pasquestion ailleurs qu’ici de chars traînés par des chameaux.Plus loin, Is., xxi, 9, un personnage monté dansun char annonce la chute de Babylone; le texte hébreude ce verset porte: rékéb iê sëmér pârâsim, «le chard’un homme, un couple de cavaliers;» les Septante traduisent: ovaSâTr,; ^jMwpïSoq, «un homme monté sur unchar à deux chevaux,» et la Vulgate: ascensor vir bigx
Sporaavijçdpa. Les successeurs d’Alexandre avaient empruntéces chars aux Perses. Xénophon en attribue l’inventionà Cyrus. «Ce prince, dit l’historien grec, abolitdans son armée l’usage des chars tels qu’étaient ceux desTroyens et des Cyrénéens, les seuls employés jusqu’alorspar les Mèdes, les Assyriens, les Arabes et les autrespeuples d’Asie. Il en fit construire d’une forme nouvelle.Les roues en étaient plus fortes, par là moins sujettesà se briser; l’essieu long, car ce qui a de l’étendue estmoins sujet à se renverser; la caisse, d’un bois épais, s’élevait en forme de tour, mais ne couvrait le cocherque jusqu’à la hauteur du coude, afin qu’il eût la facilitéde conduire ses chevaux; chaque cocher, armé de toutespièces, n’avait que les yeux découverts; aux deux boutsde l’essieu étaient placées deux faux de fer longues d’environdeux coudées et deux autres par dessous, dont lapointe tournée contre terre devait percer à travers lesrangs ennemis.» Xénophon, Cyrop., vi, 1, 29. Crésusadopta ces chars pour combattre Cyrus. Cyrop., VI, 2, 17.Les chars armés de faux figurèrent désormais dans toutesles armées asiatiques et dans celles des Séleucides. Xénophon, Anab., i, 7, 10; 8, 10; Quinte-Curce, iv, 25, 1; Tite Live, xxxvii, 11; Diodore de Sicile, xvii, 53.
VIII. Char de l’elxlql’E éthiopien. — Enfin le livredes Actes mentionne le char de l’eunuque de la reineCandace d’Ethiopie. Act., viii, 28-29, 38. Ce char devaitêtre plutôt un chariot de transport; l’eunuque, d’après lesActes, y était assis et lisait.
IX. Char d’Eue, char des chérubins, char aufiguré. — En dehors des chars de guerre, la Bible parle
encore du char de feu sur lequel le prophète Élie futenlevé au ciel. IV Reg., Il, 11, 12; Eccli., slvih, 9. —L’Ecclésiastique, xlix, 10, nous dit que le prophète Ézéchiela vu Dieu sur un char conduit par les chérubins.Voir Chérubins. — Les chars sont souvent pris poursymbole de la puissance. Ps. xix (hébreu, xx), 8; lxvii(hébreu, lxviii), 18; cv (hébreu, civ), 3. Dans ce dernierpassage, les Septante traduisent le mot rekûb, «char ou attelage,» par S’jvaareîa; , et la Vulgate parpotentias, «puissances.» Voir Chariot.
X. Bibliographie. — J. G. Wilkinson, The mannersand customs of the ancient JEgyptians, in-8°, Londres, 1878, t. i, p, 222-242; Textor de Ravisi, Études sur leschars égyptiens, dans le Congrès provincial français des
le but vers lequel tendait Judas, et c’est vers Dathemaiique, d’après le premier livre, marchait le héros asmonéen, puisque là l’appelaient les cris de détresse. Enfinla troisième, et la plus forte, nous montre dans Characaun mot syro - chaldéen, qui signifie «forteresse», munitio.Or, quand l’auteur de I Mach. mentionne Datheman, il dit, d’après la Vulgate: Et fugerunt in Dathemanmunitionem; mais il est plus que probable queces derniers mots étaient rendus en syro-chaldéen parN3-D inni, be-Dateman keraka’. Il faut ajouter à celala coutume qui aura sans doute prévalu de désigner Datheman, non par le nom propre, mais par l’appellationantonomastique Keraka, «la forteresse;» ce qui, dureste, ressort du premier livre, où, sur quatre fois qu’elle
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199. — Char romain. Musée du Tatlcan. D’après une photographie.
orientalistes, Égyplologie, bulletin I, t. ii, p. 439-464; G. Rawlinson, The five great monarchies of the Easternworld, 4e édit., in-8°, Londres, 1879, t. i, p. 406-420; W. Helbig, L’épopée homérique, trad. franc., in-8°, 1895, p. 160-198; Scheffer, De re vehiculari veterum, in-8°, Francfort, 1671; Ginzrot, Die Wagen und Fuhrwerke derGriechen und Rômer, in-8°, Munich, 1817.
E. Beurlier.
- CHARACA##
CHARACA (e’i? tôv Xâpaxa), localité mentionnéeune seule fois dans l’Écriture, II Mach., xii, 17. Elle étaitsituée à l’est du Jourdain, dans le pays de Galaad, etétait habitée par des Juifs appelés «Tubianéens». VoirTob, Tubin. La question, très difficile, qui se pose ici, est de savoir si nous sommes en présence d’un nomcommun ou d’un nom propre. — Le texte grec portel’article, et -/ipaxoc est l’accusatif de yâçiiX, «camp entouréde palissades.» De là on a conclu que Characa est «la forteresse» de Datheman, dont parle le récit parallèlede I Mach., v, 9, et dans laquelle s’étaient réfugiésles Juifs persécutés. Patrizi, De consensu utriusque libriMachabseorum, in-4°, Rome, 1856, p. 276, apporte àl’appui de cette opinion les raisons suivantes. La première, qu’il regarde à bon droit comme légère, c’est queCharaca, au second livre des Machabées, est placé dansla région de Tob, comme Datheman, au premier. Laseconde, plus grave, c’est que Characa était l’objeetif ou
est citée, elle apparaît trois fois sous la simple dénominationde «forteresse», keraka (cf. I Mach., v, 9, 11, 29, 30), et ceci nous explique pourquoi l’auteur du secondlivre a employé le nom commun plutôt que le nom propre.
— Ces derniers arguments ne manquent pas d’une certainevaleur; mais l’hypothèse ne nous paraît pas nonplus sans difficultés. On comprend que l’auteur du premierlivre des Machabées, après avoir nommé une premièrefois «la forteresse de Datheman», se contente del’appeler dans la suite «la forteresse», to ô^ypra^aMaisl’auteur du second livre, n’en faisant qu’une seule mention, restait-il intelligible en la désignant seulement sousle nom de-bv -/âpixa, «le camp ou le retranchement?» Nous ne le croyons pas, à moins que cette expressionne fût devenue, dans la bouche du peuple, un vrai nompropre, l’équivalent de Datheman. Et, dans ce cas, resteencore un point obscur. On lit, I Mach., v, 29, que Judaset ses compagnons partirent de Bosor pour venir à «laforteresse», tandis que, d’après II Mach., xii, 17, ilsvinrent de Casphin à Characa, à une distance de septcent cinquante stades. La concorde, d’ailleurs remarquable, établie entre les deux récits par Patrizi, ouvr.cit., p. 218, 220, fait, il est vrai, disparaître cette apparentecontradiction; mais nous nous demandons si sonagencement des textes n’est point trop ingénieux. Il placedu reste Casphin à l’ouest du Jourdain, ce qui nous
ÏI. - 19
semble moins conforme aux données exégétiques et géographiques. — Il est donc permis de voir un nom propredans Characa: c’est ainsi que l’ont entendu la Vulgate etla Peschito, qui porte JLs» 9, Karka'. Mais où retrouver cette localité? Assurément il est impossible de l’assimiler à l’ancienne XapïXfiwôï (Qir Mô'àb, Is.., XV, 1), aujourd’hui El-Kërak, située à l’est de la mer Morte, ausud à'Er-Rabbali (Rabbath-Moab). Celle ville moabiteétait loin du pays de Tob et dans une direction diamétralement opposée à celle que devait suivre Judas Machabée. Il faut évidemment la chercher au milieu d’autresplaces où étaient bloqués les Juifs, comme Barasa (Bosra), Bosor (Bousr el-Hariri), etc. Voir Bosor 2, 3, t. i, col. 1857, 1858, et Carnion. Quelques auteurs la reconnaissent dans El-Harâk, sur Youadi el-Ghar, au nordouest de Bosra, au sud-ouest de Bousr el-Hariri.Cf. K. Furrer, Zur ostjordanischen Topographie, dansla Zeitschrift des deutschen Palàstina-Vereins, Leipzig, t. xiii, 4890, p. 200. Il nous semble qu’elle correspondaussi bien, et même mieux au point de vue onomastique, à El-Kérak, située au sud-est d’El-Harâk, sur Youadiet-Ta’al ou Ta lit. Voir la carte de Manassé oriental.Placé à l’embranchement de deux ouadis, à une altitudede 683 mètres, cet endroit a dû avoir une certaine importance. Cette identification souffre cependant une difficulté, c’est que la distance qui sépare El-Kérak deKliîsfîn ( emplacement supposé de Casphin) est loind'égaler les sept cent cinquante stades (près de 139 kilomètres) indiqués par le texte sacré, II Mach., xii, 17.D’autres savants croient retrouver Characa à Araq-elEmir, à seize kilomètres au sud-ouest d’Ammàm.Cf. R. von Riess, Bibel-Atlas, 2 B édit., Fribourg-enBiisgau, 1887, p. 8. La distance marquée trouve mieuxici son application; mais, outre que la ressemblanceonomastique est moins complète, la marche de JudasMachabée nous paraît aussi moins facile à suivre. —Fautil enfin ne voir ici qu’une contrée, qui aurait tiréson nom d’un «camp» ou d’une «forteresse», ce quesemblerait indiquer le texte sacré en disant que Timothée ne fut pas rencontré «dans ces lieux», èit’t twv'Ô/tuv, II Mach., Xiï, 18? C’est une question difficile àtrancher. Nous avons exposé et discuté les éléments duproblème: la solution ne repose pas seulement sur l’explication du mot et sur l’assimilation des noms; elle dépend aussi de la manière dont on établit l’harmonie entrele double récit de I Mach., v, 9-54, et II Mach., xii, 10-31, et dont on comprend l’expédition du héros asmonéen au
pays de Galaad.
A. Legendre.
1. CHARAN (hébreu: Kerân; Septante: Xappiv), dernier fils de Dison, un des fils de Séir l’Horréen.Gen., xxxvi, 26; I Par., i, 41.
2. CHARAN. Le texte de la Vulgate, Tob., xi, 1, ditque lorsque l’ange Raphaël et le jeune Tobie retournèrentà Ninive, ils arrivèrent le onzième jour de leur voyageà Charan, qui est à moitié chemin d’Eebatane à Ninive.Ce nom est altéré ou du moins inconnu. Il ne peut êtrequestion de la ville syrienne de Haran (voir Charan 3), qui n'était pas sur la route, et aucun auteur ancien nementionne de Charan dans ces parages. Le texte grec ordinaire n’indique aucune ville dans Tob., xi, 1. Un textegrec amplifié (B) porte Katrapewv, au lieu de Charan( Fritzsche, Exegetisches Handbuch zu den À pokryphen, part. ii, in-8o, Leipzig, 1853, p. 98), leçon également inacceptable. L’ancienne Italique lisait Charam ou Caracha; le syriaque a Bazri. Il est actuellement impossible de rétablir la véritable leçon. H. Reusch, Das Buch Tobias, in-8o, Fribourg, 1857, p. 103-104; C. Gutberlet, Das BuchTobias, in-8o, Munich, 1877, p. 269.
3. CHARAN (Xappdcv). Le livre de Judith, v, 9, et les
Actes, vii, 2, 4, écrivent sous la forme Charan le nomde la ville de Syrie qui est appelée ailleurs Haran. VoirHaran.
- CHARANÇON##
CHARANÇON, nom vulgaire donné à la plupart desespèces d’insectes coléoptères qui forment la nombreusefamille des Curculionides ou Rhyncophores. Ce qui lescaractérise est surtout ce rostre ou bec plus ou moinsallongé, qui leur à fait donner le nom de Rhyncophoresou porte-becs. Ils vivent sur les végétaux de toute espèce; c’est à l'état de larve qu’un bon nombre d’entreeux sont très nuisibles aux céréales. En particulier lecharançon du blé (calandra granaria) (fig. 200), queles Égyptiens nommaient Mkit, cause parfois d'énormes
200. — Charançon du blé.a, grain de blé percé par le charançon pour y déposer son œuf.— 6, larve dans un grain de blé. — c, nymphe. — d, insecteparfait fortement grossi. — e, grandeur naturelle.
dégâts dans les greniers. Ce charançon et nombre d’autres espèces comme le charançon du palmier (voir Calandre, col. 54), du pin, du chêne, du gland, devaientexister autrefois en Palestine, où l’on constate actuellement leur présence. Voir L. Fairmaire, Les Coléoptères, in-12, Paris, 1889, p. 247; M. Girard, Traité d’entomologie, 1873, t. i, p. 691. Mais la Bible ne les nomme pas. Lehargol, dans lequel quelques auteurs ont cru le reconnaître, est le nom d’une espèce de sauterelle. Il en fautdire autant de V’arbéh, autre espèce de sauterelle nommée dans le même verset du Lévitique, xi, 22. Les versions ont traduit ce dernier mot par <jpo0-/o; , bruchus, qui est le nom d’une sauterelle, Théophraste, Frag., xiv, 4, par conséquent d’un orthoptère, tandis que le motfrançais correspondant, «bruche,» désigne un coléoptère d’une tribu voisine des charançons proprement dits
ou curculionides.
H. Lesêtre.
- CHARBON DES BLÉS##
CHARBON DES BLÉS, appelé aussi Nielle. Hébreu: siddâfon, Deut., xxviiii, 22; III Reg., viii, 37; II Par., vi, 28; Amos, iv, 9; Agg., ii, 17; Septante: àvc|ioç60p! oi, Deut., xxviii, 22; II Par., vi, 28; è^nuptaiio; , III Reg., vin, 37; Ttûpiouiç, Amos, iv, 9; «copia, Agg., ii, 17; Vulgate: aer corruptus, Deut., xxviii, 22; III Reg., viii, 37; serugo, II Par., vi, 28; ventus urens, Amos, iv, 9; Agg., Il, 18. — On trouve une fois dans l’hébreu sedêfâh, IV Reg., xix, 26: Septante: iraTïjpa; Vulgate: arefactaest; et dans le passage parallèle, Is., xxxvii, 27, sedêmdh, avec un d, mem, mis par erreur pour un s, phé; Septante: ayptaaziç; Vulgate: exarcuit. Cf. le participesedûfôf, Gen., xii, 6, 23, 27; Septante: àveu.ôj ûopoi; Vulgate: percussx uredine, vento urente percussx.
I. Description. — Champignon entophyte, de la familledes Ustilaginées, vivant sur diverses graminées des cultures(blé, avoine, orge, etc.) et même sur plusieurs autressauvages. Les espèces, assez nombreuses, se rangent dans
le genre Ustilago, et la plus répandue est l’Ustilago Carbo(fig. 201). — Les spores, souvent mêlées aux graines descéréales, germent avec elles, et presque simultanément, sur les sillons où le semis a été opéré. Il en sort un courtfilament, invisible à l’œil nu, nommé promycélium, quidonne naissance au bout de peu de jours à d’autres sporessecondaires, d’une extrême petitesse, ou sporidies, destinéesà se développer immédiatement, si le vent les porteen un milieu favorable"; autrement elles périssent. Cemilieu n’est autre que l’épiderme du blé naissant; leparasite pénètre par un stomate, vers le collet de la jeuneracine, pousse un long tube, qui se ramifie à l’intérieur
201. — Ustilago Caria. «, épi d’orge charbonné. — 6, groupe triftore vu par le (Jo3, grossi. — c, spores à divers états de germination, grossiesenviron 1 000 fois. — d, Promycelium.
des tissus de la plante nourrice, jusqu’à l’envahir totalement.C’est le vrai mycélium, dont les branches innombrablesne se contentent pas de serpenter dans les espaceslibres entre les cellules, mais poussent des suçoirs jusquedans la profondeur de leur protoplasma. Malgré la pénétrationintime de tous ses organes par le parasite, le blécontinue son développement normal en apparence. L’étatmaladif et les lésions internes ne se manifestent qu’aumoment où le charbon va former ses spores, juste à l’époqueoù le blé va lui-même fleurir. Alors les filamentsmycéliens se pelotonnent en un glomérule mucilagineuxà l’intérieur de l’ovaire de la graminée, se substituent àla graine qui devait y prendre naissance, et remplissentl’organe d’une multitude de cellules noires, imitant lapoussière de charbon, qui ne sont autres que les sporeset qui ont donné son nom à la maladie. À la maturitél’ovaire charbonné se rompt, et les spores incluses sontmises en liberté. Celles-ci ne germent pas immédiatement, mais restent à un état de vie latente, qui peut seprolonger de longues années, jusqu’à une prochaine saisonfavorable, au retour des pluies.
Les anciens considéraient les maladies du charboncomme une dégénérescence spontanée des grains. Adansonet B. de Jussieu reconnurent leur origine parasitaire.Il ne faut pas confondre le charbon avec la carie des blés, champignon entophyte du genre Tilletia, très voisin del’Ustilago par ses caractères et son mode de vie. Il endiffère par le promycelium non cloisonné et les filaments
sporigènes, qui ne subissent pas d’altération mucilagineuse.Enfin les spores ne sont pas mises en liberté parla rupture spontanée de l’organe qui les renferme. Laprincipale espèce est le Tillelia Caries. F. Hy.
II. Exégèse.— Le siddâfôn est un des fléaux dont Dieumenace son peuple s’il est infidèle, Deut., xxviii, 22; et qu’il détournera s’il vient le prier dans son temple.III Reg., viii, 37-40; II Par., vi, 28. Ce fléau sévit plusieursfois. Amos, iv, 9; Agg., ii, 18 (hébreu, 17). Lestraducteurs grecs et latins ne sont pas bien fixés sur lesens de ce mot, qu’ils rendent de façons très diverses.D’après son étymologie, sadaf, «brûler, noircir,» lesiddâfôn pourrait être le charbon ou la carie. L’unionhabituelle de ce fléau avec le yêrâqôn, autre maladie descéréales, la rouille, rend plausible cette opinion maintenantassez suivie. Quant à distinguer entre le charbonou la carie, il est probable que les Hébreux, commesouvent les cultivateurs de nos jours, confondaient lesdeux maladies à cause de leur étroite ressemblance.
E. Levesque.
- CHARBONS ARDENTS##
CHARBONS ARDENTS (hébreu: gahélét, d’unradical gâl}al, probablement analogue à l’arabe gâham, «allumer le feu,» Gesenius, Thésaurus, p. 280, etgahâlê’êS, e charbons de feu;» Septante: av6paxe; «vpé; , aMSpaxti, «brasier;» Vulgate: carbones, ignis, pruna).La Sainte Écriture parle assez souvent de charbons ardents, mais en différents sens.
1° Sens propre. — Le charbon noir (non enflammé), péfyâm, se change en gahélét, «charbon ardent», Prov., xxvi, 21. Exceptionnellement, pêhâm, qui vient du radicalpâham, «être noir,» désigne aussi des charbons enflammés.Is., xliv, 12; liv, 16. Ils sont employés pour brûlerl’encens. Lev., xvi, 12; pour cuire le pain, rôtir la viande, Is., xliv, 12, 19, et les poissons, Joa., xxi, 9; Tob., vi, 8; vin, 2; pour chauffer la forge, Is., liv, 16, faire bouillirla chaudière, Ezech., xxiv, 11, et alimenter les réchaudsau moyen desquels on se garantit du froid. Jer., xxxvi, 22; Joa., xviii, 18. Le Sage, pour marquer le danger desmauvaises fréquentations, les compare aux charbons enflammésqui brûlent les pieds de ceux qui marchentdessus. Prov., vi, 28.
2° Sens métaphorique. — 1° Dans sa description ducrocodile, l’auteur de Job, xli, 12, dit de l’animal:
Son souffle allume des charbons,
Et la flamme se précipite de sa bouche.
Par cette métaphore hardie, l’écrivain sacré veut donnerune idée du curieux effet de lumière qui se produitquand le saurien projette violemment de l’eau par labouche ou les narines, sous les rayons d’un soleil éclatant.Voir Crocodile. — 2° Le charbon ardent est parfoisconsidéré comme le dernier reste qui pourrait rallumerle feu. Il devient alors l’image du dernier héritier d’unefamille. Pour apitoyer le roi en faveur d’Absalom, unefemme de Thécué, à laquelle Joab a fait la leçon, vienttrouver David et se plaint qu’on veuille éteindre «le charbonqui reste», c’est-à-dire mettre à mort son dernierenfant. II Reg., xiv, 7. La Vulgate rend ici le mot gahélétpar scintilla. C’est sous cette forme d’ «étincelle» et nonde «charbon enflammé» que la métaphore a passé dansnotre langue. La locution proverbiale dont se sert Notre-Seigneur, à la suite d’Isaïe, xui, 3, «ne pas éteindre lamèche qui fume encore,» Matth., xii, 20, n’est pas sansanalogie avec celle du livre des Rois, quant à la formesinon quant au sens. Isaïe, xlvii, 14, se sert aussi del’image du charbon pour signifier qu’il n’y aura plusde maisons, quand il dit qu’après la ruine de Babylone ilne lui restera plus «ni charbon auquel on se chauffe, nifeu devant lequel on puisse s’asseoir». — 3° Le Siraciderecommande de «ne pas enflammer les charbons desméchants», c’est-à-dire de ne pas exciter leurs mauvaisinstincts, même par de justes remontrances, «de peurd’être consumé par le feu de leurs forfaits.» Eccli., viii, 13. L’auteur du Psaume cxx (cxix), 4, dit également de la langue astucieuse:
Ce sont les flèches du fort, cuisantes
Comme les charbons de genêts.
Saint Jérôme, Ep. lxxiii, ad Fabiolam, xv, t. xxii, col. 710, croit que l’arbuste ici nommé, le rotém, est legenévrier, et il prétend que le feu de son charbon se conserve sous la cendre jusqu’à une année entière. Cet arbuste n’est pas le genévrier, mais le genêt du désert, dont les racines servent à faire du feu. Voir Genêt. Les Arabes l’emploient à la préparation d’un charbon fortestimé au Caire, où il atteint un plus haut prix que les autres. Les racines sont plus fortes et plus compactes que les branches. Elles fournissent en conséquence un charbon durable et très calorifique, comme celui des bois durs. Par là s’explique la comparaison du Psalmiste.Cf. Tristram, The natural history of the Bible, Londres, 1889, p. 360. — 4o On lit au Psaume xviii (xvii), 9, 13; II Reg., xxii, 9, dans lequel David décrit l’apparition majestueuse de Jéhovah:
Le feu dévorant sort de sa bouche,
De lui jaillissent des charbons de feu…
De la splendeur qui l’entoure s’élancent des nuées,
De la grêle et des charbons de feu.
Dans ce passage, qui rappelle la théophanie du Sinaï, les charbons de feu, mêlés aux nuées et à la grêle, représentent les éclairs et la foudre. Au Psaume cxl (cxxxix), 11, c’est encore la foudre, par conséquent la vengeance divine, qui est appelée sur les méchants par ces paroles:
Que sur eux soient secoués des charbons de feu.
— 5o Enfin dans les Proverbes, xxvi, 21, on lit ces parolesque répète saint Paul, Rom., xil, 20:
Si ton ennemi a faim, donne-lui à manger;
S’il a soif, donne-lui à boire;
Ainsi tu amasseras des charbons sur sa tête,
Et Jéhovah te récompensera.
Les charbons de feu ne sont certainement pas ici un signe de malédiction. Appeler la malédiction sur son ennemi ne serait ni mériter la récompense de Jéhovah, ni «vaincre le mal par le bien», comme ajoute saint Paul, Rom., xii, 21. Cette expression est ainsi expliquée par saint Jérôme, Ep. cxx, ad Hedibiam, i, t. xxii, col. 983: «Quand nous rendons service à nos ennemis, nous élevons notre bienveillance au-dessus de leur malice, nous amollissons leur dureté, nous inclinons leur esprit irrité à la douceur et à la bonté; … et de même que le charbon pris sur l’autel par le séraphin purifia les lèvres du prophète, ainsi les péchés de nos ennemis sont purifiés, et nous vainquons le mal par le bien.» Les charbons ardents désignent donc ici les soucis cuisants, la honte salutaire, le remords que l’homme bienveillant suscitera par sa charité dans l’esprit de son ennemi. Les Arabes appellentde même «charbons du cœur» les inquiétudes qui dévorent l’âme, et dans leur langage, «laisser au cœur de quelqu’un des charbons de tamaris,» c’est lui causer un souci qui se prolongera, comme le feu que gardent longtemps les charbons provenant de cette plante. Cf. Gesenius, Thesaurus, p. 280.
3o Sens symbolique. — Les chérubins de la vision d’Ézéchiel, I, 13, ressemblent à des charbons ardents, à cause du vif éclat qui les pénètre et qui symbolise la majesté de Dieu et ses attributs terribles. Deut., iv, 24. — Dans une autre vision, x, 2, le même prophète voit entre les chérubins des charbons ardents que le Seigneur ordonne de répandre sur Jérusalem coupable. Les charbonsreprésentent ici le feu du ciel, celui de la colère divine, qui a consumé les villes criminelles d’autrefois, Gen., xix, 24, et que plus tard deux apôtres voudront faire descendre sur les cités de la Samarie. Luc, ix, 54.
— Enfin, dans la vision où il est investi du ministère prophétique, Isaïe, vi, 6, voit un séraphin qui tient un caillou pris au foyer de l’autel et lui en touche les lèvres pour le purifier. Les Septante appellent ce caillou un «charbon de feu»; mais en réalité c’est une pierre chauffée dans un brasier et remplissant ensuite le rôle du charbon ardent. Il y a ici un symbole de purification indiqué par le texte même du prophète.
H. Lesêtre.
CHARCAMIS (hébreu: Karkemîš; Septante: Χαρμείς, dans Jer., xlvi, 2; ils l’omettent II Par., xxxv, 20, et Is., X, 9; inscriptions assyriennes: Gar-ga-miš ou Kar-ga-miš; égyptiennes: Quairqamaša ou Karkamiša), ville très ancienne, située sur la rive droite du haut Euphrate, et, depuis la chute de Cadès dans les incursions des pharaons de la xviiie et de la xixe dynastie, l’une des principales capitales de la confédération héthéenne et siège d’un roi puissant (fig. 202).
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202. — Roi de Charcamis.
Stèle de basalte. British Muséum.
Elle était située sur la route qui mettait en communication l’Egypte et la Palestine avec l’Assyrie et la Babylonie, le désert empêchant de se rendre en droite ligne d’Egypte à Babylone, et la route moins septentrionale et moins longue de Thadmor ou Palmyre n’étant pas encore ouverte au commerce et étant peu praticable aux armées.Cette ville avait été conquise par Thothmès III, pharaon de la xviiie dynastie, et même déjà peut être par Thothmès Ier; Ramsés II et Ramsès III durent lutter avec ses troupes, quand ils entreprirent d’imposer leur joug à la confédération héthéenne. Maspero, Histoire de l’Orient, 1886, p. 190 et 199-200, p. 220 et 232: Recordsof the Past, t. ii, p. 67; nouv. sér., t. v, p. 38; t. vi, p. 34. Charcamis trouva bientôt après des ennemis plus voisins et plus redoutables, Théglathphalasar Ier, roi d’Assyrie, Salmanasar II (fig. 203) et ses successeurs, qui dans leurs nombreuses expéditions contre la Syrie, la Phénicie et la Palestine, la pillèrent et la rançonnèrent jusqu’à ce que Sargon mît fin à son indépendance et lui donnât un gouverneur assyrien, pour s’assurer la route de l’Asie occidentale et de l’Égypte. Isaïe, x, 9, fait allusion, dans sa prophétie contre l’Assyrie, à la prise de cette ville par le roi de Ninive. C’est la première fois qu’elle est nommée dans l’Écriture. Elle y est nommée une seconde fois à l’occasion de la campagne de Néchao II. Elle avait conservé sous la domination de l’Assyrie son importance commerciale. Celui qui la gouvernait pouvait aspirer au titre de limmu ou consul-éponyme, comme les plus hauts fonctionnaires de la cour assyrienne et comme le roi lui-même. Voir The Cuneiform Inscriptions of the Western Asia, t. i, pl. 42, 1. 74; A. Schrader, Keilinschrifen und Geschichtsforschung, in-8o, Giessen, 1878, p. 221-225. Quand l’empire assyrien eut succombé, la possession de cette ville tenta le roi d’Egypte. En 608, le pharaon Néchao II voulut prendre sa part des dépouilles de l’Assyrie en conquérant l’Asie occidentale et la route de l’Euphrate jusqu’à Charcamis, dont il s’empara, après avoir battu à Mageddo Josias, roi de Juda, qui refusait de lui livrer passage et qui périt dans le combat; il y laissa même une garnison égyptienne. Nabopolassar, roi de Babylone, regarda la prise de cette ville comme une menace pour son propreroyaume; et, en 603, il envoya contre le roi d’Égypte son fils Nabuchodonosor. Néchao vint à sa rencontre pour défendre sa nouvelle conquête, mais fut totalement battu aux environs de Charcamis, perdit ses conquêtes asiatiques et fut poursuivi jusqu’à Péluse: là Nabuchodonosorapprit la mort de son père et se hâta de rentrer à Babylone, non plus en suivant la longue route de Charcamis, mais en se lançant à travers le désert à la tête d’une légère escorte. Jer., xlvi, 2; II Par., xxxv, 20; cf. II (IV) Reg., xxiii, 29; Josèphe, Ant. jud., X, vii, 11.
Malgré la conquête assyrienne, cette ville resta toujours un centre de commerce très actif entre l’Orient et la Mésopotamie et la Babylonie d’une part, et de l’autre l’Asie Mineure, la Phénicie et l’Égypte. L’Euphrate yoffrait un passage facile, et y commençait à devenir navigable: c’était un lieu tout indiqué pour les échanges. Aussi les textes assyriens mentionnent-ils souvent, comme un poids connu partout, la mine de Charcamis. The Cuneiform Inscriptions of the Western Asia, t. iii, pl. 47, n. 1, 6 et 9. On peut donc admettre avec vraisemblance qu’insensible aux changements politiques, elle fut davantage atteinte par un changement d’itinéraire des caravanes pour la traversée du haut Euphrate, qui vint lui enlever sa prospérité et la réduire à l’abandon. De fait, sous les Perses, qui succédèrent aux Babylonienscomme ceux-ci avaient remplacé les Assyriens, on ne trouve plus de mention de cette ville, et bientôt l’ancienne capitale héthéenne, ensevelie sous ses propres ruines, tombe dans le même oubli que les capitales assyriennes, laissées elles-mêmes quelque temps inhabitées, comme en témoigne Xénophon, Anab., iii, 4, et bientôt après devenues des amas de décombres. Le nom de Charcamis fut conservé par la Bible et par Josèphe; à notre époque, on l’a retrouvé dans les inscriptions égyptiennes et assyriennes; mais la situation exacte de cette villeest restée ignorée jusque dans ces dernières années.
203. — Ambassadeurs de Charcamis payant te tribut à Salmanasar II, roi d’Assyrie. D’après The Bronze Ornaments of the Palace Gates of Balawat, E, 4.
Benjamin de Tudèle et Bochart, suivis de la plupart des anciens, Calmet, Commentaire littéraire sur Isaïe, x, 9, édit. de 1714, p. 125; sur IV Rois, xxiii, 29, édit. de 1721, p. 716, la placèrent à Circésium, actuellement Abou-Serai, sur la rive gauche de l’Euphrate, au confluentdu Chabour; l’identification reposait d’abord sur la ressemblance des deux noms, biblique et classique, et ensuite sur ce fait que Circésium, comme Charcamis, était situé sur l’Euphrate, à l’endroit où l’on traversait communément ce fleuve. Ammien Marcellin, 1. xxiii, c. 5. Mais on n’a pas encore trouvé de ruines héthéennes à Circésium; de plus, les textes assyriens lui donnent le nom de Sirhi et la distinguent soigneusement de Garga-niis. G. Rawlinson, guidé par les textes assyriens, constata que Charcamis devait être située beaucoup plus haut sur le cours de l’Euphrate, et indiqua comme sa situation probable Hiérapolis, Maboug dans les textes syriaques, — l’Ancien Testament syriaque remplace, eneffet, le nom de Charcamis par celui de Maboug, — actuellement Menbidj. G. Rawlinson, The five great monarchies, 4e édit., Londres, 1879, t. ii, p. 67. M. Maspero, s’appuyant sur les inscriptions égyptiennes qui traçaient l’itinéraire des pharaons en Asie, rejeta également le sitede Circésium, et admit comme certain celui de Maboug. De Charchemis oppidi situ et historia antiquissima, 1872, p. 14 et suiv.; Histoire des peuples de l’Orient, 1886, p. 180. — Nöldeke arriva à la même conclusion négative quant à Circésium, mais donna la préférence à Kala’at Nadjem, Gôtting. Nachricht., 26 janv. 1876, n. 11, 13, 15; cette localité est située un peu à l’est de Maboug, et toujours sur la rive droite de l’Euphrate. En effet, la Bible et les textes assyriens placent la capitalehéthéenne sur l’Euphrate. Or Maboug en est assez éloignée. — À son tour, Eb. Schrader, Keilinschriflen und Geschichtsforschung, 1878, p. 225, montra par les inscriptions assyriennes que Kala’at Nadjem est encore tropméridionale, que, spécialement d’après l’inscription de Samsi-Ramman, ibid., p. 223, Charcamis était située en face de Kar-Salmanasar, plus anciennement Tul-Barsip, et au nord du confluent du SaJjour. — Déjà, en1876, Georges Smith, quelques jours avant sa mort, avait exploré cette région, particulièrement les Jeux sites de Yarabolous et de Biradjik (suivant sa transcription], l’un sur la rive droite, l’autre sur la rive gauche de l’Euphrate, y avait remarqué des ruines héthéennes considérables, et avait identifié la première avec Charcamis, d’après ses notes, publiées par Delilzsch, Wo lag das Paradies, p. 266; voir aussi Eb. Schrader, Keileinschr. und Geschichtsf., p. 225. — H. Sayce, The Academy, 4 novembre 1876, p. 454, et Delitzsch admirent cette identification, ouvr. cit. — J. Menant, Mémoires de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, t. xxxii, part. ii, 1891, p. 201-273, montra, p. 236-271, que de ces deux amas de ruines, celui de la rive gauche de l’Euphrate était bien Tul-Barsip = Kar-Salmanasar, et celui qui se trouve sur l’autre rive, un peu au sud, Charcamis. (Voir la carte d’Assyrie, t. i, vis-à-vis la col. 1147.) Cette situation est exactement celle qu’indiquent les textes assyriens, notamment celui d’Assur-nazir-apal, roi de Ninive, qui, venant d’Assyrie, traverse d’abord l’Euphrate avant d’entrer dans Charcamis, puis rencontre à l’ouest le fleuve Apri’, l’Afrin actuel; l’Arante ou l’Oronte, le Labnana ou Liban, et la mer du pays d’Aḥarru, la mer Méditerranée. Voir Menant, ouvr. cit., p. 228-232, 240, et Annales des rois d’Assyrie, p. 88-89.D’ingénieux rapprochements permettent de croire que M. J. Menant a retrouvé, parmi les textes exhumés à Djerâblus, le nom même de la vieille capitale. Ce nom est composé de deux signes idéographiques, l’un ayantl’apparence d’une flèche, l’autre d’une sorte de fleur jointe au déterminatif en forme de cercle qui désigne les dieux: or cette fleur jointe au cercle est précisément le nom du grand dieu figuré sur le bas-relief de Yasili-Kaïa. Le nom de la capitale héthéenne serait donc composéd’un nom commun, puis d’un nom propre de dieu. D’autre part, Charcamis se décompose tout naturellement, comme l’avait déjà entrevu Gesenius, en Char-Chamos, «forteresse du dieu Chamos.» — Le nom actuel, Djirbâs ou Djerâbis, d’où Maundrell a fait à tort Djerabolus, par une fausse identification avec Hiérapolis-Maboug, paraît provenir du nom grec de cette localité, Ὠρωπός ou Ἐυρωπός. Voir Isidore de Charax, Mansiones Parthicæ, dans les Geographi græci minores, édit. Didot, t. i, p. 244 et note 3; Pausanias, x, 29, édit. Didot, p. 532. — Après la mort de G. Smith, la localité fut fouillée par Henderson, et les objets ou textes découverts furent déposés au Musée britannique de Londres. Cf. Transactions of the Society of Biblical Archæology, t. vii, p. 429.
À en juger par ses ruines, la cité proprement dite n’était pas très grande, et n’avait que trois kilomètres de tour environ; mais ses faubourgs se prolongeaient dans la direction du sud, le long de l’Euphrate. Le côté de la ville que le fleuve ne protégeait pas était défendu par un double rempart, encore présentement haut de huit à dix mètres. Au nord-est de l’enceinte oblongue ainsi formée se trouve un tertre où était la cité royale, et où l’on a retrouvé des ruines de palais et des restes de bas-reliefs; une déesse ailée et nue comme l’Istar-Vénusde Babylone, et coiffée d’une sorte de cône tronqué; des personnages velus d’une longue robe ou d’une courte tunique frangées, et chaussés des bottines à pointe recourbée, caractéristiques des monuments héthéens.Ces bas-reliefs tapissaient les parois d’une sorte de grande salle longue et étroite (vingt mètres sur cinq), analogue à celle des palais assyriens. Voir Perrot, Histoire de l’art dans l’antiquité, t. iv, p. 531 et 807-811; Vigouroux, Mélanges bibliques, 2e édit., p. 885-411.
E. Pannier.
CHARCHAS (hébreu: Karkas; Septante: Θαραϐά), le septième des sept eunuques du roi Assuérus. Esth., i, 10. D’après Oppert, Commentaire historique et philologique du livre d’Esther, dans Annales de philosophie chrétienne, janvier 1861, p. 25, c’est le nom persekarkaça, qui désigne un oiseau.
CHARDON. Hébreu: ḥoaḥ; Septante: ἄϰαν, IV Reg., xiv, 9; ἀϰχούχ II Par., xxv, 18; ϰνίδη, Job, xxxi, 40; ἄϰανθαι, Prov., xxvi, 9; Cant., ii, 2; Ose., ix, 6, et omis dans Is., xxxiv, 13; Vulgate: carduus, IV Reg., xiv, 9; II Par., xxv, 18; tribulus, Job, xxxi, 40; spina, Prov., xxvi, 9; Cant., ii, 2; paliurus, Is., xxxiv, 13; lappa, Ose., ix, 6.
I. Description. — Le chardon est un genre de plantes herbacées, épineuses, de la famille des Composées, tribu des Cynaroïdées. La tige, dressée, simple ou rameuse, est terminée par des capitules globuleux ou ovoïdes; les feuilles épineuses ou bordées d’épines; les fleurs égales, tubuleuses, en général pourpres ou quelquefois blanches; les écailles de l’involucre presque toutes terminées par une épine.
204. — Notobasis syriaca. D’après un spécimen du mont Sion,
Autrefois ce genre comprenait un très grand nombre d’espèces, mais on a créé à ses dépens plusieurs genres nouveaux. Cependant le langage vulgaire continue d’appeler du nom de «chardon» les diverses espèces de ces différents genres voisins; et même il applique improprement ce nom à beaucoup de plantes armées d’épines, qui n’ont avec lui qu’une ressemblance assez lointaine. Le chardon est une plante très nuisible à l’agriculture, qu’on a de la peine à détruire; il se propage très facilement, à cause de ses graines aigrettées que le vent transporteau loin. La Palestine est riche en chardons de tout genre. Parmi les Carduacées les plus communes, on peut citer le Carduus pycnocephalus, le Carduus argentatus, les Circium lanceolatum et arvense, et surtout le Notobasis syriaca (fig. 204) aux puissantes épines, répandu dans toute la Palestine. En dehors des Carduacées, mais dans les genres voisins, l’Atractylis comosa (fig. 205), le Carthamus oxyacantha, le Scolymus maculatus, sont très abondants dans les champs et les plaines de la Terre Sainte.
II. Exégèse. — Le ḥoaḥ est présenté dans l’Écriture comme une de ces mauvaises herbes qui poussent dans les ruines, Is., xxxiv, 13, et sont le signe d’une terre abandonnée, Ose., ix, 6; comme une plante très nuisible aux céréales, Job, xxxi, 40, croissant dans les champs à côté des lis ou anémones, Cant., ii, 2; comme une plante méprisable. IV Reg., xiv, 9; II Par., xxv, 18. Ce n’est pas un terme général pour indiquer les épines ou mauvaises herbes, mais une plante particulière, placée dans les énumérations à côté de l’ortie, Is., xxxiv, 13, ou lui répondant dans les membres parallèles d’un distique, Ose., IX, 6; mise comme terme de mépris en opposition avecle roi des arbres, le cèdre, dans la parabole du roi Joas.IV Reg., xiv, 9; II Par., xxv, 18. Tous les caractères duḥoaḥ conviennent très bien au chardon, pourvu qu’on entende toutes les plantes comprises sous ce terme vulgaire.
205. — Atractylis comosa. D’après un spécimen du couvent de Sainte-Croix, près de Jérusalem.
— Salomon dit dans les Proverbes, xxvi, 9:
Comme un ḥoaḥ qui vient en la main d’un homme ivre,
Ainsi est une belle maxime dans la bouche d’un insensé.
Plusieurs exégètes (Celsius, Hierobotanicon, t. 1, p. 470-479) croient plus juste de voir ici le prunellier, Prunus silvestris. Mais cet arbuste ne remplit pas les conditions indiquées plus haut; et les chardons à tige haute, forte, qu’on trouve encore dans la plaine d’Esdrelon, vérifient très bien la sentence des Proverbes. — Gesenius, Thesaurus, p. 497, et d’autres exégètes regardent ḥǎvâḥim, חוחים, de I Reg., xiii, 6, comme un pluriel irrégulier de ḥoaḥ pour ḥôḥim. Mais le sens de «chardons» ne convient pas bien dans cette phrase: «Les Israélites allèrent se cacher dans les cavernes, les chardons, les rochers, les antres et les citernes.» Dans cette énumération, on s’attend plutôt à trouver un nom signifiant quelque trou de rocher, comme traduit; la dernière édition de Gesenius, Hebräisches Handvwörterbuch, 1895, p. 226, en faisant toutefois remarquer qu’il y a là probablement une faute de copiste pour חירים, horim,» trou de rocher,» qu’on lit dans le chapitre suivant, I Reg., xiv, 11: «Et les Israélites sortent des cavernes, ḥaḥôrîm,» où ils s’étaient cachés.
E. Levesque.
CHARIOT (hébreu: ʿǎgâlah; Septante: ἅμαξα; Vulgate: plaustrum), véhicule traîné par un attelage debœufs et destiné au transport des voyageurs ou des marchandises, distinct du char de guerre, rékéb. Voir Char.
I. Chariots dans l’Écriture. — Les chariots sont mentionnés pour la première fois dans la Genèse. Le pharaon permet à Joseph d’envoyer un certain nombre de chariots pour ramener en Egypte les femmes et lesenfants de son père Jacob. Gen., xlv, 19, 21, 27; xlvi, 5. Après la sortie d’Égypte et le dénombrement des Israélites, les principaux de la nation offrent à Dieu des chariots couverts. Num., vii, 3. Ces chariots sont distribués aux lévites. Num., vii, (i-9. Lorsque les Philistins, que la présence de l’arche au milieu d’eux affligeait de maux nombreux, voulurent la renvoyer aux Israélites, ils la placèrent sur un chariot attelé de deux jeunes vaches.I Reg., vi, 7, 8, 10, 11, 14. David mit de même l’arche sur un chariot quand il la fit transporter à Sion. II Reg., vi, 3; I Par., xiii, 7, Le prophète Amos, ii, 13, parle ausside chariots remplis de gerbes.
II. Description. — Les chariots étaient en bois, puisque David s’en sert pour faire le feu d’un sacrifice. II Reg., xxiv, 22. Ils étaient parfois recouverts. Tels sont ceux qui sont offerts après le dénombrement. Num., vii, 3. — Les chariots égyptiens sont représentés rarement. On les voit cependant dans un camp à côté des chars (t. ii, fig. 36, col. 95). On voit également sur les monumentsles chariots dont faisaient usage les nations voisines, et qui durent à l’occasion être employés en Égypte. Le fond de la caisse est plat; sur les côtés s’élèvent des clôtures pleines ou à claire-voie; les roues, qui sont au nombre de deux, sont pleines et maintenues à l’essieu par deschevilles. Wilkinson, Manners and customs of the ancient Ægyptians, t. i, p. 249, fig. 80. Ces chariots ne sont pas couverts. Une peinture peut nous donner l’idée du chariot sur lequel fut transportée l’arche. Elle représente un chariot qui porte une barque sacrée sur laquelle est une momie. Il est formé d’un fond plat porté sur quatre rouesde huit rayons. Wilkinson, Manners, t. i, p. 237, fig. 69.Les chariots sont plusieurs fois représentés sur les monuments assyriens. Tantôt ils sont traînés par des chevaux, Layard, Monuments of Nineveh, t ii, p. 33-31; Perrot, Histoire de l’art, t. ii, p. 111, fig. 31; tantôt par des mulets, F. Lenormant-Babelon, Histoire ancienne des peuples de l’Orient, t. v, p. 114; tantôt par des bœufs; voir t. i, fig. 563, col. 1837; t ii, fig. 73, col. 225, ou même des esclaves (fig. 206). Cf. Layard, Monuments, t. 1, pl. 58; t. ii, pl. 22, 26, 35; F. Lenormant, Hist. anc. t. iv, p. 197, 305, 365; t. v, p. 60; Perrot, Hist. de l’art, t. ii, p. 543, fig. 253. Les uns son fermés sur les côtés, les autres sont à claire-voie. Les roues sont à rayons, et les jantes sont très massives. Ces chariots servaient avant tout au transport des objets; mais les personnes y montaient également, tantôt assises sur des sièges qu’on plaçait sur le fond du char, tantôt sur les objets mêmes qui étaient transportés. Aucun de ces chariots n’est couvert. Les chariots couverts n’apparaissent que sur les monuments étrusques et romains.Micali, Monumenti di antichi popoli italiani, in-f°, Rome, 1810, pi. 27, 28. — Le passage où Isaïe compare le pécheur au captif qui traîne un chariot auquel il est attaché par des cordes est rendu sensible par plusieurs bas-reliefs assyriens. On y voit, en effet, des captifsremplaçant les chevaux et les bœufs et attelés à de lourds chariots. Layard, Monuments, t. ii, pi. 13, 15, 16, 17, 18; F. Lenormant-Babelon, Histoire ancienne, t. iv, p. 316; t. v, p. 97; Perrot, Histoire de l’art, t. ii, p. 336, fig. 151; p. 338, fig. 152. — Isaïe, xxviii, 27, 28, désigneencore sous le nom de ʿǎgâlah l’instrument à l’aide duquel les Israélites écrasaient les grains sur l’aire, Is., xxv, 10; xxviii, 27, 28; xli, 15; Amos, i, 3. Voir Aire, t. i, col. 326. La Vulgate traduit ʿǎgâlàh par plaustrum, Is., xxviii, 27, 28. Elle ajoute ce mot Is., xxv, 10, pour mieux préciser le sens; mais il n’a pas d’équivalent dans l’original. Plaustrum, Is., xli, 15, est la traduction de môrag, et dans Amos, i, 3, celle de ḥârûṣ, deux mots qui désignent l’un et l’autre un instrument à battre le blé, t. ï. col. 320.
E. Beurlier.
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206. — Captifs assyriem traînant des chariots charges de cordes et de leviers. Koyoundjik. D’après Layard, Monuments of Nineveh, t. II, pl. 17.
CHARITÉ. L’hébreu ʾahǎbâh, que les Septante rendent par ἀπάγη, et la Vulgate par charitas, désigne un mouvement affectueux, sans détermination spéciale. C’est par le contexte que ce terme est déterminé à signifier l’affection de Dieu pour les hommes, Deut., vii, 8; Jer., xxxi, 3; III Reg., x, 9; des hommes pour Dieu, Deut., xi, 13, 22; Jos., xxii, 5; xxiii, 11; des hommes entre eux. I Reg., xviii, 3; xx, 17; II Reg., i, 26; Cant., II, 4; v, 8; viii, 6, 7. Dans Osée, iii, 1, ce mot, qui est répété trois fois au même verset, désigne deux fois l’amour charnel, et une fois l’amour de Dieu pour les hommes. On le trouve opposé à šinʾâh, «haine.» Ps. cvm (hébreu, Cix), 3, 4, 5; Eccle., IX, 1. Le Nouveau Testament étant établi sur la charité de Jésus-Christ, il n’est pas surprenant queNotre-Seigneur et les apôtres en parlent fréquemment, soit pour rappeler le précepte de la charité, déjà énoncé dans l’ancienne Loi, soit pour en déclarer l’excellence. La charité résume et couronne la Loi et les Prophètes; elle est le plus grand commandement, Matth., xxii, 37-40; Marc, xii, 30-31; Rom., xiii, 8-10; Gal., v, 14; I Tim., i, 5, et le lien de la perfection. Col., iii, 14. Elle l’emporte en excellence sur le don des langues et des miracles, I Cor., xiii, 1-2; sur l’aumône et les œuvres les plus généreuses, I Cor., xiii, 3; sur la foi et l’espérance, 1 Cor., xiii, 13; elle est la racine de la vie spirituelle, Ephes., III, 17; elle renferme toutes les autres vertus, I Cor., xiii, 4-8; elle est une douce et sainte servitude opposée à la criminelle liberté de la chair, Gal., v, 13; elle est l’un des fruits du Saint-Esprit. Gal., v, 22.
Son objet est Dieu et le prochain, Matth., xxii, 37-40; Marc, xii, 30-31; I Joa., iv, 20-21; v, 1-2, et par prochain Jésus-Christ veut qu’on entende les ennemis eux-mêmes. Matth., v, 25, 39-40, 44-47. Cette charité fraternelle est plus précieuse devant Dieu que l’oblation des sacrifices, Matth., v, 23-24; elle obtient le pardon des plus grands péchés, I Petr., iv, 8, et Notre - Seigneur la regarde comme si nécessaire, qu’il menace des plus grands châtiments ceux qui y manquent. Matth., v, 22. Entre tous les apôtres, saint Jean est le grand docteur de la charité. Il en fait le plus grand éloge en proclamant que Dieu est charité. I Joa., iv, 8, 10. De là il loue la charité prévenante de Dieu pour nous, I Joa., iv, 10, 19, manifestée particulièrement par l’Incarnation. I Joa., iv, 9.Mais cette charité appelle celle des hommes pour Dieu, I Joa., iv, 19, et avec un si parfait abandon, qu’elle exclut toute crainte. I Joa., iv, 17, 18. Incompatible avec l’amour du monde, I Joa., ii, 15, elle consiste à observer les commandements, Joa., xiv, 15, 21, 23, 24; I Joa., v, 2, 3; II Joa., 6, et surtout ce commandement nouveau qui a pour objet la charité des hommes entre eux. Joa., xiii, 34. Celte charité fraternelle est nécessaire pour le salut: Dieu, de qui elle émane, 1 Joa., iv, 7, et qui nous en donne l’exemple, I Joa., iv, 11, la commande à tous, Joa., xv, 12, 17; I Joa., iv, 21; sans elle on demeure dans la mort, I Joa., iii, 14; on est homicide, I Joa., iii, 15; on vit dans les ténèbres. I Joa., ii, 9, 11. Avec elle, au contraire, on demeure et on vit en Dieu, Joa., xiv, 23; I Joa., iv, 12, et on possède Dieu en soi, I Joa., iv, 16; on est dans la lumière. I Joa., ii, 10. Elle doit d’ailleurs, pour être vraie, se manifester par des actes, I Joa., iii, 18; cf. Jac, 1, 27; ii, 14-18, 20-26, et elle devient parfaite quand elle se traduit par le sacrifice de soi embrassé volontairement pour l’amour du prochain. Joa., xv, 13. Cet enseignement dépasse tellement la doctrine des fausses religions, que lacharité fraternelle est donnée comme le signe distinctif des disciples de Jésus-Christ. Joa., xiii, 35. Saint Paul compare la charité à une cuirasse contre laquelle viennent s’émousser les traits de l’ennemi du salut. I Thess., v, 8.
P. Renard.
CHARKEL ou Héraclée (probablement dans la Cyrrhesticé, Ptolémée, v, 15, dans la province de l’Euphrate), patrie de Thomas, évêque de Maboug, surnommé de Charkel, à cause de son origine. Il publia une révision de la tradition syriaque du Nouveau Testament par Philoxène; elle est connue sous le nom de charkléenne. Voir Syriaques (versions) des Saintes Écritures.
CHARLES LE CHAUVE (BIBLES DE). Le nom de l’empereur Charles le Chauve († 877) est attaché à plusieurs manuscrits, spécimens célèbres de la calligraphie carolingienne. DlCT. DE LA BlBl.E
LETOUZEY et ANÉ. éditeurs
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ps. cxvii, 28 - cxviii, 8Bibliothèque Nationale de Paris 593 CHARLES LE CHAUVE (BIBLES DE) — CHARME CONTRE LES SERPENTS 594
1° Le manuscrit n° 1 du fonds latin de la Bibliothèquenationale, connu sous le nom de «première Bible deCharles le Chauve», est un volume de grand format(495 millimètres sur 375), comptant 423 feuillets à deuxcolonnes de 51 lignes, relié aux armes de Colbert. Jusqu’en1675, il appartint au chapitre de la cathédrale deMetz, qui à cette date en fit présent à Colbert. En tête, on trouve une dédicace à l’empereur:
Rex benedicte tibi hæc placeat bibliolheca Carie…A la fin, une peinture représente l’empereur sur sontrône; devant lui un personnage fait avancer douzeclercs, dont l’un présente au prince un grand livre reliéen rouge; une dédicace en vers renferme le nom dudonateur, le comte Vivianus, abbé de Saint -Martin, àTours ({ 851), et peut-être les noms des copistes et enlumineurs, Haregarius, Amandus, Sigraldus. Cette Bible aété exécutée à l’abbaye de Saint -Martin de Tours, entre845 et 851, dans la grande école calligraphique que possédale monastère dans la première moitié du IXe siècle.L. Delisle, Mémoire sur V école calligraphique de Tours, Paris, 1885. Il est vraisemblable que cette Bible, donnéeà Charles le Chauve par l’abbaye de Tours, aura étédonnée par Charles le Chauve à la cathédrale de Metz, où, le 9 septembre 869, il fut couronné roi des États deLolhaire. Les inscriptions en vers sont écrites en capitalesd’or sur fond pourpre, les préfaces en onciales d’orsur pourpre. Le texte biblique est en onciale, les incipiten or sur pourpre, les initiales à entrelacs ou à sujets.Les canons d’Eusèbe, les sommaires ou capitula, sontécrits sous des arcades d’où pendent des lustres, et surmontéesde figurines animées. De grandes peintures àpleine page complètent l’ornementation du volume. Ilrenferme toute la Vulgate. Voir la description et un facsimilédans L. Delisle, Le cabinet des manuscrits, t. iii, Paris, 1881, p. 234 et pi. xx.
2° Le manuscrit latin n° 2 de la Bibliothèque nationaleest connu sous le nom de «deuxième Bible de Charlesle Chauve»: grand format (430 millimètres sur 335), 444 feuillets à deux colonnes de 52 lignes, relié aux armesd’Henri IV. Jusqu’en 1598, où elle passa dans la bibliothèquedu Roi, cette Bible appartint à l’abbaye de Saint-Denis.Ici encore, en tête, on lit une dédicace à l’empereur: JBiblorum seriem Karolus rex inclitus islamContexit chryso, corde calens catharo…, poème qu’une allusion qu’il renferme à la mort du fils del’empereur, Charles, roi d’Aquitaine, permet de daterdes environs de 865. Cette Bible a dû être la Bible personnellede Charles le Chauve, et être léguée par lui enmourant à Saint-Denis. Peut-être même avait-elle étéexécutée dans l’abbaye de Saint -Denis. Les inscriptionsen vers sont en capitales d’or sur fond pourpre; le texteest en minuscule, les premiers versets en onciales d’or; les initiales sont de grandes lettres ornées. Comme leprécédent, ce manuscrit renferme toute la Vulgate. Voirdescription et fac-similé du manuscrit dans L. Delisle, ouvr. cit., t. III, p. 259 et pi. xxviii.
3° La Bibliothèque Nationale possède encore, n° 1152du fonds latin, un troisième manuscrit du même empereur, «le Tsautier de Charles le Chauve,» d’un formatmoindre que les précédents (210 millimètres sur 185), 173 feuillets, écrit à pleine page sur 20 lignes, ayant encoresa reliure ancienne avec ivoires sculptés et cabochons.Il renferme le texte gallican du psautier, plus lescantiques, le TeDeum, le Symbole de Nicée, le Quicumquevult, enfin des litanies où Dieu est invoqué pourCharles, la reine Hermintrude († 869) et leurs enfants, et à la fin desquelles le copiste a mis son nom:
Hic calamus facto Liuthardi fine qidevit.Le manuscrit contient comme les autres une image dedédicace à Charles le Chauve. Il est écrit tout entier enonciales d’or, à l’exception de quelques pages en minuscules, et de quelques versets messianiques qui sont sur
fond pourpre. Grandes initiales peintes. Description etfac-similé dans L. Delisle, ouvr. cit., t. iii, p. 320. Lefac-similé que nous en donnons ci-joint (fig. 207) contientPs. cxvii, 28- cxviii, 8.
4° La Bibliothèque royale de Munich, sous le n° 14000, possède un quatrième manuscrit portant la reliure en orque lui fit donner Ramvold, abbé de Saint -Emrneran, à.Ratisbonne (975-1001); grand format (420 millimètressur 320), 126 feuillets à deux colonnes de 40 lignes. Cesplendide volume a été exécuté en 870 ou C71, par lescopistes Beringarius et Liuthardus, ce dernier le mêmeque pour le psautier ci-dessus. Le manuscrit est écrit enentier en lettres d’or. Une image représente Charles leChauve béni par la main de Dieu, avec l’inscription: Francia grata tibi, rex inclite, munera defert…Ce manuscrit des quatre Évangiles est connu sous lenom d’ «Évangiles de Saint-Emmeran». Légué à l’abbayede Saint -Denis à la mort de Charles le Chauve, ilaurait été échangé vers 893, par l’abbé de Saint -Denis, contre la moitié du corps de saint Denis, dérobé à l’abbayepar les gens de l’empereur Arnoul, lequel le passaà Saint-Emmeran. Les Évangiles de Saint-Emmeran, lePsautier de Charles le Chauve, comme aussi le CodexPaulinus, auquel nous consacrerons un article spécial, auraient été copiés à l’abbaye de Corbie. — Voir sur cesmanuscrits et sur les manuscrits carolingiens en généralle mémoire de M. H. Janitschek, dans la publication quia pour titre Die Triérer Ada-Handschrift, Leipzig, 1889, p. 63-111, et S. Berger, Histoire de la Vulgate, Paris, 1893, p. 243-299. P. Batiffol.
CHARME contre les serpents. Moyen employé par lescharmeurs pour prendre les serpents ou les rendre inolfensifs.— 1° Les Hébreux appelaient le charme laliaS, de la racine MhaS, usitée à la forme pihel, lihês, <.< siffler, parler à voix basse, chuchoter,» parce que les charmeurs, melahasim, «les siffleurs,» Ps. lviii, 6, attirent le serpenten sifflant et en chuchotant une conjuration plus oumoins intelligible. Voir Charmeurs de serpents. — L’Ecclésiaste, x, 11, compare le médisant au serpent (ndhâs)qui mord lorsqu’il n’en est pas empêché par le charme(lahas). (La Vulgate traduit le mot hébreu par «en silence», mais elle ne rend pas le sens de l’original.) — Jérémie, vin, 17, menaçant son peuple, au nom de Dieu, degrands châtiments, leur dit: «Je vais envoyer contrevous des serpents (nehâSim) et des vipères (sife’ônim)contre lesquels il n’y a pas de charme (laljaS), et ils vousmordront.» La Vulgate traduit exactement dans ce passagelahas par incantatio. — 2° Isaïe, iii, 3, appelle lecharmeur nebôn lahas, «celui qui connaît les charmes.» Vulgate: prudentem eloquii mystici. Saint Jérôme, InIs., iii, 3, t. xxiv, col. 62, dit qu’il traduit ainsi d’aprèsSymmaque (Théodotion et Aquila, au rapport du mêmesaint docteur, ibid., avaient traduit justement: «prudentenchanteur» ), et eloquium mysticum doit s’entendre ducharme. Les Septante ont traduit inexactement: ouvstôvàxpoaîT|v, «un intelligent auditeur,» ou, comme beaucoupl’interprètent, mais non moins faussement, «unorateur éloquent.» (Schleusner, Thésaurus sive Lexiconin LXJC, 1824, t. i, p. 133.) — 3° D’après une interprétationtrès vraisemblable, parce qu’elle s’appuie sur le sensdu mot lahaS qui vient d’être exposé, le bijou mentionnépar Isaïe, iii, 20, sous le nom de leliâsim ( Vulgate: inaures, «pendants d’oreilles» ) et porté par les femmesjuives, était une amulette sur laquelle on avait écrit uneformule ou charme contre les morsures des serpents. Laforme en est inconnue. Voir t. i, col. 531. Quelques-unsont supposé que les lehâSwi avaient la forme de serpents.
F. VlGOUROl’X.
CHARMEL. La Vulgate, à la suite des Septante, quiportent XÉpjisX, a rendu comme un nom propre, désignantle mont Carmel (S. Jérôme, In Is., xxix, 17, t. xxiv, col. 335), le substantif commun hébreu kcutnél,
qui signifie «champ cultivé et fertile», dans ce passaged’isaïe, xxix, 17: «Ne verra-t-on pas bientôt et dans peude temps le Liban se changer en Charmcl et le Charmeldevenir une forêt?» Le texte original doit se traduire: «Le Liban (qui n’est qu’une forêt inculte) ne sera-t-ilpas dans peu de temps changé en un champ cultivé ( karmél), et les champs cultivés (karmél) ne deviendront-ilspas une forêt (inculte comme le Liban)?» c’est- à- direce qui paraissait stérile comme le Liban deviendra fertile, et ce qui promettait une abondante récolte ne porteraaucun fruit. L’alliance égyptienne sur laquelle lesJuifs avaient compté pour les sauver de leurs ennemis, les secours humains sur lesquels ils s’appuyaient, sontcomparés à un champ fertile; ils leur sont inutiles; maisDieu, qui est comparé au Liban, les protégera et les délivrera.— Le Carmel étant une montagne boisée commele Liban, il n’y a pas d’antithèse possible entre l’un etl’autre; aussi l’auteur sacré n’a-t-il point dit, comme l’asupposé saint Jérôme, que le Carmel deviendrait uneforêt, car il l’était déjà. F. Vigouroux.
- CHARMEUR DE SERPENTS##
CHARMEUR DE SERPENTS (hébreu: melahàiim, Ps. lviii [Vulgate: lth], 6; nebôn lahas, Is., iii, 3, de lâlias, «siffler;» Septante: èTuxSôvTE; -, sraiot80! ; VuIgate:
208. — Charmeur de serpents sur un vase égyptien en bronze.Musée du Louvre.
incanlantes, incanlalor), nom donné à celui qui a l’artde découvrir et de prendre les serpents, de jouer impunémentavec eux, et au besoin de les apprivoiser. On seservait aussi des serpents pour une espèce de divinationappelée ophiomancie. Celui qui la pratiquait est appelé dansle Deutéronome, xviii, 10, menahvs, dendhâs, «serpent;» mais il est différent du charmeur. Voir Ophioman’CIE.
I. L’art du charmeur. — Cet art remonte à une trèshaute antiquité. On le constate chez les Égyptiens dansles temps les plus reculés; un de leurs anciens vases debronze, conservé au Louvre, représente un psylle qui aenchanté un serpent et le tient par la partie supérieuredu corps (fig. 208). Les auteurs de l’antiquité racontentdes choses merveilleuses sur les exploits des charmeursde serpents. Aristote, Jlirab., 151; Élien, Hist. animal., I, 57; Pline, H. N., ii, 2; viii, 38, xxviii, 6; Strabon, xvii, 44; Silius Ital., iii, 302; Lucain, Phars., ix, 890; Virgile, JEneid., vii, 753, etc.; Bochart, Hierozoicon, III, 161; Bôhmer, De Psyllorum, Marsorum et Ophiogenumadversus serpentes virtute, Leipzig, 1745. L’artde ces enchanteurs ne s’est point perdu. On rencontrefréquemment, en Egypte et dans les pays orientaux, deshommes qui savent se faire obéir des serpents (fig. 209). Ilsles obligent à sortir de leurs trous, les manient comme des
bêtes inoffensives, les mettent dans leur sein, se les lancentles uns aux autres comme des balles, les dressent à exécutercertains exercices et même parfois les mangenttout vivants. Cf. J. Bruce, Travels to discover the sourceof the Nile, Edimbourg, 1790, t. v, p. 208-209; W. G. Browne, Travels in Africa, Egypt and Syria, Londres, 1799, p. 84, 104; H. von Schubert, Reise indas Morgenland, Erlangen, 1839, t. ii, p. 115, 116; deLaborde, Commentaire géographique sur l’Exode, Paris, 1811, p. 22-27; Vigouroux, La Bible et les.découvertesmodernes, Paris, 6= édit., 1896, t. ii, p. 298-304, 593-607.Voici comment, d’après Tristram, The nalural historyof the Bible, Londres, 1889, p. 272, les choses se passentaujourd’hui. Le charmeur se sert d’un procédé fortsimple. Il fait entendre au serpent les sons aigus de laflûte, les seuls que puisse bien distinguer cet animal,
fi S-209. — Charmeur de serpents au Caire. D’après une photographie.
chez lequel le sens des sons est fort imparfait. Il doitpardessus tout avoir du sangfroid, du courage et assezde délicatesse de main pour manier le serpent sans l’irriter.Les charmeurs ne sont pas des imposteurs. Quelquefois, sans doute, ils peuvent retirer au reptile ses crochetsvenimeux; mais il est incontestable qu’ils les laissenthabituellement subsister. Du reste, ils opèrent aussi volontierssur celui qu’ils viennent de prendre que sur unautre depuis longtemps en leur possession. Mais il leurrépugne beaucoup de faire l’expérience sur une autreespèce que le cobra, le pétén hébreu ou aspic. Cf. t. i, col. 1124.’Quand il a découvert un cobra dans un trou, le charmeur l’attire dehors en sifflant, puis il le saisitsoudain par la queue et le tient à longueur de bras. Ainsisuspendu, le serpent est incapable de se retourner pourmordre. Lorsque ses vains efforts l’ont épuisé, on le placedans un panier muni d’un couvercle. Ce couvercle estensuite soulevé pendant qu’on joue de la flûte, et àchaque tentative du serpent pour se précipiter dehors, on.
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CHARMEUR DE SERPENTS
CHARPENTIER
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rabat le couvercle sur lui, jusqu’à ce qu’il ait appris à setenir tranquille sur sa queue, à se balancer au son de lamusique et à ne plus essayer de s’enfuir. S’il devient plusagité que d’ordinaire, on lui extrait ses crochets par; mesure de précaution. — Les charmeurs qui opèrent denos jours en Egypte obtiennent les résultats les plus surprenants.Ils ont un certain flair qui leur permet de reconnaîtrela présence d’un serpent caché dans une vieillemuraille et même d’indiquer sa taille avant de l’avoir vu.Ils le font sortir en promenant une simple baguette lelong du mur, le saisissent par la tête, lui font mordreleurs vêtements et lui arrachent les dents en le tirantbrusquement pendant cette morsure, le prennent eux-mêmesdans leur bouche, le projettent à terre, le ressaisissent, etc. Ces exercices, se font dans des conditionsqui excluent tout soupçon de supercherie. Toutefois lecharmeur ne réussit pas toujours à se préserver des morsuresde l’animal. Cf. Vigouroux, La Bible et les découvertesmodernes, 1896, t. ii, p. 595-602.
II. Les charmeurs dans la Bible. — 1° Les magiciensde l’Exode. — Le premier signe de sa mission que Moïsedonna au pharaon d’Egypte consista à faire changer enserpent la verge d’Aaron. Les magiciens en firent autant, «au moyen d’incantations.» Mais la verge d’Aaron dévorales leurs. Exod., vii, 10-12. II ressort du contexte queMoïse agit en cette circonstance d’après l’ordre de Dieuet avec le concours de sa puissance surnaturelle. Exod., vu, 9. Quant aux magiciens, il est probable que le démonvint à leur aide, surtout à une époque et dans un paysoù sa puissance s’exerçait avec une liberté presque entière.C’est le sentiment de la plupart des commentateurs. VoirCalmet, Commentaire littéral sur l’Exode, Paris, 1717, p. xiv-xxviii. Toutefois, une partie du pouvoir des charmeurségyptiens leur venait aussi de leur habileté naturelle.On prétend que certains jongleurs, en prenant avecles doigts la nuque du cobra, réussissent à le faire tomberdans un état magnétique qui le rend raide et immobile, comme s’il était changé en verge ou en bâton. Tristram, Natural history, p. 273. Les magiciens égyptiens auraientdonc pu se présenter avec des serpents ainsi réduits enune sorte de catalepsie, et rendre le mouvement à cesreptiles en les projetant à terre. Toujours est-il que lepouvoir dont Moïse était investi dépassait de beaucouple leur, comme le montra le dénouement de la scène.
2° Les charmeurs chez les Hébreux. — Saint Jacques, m, 7, admet que le pouvoir du charmeur peut être purementnaturel, quand il dit que «toutes les espèces debêtes, d’oiseaux et de serpents seront domptés parl’homme». Salomon avait déjà dit d’une manière analogue: «Le serpent mord, faute d’incantation.» Eccle., x, 11. Mais comme cet art pouvait servir à tromper etsurtout à voiler l’intervention du démon, Moïse défend detolérer parmi son peuple le hôbêr hâbér, celui qui «pratiqueles enchantements;» ce qui, d’après l’interprétL «tion probablement trop étroite de Raschi, s’appliqueraitspécialement aux charmeurs de serpents. Deut., xviii, 11.
— Les charmeurs ne réussissaient pas toujours dans leurentreprise. Tristram, The natural history, p. 273, remarquequ’aujourd’hui encore «il n’est pas rare que, malgré toutes les précautions, la vie du charmeur soitsacrifiée dans quelqu’une de ses exhibitions». Les charmeursle savaient par leur expérience, et ils étaient parfoisvictimes du danger auquel ils s’exposaient. «Quiaura pitié du charmeur (ènacuSôv, incantator), mordupar le serpent, ou de ceux qui approchent des bêtes?» dit le fils de Sirach. Eccli., xii, 13. D’ailleurs toutes lesespèces de serpents ne sont pas sensibles à l’action ducharme. Jérémie, viii, 17, annonce que le Seigneurenverra pour punir les Israélites «des serpents contrelesquels il n’y a pas de charme, lal.ias». Le psalmiste, Ps. lviii (lvii), 5, 6, dit aussi des juges iniques: Leur venin est semblable au venin du serpent, De l’aspic sourd qui ferme son oreille,
Qui n’entend pas la voix des enchanteurs, Du charmeur habile dans son art.
Ce texte ne suppose pas qu’il existe des serpents naturellementsourds. La «vipère sourde qui ferme son.oreille» est simplement un serpent qui entend, mais quiagit comme s’il n’entendait pas, et qui ne subit pas l’actiondu charme. La comparaison est alors très juste entrelereptile rebelle à l’incantation et le juge inique volontairementsourd à la voix de Dieu et de la conscience.Les serpents sont dépourvus d’oreille externe, ce qui afait supposer par quelques-uns qu’ils n’entendent pas.Mais ils ont une oreille interne qui leur permet de percevoirles sons et même de se montrer très sensibles icertains d’entre eux. Les histoires de serpents se bouchantles oreilles avec la queue ou avec de la poussière, pour ne pas entendre la voix du charmeur, proviennentd’une interprétation trop servile du texte cité plus haut, et ne reposent sur aucun fondement. — Notre -Seigneurdonna aux soixante-douze disciples le «pouvoir de marchersur les serpents» avec leurs pieds nus, Luc, x, 19, et à tous ceux qui devaient croire en lui celui de «saisirles serpents» avec leurs mains. Marc, xvi, 18. Bien entendu, le pouvoir ainsi conféré n’est pas celui du charmeur.Sans doute, quand il plaira à la divine Providence, le disciple du Sauveur pourra toucher les serpentssanscourir aucun danger, comme il arriva pour saintPaul. Act., xxviii, 3. Mais ce pouvoir de fouler aux piedsou de saisir les serpents est surtout symbolique; car cesserpents, ce sont les démons, que les disciples ont la missionde combattre et d’écraser. Cf. Apoc, xii, 9; Ps. xc, 13.
H. Lesêtre.
CHARMI. Nom de trois personnages, dont deux sont: mentionnés dans le texte hébreu et un dans le livre de-Judith.
1. CHARMI (hébreu: Karmî; Septante: Xapjii), quatrièmefils de Ruben, Gen., xlvi, 9; Ex., vi, 14; Num., xxvi, 6; I Par., v, 3, chef de la famille des Charmites.Num., xxvi, 6. Ecrit Carmi, I Par., v, 3.
2. CHARMI (hébreu: Karmî; Septante: Xocpni), fils, ou plutôt descendant de Juda, I Par., iv, 1; il était filsde Zabdi ou Zamri et petit-fils de Zara, I Par., ii, 6; Jos., vil, 18, et père ou ancêtre d’Achan, qui fut lapidé parordre de Josué. Jos., vii, 18.
3. CHARMI (Septante: Xapii?; ; Codex Alexandrinus: Xa), [x.e; ; ), un des anciens du peuple, auquel Judith seplaignit de ce qu’Ozias avait promis de rendre Béthulie, si Dieu ne les secourait pas dans cinq jours. Judith, vi, 11; vm, 9 (Septante: vi, 15; viii, 10). Les Septante, qui lementionnent, de plus, nommément x, 6, en font le fils deMelchiel, et non seulement un des anciens, îip£<r6u~Épo: , mais un des trois chefs de la cité, apxovreç, VI, 15. LaVulgate, vi, 11, dit que Charmi s’appelait aussi Gothoniel; mais il doit y avoir une lacune dans le texte. LesSeptante, qui dans trois passages nomment les troisanciens de Béthulie, (tandis que le texte latin abrège ousupprime même les noms, comme Judith, x, 6), disentexpressément, Judith, vi, 15, que Gothoniel était le pèred’Abris (pour Chabri); il est par conséquent différent de-Charmi.E. Levesque.
- CHARMITES##
CHARMITES (hébreu: hak-Karmi; Septante: Xap[u; Vulgate: Charmitse), descendants de Charmi, quatrième fils de Ruben. Num., xxvi, 6. Voir Charm 1.
CHARPENTIER. Hébreu: Ifârâs, de haras, «tailler,» l’artisan qui taille et travaille le bois, et qui pour cela estappelé assez souvent: hârâi’êsim, «celui qui taille lesbois;» hôtêb, de hâtab, «fendre;» Septante: ~; y.Tù>v, £uXox<fao; ; Vulgate: faber, lignorum exsor. Ces différents.
S99
CHARPENTIER
COO
termes servaient chez les Hébreux à désigner tous lesouvriers qui travaillaient le bois et exerçaient à la foisles métiers aujourd’hui spécialisés du bûcheron, du charpentier, du charron, du menuisier, de l’ébéniste, etc.
ou menuisiers au travail (fig. 210). L’un des ouvriersapplique un morceau de bois noir sur une pièce de boisordinaire. Devant lui on voit une herminette plantée dansun billot, une espèce de règle et une équerre; au-des210. — Charpentiers égyptiens coupant les arbres, les équarrissant, les façonnant et les transportant, quand leur ouvrage est fini.Pyramides de Saqqara. IVe dynastie. D’après Lepsius, Denlsmàler, Abth. ii, El. 103.
Quant à la charpenie proprement dite, elle n’était guèreemployée que dans le Temple, les palais et les édificesconsidérables. Les maisons ordinaires ne comportaient
sus est un coffret, sans doute fabriqué dans l’atelier.Un autre ouvrier scie une barre de bois dans le sens desa longueur; son compagnon taille à l’herminette des
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211. — Charpentiers orientaux au travail. D’après une photographie.
que des solives grossièrement préparées pour soutenirles dalles du toit, quand la maison n’était pas voûtée, et quelques pièces de bois pour la porte. C’est en Egypteque les Hébreux durent apprendre à tailler le bois. Lesmonuments de ce pays nous montrent des charpentiers
pieds de sièges ou de meubles. Wilkinson, Mannersand customs of the ancient Egyptians, t. ii, p. ld’1-119.Le métier passait pour assez dur. Les anciens textesdisent du charpentier égyptien: «L’artisan de touteespèce qui manie le ciseau n’a pas autant de mouvement
que celui qui manie la houe; mais ses champs à lui c’estle bois, son affaire c’est le métal; et la nuit, quandl’autre est libre, lui il fait œuvre de ses mains en surplusde ce qu’il a déjà fait, car la nuit il travaille chez lui àla lampe.» Papyrus Sallier, ii, pi. rv; Maspero, Histoire, ancienne des peuples de l’Orient, Paris, 1895, t. i, p. 311.
— Des charpentiers, initiés à leur métier en Egypte, travaillèrentà la fabrication de l’arche d’alliance et à laconstruction du tabernacle et de son mobilier, sous ladirection de Béséléel. Exod., xxv, 10; xxxv, 10-18; xxxvi, 1; xxxvii, 1, 10, 15, 25; xxxviii, 1.— Moïseordonne à tous de renouveler l’alliance, «depuis celuiqui coupe le bois jusqu’à celui qui porte l’eau.» Deut., xxix, 11. La Vulgate traduit, contrairement au texte original: exceptis lignorum czesoribus. Sous Josué, ix,
un voyageur en parlant de son passage à Nazareth, onest à peu près certain d’y retrouver ce qu’on voyait, ily a près de dix-neuf siècles, dans la modeste échoppede Joseph. Nous faisons donc visite à plusieurs charpentiers, qui nous accueillent avec une touchante déférence.Ils fabriquent des charrues, des jougs, des fourches etquelques coffres grossiers destinés à servir d’armoiresdans les maisons. Leur science et les besoins de la clientèlene vont guère au delà. La charpente proprement diteest rarement employée ici, où les bonnes maisons ontdes toitures en voûtes et les mauvaises se contentent dequelques couches d’herbes sèches et de terre glaise, supportéespar des arbres grossièrement travaillés. Les instrumentsdu charpentier sont rudimentaires. Une hachemarteau, quelques ciseaux, un maillet, morceau de bois
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212. — Charrue égyptienne. D’après Prisse d’Avesnea, Monuments égyptiens, pi. 43.
21, 23, 27, des Gabaonites sont admis à se joindre auxHébreux en qualité de «coupeurs de bois». Ces hommesqui coupent le bois ne sont évidemment pas des charpentiersproprement dits, mais de simples bûcherons, occupant un rang infime dans la société. — Les charpentiershabiles dans leur art faisaient défaut parmi lesHébreux. Aussi est-ce au roi sidonien, Hiram, que Daviden demanda quand il voulut bâtir son palais. II Reg., v, 11; I Par., xiv, 1. Salomon renouvela la mêmedemande, quand il s’agit de construire le Temple, III Reg., v, 6-14; II Par., ii, 8-14, et d’autres bâtiments importants.III Reg., vii, 2-12. À l’époque de Joas, on mentionnedes charpentiers attachés à l’entretien du Temple.IV Reg., xii, 11. — Isaïe.XLiv, 13; Jérémie, x, 3, etl’auteur de la Sagesse, xiii, 11, se moquent des idolesque les charpentiers ont fabriquées à coups de hache.
— Après la captivité, les charpentiers deviennent plusnombreux. C’est alors que «le charpentier et le constructeursont absorbés la nuit et le jour», pour combinerleurs plans et en préparer l’exécution. Eccli., xxxviii, 28. — Sur les outils à l’usage du charpentier, voir t. i, col. 1045, C.
Saint Joseph était charpentier, téxtuv, faber, termequi comporte toute la variété de travaux dont il a étéparlé plus haut. Le divin Maître prit naturellement lemétier de son père adoptif. Il fut «charpentier, fils decharpentier». Matth., xiii, 55; Marc, VI, 3. Saint Justin, Cont. Tryph., 88, t. vi, col. 688, parle de charrues, dejougs et d’autres ouvrages fabriqués par lui. Théodoret, H. E., iii, 18, t. lxxxii, col. 116, semble supposer qu’ilpouvait avoir à faire des coffres pour mettre les morts. «Comme rien ne change dans ces pays de l’Orient, dit
très dur arrondi par un bout et’aminci de l’autre, unvilebrequin tournant à l’aide d’une corde, quelques sciesà poignée, suffisent à ces ouvriers, qui réussissent à sepasser d’étau en serrant entre leurs pieds nus (fig. 211)la pièce qu’ils fabriquent tout assis.» Le Camus, Notrevoyage aux pays bibliques, Paris, 1894, t. ii, p. 94, 95.Ainsi en devait-il être déjà à Nazareth à l’époque oùvivait le Sauveur. H. I.esétre.
- CHARRUE##
CHARRUE (hébreu: ’êf, Septante: apotpov; Vulgate: aratrum), instrument qui sert à labourer la terre
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213. — Charrue chaldéenne. Intaille de la Bibliothèque nationale.
(fig. 212). La charrue orientale ne fut pas autre chose qu’unehoue agrandie et retournée, avec un manche allongé pourqu’elle pût être tirée par des bœufs. Une intaille chaldéenneconservée au cabinet des médailles de la Bibliothèquenationale (fig. 213) représente une charrue très <503
CHARRUE
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primitive, que tirent deux bœufs attelés en flèche. Lelaboureur pèse sur les deux bâtons bruts qui serventd’oreilles, tandis que des valets excitent les bêtes. EnEgypte, on labourait conjointement avec la houe et avecla charrue (fig. 214). Voir t. i, fig. 46, col. 283. Mais souventon employait la charrue seule, tirée quelquefois pardes chevaux (voir Cheval) et habituellement par deuxbœufs (fig. 214). Voir t. i, fig. 45 et 61, col. 278 et 307.Le semeur suivait immédiatement en lançant la semence.Voir la description détaillée de la charrue égyptienneet de la manière dont on s’en servait dansG. Maspero, La culture et les bestiaux dans les tableaux
petite bêche large de dix centimètres. Voir t. i, col. 308; Jullien, L’Egypte, Lille, 1891, p. 260; cf. Pline, H. N., xviii, 49. Jusqu’à l’époque des rois, les Hébreux furenttributaires de leurs voisins, particulièrement des Philistins, pour tout ce qui dépendait des industries métallurgiques.Sous Saûl, c’est chez eux que tout Israël descendaitpour faire aiguiser la mahârêSâh, la charrue {’et), la hache (qardôm) et la rnaliârését. I Reg., xiii, 20. Lesdeux mots non traduits viennent de hâraS, «labourer,» et désignent peut-être quelques pièces de la charrue elle-même.Les Septante traduisent par ôpsmtvov, «faux,» etôépcoTpov, «vêtement d’été;» le chaldéen par’ù'sféyh,
214. — Charrue tirée par des bœufs. Ancien Empire. — An haut, à droite, le propriétaire préside au travail des ouvriers. — La partieintérieure de la gravure est la continuation de la partie supérieure. On voit deux laboureurs qui conduisent la charrue, troissemeurs, des ouvriers qui travaillent h la houe. À l’extrémité, à gauche, un ouvrier altéré boit de l’eau à une outre. — D’aprèsles Mémoires archéologiques du Caire, t. V. Tombeau de Makhti, ꝟ. 2, pi. 476 et pi. IV.
des tombes de l’Ancien Empire, dans ses Études égyptiennes, t. ii, fasc. i, in-8o, 1888, p. 68-71; 74-77.
La charrue hébraïque a dû être très simple, si l’on enjuge par celles qui sont encore en usage en Syrie(fig. 215 et 216). Elle était munie d’un soc en fer. Pourenlever l’argile et les herbes qui s’attachaient au soc, sans cependant se déranger de sa place, le laboureurse servait de son long aiguillon, semblable à celuiqui se voit encore aux mains des paysans de Célésyrie.Voir t. i, fig. 61 et C2, t. î, col. 3Ô7 et 308. Au côtéopposé à la pointe dont on aiguillonne les bœufs, cetinstrument se termine par un morceau de fer long d’unpied, pesant plus d’une livre et ayant la forme d’une «leur hache,» et perâSêyh, «leur aiguillon;» la Vulgatepar vomer, «soc,» et sarculum, «hoyau.» Gesenius, Thésaurus, p. 530. Les charrues hébraïques n’avaientpas de roues. Elles étaient traînées par deux animauxqui devaient être de même espèce; on ne pouvaitatteler ensemble un bœuf et un âne pour labourer. Deut., xxii, 10. Théophraste, Des causes des plantes, iii, 25, etPline, H. N., xviii, 47, attestent qu’en Syrie on se servaitde petites charrues. Aussi comprend-on qu’Isaïe, ii, 4, etMichée, IV, 3, parlent du changement des glaives en socsde charrue, et qu’au contraire Joël, m (hébreu, iv), 10, conseille de changer ces socs en glaives et en lances. —L’auteur de l’Ecclésiastique, xxxviii, 25, 26, range parmi 605 CHARRUE — CHARTREUX (TRAVAUX DES) SUR LES SAINTES ÉCRITURES 606
ceux qui n’ont pas le loisir d’acquérir la sagesse le laboureur «qui tient la charrue, qui est fier d’agiter l’aiguillon, qui mène les bœufs au biton…, met tout son cœur àretourner les sillons». — Notre -Seigneur dit proverbialernxa%), le premier des sept grands seigneurs de Perse, les Orosanges, qui sont admis en présence du roi. Esth., i, 14. Le roi le consulta pour savoir le châtiment qu’ilfallait infliger à Vasthi, son épouse. C’est le nom perse
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215. — Syrien labourant. D’après une photographie.
ment que «celui qui met la main à la charrue et regardeen arrière n’est pas propre au royaume de Dieu». Luc, IX, 62. Pour bien labourer, il faut apporter la plus grandeattention à la manœuvre de la charrue, de manière que
Karsehna, d’après Oppert, Commentaire historique etphilologique du livre d’Esther, dans Annales de philosophiechrétienne, janvier 1864, p. 25. D’autres rapprochentce nom du zend keresna «noir
Î10. — Charrue employée aujourd’hui en Syrie. D’après le Palestine exploration fund, Quarterly Statement, 1891, p. 113.
le sillon ait toujours la même profondeur et la mêmedirection. Arator, nisi incurvus, prœvaricabitur, ditPline, H. N., xviii, 29, «le laboureur qui ne demeurepas penché sur sa charrue ne fait rien de bon.» De même, quand il s’agit du salut, il faut s’y appliquer tout entier, sans se laisser distraire du travail spirituel par les soucis
de ce monde.
H. Lesêtre.
- CHARSENA##
CHARSENA (hébreu: Karsenâ’; Septante: ’ApxeCHARTREUX (TRAVAUX DES.) SUR LESSAINTES ÉCRITURES. — De tout temps l’étude desLivres Saints a été en honneur chez les Chartreux. C’estun héritage qu’ils ont reçu de leur saint fondateur etqu’ils ont gardé soigneusement. Saint Bruno, ancien écolàtrede l’Eglise de.Reims, et auteur de commentairesremarquables sur les Psaumes et sur les Épîtres de saintPaul, s’étant retiré au désert de la Chartreuse (1084), etplus tard dans la solitude de la Tour, en Calabre (10W), 607 CHARTREUX (TRAVAUX DES) SUR LES SAINTES ÉCRITURES
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où il termina sa vie, en 1101, partageait son temps entrela prière, les offices divins, la contemplation et l’étude desSaintes Écritures. Ses compagnons suivirent son exemple, et cet amour pour l’étude des textes sacrés s’est conservédans Tordre à travers les âges. Aussi n’est-il pas rare de liredans les chroniques des différentes maisons de l’ordre cetéloge rendu aux religieux les plus célèbres: Vir in divinishumanisque litleris eruditus. Car, sans parler des étudesque chaque sujet avait pu faire avant de quitter le monde, il est facile de comprendre que l’obligation d’avoir à copierles Livres Saints et les œuvres des Pères et des écrivainsecclésiastiques contribuait beaucoup à instruire les religieux, à former leur esprit aux grandes conceptions dela science divine, et fournissait aux plus savants d’entreeux l’occasion de composer eux-mêmes des commentaireset d’autres ouvrages sur les Écritures. Mais cettetrès utile occupation, à la fois intellectuelle et manuelle, ne fut pas la seule cause qui engagea les Chartreuxà l’étude des Saintes Lettres. Leur règle ordonne de lireen entier, chaque année, tous les livres de l’Ancien et duNouveau Testament, soit au chœur, soit au réfectoire, soitau chapitre; elle prescrit qu’à la suite de la lecture capitulaireles religieux discutent entre eux sur les chosesentendues; les pieux cénobites doivent par conséquentseniir le besoin d’approfondir le sens caché des divinesparoles. C’est la remarque que les auteurs de YHistoirelittéraire de France, t. i, p. 120, édit. Palmé, ont faiteen traitant des études chez les enfants de saint Bruno: «L’ordre des Chartreux, disent-ils, réussit par là, sansqu’on y enseignât les sciences par principe, à former grandnombre de savants, solitaires et autres, qui devinrentcélèbres par leur mérite et les dignités auxquelles ilsfurent élevés.» Une ordonnance des premiers chapitresgénéraux, insérée dans les statuts de dom Guillaume Raynaud(1368), a donné lieu aux auteurs que nous venonsde citer de faire encore cette remarque: «Les plus habilescopistes corrigeaient aussi les fautes qu’ils découvraientdans les exemplaires qui leur servaient de modèle. Maisil ne leur était pas permis de le faire de leur propre mou. vement et suivant leurs idées, à l’égard des livres de l’ÉcritureSainte, de ceux du chœur et des ouvragés des auteursecclésiastiques. Il fallait que le prieur de la maison et lesplus éclairés d’entre les Pères jugeassent que la fauteétait réelle. Alors on la corrigeait sur les plus fidèlesexemplaires qui fussent dans les maisons de l’ordre.Attention aussi utile qu’admirable, qui a contribué à noustransmettre dans sa pureté le texte de la Bible et des Pèresde l’Église.»
L’invention de l’imprimerie exempta en grande partieles Chartreux du travail de transcription des manuscrits, mais elle ne diminua pas leur goût pour les études bibliques.Au contraire, grâce aux produits de l’art nouveau, ils eurent plus de ressources et de loisir pouracquérir une plus grande connaissance des Écritures, àl’aide des nombreux commentaires qui parurent à cetteépoque. Cette abondance de nouveaux auteurs fut mêmeun écueil pour un certain nombre d’entre eux, contre quile chapitre général, en 1542, porta des peines sévèrespour les détourner de l’étude immodérée du grec, sanslequel, prétendaient-ils, on ne pouvait avoir la véritableintelligence du sens des paroles divines.
Au commencement du Xvn c siècle, l’ordre, pour seconformer aux vœux du pape Paul V, décida que dansla promenade hebdomadaire un des religieux désigné parle prieur de chaque maison ferait à ses confrères uneconférence sur l’Écriture Sainte. Mais on ne tarda pas àconstater que cette ordonnance présentait bien des inconvénients, et surtout qu’elle privait les solitaires des avantagesqu’ils retirent de leur sortie dans la campagne.Aussi, avec l’agrément du Saint-Siège, on supprima cetteconférence et on revint à l’ancien usage, qui laisse àchaque sujet la liberté d’étudier en particulier les LivresSaints, selon ses moyens personnels et sous la direction
générale de son prieur. C’est pour continuer cette traditionavec une certaine méthode que le Père généralInnocent Le Masson, dans le programme d’étudesinséré dans ses Annales, engage les religieux à se bornerpendant les cinq ou six premières années de professionaux commentaires de Bellarmin sur les Psaumes etaux ouvrages de Ménochius et de Tirin sur le reste del’Écriture. Le zèle de cet illustre général de l’ordre luifit entreprendre de pieuses explications du Cantique descantiques et des Psaumes des divers offices que récitentles Chartreux, à l’usage des moniales ou religieuses chartreuses, afin que ces vierges sacrées pussent accomplirl’œuvre divine avec intelligence, attention intérieure etavec une sainte ferveur.
Jusqu’à l’époque de la grande révolution, dans toutesles maisons de l’ordre, on garda l’usage très ancien defaire apprendre par cœur le psautier aux novices, afinde les habituer à la psalmodie des nocturnes, pendantlaquelle les religieux éteignent les lampes. Tout le mondesait, dit un auteur du xv s siècle, combien cette coutumecontribue à entretenir le recueillement dans les offices, et de combien de distractions l’obscurité nous délivre.
Si nous considérons le nombre des Charlreux auteursde commentaires sur nos Livres Saints, il nous sera facilede constater que même sous ce rapport les enfants desaint Bruno ont fidèlement imité ses exemples, et qu’ilspeuvent figurer avec honneur dans la glorieuse phalangedes interprètes sacrés issus des autres ordres monastiques.Cependant il faut remarquer que, suivant l’esprit de leurvocation, beaucoup ne destinaient pas leurs œuvres aupublic. Éloignés du commerce des hommes et vivant dansla solitude, ils ne songeaient qu’à nourrir leur âme de ladivine parole, et tout au plus à en instruire leurs confrères.Toute autre ambition n’entrait même pas dans Jeuresprit. Mais cet amour de la vie cachée nous a été préjudiciablesous plusieurs rapports, et nous regrettons àprésent d’ignorer leurs doctes travaux et jusqu’aux nomsdes écrivains des premiers siècles de l’ordre. Dans lestemps plus rapprochés de nous, on commença à rédigerles chroniques des différentes maisons et à noter lesœuvres composées par les religieux. C’est grâce à desrecherches spéciales concernant la bibliographie cartusienneque nous pouvons présenter ici un tableau sommairedes auteurs d’ouvrages scripturaires.
Saint Bruno, comme nous l’avons déjà dit, a laissé descommentaires sur les Psaumes et les Épîtres du grandApôtre, qui ont mérité les suffrages des auteurs de 17/tstoirelittéraire de la France, de dom Cellier et des Bollandistes.— Peu de temps après sa mort entrait à la Grande-Chartreuseun jeune aspirant, qui plus tard devait succéderà saint Hugues sur le siège de Grenoble et devenirenfin archevêque de Vienne. Hugues, c’est aussi son nom, ne fut pas seulement illustre par ses dignités et ses vertus, mais aussi par sa science. Il composa des sermonssur la Genèse et des opuscules ascétiques. On croit qu’ilmourut en 1155.
Au xme siècle, nous trouvons Hugues de Miromars, prieur de Montrieux (Var) (-j-1242), auteur d’un courtcommentaire sur l’Apocalypse, actuellement à la Bibliothèquenationale de Paris; — Martin de Laon (-j- 1270 environ), qui pour affermir un novice dans sa vocation luiécrivit un traité en forme de lettre, composé uniquementdes textes de l’Écriture, ce qui a fait dire à un poèteque ce chartreux avait surpassé saint Bernard; — enfinD. Guigues du Pont († 1297), à qui on attribue uneexplication d’Habacuc.
tin chartreux anglais, Guillaume Lundtlinchton († 1309), est le premier de notre liste des écrivains scripturairesdu XIVe siècle. Il a laissé un commentaire sur saint Matthieu, très loué par ses contemporains. — Hubertin deCasale, frère mineur, mort chartreux vers 1312, a appliquéà l’Église l’Apocalypse de saint Jean. Son ouvrage, intitulé Ile septem Ecclesise slatibus, parut à Venise, en G09
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1515 et 1525. — D. Porchetti Salvagio, chartreux de Gènes(f vers 1350), s’est illustré par son livre Victoria adversusimpios Hebrœos, dans lequel, à l’aide de l’ÉcritureSainte et avec des extraits du Talmud et des auteursadmis par les Juifs, il prouve la vérité de notre foi. Cetouvrage fut publié à Paris, en 1520, par les soins duP. Justinianj, dominicain. — Enfin, dans le même siècle, Ludolphe de Saxe quitta l’ordre des Frères Prêcheurspour se retirer à la chartreuse de Strasbourg (1340), d’oùil jeta un vif éclat sur la famille cartusienne par ses éminentesvertus et par ses ouvrages célèbres, la Vita Christiet VExpositio in Psalterium.
Les renseignements sur les auteurs du XVe siècle sontheureusement plus abondants. Vers 1400, un chartreuxSe Paris, Verner ou Guerner, ancien religieux de Saint-Victor, composa ses Enucleamenta Biblise en seize livres, tirés des œuvres de saint Grégoire le Grand et publiésà Paris, en 1508 et 1608. Un autre religieux de la Grande-Chartreuseécrivit un ouvrage du même genre: Expositkmesquarumdam dictionum et sententiarum Biblise, manuscrit in-f°, à la Bibliothèque de Grenoble. — HenriKernenadius de Coesfeld, prieur de la chartreuse de Hollande(-j- 1410), a laissé une explication mystique surl’Exode et une autre sur l’Épitre aux Romains. — BonitaceFerrier, frère de saint Vincent Ferrier et général del’ordre (-j- 1417), traduisit toute la Bible en espagnol. Sonouvrage fut imprimé à Valence, en 1478. — Henri deHassia, prieur d’Arnheim († 1427), a écrit sur la Genèse, l’Exode, le Cantique des cantiques, les Proverbes de Salomonet sur l’Apocalypse. — Jean Rode († 1439) a laisséun commentaire incomplet sur la Genèse. — Jean Institor, chartreux de Buxheim, dans la Souabe (-j- 1440), avait réuni dans un manuscrit cent soixante objectionssur la Bible. Ce codex a été vendu dernièrement à Munich.— Antoine le Cocq, piémontais, mort à Val-de-Pezio, en 1458, composa un traité sur Job, qu’il dédia àla duchesse de Savoie. — Gérard Haghen, mort à la chartreusede la Capelle (Belgique), en 1465, a expliqué lepsaume lxvii, Exurgat Deus… — Henri Reicher, religieuxde Wurtzbourg (j- 1466), a interprété le Cantique descantiques. — Jacques Junterbuck ou de Clusa, abbé cistercien, mort chartreux à Eriurt, en 1466, a laissé les ouvragessuivants: Passio Domini secundum I V Evangelia; Scrutinium Scripturarum; Collatio pro divines scientiœcommendatione; De septem statibus Ecclesise in Apocahjpsidescriplis: ce dernier, publié par les protestants àdifférentes époques, a été mis à l’index avec la Monarchiade Golstad. — Un prieur de la chartreuse de Ferrare, André de Hongrie († 1469), nous est connu comme auteurd’une paraphrase sur les Psaumes et d’une autre sur leCantique des cantiques, qui existe encore. — Jean le Riche(Divitis) de Gand, prieur du Mont -Dieu (-J-1470), écrivitun traité intitulé: Quo pacto secularibus non semper conducantlibri Sacras Sc.ripturse malemo idiomate translati.— Le 12 mars 1471 mourut en odeur de saintetéDenys le Chartreux, auteur de commentaires sur toutel’Écriture. Voir Denys le Chartreux. — Au mois d’aoûtde la même année, la mort enleva Guillaume Abselius, prieur de Bruges, qui figure parmi les écrivains del’ordre à cause des ouvrages suivants: Super Genesim; item in Psalterium et Canlicum canticorum; Tractalusde anwre sponsi super Canticum canticorum, manuscrità la Vaticane avec l’autre traité: De amore sponsat inCanticis canticorum. — Jacques de Gruytrcede, prieurde Liège († 1472), Psalterium cum glossa interlineariet marginali, manuscrit. — Un autre commentateur surtous les Livres Saints, issu de l’ordre des Chartreux, estle célèbre Jean Haghen de Indagine († 1475), dont ilsera lait mention dans un article à part, à cause du grandnombre de ses ouvrages scripturaires, bien qu’ils soienttous restés manuscrits. — Henri Loen, prieur de Bruxelles(† 1481), a composé des commentaires sur les Psaumes.
— En l’année 1487 moururent deux commentateurs char
treux, Henri Arnoldi et Henri Dissenius; le premier, prieurde Bâle, a écrit des commentaires sur saint Marc et saintJean et une Passion selon la concordance des Evangilesqui existe encore manuscrite à la Bibliothèque de Bâle; le second, religieux de la maison de Cologne, a laissé: Viridarium in Psalterium, 4 vol., manuscrit; PostillœinEvangelio de sanctis, 1 vol., manuscrit; Expositio Apocalypse, manuscrit; In Evangelio dominicalia expositiones, manuscrit; Consolationes in Cantica canticorum, 8 vol., manuscrit. — On trouve dans les deux dernierstomes de la Bïbliotheca ascetica de Bernard Pez, bénédictin, les huit livres d’explications sur le Cantique parNicolas Kempf, strasbourgeois, prieur de la chartreuse deGemnitz (Autriche), mort en 1497. — Enfin, c’est pendantle xve siècle qu’écrivirent leurs ouvrages les religieux suivants: Werner Rolewinck, chartreux à Cologne (fl502): In Thobiam Expositio; In Acta Apostolorwm commentarii; Vita sancti Pauli libri vu; In omnes D. Pauliapostoli Epistolas et in omnes Epistolas canonicas expositio.— Pierre Roux des Bettons ( Ruffi), général del’ordre († 1503), auteur de commentaires sur les Psaumeset sur le Cantique des cantiques, tvmbroise Alentsen, prieur de Nordlingen (Allemagne) († 1505), dont labibliothèque de la ville de Bâle conserve les manuscrits, intitulés: Psalterium Davidis cum glossa interlineari, in-f°; Glossa interlinearis in vu capita Matthasi cumprologo et conclusione in Evangelistas et Evangelium, in-f°. — Jean de Louvain († 1507): Principium utriusqueTestamenti, manuscrit de la bibliothèque de Strasbourg.
Le XVIe siècle nous fournit plusieurs écrivains chartreuxdont les travaux sur l’Écriture Sainte n’honorent pas moinsl’ordre que ceux de leurs confrères du siècle précédent.Et d’abord il convient de louer les religieux de la chartreusede Cologne qui entreprirent de livrer à l’impressionles commentaires de Denys sur les Livres Saintset tous ses autres ouvrages. Plus de vingt volumesin-f° et un certain nombre d’autres de divers formatsresteront comme un monument impérissable du zèlede ces savants religieux et du bien qu’ils ont procuréà l’Église de Dieu. En 1531, Thierry Loher, vicaire decette maison (-j- 1554), le plus infatigable de ces éditeurs, publia en un volume in-16 le Monotessaron de Gersonet le Monopanton de Denys, pour faciliter l’intelligenced’une lecture suivie des Evangiles réunis en unseul livre, et des Épîtres de saint Paul exposées sur unplan uniforme et divisées selon les matières dont ellestraitent. Cet opuscule fut réimprimé en 1546 et 1586.Le même religieux retoucha une vieille traduction allemandedes Psaumes et des hymnes de l’Église, faitepar un chartreux anonyme, y ajouta un commentairetiré des œuvres de saint Augustin, de Denys et deLudolphe, et la publia sous ce titre: Psalter laleinund teutsch, etc., Cologne, 1535, 1536 et 1562. — JeanAldenrait ( 1532) enrichit l’édition des commentairesde Denys d’une table des sentences les plus remarquables, qui a été reproduite dans d’autres éditions. —Jean Juste Lansperge († 1539) composa, en la mêmechartreuse de Cologne, des paraphrases et des sermonssur toutes les épltres et sur tous les évangiles de l’année, ainsi que des homélies et des considérations surla passion du Sauveur. Ces ouvrages ont été imprimésplusieurs lois. — Laurent Surius, le célèbre auteur desVitse sanctorum, mérite une place dans ce groupe par latraduction en latin des ouvrages de Frédéric Staphylus: Apologia de vero germanoque Scriptural Sacrât intellectu, De Bibliorum in idioma vulgare translatione, Cologne, 1561; Prodromus in defensionem Apologise, Cologne, 1562; Absoluta responsio de vero ScripturseSacrât intellectu, Cologne, 1563. De plus, Surius publiaaussi le Recueil des homélies des Pères sur les évangilesde l’année, par Alcuin, et l’enrichit de sermons exégétiques, Cologne, 1567, 1569, 1576, 1604, et Venise, 1571.
II.
20 Cil CHARTREUX (TRAVAUX DES) SUR LES SAINTES ÉCRITURES
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— Jean Reckschenkel, prieur de cette même chartreusede Cologne († 1611), composa des commentaires sur lesPsaumes, dont une partie (Ps. lvii-cxxxiii) était devenuedans ces derniers temps la propriété de sir Philipps, à Jliddlehill (Angleterre). — Enfin Théodore Petrejus(† 1640) publia en 1595, à Cologne, l’histoire de Jonasen vers latins, avec les commentaires sur le même prophètedu P. Feu-Ardent. — Dans les autres chartreusesd’Europe, il y eut aussi, à la même époque, des hommesremarquables par leur science, dont les ouvrages sur lesLivres Saints méritent une mention: François Dupuy, généralde l’ordre († 1521), est l’auteur d’une Catena aureasuper Psalmos, Paris, 1510, 1520, etc. — Michel Torrez, espagnol († 1527), a écrit sur les Psaumes et sur les grandsProphètes (manuscrit). — Thomas Spenser, anglais (-j-1528), a laissé une exégèse de l’Épitre aux Galates. — Jean Batmanson, prieur de Londres (-ꝟ. 1531), a expliqué le Cantiqueet les Proverbes. — Guillaume de Branteghem, chartreux d’Anvers, a publié: 1° Enchiridion, complusculaeorum quss in Veteris Testamenti sacris Bibliistraduntur picluris expressa conlinens, addito insupertextu, Anvers, 1535; 2° Jesu Christi vitajuxta IV Evangelistarumnarraliones artificio graphices picla, Anvers, 1537, 1540, etc.; traduite en français, Anvers, 1537, 1539, 1540; Paris, 1540; Lyon, 1541, etc. — Pierre Cousturier(Sutor), prieur de la chartreuse de Paris, écrivit son livreDe translatione Biblise et novarum interpretationumreprobatione, Paris, 1524, 1525, contre les traductions deLe Fèvre d’Étaples et d’Érasme. Celui-ci ayant publié uneapologie en sa faveur, Baie, 1525, Cousturier lui répliquapar une Anti-Apologia, Paris, 1526. — Un certain PaulDenys, chartreux, publia à Venise un recueil de sentencestirées des Épîtres de saint Paul, 1538. — Jean Picus, prieurde Dijon [f 1545), a fait imprimer un commentaire surle Cantique, P’errare, 1492; Paris, 1524; des paraphrasessur les Psaumes Miserere et Deus misereatur nostri, Paris, 1540, ainsi que sur les Psaumes pénitentiaux, Paris, 1542, et sur les autres Psaumes. — Jean Volon, généralde l’ordre († 1553), a aussi commenté le Psautier, manuscrit.— Lœvin Ammonius, belge († 1558): Tractatusin parabolani de filio minore natu, Louvain, 1542. —Les huguenots, en détruisant par le feu la chartreuse deCastres, en 1567, nous ont privés de huit gros volumes decommentaires sur rÉcriture Sainte, composés par Jeande Libra, prieur de cette maison († 1582). — Le vénérableSchoonhceven, condamné à être pendu, en haine de la foicatholique, par les calvinistes de Hollande, mais qu’unemort subite surprit au pied de la potence (1572), avaitcomposé en langue vulgaire une explication du Décaloguepar d’autres textes de l’Écriture, manuscrit. — On attribueà Jean Billy, prieur de Bourbon-lès-Gaillon (fl580), une petite Bible spirituelle. — André Capilla, chartreuxde Scala Dei (Espagne), mort évêque d’Urgel, en 1609, est l’auteur d’un commentaire sur Jérémie, imprimé en1586, à la chartreuse de Scala Dei. — Sylvius Badulati, prieur de Rome († 1587), écrivit des opuscules sur lesÉpîtres de saint Paul. — Le 27 décembre 1591 mourut àVal-de-Christo (Espagne) Jean de Alba, qui a laissé de nombreuxtravaux sur tous les Livres Saints, et dont quelques-unsont été livrés à l’impression: Sacrarum Semioseonanimadversionum ex utriusque Testamenti lectione commentarius, Valence, 1610; Venise, 1631; Selectx annotationesin varia utriusque Testamenti difficillima loca, Valence, 1613; Floridus manipulus divinse Scripturse, Valence, 1615. — Pierre Carbo, prieur de Briinn, enBohême (1591), a publié plusieurs ouvrages scripturaires.Voir col. 253. — L’Espagne fournit à l’ordre un autre religieuxcélèbre par sa science: c’est Etienne de Salazar(† 1596), qui se démit de sa charge de prieur afin d’avoirplus de temps à consacrer aux commentaires de l’Écriturequ’il avait entrepris. Nous en ferons mention dans unarticle à part. — Enfin Jean Gérulphe, chartreux de Louvain(† 1605), clôt cette liste d’écrivains du xvie siècle par
sa traduction des Proverbes et de l’Ecclésiaste en hexamètreslatins (manuscrit).
Le xviie siècle ne le cède guère aux deux siècles précédentspar le nombre et le mérite des travaux sur l’Écrituredus à l’ordre des Chartreux. — Jean Valero, prieurde Scala Dei {-f 1614), a laissé, manuscrit, un travail intituléAnnotationes et glossse inBibliam sacram. — FaustinSalerno, chartreux de Naples (-f 1623), a commenté lesPsaumes (manuscrit). — Jean Dagonneau, prieur duMont-Dieu († 1623), publia en 16Il son ouvrage SusannaDanielica. Il avait aussi expliqué l’Évangile de saint Jean( manuscrit). — Pierre Torres, profès de Porta - Cseli(Espagne) († 1631), mérite d’être cité pour son manuscritÈxplicaciones de varias lugares de la SagradaEscritura. — Bruno d’Attringues, général de l’ordre(† 1632), composa des commentaires sur l’Écriture, surtoutsur les Psaumes, qui n’ont jamais été imprimés.
— Jean Dinges, religieux de la chartreuse de Cologne(† 1636), a écrit deux livres sur les Psaumes, et quatreautres intitulés Compendium commentariorum Salomonis(manuscrit). — Polycarpe de la Rivière, mortvers 1640, publia l’ouvrage suivant: L’éloquent amoureux, ou Saintes pensées sur le Cantique de Salomon.
— Jean Poullet, prieur de Valprotonde († 1647), a aussifait un exégèse du Cantique (manuscrit). — Vers 1650vivait à la chartreuse de Naples Vincent Suriano, auteurdes manuscrits suivants: 1° Homiliarium secundumMatthseum, 2 vol.; 2° Sermones in aliquos Psalmos; 3° In EvangeliumS. Joannis; 4° De creatione hominis; 5° De Paradiso terreslri; 6° De Adam et Eva. — Unautre chartreux de Bologne, François de Bruneltis († 1648), a laissé cinq volumes in-f° de commentaires sur le Pentateuque, les Actes des Apôtres et la concordance desÉvangiles. — Thomas Cantini, prieur de la chartreuse deCalabre (-j- 1649), est l’auteur d’un opuscule publié àNaples, en 1859, intitulé Expositio in Canticum canticorwm(in-32). — Laurent Wartemberg, prieur de Gemnitz(-j- 1667), a composé un commentaire sur la Genèse, dont une partie se trouvait encore, au siècle dernier, dansla bibliothèque de la susdite maison. — François Ganneron, chartreux du Mont-Dieu (-f 1668), auteur d’un trèsgrand nombre d’ouvrages, presque tous inédits, a écritles traités scripturaires suivants: 1° Scénopégie, ou Descriptiondes tabernacles des anciens Hébreux, distinguésen 72 mansions, qui se retrouvent depuis la vocationd’Abraham jusqu’à l’entrée de la Terre Promise (manuscrità la bihliothèque de Mézières); 2° Medulla totiusvitse spiritualis ex meris locis et exemplis Sacrse Scripturseelicilæ (manuscrit, ibid.). — Bruno de Solis y Valenzuela, américain, profès de Paular (Espagne) (fl677), a écrit les ouvrages suivants: 1° Aller Job, Tobias (manuscrit); 2° El Panai de Sanson (manuscrit); ’S EnchiridionVeteris et Novi Testamenti (manuscrit); 4° Commentariolusin Psalmos (manuscrit). — Vers 1680, lechartreux napolitain Innocent Casanova († 1727)’publiatrois volumes de sermons intitulés Gli empirei fiori deiVangelo moralizzato, nel corso festivo di tutto V anno.On a aussi du même auteur: Expositio septem Psalmorumpœnitentialium (manuscrit). — À la chartreuse deMiratlorès, près de Burgos (Espagne), mourut en 1685le savant religieux François Lamberto y Chabarry, auteurd’une histoire de la Bible en trois volumes in-f° (manuscrit).— Janvier de Simone, chartreux de Naples († 1687), a laissé un manuscrit portant ce titre: Totius Sacrse Scripturxflores cum scholiis glossx ordinariæ et interlinearisNie. Lyrani et Emm. Sa. — Pierre Antoine deMouxy de Loche, prieur de Turin (-f-1688), composa uneCatena sacra in Cantica canticorum (manuscrit). —Joseph Bonanat, profès de Scala Dei (Espagne) (fl69I), rédigea en vers latins, dans le sens mystique, une exégèsedes Psaumes et une autre sur le Cantique. — Joseph LeTellier, prieur de Rouen († 1693), composa en françaisune Explication morale du livre de Job, publiée à Naples, 613 CHARTREUX (TRAVAUX DES) SUR LES SAINTES ÉCRITURES — CHASLUIM 614
en 1858. — Charles Jacquet, profès de Paris, a laissé uneparaphrase du Pentateuque, qui se trouve actuellementà la bibliothèque de Saint-Pétersbourg. — Nous avonssignalé plus haut quelques-uns des ouvrages scripturairesd’Innocent Le Masson († 1703). On trouvera dans unarticle particulier les titres de ses autres opuscules. —Swibert Moeden, chartreux de Mayence († 1705), publiaen 1697, à Francfort, son Florilegium Evangelicum siveComment, in Monotessaron 1 V Evangeliorum (in-f°). —Bonaventure d’Argonne, religieux de Bourbon-lés-Gaillon(† 1704), est le dernier écrivain chartreux que nous ayonsà signaler au xviie siècle. Son Histoire de la théologiefut publiée en deux volumes, en 1785, à Lucques, en Italie, par les soins du R. P. Fassini. Les trois premiers livresde cet ouvrage, qui forment le premier volume, sont consacrésà la théologie de l’Ancien Testament, c’est-à-direaux questions qui servent aujourd’hui d’introduction auxLivres Saints. La Grande-Chartreuse conserve encore untraité manuscrit du même auteur: Introduclio ad lectionemSacrae Scripturæ collecta ex sanclis Patribus etscriptoribus ecclesiasticis.
Au xviiie siècle, les chartreux n’abandonnèrent pasleurs anciennes traditions au sujet de l’étude de l’ÉcritureSainte. Mais la suppression de presque toutes lesmaisons de l’ordre et la création de la congrégation d’Espagneeurent pour résultat la distraction de la plupart desmonuments qui pouvaient nous renseigner à cet égard.Voici néanmoins quelques noms d’auteurs que nous avonspu recueillir: Urbain de Malarcher, prieur de Bosserville, près Nancy († 1709), écrivit un commentaire: In Canticumcanticorum ex divo Bernardo, ouvrage manuscritin-f°, qui se trouve à la bibliothèque de Grenoble. —Bonaventure Bonnet, profès du Val-Saint-Pierre († 1728), est l’auteur d’un opuscule manuscrit conservé à la mêmebibliothèque, intitulé Malleolus crucis mysticx, id est, enucleatio veritdtis quse latel in cortice Scripturarumcanonicarum. — Jean Wagener, mort prieur de la chartreusede Cologne (1730), a laissé un commentaire manuscritsur les cinquante premiers psaumes, et publiéune paraphrase abrégée du Psautier: Psalterium Davidisparaphrastico-morale, in-8o, Cologne, 1725. — InnocentHubernagel, allemand, profès de Trisulti (États pontificaux) (-j- 1735), a écrit en vers latins sur les sujets suivants: In fastos mosaïcos; in Psalmos Davidis; inIV Evangelistas; in Acta aposlolica. — Raymond Nicolan, religieux de la chartreuse de Majorque, vers 1737, aexpliqué les Figuras del Viejo Testamenlo alusivas à laVirgen Maria (manuscrit). — Claude Guichenon, prieurd’Orléans († 1740), a laissé un manuscrit in-4° intitulé: Brèves annolationes in præcipua et dif/iciliora locaPsalmorum, qui se trouve à la bibliothèque de Loches.
— Un religieux anonyme écrivit, en 178(3, un traité deperfection religieuse composé uniquement des textes del’Écriture. Cet ouvrage manuscrit est aux archives de laGrande -Chartreuse. — Joseph de Martinet, chartreux deMarseille, célèbre par ses vertus et par son zèle à exercerlé saint ministère dans cette ville pendant la Terreur, mort en odeur de sainteté, le 12 juin 1795, a laissé uncertain nombre de traités et de commentaires sur lesLivres Saints, dont il sera parlé avec plus de détails dansun article spécial.
Au commencement de notre siècle, un chartreux anonymede Venise entreprit de mettre en un meilleur ordrela partie littérale du commentaire de Denys Rickel surles Psaumes. Ce travail, en un gros volume in-f°, setrouve à la chartreuse de Sélignac (Ain). D’autres religieuxde l’ordre ont continué à notre époque à s’adonnerà l’étude des Saintes Écritures et à composer descommentaires pour leur usage personnel, mais ils n’ontpas été donnés au public.
Pour développer de plus en plus le goût et l’intelligencedu texte sacré et pour en faciliter l’élude, l’ordre a faitréimprimer, à la chartreuse de Montreuil-sur-Mer, les
commentaires de saint Bruno, de Ludolphe et de Denysle Chartreux, et en a mis des exemplaires dans toutes lescellules des religieux de chœur. De l’imprimerie de cettemaison sont sortis aussi les ouvrages scripturaires suivants: Liber Psalmorum Vulgalx editionis, in-16, 1881; Biblia sacra Vulgalas editionis ad usum sacri Ordiniscartusiensis, 1 in-f°, 1884; SanclaJesu Christi Evangelia, in-8o, 1884; Epistolm B. Pauli apostoli, in-8o, 1884. Elleprépare en ce moment une nouvelle édition des œuvrescomplètes de Denys. Ses seuls commentaires sur l’ÉcritureSainte formeront quinze volumes grand in-8o, àdeux colonnes. Le texte sera conforme aux éditions donnéespar les chartreux de Cologne. M. Autore.
- CHASELON##
CHASELON (hébreu: Kislôn, «espérance;» Septante: XotuXwv), père d’Élidad, de la tribu de Benjamin.Num., xxxiv, 21.
- CHASLUIM##
CHASLUIM (hébreu: Kasluhim; Septante: Xoto^wviet’p.), nom d’un peuple descendant de Mesraïm, mentionnéseulement dans la Genèse, x, 14, et dans le passageparallèle du premier livre des Paralipomènes, I, 12(Dans le premier endroit, la Vulgate écrit Chasluim, etdans le second Casluim). Le Targum de Jonathan rendKasluhim par Pentapolites; celui de Jérusalem, parPentascénites. Voir Walton, Biblia Polyglotta, t. iv, p. 18.
I. Identification. — Il est impossible de dire aveccertitude quel est le peuple ainsi désigné. — 1o Bochart, Phaleg, iv, 31, Opéra, Leyde, 1C92, col. 285-290, l’aidentifié avec les Colchidiens, qui étaient une colonieégyptienne, d’après plusieurs auteurs anciens. Apollonius, Argonaut., iv, 277; Valerius Flaccus, Argonaut., v, 421; Hérodote, II, 104; Diodore de Sicile, i, 28, 55; Denis Périégète, p. 689; Ammien Marcellin, xxii, 22, etc.Un grand nombre d’exégètes ont adopté cette opinion: Gesenius, Thésaurus, p. 702; Frd. Keil, Genesis undExodus, 2e édit., 1866, p. 119, etc. La Colchide fut célèbredans l’antiquité par l’expédition fabuleuse des Argonautes, qui allaient y conquérir la toison d’or. C’est une contréed’Asie d’une fertilité merveilleuse, arrosée par le Rioné, ancien Phase, et le Tchorok, ancien Bathys. Elle avaitpour limites le Caucase au nord, l’Ibérie à l’est, l’Arménieau sud, et le Pont-Euxin à l’ouest. Elle formaaujourd’hui le gouvernement russe de Kotatis, comprenantles provinces d’Iméréthie, de M ngrélie et de Gourie.
— Chardin, Voyage en Perse, 3 in-4o, Amsterdam, 1711, ’t. i, p. 41, dit en parlant des Mingréliens: «Je n’ai pu…m’assurer autant que j’aurais voulu de l’origine de cettenation, que Diodore le Sicilien et d’autres auteurs fontsortir de l’Egypte et être une colonie de Sésostris, ce quin’est pas fort vraisemblable.» Quoi qu’il en soit d’ailleurs, il y a tout lieu de croire que la Genèse n’a pas vouludésigner par les Chasluim les habitants de la Colchide.Fr. de Hummelauer, Commentarius in Genesim, in-8o, Paris, 1895, p. 323. Elle énumère, en effet, ces descendantsde Mesraïm au milieu d’autres peuples qui habitaientl’Egypte ou son voisinage, et semble indiquer parlà qu’ils demeuraient dans les mêmes régions.
2o D’autres exégétes, tels que Chr. J. Bunsen, VollstàndigesBibelwerk, t. i, Leipzig, 1858, p. 26, croient queles Chasluim habitaient entre Gaza et Péluse, sur les bordsdu lac Serbonis et le long du rivage de la Méditerranée, dans la province de Cassiotis ou Cassiotide, ainsi nomméedu mont Casius, à la frontière nord-ouest de l’Egypte.Pline, H. N., v, 12, 14; Strabon, xvi, p. 759; Etienne deByzance, p. 455. On ne peut du reste donner d’autrepreuve en faveur de cette opinion que la similitude dela première syllabe dans Kas-luhhn et Cas-siotis, cequi est un argument bien faible. Cf. Knobel, Die Vôlkertafelder Genesis, in-8o, Leipzig, 1850, p. 290. M. G. Ebersa cherché à établir plus solidement cette opinion dansson Aegypten und die Bûcher Mose’s, in-8o, Leipzig,
1868, p. 120-127. Il rapproche la forme grecque de cenom dans les Septante, Xz<J| «ùviei’|a, du mot égyptienhesmen, qui signifie «sel, nitre», et il en conclut queles Chasmonim (Chasluim) habitaient une terre salée ounitreuse, comme les environs du mont Casius, et s’occupaientde préparer le nitre ou de saler soit les cadavreshumains, soit les poissons qu’on conservait de la sorte etdont on Élisait une grande consommation en Egypte.Cette étymologie et, par suite, les conséquences qu’entirent les savants allemands sont fort contestables. Tantqu’on n’aura pas trouvé dans les documents égyptiens lenom des Chasluim, on ne pourra émettre à leur sujetque des hypothèses plus ou moins plausibles. La secondeopinion paraît d’ailleurs plus probable que la première.
II. Les Chasluim et les Philistins. — La Genèse, x, 14, ajoute en parlant des Chasluim, d’après la traductionde la Vulgate: «d’eux sont sortis les Philistins.» le texte hébreu porte à la lettre: «Les Kasluhim, quede là (miS-sàm) sont sortis les Philistins.» Sdm est unadverbe de lieu et s’applique par conséquent au paysqu’habitaient les Chasluim, de sorte que ce membre dephrase exclut le lien généalogique entre les deux peupleset signifie seulement que les Philistins, avant de s’établirdans la Philistie, avaient habité le pays des Chasluim.Amos, ix, 7, dit que les Philistins venaient de Caphtor, et Jérémie, xlvii, 4, les appelle «les restes de l’île deCaphtor» (texte hébreu). H n’existe aucune contradictionentre ces divers passages, puisque les Philistinspouvaient venir de Caphtor en passant par le pays desChasluim. On n’est donc pas obligé de supposer uneinterversion dans le texte de la Genèse, x, 14, commel’ont fait certains commentateurs, et de lire: «Mesraïmengendra les Ludim…, et les Chasluim et les Caphtorim, d’où sont sortis les Philistins;» au lieu de la leçon denos Bibles: «Mesraïm engendra les Ludim…, et lesChasluim, [de la terre] desquels sont sortis les Philistins, et les Caphtorim.» Ce membre de phrase a étéajouté par l’auteur sacré à cause du pays qu’habitèrentles Philistins à côté des tribus israélites et du rôle importantqu’ils jouèrent dans l’histoire du peuple de Dieu.Cf. Exod., xiii, 17; xv, 14. Pour l’origine des Philistins, voir Philistins. F. Vigouroux.
- CHASPHIA##
CHASPHIA (hébreu: Kâsifyâ’; Septante: èv àpyupi’cptoO touou), ville ou contrée habitée par une importantecolonie de Juifs exilés, dont la plupart étaient desjN’athinéens. I Esdr., viii, 17. Esdras, parti de Babylonedepuis neuf jours, pour retourner à Jérusalem, et s’arrétantprès du fleuve Ahava, remarqua qu’il n’y avait pasun seul lévite dans sa caravane, alors que les serviteursdu Temple auraient dû être les premiers à se présenterpour rentrer dans la ville sainte. Il envoya donc unedélégation de onze membres à Eddo, chef de la colonie, pour lui demander des ministres sacrés. I Esdr., viii, 15-17. — Chasphia est jusqu’ici resté complètement inconnu.Les Septante, rattachant le mot à késéf, <t argent,» ont donné une traduction incompréhensible, à moinsde supposer avec certains exégètes qu’il s’agit ici d’une «maison du trésor» à Babylone même; ce qui n’est guèrevraisemblable. Quelques auteurs placent cet endroit dansle royaume de Perse ou au sud de la Médie, là où setrouvaient, au dire de Strabon, xi, 506, et d’Hérodote, vu, 67, de nombreuses colonies de Caspiens, dans unerégion adjacente à la mer Caspienne, d’un côté, et, del’autre, à la Babylonie, peu éloignée par là même du paysde l’exil. Cf. G. B. Winer, Biblisches Realworterbuch, 1847, t. i, p. 223; J. Furet, Hebrâisches Handwôrterbuch, 1876, t. i, p. 617. Le premier de ces savants fait remarquerque le livre de Tobie, I, 16; iii, 7, mentionne desJuifs dans cette contrée, et le second consacre l’articleKâsifyâ à établir des rapprochements entre ce mot, quiveut dire blanc, et Y Albanie, située au pied du Caucase,
près de la mer Caspienne; puis la Caspiana, le montCaspius, et les portes Caspiennes des anciens. Quoi qu’ilen soit de ces assimilations, le territoire indiqué noussemble trop éloigné pour répondre aux données du contexte.Esdras, en effet, pendant les trois jours qu’il passaprès du fleuve Ahava, eut le temps d’envoyer chercheret de recevoir les lévites, I Esdr., viii, 15, 18; ils ne devaientdonc pas habiter très loin. Voilà pourquoi il sembleraitplus naturel de chercher Chasphia dans le pays de
Babylone.
A. Legendre.
- CHASSE##
CHASSE (hébreu: sayid; Septante: aypi; Vulgate: venatw), poursuite et prise du gibier (fig. 217). La pratiquede la chasse est presque aussi ancienne que l’humanité.Elle découle naturellement de la supériorité queDieu accorda à nos premiers parents sur le reste de lacréation, Gen., i, 26, 28, et devint bientôt un desmoyens de subsistance de l’homme. Gen., ix, 2-4. Deplus, à une époque où l’humanité était encore peu répanduesur la terre, tandis que les animaux y étaient trèsmultipliés, la chasse dut être un des moyens de défenseauxquels l’homme eut bientôt à recourir. Cf. Exod., xxiii, 29. Même après de longs siècles de civilisation, devastes provinces étaient tellement infestées par des bêtesfauves, que des monarques puissants organisèrent contreelles des battues générales non moins importantes à leursyeux et à ceux de leurs sujets que leurs grandes expéditionsmilitaires. C’est ce que nous apprennent les inscriptionsassyriennes, et en particulier celle de ThéglathphalasarI «(cf. A. H. Sayce, dans les Records of thepast, nouv. série, t. i, p. 112-113). Nemrod, le premierchasseur que nomme l’Écriture, est représenté dans laBible comme le «robuste chasseur devant Jéhovah» etun puissant conquérant. Gen., x, 8-10. — Ismaël, destinéà vivre dans le désert de Tharan, «devint habile à tirerde l’arc,» Gen., xxi, 20, 21, et tel fut aussi, semble-t-il, la pratique ordinaire d’Ésaù. Gen., xxv, 27-28. — Le longséjour d’Egypte familiarisa sans doute les descendants deJacob avec l’art de la chasse, et la loi mosaïque leur enpermit la pratique. Lev., xvii, 13; Deut., xii, 15. Mais laBible ne nous donne aucun renseignement sur leur manièrede la poursuivre. Elle nous dit seulement que Salomonput chaque jour fournir sa table et celle de sesnombreux serviteurs du gibier le plus exquis et le plusabondant. III Reg., IV, 23. Mais la loi mosaïque énumérantparmi les animaux dont il était permis de mangerla chair un certain nombre d’animaux sauvages, Deut., xiv, 5, 11-18; Lev., XI, 13-19 (voir t. i, col. 622), ellesuppose par là même la pratique de la chasse.
I. Animaux poursuivis a la chasse. — Ils peuvent êtredivisés en deux catégories: les bêtes sauvages et les oiseaux.
— 1° Bêtes sauvages. — À leur arrivée jeu Palestine, lesIsraélites y trouvèrent de nombreux animaux sauvages, Exod., xxiii, 29; Jud., xiv, 5, 6; xv, 4, et du gibier enabondance. Lev., xi; Deut., xiv. Voici la liste alphabétiquedes animaux sauvages poursuivis à la chasse: Addax, Deut., xiv, 5, une espèce d’antilope, t. i, col. 669, probablementreprésentée sur les sculptures de Béni -Hassan.Cf. Wilkinson, Manners and cusloms of the ancientEgyptians, 2e édit., 1878, t. ii, p. 90. — Ane sauvage.Job, xxxix, 5-8; Eccli., xiii, 23. Les traits sous lesquelsle livre de Job décrit l’onagre correspondent bienà ce que nous en apprennent les monuments assyriens, où on le voit capturé par une meute de chiens, G. Rawlinson, Ancient monarchies, 2e édit., t. i, p. 517; pris aulasso par les chasseurs, G. Rawlinson, ibid., ou succombantsous leurs flèches. G. Rawlinson, ibid., p. 516. —Aurochs. Ps. XXI, 22 (hébreu: xxii, 21); Job, xxxix, 9-12; Is., xxxiv, 7. La Bible en parle en des termes quidénotent sa vigueur et son naturel farouche, et tel ilapparaît sur les bas-reliefs de Nimroud. L’un d’eux nousle représente luttant avec un lion, G. Rawlinson, ibid., p. 512; d’autres nous le montrent poursuivi par le roi dans
son char et suivi de ses chasseurs. G. Rawlinson, ibid., p. 513. Parfois non moins de cinq flèches paraissent avoirété nécessaires pour lui donner la mort. Voir Aurochs, t. i, col. 1203. — Béhémoth ou hippopotame. Job, xl, 10-19. Les allusions de Job à la manière de chasserl’hippopotame correspondent exactement à ce que nousmontrent les chasses représentées sur les monumentségyptiens. Voir Béhémoth, t. i, col. 1552-1553. — Bouquetin.Prov., v, 19; Job, xxxix, 1-4. Ce gracieux animalétait chassé en Assyrie, Fr. Lenormant, Histoire anciennede l’Orient, t. v, p. 18; G. Rawlinson, Ancient monarchies, t. i, p. 521, aussi bien qu’en Egypte. Wilkinson, Manners and customs, t. ii, p. 88, 92. Voir Bouquetin, t. i, col. 1893. — Bubale. Deut., xiv, 5; III Reg., iv, 23.Celte espèce d’antilope à la chair délicate était poursuivie
Hist. anc, t. iii, p. 324; là, on aperçoit des gazellespoursuivies par des chiens, G. Rawlinson, Ancient Egypt, t. i, p. 281; ailleurs, on remarque un homme portanttrois gazelles destinées à un parc de bêtes sauvages. Wilkinson, Manners and customs, t. ii, p. 83. Sur un monumentde Khorsabad, Layard découvrit un chasseur rapportantune gazelle sur ses épaules. G. Rawlinson, Anc.mon., t. i, p. 522. Enfin elle est représentée poursuiviepar un chien sur le monument de Kaïm-Hurmul. VanLennep, Bible Lands, in-8°, NewYork, 1875, t. i, p. 250.
— Hyène. Jer., xii, 9. Les monuments deThèbes nous lamontrent poursuivie par les chasseurs, Wilkinson, ibid., t. ii, p. 92, ou rapportée par eux, les pattes liées à uneperche. Wilkinson, ibid., p. 78. — Léopard. Hab., i, 8; Ban., vii, 6. Deux espèces de léopards apparaissent sur
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218. — Héthéens chassant le cerf. Bas-relief du x «siècle environ avant J.-C. Musée du Louvre.
en Egypte avec arc et flèche (voir Bubale, 1. 1, col. 1955); elle était aussi prise au lasso. Wilkinson, Manners andcustoms, t. ii, p. 87. — Cerf, Gen., xlix, 21; Deut., xiv, 5; III Reg., IV, 23; Ps. xli, 2 (hébreu: xlii, 1).La fuite du cerf poursuivi par le chasseur est vivementreprésentée sur un monument héthéen du Louvre(fig. 218) et sur les sculptures de Koyoundjik. G. Rawlinson, Ancient monarch., t. i, p. 518, 519. Un basreliefde Ninive nous montre plusieurs cerfs pris aufilet. Voir plus haut, fig. '150, col. 447. Parmi les animauxà détruire comme nuisibles à l’agriculture, lesinscriptions ehaldéennes nomment le cerf. J. Menant, La bibliothèque du palais de Ninive, p. 168. Voir Cerf, t. ii, col. 416. — Chacal ou renard. Jud., xv, 4; Cant., n, 15. Il était activement poursuivi en Egypte. Wilkinson, Manners and customs, t. ii, p. 91. Voir Chacal, t. ii, col. 475. — Crocodile. Job, iii, 8; XL, 20-xli.(hébreu, 25-xli); Is., xxvii, 1; Ezech., xxix, 3-4; xxxii, 2-4. Ce que l'Écriture nous en dit est confirmépar les monuments égyptiens. On le chassait en canot, lance en main. G. Rawlinson, Ancient Egypt, 1. 1, p. 561.
— Gazelle, autre espèce d’antilope. Deut., xii, 15; xiv, 5; III Reg, iv, 23; Prov. vi, 5; Eccli., xxvii, 22. Is., xiii, 14.Ce gracieux et agile animal est souvent représenté surles monuments d’Egypte. Ici, on voit le chasseur rapportantune gazelle sur ses épaules, Fr. Lenormant,
les sculptures de Béni-Hassan. Wilkinson, ibid., t. ir, p. 90.Le léopard est aussi représenté sur une coupe de Nimroud.Rawlinson, Anc. mon., t. i, p. 223. — Lièvre. Lev., xi, 6; Deut., xiv, 7. Il était poursuivi comme gibier parles anciens Égyptiens et Assyriens. Ainsi, sur un tombeaude Thèbes, on voit un chasseur rapportant un lièvrevivant, Fr. Lenormant, Hist. anc, 9e édit., t. iii, p. 324; une scène analogue se remarque sur un bas-relief deKhorsabad. Rawlinson, Anc. mon., t. i, p. 522. Sur unecoupe de bronze découverte à Nimroud, on aperçoit unesérie de chiens et de lièvres qui alternent, ce qui prouveque la chasse à courre était connue des Assyriens. Rawlinson, ibid., p. 523. — Lion. Gen., xlix, 9; Num., xxiv, 9; Ps. xc, 13; Job, iv, 10; Jer., ii, 15; v, 6; xii, 8, 9; Ezech., xix, 3, 4, 6, 8, 9; xxxii, 2-3; Eccli., xlvii, 3; Amos, m, 12; Nah., ii, 11-13. Point d’animaux dont le nom soitplus souvent mentionné dans la Bible. Lt chasse auxlions est représentée sur les monuments égyptiens et surtoutsur les monuments assyriens. Sur une des peinturesde Béni-Hassan, on voit le chasseur se servant d’un lionapprivoisé et dressé à la chasse. Wilkinson, Manners andcustoms, t. ii, p. 88. Voir Lios. — Oryx, espèce d’antilope.Deut., xiv, 15; Is., li, 20. Il est représenté sur unepeinture d’une chasse dans le désert de la Thébaïde.Wilkinson, ibid., t. n. p. 91. — Ours. I Reg., xvii. 31, 35, 37; II Reg., xvii, 8. Il n’apparaît sur les monuments
d’Egypte que dans des scènes où des étrangers payentleur tribut annuel au pharaon, Wilkinson, ibid., t. iii, p. 271; il est représenté sur le rebord d’une coupe assyrienne.G. Rawlinson, Ancient mon., t. i, p. 528.
2° Oiseaux. — La loi mosaïque permettait la chasse auxoiseaux, Lev., xvii, 13; mais par suite des règlementsprohibant de manger la chair des oiseaux impurs, Lev., xi, 13-47; Deut., xiv, 12-19, il est très probable que lesHébreux ne firent jamais la chasse qu’à un petit nombred’espèces d’oiseaux. De fait, on ne trouve dans la Bibled’allusions à la chasse aux oiseaux qu’au sujet des suivants: Autruche. Job, xxxix, 13-18. Cf. Rawlinson, Ane.mon., t. i, p. 228. Voir Autruche, t. i, col. 1280, 1289.
— Passereau. Ps. x, 2 (hébreu: xi, 1); cxxiii, 7; Lev., xiv, 4, 49. — Perdrix. I Reg., xxvi, 20; Eccli., xi, 32.Cf. Rawlinson, Ane. mon., t. i, p. 228; Fr. Lenormant, Hist. anc, t. v, p. 127.
IL Instruments de chasse. — 1° Chasse des bêtessauvages. — Les instruments le plus souvent employéspour la chasse des bêtes sauvages étaient l’arc et les(lèches, le piège, la trappe, le filet et probablement lelasso. — L’arc et les flèches étaient usités chez les Hébreuxcomme chez tous les autres peuples. Gen., xxi, 20; xxvii, 3; Job, xii, 19; Is., vii, 24, etc. Les monumentsnous les montrent employés dans la poursuite des animauxles plus féroces, tels que le crocodile, le lion, l’aurochs.Cf. Rawlinson, Anc. mon., t. i, p. 513; Wilkinson, Manners and customs, t. ii, p. 79. — Le piège et la trappene sont point représentés sur les monuments, mais ilssont très souvent mentionnés dans la Bible. Piège: Ps. lvi, 7; cxviii, 61, 110, etc.; Job, xviii, 9, 10; Jer., xvin, 22; Eccli., xxvii, 29, 32; trappe: Ps. vii, 16 (hébreu, 15); ix, 16 (hébreu, 15); Job, xviii, 10; Is., xxiv, 17, 18, 22; xxviii, 13, etc. Le filet est également souventmentionné dans l’Écriture, Ps. IX, 16; xxiv, 15; xxx, 5; Job, xviii, 8; xix, 6; Is, , li, 20; Ezech., xii, 13; xvii, 20; Osée, v, 1, etc.; mais, de plus, il est représenté sur lesanciens monuments. Les sculptures égyptiennes nousmontrent parfois une vaste étendue de territoire couvertede filets où des animaux de tout genre sont capturés etfinalement dépêchés par les traits du chasseur. Wilkinson, Manners and customs, t. ii, p. 80. Sur une sculptureassyrienne, on voit le filet employé d’une manière analogue.Voir fig. 150, t. ii, col. 447. — Le lasso n’estprobablement mentionné que dans I Cor., vii, 35; maisil figure maintes fois sur les monuments assyriens etégyptiens. En Egypte, on s’en servait pour s’emparerde la gazelle et de l’aurochs. Wilkinson, Manners andcustoms, t. ii, p. 87; en Assyrie, on voit l’âne sauvagepris au lasso. Rawlinson, Anc. mon., t. i, p. 517. —Dans la chasse à V hippopotame, le livre de Job, XL, 17-20, fait mention d’engins moins usités: l’épée, le javelot, la lance, la fronde, la massue et le dard. — On voitpar les monuments des Égyptiens et des Assyriens qu’ilsse servaient du cheval et du chien dans leurs parties dechasse. La Bible n’a qu’une seule allusion à l’emploi ducheval dans la poursuite du gibier. Elle se trouve dansJob, xxxix, 18, et a rapport à l’autruche, c’est-à-dire àun animal que les Hébreux regardaient comme impur, Lev., xi, 16; Deut., xiv, 15, et qui n’existait qu’endehors de la Palestine.
2° Chasse des oiseaux. — L’arc et les flèches étaient sansdoute employés pour la chasse aux oiseaux, Ps. x, 2, 3, cf. Rawlinson, Anc. mon., t. i, p.’228; Lenormant, Hist.anc, t. v, p. 332; mais c’est surtout avec des pièges etdes filets de toute dimension qu’on leur faisait la guerre.Eccle., IX, 12; Prov., i, 17; vii, 23; Ps. cxxiii, 7; Jer., v, 26, 27; Amos, iii, 5; Osée, VU, 12, etc. Pour se faireune idée exacte de ces divers pièges et filets, on n’a qu’àétudier ceux dont les monuments d’Egypte nous ont laissétant de représentations. Wilkinson, Manners and customs, t. ii, p. 102, 103, 110. — Un autre engin qui était trèsprobablement employé par les Hébreux, quoiqu’il ne soit
pas mentionné dans la Bible, est un projectile que lesBédouins de nos jours manient avec non moins de dextéritéque les anciens Égyptiens. Il était fait de boispesant, aplati, et n’offrait qu’un minimum de résistanceâ l’air dans la direction où il était projeté, de sorte qu’unbras vigoureux et exercé pouvait le lancer à une distanceconsidérable, bien que d’ailleurs on s’efforçât toujoursde s’approcher des oiseaux le plus possible, à l’abri desbuissons ou des roseaux. Il est souvent représenté sur lesmonuments d’Egypte, Wilkinson, Manners and customs, t. ii, p. 104, 107, 108, et rappelle le boumërang d’Australie.Cf. Maspero, Histoire ancienne des peuples de.l’Orient, t. i, 1895, p. 59; J. Lubboek, L’homme préhistorique, in-8°, Paris, 1888, p. 402-403. — Dans l’Ecclésiastique, xi, 31-33, on trouve une allusion à un autremoyen de faire la chasse aux oiseaux. Il consistait à seservir d’animaux comme appeaux. Cette méthode estaussi souvent représentée sur les monuments égyptiens.Wilkinson, Manners and customs, t. ii, p. 104, 107, 108.
III. MÉTAPHORES EMPRUNTÉES À LA CHASSE. — L’exercice de la chasse et la pratique de la guerre présententde nombreux traits de ressemblance. Dans l’une et l’autre, on poursuit une proie avec ardeur et acharnement, ouon la capture au moyen de stratagèmes analogues. Plusieursengins sont communs à la chasse et à la guerre, et dans l’une et l’autre ori court souvent des dangerssérieux. Les impressions diverses qu’éprouve le gibiertraqué par le chasseur sont également éprouvées parl’homme innocent ou désarmé fuyant devant un ennemimortel. Ces analogies expliquent comment toutes leslangues, et l’hébreu en particulier, abondent en métaphoresempruntées à la poursuite du gibier ou des animauxsauvages.
1° Métaphores tirées des chasseurs. — Souvent ils sontpris comme type d’ennemis dangereux et acharnés, Ps. ix(hébreu, x), 9, 10; xxx, 5 (hébreu, xxxi, 4); Mich., vii, 2, etc.; la mort elle-même, le plus formidable ennemi del’homme, est assimilée au chasseur qui a fini par atteindresa proie, et qui ne lui permet en aucune façon de s’échapper.Ps. xvii (hébreu, xviii), 5, 6; exiv, 3. Ailleursles impies sont représentés sous l’image d’oiseleurs patiemmentaux aguets pour surprendre leurs victimes. Jer., v, 26; Ps. cxviii, 61, 110. Dans le prophète Jérémie, xvi, 16, nous trouvons les guerriers nombreux, puissants et acharnésde l’Assyrie désignés sous le nom de chasseurs etd’oiseleurs envoyés par Jéhovah pour punir le peupled’Israël. Cf. Ezech., xix, 3-8. Si l’on traduit Ézéchiel, xxxii, 30, comme fait la Vulgate: «là sont tous les princesde l’aquilon et tous les chasseurs,» on voit que les guerriersqui accompagnaient leurs princes dans une expéditionmilitaire sont assimilés à des chasseurs de professionchargés d’accompagner leur maître à la chasse.
2° Métaphores tirées des animaux qui poursuiventleur proie. — Ils forment un second genre de chasseurs, qui fournit une nouvelle source de métaphores. SuivantIsaïe, lvi, 9, et Jérémie, xii, 9, les Gentils sont des bêtesféroces que Jéhovah invite à faire la chasse à son peuplerebelle. Cf. aussi Is., v, 29; Jer., L, 17. De même, Cyrusest représenté comme un oiseau de proie, Is., xlvi, 11, etNabuchodonosor comme un aigle puissant. Jer., xlviii, 40; Ezech., xvii, 3, 12. Le riche qui traite le pauvre sansmerci est semblable au lion qui dévore un âne sauvage, Eccli., xiii, 23; les ravages causés parmi le peuple deDieu par les faux prophètes et les mauvais princes fontassimiler les premiers à des lions ravissants, les secondsà des loups dévorants. Ezech., xxii, 25, 27.
3° Métaphores empruntées aux animaux poursuivispar le chasseur. — Ces métaphores sont aussi nombreusesqu’intéressantes. Semblable au cerf poursuivi par le chasseuret se précipitant altéré vers le ruisseau d’eau vive, le Psalmiste fuyant devant ses ennemis soupire vivementaprès les consolations divines. Ps. xli, 2 (hébreu, xlii, 1).Comme le passereau, le juste n’a, humainement parlant, C23
CHASSE
CHASTETE
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point d’autre ressource que la fuite pour ne pas tomberau pouvoir de puissants ennemis. Ps. x, 2-4 (hébreu, xi, 1-3). Plus heureuse que l’animal environné de toutesparts de pièges et de filets, l’âme dont les regards sonthabituellement dirigés vers Jéhovah peut aisément échapperaux mille perplexités d’ici-bas. Ps. xxiv (hébreu, xxv), 15; cf. Ps. xxx (hébreu, xxxi), 9; xc (hébreu, xci), 3.L’oiseau qui se précipite vers le piège sans soupçonner ledanger est une figure expressive de l’âme qui se précipitesans trop s’en douter vers sa ruine. Prov., vii, 23. Demême que la gazelle qui a été prise au filet et a réussi às’en dégager s’enfuit pour toujours, ainsi l’amitié d’unhomme qu’on a blessé au vif ne saurait être regagnée.Eccli., xxvii, 22; cf. xxii, 25. Qui n’a souvent admiré lacomparaison gracieuse du Ps. cxxm (hébreu, cxxiv), 7?Israël, délivré de la captivité, ressent la même joie quele passereau qui voit soudain se briser le filet qui le retenaitcaptif. Les efforts si courageux que fait la gazellepour se délivrer, ou l’oiseau pour s’échapper, sont uneimage pittoresque des efforts énergiques qu’un hommedoit faire pour se soustraire aux difficultés qu’il rencontreras’il continue à être caution même pour un ami.Prov., vi, 1-5.
4° Métaphores tirées des engins^ de chasse et des manièresde s’en servir. -~ Elles sont les plus nombreuses.La trappe, c’est-à-dire la fosse soigneusement recouvertede branchages et d’un peu de terre, dans laquelle onespère faire tomber les bêtes fauves, est la figure depièges tendus à un ennemi dont on médite la perte.Ps. lvi, 7; lxvhi, 23; cxxxix, 6, etc.; Jer., xviii, 20, 22; Eccli., xii, 15; Prov., xxii, 14; Rom., xi, 9; I Cor., vii, 35.L’emploi de la trappe a aussi fourni le proverbe souventrépété dans la Bible: «Celui qui creuse une fosse y tombera,» pour exprimer la manière dont la justice divines’exerce envers les méchants. Prov., xxvi, 27; Ps. vii, 16, etc. — Pour capturer les bêtes sauvages, on se servaitégalement du piège, que l’on cachait sur leur passage.Prov., i, 15-16; xxii, 5, il désigne par métaphore les dangersinvisibles, mais réels, que l’on court dans la fréquentationdes pervers. Cf. Eccli., ix, 3, 20. Le piège secomposait de deux parties maintenues séparées par unmorceau de bois, et qui, se refermant au moindre contact, retenaient leur captif par la patte: de là les expressionsfigurées qu’on lit dans Job, xviii, 9, 10. — Sous la plumed’Isaïe, xxiv, 17-18, et de Jérémie, xlviii, 43-44, noustrouvons combinées ces deux méthodes de s’emparer desanimaux savages. Elles forment un proverbe qu’Isaïe formuleainsi: «Habitant de la terre, l’effroi, la fosse et lepiège te sont réservés. Celui qui à la voix de la crainteaura fui tombera dans la fosse; celui qui se sera tiré dela fosse sera pris au piège.» Nous avons ici une manièrepittoresque de décrire une ruine complète et assurée. Deplus, il est probable que dans les expressions «l’effroit’est réservé; celui qui à la voix de la crainte aura fui», il faut voir des métaphores empruntées aux grands crispoussés par les chasseurs quand ils faisaient une battue, et au bruit desquels les animaux s’enfuyaient remplis decrainte. — L’emploi du filet pour prendre bétes sauvageset oiseaux a donné lieu à de nombreuses métaphores.C’est ainsi qu’il sert à désigner les machinations desimpies, Ps. ix, 9, 10; xxiv, 15, etc., aussi bien que leseffets terribles et certains de la vengeance divine. Ezech., xii, 13; xvii, 20; xix, 3, 4, 8, etc. On retrouve même dansle Psaume ix, 9, 10, une allusion à la manière dont lesÉgyptiens se servaient du filet pour la chasse aux oiseaux.Dans une peinture égyptienne (tombeau à Béni-Hassan, Lenormant, Histoire ancienne, t. ii, p. 121), on voit leschasseurs baissés, blottis derrière un buisson et tirantà eux un filet rempli d’oiseaux; en un mot^ les chasseurssont représentés tels que le Psaume suppose les méchants.
— Mentionnons en terminant que plusieurs auteurs voientdans les expressions d’Ézéchiel, xix, 3, une allusion àla coutume égyptienne de dresser à la chasse des lions
apprivoisés; et que l’on trouve dans Eccli., XI, 31-33, uneallusion à un usage souvent représenté dans les peintureségyptiennes, à savoir celui de se servir d’animaux commeappeaux, image trop fidèle des attraits trompeurs qui setrouvent dans la compagnie des impies. F. GiGOT.
CHASSEUR. Il en est plusieurs fois question dansl’Écriture. La Genèse, x, 9, dit que Nemrod était unrobuste chasseur (hébreu: gibbôr sayid; Septante: y’Y «î-cjmt]y4; ; Vulgate: robustus venator). — L’Ecclésiaste, vu, 27, compare une mauvaise femme «au piège deschasseurs»; mais le mot venalores, qu’on lit dans laVulgate, n’est exprimé ni dans l’hébreu, Eccle., vii, 26, ni dans le grec, quoiqu’il soit impliqué dans les expressionsmesôdîm et e^psujjia, «pièges de chasse.» — LeSeigneur, dans Jérémie, XVI, 16, dit aux Juifs qu’il enverrades chasseurs, sayyâdîm, c’est-à-dire les Chaldéens, qui, pour les punir de leurs infidélités, les chasserontsur les montagnes, et sur les collines, et dans lestrous des rochers. — Saint Jérôme a probablement luaussi sayijâdim dans Ezech., xxxii, 30, car il a traduitvenatores dans ce passage, comme dans Jer., xvi, 16; mais le texte hébreu porte Sidônî, «le Sidonien,» demême que la Peschito, Symmaque, Aquila, etc. Les Septanteont aussi lu inexactement ffTparviYoi’Aaaoip, «lesgénéraux d’Assyrie.» Voir Chasse.
- CHASSIEUX##
CHASSIEUX (YEUX). La Genèse, xxix, 17, dit en
parlant des yeux de Lia, la sœur de Rachel, qu’elle avaitles yeux rakkôt; la Vulgate a rendu cette épithète parlippi, «chassieux;» mais elle est la seule des versionsanciennes qui ait ainsi interprété le mot hébreu. Rak(pluriel: rakkôt) signifie» tendre, délicat, faible;» c’estce dernier sens qui paraît le mieux convenir ici: àa-zsv£Ï; , comme ont traduit les Septante. Le Targum d’Onkélos, suivi par la version arabe, l’a entendu dans le sensde «beaux», ijà’âijân, signification qui est en désaccordavec le sens du mot hébreu original et aussi avec lecontexte, qui met en opposition un défaut de Lia avecla beauté de Rachel. Cf. aussi I Sam., xvi, 12, où il estdit que David était yefêh’ênayîm, «aux beaux yeux» (Vulgate: pulcker aspectu).
CHASTETÉ. Cette vertu, qui consiste essentiellementdans l’abstention des relations sexuelles illicites, et à undegré supérieur dans l’éloignement de toute pensée etdésir impurs, n’est désignée dans l’Ancien Testament paraucun terme spécifique. Judith, xv, 11; xvi, 26, est louéepour avoir aimé la chasteté; mais le premier de ces passagesne se trouve pas dans les Septante, et au lieu dusecond on y lit: Kat îtoMoi È7U£60[i.T)aav ocJtïjv, «Elle eutbeaucoup de prétendants,» ce qui sans doute, avec lereste du verset, signifie l’amour de Judith pour la chasteté, mais sans exprimer le nom de cette vertu. Il en estde même Sap., iv, 1, où, selon la Vulgate, se trouve l’élogede la race des hommes chastes, tandis que les Septanteexpriment un aphorisme où la chasteté est impliquéesans être exprimée: «Mieux vaut la privation d’enfantsavec la vertu.» Le mot hébreu que la Vulgate rendpar castilas, castus, est tehôrôt, Ps. xi, 7, qui dans cepassage signifie «exemption d’erreur», cf. Ps. xviii, W(hébreu, xix, 10), bien qu’ailleurs il désigne la puretéou l’éclat, soit d’un lieu, Lev., iv, 12; vi, 4; x, 14, soitd’un vêtement, Zach., iii, 5, soit d’un métal, Exod., xxv, 11-Job, xxviii, 19, ou encore la pureté légale, Lev., vii, 19; x, 10; xi, 36, 37; xiii, 13, etc., enfin la pureté morale oul’exemption de péché. Job, xiv, 4; Ps. ii, 12. Jamais ilne signifie la chasteté proprement dite. Dans les Septanteet dans le Nouveau Testament, les mots grecs employéspour désigner la chasteté et l’homme chaste sontèYï-paTEÏa, Act., xxiv, 25; CTx.pxrf l ç, Eccli., xxvi, 20; Tit., i, 8, qui signifient «modération, répression», et, par suite, «continence,» bien que Sap., viii, 21, et Eccli., vi, 28, .
il ait un autre sens; et «yvecoe, I Mach., xiv, 36; I Tim., IV, ’12; v, 2; âY v< 5°H> ll Cor., vi, 6; âfvk, II Cor., xi, 2; I Tim., v, 22; TH., ii, 5; I Petr., iii, 2. En deux autrespassages, le mot grec répondant à castilas de la Vulgateest ue|j.v<Stï]î, I Tim., ii, 2; iii, 4, qui signifie «sainteté, dignité».
La Sainte Écriture loue la chasteté, soit celle qui présideà la vie des époux dans le mariage, Tob., iii, 16, 18; Sap., iii, 13; soit celle qui, sous une forme plus absolueou plus parfaite, s’appelle la virginité. Voir Célibat, Virginité.Elle montre la nécessité de garder la chasteté, aumoins d’une manière temporaire, pour l’accomplissementde certaines œuvres saintes, comme manger les painsde proposition, I Reg., XX, 4; recevoir des communicationsdivines, Exod., xix, 15; ou seulement prier avecplus de liberté. I Cor., vii, 5. La chasteté procède d’uncœur pur, comme la luxure procède d’un cœur corrompu, Marc, vii, 21-23; le moyen de la pratiquer fidèlement, c’est d’être modeste dans ses regards, Job, xxxi, 1; de serevêtir intérieurement de Jésus-Christ, Rom., xiii, 14; de respecter son corps comme le temple du Saint-Esprit.I Cor., vi, 15-19. Le vice opposé est constamment llétridans l’Écriture, Exod., xx, 14; Lev., xviii, 22-23; XX, 13-16; Deut., xxii, 20-30; xxiii, 17; Prov., v, 3-6; vi, 24; vii, 5-27; Jer., xxix, 23; Ezech., xxii, 11; Luc, xviii, 20; Act., xv, 20; Rom., i, 26-27; xiii, 13; I Cor., vi, 9, 10; Gal., v, 19; Ephes., v, 5; Coloss., iii, 5; Hebr., xiii, 4; Jac, ii, 11; Apoc, xxi, 8 (voir Luxure, Fornication, Adultère); et tandis que ces crimes sontpunis par Dieu avec une extrême sévérité, Gen., xix, 24; xlix, 4; Num., xxv, 1-9; Jud., xx, 1-46, etc., leshéros de la chasteté sont exaltés, comme Joseph, Gen., xxxix, 7-12; Judith, xvi, 26; Susanne. Dan., xiii, 63.
P. Renard.
CHAT (Septante: aftoupo; ; Vulgate: calta), carnassierde la famille des félins, à l’allure souple et élégante, aux poils assez longs, fins, diversement colorés, au caractèredéliant, aux mœurs qui gardent presque toujours
Chat.
quelque chose de sauvage, même dans la domesticité, (lig. 219). Les Hébreux l’avaient certainement connu enEgypte.
1° Le chat en Egypte. — Les Égyptiens l’ont souventreprésenté (fig. 220). Ils avaient reçu tout domestiquéle chat originaire d’Abyssinie, felis maniculata, qui vit encore à l’état sauvage en Nubie. Ils l’appelaientmiou ou maou. Ce nom, qui est une onomatopée, étaitd’ailleurs commun au chat, au lion et à la lionne, ainsiqu’aux bêtes sauvages en général. Brugsch, Hieroglyphisch- demolischen Worterbuch, Leipzig, 1868, t. ii, p. 565. On voit le chat sur les tombeaux de Béni-Hassan(xir 3 dynastie). Dès le Moyen Empire, on utilisa l’animalpour la chasse aux oiseaux aquatiques, pour la destructiondes rats et celle des serpents. Dans une caricatureégyptienne du temps de Ramsès III, on voit un chat conduisantdes oies. Vigouroux, La Bible et les découvertesmodernes, 6e édit., 1896, t. ii, fig. 2, p. 27. Les Égyptienstenaient beaucoup à leurs chats et les entouraientmême d’un respect superstitieux qui dut étonner les fils
de Jacob pendant leur séjour dans la terre de Ges-.sen. Dans le conte de Sinouhit, qui date de la xil" dynastie, le héros se dispose à défendre contre l’agresseurses chats, ses chèvres et ses vaches. Les chats tiennentla première place dans son énumération comme dans sonestime. Maspero, Histoire ancienne des peuples del’Orient, 1895, t. i, p. 472. Le nom de Tamiou, «lachatte,» était assez usité comme nom de femme. À la mortdu chat familier, toute la maison prenait le deuil. Hérodote, n, 66. Le chat devint de bonne heure un animalsacré. Il personnifiait Pacht, l’épouse de Ptah, qui, déesselionnesous l’ancien empire, se transforma ensuite endéesse-chatte portant le nom de Bast. Voir t. i, col. 1959.On voit aussi, sur une stèle du musée de Ghizéh, une déesse-chatte représentant Moût, dame du ciel et
320.
Chatte égyptienne en bronze. Musée du Louvre.
femme d’Ammon, en tête à tête avec Smonou, l’oie d’Ammonqu’on nourrissait dans le temple de Karnak. Maspero, Histoire ancienne, p. 87, 102. Le chat, destructeur desanimaux immondes, personnifia aussi Ra, le dieu-soleil, qui remporte la victoire sur les puissances typhoniennes.E. de Rougé, Étude sur le rituel funéraire des anciensÉgyptiens, dans la Revue archéologique, 1860, t. i, p. 339. Les chats sacrés étaient soigneusement embaumés.Leurs momies remplissent certaines hypogées et formentun monticule auprès de Bubaste, ou s’élevait un templecélèbre en l’honneur de Bast (t. i, col. 1959).
2° Le chat dans les autres pays. — Le chat est restéinconnu des Assyriens et des Babyloniens. On n’en trouvepas la moindre mention dans leurs monuments. Il n’existepas de nom hébreu pour le désigner. Baruch, VI, 21, estle seul écrivain sacré qui en parle. Pour se moquer desidoles, il dit que les oiseaux voltigent tout autour et que «les chats courent aussi dessus». Il s’agit sans nul doutedans ce texte, non du chat domestique d’Egypte, mais duchat sauvage à longue queue. Le chat ne figure pas davantagedans les monuments des Grecs et des Romains, etleur littérature ne le mentionne qu’à l’occasion des Égyptiens.Aristote, Hist. animal., v, 2, 3, ne le connaît qu’àl’état sauvage. Notre chat domestique, felis catus, a étéimporté par les Romains, quand ils eurent fait la conquêtede l’Egypte, comme le prouve son nom de catus, qatô en syrien, qitt en arabe et schau en copte. Fr. Lenormant, Premières civilisations, Paris, 1874, 1. 1, p. 356^360, 365-374. Le chat domestique est aujourd’hui plus communen Palestine qu’autrefois, bien qu’il n’y soit presquejamais complètement apprivoisé. Les chats sauvages yappartiennent à plusieurs espèces. On rencontre princi€27
CHAT — CHAUDIERE
C28
paiement le felis chaus, qui a deux fois la taille du chatdomestique et ressemble plutôt au lynx. Il se tient de préférencedans les fourrés qui avoisinent le Jourdain. Lefelis maniculata est aussi rare à l’ouest du Jourdain qu’ilest commun à l’est. Le felis syriaca, analogue au chatsauvage d’Europe et reconnaissable à sa longue queue,
- st une variété particulière au pays. Du reste, tous ces
-animaux ne s’aperçoivent qu’assez rarement. Tristram, Fauna and Flora of Palestine, Londres, 1884, p. 18; Id., The natural history of the Bible, Londres, 1889, p. 67; Socin, Palâstina und Syrien, Leipzig, 1891, p. lx; Placzek, The Weasel and the Cat in ancient Times, dans les Transactions of the Society of Biblical Archseology, t. ix, p. 155-166; cf. A. Lowy, dans les Proceedingsde la même société, t. vii, p. 97; Lefébure, ibid.,
p. 193.
H. Lesêtre.
- CHATHUANT##
CHATHUANT (hébreu: Mît; Septante: èvoxev-Taûpoç; Vulgate: lamia). En décrivant la désolation del’Idumée, Isaïe, xxxiv, 14, dit que «le lilit s’y retire ety trouve sa demeure». Le mot lilit ne se lit qu’en cetendroit de la Bible, et les anciens traducteurs l’ont rendupar des termes qui n’en déterminent guère le sens. Gese-Jiius, Thésaurus, p. 749, prétend que le lilit, dont le nom
vient de làîl, «nuit,»
est un spectre nocturne, une sorte de
démon femelle, analogue à la ghula
des Arabes, qui attaque les enfants et
même les hommes
pour sucer leur sang.
Rosenmùller, Scholia, Jesaise Valicinia, Leipzig, 1793,
t. ir, p. 732, qui
soutient la même
opinion, enregistre
pourtant le sentiment de Dœderleim,
qui voit là un oiseau
de lente allure, Yolis
des anciens, l’outarde. Robertson,
Thésaurus linguse
sanctse, Londres,
1680, p. 474, avait
déjà traduit le mot hébreu par strix, «oiseau de nuit.» C’est, en effet, le sens que suggère l’étymologie delilit; c’est aussi celui que réclame le contexte. Dans toutce passage d’Isaïe, xxxiv, 13-15, en effet, l’Idumée estreprésentée comme un pays devenu sauvage et désert; seules, les bêtes y habitent. Les versions parlent ici, ilest vrai, de dragons, de démons, d’onocentaures, etc., etplusieurs commentateurs anciens et modernes ont penséque le prophète faisait allusion à des êtres fantastiquesappartenant à la mythologie populaire. Mais il est difficilede croire qu’Isaïe ait évoqué l’idée d’êtres purement fabuleux, et de fait, en hébreu, les mots que les versions onttraduits si singulièrement sont des noms de bêtes sauvagesou d’animaux qui habitent les ruines et les déserts: fannîmet Hyyïm, les chacals; benôt-ya’ânâh, les filles’del’autruche; siyyîm, des bêtes du désert, peut-être leshyènes; ia’ir, le bouc sauvage; lilit, et ensuite qippôz, la chouette de l’espèce duc, et enfin dayyôt, les vautours.Le lilit qui vient dans l’énumération en tête desoiseaux est très vraisemblablement un oiseau lui-même, et le plus exclusivement nocturne de tous les animauxdu genre chouette, le chathuant. Le chat-huant (fig. 221)se distingue des autres rapaces nocturnes par le disquecomplet de plumes qui entoure ses yeux et par sa grossetête immédiatement rattachée au corps. Voir Choleïïe.
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521. — Chat-huant.
Il n’a absolument rien de commun avec le chat, le nomde chat-huant n’étant qu’une altération de l’ancien motfrançais «chavan», qui venait du bas-latin cavannus.Littré, Dictionnaire de la langue française, t. i, p. 575.Le lilit appartient sans doute à l’espèce du Syrniumaluco, commun en Egypte et dans certaines parties de laPalestine. Tristram, The natural history of the Bible, Londres, 1889, p. 196. Cet oiseau a les couleurs plus clairesen Syrie que dans nos pays. Il pousse pendant la nuit descris lugubres et plaintifs. Il caractérise donc bien la désolation
d’une contrée maudite.
H. Lesêtre.
CHASTEIGNER DE LA ROCHEPOZAY HenriLouis, évêque de Poitiers, né à Tivoli, en Italie, le 6 septembre1577, mort à Dissay, dans le diocèse de Poitiers, le 30 juillet 1651. Il était fils de l’ambassadeur de Henri IIIà Rome. Il fut destiné de bonne heure à l’état ecclésiastique, et, après avoir été pourvu de plusieurs richesabbayes, devint le coadjuteur de ila r Geoffroy de Saint-Belin, évêque de Poitiers, auquel il succéda en 1612. Ilne recula devant aucune fatigue pour procurer le biende son diocèse, et, voulant purger le Poitou des erreursdu calvinisme, il y appela un bon nombre de communautésreligieuses. Il commenta presque tous les livresde la Sainte Écriture: Remarques françaises sur saintMatthieu, in-4°, Poitiers, 1619; Exercitationes in Marcuni, Lucam, Johannem et Acla Apostolorum, in-4°, Poitiers, 1626; in Genesim, 1628; in Exoduni, in librosNumerorum, Josue et Judicum, 1629; in IV libros Regum, 1626; in librum Job, 1628; in librum Psalmorum, 1643; in prophelas majores et minores, in-4, Paris, 1630. Tous ces divers travaux furent réunis enun seul volume, qui fut publié à Poitiers, in-f°, 1640.
— Voir Gallia christiana, t. ii, col. 1206.
B. Heurtebize.
CHASTILLON Sébastien. Voir Castalion.
CHÂTIMENTS. Voir Supplices.
CHATONS de l’éphod. Voir Érncn.
CHAUDIÈRE. Hébreu: dûd, sir, pârûr, kiyyôr, substantifs tirés des verbes dûd, sir, pâ’ar, hûr, qui tousles quatre signifient «bouillir»; qallahat, de qâlah, «verser.» Le mot sir est celui qu’on rencontre le plussouvent; les quatre autres se lisent dans un même verset, I Reg., ii, 14; dûd se retrouve aussi Job, xli, 11; II Par., xxxv, 13; pârûr, Nom., xi, 8; Jud., vi, 19, et qallahat, Mich., iii, 3; Septante: XouttJp, Xéêi); , -^oiXxeïov, X’-> T 9 a >Vulgale: lebes, caldaria, olla, cacabus. Dans deux passages, Joël, ii, 6; Nah., ii, 10 (hébreu, 11), les versions ontlu pârûr là où le texte massorétique porte actuellementpâ’rûr, «couleur du visage;» et dans Amos, iv, 2, ellesont traduit le pluriel sirôf par «chaudières», là oùconvient mieux le sens de «crochets, hameçons», qu’aaussi ce mot.
La Bible parle une vingtaine de fois des chaudières, soit dans le sens propre, soit dans un sens figuré. Lasignification des cinq mots hébreux qui servent à nommerces ustensiles est trop générale pour qu’on puisseétablir une différence certaine entre les objets qu’ils désignent.Ces objets sont des récipients de terre ou demétal, de forme et de grandeur diverses, destinés à êtreplacés sur le feu pour l’ébullition des liquides et la cuissondes aliments. Ils correspondent à ce que nous appelonschaudière, chaudron, casserole, pot, marmite, etc.
1° Au sens propre. — Au désert, les Hébreux regrettentle temps où, en Egypte, ils étaient «assis auprès des marmitesde viandes». Exod., xvi, 3. Les monuments égyptiensnous ont conservé des dessins de ces marmites(fig. 222). On y voit cuire des viandes tandis que descuisiniers activent le feu et remuent le contenu des récipients.Les monuments assyriens nous offrent des re
présentations analogues (fig. 223). — Des chaudièresde toutes sortes furent fabriquées par Béséléel pour leservice du tabernacle, Exod., xxxviii, 3, et plus tard parHiram pour le service du Temple. III Reg., vii, 40, 45; II Par., iv, 11, 16. Ces dernières sont mentionnées sousle règne de Josias, II Par., xxxv, 13, et finalement emportéespar les Chaldéens. IV Reg., xxv, 14; Jér., lii, 18.
— C’est dans la marmite appelée pârûr que les Hébreuxfaisaient cuire la manne pour en former des espèces degâteaux. Num., xi, 8. — Un passage des Juges, vi, 19, nous donne une idée de la manière dont on servait alorsun hôte de distinction. Gédéon reçoit la visite de l’ange, qu’ilprend pour un étranger. Il fait cuire un chevreau, puisen met la viande dans une corbeille et le jus dans unpârûr pour les offrir au visiteur. — Les victimes offertesau tabernacle étaient mises à cuire dans les quatre vases
comme dans un sîr et comme de la viande dans unqallahat.» Mich., iii, 3. Quand les princes de Jérusalemprétendent demeurer dans la ville avec l’aide des Égyptiens, malgré l’invasion prochaine des Chaldéens, ilsdisent de Jérusalem: «Voilà la chaudière; nous, noussommes la viande,» nous resterons donc dans la villecomme la viande reste dans la chaudière. Le Seigneurleur fait répondre: «La viande» qui restera en place, «ce sont ceux que vous ferez périr au milieu de la ville» par votre résistance présomptueuse; «la chaudière, lavoilà,» en effet, c’est Jérusalem, «mais je vous en chasseraipour vous livrer aux mains des ennemis.» Ezech., xi, 3, 7-11. Le jour où commence le siège de Jérusalem, Ézéchiel, xxiv, 3-6, compare la ville à une marmite danslaquelle cuisent toutes sortes de morceaux de viande etmême les os. Mais la marmite est rouillée, et malgré
A. M
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222. — Chaudières dans lesquelles on fait cuire des viandes. Ve dynastie. Ghizéh. D’après Lepsius, DenkmaUr, Abth. ii, Bl. 52.
appelés kiyyôr, dûd, qallahat et parût: Les enfantsd’Héli venaient avec des fourchettes à trois dents et enlevaientpour eux ce qu’ils pouvaient saisir. I Reg., ii, 14.
— On chauffait les chaudières avec des broussailles et desbranchages. L’Ecclésiaste, vii, G (Vulgate, 7), compare lerire du fou au crépitement des épines sous la chaudière.Le texte contient ici un jeu de mots sur le singulier sîr, qui veut dire «chaudière», et le pluriel sîrîni, qui signifie «épines»: keqôl hassîrbn lahat hassir, «comme lebruit des épines sous la chaudière.» — Dans un tempsde famine, du vivant d’Elisée, un serviteur reçoit l’ordrede préparer la nourriture et fait cuire des coloquintesdans un sir. En goûtant de ce mets, les fils des prophètesse mettent à crier: «C’est la mort qui est dans le sir!» Elisée intervient alors et rend cet aliment inoffensif.IV Reg., iv, 38-41. — Antiochus fait chauffer des chaudièresd’airain pour le marlyre des sept frères Mæhabées.II Mach., vii, 3. C’est aussi dans une chaudièred’huile bouillante que l’apôtre saint Jean fut plongé àRome, et il en sortit plus vigoureux qu’auparavant. Tertullien, De prxscript., xxxvi, t. ii, col. 49; S. Jérôme, Cont. Jovin., i, 26, t. xxiii, col. 259. Toutefois la Biblene mentionne pas ce dernier événement.
2° Au sens figuré. — Dans l’Ecclésiastique, xiii, 3, tm lit cette sentence: «Comment la marmite de terre(x’JTpa, cacabus) s’associera-telle au chaudron ()iSr, ç, olla)’! Celui-ci heurtera, et celle-là sera brisée.» Cettecomparaison se retrouve dans Ésope, 329, 295: Ollse, etelle est devenue le thème d’une fable de La Fontaine, Lepot de terre et le pot de fer, V, n. — Job, xli, 11, 23(Vulgate, 22), dans sa description du crocodile, dit quela vapeur s’échappe des narines de l’animal comme d’unechaudière, et que, quand il s’enfonce dans l’eau, celle-cibouillonne comme dans une chaudière. — Les prophètesempruntent à la chaudière des comparaisons très expressives.Jérémie, i, 13, voit une chaudière en ébullition, symbolisant les peuples qui vont fondre du nord sur Jérusalem.Les grands persécutent le peuple, «ils le hachent
l’ébullition la rouille n’a pas disparu. Cette rouille estl’emblème du sang répandu, et la ville de sang périrapar le feu. Enfin, pour marquer l’affluence de ceux quiaccourront au temple de Jérusalem à l’époque de lagrande restauration, par conséquent au temps messianique, Zacharie, XIV, 20, 21, dit que «les marmites qui
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223. — Chaudière assyrienne. Bas-relief de Ninive.
sont dans la maison de Jëhovah serviront de coupes devantl’autel» pour présenter les offrandes, tant celles-ciseront abondantes; que «tout ce qu’il y a de chaudièresà Jérusalem et en Judée sera consacré à Jéhovah» et
qu’on y fera cuire les victimes.
H. Lesêtre.
CHAUDRON. Voir Chaudière.
CHAUFFAGE. Voir Feu.
- CHAUME##
CHAUME (hébreu: qânêh, «roseau, tige;» Septante: m; 6u.r|V; Vulgate: culmus), tige des graminées et enparticulier des céréales. Le songe du pharaon, Gen., xli,
5, 22, nous montre sept épis pleins sortant d’une mémotige, qànéh. Le mot qâmàh est traduit une fois dans laVulgate, Ose., rai, 7, par culmus; mais il désigne plusprécisément la tige avec son épi, et est pris collectivementpeur la moisson sur pied, Deut., xvi, 9; xxiii, 25(hébreu, 26); IV Reg., xix, 26; Is., xvii, 5; xxxvii, 27; Ose., viii, 7, par opposition à la moisson en gerbe. Exod., xxii, 6 (hébreu, 5); Jud., xv, 5. — Saint Paul, I Cor., m, 12, parlant des différentes prédications faites à Corintheaprès qu’il eut posé le fondement de cette église, recommandeaux prédicateurs de l’Évangile de ne pas construireavec des matériaux fragiles comme le bois, lapaille et le chaume (xaXâ|JUi; Vulgate: stipula), car au
Dans Isaïe, ix, 4 (Vulgate, 5), le mot se’on, qui est traduitdans les Septante par (jto).t|, et dans la Vulgate parviolenta preedatio, signifie, selon certains interprètes, le «soulier du soldat», caliga. Gesenius, Thésaurus linguxhebreese, p. 932.
I. Chaussures des Hébreux. — 1° Mentions de lachaussure dans la Bible. — La chaussure est mentionnéedans l’Écriture dès le temps des patriarches. Abrahamrefuse, en effet, d’accepter du roi de Sodome même unecourroie de chaussure, de peur que ce roi ne puisse dire: «J’ai enrichi Abraham.» Gen., xiv, 23. Quand Moïses’approche du buisson ardent, Dieu lui dit de retirer seschaussures, parce que ce lieu est saint. Exod., iii, 5;
"IMnillll’n…’, , , , ’.".’/// ///7/ //, ., „, , …’f/Â
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uiiiiiiiiiMiiMiiuinii! i! lïllll(||iiii’! iiiiiiiV/iVinuNiuVi’ii…; ’l’V////; ^r’i’224. — Israélites portant le tribut à Salmanasar II. Obélisque de Nimroud. D’après le fac-similé du Louvre.
jour de l’épreuve tout serait détruit par le feu. L’Apôtretire sa comparaison d’une maison bàtio en bois ci enterre pétrie avec de la paille et couverte de chaume.
E. Levesque.
- CHAUSSURE##
CHAUSSURE (hébreu: na’al, Deut., xxix, 4; Jos., v, 15; 1Il Reg., ii, 5, etc.; grec: ûitôS^ixa, Gen., xiv, 23; Exod., iii, 5; xii, 11; Deut., xxv, 9, etc.; uav51).iov, Marc, vi, 9; Act., xii, 8; Vulgate: calceamentum, Deut., xxix, 5; Jos., v, 16, etc.; Matth., iii, 11; x, 10; Marc, i, 7, etc.; sandalia, Judith, x, 3; xvi, 11; Marc, vi, 9). Le mot na’al signifie une chose qui enferme, parce que le pied est enfermé dans la chaussure, à l’aidedes courroies qui l’enserrent; il se dit ordinairement dela sandale; iiriSï]u.a désigne à proprement parler lasemelle qui est placée sous le pied, la sandale; cepen nt les écrivains grecs de l’époque alexandrine emploientce mot pour toute espèce de chaussure. Josèphe, Ant. jud., Vꝟ. 1, 8, s’en sert même en parlant de lacaliga du soldat romain, qui était un véritable soulier.Le mot trïvSiiiov signifie la sandale proprement dite.Calceamentum est en latin le terme qui s’applique à lachaussure en général, sans indication de forme. Il tireson origine du mot cake, «talon,» parce qu’il est destinéà protéger cette partie du pied. Dans le Deutéronome, xxxiii, 25, les Septante portent ûjiôS/; u.a, et laVulgate calceamentum, tandis que le texte hébreu donnele mot min’àl, qui signifie «verrou» ou «forteresse».
Act., vii, 33. Josué reçoit l’ordre de faire de même en unecirconstance semblable. Jos., v, 15 (Vulgate, 16). Au momentde la sortie d’Egypte, lorsque les Hébreux reçurent l’ordred’immoler et de manger l’agneau pascal, il leur fut prescritde faire ce repas en costume de voyageur et les piedschaussés. Exod., xii, 11. Ce rite fut conservé, par ordrede Dieu, dans la célébration de la Pàque qui avait lieuchaque année. Pour marquer qu’il les protégea pendantleur voyage à travers le désert, Dieu leur rappelle queleurs chaussures ne se sont pas usées sur leurs pieds.Deut., viii, 4; xxix, 5. II Esdr., ix, 21. L’Ecclésiastique, xlvi, 22, faisant l’éloge de Samuel, dit qu’il ne reçutaucun présent, pas même des chaussures. L’usage deschaussures nous est encore signalé au temps des rois.Joab fait couler le sang d’Abner et d’Amasa jusque surles chaussures de ces officiers. III Reg., ii, 5. Quand leroi d’Israël Phacée eut vaincu le roi de Juda Achaz, leprophète Obed défendit, au nom du Seigneur, de garderles soldats de Juda. Les principaux chefs de la tribud’Éphraïm, obéissant à cet ordre, renvoyèrent les prisonniers, après leur avoir fait donner des vêtements et deschaussures. II Par., xxviii, 15. Quand Judith va trouverHolopherne, les sandales sont mentionnées parmi les objetsdont elle se pare Judith, x, 3. — Dans le Nouveau Testament, les chaussTires sont plusieurs lois nommées. SaintJean-Baptiste, pour marquer son rôle de serviteur àl’égard du Sauveur, dit qu’il n’est pas digne de dénouer
la courroie dé ses chaussures, Marc, i, 7; Luc, iii, 16; Joa., i, 27; Act., xiii, 25, ou de les porler. Matth., iii, 11.Notre-Seigneur, quand il envoie ses disciples prêcher, leur ordonne, pour montrer leur confiance en la Providence, de ne pas porter de chaussures, Matth., x, 10; Luc, x, 4; xxii, 35; ce qui veut dire qu’ils ne doiventpas avoir dans leur besace de chaussures de rechange, etqu’ils doivent se contenter des sandales qu’ils portent auxpieds. Marc, vi, 9. L’enfant prodigue, quand il rentrerepentant à la maison paternelle, reçoit de son père desvêtements et des chaussures. Luc, xv, 22. Enfin quandl’ange délivre saint Pierre de sa prison, il lui commandede mettre ses sandales. Act., xii, 8.
2° Forme des chaussures chez les Juifs. — La Bible nedonne pas de descriptions des chaussures dont se servaientles Juifs, mais les expressions qu’elle emploiesupposent que ces chaussures ressemblaient à celles despeuples voisins. Il est question, en effet, de courroies(hébreu: serôk; grec: îjià; ; Vulgate: corrlgia), commecelles qui attachaient les chaussures des Égyptiens, desAssyriens, des Grecs et des Romains. Gen., xiv, 23.La forme la plus ancienne et celle qui demeura la pluscommune jusqu’à la fin, ce furent les sandales, c’est-à-direde simples semelles protégeant le dessous du piedcontre l’humidité en hiver, contre le sol brûlant et lespierres en été. Ces semelles étaient maintenues par lescourroies dont nous venons de parler. Nous trouvons unepreuve de l’emploi de cette forme de chaussure dansl’usage de laver les pieds des voyageurs dès qu’ils arrivaientdans une tente ou dans une maison. Abraham etLot offrent de quoi se laver les pieds aux anges qu’ils prennentpour des voyageurs. Gen., xviii, 4; xix, 2; cf. xxiv, 32; xliii, 21, etc. Voir Bain, t. i, col. 1388. — Le seulmonument ancien qui représente des Israélites chaussésest l’obélisque de Nimroud, conservé actuellement auBritish Muséum (fig. 224). On y voit les envoyés du roid’Israël Jéhu apportant un tribut à Salmanasar II. Auxpieds des Assyriens apparaissent très nettement des sandales.Il est, par contre, assez difficile de distinguer quellesorte de chaussure portent les Israélites. Cependant, comme ni les doigts de pieds ni les courroies ne sontvisibles, et que, d’autre part, l’extrémité de la chaussurea une forme pointue et est relevée, il est clair que le sculpteura voulu figurer des souliers ou des babouches et nondes sandales. G. Rawlinson, The five great monarchiesin the Eastern world, 4e édit., in-8°, Londres, 1879, t. ii, p. 105; Lenormant-Babelon, Histoire ancienne del’Orient, 9e édit., in-8°, Paris, 1885, t. iv, p. 190-191.
3° Matières dont étaient faites les chaussures. — LeTalmud nous apprend qu’on se servait, pour confectionnerles chaussures, de peau, d’étoffes ou de bois, Mischna, Yebam., xii, 1-2, et qu’elles étaient même parfoisferrées. Ibid., Sabb., vi, 2. — Ces matières ayant unemédiocre valeur, les chaussures étaient considéréescomme des objets de peu de prix. Eccli., xlvi, 22. C’estpourquoi Amos, ii, 6; viii, 6, prophétisant contre lesroyaumes d’Israël et de Juda, reproche à leurs rois d’avoirvendu ou acheté le pauvre pour une paire de chaussures.
4° Chaussures des femmes. — Il y avait cependant deschaussures de luxe faites de peaux teintes en couleursbrillantes, mais elles étaient à l’usage des femmes. Leprophète Ézéchiel, montrant la bonté de Dieu à l’égard deJérusalem, compare cette ville à une femme revêtue parle Seigneur des plus belles parures. Ses chaussures sontfaites de la peau du tahaS, c’est-à-dire du dugong (Septante: îàvBivo; ; Vulgate: ianthinus, «violet» ). Ezech., xvi, 10. Voir Dugong. Les sandales de Judith étaient richementornées, puisqu’elles charmèrent les yeux d’Holopherne.Judith, xvi, 11. L’époux du Cantique énumèreles chaussures parmi les ornements de l’épouse. Cant., vu, 1. Dans Isaïe, iii, 16, 18, les mots tife’érét hâ’âkâsini, que les Septante traduisent par 86 ?av xoû î|iaTiff|i.oO, et laVulgate par ornamenta calceamentorum, désignent peutêtre les anneaux que les femmes portaient aux doigts despieds. S. Jérôme, in Isaiam, iii, 18, t. xxiv, col. 69; S. Basile, in Isaiam, 125, t. XXX, col. 320-321.
5° Usages relatifs à l’emploi de la chaussure. — 1. Lafragilité des chaussures et la difficulté de trouver descordonniers pour les réparer faisaient que les Juifs portaientquelquefois avec eux en voyage une paire de sandalesde rechange dans leur besace. Notre-Seigneur faitallusion à cet usage quand il recommande à ses disciples, pour montrer leur confiance en la Providence, de ne pasporter de chaussures, Matth., x, 10; Luc, x, 4; xxii, 35; cette recommandation ne signifie pas qu’ils doivent marchernu-pieds. Marc, vi, 9. — 2. Retirer sa chaussureétait chez les Juifs une marque de respect, c’est pourcela que Dieu ordonne à Moïse et à Josué de se déchausserdans les passages cités plus haut. David marche égalementnu-pieds devant l’arche. II Reg., xv, 30. Pour lamême raison les prêtres remplissaient leurs fonctions
225. — Sandales modernes. D’après J. Benziger, Eebrdische Archdologie, 1894, p. 104.
dans le Temple nu-pieds. Théodoret, ad Exodum, quest. 7, t. lxxx, col. 230. Le Talmud dit même qu’il était interdità tout Israélite d’entrer dans le Temple sans retirer sachaussure. Mischna, Berach., ix, 5. Celte forme de respectn’est pas particulière aux Juifs. Les Samaritainsmontaient pieds nus sur le mont Garizim. Ed. Robinson, Biblical researches, in 8°, Londres, 1867, t. ii, p. 378. —A Rome, les prêtres de Cybèle célébraient leur culte nupieds.Prudence, Peristephanon, x, 154, t. lx, col. 457.Il en était de même des prêtres d’Isis, dans le sanctuairede leur divinité. "W. Helbig, Vie Wandgemàlde Campaniens, in-4°, Leipzig, 1868, fig. 11Il et 1112. Chez lesRomains certaines fêtes en l’honneur des dieux portaientmême le nom de nudipedalia. Tertullien, Apol., 40, 1. 1, col. 487. Les musulmans, quand ils entrent dans unemosquée, retirent leurs chaussures; les Mésopotamiensen font autant près des tombeaux de leurs saints. Layard, Nineveh and ist remains, t. i, p. 282. Les prisonniersétaient également déchaussés en signe d’humiliation.II Par., xxviii, 15. Ainsi sont représentés les Juifs emmenéscaptifs par Sennachérib, après la prise de Lachis. Voirt. ii, fig. 73, col. 225-226. C’est pourquoi Dieu ordonneau prophète Isaïe de se déchausser pour figurer la captivitédans laquelle vont tomber les Juifs. Is., xx, 2, 4.Pour indiquer l’action de retirer sa chaussure, le textehébreu emploie les mots nasal, Exod., iii, 5; Jos., v, 15; hâlas, Deut., xxv, 10; Is., xx, 2, et salaf, Ruth, iv, 7, 8.Le passage où saint Jean nous montre Marie oignant lespieds de Jésus, pendant qu’il est à table chez Lazare, supposeque les Juifs, comme les autres peuples de l’antiquité, avaient l’habitude de retirer leurs chaussures encette circonstance. Joa., xii, 3. II est même à supposerqu’il ne les gardaient jamais à l’intérieur de leurs maisons.Les Juifs retiraient parfois leurs chaussures pourcourir plus vite, comme le font en tous pays les personnes
qui portent des chaussures qui n’enserrent pas solidementle pied ou dont les semelles sont lourdes. C’estpourquoi Jérémie, ii, 25, avertit le peuple de ne pas retirersa chaussure pour courir plus vite après les idoles.6° Chaussures modernes des habitants de la Palestine.
— Les habitants de la Palestine ont conservé l’usage dechaussures qui doivent ressembler beaucoup à celles queportaient les Israélites. Ce sont souvent des sandales de cuirou de bois (fig. 225) liées au cou-de-pied par une courroieet munies à l’extrémité d’une autre courroie par laquelle
226. — Sandales attachées au pied. D’après J. Benziger, nebrdische Archaologie, 1894, p. 104.
passe le gros orteil (fig.’226). D’autres fois la courroiedu cou-de-pied est rattachée à l’extrémité de la sandalepar un cordon qui est passé entre les orteils. C. Niebulir, Beschreibung von Arabien, in-8°, Hanovre, 1772, p. 64, pi. ii, lig. E. G. D’autres fois ils portent des chaussures
K7. — Chaussures modernes en Palestine. D’après Benziger, IHblische Archaologie, 1894, p. 106.
grossièrement faites de peau cousue ou collée. Cf. C. Niebulir, Reisen in Arabien, in-8°, Hanovre, 1774-1778, t. ii, p. 108. Plusieurs ont adopté les babouches turques oudes bottines relevées à l’extrémité (fig. 227), dans legenre des chaussures que portent les envoyés de Jéhu.
II. Chaussures des peuples étrangers. — Tant qu’ilsvécurent au milieu des populations étrangères, les Juifsportèrent sans doute les chaussures en usage chez ces
peuples. Moïse et le peuple entier, quand ils sortirentd’Egypte, avaient aux pieds des sandales égyptiennes.De même les Juifs à Ninive et à Babylone portèrent deschaussures assyriennes et babyloniennes, des chaussuresperses à Suse et à Ecbatane, et adoptèrent les chaussuresgrecques et romaines sous la domination des Séleucideset des Césars.
1° Chaussures égyptiennes. — Les Égyptiens marchaientsouvent pieds nus, cependant l’usage des sandales(fig. 228) était fréquent dans la classe moyenne. Les rois, les
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228. — Sandales égyptiennes. Musée Gfuimet.
personnes d’un rang élevé et les femmes en portaient derichement ornées. Elles apparaissent sur les monumentsà partir de la Ve dynastie. Leur forme varie peu. Ellesconsistaient en une simple semelle fixée au pied par unelanière passant entre le gros orteil et les autres doigts, etattachée à une bande qui serrait le cou-de-pied et étaitfixée des deux côtés à la semelle (fig. 229). Celles des gensde la classe supérieure et des femmes sont relevées àl’extrémité. G. Wilkinson, The manners and customs oftheancient Egyptians, t. ii, p. 335, fig. 443, n° 7; p. 336, fig. 444, n° 1; F. Lenormant, Histoire ancienne despeuples de l’Orient, 9e édit., t. ii, p. 159, 227, 321; t. iii,
229.
Sandale égyptienne. Thèbes. D’après Lepsius, Denkmaler, Abth. m. Bl. 1.
p. 8, 25, 26, 171, 194; Maspero, Histoire ancienne despeuples de l’Orient classique, in-4°, 1895, t. i, p. 269, 273, etc. Quelques-unes avaient l’extrémité pointue, .G. Wilkinson, The manners, t. ii, p. 335, fig. 443, n os 5, 6; d’autres l’avaient arrondie. Elles étaient faites d’une sortede tresse de feuilles de palmier ou de papyrus, on envoit aussi en paille tressée ou en cuir, sandales de peaublanche, sandales de peau noire, dit-on dans les textes.G. Wilkinson, The manners, t. ii, p. 335, fig. 443, n 88 5, 6; p. 336, fig. 444, n" 2; F. Lenormant, Histoire ancienne despeuples de l’Orient, t. ii, p. 75. Parfois elles étaient revêtuesd’une doublure sur laquelle on peignait un ennemicaptif, foulé ainsi aux pieds par le vainqueur. Quelquefoison y lit cette inscription: «Tes ennemis sont sous tessandales» (fig. 230; . G. Wilkinson, The manners, t. ii, p. 336, fig. 444, n° 3. Les prêtres dans l’exercice deleurs fonctions sacrées, et les sujets en présence duroi, reliraient leurs sandales en signe de respect. Silius 037
CHAUSSURE
G38
Italicus, iii, 28. On a trouvé dans quelques tombeauxde Thèbes des chaussures ressemblant à des pantoufles, G. Wilkinson, The manners, t. ii, p. 335, fig. 443, n os 1-4; mais elles appartiennent à l’époque desPtolémées. Sur les monuments égyptiens, ce sont lesétrangers qui portent des chaussures de ce genre. Les
230. — Semelles égyptiennes.D’après un papyrus de la Bibliothèque nationale.
Égyptiens sont nu-pieds ou portent des sandales. G.Wilkinson, The manners, t. ii, p. 335-337. Cependant unestèle représente le roi Menepthah et deux autres personnageschaussés de sortes de souliers. F. Lenormant, Histoireancienne des peuples de l’Orient, t. ii, p. 291. Lessandales figurent de tout temps dans le mobilier desmorts. Maspero, Histoire ancienne, t. i, p. 57. Plusieursmonuments représentent des cordonniers égyptiens, ainsi
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231. — Sandales assyriennes. Musée du Louvre.
que leurs instruments de travail. Voir t. i, fig. 87, col. 343. Cf. G. Wilkinson, The manners, t. ii, p. 187, fig. 394; p. 188, fig. 395; F. Lenormant, Histoire anciennedes peuples de l’Orient, t. ii, p. 291; Maspero, Histoireancienne des peuples de l’Orient, t. i, p. 313.
2° Chaussures des peuples de Chanaan. — Les peuplesdu pays de Chanaan portaient des chaussures. Nous levoyons à la ruse dont se servent les Gabaonites pourobtenir d’être épargnés par Josué. Afin de faire croireau successeur de Moïse qu’ils venaient de très loin, ils seprésentèrent à lui avec des chaussures raccommodées, et lui dirent qu’ils les avaient usées par la longueur de laroute. Jos., ix, 5, 13.
3° Chaussures des Assyriens et des Babyloniens. —Daniel, iii, 21, raconte que les trois jeunes Israélites, Sidrac, Misach et Abdénago, furent jetés dans la fournaisepar ordre de Nabuchodonosor, avec leurs vêtements etleurs chaussures. Ces jeunes gens étaient habillés à la
mode babylonienne, ils portaient donc la chaussure enusage à Babylone. Les monuments assyriens nous fontconnaître les chaussures que portaient le roi, la reine, les principaux officiers et les soldats. Les chaussures desrois et des officiers royaux sont tantôt des sandales, tantôtdes espèces de chaussons. La forme la plus simplede la sandale, telle quenous la rencontrons autemps de Sargon, consistedans une mincesemelle avec une enveloppeprotégeant le talon.Cette enveloppe est représentéesur les monumentsde Khorsabadcomme formée de lanièrescousues ensembleet alternativement rougeset bleues. Souventla sandale entière estrouge. Elle était maintenuepar une courroiepassée au-dessus du grosorteil et par un cordonlacé en avant et en arrièreà travers le cou-depied(fig. 231). G. Rawlinson, The five great monarchiesof the ancientEastern world, 4e édit.,
Londres, 1875, t. i, p. 468, 486, 502; F. Lenormant, Histoireancienne, t. iv, p. 197, 206, 249, 2C8, 281, 285, 207, 299, etc.; t. v, p. 16, 33, 40. Botta a vu des sandales du
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232. — Bottine assyrienne.
D’après Botta, Monumentde Ninive^
t. ii, pi. 108.
233. — Sandale grecque. Hermès de Praxitèle. D’après le fac-similédu Musée du Trocadéro.
même genre aux pieds des habitants actuels de la Mésopotamie.Botta, Monument de Ninive, t. v, p. 85. Uneautre forme de sandale qu’on voit sur les monuments.
Vase grec en forme de crépidc. Musée du Louvre.
d’Assurnasirpal se distingue de la première par une semellebeaucoup plus épaisse vers le talon. L’enveloppe quiprotège le talon défend aussi les deux côtés du pied, lesorteils et le cou-de-pied sont seuls à découvert. Deslanières qui partent de chaque côté de la semelle, prèsdes orteils, s’entre - croisent au - dessus du pied en pas
sant par des anneaux attachés à l’enveloppe de peau etsont probablement fixées par une boucle. G. Rawlinson, The five great monarchies, t. i, p. 488, 500; F. Lenormant, Histoire ancienne, t. iv, p. 432, 433; t. v, p. 48.Enfin les derniers rois portent une sorte de chausson depeau, arrondi au bout du pied, orné de rosettes ou decroissants et de rosettes. Tels sont les souliers que porteSennachérib. G. Rawlinson, The five great monarchies, , ., p. 488, 500; F. Lenormant, Histoire ancienne, t. v, p. 42.Les souliers de la reine sont du même genre. G. Rawlinson, ibid., p. 493. Les soldats, cavaliers et fantassins, portaient des bottines lacées par devant (fig. 232). Ces bottinesétaient en peau et sans semelles. Celles des cavaliersmontaient plus haut que celles des fantassins; elles atteignaientpar derrière le milieu du mollet, et dépassaientmême cette hauteur par devant. G. Rawlinson, The fivegreat monarchies, t. i, p. 425-428; F. Lenormant, Histoireancienne, t. v, p. 57. Les fantassins portèrent d’abord
238.
wi.Mt (»
Chaussure romaine. Musée du Louvre.
la simple sandale, G. Rawlinson, ibid., p. 429, 431, 432; F. Lenormant, Histoire ancienne, t. iv, p. 201; puis ilsfurent chaussés d’une bottine de même forme que celledes cavaliers, mais un peu moins haute. Ibid., p. 434, 435, 438, 446, 475, 478, 480, 517, 540; F. Lenormant, Histoireancienne, t. iv, p. 183, 222, 225, 305, 323, etc. Lesrois à la chasse et en guerre portaient la bottine militaire.Ibid., p. 506, 507. On trouve sur des monuments des personnagesde rang inférieur, des musiciens, par exemple, chaussés, suivant les époques, de sandales, ibid., p. 529, 530, ou de chaussons. Ibid., p. 533, 543.
4° Chaussures des Mèdes et des Perses. — Les Mèdesportaient des souliers ouverts par devant et attachés àgauche sur le dessus du pied par des boutons. G. Rawlinson, The five great monarchies, t. ii, p. 316. Les souliersdes Perses étaient fermés et maintenus au pied par uncordon qui les serrait en haut. Ibid., t. ii, p. 172, 174, 224, 233.
5° Chaussures des Grecs. — Les chaussures portéespar les Grecs peuvent se diviser en deux classes principales, les sandales et les souliers. Les sandales portaientie nom générique d’-J7to8ru.aTa. C’étaient, à proprementparler, de simples semelles attachées par des lanières<ju des cordons qui s’entrecroisaient (fig. 233). Homère, Odyss., xv, 369; Hérodote, i, 195, etc. Cependant ce motdésigne quelquelois des souliers qui enveloppent tout lepied. Aristophane, Plutus, 983. La aav8àÀ.iov ou adtvSocXovest une première transition vers le soulier. À son extrémitéest fixée une bande de peau appelée Ç-jyéç ou Çuyév, danslaquelle passent les orteils. Aristophane, Lysistrata, 416, et le scholiaste, ad loc. La crépide, xpr^îç, consiste dans
une forte semelle de cuir souvent munie d’une empeignequi garantit le talon, et dans laquelle sont pratiqués desœillets destinés à des liens de cuir qui couvrent le dessusdu pied et qui se nouent sur la cheville ou même plushaut. Les vases grecs nous montrent que les formes dessandales grecques variaient beaucoup dans le détail.Nous donnons ici (fig. 234) un exemple de sandales quitiennent le milieu entre le uotvSiXiov et la xpr, *! ; , d’aprèsun vase du Ve siècle. Monumenti delV Inst. archeol., 1830, pi. xxv. On voit aussi sur les monuments de véritablessouliers fermés par des boutons, Millin, Peinturesde vases, t. ii, pi. 8, ou des bottines lacées. Millin, ibid., pi. 69. Les femmes portaient aussi des souliersornés et noués par des rubans. Millingen, Peintures devases, pi. 69.
6° Chaussures des Romains. — Chez les Romainsles sandales à lacets (sandalia, solex), les pantoullessans lacets (socci), les chaussures grecques dites crepidse.
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230. — Autre chaussure romaine. Musée du Louvre.
étaient en usage dans la vie ordinaire; mais la véritablechaussure romaine était le calceus, qui était l’insigne ducitoyen au même titre que la toge. C’était une chaussuremontante et fermée analogue à nos souliers. Clarac, Musée de sculpture, t. iii, pi. 277, n° 2315. Les sénateurset les patriciens portaient un calceus particulier appelécalceus senatorius ou calceus patricius. Clarac, ibid., pi. 277, n° 2373. La chaussure des soldats romains portaitle nom de caliga. La caliga consistait en une fortesemelle ferrée de clous, à laquelle étaient attachéesdes lanières de cuir qui formaient un réseau autourdu talon et du pied. Les doigts restaient à découvert(fig. 235, 236).
III. Symbolisme de la chaussure. — La chaussurejouait un rôle symbolique dans plusieurs actes légaux.Quand le beau-frère d’une veuve refusait de l’épouser, ainsi que le demandait la loi, celle-ci s’approchait de luidevant les anciens et lui arrachait la chaussure du pieden prononçant ces paroles: «C’est ainsi qu’on agira àl’égard de l’homme qui ne soutiendra pas la famille deson frère.» Dès lors la maison de cet homme s’appelaitla maison du «déchaussé». Deut., xxv, 10. De même quandune personne renonçait au droit de retrait lignager, c’est-à-direau droit de racheter un bien de famille mis envente, cette renonciation se faisait en donnant sa chaussureà celui à qui on cédait ce droit. Le livre de Ruth, iv, 7-8, nous fait connaître cette coutume. Noémi, bellemèrede Ruth, avait mis en vente un champ qui lui venaitde son mari. Rooz, un des parents du mari, est avertipar Ruth, belle-fille de Noémi. Mais Rooz, qui n’a ledroit de retrait qu’en seconde ligne, doit d’abord obtenir
la renonciation de celui qui possède ce droit avant lui. Ilobtient cette renonciation. «Or, dit le texte sacré, c’étaitune ancienne coutume en Israël, qu’en cas de droit deretrait lignager et de subrogation, pour confirmer la chose, l’homme retirait sa chaussure et la donnait à son parent, et c’était là un témoignage en Israël. Quand donc celuiqui avait le droit de retrait lignager eut dit à Booz: Acquiers pour toi, il retira sa chaussure. Et Booz dit auxanciens et à tout le peuple: Vous êtes aujourd’hui témoinsque j’ai acquis tout ce qui appartenait à Élimélech.» —Dans les Psaumes lix (hébreu, lx), 10, et cvn (hébreu, cviii), 10, Dieu dit qu’il jette sa chaussure sur Édom.Les commentateurs ont interprété diversement ce passage.Les uns y ont vu un signe de mépris, les autresune prise de possession du territoire. — Dans saint Paul, Ephes., vi, 15, les chaussures, qui font partie de l’armementdu chrétien, symbolisent la fermeté dans la marche, le zèle, la promptitude et la générosité.
IV. Bibliographie. — Bynseus, De calceis Hebrseorum, in-8°, Dordrecht, 1715; Weiss, Kostumkùnde, in-8°, Stuttgart, 1860, t. i, p. 128-204; G. Wilkinson, Themanners and customs of the ancient Egyptians, 2e édit., t. ii, p. 335-337; A. Frauberger, Antihe und frûhmittelalteiiichteFussbekleidenigen aus Achmin-Panopolis, Dusseldorfꝟ. 1890; A. Baumeister, Denkmâler desklassichen Altertums, t. i, p. 574-570; W. Becker-Gôll, Charikles, in-18, Berlin, 1878, t. iii, p. 207-277; Gallus, in-18, Berlin, 1883, t. iii, p. 227-230; Gùhl etKôner, £avie privée des anciens, trad. franc., in-8°, Paris, 1885, t. i, p. 248-250; t. ii, p. 322-323. E. Beurlier.
- CHAUVE -SOURIS##
CHAUVE -SOURIS (hébreu: ’atallêf; Septante: vOxTuipi; ; Vulgate: vespertilio, noctua). La chauvesouris(fig. 237) est un petit mammifère de l’ordre deschéiroptères, ou animaux à «mains ailées». Ce nom rappellela particularité la plus caractéristique de la chauvesouris.Chez cet animal, les quatre derniers doigts de
^-.r *£
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237. — Chauve - soui-13.
la main sont très allongés et reliés ensemble par unemembrane, qui s’étend tout autour de la partie inférieuredu corps et enveloppe presque complètement lespattes de derrière. Cette membrane remplit l’office devéritables ailes. Aussi la chauve-souris se traîne-t-elle àterre assez difficilement. Elle est surtout organisée pourvoler. Il n’est donc pas étonnant que Moïse, voulant laproscrire de l’alimentation, l’ait rangée parmi les oiseauximpurs. Lev., xi, 19; Deut., xiv, 18. À première vue, lachauve-souris paraît être, en effet, une sorte d’oiseau, et Moïse eût singulièrement étonné ses contemporains, s’il eût placé cet animal qui vole en compagnie des quadrupèdes.Il a parlé ici conformément au langage populaire, sans s’inquiéter d’aucune classification scientifique.La chauvesouris a le pelage très fin. Le sens du toucherest extrêmement développé chez elle. Pendant le jour, elle se confine dans les cavernes, les ruines et les réduitsobscurs. Elle n’en sort que le soir au crépuscule, ou lematin aux premières lueurs de l’aube, pour chercher sanourriture. On la voit alors se précipiter au dehors, voler
circulairement dans l’air ou raser la surface des eaux, pour se saisir des insectes nocturnes, comme fait l’hirondelledes insectes du jour. C’est un animal hibernant, qui reste engourdi pendant tout l’hiver et subsiste alorsaux dépens de sa propre graisse. Aux environs de la merMorte cependant, la chaleur se maintient à un tel degré, que la chauvesouris reste active toute l’année. Dans lesretraites où il habite, l’animal se suspend aux parois parles pattes postérieures, munies d’ailleurs d’ongles solideset recourbés, et il demeure ainsi la tête en bas et lesailes repliées. Parfois les chauves-souris sont ainsi suspenduesles unes au-dessus des autres en nombre incroyableet forment une masse compacte. En Orient, iln’est pas rare de les voir élire domicile dans les maisonshabitées, et se suspendre aux voûtes des caves ou mêmeau plafond des chambres obscures, sans souci du mouvementqui se produit autour d’elles. On en trouve desquantités énormes dans les tombeaux et les monumentsd’Egypte. En Palestine, les carrières royales de Jérusalemen abritent de telles légions, qu’on n’y peut pénétrer sansque les torches soient bientôt éteintes par l’agitation deleurs ailes. Toutes les cavernes qui avoisinent la merMorte, le Jourdain et le lac de Génésareth, en sont peuplées.Les chauves-souris sont donc les hôtes des endroitsténébreux et en général inhabitables. C’est pourquoiIsaïe, ii, 20, dit qu’un jour on jettera les idoles d’oret d’argent «dans les creux des rats et des chauvessouris» (texte hébreu), c’est-à-dire dans des endroits oùpersonne n’aura l’idée, de venir les chercher. Baruch, vi, 21, parle aussi de chauves-souris voltigeant autour desidoles, pour marquer l’abandon et le délabrement danslesquels ces idoles sont laissées.
Il existe en Palestine plusieurs espèces de chauvessouris.Tristram, Fauna and Flora of Palestine, Londres, 1884, p. 25; The natural liistory of Uie Bible, Londres, 1889, p. 40, en compte quatorze espèces. Il cite spécialementle Vesperugo kuhlii, aux environs de Jérusalem; le Rhinopoma microphyllum, autour de la mer Morteet dans la vallée du Jourdain; le Taphozous nudiventriset le Plecotus auritus, en Galilée et autour du lac deGénésareth; le Xantharpia segyptiaca, dans les régionsboisées, et enfin le Rhinolophus ferrum-equinum, leRhinolophus clivosus et le Vespertilio murinus.
H. Lesêtre.
- CHAUX##
CHAUX (hébreu: sid; Septante: xovîoc; Vulgate: calx), oxyde de calcium obtenu par la calcination descalcaires. Le produit de cette opération est la chaux vive, qui une fois saturée d’eau devient de la chaux éteinte etfournit une matière très divisée et très blanche, dont ons’est servi dans tous les temps pour enduire les murs.Isaïe, xxxiii, 12, fait allusion à la calcination du calcairedans les fours à chaux, lorsque, prédisant le désastrede Sennachérib, il dit que les peuples ennemis seront «comme des incendies de sid», par conséquent dévoréspar le feu de la colère divine. Amos, ii, 1, accuse lesMoabites d’avoir «brûlé par la sîd», comme s’ils étaientdes pierres a chaux, les os du roi d’Idumée, exerçantainsi une vengeance sauvage jusqu’au delà du tombeau. —Moïse ordonne de blanchir à la chaux les stèles sur lesquellesles Israélites écriront les paroles de la Loi, aprèsle passage du Jourdain, et de dresser ensuite ces stèlessur le mont Hébal. Deut., xxvii, 2, 4. Le texte de la Vulgatedit: «Tu les enduiras de chaux afin que tu puissesécrire dessus,» ce qui donnerait à supposer une écrituretracée à la couleur sur un fond blanc. Mais dans l’hébreuon lit: «Tu les enduiras de chaux, et tu écriras surelles.» Des stèles destinées à être dressées en plein airne peuvent recevoir d’inscriptions à la détrempe, à moinsqu’on ne veuille que ces inscriptions soient rapidementeffacées par les intempéries. Or l’intention évidente deMoïse est que ces inscriptions du mont Hébal soient durables.Par conséquent elles seront gravées dans la pierre, et la stèle sera ensuite blanchie. Le ꝟ. 4 le dit formelII. - 21 G43
CHAUX
CHEF
644
lement: «Vous dresserez les pierres que je vous prescrisaujourd’hui sur le mont Hébal, et vous les enduirezde chaux.» On doit les blanchir pour attirer l’attentiondu passant, qui en apercevant la stèle éclatante la distinguerafacilement des rochers ordinaires du pays et viendralire l’inscription. — Pour une raison analogue, audernier mois de l’année, en Adar, les Juifs blanchissaientà la chaux l’extérieur des tombeaux. Les pèlerins, si nombreuxaux solennités de la Pâque, qui tombait le moissuivant, étaient ainsi avertis par la couleur blanche dene pas approcher des sépulcres, dont le contact produisaitune souillure légale. Matth., xxiii, 27; Jerus. MaasarScheai, v; Shekalin, i, 1, traduct. Schwab, t. iii, 1879, p. 246-247; t. v, 1882, p. 259. Voir Enduit, col. 1783.
H. Lesêtre.
1. CHAYIM ou Hayyîm Joseph David Asulaï benSerachia, rabbin, né à Jérusalem en 1726, passa la plus grandepartie de sa vie à Livourne et y mourut le 21 mars 1807.Il a laissé, outre une célèbre bibliographie des auteursjuifs, ëêm haggedôlim, «Le nom des grands,» plusieursouvrages d’exégèse: un commentaire sur le livre de Ruth, Simhap hârégél’al Rûp, «Joie de la fête, sur Ruth, s in-4o, Livourne, 1782; un commentaire sur Esther, Simhathârégél’al’Esfêr, «Joie de la fête, sur Esther,» in-4o, Livourne, 1782; des remarques sur le Pentateuqueavec des notes tirées des anciens auteurs, Penê David, «Face de David,» in-f°, Livourne, 1792; un commentairesur le Pentateuque, Nahal Qedûmîm, «Torrent deQedumîm,» Jud., v, 21, in-4o, Livourne, 1800; un commentairesur les cinq Megillôt (Cantique, Ruth, Lamentations, Ecclésiaste, Esther); Nahal’eskôl, «Torrentd’Eskol,» in-f°, Livourne, 1808; un commentaire sur lesPsaumes, Yôséf lehillôt, «Multipliant les louanges,» in-4o, Livourne, 1801. E. Levesque.
2. CHAYIM ben Josua. Voir Hurwitz Chayim.
3. CHAYIM ibn Athar. Voir Athar 2.
- CHAZZEKÛNI##
CHAZZEKÛNI, surnom de Chiskia ben Manoach.Voir Chiskia ben Manoach.
- CHEBBON##
CHEBBON (hébreu: Kabbôn; Septante: Xaêpà; on lit Xaêëûv, Xagiiv, dans plusieurs manuscrits), villede la tribu de Juda, mentionnée entre Églon et Leheman.Jos., xv, 40. Elle fait partie du second groupe descités de «la plaine» ou de la Séphéla, et est peut-êtreidentique à Machbéna (hébreu: Makbênâ") de I Par., Il, 49. Le nom et la place qu’elle occupe dans rénumérationde Josué répondent suffisamment à une localitéactuelle, El-Qoubêibéh, située au sud-ouest de Beit-Djibrin, et qui se trouve précisément entre KhirbetAdjlân (Églon) et Khirbet el-Lahm (Leheman). Voir lacarte de la tribu de Juda. Cette colline semble avoir étéjadis comme place forte la clef des montagnes de Juda.Cf. Van de Velde, Reise durch Syrien und Palàstina, Leipzig, 1855, t. ii, p. 156; Rôbinson, Biblical Researchesin Palestine, Londres, 1856, t. ii, p. 50, 51. Les deuxvoyageurs ne signalent rien de particulier et ne fontaucune allusion à la cité biblique. L’identification, admisepar Keil, Josua, Leipzig, 1874, p. 131, et d’autres, paraîtcependant acceptable. Cette localité est distincte du villageplus connu, El-Qoubéibéh, situé au nord-ouest deJérusalem, et que plusieurs regardent comme l’Emmaùs
de l’Évangile.
A. Legendre.
- CHÉBRON##
CHÉBRON (Xegpwv), orthographe, dans I Mach., v, 65, du nom de la ville d’Hébron. Voir Hébron.
1. CHEF. Terme générique, d’une signification peudéterminée, par lequel sont désignés dans l’Écriture tousceux qui à un titre quelconque exercent l’autorité.
1. Dans l’Ancien Testament. — Le peuple hébreu était
divisé en tribus. Nous trouvons: 1° les chefs de tribus, en hébreu: neèi’im; Vulgate: principes, duces, Gen., xxv, 16; Num., vii, 11, etc., ou ra’sim, principes, caput,
I Reg., xv, 17, etc., constitués pour gouverner une portiondu peuple. Ils remplissaient particulièrement lesfonctions de juges, quelquefois de commandants militaires.Nous les voyons, Jos., ix, 15, former avec Josuéun conseil suprême pour dicter à l’ennemi les conditionsde la paix. — Les tribus se subdivisaient en familles, d’où
2° Chefs de famille, ra’Sê’abôt, principes familiarum, titre donné aux principaux ancêtres d’une famille, Exod., vi, 14, 25, etc., par le nom desquels on désignaitleurs descendants, par exemple: les fils de Phinées, lesfils d’Ithamar, etc. I Esdr., viii, 1-14; cf. II Esdr., vii, 70-71; viii, 13, etc. — La distinction du peuple hébreuen tribus et en familles remonte à l’origine même de lanation. — À partir de l’établissement de la royauté, l’organisationde l’armée et du service religieux du Templedonna naissance à de nouvelles dignités.
3° Chef s de l’armée, officiers, désignés ordinairementpar l’hébreu sârîm, auquel s’ajoute quelquefois une déterminationplus spéciale: èar’asérét, «chef de dix» (Vulgate: decani), Éxod., xviii, 21; Sar hamissim, «chef decinquante,» Septante: it£VTT)xdvT «px 01: j quinquagenariumprincipem, IV Reg., i, 9; Is., iii, 3; idrê mê’ôt, «chefsde cent,» centuriones, Deut., i, 15; Sar’ëlëf, «chef demille,» tribunum super mille viros, I Sam. (I Reg.), xviii, 13; I Par., xv, 25; èar has-sàbà’, «chef de l’armée,» Septante: àp-/[aTâpTïiyo; ; Vulgate: princepsexercilus, Gen., xxi, 22; èar sebâ’, Vulgate: magistermilitise, I Reg., xii, 9; sar hat-tabbâl.nm, «chef des satellites,» Septante: àf/’M-^Y^’P? i Vulgate: magister militum, Gen., xxxvii, 36; xxxix, 1; xli, 10; Jer., xl, 1; ou simplement sar, «chef,» qui se dit indistinctementd’un chef de milice. Num, xxi, 18; IV Reg., ix, 5; II Par., xxxii, 21; Job, xxxix, 25; Is., xxi, 5; xxxi, 9. Dans leNouveau Testament, le chef d’armée est appelé ^Aî-xp/o{, qui d’après l’étymologie désignerait un chef établisur mille soldats. Il est employé pour signifier indistinctementtout chef militaire. Marc, vi, 21; Joa., xviii, 12; Act., xxi, 31-37; xxv, 23. — Parmi les chefs sont à signalerspécialement les chefs appelés en hébreu rôs hasâlisi, ou mieux sâlisim, titre donné à Jesbaam l’Achamonite, l’un des plus braves guerriers de David, II Reg., xxm, 8; I Par., xi, 11; à Abisaï, II Reg., xxiii, 18, et àAmasaï. I Par., xii, 18; cf. IV Reg., vii, 2, 17, 19; ix, 25; xv, 25. Voir Armée, t. i, col. 978.
4° Chefs des chantres et musiciens, qui dirigeaient leschœurs des lévites, particulièrement Asaph, Héman, Idithum.Voir ces mots. I Par., xvi, 5, 7, 37, 41; xxv, 1-4, 6;
II Par., v, 12; xxix, 13, 14; xxxv, 15. Voir Chantresdu Temple.
5° Chefs des eunuques. — Dans le livre de Daniel, i, 11, il est question du chef qui, à la cour de Babylone, était chargé de veiller sur les eunuques, èar has-sdrîsim, princeps eunuchorum, et de diriger et contrôler leurservice.
II. Dans le Nouveau Testament. — Plusieurs espècesde chefs, dont il n’est pas question dans l’Ancien Testament, sont nommés dans le Nouveau.
1° Chefs des prêtres, ip^tepeîç; Vulgate: principessacerdotum, «princes des prêtres,» dont il est questionMatth., ii, 4; xvi, 21; xx, 18; xxi, 15, etc. Plusieurs exégètesveulent les confondre avec les grands prêtres actuellementou autrefois en fonction, parce que du temps deNotre -Seigneur il en existait plusieurs, qui s’étaient succédéà brefs intervalles. Cette opinion est peu vraisemblable.D’autres pensent que ces chefs des prêtres étaientles chefs des vingt-quatre familles sacerdotales, commeII Par., xxxvi, 14, èarê hak -. kôhânîm, principes sacerdotum.
2° Chefs de la synagogue^ en grec àp-/w.waY<iYOt, Marc, v, 22; Act., xiii, 15, appelés aussi ïp/ovTe; , Matth.,
ix, 18, 23; Luc, viii, 41, magistrats qui présidaient àl’administration des synagogues, réglaient les litiges, admettaient les prosélytes. Voir Synagogue.
3° Chefs de la milice du Temple, a-pxrf t Yr>: , magistratus, Luc, xxii, 4, 52, officiers chargés de présider à lagarde du Temple, qui était faite sous leurs ordres, parun groupe déterminé de lévites. Cf. Act., iv, 1; v, 21, 26.
4° Chefs d’armée. — Le commandant des soldats romainsen Palestine est appelé dans le Nouveau TestamentfMttf/fiit proprement «chef de mille». Ce mot désignele preefectus cohortis ou le tribunus militum, Joa., xviii, 12; Act., xxi, 31-33, 37; xxii, 24, 26-29; xxiii, 10, 15, 17-19, 22; xxiv, 7, 22; xxv, 23; et par extension toutchef de soldats. Marc, vi, 21; Apoc, vi, 15; xix, 18.
5° Chef d’Asie, dénomination impropre pour désignerun asiarque, ’Auiap/Ti; , prêtre de l’empereur et présidentde l’assemblée provinciale d’Asie Mineure. Act., xix, 31. Voir Asiarque, t. i, col. 1091. P. Renard.
2. CHEF DES CHANTRES (menassêah). Le termenïHO, menassêah, employé cinquante-six fois dans la
Bible (dans cinquante-cinq Psaumes et Hab., iii, 19)comme indication musicale, est le participe du verbenui, nissêafy quhel), «présider,» «diriger un travail,»
I Par., xxiii, 4; II Par., ii, 17; xxxiv, 12; I Esdr., iii, 8-9, spécialement «conduire le chant et la musique». Cettedernière signification fait de menassêah un synonyme dugrec -îiYlt 1 "? «cne f du chœur» ou <c chef musicien». —Dans l’organisation que David donna à la musique duTemple, les maîtres musiciens, melummedê Sîr, «habilesdans l’art du chant,» étaient au nombre de deux centquatre-vingt-huit, chargés les uns de conduire les chanteurs, les autres de commander aux joueurs de nable, aux harpistes ou aux joueurs de cymbales. I Par., xxv, 1-7. La Prothéorie sur les Psaumes, publiée à la suitedes œuvres de saint Jean Chrysostome, Pair, gr., t. lv, col. 531-534, nous représente David distribuant les chœursdes musiciens sous la conduite de leurs chefs, et donnantles Psaumes à chanter à l’un ou à l’autre. On choisissaitl’instrument dont le caractère convenait au cantique, oubien dont l’étendue ou l’accord répondait au mode dechant qu’on voulait employer. Le chef musicien recevaitle Psaume, l’adaptait à l’air sur lequel il devait êtrechanté, et en préparait l’exécution. Tel est le sens dansles titres des Psaumes de l’expression lamenassêah binegînôt, «au chef des [joueurs d’] instruments à cordes,» Ps. iv, vi, liv (lui), lv (liv), lxvii (lxvi), lxxvi (lxxv); Hab., iii, 19; — lamenassêah’al-negînôt, Ps. lxi (lx), et lamenassêah’al-haggitlit, Ps. vm; lamenassêah’el-hannehîlôt, Ps. v; lamenassêali’al-mahâlat, Ps. un (lu), lxxxviii (lxxxvii); lamenassêah’al-hassemînîf, Ps. XH (xi), et d’autres où lamenassêah estsuivi du nom d’un instrument de musique. Ps. ix (voirAlamot, t. i, col. 333), xlv(xliv), xlvi (xlv), lvi(lv), lx (lix). Ailleurs lamenassêah est joint au nom del’auteur du Psaume, de cette façon: lamenassêah le-David, ou lamenassêah mizmôr le-David, ou encorelamenassêali le-David mizmôr, que l’on doit traduire: «Psaume composé par David et remis au chef dechœur.» Le Targum ajoute Nnaur, leSabâhâ’, «pour
être chanté.» Ps. XI (x), xm (xii), xiv (xm), xviii(xvii), xix (xviii), xx (xix), xxi (xx), XXII (xxi), XXXI(XXX), XXXVI (XXXV), XL (XXXIX), xli (xl), li (l), lu(li), lvii (lvi), lviii (lvh), lix (lviii), lxiv (lxiii), lxv (lxiv), lxviii (lxvii), lxx (lxix), cix (cviii), cxxxix(cxxxviii), cxl (cxxxix). Les Psaumes xlii-xliii (xliXLII), XL1V (XLIIl), XLV (XLIV), XLVI (XLV), XLVII (XLVl), XL1X (XLVIIl), LXXXIV (LXXXIIl), LXXXV (LXXXIV), LXXXVIII
(lxxxvii), portent de la même manière le nom des filsde Coré, et le Psaume lxxv (lxxiv) le nom d’Asaph. Ontrouve encore lamenassêali avec le nom de l’auteur du
psaume et celui du chef musicien, lamenassêah l-Yidûtûnmizmôr le-David, «Au chef de chœur Idithun. Psaume deDavid,» Ps. xxxix (xxxviii), lxii (lxi); lamenassêah’al-Yedûtûnle-’Asdf mizmôr, «Au ehef de chœur Idithun.Psaume d’Asaph.» Ps. lxxvii (lxxvi). Enfin lamenassêahse trouve sans aucun nom au Psaume lxvi (lxv). Il fautnoter que cette inscription ne se lit pas dans le quatrièmelivre des Psaumes (xc [lxxxix]-cvi [cv]), et qu’ellene se rencontre que trois fois dans le cinquième (cvii[cvi]-cl). Ce fait peut s’expliquer par la circonstanceque les cinq livres du psautier ne furent pas recueillisà la même époque, ni peut-être dans la même région.
Le chef de musique dirigeait, commandait (niséah) lechant, en chantant lui-même, ou bien en jouant d’uninstrument (Aben-Esra, Comment. inPs. iv), ou encorepar le mouvement de la main, comme le xopuçafo; ouïjfoiniv des chœurs grecs, que les Latins appelaient manuductor.Cf. Burette, Dissertation sur le rythme del’ancienne musique, dans les Mémoires de l’Académiedes Inscriptions, t. v, part, ii, 1729, p. 160. Les thérapeutesd’Egypte avaient aussi leurs r^r^à-i, qu’ils choisissaientparmi les plus habiles d’entre les musicienset leurs chants étaient accompagnés des gestes de lamain. Philon, Vita contempl., xi, édit. Mangey, p. 485.De nos jours encore, dans les églises grecques, lejipo)Toiic(), Tr, ç dirige le chant par les gestes de la main; et les divers signes manuels reproduits par l’écritureconstituent la notation byzantine, appelée du nom mêmede -/s’P°voqua, qui veut dire «geste». Cf. Villotteau, Dal’état actuel de l’art musical en Egypte, dans la Descriptionde l’Egypte publiée par ordre du gouvernementfrançais, Paris, t. xiv, an VII, c. IV, p. 692; Christ et Paranikas, Anthologia grseca carminum christianorum, in-4°, Leipzig, 1871, p. cxiv et cxxiv. Lesversions anciennes n’ont pas rendu exactement la vraiesignification de lamenassêah; mais l’impossibilité où sesont trouvés les anciens interprètes de traduire plusieursdes termes contenus dans les titres des Psaumes est unepreuve en faveur de leur authenticité. Cf. Reusch, Enleitungin das Aile Testament, in-8°, Fribourg-en-Brisgau, 1870, § 21, p. 54. Aux titres des Psaumes citésles Septante traduisent eiç ta téXoç, et la Vulgate d’aprèseux in finem, comme si le texte portait nï: S, lenêsah.
Les autres versions se sont rapprochées davantage dela vérité en traduisant vixonoiw (Aquila), èmvixio; (Symmaque), eî; tô vïxo; (Théodotion), victori (saint Jérôme, Patr. lat., t. xxviii, col. 1 130, etc.). La racine rati, nâsah, possède ce sens de «surpasser, vaincre», dans l’hébreului-même, (I) Esd., iii, 8, etc., et dans les langues congénères.J. Parisot.
- CHÉLÉAB##
CHÉLÉAB (hébreu: Kil’âb; Septante: Aa), ovti), second fils de David; il l’eut d’Abigaïl, qu’il prit pourfemme, après la mort de Nabal. II Reg., iii, 3. Au passageparallèle, I Par., iii, 1, il est appelé Daniel. On adit qu’il pouvait porter deux noms. Bochart, Opéraomnia, Leyde, 1692, t. ii, 1. ii, cap. 55, p. 663. Mais ilest assez probable que nous avons dans Kil’âb, 3Nb3, une erreur de copiste, assez explicable, si l’on considèreque le mot suivant commence par trois lettres semblables, S; cxb. Les Septante, II Reg., iii, 3, du resteportent Aa), ou: : *. Daniel serait donc plutôt le vrai nomdu second fils de David. Voir Daniel 1. E. Levesque.
- CHÉLIAU##
CHÉLIAU (hébreu: Kelûhy; qeri: Kelûhû; Septante: XeXxta), un des fils de Bani qui après le retourde la captivité renvoyèrent les femmes étrangères qu’ilsavaient épousées contrairement à la loi. I Esdr., x, 35.
- CHÉLION##
CHÉLION (hébreu: Kilyôn; Septante: XeXaiwv; Codex Alexandrinus: XeX&ûv), fils d’Élimélech et doNoémi. Ruth, i, 2. Lorsque la famille d’Élimélech fut
obligée par la famine de se retirer au pays de Moab, Chéliony épousa une Moabite, Orpha, et mourut dix ansaprès. Ruth, i, 5; iv, 9, 10.
- CHELLUS##
CHELLUS (XsXo’Jç, XsUo’j; ; Codex Sinaiticus: Xeo-Xo-J; ), nom de lieu, omis dans la Vulgate, mentionnédans le texte grec du livre de Judith, I, 9. Il désigne unedes villes situées au sud de Jérusalem, dont le roi d’Assyrieexigeait la soumission immédiate. Citée entre Bétané(Betxvïj, peut-être la B^Oavsa ou Br, 9avlv d’Eusèbe, dans la région montagneuse d’Hébron; cf. Onomasticasacra, Gœttingue, 1870, p. 220) et Cadès (KâS» ); , AïnQadis), cette place a sa position tout indiquée dans lesud-ouest de la Palestine. Aussi est-ce avec beaucoupde vraisemblance que Reland, Palsestina, Utrecht, 1714, t. ii, p. 717, a cherché à l’identifier avec l’ancienne Élusa, la talmudique ffalûsah (cf. A. Neubauer, La géographiedu Talmud, Paris, 1868, p. 410), aujourd’hui Khalasah, au sud-ouest de Bersabée (Bir es-Séba’) et au nord deCadès. On trouve en Cet endroit des ruines assez considérables, mais ces restes d’une ville autrefois importantesont trop confus pour qu’on puisse en suivre nettementle pian. Les habitants de Gaza en ont emporté des débrisde toutes sortes pour bâtir leurs maisons. Élusa fut célèbresurtout à l’époque romaine et dans les premiers sièclesde l’ère chrétienne. Cf. Robinson, Biblical Besearches inPalestine, Londres, 1856, t. i, p. 201-202; E. H. Palmer, The désert of the Exodus, Cambridge, 1871, t. ii, p. 385.
— Un certain nombre d’auteurs ont confondu et identifiéChellus avec Cellon, pays mentionné également une seulefois, dans le même livre de Judith, ii, 13 (grec, 23), à propos de la première campagne d’Holopherne. "Voirà l’article Cellon la réfutation de cette erreur.
A. Legendre.
- CHELMAD##
CHELMAD (hébreu: Kilmad; Septante; X «pu.div), nom d’une localité ou d’une ville qui entretenait un traficsuivi avec Tyr. Ezech., xxvii, 23. Les noms de Hâran, Assur et Éden, qui précèdent, la font placer égalementdans la Mésopotamie; la nature des objets de trafic confirmecette induction: les tapis et les étoffes brodées deBabylone étaient célèbres dans toute l’antiquité. Cependanton n’a pas encore trouvé le nom de Kilmad dansles textes cunéiformes, et sa situation précise demeureinconnue. Bochart, Phaleg, Francfort, 1681, p. 480, laconfond avec la XapjiâvSr) de Xénophon, ville riche, située dans une région déserte, au delà de l’Euphrate, laliquide b ou l étant changée en r par les Perses, dontXénophon nous donne la prononciation, comme ellel’était dans Babirus pour Babilu, le nom de Babylonedans les inscriptions trilingues des Achéménides. C’estpeut-être aussi une faute du copiste hébreu, les Septanteayant transcrit Xap[i<%v, où on a cru voir la Carmanie.Calmet, Commentaire littéral, Ezéchiel, Paris, 1715, p. 278, l’identifie avec la C/wlmadora de Ptolémée, v, 25, en Commagène. G. Rawlinson, The five great monarchies, Londres, 1879, t. i, p. 15, 21, 168; G. Smith, dans lesTransactions of the Society of Biblical Archseology, 1872, p. 62, et Frd. Delitzsch, Wo lag das Paradies, 1881, p. 206, la confondent avec la Chelmada moderne, petite localité proche de Bagdad, où l’on a trouvé desanneaux de bronze avec inscription cunéiforme au nomdu roi babylonien Hammourabi. Le Targum traduit: «laMédie.» Hitzig, Der Prophet Ezéchiel, in-8o, Leipzig, 1817, p. 207, à la suite de Joseph Kimehi, y voit non pasune localité, mais le mot limmud, précédé de la particulecomparative ke, et traduit ce passage: «Assur a étécomme ton disciple en négoce.» Ce sont là autant d’hypothèsesentre lesquelles il est impossible de faire unchoix raisonné. Voir J. Knabcnbauer, Commentarius inEzechielem, in-8o, Paris, 1890, p. 281-282.
E. Pannier.
- CHELMON##
CHELMON (Septante: K-jxulùv; syriaque: Qadmôn; arabe: Qalîmôn), localité aux environs de Béthulie. —
D’après les Septante, Judith, vii, 3, l’armée assyrienneformant le siège de Béthulie «établit son camp dans lavallée voisine de Béthulie, près de la fontaine, s’étendanten largeur de Dothaïn jusqu’à Belthem, et en longueurdepuis Béthulie jusqu’à Kyamôn, qui est en face d’Esdrelon». La version syriaque s’exprime un peu différemment: a L’armée, dit-elle, campa dans la vallée qui est devantla ville, près de la’fontaine des eaux; elle s’étendait enlargeur de Doteim jusqu’à’Abelmehata’, et en longueurdepuis Qadmôn jusque vers Jczraël.» La "Vulgate diffèredavantage: «Ils vinrent, dit-elle, par le faîte des montagnesjusqu’à la hauteur qui regarde sur Dothaïn, depuisle lieu appelé Belma jusqu’à Chelmon, qui est en faced’Esdrelon.» Ces versions concordent cependant à montrerChelmon non loin de Dothaïn et en face d’Esdrelon, autrement dit Jezraël. — Ni Eusèbe ni saint Jérôme nenous renseignent sur cette localité, non plus que sur Béthulie.Le nom de Chalmount se lit dans une charte de1139, par laquelle le comte de Tripoli cède à l’église dumont Thabor le casai de Bethsan et une terre du territoirede Béthélion. Gocelin de Chalmount et Pierre -Raymonde Balma sont nommés comme témoins. Rien dansl’acte ne détermine la situation des lieux dont ces seigneursportent les noms. Voir Sébastian o Paoli, Codicediplomatico del sâcro militare ordine Hierosolymitano, in-f°, Lucques, 1733, t. i, n° 18, p. 19. Les relations despèlerins se taisent sur Chelmon. Jacques Ziegler, Palmstina, in-4o, Strasbourg, 1532, ꝟ. xxxv b, indique Chelmonentre Helma (Belma) et Béthulie; Helma entre Seythopoliset Béthulie; Dothaïn à douze milles au nord de Samarie, et, ꝟ. xxxii b, Béthulie aux degrés 66° 39’et 32° 25’.Ces indications nous mènent au sud de la plaine d’Esdrelon, non loin de Dofân et à l’orient de Bal’amêh. Ellesnous paraissent toutetois plutôt une interprétation de l’Écriture, appuyée sur l’Onomaslicon d’Eusèbe, que l’expressionde la connaissance topographique traditionnelle.Reland, Palsestina, Utrecht, 1714, p. 732, croit Chalmonidentique à KapiMovâ d’Eusèbe et Cimona de saint Jérôme, placés par eux, De locis et nominibus hebraicis, t. xxiir, col. 887, dans la grande plaine, à six milles au nord deLégioun. D’après Bonfrère, Onomasticon, édit. Clericus, inf°, Amsterdam, 1707, p. 55, elle était «près d’Esdrelonet de Béthulie, dans la Galilée inférieure». — Les modernesla cherchent également en divers lieux, suivantl’opinion adoptée par eux sur le site de Béthulie. F. deSaulcy, Dictionnaire topographique de la Terre Sainte, in-12, Paris, 1877, au mot Chelmon, p. 105, écrit qu’ «ilest impossible de ne pas reconnaître dans le mont Chelmonle petit Hermon, qui est nommé aujourd’hui Djébel-Dahy»; au mot Cyamon, ibid., p. 108, il ajoute: «C’estprobablement le village actuel de Koumiéh, qui est aupied du Djebel -Dahy, et à une heure de marche à l’estnord-estde Zéraïn.» Ce village, assis sur une collinedominant l’Ouadi-Djâloud, n’a rien de particulier. Cetteidentification serait tris probable si Beth-IIfa, comme l’acru le consul Schulz, était Béthulie; mais de Saulcy voitBéthulie dans Sanour, qui est à plus de trente kilomètresau sud de Koumiéh: on peut se demander comment, àcette distance, Koumiéh pouvait entrer dans la ligne d’investissementde Béthulie. — Victor Guérin, Samarie, t. i, 1874, p. 306-307, propose Koumiéh, «à cause de son nomet de sa position en face de la grande plaine d’Esdrelon,» ou El-Fouléh, «la fève,» qui pourrait être «la traductionfidèle en arabe du mot grec Kyajirôv, qui signifie «champde fèves», de -/.’jau-o: , «fève.» El-Fouléh est aussi enface d’Esdrelon. C’est le Castrum Fabse; «Château de laFève,» des croisés. Cette citadelle, située sur une collinepeu élevée, au milieu de la plaine d’Esdrelon, avait desmurs très élevés, dont il reste une partie. Voir V. Guérin, Galilée, t. i, p. 110. La distance qui la sépare de Sanour, identifiée avec Béthulie par M. Guérin, est à peu près cellede Koumiéh. En 1875, dans La Samarie, t. i, p. 241-2H, Victor Guérin identifie Chelmon avec Tell-Kaimoun, le C49
CHELMON — CHEMINÉE
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Ka[i(iwvâ d’Eusèbe, Tell-Kaimoun est une ruine située aupied du Carmel, assez étendue, mais informe, sur la lisièreest de la plaine d’Esdrelon, presque en face de Zéraïn, l’antique Jezraël ou Esdrelon, à treize kilomètres au nordde Légioun. G. Armstrong, Conder et Wilson, Names andplaces in the Old Testament and apocrypha, in-8°, Londres, 1887, p. 45, adoptent la même identification.Tell-Kaimoun est à plus de quarante kilomètres de Messiliéh, identifiée par Conder avec Béthulie; à quarante-cinqde Sanour et autant de Tell-Khaibâr, proposée commelîéthulie par d’autres membres du Palestine ExplorationFund. — M. J. Fahrngruber, Nach Jérusalem, in-18,
bourgen-Brisgau, 1872, p. 58, s’est rallié, Bibelvtlas, 2e édit., in-f°, ibid., 1887, p. 18, à l’identification proposéepar Fahrngruber. Si l’on considère que la plupartdes villages de la Galilée et de la Samarie sont peupléspar des habitants de race syrienne, et que les Syriensen général ne prononcent pas la lettre Q, mais disent’Odes pour Qodes, ’Ana pour Qâna, ’Yamôn dans labouche de ces populations est absolument identique àQyamôn, nom qui, suivant les règles de transcriptionsusitées par les Septante, doit se transcrire en grec parKuaiiiov. Yâmôn est à huit kilomètres au nord-ouest duKhirbet Bal’améh, et à peu près à la même distance au
Wurzbourg, ’° édit. (sans date), p. 305, note **, proposeYamôn (fig. 238). Yamôn est un grand village lormé dedeux quartiers s’étendant de l’est à l’ouest. Il est assis surune grande colline située au pied et non loin du sommetélevé appelé Seheikh-Schibel, que nous croyons la montagnede Béthulie, et de I.Iaraieq, du côté du nord. Voirt. i, fig. 533, col. 1751. De cette colline, qui se dresse au-dessusdes premières élévations, bordant au sud-ouest leMerdj-Ibn-’Amer (plaine d’Esdrelon), le regard embrassecette plaine dans toute son étendue Les alentours sontcouverts de superbes plantations d’oliviers et de bosquetsde figuiers et de grenadiers. Non loin, vers l’est, est ungrand puits d’eau vive appelé Bir-Sebà’. M. J. Khalîl-Marta, qui identifie Béthulie avec Ilaraiéq, ruine situéesur la montagne, au-dessous du Seheikh-Schibel, adopte, Intorno al vero silo di Belulia, dans la Terra Santa, in-i», Florence, 1887, n° s 9 et 10, et tirage à part, p. 15 et suiv., l’identification de Yâmon pour Chelmon. Le D r Riess, qui hésitait d’abord, Biblische Géographie, in-f", Frinord de Tell-Dotân. Ces trois localités se trouvent sur lecercle qui entoure les montagnes de Seheikh-Schibel etBîarraiéq et de Saliel’Arrabeh, appelé quelquefois encoreSahel Dotân.Vok la carte de Béthulie, Dictionnaire dela Bible, 1. 1, col. 1758. Si Tell-Dotân est le Dothaïn du livrede Judith, et Bal’améh, Belma ou Balamon, il faut admettre, ce semble, presque nécessairement, que Yamônest le K’jafjiidv du même livre, compris dans la ligned’investissement de Béthulie. Voir Béthulie, Belma et
Dothaïn.
L. Heidet.
- CHÉLUB##
CHÉLUB (hébreu: Kelûb; Septante: 8 Xs).où8), pèred’Esri, un des intendants de Salomon. I Par., xxvir, 26.
CHEMIN. Voir Route.
CHEMINÉE. L’usage de la cheminée n’exisle pas enPalestine. Il n’en est jamais question dans la Bible. LaVulgate, il est vrai, emploie quelquefois le mot cami
nus; mais à ce terme correspondent en hébreu des motsassez divers: kibsân, le fourneau à fondre les métaux, Exod., îx, 8, 10; kûr, autre fourneau servant au mêmeusage, Prov., xvii, 3; tannûr, le four à cuire le pain, Is., xxxi, 9; Mal., iv, 1 (m, 19); ’attûn, la fournaise, Dan., iii, 17, 23, et kîyyôr, la casserole, Zach, xii, 6.Les maisons des pauvres n’avaient qu’une ouverture, laporte. On n’allumait de feu que pour faire la cuisine, et cette cuisine fort simple se préparait ordinairementdehors. Les foyers à cuisine, mebaslôt, nayeipeîoc, culinse, dont parle Ézéchiel, xlvi, 23, dans sa description duTemple, sont en plein vent, ou du moins sous desportiques aérés. Les maisons plus importantes avaientquelques fenêtres, mais petites, peu nombreuses et ferméespar jje simples treillages de bois. Quand on allumaitdu feu à l’intérieur, la fumée s’échappait par lafenêtre la plus proche. En parlant du châtiment réservéà Éphraïm, Osée, xiii, 3, dit que cette tribu sera emportée «comme la paille soulevée de l’aire par le tourbillon, commela fumée au sortir de la fenêtre», ’ârubbâh, fumarium.Le mot hébreu ne désigne qu’une fenêtre à grillage. Oncomprend que dans de pareilles conditions la fumées’échappât difficilement; les yeux des habitants en souf^fraient, comme le suppose cette sentence des Proverbes, X, 26, où l’on dit que le paresseux, c’est «du vinaigresur les dents, de la fumée dans les yeux». Dans l’Ecclésiastique, xxii, 30, il est fait aussi mention du foyer, xi|nvo; , caminus, d’où s’élèvent la vapeur et la fumée.Le chauffage des maisons était chose inutile en Palestine; le climat n’y est pas humide, et la température ydescend rarement au-dessous de zéro, et encore cet abaissementne se produit-il que sur les plateaux élevés, commeà Jérusalem. Les riches personnages, habitués à plus dedélicatesse, éprouvaient seuls le besoin de se chaufferdans leurs maisons. Une seule fois, la Bible mentionneun réchaud ou brûloir d’appartement, ’ah, èo-xipa irjpii; , arula, dont le roi Joakim se servait au neuvième mois, qui correspond à novembredécembre. Jer., xxxvi, 22.Le brasier, ivOpowia (ad primas), dont parle saint Jean, xviii, 18, dans le récit de la passion, est allumé au milieud’une cour, pour combattre la fraîcheur toujours trèsgrande en Orient pendant la nuit. Il n’y a évidemment pas làde cheminée. De même pour le feu qui est allumé sur lerivage du lac de Tibériade. Joa., xxi, 9 (àv9paxia, pnmas).
H. Lesêtre.
- CHENE##
CHENE (hébreu: Kannêh; Septante: Xavotâ), villementionnée par Ézéchiel, xxvii, 23, avec Haran etÉden, comme faisant le commerce avec la ville de Tyr.Ptolémée, Vi, 7, 10, parle d’une ville commerçante appeléeCane, et certains commentateurs ont pensé quec’était d’elle qu’il élait question dans le prophète. Cetteidentification n’est pas possible, parce que la Cane dePtolémée est située dans l’Arabie Heureuse, et qu’Ézéchielplace Chené en Mésopotamie, puisqu’il la nommeentre Haran et Éden, qui sont deux villes de Mésopotamie.Cf. Is., xxxvii, 12. — On admet aujourd’hui presqueuniversellement que l’hébreu Kannêh est une contractionde Kalnêh (Vulgate: Chalanné). Un manuscrit hébreuporte même ruSs, Kalnêh, au lieu de riîs, Kannêh,
J. Knabenbauer, Comment, in Ezech., 1890, p. 281. VoirChalaxsé.
CHÊNE. 1° Hébreu: ’allôn; Septante: pi).avo; , Gen., xxxv, 8 (deux fois); Is., ii, 13; vi, 13; BpC; , Ose., iv, 13; Amos, ii, 9; Zach., xi, 2 (et dans le Codex Alexandrinuset le Sinaiticus, Is., xliv, 13); jÀir-.vo; , Ezech., xxvii, 6; Vulgate: quercus; — 2° hébreu: ’êlôn; Septante: fiïXavo: , Jud., IX, 6; opù; , Gen., xii, 6; xiii, IS: xiv, 13; xviii, 1; Deut., xi, 30; Jud., iv, 11; I Reg., x, 3: ’HX «jv[j.attdvev=i|i (uni au mot hébreu suivant me’ônenîm. «devins» ), Jud., ix, 37; et omis ou altéré, Jos., six, 33, Vulgate: quercus, Jud., ix, 6, 37; I Reg., x, 3; convallis, Gen., xii, 6; xiii, 18; xjv, 13; xviii, À; vallis, Deut.,
xi, 30; Jud., iv, 11; Elon, Jos., xrx, 33; — 3° hébreu: tirzâh, Is., xi.iv, 14; Septante: omis dans le Codex Vaticanus, mais àypto61).avoî dans le Codex Alexandrinuset le Codex Sinaiticus; Vulgate: ilex; — 4° dans l’histoirede Susanne, Dan., xiii, 58; Septante: irpivoç; Vulgate: prinus.
I. Description. — Arbre de l’ordre des Amentacées, pour ses fleurs unisexuelles, dont les miles sont groupéesen chatons, et type de la famille des Cupulifères, caractérisé par son fruit ou gland, solitaire et enchâsséà la base dans une cupule indivise, recouverle d’écaillés.La saillie plus ou moins prononcée de ces écailles permetde distinguer parmi les chênes d’Orient deux séries bientranchées, qui peuvent chacune se subdiviser d’après lapersistance plus ou moins accentuée des feuilles.
1° Dans la première série, les écailles qui garnissentla cupule demeurent courtes et apprimées; en outre, lefruit mûrit l! année même de sa formation. — 1. Le QuercusRobur, commun dans toute l’Europe moyenne, setrouve représenté dans la région du Liban par la variétéCedrorum, à feuilles plus longues et plus étroites quedans le type de la plaine, et par une autre variété pinnatifida, à lobes foliaires plus profonds, dépassant
[[File: [Image à insérer -->]|300px]]
239. — Quercus pseudo-cocdfera.
le milieu du limbe. — 2. Le Quercus infectoria, malgréses variations fort nombreuses, se distingue aisément duprécédent par ses feuilles plus petites, coriaces et bordéesde dents aiguës. Celles-ci, sans être absolumentpersistantes, se détachent toutefois plus tard des rameauxet peuvent même y rester en partie vivantes jusqu’à lafin des hivers doux ou dans les localités mieux abritées.C’est l’arbre qui fournit la noix de galle, lorsque sesbourgeons viennent à être piqués par un insecte hyménoptèredu genre Diplolepis. — 3° L’yeuse ou chêne vert(Quercus llex) doit son nom à ses feuilles, qui demeurentvertes jusqu’au printemps, et ne se détachent qu’aumoment où les nouvelles vont se développer. Cet arbre: caractérise le mieux la région méditerranéenne, où il serencontre partout spontané ou cultivé.
2° La deuxième série se reconnaît à la cupule recouverted’écaillés ordinairement saillantes et recourbées; , en outre, les glands, mettant deux ans à se développer, ne s’observent à l’état de maturité parfaite que sur lebois de la seconde année. — 1. De ce nombre est leQuercus coccifera, appelé chêne kermès, parce qu’ilnourrit la cochenille de l’ancien monde. C’est un arbrisseaureproduisant l’aspect de l’yeuse, mais sous une formeréduite dans toutes ses parties végétatives. Du reste, deshybridations fréquentes établissent entre les deux typesunesérie presque continue de formes, répandues enSyrie, et regardées jusqu’à ce jour comme de simplesvariétés, sous les noms de Calliprinos, Pseudo-coccifera( fig. 239, , etc. La forme Palsestina est plus élancée etatteint la taille d’un petit arbre, avec les écailles de lacupule remarquablement réfractées. — 2. Enfin troisdernières espèces possèdent en commun des feuillesamples et plus ou moins franchement caduques, à diviG53
CHÊNE
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sions aiguës ou mueronées, avec un fruit à cupule volumineuse.Le type européen du Quercus Cet-ris, vulgairementGland -Châtain, a été retrouvé sur les pentes duLiban avec le Quercus JEgilops (fig. 240), qui s’en distinguepar ses fruits plus gros du double, par sesfeuilles moins profondément découpées, plus fermes etsubpersistantes. Ce dernier, connu en Grèce sons le nomde chêne Velani, n’est représenté en Syrie que par deuxvariétés d’abord admises comme espèces: Quercus IthaburensisDecaisne, à feuilles largement ovales, et QuercusLook Kotschy. Le Quercus Libani (fig. 241) observédans la région du Liban se rattache à la même sectionpar ses fruits à maturation bisannuelle, mais la cupulen’est pas hérissée. Les espèces les plus répandues en
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840. — Quercus segilops.
Palestine sont le Quercus JEgilops et le Quercus pseudococcifera.— Cf. A. de Candolle, Cupuliferse, in De.Prodr. regni veget., pars xvi, sect. 2, fasc. 1; Kotschy, Eichen Europ. und Orient., in-f°, Vienne, 1858.
F. Hy.
IL Exégèse. — i. identification: — Les noms’êlâh, ’allâh, ’allôn, ’êlôn, qui dérivent d’une racine Vin, S>n, ’ail, ’il, exprimant de l’aveu de tous la force, et désignentpar conséquent des arbres vigoureux, ont été très diversementrendus par les versions. Si l’on ne tient pas comptedes points-voyelles (adjonction traditionnelle sans doute, mais quelquefois fautive, et en tous cas moins importantequ’une terminaison de consonnes), ils se ramènent à deuxtypes: rns et pbs. Or le texte sacré dislingue nettemententre le -Vn, ’êlâh, et le jVw, ’allôn. ls., vi, 13; Ose.,
iv, 13. D’autre part, ’allôn, sur neuf fois qu’il se présentedans la Sainte Écriture, est traduit par «chêne», huit fois dans les Septante et toujours dans la Vulgate.Et la plupart des exégètes anciens et modernes s’accordentà lui donner ce sens. Au contraire, ’êlâh estrendu tantôt par «chêne», tantôt par «térébinthe» dansles versions, et les interprètes conviennent généralementde lui laisser ce dernier sens.’Allah, n^x, qui ne se rencontrequ’une fois, Jos., xxiv, 26, et ne diffère du précédentque par la ponctuation, s’y rattache et a le sensde o térébinthe», que lui donnent d’ailleurs les Septante.Pour’êlâh et’allâh, voir Térébinthe. Le’êlôn, au contraire, qui n’est qu’une ponctuation différente du’allôn(jiba, fi’îs), a la même signification; mais il y a ceci de
particulier, qu’il ne se rencontre que dans les désignationstopographiques: serait-ce que la vraie prononciationse serait mieux conservée dans ces noms de lieu, ou bien ce mot désigne-t-il plutôt un bois de chêne, unechênaie? — Quant au mot’èl, qui ne se présente qu’unefois au singulier et en composition avec un autre motpour former un nom propre, ’El-paran, Gen., xiv, 6, et à sa forme plurielle’êlim, ls., i, 29; lvii, 5; lxi, 3; Ezech., xxxi, 14, il désigne des grands arbres en général
ou des futaies, comme l’araméen’ilân, Dan., iv, 7, 8, 11, 17, 20, 23, que les Septante rendent bien par ôévêpov, et
laVulgate par arbor. Cf. syriaque ^*j>’ilon, «grand
arbre». Aussi cette expression convient aussi bien à despalmiers, cf. Exod, xv, 27; III Reg., IX, 26, qu’à des chênesou à des térébinthes. Et si l’on veut voir une espèce déterminéedans Isaïe, 1, 29, ce serait plutôt le térébinthe quele chêne. Cf. Is., i, 30 (hébreu). — La plupart des languesont deux mots pour désigner le chêne et le chêne vertou yeuse (grec: SpO?, itpîvoç; latin: quercus, ilex), il en
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241. — Quercus Libani.
est probablement de même de l’hébreu. Le mot’âllôn ou’êlon désigne toute espèce de chêne; mais quand il s’agitde préciser, il existe un terme spécial, tirzâh (d’une racineexprimant la dureté, la fermeté), et qui se trouveplacé à côté du chêne proprement dit, ’âllôn, dans Isaïe, xliv, 14. La Vulgate traduit par ilex, et Celsius, Hierobotanicon, X. ii, p. 269, comme E. F. K. Rosenmûller, Handbuch der biblischen Alterthumskunde, t. iv, p. 312, approuvent cette traduction. Le texte demande un boispropre à être travaillé, sculpté: ce qui convient à merveilleau chêne vert. — C’est par le mot Trpîvoç, «chênevert,» Dan., xiii, 58, que le traducteur grec de l’histoirede Susanne a rendu le terme de l’original, soit qu’il y eût, en effet, une yeuse, ou que, pour conserver le jeu de mots, il eût changé le nom de l’arbre. Voir Susanne.
ii. le chêne dans L’ÉCRITURE. — C’est à l’est du Jourdain, surtout dans le pays de Basan, que se trouvaientles chênes les plus célèbres et par leur grosseur et parleur nombre. Is., ii, 13; Ezech., xxvii, 6; Zach., xi, 2.Dans les contrées de Galaad et de Basan, Burckhardt, Travels in Syria, 1822, p. 205, 348, vit encore des forêtsde beaux chênes. Depuis elles ont en grande partie disparusous la hache des Bédouins, qui ne prennent passoin de garantir les jeunes pousses de la dent de leurstroupeaux. Cependant on y trouve encore des bois degros chênes. Voir Basan, t. i, col. 1489. C’est le QuercusASgilops qui domine, et cette espèce paraît bien être lefameux chêne de Basan mentionné dans l’Écriture, digned’être mis en parallèle avec le cèdre du Liban. Is, ir, 13.Adrichomius, Theatrum Terrée Sanctse, in-f°, Cologne, 1600, p. 79, décrivant le pays de Basan, et la partie decette contrée qui longeait le lac de Génésareth et le Jourdain, remarque l’abondance des glands produits par sesnombreux chênes, et la facilité qu’on avait par là d’yélever sans peine des troupeaux de deux mille porcs, comme celui qui se précipita dans les Ilots après la gué
rison du possédé par Notre - Seigneur. Matth., viii, 30; Marc,-v, 11; Luc, viii, 32. Ces chênes de Basan donnaientun bois très estimé, qu’on exploitait à Tyr, où ilservait à la construction des vaisseaux, en particulier à lafabrication des rames. Ezech., xxvii, G. Son bois très duret qui se conserve bien dans l’eau convenait parfaitementà cet usage. Théophraste, Hist. Plant., v, 8; Strabon, iv, 1, édit. Didot, p. 162. Les chênes croissaient aussià l’ouest du Jourdain, surtout en taillis couvrant les collinesde Judée et de Galilée. Les beaux types de chênesparaissent y avoir été plus rares, et souvent isolés. C’estau pied d’un de ces beaux chênes ou dans un bois dechênes, près de Sichem, qu’on se réunit en assemblée
in-8o, Paris, 1820, t. ï"V, p. 349. — La force du chêne étaitdevenue proverbiale chez les Hébreux comme chez nous.Amos, ii, 9. Pour eux cet arbre vigoureux, au port majestueux, était le symbole de la puissance, Zach., xi, 2, et de la puissance orgueilleuse, que Dieu châtie. Is., Il, 13. Le chêne auquel on coupe les branches en ne laissantplus que le tronc, mais qui conserve assez de viepour se couvrir ensuite de nouveaux rameaux verdoyants, est pour le prophète, Is., vi, 13, l’image de la vitalitéd’Israël, qui sera décimé par les épreuves, mais retrouveraaux temps messianiques sa force et sa gloire.
III. NOMS DE LIEUX DANS LESQUELS ENTEE LE MOT DE
cilÉSE. — Plusieurs localités de Palestine étaient dési242. — Chêne d’Abraham, à Hébron. D’après une photographie.
pour établir roi Abimélech. Jud., ix, 6. Sous leurs fraisombrages on offrait des sacrifices aux faux dieux. Ose., iv, 13. Cf. Is., i, 29; lvii, 5; Virgile, Georg., iii, 332; Ovide, Métamorph., vii, 743; Kiesling, De superstitiosoIsrælis sub quercubus cultu, in-4o, Leipzig, 1748: Aupied de grands arbres les nomades ensevelissaient leursmorts, comme cela se pratique encore pour des scheikhsarabes ou des personnages célèbres par leurs vertus.Cf. I Reg.. xxxi, 13. C’est au pied d’un chêne que Débora, la nourrice de Rébecca, fut enterrée. Gen., xxxv, 8.
— Le chêne, ’allôn, et l’yeuse ou chêne vert, tirzâh, sontmentionnés ensemble parmi les bois durs que l’idolâtrechoisit pour se faire une statue de dieu, Is., xliv, 13(hébreu, 14): du reste, ajoute le prophète avec ironie, il se chauffe et fait cuire ses aliments, y. 16-17. Ces deuxespèces de bois sont précisément indiquées parmi cellesdont se servaient les anciens pour leurs statues de divinités.Pausanias, Description de la Grèce, trad. Clavier,
gnées par le nom d’un chêne ou d’une chênaie. Ainsi1o le chêne auprès duquel, près de Béthel, fut ensevelieDébora, la nourrice de Rébecca, était connu dans lemonde patriarcal sous le nom de «chêne des Pleurs», ’allôn Bâkût. Gen., xxxv, 8, cf. t. 1, col. 390. Auxme siècle, Brocard, Descript. Terras Sanctse, vii, 15, in-12, Cologne, 1624, p. 31, et dans Ugolini, Thésaurus, t. vi, col. mxlvi, vit encore un monument qu’onavait élevé en ce lieu. — 2o Le chêne de Moréh, ’ùlônMôrëh, Gen., xii, 6, ou plutôt les chênes ou la chênaiede Moréh, ’êlônê Môréh, Deut., XI, 30, près deSichem, où Abraham, à son arrivée dans le pays deChanaan, vint habiter. Près de ce lieu, les Israélites, entrant, eux aussi, dans la Terre Promise, trouveront, leur dit Moïse, l’Hébal et le Garizim, où ils doivent seréunir. Deut., xi, 30. La Vulgate traduit ces mots par «vallée illustre», Gen., xii, 6, et par «vallée qui s’étendet s’avance au loin». Deut., xi, 30. Les Septante ont G57
CHÊNE — CHÉRUBIN
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Lien rendu’êlôn par 8p3ç, «chêne;» mais au lieu devoir un nom propre dans Moréh, ils mettent v^y, ), ^; , «élevé,» l’épithète habituelle du chêne chez les poètesanciens. Celsius, Hierobotanicon, t. i, p. 65. Voir Moréh.
— 3o La chênaie de Mambré, ou le bois de chêne, prèsd’Hébron (car l’expression est toujours employée au pluriel, ’êlônê Mamrê), lieu où séjourna Abraham, Gen., xin, 18; xiv, 13, où il dressa un autel au Seigneur, Gen., Xin, 18, et où Dieu lui apparut à l’entrée de sa tente.Gen., xviii, 1. Il ne s’agit donc pas d’un arbre en particulier; mais les Septante ayant traduit par ôp-Gç, «chêne,» au singulier, on fut amené à regarder comme l’arbred’Abraham le plus beau des arbres de cet endroit. Et onl’appela tantôt chêne, tantôt térébinthe, soit qu’on confonditces deux espèces d’arbre, soit qu’en réalité destypes de l’une et de l’autre espèce aient porté successivementle nom d’arbre d’Abraham. Josèphe, Bell. jud., IV, IX, 7, l’appelle un térébinthe; mais, Ant.jud., i, x, 4, il dit qu’Abraham habitait près du chêne nommé Ogygès.Eusèbe, Onomasticon, édit. Larsow et Parlhey, 1862, p. 172, en réunissant les deux mots dans la même phrase, donne ce sens confus: «Le chêne de Mambré, situé prèsd’Hébron; c’est le térébinthe que l’on montre encoreaujourd’hui à l’endroit où campait Abraham.» Saint Jérômereproduit ce passage avec la même confusion, etajoute qu’on voyait encore ce chêne à l’époque de sonenfance et du règne de Constance: ce qui semble indiquerqu’il n’existait plus au temps où il écrivait; et dureste il nous montre sainte Paule, t. xxiii, col. 886, visitant «les vestige du chêne d’Abraham». À l’époque deConstantin, des superstitions étaient pratiquées par lespaïens auprès de ce chêne; l’empereur fit renverserl’autel et les idoles et ériger une basilique chrétienne.Socrate, H. E., i, xviii, t. 67, col. 124. Après saint Jérôme, les pèlerins continuèrent de vénérer le chêne deMambré: il faut donc qu’un nouvel arbre ait reçu cenom. C’est ce que signale Brocard, Descript. TerrseSanclx, édit. Laurent, 1864, t. ix, p. 81, en disant quec’est un rejeton né de ses racines. Celui que la traditionpopulaire regarde maintenant comme le chêne d’Abraham(ùg. 242) est un bel arbre de 30 mètres de hautet de 8 mètres 45 de tour; «de son tronc vigoureuxs’élancent trois grands bras qui se subdivisent en depuissants rameaux. À midi, il couvre de son ombre unterrain dont l’étendue de l’est à l’ouest est de trente-deuxpas, et de trente du nord au sud.» Guérin, LaJudée, t. m j p. 267. Il est dans l’oued Sebta, à l’ouestnord-ouest d’Hébron; mais il ne paraît pas que ce soitlà l’emplacement de la vallée de Mambré; elle se trouveplutôt au Haram Ramet el-Khalil. Cf. Guérin, La Judée, p. 279, et voir Mambré. — La Vulgate, aux trois endroitscités, traduit’êlônê par convallis, «vallée,» suivant encela lesTargums. — 4o Le chêne de Sichem, appelé’êlônmussâb, «chêne du poste militaire,» selon quelquesexégètes, ou plutôt «chêne de la stèle», appelé ainsi dequelque stèle ou pierre debout placée au pied de cetarbre. Est-il fait allusion à la «grande pierre que Josuéérigea en témoignage pour le peuple» ?Jos., xxiv, 26-27.La difficulté est qu’il est question d’un’allâh, «téré"binthe,» et non d’un chêne. À moins d’admettre unefaute de copiste pour’âllon, nS «pour p’iN, il faut reconnaîtredeux endroits différents. C’est près de ce chêneque les hommes de Sichem firent roi Abimélech. Jud., ix, 6. — 5o Le «chêne des enchanteurs», ’êlôn me’onànim, autre chêne près de Sichem, qui donnait son nomà un chemin d’où Gaal, un des chefs de la cité, vit venirles troupes. d’Abimélech. Jud., ix, 37. La Vulgate supprimele mot me’onânîm; les Septante l’unissent au mot’ëlon pour en faire un seul nom propre: ’LLù>v[jlo<(ovev£iu..— 6o Le «chêne en Saananim», ’éïon be-Sa’ânannîm, Jos., xix, 33, ou’êlôn be-Sa’ânnayhn, Jud., iv, 11, localitéprès de Cédés. Dans le premier passage, la Vulgate traduit «Élon en Saananim»; dans le second, «jusqu’à la
vallée qui s’appelie Sennim.» Voir Élon. — 7o Le «chênede Thabor», ’élon tâbôr, I Sam., x, 3, endroit par oùSaiil doit passer après qu’on lui aura annoncé que lesânesses de son père sont retrouvées. Il ne s’agit pas évidemmentde la montagne du Thabor, mais d’une localitéprès de Béthel. Voir Thabor 2. E. Levesque.
CHENILLE. La Vulgate a rendu par eruca, «chenille», Joël, i, 4; ii, 25; Am., iv, 9, l’hébreu gdzâtn.Voir Sauterelle.
- CHÉRÉAS##
CHÉRÉAS (Septante: Xaipéaq; Vulgate: Chxréas), gouverneur de la forteresse de Gazara (appelée ordinairementGazer), qu’assiégea Judas Machabée. II Mach., x, 32-33. Cf. I Mach., v, 8. Il était frère de Timothée, le chef des Ammonites adversaires des Juifs. II Mach., x, 37. Cf. I Mach., v, 6. Chéréas et Timothée furent misà mort dans une citerne où ils s’étaient cachés après laprise de la forteresse. II Mach., x, 37.
- CHÉRUB##
CHÉRUB (hébreu: Kerûb; Septante: X; po’jg), localitéchaldéenne ou de la partie méridionale de la Mésopotamie, d’où partirent pour suivre Zorobabel en Palestinecertaines familles qui se prétendaient d’origine juive, mais sans pouvoir «faire connaître leur maison paternelleet leur race, pour prouver qu’ils étaient véritablementd’Israël». I Esdr., Il, 59; II Esdr., vii, 61. — Les textescunéiformes n’ont pas encore révélé de localité de cenom. Quelques interprètes doutent si ce nom doit êtreisolé du suivant, ou s’y joindre sous la forme Chèrub-Addonou même Chérub-Addon-Immer. Keil, Chronik, in-8o, Leipzig, 1870, p. 420. Toutefois le texte de II Esdraspeut être allégué dans l’hébreu contre la troisième lecture, la Vulgate et les Septante contre la seconde, carils renferment la conjonction entre les différentes partiesde ce mot. On fait valoir à rencontre que la troisièmelecture donne trois localités au lieu de cinq, comme lieude départ des trois familles mentionnées I Esdr., ii, 60.Calmet admet même que ces noms, Chérub, Adon etÉmet; sont des noms de personnes, Commentaire littéral, Esdras, Paris, 1722, p. 16; mais c’est à tort, carles familles en question sont nommées au ꝟ. 60.
E. Pannier.
- CHÉRUBIN##
CHÉRUBIN (hébreu: kerûb; Septante: yzpovê; Vulgate: cherub; au pluriel: y_epou6f|ji, cherubim, êtresurhumain ministre de la puissance divine, ou représentépour rappeler et symboliser cette puissance.
I. Nature et nom. — L’Écriture mentionne: 1o leschérubins du paradis terrestre, 2o les chérubins sculptéssur l’arche d’alliance, 3o dans le sanctuaire, 4o brodéssur les tapisseries du Temple, et 5o décrits dans les visionsd’Ézéchiel. On n’a jamais hésité à reconnaîredes anges dans les chérubins du paradis terrestre. Maisles chérubins du sanctuaire et surtout d’Ézéchiel onttoujours paru enveloppés d’un mystère impénétrable.Josèphe, Ant. jud., VIII, iii, 3, écrit à propos des chérubinsdu Temple: «Personne ne peut ni dire ni conjecturerce qu’ils étaient.» Saint Grégoire de Nazianze, Orat. xxviii, 19, t. xxxvi, col. 52, parle de même deceux d’Ézéchiel, et saint Jérôme, In Ezech., i, 4, t. xxv, col. 19, fait cette déclaration, à propos de la vision duprophète: «Toutes les synagogues des Juifs sont muettesau sujet de son interprétation; ils disent qu’il est au-dessusdes forces de l’homme de tenter d’expliquer cepassage et celui qui traite de la construction du Temple, à la fin de cette prophétie.» L’étymologie même du motkerûb, jusqu’en ces derniers temps, demeurait conjecturale.Pour éviter qu’on ne la tirât du radical chaldépnkârab, «labourer,» et que le kerûb n’éveillât l’idée duveau d’or ou du bœuf Apis, les rabbins talmudistes préféraientlire kerabija’, ce qui signifie «comme un enfant», et permettait d’assimiler le kerûb à un enfant. Buxtorf, Lexicon chaldaicum, Leipzig, 1875, p. 550. D’autres ra^
tachèrent le mot hébreu au grec yp-fy, pluriel ypyqplç, qui désignait une espèce d’oiseau fantastique, le griffon.Hérodote, iii, 116; Élien, Hist. anim., iv, 27. Le chérubinaurait été un génie à nez crochu. Renan, Histoiredes langues sémitiques, 1™ édit., p. 460, tient pour cetteexplication. Gesenius, Thésaurus, Leipzig, 1840, p. 711, essaye d’identifier quant au sens les deux racines kârabet hâiam, «défendre» et «consacrer», d’où le sens de «gardien sacré», prêté par lui à kerûb. — La découvertedes grands taureaux ailés de Ninive par Layard, Ninevehand its remains, Londres, 1849, t. i, p. 65-67, projetatout d’un coup une vive lumière sur le problème des chérubinsbibliques. Les êtres mystérieux décrits par Ézéchielapparurent magnifiquement sculptés et dans desproportions gigantesques. La plupart de ces colosses, aujourd’huitransportés dans les musées d’Europe, sont lecommentaire le plus clair et le plus simple dont on puissese servir pour comprendre le texte du prophète. En 1858, dans ses Addenda au Thésaurus de Gesenius, p. 95, Rœdiger remarquait, au mot kerûb: «Aujourd’hui personnen’omettra de comparer avec les chérubins les colossalesfigures de taureaux et de lions ailés et à face humaine, qui ont été extraites des ruines des villes assyriennes etque Botta, Layard et d’autres ont décrites.» La suite decet article montrera par le détail jusqu’à quel point lessculptures ninivites répondent aux descriptions bibliques.On a voulu rattacher le mot kerûb aux langues indœuropéennes; mais, quoique l’étymologie n’en soit pasencore établie avec certitude, Vigoureux, La Bible et lesdécouvertes modernes, 6e édit., t. i, p. 283-284, on peutdire que le mot kerûb es! purement sémitique et a étéemployé comme substantif pour dire un taureau, en tantque l’animal fort, puissant par excellence. Nous en avonsla preuve par la comparaison des deux passages parallèlesdu prophète Ézéchiel, i, 10; x, 14, où kerûb s’échangeavec sôr, <i taureau,» et où «face de kerûb» et «face detaureau» sont deux expressions synonymes.
II. Les chérubins du paradis terrestre. — Aprèsavoir prononcé la sentence contre nos premiers parentsprévaricateurs, le Seigneur «chassa Adam, plaça devantle jardin d’Éden les kerabim et la flamme glaive tournoyant, pour garder le chemin de l’arbre de vie». Gen., m, 24. Le texte sacré n’indique ni la nature, ni le nombre, ni la forme de ces chérubins. Mais ce sont des êtresdéterminés, puisque leur nom est accompagné de l’article; leur fonction est nettement indiquée: ils sont là «pour garder le chemin de l’arbre de vie». Enfin auprèsd’eux se voit le glaive de feu tournoyant, sans qu’il soitparlé de l’action qu’ils peuvent avoir sur ce glaive. Toutce qui ressort du texte, c’est que ces chérubins sont desministres de la puissance divine, assez forts pour intimide] - l’homme et lui ôter la tentation de revenir auprèsde l’arbre de vie, soit seul, soit plus tard avec le secoursde ses descendants. Pour atteindre ce but, ils ont dû êtrerevêtus d’une forme visible, peut-être même terrifiante.Il faut aussi remarquer que le Seigneur les plaça à demeure, yaskên, littéralement «les fit habiter» à la portedu paradis. Leur mission a donc duré un certain laps detemps, et leur présence prouvait à l’homme que la fermeturede l’Éden était définitive. Dans le récit de la tentation, le texte sacré a déjà donné lieu de conclure àl’existence d’un esprit supérieur à l’homme, mais malfaisant, opposé à Dieu et se cachant sous la forme d’unserpent. Il est donc naturel de penser que les chérubinssont aussi des esprits supérieurs à l’homme, mais obéissantà Dieu et capables de revêtir, au moins en apparence, une forme sensible.
Les assyriologues n’ont pas manqué de signaler lesrapports assez frappants qui existent entre les chérubinsdu paradis et les taureaux ailés des palais assyriens. Cesderniers n’étaient pas de simples sujets décoratifs. Unêtre surnaturel était censé résider dans leur corps etexercer les fonctions de gardien et de protecteur. C’est là
un point sur lequel les inscriptions ne permettent aucundoute. Les taureaux ailés sont, aux yeux de l’Assyrien, des sêdu, des génies surnaturels vivant sous une enveloppematérielle, mais exerçant l’office de gardiens puissants.Prisme d’Assaraddon, col. vi, 33-35; E. Budge, History of Esaraddon, in-£°, Londres, 1880, p. 83-85, 97. Bien plus, une des représentations qu’on rencontre leplus fréquemment sur les monumenls figurés est celledes deux génies de forme humaine et munis de quatreailes, qui montent la garde de chaque côté de l’arbre devie. Voir t. i, fig. 619 et 620, col. 1939 et 1941. La traditionbiblique paraît d’ailleurs, sur bien des points, antérieureet préférable aux traditions chaldéennes, dans l’étatoù elles se présentent actuellement. Voir Vigoureux, LaBible et les découvertes modernes, 6e édit., 1896, t. i, p. 274-275; Hummelauer, Comment, in Genesim, Paris, 1895, p. 174, 4.
Certains auteurs ont prétendu que les chérubins duparadis n’étaient que des spectres ou des fantômes, Théodored’Héraclée, dans Théodoret, Quœst. xi in Gen., t. lxxx, col. 141-144; Procope de Gaza, In Gen., iii, 24, t. lxxxvii, col. 228; des espèces d’êtres mythologiques, Winer, Biblisches Bealwôrterbuch, Leipzig, 1833, t. i, p. 263; des produits de l’imagination populaire, Herder, Histoire de la poésie des Hébreux, trad. Carlowitz, Paris, 1851, p. 136-138; Jahn, Biblische Archâologie, Vienne, 1817, t. iii, p. 266; Munk, Palestine, Paris, 1881, p. 145; Reuss, L’histoire sainte et la loi, Paris, 1879, 1. 1, p. 300. Mais la Bible parle des chérubins du paradisde la manière la plus positive, et l’absence même detoute description montre que l’imagination n’est pour riendans ce récit. Cf. Vigoureux, Les Livres Saints et la critiquerationaliste, 4e édit., 1891, t. IV, p. 167-170. On nepeut donc pas non plus les assimiler aux kirubi assyriens, comme l’a fait Fr. Delitzsch, Wo lag das Paradies, Leipzig, 1881, p. 150-155.
III. Les chérubins d’or de l’arche d’alliance. — LeSeigneur lui-même en donne la description à Moïse et enindique la raison d’être. Exod., xxv, 18-22; xxxvii, 7-9.Ce sont deux chérubins en or repoussé, destinés à êtreplacés de chaque côté du propitiatoire qui recouvre l’arche.Ils occupent les deux extrémités du propitiatoire même, ont le visage tourné vers lui et étendent leurs ailes demanière à le recouvrir en l’entourant. L’emplacementcirconscrit par ces ailes est l’endroit d’où le Seigneurfera entendre ses oracles à Moïse et où sa majesté résidera.— Ces chérubins de métal ne sont pas présentéscomme des êtres vivants, ni même comme des figuresabritant des génies ou des anges, mais comme de simplesimages matérielles. Sans doute ils évoquent, dans l’espritdu peuple hébreu, soit la pensée des anges invisibles, soit le souvenir des êtres supérieurs à forme matérielleauxquels on donne habituellement le nom de kerubim.Mais, dans la Bible, ce ne sont en réalité que de simplesreprésentations inanimées, et le seul être invisible et réelqui soit mentionné dans la description de l’arche est leSeigneur lui-même. Un certain nombre d’auteurs ontassimilé ces chérubins à ceux d’Ézéchiel et ont conclude l’identité du nom à l’identité de la chose. Rosenmûller, Scholia in Exodum, Leipzig, 1795, p. 581. DeSaulcy lui-même, Histoire de l’art judaïque, Paris, 1858, p. 22-29, s’est efforcé d’établir que les chérubins de l’archeet du Temple étaient des taureaux ailés semblables àceux de Ninive. On se figure difficilement des imagesde taureaux placées sur l’arche et dans le tabernaclepeuaprès l’adoration du veau d’or. De plus, la descriptionque fait l’Exode «ne peut en aucune façon s’appliquerà des kiroubi à l’assyrienne, en forme de taureaux dontles ailes étendues, d’après la direction qu’on leur donnetoujours et dont elles s’implantent dans leur corps, n’auraientété en mesure de couvrir le propitiatoire, oucouvercle de l’arche, qu’à condition qu’on les eût placésse tournant le dos», ce qui est précisément contraire
aux données bibliques. La description de l’Exode «convientbien mieux à ces figures de forme humaine, queles monuments égyptiens nous montrent fréquemmentplacées face à face des deux côtés des naos des dieux, et étendant pour les envelopper leurs bras garnis degrandes ailes. Tout est d’ailleurs… égyptien de forme dansle mobibier sacré du tabernacle…, comme il était naturelque cela fût au lendemain de la sortie d’Egypte».Fr. Lenormant, Les origines de l’histoire, t. i, p. 125126. Toutefois ces chérubins, imités des figures ailées del’Egypte, avaient certainement des visages humains, etnon des têtes d’oiseaux, comme ceux qu’on aimait àreprésenter sur les bords du Nil. Voir t. i, col. 914, etpour les figures de chérubins, fig. 242-241, col. 915-918.Le nom de kevûb est sémitique et chaldéen. Cependant, en égyptien, on trouve la racine jrp, yrb ou yrpu, signifiant «figure, simulacre», et désignant souvent lesreprésentations figurées comme ornements sur lesplaques de métal, les portes, etc. Brugsch, Hieroglyphisch-demotischesWôrterbuch, Leipzig, t. vi, 1881, p. 961. En parlant de kerûbîm, Moïse n’évoquait doncpas une notion qui fut étrangère aux Hébreux sortantd’Egypte.
Les deux chérubins de l’arche, entre lesquels le Seigneurrendait ses oracles, Num., vii, 89, sont considéréspar les écrivains sacrés à un point de vue qui excluttoute idée d’idolâtrie: ils ne sont que l’escabeau sur lequelmonte le Seigneur, le trône sur lequel il siège. «Celuiqui est assis sur les chérubins» est une expression quiapparaît à l’époque de Samuel, I Reg., iv, 4, et que lesécrivains postérieurs reproduisent volontiers. II Reg., vi, 2; I Par., xiii, 6; IV Reg., xix, 15; Ps. lxxix, 2; xcvm, 1; Is., xxxvii, 16; Dan., iii, 55. Mais ce trône estconstitué par des êtres pourvus d’ailes; on peut dès lorsle concevoir comme transformé en char aérien. C’est Davidqui emploie cette poétique image:
Il incline les cieux et descend;
Un nuage sombre est sous ses pieds.
Porté sur le chérubin, il vole,
Il plane sur les ailes des vents.
Ps. xviii (xvii), 10, 11; ir Reg., xxii, 11.
Il est donc naturel que saint Paul appelle les chérubinsde l’arche des «chérubins de gloire», Hebr., IX, 5, c’est-à-diredes êtres sur lesquels rejaillit la gloire du Seigneur.IV. Les chérubins du Temple de Salomon. — Le roiSalomon fit entrer les chérubins comme motif de décorationdans le Temple. Tout d’abord il plaça deux grandschérubins de forme colossale dans le Saint des saints. Onles avait sculptés en bois d’olivier, et recouverts de lamesd’or. Ils étaient debout, de chaque côté de l’arche qu’ils regardaient.Hauts de dix coudées, soit environ cinq mètres, ils avaient des ailes de même longueur. Celles-ci étaientétendues; les ailes inférieures se touchaient au-dessusdu propitiatoire, et les supérieures atteignaient jusqu’auxmurs. III Reg., vi, 23-28; II Par., iii, 10-13. Le texte nedit pas de quelle forme étaient les chérubins. Josèphe, Ant. jud., VIII, iii, 3. Il est assez probable qu’on nes’écarta guère du type égyptien, dont on avait le modèlesous les yeux dans les chérubins mêmes de l’arche. Leschérubins du Saint des saints auraient alors ressembléà ces génies égyptiens, à figure humaine, qui encadrentdans leurs ailes étendues un personnage divin. Voir t. i, fig. 241 et 242, col. 913, 915. Cf. Wilkinson, Manners andcustoms of the ançient Egyptians, Londres, 1878, t. iii, pi. L. Munk, Palestine, p. 157-158, croit qu’en effet ceschérubins reproduisaient le type égyptien. Fr. Lenormant, Les origines de l’histoire, 1880, p. 126, est d’un avis différent. «À cette époque, dit-il, l’influence égyptienne n’étaitplus seule à s’exercer sur les Hébreux. L’influence assyrobabyloniennela balançait… Il est très possible que lesnouveaux keroubim exécutés alors aient été différents desanciens, tels que les décrit l’Exode. Il y a même de fortes
raisons de croire que dés lors ce furent des kiroubi àl’assyrienne.» Les Phéniciens, constructeurs et décorateursdu Temple, pratiquaient un art très composite, etil se peut qu’ils aient renoncé au type purement égyptiendans la fabrication des chérubins du sanctuaire. Les Assyrienssculptaient aussi des génies à tête humaine, deboutet pourvus d’ailes. Voir t. i, col. 1 155. De fait, les animauxsymboliques qu’Ézéchiel, x, 20, 21, voit dans le Templede Jérusalem ressemblent aux taureaux ailés des Assyriens.Toutefois l’on ne peut conclure de la vision à la réalité, et rien ne permet de déterminer sûrement à quel typeappartenaient les chérubins de Salomon. Voir Riehm, DieCherubim in der Stiftshûtte und in Tempel, dans lesTheologische Studien und Kriliken, 1871, p. 399-457.A en croire les traditions rabbiniques, Echa Rabbathi, 54, 1, les Ammonites et les Moabites se seraient emparésde ces chérubins, au moment de la prise de Jérusalempar les Chaldéens, et auraient cherché à les
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543. — Les chérubins d’Ezéchiel.
Miniature placée en tête du chap. I d’Ezéchiel, dans la Blblomanuscrite écrite par Goderan, moine de Lobbes, et achevéepar M en 1084, D’après la Bévue de l’art chrétien, 1880, p. 359.
faire prendre pour des dieux adorés par les Hébreux. IIest plus probable que ces statues de bois périrent dansl’incendie du Temple, après avoir été dépouillées de l’orqui les revêtait. Il n’est pas question de chérubins semblablesdans le second Temple, privé d’ailleurs de la présencede l’arche. Cf. Reland, Antiquitates sacrée, Utrecht, 1741, p. 39.
Salomon fit encore tisser, pour masquer la vue duSaint des saints, un rideau précieux sur lequel étaientbrodés des chérubins. II Par., iii, 14. Sur le vêtementroyal d’Assurnazirpal, on voit aussi un grand nombre degénies ailés en broderie. Voir t. i, fig. G20, col. 1941. Onsait d’ailleurs que les Phéniciens s’étaient acquis unegrande habileté dans l’exécution de ces sortes d’ouvrages.
Enfin, sur tous les murs du Temple, des bas-reliefsreprésentèrent des chérubins alternant avec des palmeset des fleurs écloses. III Reg., VI, 29; Ezech., xli, 18-20, 25.Ici l’imagination des artistes put se donner libre carrière. «Ces keroubim, sculptés en très bas relief, se rangeaientle long des parois sacrées en files silencieuses, alternantavec des palmiers, semblables aux figures alignées surles murs de Thèbes ou de Khorsabad; ces processionsétaient encadrées dans des frises de Heurs fermées ouépanouies, lotus ou papyrus en Egypte, lotus ou pavotsen Assyrie, coloquintes à Jérusalem.» De Vogué, Le Templede Jérusalem, p. 33.
V. Les chérubins d’Ezéchiel. — Voici comment leprophète décrit la première vition qu’il eut des animauxsymboliques, en Assyrie, sur les bords du fleuve Chobar: «Au milieu, la ressemblance de quatre animaux. Voici C63
CHÉRUBIN
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]eur aspect: ils avaient une ressemblance d’homme.A chacun quatre formes et à chacun quatre ailes. Leurspieds étaient droits, et la plante de leurs pieds étaitcomme la plante du pied d’un veau; ils étaient étincelantscomme l’airain poli. Il y avait des mains d’hommesous leurs ailes sur leurs quatre côtés. À tous les quatreétaient la même figure et les mêmes ailes. Leurs ailes serattachaient l’une à l’autre. Ils ne revenaient pas sur euxLeur description ressemble à celle qui précède; Ézéchielajoute cependant quelques traits nouveaux: «Le bruitdes ailes des chérubins s’entendait jusqu’au parvis de lacour extérieure… Leur corps, leur dos, leurs mains, leursailes et leurs quatre roues étaient remplis d’yeux tout autour... C’était l’animal que j’avais vu au-dessous du Dieud’Israël près du fleuve Chobar, et je compris que c’étaientdes chérubins, ayant chacun quatre formes, quatre ailes
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244. — Taureau ailé à tête humaine. Musée du Louvre.
mêmes dans leur marche, et chacun s’avançait devantsoi. Voici quelle était la ressemblance de leur forme: une forme d’homme et une forme de lion à tous les quatresur la droite, une forme de taureau à tous les quatre surla gauche, et une forme d’aigle à tous les quatre. Voilàleurs formes. Des ailes s’étendaient par-dessus; elles sejoignaient deux à deux, et deux d’entre elles recouvraientle corps. Chacun marchait devant soi; là où l’esprit lespoussait, ils allaient, sans se retourner dans leur marche.L’aspect des animaux était celui de charbons de feu brûlantcomme des flambeaux. Ce feu courait entre les animaux; il brillait, et de ce feu jaillissait l’éclair. Et lesanimaux allaient et venaient, semblables à la foudre.» Ëzech., i, 5-14. Dans une autre vision, les chérubinsapparaissent au prophète dans le Temple de Jérusalem.
et sous les ailes une forme de mains humaines.» Ezech., x, 5, 12, 20, 21.
Le prophète avait sous les yeux les taureaux ailés deNinive quand il écrivit la description de sa vision. Cettedescription, naguère incompréhensible malgré tous lesefforts des exégètes, qui se représentaient les chérubinssous les formes les plus étranges (fig. 243), devient maintenantassez facile à expliquer, pourvu que l’on connaisse, au moins d’après les gravures qui en ont étéfaites, les colosses qui ornaient autrefois les palais assyriens.Sans doute les chérubins décrits par Ézéchiel nerépondent exactement à aucun de ceux que l’on a retrouvésjusqu’ici. Mais «il a toujours été facile aux poèteset aux prophètes de décrire des combinaisons compliquéesde forme, que les artistes ont eu plus de peine à réaliser G65
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plastiqueraient. Nous sommes loin d’ailleurs de connaîtreencore tous les types religieux créés par l’art chaldéoassyrien, et plus encore toutes les variantes dont cestypes ont été susceptibles». Fr. Lenormant, Les originesde l’histoire, 1. 1, p. 123. Néanmoins les monumentsdécouverts jusqu’à ce jour suffisent à rendre comptedes détails consignés par le prophète dans le récit de sesvisions.
Les quatre animaux «avaient une ressemblanced’homme». Les taureaux ailés assyriens ont une têted’homme. «La tête humaine qu’ils supportent est coifféed’une mitre, formant un cône tronqué presque cylindrique, parsemée d’étoiles, surmontée d’une rangée deplumes, et armée sur le devant d’une rangée de cornes.Ces cornes, superposées l’une à l’autre, s’enroulent autourde la mitre, et sont au nombre de trois pour chaque
reaux, quant à la disposition générale… Les taureauxdiffèrent peu des lions; ils s’en distinguent sans doutepar les parties nécessairement dissemblables, telles quela patte; mais ils ont le même type… Il est digne deremarque que les lions alternent quelquefois avec lestaureaux: ainsi les deux premières figures colossalestransportées en Angleterre par M. Layard sont un lion etun taureau, qui gardaient chacun, comme de concert, un côté d’une même porte. Ailleurs, à Persépolis, et dansles ruines d’origine perse, mais qui proviennent de monumentsimités de ceux des Assyriens, on a aussi observécette réunion et cette disposition alternative des taureauxet des lions.» Feer, Les ruines de Ninive, p. 70-72. Dansles dernières lignes du Prisme trouvé dans le palais d’Assarhaddon, à Ninive, on lit: «Que dans ce palais le taureausuprême, le lion suprême, les gardiens de ma royauté
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245. — Personnage à quatre ailes, placé & côté du taureau ailé. D’après Place, Ninive et l’Assyrie, t. iii, pi. 12.
rangée chez les taureaux de la plus grande dimension, de deux seulement chez les moins grands. La figure, quia une très belle expression et une grande régularité dansles traits, porte une longue barbe, frisée avec un sointout particulier. Par suite de cette frisure, la barbe pendanteparait divisée en bandes verticales distinctes, quitraversent plusieurs rangées horizontales de boucles. Lescheveux sont également frisés… L’ensemble de la figureexprime un singulier caractère de majesté, de calme etde force, dont on ne peut s’empêcher d’être surpris etcomme saisi.» Feer, Les ruines de Ninive, in-8°, Paris, 1864, p. 69-70. «À chacun quatre formes: une forme d’homme et uneforme de lion à tous les quatre sur la droite, une formede taureau à tous les quatre sur la gauche, et une formed’aigle à tous les quatre.» Ezech., i, 10. En hébreu, ces formes sont appelées pânim, mot qui signifie nonseulement «face, figure», mais aussi «aspect, apparence». Gesenius, Thésaurus, p. 1110. Les taureaux ailésn’ont pas quatre têtes ni quatre figures, mais seulementquatre aspects. Ils sont hommes par le visage, aigles parles ailes, taureaux ou lions par le corps et les jambes.Voir un taureau ailé (fig. 214), et un lion ailé, t. i, fig. 69, col. 313. «Tandis que les colosses de Khorsabad sont généralementdes taureaux, la plupart de ceux deNimroudsont des lions. Cos lions ressemblent beaucoup aux tauqui protègent mon honneur, brillent d’un éclat éternel, jusqu’à ce que leurs pieds se séparent de ces portiques.» J. Menant, Ninive et Babylone, Paris, 1888, p. 74. Cettealternance explique un détail de la vision. Le prophètedit que chaque animal a la forme de lion sur la droiteet la forme de taureau sur la gauche. Comme dans lesmonuments une seule moitié de l’animal sort de la muraille, Ézéchiel suppose que la partie engagée diffère dela partie visible. On peut penser aussi qu’il a vu des animauxcomposites, lions d’un côté et taureaux de l’autre.On a d’autant plus droit de le conjecturer que les animauxde la vision sont vivants et en mouvement, pa. conséquenttout à fait dégagés des murailles d’où émergent à demiles bas-reliefs. «À chacun quatre ailes… Leurs ailes se rattachaientl’une à l’autre…, elles se joignaient deux à deux, et deuxd’entre elles recouvraient le corps.» Ezech., i, 6, 9, 11. Lesanimaux à quatre ailes n’ont pas été retrouvés dans lasculpture assyrienne. Les génies à quatre ailes, au contraire, sont communs. Voir t. i, fig. 56, col. 302; fig. 133, col. 530; fig. 317, col. 1155; fig. 618, col. 1935. Dans lessculptures de la porte du palais de Khorsabad, les deuxtaureaux qui de chaque côté se présentent de profil sontséparés par des personnages à quatre ailes (fig. 245).Deux de ces ailes retombent et peuvent recouvrir le corps, les deux autres s’élèvent comme pour voler. Le dieu chai
déen de l’enfer, Nergal, est représenté en forme de chienà quatre ailes, dont les deux inférieures peuvent recouvrirson corps. Maspero, Histoire ancienne des peuplesde l’Orient, Paris, 1895, t. i, p. 691. «Leurs pieds étaient droits, et la plante de leurs piedsétait comme la plante du pied d’un veau.» Ezech., i, 7.Ce dernier détail suppose que les quatre animaux, mêmeceux qui étaient à moitié lions, avaient le pied corné etfendu de l’espèce bovine. Les pieds qui sont droits s’expliquentpar la vue même du taureau ailé (fig. 244).L’animal a cinq pattes. Vu de profil, il n’en montre quequatre, qui paraissent en mouvement; vu de face, il
tête qui se tourne vers le spectateur, ne pourraient fairevolte-face sans se heurter l’un l’autre (fig. 246). Ils sontimmobiles dans les bas-reliefs, et dans la vision d’Ezéchielil ne faut rien moins que l’esprit de Dieu pour lesmettre en mouvement. «Leur corps, leur dos, leurs mains, leurs ailes, étaientremplis d’yeux tout autour.» Ezech., x, 12. Il est à présumerque le mot’ain ne désigne pas ici des yeux proprementdits, mais des yeux dans le sens métaphorique, c’est-à-dire des parties brillantes, étincelantes. Le motse présente avec ce dernier sens dans le livre des Proverbes, xxiii, 31, où il est parlé du vin «qui donne son œil»,
/tf/^c/j) j-.
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246. — Taureaux allés des portes de Khorsabad, tels qu’Us étalent disposés
semble campé sur deux pattes de devant, qui sont rigideset au repos. «Il y avait des mains d’homme sous leurs ailes surleurs quatre côtés,» Ezech., i, 8, c’est-à-dire sur le côtédes quatre animaux. Ces mains d’hommes, assez raresdans les sculptures assyriennes, se voient cependantquelquefois, entre autres sur deux lions de Nimroud, actuellement au Musée britannique (fig. 247). Layard, Monuments of Nineveli, Londres, 1853, t. i, pi. 42.D’autres lions ont une tête et des bras d’homme sans ailes.Perrot, Histoire de Tart dans l’antiquité, Paris, 1881, t. ii, p. 580-581. «Ils ne revenaient pas sur eux-mêmes dans leurmarche, et chacun s’avançait devant soi.» Ezech., i, 12.C’est l’attitude qu’ont les taureaux ailés des monuments.Debout le long des parois des murs dans lesquels sontpercées les portes, ils semblent faits pour aller tout droitdevant eux. En particulier, ceux qui sont sculptés surle mur de façade et qui se montrent de profil, sauf la
c’est-à-dire évidemment «son éclat». Voir Gesenius, Thésaurus, p. 1018; Ch. de Linas, Les origines de l’orfèvreriecloisonnée, 3 in-8°, Paris, 1877, t. i, p. 77. Cetéclat scintillant pouvait ressembler à celui de l’émail, dontÉzéchiel, i, 4, fait mention; à celui de la peinture ou dela dorure dont étaient parfois revêtus les monumentsfigurés. J. Menant, Ninive et Babylone, p. 136-140. Dureste, la vision du prophète se produit au milieu d’un «feu étincelant» et d’une «lumière rayonnante», Ezech., I, 4: les chérubins ressemblent «à des charbons de feu, brûlant comme des flambeaux». Ezech., i", 13. Il n’estdonc pas étonnant qu’ils lancent de toutes parts des «yeux», c’est-à-dire des rayons étincelants. Voir Vigoureux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., 1896, t. iv, p. 183-243.
VI. Symbolisme des chérubins, — 1° Les chérubinsdu paradis terrestre ne sont pas des symboles, mais desréalités, des anges, en un mot, bien que revêtus de formesd’emprunt.
2° Les chérubins de l’arche et du Temple sont des figuressymboliques. Ils représentent les gardiens invisibles dusanctuaire. «Ils étendaient leurs ailes sur l’arche. Sansdoute ils servent à symboliser la présence de Dieu, àindiquer un lieu réservé, où il n’était pas permis d’atteindre.En ce sens, ce sont encore des gardiens. Maisnous ne les trouvons plus aux portes, comme les gardiensplacés par l’Éternel à l’entrée d’Éden… Dans ces êtres ouces symboles, que la parole de Dieu nous décrit d’unemanière très voilée, l’aile est le caractère essentiel etdominant. Il n’est pas moins certain que leur fonctionest de garder ce qu’il y a de plus saint et de plus vénédivin», un «jardin divin», c’est-à-dire la demeure decelui qui se dit et se croit un dieu. ꝟ. 2, 13. Il est comparéau chérubin mimsah, non pas d’ «onction», maisd’s extension», qui étend ses ailes pour couvrir et protégerses trésors, comme les chérubins de l’arche et dusanctuaire étendent les leurs pour couvrir et défendre lamajesté invisible du Seigneur. De sa montagne sainte àlui, sur laquelle il plane comme les chérubins sur la montagnede Sion, Dieu l’arrachera honteusement. Voir Rosenmûller, Scholia, Ezechiel, Leipzig, 1810, t. ii, p. 326-329; Gesenius, Thésaurus, p. 825; Bàhr, Symbolik des mosaischenCultus, Heidelberg, 1837, t. i, p. 341-346. Saint
j.MÀiLZonz
dans le palais de Sargon. D’après Place, NLnive et l’Assyrie, t. iii, pi. SI.
rable. Il est donc permis de croire que les Assyriens, endonnant des ailes aux figures qui gardaient les portes desdemeures royales, observaient une tradition antique etrespectable, dont peut-être ils avaient perdu le sens, maisqui s’était perpétuée jusqu’à eux depuis les premiers âgesdu monde.» Feer, Les ruines de Ninive, p. 76. — Danssa lamentation sur le roi de Tyr, Ézéchiel semble consacrerce symbole. Il dit, en effet, de ce roi, orgueilleux desa puissance et de ses richesses: «Tu es kerûb mimsaJfhassôkêk, un chérubin qui s’étend et qui protège, je t’aiplacé sur la montagne sainte de Dieu, et tu marches aumilieu des pierres de feu… Mais, à cause de l’étendue deton commerce, ton cœur a été rempli d’iniquité et tu aspéché; c’est pourquoi je t’arracherai honteusement de lamontagne divine et te perdrai, chérubin protecteur, dumilieu des pierres de feu.» Ezech., xxviii, 14, 16. Cespierres de feu sont les pierres scintillantes qui constituentle trésor et l’ornement du roi. y. 13. La montagnesainte de Dieu est Tyr, que le prophète appelle un «séjour
Thomas, Summa theologica, 1* 2 æ, en, 4, ad 6, dit aussi, au sujet des chérubins de l’arche: «Dieu, qui est au-dessusde tout, est incompréhensible à toute créature.C’est pourquoi ou ne mettait aucune image pour représenterson invisibilité, mais on plaçait comme une figurede son trône, (les chérubins) d’une nature incompréhensible, qui est au-dessous de Dieu comme le trône au-dessousde celui qui est assis.»
3° Le symbolisme des taureaux ailés, dont Ézéchiel faitla description, est plus compliqué. Cependant «rien deplus clair que l’intention et l’idée-mère de cette création.L’art a voulu réunir dans un seul être les plus hautespuissances de la nature et de la vie. Le taureau, le lionet l’aigle, ce sont les types divers de la force physique, qui n’a pas partout le même caractère et qui ne se manifestepas de la même manière. Patiente et tenace dansle taureau, qui traîne la charrue et transporte les pluslourds fardeaux, elle est impétueuse et violente chez lelion, et dans l’aigle, à la redoutable vigueur du bec et G71
CHÉRUBl’N
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de la serre s’ajoute la foudroyante rapidité du vol.L’homme enfin, qui est ici représenté par la tête et levisage, c’est la force intelligente, c’est la volonté réfléchie, devant laquelle s’incline et à laquelle se soumet tout cequi vit». Perrot, Histoire de l’art, t. ii, p. 497. Dans leprophète, le symbole s’élève encore davantage. Les chérubinsne représentent plus seulement les forces de lanature et de la vie, divinisées par les anciens; ils sont
vais, qui exercent leur action sur le monde et sur leshommes.
4° Le taureau à quadruple forme d’Ézéchiel, dont saintJean reprend le type, Apoc, iv, 6-7, est devenu le symboledes quatre évangélistes, que saint Jérôme, Epist. lui, 8, t. xxii, col. 548, appelle le «quadrige du Seigneur «.VoirMartigny, Dictionnaire des antiquités chrétiennes, Paris, 1877, p. 295-296.
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247. — Lion ailé à tête et à bras humains. D’après Layard, Monuments of. Mneveh, t. 1, pi. 3 et 42.
les images sensibles des êtres spirituels dont Dieu se sertpour exercer sa puissance. Sans doute ces images nedonnent qu’une idée grossière de la réalité; mais ellessont appropriées au génie de l’époque et manifestent lapuissance divine par ce qui frappait davantage l’espritde l’homme: la puissance des êtres supérieurs de la création.L’auteur de Job a procédé d’une manière analoguequand, pour donner l’idée de la grandeur de DieU, il adécrit longuement les animaux les plus merveilleux, lecrocodile, l’hippopotame, etc. Job, xxxix-xi.i. Daniel, vii-viii, représentera également sous le symbole d’animauxles divers empires que Dieu suscitera successivement, et saint Jean, Apoc, vi, ix, xir, xiii, xix, décrità l’aide d’images analogues les anges, bons ou mau. 5° Dans la théologie chrétienne, le nom de «chérubins» a été donné à l’un des neuf chœurs des anges.Voir t. i, col. 980. Cette attribution se base sur le récitde la Genèse, puisque les chérubins du paradis terrestreétaient certainement des anges. Pour les anciens, Phi-Ion, De Vila Mosis, Londres, 1742, t. ii, p. 150; Origène, In Rom., iii, 8, t. xiv, col. 948; saint Jérôme, Epist. lui, 8, t. xxii, col. 548, etc., le nom de «chérubin» veut dire èTriyvtixji; itoXXri, «science très grande.».Voir Petau, De theologicis dogmatibus, de Angelis, ii, v, 8; Rosenmûller, Scholia in Exodum, Leipzig, 1795, p. 585. Cette étymologie ne se justifie pas en hébreu rmême si on suppose que, par métathèse, kerûb puissevenirde kâbar, «être grand, nombreux, long.» Peutêtre Philon, qui donne le premier ce sens à kerûb, a-t-il été tenté par le désir d’assimiler le kerûb hébreu ausphinx égyptien. L’un et l’autre sont symboliques.» Perrot, Histoire de l’art dans l’antiquité, t. ii, p. 497. Le sphinx, composée d’un corps de lion et d’une tête humaine, représentait la force et l’intelligence réunies. Onl’a même regardé comme le symbole de la grande divinitéde Sais, Neith, mère du soleil et déesse de la sagesse, que les Grecs ont cherché à identifier avec leurAthénè. Il est donc à croire qu’en proposant cette étymologie, Philon a cédé à ses tendances hellénistes. VoirJ. R. Bosanquet, The successive visions of the Cherubins, in-12, Londres, 1871.
H. Lesêtre.
CHÉRUBIN DE SAINT-JOSEPH (de son nom de famille Alexandre de Borie), carme déchaussé, né à Martel, aujourd’hui département du Lot, le 5 août 1639, mortà Bordeaux le 4 avril 1725. Profès à l’âge de seize ans, prêtre à vingt-deux ans, il professa de longues années, avec une véritable supériorité, la théologie et la philosophie avec les mathématiques et les sciences naturelles, se procurant pour cela tous les livres nécessaires et utiles et les instruments les plus perfectionnés. Plusieurs fois prieur, définiteur, provincial, visiteur général, il s’appliquait avec tant de zèle au gouvernement des âmes et à l’observance régulière, qu’il paraissait ne pas même regarder les livres, et pendant ce temps-là il apprenait l’hébreu et vaquait à l’étude des Saintes Lettres, des conciles, des Pères et de l’histoire ecclésiastique, comme s’il n’avait pas eu d’autre souci. Il travailla jusqu’au jour de sa mort. On a de lui: Bibliotheca criticæ sacræ circa omnes fere Sacrorum Librorum difficultates, 4 in-f°; les deux premiers volumes, Louvain, 1704, et les deux derniers, Bruxelles, 1705 et 1706; Summa criticæ sacræ in qua scholastica methodo exponuntur universa Scripturæ Sacræ prolegomena, 9 in-8°, Bordeaux, 1709-1716; et vingt autres ouvrages in-4° sur l’Écriture restés manuscrits. — Dans le premier de ces ouvrages, qui est incomplet, l’auteur se proposait de réunir en 12 in-folio tout ce qui avait été dit jusque-là pour la solution des difficultés de l’Écriture; mais la publication en fut arrêtée au cinquième volume, par les guerres de la succession d’Espagne. Obligé de revenir de Bruxelles à Bordeaux, et n’y trouvant ni caractères hébraïques ni typographes exercés à ce genre de composition, et son âge avancé ne lui permettant plus de se transporter dans un autre pays, il prit le parti de faire de son immense travail un résumé, qu’il publia sous le titre de Summa criticæ sacræ. Voir le Journal des savants, années 1705, 1711; les Mémoires de Trévoux, années 1710, 1711, 1712, 1713.
F. Benoit.
CHESLON (hébreu: Kesâlôn; Septante: Χασαλών, «lieu fertile,» de la racine peu usitée kâsal, dont la signification primitive, d’après Fürst, est: «être charnu, gros, massif,» ou bien place «forte», montagne «massive», d’après l’analogie d’autres dérivés de la même racine), ville de la tribu de Juda, mentionnée Jos., xv, 10, sur la frontière nord de la tribu de Juda, entre Cariathiarim et Bethsamés. Elle semble y être placée sur le versant septentrional du mont Jarim (Har Ye’àrim, «montagne des forêts»): «[La frontière] passe [de la montagne de Séir] vers l’épaule du Har Ye’ârîm du côté nord: c’est Kesâlôn.» — Tout le monde convient que c’est le Keslâ actuel. La forme arabe doit son origine à une forme hébraïque Kaslôn. Voir Kampffmeyer, Alte Namen im heutigen Syrien und Palästina, dans la Zeitschrift des deutschen Palästina-Vereins, t. xvi, année 1893, p. 46. Cela prouve que la transcription de la Vulgate (et des Septante) est plus exacte que la prononciation massorétique, à moins qu’on ne préfère admettre (avec Kampffmeyer) deux formes hébraïques différentes.
Le Keslâ actuel est ainsi décrit par Conder, dans le Survey of Western Palestine, Memoirs, t. iii, p. 23: «Un petit village en pierres dans une position très visible sur le sommet d’une hauteur raboteuse, avec une profonde vallée du côté nord. Il y a une source vers l’est et deux autres dans une vallée vers le midi. Les broussailles qui couvrent la montagne correspondent parfaitement à l’ancien nom de Yearim.» Sur la grande carte du Palestine Exploration Fund l’élévation est marquée à 2 082 pieds anglais (791 mètres). La profonde vallée vers le nord est l’Ouâdi el-Himâr, «vallée de l’âne,» venant A’Abôu-Gosch au nord-est, où il porte le nom d’Ouâdi el-Gadh; «vallée du marais.» Près de Kesià il se dirige directement vers l’ouest, mais peu après il reprend sa direction sud-ouest sous le nom d’Ouâdî el-Gourâb, «vallée du corbeau;» plus loin encore il est appelé Ouàdi el-Moutlaq, «vallée de l’affranchi;» et c’est sous ce nomqu’il débouche dans la large vallée de l’Ouâdi es-Sourâr, «vallée des cailloux,» vis-à-vis de ’Aïn Chenis (Bethsamés).— La source à l’est du village est ’Aïn ’el-Qasab, «fontaine des roseaux;» celles du midi s’appellent’AïnKeslâ et’Ain el-’Arab, «fontaine des Bédouins.» L’Ouâdiel-’Arab, au-dessous de la source, a une riche végétationde broussailles et d’arbrisseaux qui lui donnent un aspectcharmant, mais sauvage. Je ne sais si la végétation actuellecorrespond mieux au nom de Har Ye’àrim. qu’au nom précédent de Sé’ir. Le premier semble plutôt désignerune forêt d’arbres plus élevés; sê’îr, «hirsute, hispide,» ferait plutôt penser à des broussailles. Néanmoins le texte nous oblige d’identifier le Har Ye’àrim avec la montagne de Keslâ, quoique le nom ait pu comprendreencore d’autres hauteurs à l’est de l’Oùâdi el-Gourâb.Le mont Séir semble être la montagne plus élevée qui, au sud de Saris et au nord-est de Keslâ, s’élève à2347 pieds anglais (892 mètres). La frontière, d’après letexte de Josué, passait d’ici à Keslâ sur le Har Ye’àrimdu côté nord. Nous comprenons ces mots dans ce sens: que la frontière traversait l’ouadi en allant du côté nordvers le midi. Mais si l’on voulait y lire qu’en traversantla vallée elle gagnait le versant nord de la montagne deKeslâ, on aurait aussi un sens admissible. Du reste, lafrontière au midi de Keslâ ne devait pas s’éloigner beaucoupde l’Ouâdi el-Gourâb, car elle n’avait qu’à le suivrepour «descendre» tout droit «à Bethsamés».
Cheslon n’a pas d’histoire. Après l’avoir nommé une seule fois dans la description de la frontière de Juda, l’Écriture n’en fait plus mention. L’histoire profane gardele même silence. Le nom néanmoins s’est conservé à traversles siècles depuis Josiié, et les forêts qui ont donnéleur nom à la montagne, peut-être longtemps avant Josué, y ont laissé des traces encore reconnaissables.
J. P. van Kasteren.
CHETHIB. On transcrit souvent ainsi le mot hébreuכתיב, keṭib, qui signifie «ce qui est écrit», et indique une leçon jugée défectueuse par les Massorètes, mais conservée dans le texte, parce qu’ils l’ont trouvée «écrite». La lecture qu’on doit lui substituer d’après eux est indiquée en marge dans le qerî, «ce qu’il faut lire».
CHEVAL (hébreu: sûs; — paras, mot qui désigneà la fois le cavalier et le cheval, comme du reste equesen latin; A. Gelle, Noct. attic. xviii, 5; Macrobe, Saturnal., vi, 9; — rékéš; — qal, «léger, rapide», employé poétiquement une seule fois, Is., xxx, 16; — sûsâh, Cant., i, 9, et rammâk, Esth., viii, 10, la jument. Septante: ἳππος; Vulgate: equus). Le cheval (fig. 248) est un mammifère pachyderme de l’ordre des Jumentés et de la famille des Solipèdes ou Équidés. Les solipèdes sont ainsi nommés parce qu’ils n’ont qu’un seul doigt et un seul sabot à chaque pied. Le cheval se distingue des autres animaux de la même famille, âne, hémione, zèbre, par sa taille, la couleur uniforme de sa robe, sa queue garnie de poils dès la base, la beauté de ses formes et son intelligence, surtout quand il est convenablement traité. Il vit une trentaine d’années; mais dans sa vieillesse il perd ses
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CHEVAL
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meilleures qualités. Il est originaire des grandes plainesde l’Asie centrale. Milne-Edwards, Zoologie, Paris, 1867, p. 392. Si loin qu’on remonte dans l’histoire des Aryas, on les voit employer le cheval comme animal domestique.C’est par leurs migrations que, d’après certains savants, les peuples aryens le propagèrent dans les autres pays.Fr. Lenormant, Noies sur un voyage en Egypte, Paris, 1870 (Noies sur l’âne et le cheval dans les antiquitésdes peuples aryens), p. 13-16.
I. Le cheval dans la. Bible, avant l’époque des rois.
— 1° Au temps des patriarches. — Ni Abraham ni sespremiers descendants ne se servaient de chevaux. Vouésà la vie nomade, ils utilisaient les chameaux, les bœufs, les ânes, pour porter leurs fardeaux ou traîner leurs chariots, le bétail pour leur alimentation; mais ils n’avaient
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248. — Cheval arabe.
que faire du cheval, que les anciens employaient surtoutà cause de sa vitesse et de son aptitude à mener les charsde guerre. Du reste le pays de Chanaan, qu’habitèrentles premiers patriarches, était trop accidenté pour que leschevaux pussent rendre des services aux caravanes. Aussidans tout le Pentateuque n’est-il jamais question de chevauxpossédés par les premiers Hébreux.
2° En Egypte. — Le cheval n’existait pas en Egyptedans les temps antérieurs au xviii" ou XXe siècle av. J.-C.Les auteurs qui ont soutenu le contraire, Chabas, Etudessur l’antiquité historique, Paris, 1873, p. 421-427, etM. Lefébure, Sur l’ancienneté du cheval en Egypte, dansles Annales de la faculté des lettres de Lyon, 1884, fasc. i, p. 1-11, et Le nom du cheval, dans les Proceedings oftlie Society of biblical Archseology, 1890, p. 449-456, n’ont pas réussi à prouver ni à faire accepter leur assertion.Cf. Maspero, Histoire ancienne des peuples del’Orient, Paris, 1895, t. i, p. 32, note 2. Le cheval ne futintroduit en Egypte que par les Hyksos, qui dominèrentdans la vallée du Nil pendant plus de quatre cents ans, jusque vers l’an 1600 av. J.-C. Ces conquérants, d’originesémitique, acclimatèrent en Egypte le cheval de racemongolique, qu’ils avaient amené avec eux des désertsd’Arabie et de Syrie. C’est ce qui explique pourquoi lesnoms qui désignent l’animal en égyptien sont des nomsasiatiques: sesni-t, la cavale, le coursier; soumsim, leschevaux de guerre, rappellent le sus hébreu; abiri, lescoursiers forts et rapides, tirent leur nom de la racinesémitique’âbar; le nom égyptien de l’étalon, kaoua, vient aussi sans doute du sanscrit açva, «cheval.» Chabas, Études sur l’antiquité historique, p. 438, 455, 456.
Si le cheval n’est entré en Egypte qu’avec les Hyksos, iln’est donc pas étonnant qu’il ne soit pas nommé parmiles animaux qu’Abraham reçut en présent, quand il vintdans la vallée du Nil sous un pharaon de la XIIe dynastie.Gen., xii, 16. Le cheval n’apparait d’ailleurs sur les monumentségyptiens qu’à partir de la XVIIIe dynastie. Lespatriarches connaissaient pourtant bien cet animal pourl’avoir vu maintes fois monté par les Bédouins de l’époque.Jacob mourant compare Dan au céraste qui mord le pieddu cheval pour faire tomber le cavalier. Gen., xlix, 17.A partir de la XVIIIe dynastie, qui régnait à la fin du séjourdes Hébreux en Egypte, on voit communément apparaîtreles chevaux sur les monuments figurés, dont la série avaitété assez longtemps interrompue. Ils ont le type mongolique: taille élevée, allure vigoureuse, profil de la têtelégèrement busqué, cou effilé, croupe un peu étroite, membres assez maigres, queue longue et bien fournie.On se sert du cheval pour traîner les chars des grandspersonnages, pour amener les provisions de la campagneet pour labourer. Papyrus Sallier, i, 6, 5. On ne le monteque très rarement. Un cavalier représenté sur une hachedécoupée à jour, Wilkinson, Manne>'s and customs ofthe ancient Egyptians, t. i, p. 406, et cinq autres quisont figurés sur les monuments sont les seuls exemplesconnus de chevaux montés dans l’ancienne Egypte. Chabas, Études sur l’antiquité historique, p. 423-427. On s’enservait quelquefois pour labourer (fig. 249). À l’armée, ils étaient presque exclusivement employés à traîner leschars de guerre. Quand Moïse parle des chevaux etdes chars des Egyptiens à la poursuite des Hébreux, ilne faut donc pas entendre ses paroles d’une cavalerieproprement dite, mais simplement d’attelages de guerre.Du reste, les chars sont toujours mentionnés conjointementavec les chevaux. Exod., ix, 3; xv, 1, 21; Deut., xi, 4. Cf. Is., xliii, 17. Le mot rakkâb, employé dans cespassages et dans d’autres et souvent traduit par cavalier, désigne à la fois l’homme à cheval et l’homme monté surun char, du verbe râkab, qui signifie «aller à cheval ouen char». Notons enfin que dès les premiers temps oùils représentent des chevaux, les monuments égyptiensmentionnent ceux de Naharaïn (Mésopotamie), ce quiconfirme l’origine asiatique de la race chevaline des bordsdu Nil. Chabas, Etudes sur l’antiquité historique, p. 441; Fr. Lenormant, Notes sur un voyage en Egypte (Surl’antiquité de l’âne et du cheval comme animaux domestiquesen Egypte), p. 2-4; Premières civilisations, t. i, p. 306-313; C. A. Piètrement, Les chevaux dans les tempspréhistoriques et historiques, Paris, 1883, p. 477-490; Ebers, Aegypten und die Bâcher Mose’s, Leipzig, 1861, t. i, p. 265-266. — Les Hébreux, en quittant l’Egypte, n’emmenèrent pas de chevaux avec eux. Ils n’en eurentpas dans le désert. Ces animaux étaient considérés surtoutcomme favorisant le luxe ou servant à la guerre.Aussi Moïse, sans défendre à son peuple d’en posséder, recommandat-il aux rois futurs des Israélites de ne pasen avoir un trop grand nombre. Deut., xvii, 16.
3° Au temps de Josué et des Juges. — Pendant cettepériode, les chevaux ne sont mentionnés que dans lesarmées des rois chananéens. Les peuples de Syrie, Chananéens, Khétas ou Héthéens, combattaient sur deschars, rarement à cheval. Lepsius, Denkmaler, Abth. iii, Bl. 145. Quand les Hébreux victorieux prennent deschevaux, ils reçoivent l’ordre de leur couper les jarrets, pour que personne ne puisse plus s’en servir. Jos., xi, 4, 6, 9. Dans son cantique, Débora fait allusion à lafuite des chevaux de Jabin. Jud., v, 22. Ce sont les deuxseuls passages où il soit question de ces animaux, depuisla conquête de Chanaan jusqu’à Saùl. La nature du paysoccupé par les Hébreux leur rendait, en effet, le chevalpresque inutilisable. Cet animal ne pouvait ni courir àtravers les rochers, Am., vi, 13, ni traîner des chars dansun pays montagneux dépourvu de chemins carrossables, ni labourer des terrains trop inclinés. Au contraire, les
Philistins et les Chananéens se servaient facilement dechevaux et de chars dans les régions qu’ils occupaient, les bords de la mer, la plaine d’Esdrelon et le nord-ouestde la Palestine. C’est ce qui fait que les Hébreux et lesPhilistins gardèrent si longtemps leurs positions respectivesles uns en face des autres: les Hébreux inexpugnablesdans la montagne, mais peu propres à faire faceà l’irruption des chars de guerre quand ils s’aventuraientdans la plaine; les Philistins facilement maîtres de laplaine, mais incapables de faire avec leurs chevaux l’assautdu pays montagneux. Le même fait se reproduisitplus tard, quand les Syriens attaquèrent les Israélites parle nord-est. Vaincus dans les montagnes où leur cavalerieétait impuissante, les Syriens disaient: «Leurs dieuxsont des dieux de montagnes, et c’est pourquoi ils nousont vaincus. Combattons contre eux dans les plaines, etnous en viendrons à bout.» III Reg., xx, 23.
p. 161. Ils réussirent ainsi à former une race particulièrede chevaux vigoureux, à la taille élevée, qu’on voit représentéssur leurs monuments. Voir t. i, fig. 259, col. 977.Dans ses inscriptions, Assurbanipal mentionne spécialement «les grands chevaux» dans l’énumération du butinqu’il fit à Thèbes, en 665. Cette race de grands chevauxne s’est guère conservée intacte aujourd’hui que dans leDongolah, en Nubie. Fr. Lenormant, Premières civilisations, p. 311-313; Chabas, Études sur l’antiquité historique, p. 445-455; Piètrement, Les chevaux dans lestemps préhistoriques et historiques, p. 508-570; Hartmann, dans la Zeitschrift fur wjyptische Spraclie, 1864, p. 21. Salomon s’approvisionnait de chevaux en Egypte eten revendait lui-même à ses voisins. Il les payait centvingt-cinq sicles par tête, soit environ quatre cent cinquantefrancs. Il en faisait venir aussi d’une localitéappelée Coa. Voir Coa. III Reg., x, 28; II Par., i, 16;
24-). — Chevaux labourant en Égypt». D’aprèa Prisse d’Avennes, Monuments
iens, pi. xxxv, 2.
II. Le cheval a l’époque des rois. — 1° Sous Saül etDavid. — Samuel, avant de donner un roi aux Hébreux, les avertit que ce roi prendra leurs fils pour les mettresur ses chars et les faire aller à cheval devant lui. 1 Reg., vm, 11. Le vieux prophète prévoyait ce qui n’allait guèretarder à s’accomplir. Il est probable que Saûl, une foissacré, tint à avoir des chevaux à son service. PourtantDavid est le premier à qui la Sainte Écriture en attribueformellement. Après sa victoire sur Adarézer, il fit couperles jarrets des chevaux dont il s’était emparé, tout enréservant cependant de ces animaux pour cent chars.II Reg., viii, 4. Absalom, probablement à l’exemple deson père, se fit faire un char et voulut avoir une escortede cavaliers. II Reg., xv, 1. David dut se servir quelquefoisde ses chars à la guerre; mais il ne semble pas avoirfait grand fond sur ses chevaux pour s’assurer la victoire.Ps. xix, 8; xxxii, 17.
2° Sous Salomon. — Sans prendre grand souci de larecommandation de Moïse, ce roi voulut posséder denombreux et beaux chevaux. D’après certains commentateurs, il eut quatre mille chevaux de trait pour seschars et douze cents chevaux de selle. III Reg., iv, 26(hébreu, I Reg., v, 6); II Par., ix, 25. Des intendantsétaient préposés à toute cette cavalerie. III Reg., ix, 22.De tout le pays, on amenait chaque année des chevauxà Salomon. III Reg., x, 25; II Par., ix, 21. Il en faisaitaussi venir d’Egypte. Les Égyptiens s’appliquaient alors àl’élevage des chevaux avec d’autant plus de soin, qu’entrele xvie et le xi" siècle ces animaux devinrent plus raresen Syrie. Ils avaient créé des haras à Thèbes, à Memphis, à Hermopolis et dans les principales cités de la moyenneEgypte. Ils attachaient grand prix à la pureté de la race etconservaient la généalogie de leurs animaux, comme lestribus arabes ont continué depuis à le faire. Cf. de laRoque, Voyage dans la Palestine, Amsterdam, 1718,
ix, 28. Ses successeurs on firent acheter plus tard à Thogorma, en Arménie. Ezech., xxvii, 14.
3° De Salomon à la captivité. — Pendant cette période, les chevaux ne sont signalés formellement qu’une seulefois, dans l’armée de Ju..phat, roi de Juda. IV Reg., m, 7. Sous Ézéchias, Rabsacès pouvait ironiquement offrirdeu.x^ mille ^.chevaux aux assiégés de Jérusalem, en prétendantqu’ils n’auraient pas assez de cavaliers pour lesmonter. IV Reg., xviii, 23; Is., xxxvi, 8. Les Israélitesde Béthulie possédaient des chevaux, Judith, iii, 3, sanspouvoir probablement s’en servir à la guerre. Amos, iv, 10, et Michée, v, 10, font allusion à la présence dechevaux de guerre parmi les Hébreux. Néanmoins larareté des textes bibliques qui parlent des chevaux deguerre donne le droit de conclure qu’au point de vuemilitaire, le cheval joua toujours un rôle très secondairechez les Israélites. Pourtant ceux-ci cherchaient encorebeaucoup trop à en posséder, contrairement aux intentionsde Moïse, et Isaïe, ii, 8, leur en fait le reproche.Il est question une fois du cheval employé comme monture.Quand Salomon dit que la place du serviteur n’estpas à cheval, Eccle., x, 7, il suppose que cette montureétait réservée de son temps aux personnages considérables.Le cadavre d’Amasias est ramené à Jérusalemsur ses propres chevaux. IV Reg., xiv, 20. Enfin le textehébreu d’Isaïe, xxviii, 28, nous apprend qu’on se servaitdu cheval pour battre le blé en Palestine. C’est le seulpassage de la Bible qui signale l’emploi de cet animalpour le service de l’agriculture. D’un autre texte, IV Reg., vu, 13, il ressort que les Israélites mangeaient leurs chevaux, au moins dans les temps de disette. Enfin l’historiensacré accuse les rois de Juda d’avoir consacré deschevaux au soleil, dans leurs accès d’idolâtrie. IV Reg., xxiii, 11. Les chevaux donnèrent leur nom à une desportes de Jérusalem. Jer., xxxi, 40; II Esdr., iii, 28.
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CHEVAL
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Cf. IV Reg., xi, 16; II Par., xxiii, 15. Voir Chevaux(porte des). — La Sainte Écriture mentionne fréquemmentla présence des chevaux dans les armées étrangères, pendant la période des rois de Juda et d’Israël.Elle en signale dans l’armée de Bénadad, roi de Syrie, défait par Achab, III Reg., xx, 21, 25, et dans d’autresarmées syriennes. IV Reg., vi, 14; vir, 7, 10. C’est surun char traîné par des chevaux que Naaman vint en Palestine.IV Reg., v, 9. — La cavalerie assyrienne (fig. 250; voir t. r, col. 983, etr, .) est celle dont, il est le plus fréquemmentquestion dans la Bible. Les Assyriens se servaient du
vrer la cavalerie par grandes masses, pour éclairer lesmarches, charger à fond, lancer la flèche pendant le galopet poursuivre les fuyards. On monta d’abord le cheval ànu, puis sur une simple couverture ou un caparaçon plusou moins orné. On élevait les chevaux de guerre dansdes haras, comme en Egypte. Hérodote, i, 192, mentionneun haras en Babylonie sous Xerxès. Dans la vallée del’Euphrate, on avait. aussi l’habitude, empruntée aux Mongols, de manger le cheval. Avesta, Yesht, v, 28-31. Lesécrivains sacrés ont souvent l’occasion de parler des chevauxassyriens et chaldéens. Judith, xvi, 5; Ps. lxxv, 7;
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550. — Chevaux assyriens à l’écnrle. D’après Layard, Monuments 0/ Nineveh, t. i, pi. 30.
cheval depuis les temps les plus reculés de leur histoire. Lecheval ou «âne de l’est» avait été primitivement introduitde la Haute Asie en Chaldée. Maspero, Histoire anciennedes peuples de l’Orient, Paris, 1895, t. i, p. 560, De Théglafhphalasar Ier à la fin des Sargonides, les Assyriensn’ont cessé d’introduire chez eux les chevaux detous les peuples, les uns de race mongolique, les autresde race aryenne. Bien que la première race fût primitive, ils firent prédominer la seconde par sélection, etparaissent l’avoir estimée davantage. Piètrement, Leschevaux dans les temps préhistoriques et historiques, p. 408-412. Les chevaux de leurs bas-reliefs ont toujoursle type aryen: tête petite et gracieuse de forme, encolure forte et cambrée, corps lourd, jambes fines etmusculeuses, crinière et queue assez fournies. Les Assyriensn’employèrent d’abord leurs chevaux de guerrequ’à la conduite des chars; de rares cavaliers étaientseuls réservés pour la transmission des messages. Sargonet Sennachérib furent les premiers à faire manœuJer., vi, 23; viii, 16; xii, 5; l, 37; li, 21; Ezech., xxvi, 7, 10, 11; Nah., iii, 2. Isaïe, v, 28, remarque qu’ils ont lacorne dure, parce que, en effet, on ne les ferrait pas; lesBédouins d’aujourd’hui ne ferrent pas non plus les leurs.Jérémie, iv, 13, dit qu’ils sont «plus vites que les aigles».Cf. Hab., i, 8. Ëzéchiel, xxiii, 6, 12, 23, parle des jeuneset beaux cavaliers babyloniens par lesquels Samarie etJérusalem se laissent surprendre. — Il est encore faitmention par les écrivains de cette époque de la cavaleriedes Égyptiens, Jer., xlvi, 4, 9; Ezech., xvii, 15; de celledesMédes, qui montaient des chevaux semblables à ceuxdes Assyriens, Jer., L, 42; ii, 27, et de celle du peuplequ’Ézéchiel, xxxviii, 4, 15; xxxix, 20, désigne sous lenom symbolique de Gog. Chez les Perses, le cheval servaitaussi de monture de luxe. Esth., VI, 8-11.
III. Le cheval a partir du retour de la captivité.
— Les prophètes avaient annoncé que les captifs de Judareviendraient avec honneur, leurs chefs montés sur deschars et des chevaux. Is., ixvi, 20; Jer., xvii, 25; xxii, 4.
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A leur retour, ils ramenèrent, en effet, sept cent trente-sixchevaux. I Esdr., ii, 66; II Esdr., vii, 68. Ce nombre, beaucoup trop faible pour constituer une cavalerie proprementdite, suffisait parfaitement pour que les principauxpersonnages fussent montés. Dans les temps postérieursà la captivité, il n’est parlé que fort rarement dechevaux, et seulement des chevaux de peuples en guerreavec les Juifs. Agg., ii, 23; Zach., xiv, 15, 20; I Mach., x, 81. Le Nouveau Testament n’en ferait absolument aucunemention, sans les indications symboliques de l’Apocalypseet sans un texte de saint Jacques, iii, 3, où il est parlé dufrein à l’aide duquel on mène les chevaux. De tout ce quiprécède il y a donc lieu de conclure que les Juifs n’ontjamais fait grand usage du cheval. La nature du pays rendaitdu reste cet usage difficile et dangereux, et seuls derares voyageurs, comme peut-être le bon Samaritain, Luc, x, 31, allaient à cheval. Encore le mot jumentum, employé dans ce passage, peut-il désigner toute autreespèce de monture..
IV. Remarques bibliques sur le cheval. — Le livrede Job, xxxix, 18, 26, renferme une belle description ducheval de bataille. Après avoir parlé de l’autruche et desa merveilleuse rapidité, l’auteur conclut ses remarquessur l’oiseau en disant:
Elle se rit du cheval et de son cavalier.
Puis il trace le portrait du cheval arabe dressé pour laguerre, tel qu’il le voyait de son temps:
Est-ce toi qui donnes au cheval la vigueur, Et qui ornes son cou d’une crinière flottante?Peux-tu te faire bondir comme la sauterelle, Lui qui épouvante par la puissance de son souffle?Du pied il creuse la terre, tressaille de bravoure; Il court au-devant des traits,
Se rit de la peur, sans que rien l’émeuve, , Et ne recule pas devant l’épée.
Sur lui résonne le carquois,
Le fer étincelant de la lance et du javelot.Frémissant d’ardeur, il dévore la terre, Il est hors de lui au son de la trompette; Dès qu’il l’entend retentir, il dit: Ha 1De loin il flaire le combat,
Le cri tonnant des chefs, le fracas do l’armée.
Dans ce passage, dit Ilerder, Histoire de la poésie desHébreux, trad. Carlowitz, 1851, ve dialogue, p. 93, s lecheval est peint tel que l’Arabe le voyait et le voit encore, c’est-à-dire comme un être pensant, courageux et belliqueux, qui prend part à toutes les chances d’une bataille; son hennissement est inséparable du cri de guerre duhéros.» Cf. J. von Hammer-Purgstall, Das Pferd beiden Arabern, in-4°, Vienne, 1856. — Au livre des Proverbes, xxx, 31, c’est probablement aussi le cheval deguerre qui est désigné par l’expression zarzîr molnayîm, «celui qui est ceint des reins.» Le contexte réclame, eneffet, un quadrupède dans l’énumération que fait l’auteur:
Il y en a trois qui s’avancent majestueusement.Et quatre qui marchent fièrement:
Le lion, le plus fort des animaux,
Qui ne recule à la vue de personne, L’animal aux reins ceints, le bélier, Et le roi à la tête de son armée.
Le cheval de guerre semble le mieux indiqué pour justifierla périphrase hébraïque, et accompagner le lion etle bélier. Cf. Gesenius, Thésaurus, p. 435. Il est encoreparlé du cheval de bataille dans plusieurs autres passages, Prov., xxi, 31; Jer., viii, 6; Zach., x, 3; Apoc, ix, 7. La comparaison entre le cheval et la sauterelle estreproduite par Joël, ii, 4, et par saint Jean, Apoc, ix, 7, mais en sens inverse. Si valeureux qu’il soit pourtant, cen’est pas le cheval qui assure la victoire, et le secoursdu Seigneur vaut mieux que la plus puissante cavalerie.Les auteurs sacrés reviennent souvent sur cette pensée,
afin de déprendre les Israélites de l’engouement quepouvaient leur inspirer les cavaleries de l’Egypte et del’Assyrie. Judith, ix, 16; Ps. xxxii, 17; cxlvi, 10; Is., xxx, 16; xxxi, 1, 3; Os., i, 7; xiv, 4; Am., ii, 15. — Lecheval n’a pas toujours les brillantes qualités que célèbre lelivre de Job. II est parfois dépourvu d’intelligence commele mulet, Tob., vi, 17; Ps. xxxi, 9, en ce sens au moinsqu’il ne connaît pas son Créateur. — Dans le désert, oùle chemin est facile, il ne bronche pas, Is. lxiii, 13; maisil se montre parfois indomptable et rétif, Eccli., xxx, 8, et il faut le fouet pour le faire marcher. Prov., xxvi, 3.On lui met des mors, des rênes et différentes sortes decaparaçons. Ps. xxxi, 9; IV Reg., xix, 28; Jac, iii, 3.L’étalon, qui hennit à tout propos, est l’image de l’hommeincontinent. Eccli., xxxiii, 6; Jer., v, 8; Ezech., xxiii, 20.V. Le cheval dans les apparitions symboliques. —Le prophète Élie est emporté au ciel par des chevauxde feu. IV Reg., ii, 11; Eccli., xlviii, 9. Des chars et deschevaux de feu apparaissent autour d’Elisée. IV Reg., vi, 17. Plus tard, un envoyé céleste à cheval terrasseHéliodore dans le temple, II Mach., iii, 25, et cinq cavaliersmystérieux combattent aux côtés de Judas Machabée, II Mach., x, 29. Ces différents chevaux sont le symbolede la puissance divine qui intervient en faveur desprophètes et des serviteurs de Jéhovah. Cette mêmeintervention est manifestée par les chars et les chevauxqu’on entend ou qu’on voit évoluer dans les airs, commepour entrer en lutte contre les ennemis du peuple deDieu. IV Reg., vii, 6; II Mach., v, 2, 3. Le Seigneur estlui-même monté sur-des chevaux, pour combattre lesnations. Hab., iii, 8. Mais au temps du Messie, qui est lePrince de la paix, il n’y aura plus de chevaux de guerre.Zach., ix, 10; XII, 4. Dans ses visions, le prophète Zacharievoit un homme monté sur un cheval roux, couleurqui rappelle le sang et symbolise la vengeance. Zach., i, 8. Le cheval de couleur noire est un présage de calamitéssinistres, le cheval blanc un symbole de victoire; les chevaux mouchetés semblent annoncer des malheursde diverse nature, guerre, peste, famine, etc. Zach., i, 8; vi, 2, 3, 6. — Dans l’Apocalypse, saint Jean voit aussi deschevaux de différentes couleurs en rapport avec la fonctiondes cavaliers symboliques. Le cheval blanc porteun personnage puissant et victorieux; le cheval roux, uncavalier qui déchaîne la guerre; le cheval noir, un messagerde famine et de vengeance; la mort est montée surun cheval pâle. Apoc, vi, 2, 4, 5, 8. Dans une autrevision, l’apôtre parle d’une armée de vingt millions deguerriers montés sur des chevaux terribles à la fois parleurs têtes et par leurs queues. Apoc, ix, 16-19. Ces bêtessont donc doublement armées pour nuire. Plus loin, leFils de Dieu apparaît sur un cheval blanc, symbole demajesté et de triomphe. Les armées célestes le suiventsur des chevaux de même couleur, parce qu’elles combattentpour sa cause et sous ses ordres. Apoc, xix, 11, 14.
- CHEVAUX##
CHEVAUX (PORTE DES) (hébreu: sa’ar hassùsim; Septante: itjXt) imcuv; Vulgate: Porta equorum), porte de Jérusalem, donnant sur la vallée du Cédron, vers l’angle sud-est de l’enceinte du Temple. Jer., xxxi, 40; II Esdr., iii, 28. Jérémie, xxxi, 40, avait annoncéqu’après la captivité Jérusalem reconstruite s’étendraità l’est jusqu’à l’angle de la Porte des Chevaux. Et nousvoyons qu’après le retour, lorsque Néhémie fait releverles murs et les portes, les prêtres bâtissent une partie durempart près d’Ophel, à partir de la Porte des Chevaux, enremontant vers le nord, et chacun en face de sa maison.II Esdr., iii, 27-21. Son nom de Porte des Chevaux luivenait sans doute de ce qu’elle servait d’entrée aux chevauxdu palais royal, construit au sud de l’aire actuelledu Haram. C’est là du reste qu’une tradition place lesécuries de Salomon. V. Guérin, Jérusalem, in-8°, Paris, 1889, p. 230, 233. Près de cette Porle des Chevaux, surl’ordre du grand prêtre Joïada, les centurions mirent à G83
- CHEVAUX##
CHEVAUX (PORTE DES) — CHEVEUX
GS4
mort Athalie, qu’ils avaient entraînée hors de l’enceintesacrée. II Par., xxiii, 15; cf. IV Reg., xi, 16. On ne fitpas prendre à la reine le chemin direct du Temple aupalais, parce que le roi Joas devait passer par là, IV Reg., il, 19; mais on inclina sur la gauche, dans la directionAu chemin qui conduisait du palais aux remparts, «le «hemin de l’entrée des chevaux.» IV Reg., xi, 16. Fr. Keil, Chronik, Esra, Nehemia, in-8°, Leipzig, 1870, p. 525, identifie à tort la porte des Chevaux avec la porte actuelledu Fumier, Bab et Moghâribeh, dans la vallée du Tyropœon: les textes de Jérémie, xxxi, 40, et de II Esdr., m, 28, indiquent nettement la position sud-est du rempart.George SaintClair, Nehemiah’s south ivall, dansPalestine Exploration Fund, Quarterly Slalement, 1889, p. 91, 97, 98. E. Levesque.
- CHEVÊCHE##
CHEVÊCHE (hébreu: kOs; septante: wxxr/.iSpaÇ; Vulgate: bubo, nycticorax). Le sens du mot kôs ne s’est pasprésenté très clairement aux anciens traducteurs. Le motse trouve trois fois dans la Bible; les Septante le rendentdeux fois par wxiixiSpaS, «corbeau de nuit ou hibou,»
et une fois par âpûS; o; , «héron;» la
Vulgate le traduit
de trois manières
différentes: bubo, «hibou;» herodium, «héron,» et nycticorax, et elle réserve le mot noctua
pour traduire l’hébreu tahmds, qui
est le nom particulier du hibou. Les
scribes qui copiaient
le texte hébreu n’étaient pas non plus
bien fixés sur le
sens de kôs, puisque saint Jérôme,
Ep. cri ad Sun. et
Fretel, 63, t. xxii,
col. 859, écrit que
de son temps les
manuscrits portaient
ios, par confusion entre les deux lettres 3 et 3. Les ancienstraducteurs donnent généralement à kôs le sensde «hibou, oiseau de nuit», qui paraît de beaucoup lepins probable. Rosenmûller, Scholia, Psalmi, Leipzig, 1823, t. iii, p. 1585. Le sens de pélican, que préfèreGesenius, Thésaurus, p. 695, ne peut être adopté, puisqu’auPs. en (hébreu), 7, le kôs est précisément opposéan qà’ât, dans lequel on s’accorde aujourd’hui à reconnaîtrele pélican. — La Sainte Écriture ne parle que troisfois du kôs: deux fois pour le mettre au nombre des «iseaux impurs, Lev., xi, 17; Deut., xiv, 16, et une foispour le représenter comme un oiseau caractéristique dessolitudes désolées:
Je ressemble au pélican (qâ’ât) du désert,
Je suis comme le kôs des ruines. Ps. en (hébreu), 7.
Cet oiseau qui habite les ruines, et dans lequel les verrionsvoient un oiseau de nuit, analogue au hibou, estfort probablement le boomah des Arabes, le petit hibouon chevêche, Athene persica, que les Arabes appellent, i peu près comme le psalmiste, uni eleharab, «mère desruines.» Il est à croire d’ailleurs que le mot hébreu kôsdésigne plusieurs des oiseaux qui appartiennent au genreChouette. Mais de tous les oiseaux de ce genre, la Noctuaon chevêche est de beaucoup le plus abondant en Palestineet en Syrie. On est donc en droit de l’identifier avecle kôs. Voir Chouette. — La chevêche (Gg. 251) se dis251. — Chevêche.
tingue des autres chouettes par son disque périophtalmiqueincomplet et par l’absence de crêtes aux oreilles.Elle se nourrit de petits quadrupèdes, rats, souris, mulots, etc., et même d’oiseaux. Elle ne se met en mouvementque quand il y a nécessité; elle perche ordinairementdans des endroits de couleur analogue à son plumage.Cet oiseau a un air à la fois comique et grotesque avecses allures solennelles, ses deux grands yeux de face etles mouvements compassés de sa tête quand il observece qui se passe autour de lui. La chevêche se montrehabituellement prudente et pourtant familière. Parmi lesArabes, on la considère comme un oiseau de bon augure; on craint de la molester; aussi se multipliet-elle beaucoup.C’est seulement le soir, au coucher du soleil, qu’onpeut entendre son cri plaintif. Elle fait son nid dans lestrous des arbres, dans les parois des rochers et spécialementdans les vieilles ruines. On la trouve dans les boisd’oliviers qui entourent les villages, dans les gorgesrocheuses, dans les buissons au bord des eaux, dans lestombeaux et dans les ruines, a*u milieu des décombresdes anciennes localités de Judée, dans les monticulessablonneux de Bersabée, etc. Ainsi se justifie la paroledu psalmiste qui l’appelle le «kôs des ruines». Cf. Tristram, Fauna and Flora of Palestine, Londres, 1884, p. 93; The natural history of the Bible, Londres, 1889, p. 193; Wood, Bible animais, Londres, 1884, p. 371.
— «La chevesche est la marque de la monnoie d’Athènes.» Plutarque, Periclès, 26, trad. Amyot, Paris, 1619, p. 105 G.Les Juifs et les premiers chrétiens eurent souvent cettemonnaie entre les mains. La déesse protectrice d’Athènes, Pallas Athéné, portait le surnom de YXavxwm: , «aux yeux d’azur» ou «aux yeux de chouette». Lachouette, yX «ïÇ, l’accompagnait pour symboliser la pénétrationde son regard, la nuit aussi bien que le jour, auphysique et au moral. Cf. Pausanias, i, 14; iii, 18, 2; Plutarque, Lycurgue, 11. La chouette athénienne, quinichait en grand nombre dans les rochers de l’acropole, n’était autre que la chevêche de l’Europe méridionale, appelée par les naturalistes Athene noctua. La chevêchede Palestine, Athene persica, ne diffère de la premièreque par la couleur plus claire de son plumage.
H. Lesêtre.
- CHEVEUX##
CHEVEUX (hébreu: dallâh, Cant., vii, 6; péra’, Num., vi, 5; Ezech., xliv, 20; sa’ârâh, I Sam. (Reg.), xiv, 45; II Sam. (Reg.), xiv, 11; I Reg. (III Reg.), i, 52; Job, iv, 15; tê’âr, Jud., xvi, 22; II Sam. (Reg.), Xiv, 26; 1 Esdr., ix, 3; chaldéen: ie’ar, Dan., iii, 27 (Vulgate, 94); iv, 30; vii, 9; grec: 6p: Ç, Lev., xiii, 10, 30, etc.; Matth., v, 36; x, 30; Luc, vii, 38, etc.; Tpi-/(Du.a, Cant., vi, 4; 7Ù.if^.a, I Tim., ii, 9; nXôxiov, Cant., vii, 5; Vulgate: csesaries, Num., vi, 5; Deut., xxi, 12; II Reg., xiv, 16; capillus, Lev., xiii, 10, etc.; Num., VI, 18; Jud., xvj, 22, etc.; Matth., v, 36; Luc, vii, 38; capillatura, I petr., ni, 3; coma, Lev., xix, 27; Judith, xiii, 9; I Cor., xi, 14, etc.; crines, Jud., xvi, 13; Judith, x, 3; Cant, iv, 9I Tim., ii, 9). Les mots qui désignent en hébreu les cheveuxont pour origine plusieurs verbes de significationtrès différente. Dalàh veut dire «la chevelure qui pend».Péra’vient du verbe para’, qui signifie «tondre»; ildésigne la chevelure entière. Sa’ârâh, sê’àr, désignent «les poils» en général. Tantôt ces mots sont employésseuls, 1 Sam. (Reg.), xiv, 45; Job, iv, 15; Cant., iv, 1; Dan., iii, 27 (94); tantôt avec le mot rô’s, «tête.» Jud., xvi, 22; II Sam. (Reg.), xiv, 26; Esdr., IX, 3. En grec, KX£yu.a et TiXôxtoy désignent spécialement les cheveuxarrangés. En latin, exsaries a une étymologie semblableà celle du mot hébreu péra’; il vient du verbe cxdere, «couper.» Les autres mots sont les termes classiquesen grec et en latin pour désigner les cheveux et la chevelure.
I. La chevelure chez les Hébreux. — Les Hébreux, en Chaldée, portaient les cheveux longs ainsi que labarbe. Voir Bajibe. Ils conservèrent cet usage au milieu «85
CHEVEUX
G86
des Égyptiens, qui se rasaient ordinairement la tête. (Voirt. i, fig. 383, col. 1289.) Toutes les règles qui sont donnéespar la loi mosaïque, relativement aux cas où lescheveux doivent être coupés et à la manière dont ilsdoivent l’être, supposent qu’habituellement les Hébreuxportaient les cheveux longs.
1° Chevelure des prêtres. — Dieu avait imposé auxprêtres des règles strictes sur la façon dont devait êtrearrangée leur chevelure. La loi leur interdit de tondre enrond les coins de leur tête. Lev., xix, 27. Ils ne doiventni se raser la tête ni laisser croître indéfiniment leurs «heveux, mais les couper simplement. Lev., xxi, 5; Ezech., xliv, 20. Par ces prescriptions, Dieu veut distinguer sesprêtres de ceux des dieux des nations. Lev., xix, 27; Deut., xiv, 1. «Il ne veut pas, dit saint Jérôme, qu’ilssoient rasés à la manière des prêtres d’Isis et de Sérapis, jni qu’ils laissent croître leur chevelure à la façon des
ment pour les prêtres égyptiens, Hérodote, ii, 36, et pourd’autres prêtres orientaux. Voir Barbier, t. i, col. 1457.2° Chevelure des nazaréens. — Parmi les observancesauxquelles se soumettait celui qui faisait vœu de nazaréatétait en premier lieu celle de laisser pousser ses cheveuxsans les couper. Num., vi, 5; Jud., xiii, 5; xvi, 17; I Reg., i, 11. Si quelqu’un meurt auprès d’un nazaréen, celui-ciest souillé et rase sa tête au jour de la purification, c’est-à-direau septième jour. Num., vi, 9. Lorsque le tempsdu nazaréat est terminé, le nazaréen rase aussi sa tête àl’entrée du tabernacle et met ses cheveux sous le feu dusacrifice des victimes pacifiques. Num., vi, 18-19. Parmiceux qui firent ce vœu figure au premier rang Samson.La force extraordinaire de ce juge était attachée à la longueurde ses cheveux. Jud., xvi, 17. Il la perdit quandDalila, qui lui avait arraché son secret, les lui eut coupés.Dès qu’ils furent repoussés, Samson recouvra sa
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252. — Tête de roi hyksos. Fragment d’une statue de la villa Ludovisi, à Epme.
larbares et des soldats, mais qu’ils aient une tenue convenableaux prêtres.» In Ezech., xiii, 17, t. xxv, col. 437.Les prêtres égyptiens avaient, en effet, comme tous leurs.compatriotes, la tête rasée, et même en dehors de l’Egypteles prêtres d’Isis adoptaient la même tenue. H. Helbig, Wandgemâlde Campaniens, in-4°, Leipzig, 1868, n M 1111et 1112. La défense de couper les coins de la chevelureest faite dans un dessein semblable. C’est pour empêcherl’usage de superstitions habituelles à certains peuplesvoisins, comme était, par exemple, l’habitude qu’avaientcertains Arabes d’offrir au dieu Orotal les cheveux plantésentre les tempes et les oreilles. Hérodote, iii, 8. Toutefois, comme il est remarqué à l’article Barbe, il est difficilede savoir exactement la signification du mot «coin», pê’âh, dans le passage d’Ezéchiel cité plus haut. Cf. t. i, col. 1452. Il est plus difficile encore de savoir si, dansJérémie, ix, 26 (hébreu, 25); xxv, 23; xlix, 32, le prophète, en parlant des Arabes, les désigne par la coupede leurs cheveux. Tandis que les Septante traduisent lesmots qesûsé pê’âh par: «celui qui est rasé autour desa face,» Tiâvxa Trepixe: p6[j.svov nrà xoctcc updffwTiov aùrou, et la Vulgate par: «ceux dont l’extrémité des cheveux estcoupée,» abscissi extrema coma, un certain nombred’interprètes appliquent le mot «extrémité» à la terreet traduisent: «ceux qui sont aux extrémités du désert.» Gesenius, Thésaurus, p. 1087.
Dans certains cas, il était prescrit aux prêtres de seraser entièrement le corps. C’était alors une partie de lacérémonie de la purification. Au moment de leur consécrationles lévites devaient avoir la tête rasée, comme toutle reste du corps. Num., viii, 7. Cet usage existait égaleforce, renversa les colonnes de la salle où les Philistinsfaisaient un festin, en tua un grand nombre et périt lui-mêmesous les décombres. Jud., xvi, 22. Voir Samson. —Saint Paul fit également le vœu du nazaréat à Éphèse, etla période durant laquelle le fer ne devait pas toucherà ses cheveux expira pendant son séjour à Cenchrées.Il se fit couper les cheveux dans cette ville, avant de serembarquer pour l’Orient. Act., xviii, 18. C’est bien à lui, en effet, que se rapporte le participe et non à Aquilas, comme l’ont cru à tort certains interprètes. C. Fouard, Saint Paul, in-8°, Paris, 1892, p. 268-269..
3° Chevelure du peuple. — Dans la vie ordinaire, lesJuifs portaient les cheveux assez longs. Nous voyons, eneffet, le prophète Habacuc enlevé par les cheveux. Dan., xiv, 35; et parmi les supplices infligés aux sept Machabéesest indiqué celui qui consiste à arracher à l’un d’euxles cheveux et la peau du crâne. II Mach., vii, 7. C’estavec les cheveux longs que les bas-reliefs égyptiens etassyriens représentent les Juifs. Sur le monument deSésac à Karnak, les cheveux sont liés par un bandeau quientoure la tête et qui est noué par derrière. Voir Barbe, t. i, fig. 447, col. 1454. Sur l’obélisque de Nimroud, latête est couverte d’un bonnet et le bas des cheveux estroulé, à quatre rangs de frisures. Voir Barbe, t. i, fig. 448, col. 1454. Sur le monument de Ninive où sontfigurés des Juifs rendant hommage à Sennachérib, latête de ce «x-ci est nue et sans bandeau et leurs cheveuxsont bouclés. Voir Barbe, t. i, fig, 449, col. 1455.
On admirait chez les jeunes gens une chevelure abondante.Celle d’Absalom, qu’il coupait chaque année, dit letexte sacré, pesait deux cents sicles du poids royal. II Reg.,
xiv, 26. Ce chiffre paraît extraordinaire et a donné lieuà un certain nombre d’hypothèses pour l’expliquer. Ona supposé notamment que la lettre caph, d, qui signifie20, avait été changée par une erreur de copisteen resch, i, qui signifie 200. Mais toutes les anciennes
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253. — Esclave égyptienne, xviii «dynastie.
Tombeau d’Abd el-Qournah. D’après Lepsius, Denkmiiler,
Abth. iii, Bl. 42.
versions contiennent le nombre 200. Cf. Keil et F. Delitzsch, BMical comnientary on the books of Samuel, trad. angl., Edimbourg, 1886, p. 412. Josèphe, Ant. jud., VII, viii, 5, raconte qu’Absalom coupait ses cheveux tousles huit jours. C’est à la longueur de sa chevelure qu’il
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254. — La princesse Nofrit. Musée de GMzéh.
dut sa perte. II Reg., xviii, 9. Voir Absalom. Les gardesdu roi Salomon portaient aussi les cheveux très longs, d’après Josèphe, Ant. jud., VIII, vii, 3.
L’histoire de Samson prouve que les hommes mêmes, quand ils portaient les cheveux longs, les arrangeaienten tresses (hébreu: malilâfôt; Septante: o-stpac; Vulgate: crines). Jud., xvi, 13, 19; cf. Is., iii, 24. Cet usageexistait aussi chez les Hyksos ou rois pasteurs d’Egypte,
qui étaient de race sémite (fig. 252), ainsi que chez lesGrecs de l’époque archaïque. W. Helbig, L’épopée homérique, trad. Trawinski, in-8°, Paris, 1894, p. 221, 229, 298-310; Bulletin de correspondance hellénique, 1881, pi. xi; Monuments publiés par l’association des étudesqrecques, 187H, pi. i; O. Rayet et Max. Collignon, Histoire: de la céramique grecque, p. 81, fig. 43.
Les boucles des cheveux, en hébreu taltalim, sontcomparées à des rameauxflexibles du palmier, selonles Septante et la Vulgatequi rendent ce mot parèXi-rai, et par elatx. Cant., v, 11. Le mot même quidésigne la chevelure dansce passage, dallâh, signifie «un fil qui pend»; lesSeptante le rendent partiMxiov, et la Vulgate parcoma. Dans le même livre, v, 2 et 11, les bouclessont appelées qevussot, motque les Septante traduisentpar p6<TTpv-/oi, et la Vulgatepar cincinni. Dans
Èzéchiel, viii, 3, elles sont présentées sous l’image d’unefrange (hébreu: sisi(; Septante: xopûçn], «sommet de latête;» Vulgate: cincinni).
Les Juifs oignaient d’huile et parfumaient leurs chevelures.Ruth, iii, 3; II Reg., xiv, 2; Ps. xxii (hébreu, xxm), 5; Eccle., îx, 8; Is., iii, 24. Ils le faisaient surtoutquand ils assistaient à des festins, et souvent celuiqui recevait fournissait des parfums à ses hôtes. Matth.,
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255. — Grecque du tempa
des Diadoches. D’après le iluseo
Borbonico, x, 11.
256.
Égyptienne, xviii 8 dynastie. Tombeau d’Abd el-Qournah*D’après Lepsius, Denkmater, Abth. iii, Bl. 42.
vi, 17; xxvi, 7; Luc, vii, 46. Cf. Josèphe, Ant. jud., XIX, iv, 1.
Les cheveux des Juifs, comme ceux de tous les Orientaux, étaient noirs. L’épouse du Cantique compare ceuxde son mari à l’aile d’un corbeau. Cant., v, 11. Parfois-onsemait de la poudre dans les cheveux pour en rehausserl’éclat. Josèphe, Ant. jud., VIII, vii, 3. L’usage de la teintureparaît inconnu aux Hébreux. Si Hérode le Grand seteignait pour dissimuler son âge, c’était parce qu’il avaitadopté les usages grecs. Josèphe, Ant. jud., XVI, viii, 8.La couleur blanche est souvent signalée comme un
des signes caractéristiques de la vieillesse, Gen., xlii, 38; xuv, 29; III Reg., ii, 6; Ose., vii, 9; Prov., xvi, 31; SX, 29. La chevelure blanche sert à représenter l’éternité, divine. Dan., vii, 9; Apoc, i, 14. Plusieurs des peuplesvoisins de la Palestine, comme les Égyptiens et les Perses, faisaient usage de la perruque. Wilkinson, The manners, t. ii, p. 324; Xénophon, Cyrop., i, 3, 2. Il ne semblepas qu’elle ait été usitée chez les Juifs. Josèphe, Vita, ii, ne signale qu’une fois l’emploi d’une perruque, mais c’estpour servir à un déguisement.4o Chevelure des femmes. — La Bible nous fournit
quelques renseignementssur la manièredont les Juives arrangeaientleurs cheveux.Les termes dont se sertla Sainte Écriture sontgénéralement vagues.Il est dit de Jézabelqu’elle ornait sa tête(hébreu: tètèb; Septante: Trouve, «ellerendit belle»; Vulgate: ornavit). IV Reg., ix, 30. Cependant dansle livre de Judith, x, 3, le texte grecporte SiÉTaije, et la Vulgate discreminavit, «elle sépara,» ce qui semble indiquer l’usage d’un peigne. Cespeignes, suivant de nombreux commentateurs, sont désignéspar le mot pe’êrim. Is., iii, 20. C’est la traductionque donne la Vulgate: discriminalia. Les Septante traduisentpar: «l’arrangement de l’ornement de la gloire,»
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267. — Cylindre chaldéen.
D’après P. Lajard, Culte de Mithra,
pi. xxvii, n° 7.
aussi les Grecques (fig. 255). G. Wilkinson, The manners, t. ii, p. 335. C’est du moins le sens que donnentau mot hébreu sebisim, dans Isaïe, iii, 18, les Septante, qui traduisent par ètMiXôxta; la Vulgate, qui traduit parreticulas, et le Talmud, Kelim, xxyiii, 10.
La comparaison que l’époux du Cantique fait des cheveuxde son épouse à la pourpre du roi, Cant., vii, 5, n’indique en aucune façon que les femmes juives aientteint leurs cheveux. Le mot «pourpre» est employé icidans le sens de «noir foncé», comme l’est parfois m>p ?ûpso; en grec. Iliad., v, 83; Antholog., xi, 13, etc. —Pour les cheveux des Syriennes, voir la tête d’Astarté, t. i, fig. 333, col. 1185. Pour les Égyptiennes, voirfig. 256, et t. i, fig. 415, col. 1387.
5o La chevelure dans le deuil. — Se raser la tête étaitpour les Hébreux un signe de deuil. Lev., x, 6; Deut., xxi, 12; Is., iii, 17, 24; xv, 2; xxii, 12; Jer., vii, 29; xlviii, 37; Amos, viii, 10; Josèphe, Bell. jud., II, xv, 1.Parfois même ils s’arrachaient violemment les cheveux.Ezech., xxvii, 31; Mich., i, 16; I Esdr., ix, 3. Ils suivaientdonc l’usage contraire à celui des Égyptiens. Ceuxci, en effet, laissaient pousser leur chevelure en signede deuil, Hérodote, ii, 36, et la coupaient quand leurdeuil était terminé. Les Grecs, à l’époque classique, avaient la même coutume que les Juifs. Homère, Iliad., xxiii, 135, 152; Odyss., iv, 198; Sophocle, Electr., 449; Euripide, Alcest., 434; Plutarque, Consolatio ad uxorem, l; Athénée, Deipnosoph., xv, 16; Lucien, DeLuctu, 11; Monuments de l’instit. arch. de Borne, 1864, pi. iv et v; Benndorf, Griechische und SicilischeVasenbilder, pi. 1, 16, 17, 21, etc. À l’époque grécoromaine, au contraire, où l’habitude était de porter lescheveux courts, on les laissait pousser pour marquer la
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258. — Statuette grecque.
D’après Baumelster, Denkmaler des
klasslschen Alterthums, t. i, fig. 682.
259. — Statuette de jeune Grecque.Musée du Louvre. Rotonde d’Apollon.
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260. — Chevelure frisée au fer.
Statuette grecque. D’après Baumelster,
t. i, fig. 684.
ttjv 5Ûv(te<Tiv toO xô(7|jiou Tïjç 8(5 ?ïjç. Ailleurs, dans Ézéchiel, xxiv, 17, saint Jérôme traduit le même mot par «couronnes». Cf. Gesenius, Thésaurus, p. 1089. Lescheveux étaient divisés en nattes ou en tresses commecelles que portent des esclaves égyptiennes (fig. 253).Une seule tresse de l’épouse suffit à séduire le cœur del’époux, d’après la Vulgate, Cant., IV, 9, mais le mothébreu’ânaq, qu’elle traduit par crinis, signifie non pas «un cheveu», mais «un collier». (Septante: èv8é[jia, «collier».) Plus loin, Cant., vii, 5, la chevelure del’épouse est comparée à la pourpre du roi attachée pardes anneaux (hébreu: rehâtim, proprement «galeries, canaux» ); les anneaux sont, en effet, ronds comme lesconduites d’eau (Septante: jiapaSpojjii’ai; Vulgate: canales).
Les femmes juives maintenaient probablement lestresses à leur place par un filet ou bandeau, comme lefaisaient quelquefois les femmes égyptiennes (fig. 251) et
douleur. Plutarque, Qusest. rom., 14. Les Romains laissaientégalement pousser leurs cheveux en pareil cas.Suétone, Caligula, x, 24; cf. Tite Live, xxvii, 34.
6o Prescriptions relatives à la chevelure dans les maladiesde la peau. — Pour l’examen de certaines maladiesqui rendaient impur celui qui en était atteint, enparticulier de la teigne et de la lèpre, le Lévitique ordonnede considérer avec soin la couleur des cheveux et despoils. Si le poil devient jaune, la maladie est évidente, Lev., xiii, 10, 30, 36, 42; au contraire, elle n’existe pas, si le poil conserve sa couleur noire. Lev., xiii, 31, 37.Lorsque le lépreux est guéri, il doit par deux fois, àsept jours d’intervalle, se raser la tête et tout le corpsavant d’accomplir les sacrifices de purification. Lev., xiv, 8-9.
II. Chevelure des Babyloniens. — En parlant des troisjeunes gens qui furent jetés dans une fournaise par ordrede Nabuchodonosor, la Bible nous dit qu’aucun cheveu
de leur tête ne fut brûlé. Dan., iii, 94 (hébreu, 27). Ilsportaient le costume du pays, et leurs cheveux devaientêtre arrangés à la mode babylonienne. Les monumentsassyriens nous montrent quel était cet arrangement. Lescheveux étaient longs, ondulés et terminés au bas parplusieurs rangs de boucles frisées. Lenormant et Babelon, Histoire ancienne des peuples de l’Orient, t. v, p. 33, 42, 48, etc. Voir t. i, fig. 136, 435, col. 553, 1427, etc.Telle devait êlre aussi la chevelure d’Holopherne. Judith, xin, 9 (grec, 7). Un ancien cylindre chaldéen nousmontre comment était arrangée, dans la patrie de Sara, la chevelure des femmes (fig. 257).
III. La cheveluhe dans le Nouveau Testament. —L’Évangile ne nous dit pas comment était la chevelure
261. —Femme chrétienne.
D’après Gamicci, Storia dell’arte, t. iv, fig. 225.
de Notre-Seigneur. Une tradition qui remonte aux premiersâges de l’Église et qui est déjà fixée dans une peinturede la catacombe de Saint-Callixte donne au Sauveurune longue chevelure, séparée sur le milieu du front etretombant des deux côtés en longues boucles. Voir t. i, col. 1533. Les Évangiles mentionnent la chevelure; desainte Madeleine, avec laquelle elle essuya les pieds duSauveur. Luc, vii, 38, 44; Joa., xi, 2; xii, 3. L’apôtre saintPaul recommande aux hommes de ne pas porter les cheveuxlongs, car cela esl une honte; au contraire, la femmedoit laisser croître ses cheveux, qui sonl pour elle commeun voile. I Cor., XI, 14-15. Les papes et les conciles ontsouvent rappelé aux clercs les préceptes de saint Paul.Liber pontificalis, édit. Duchesne, t. i, p. 134. Cf. S.Jérôme, in Ezech., xii, 20, t. xxv, col. 441; Cod. Théod., xvi, 2, 38. Cette règle a toujours été maintenue dansl’Église latine; dans l’Église grecque, au contraire, lesprêtres laissent pousser leurs cheveux comme leur barbe.Saint Paul recommande ailleurs aux femmes la simplicitédans le soin de leur chevelure. Il veut qu’elles s’abstiennentde porter des nattes ou d’autres coiffures compliquées, comme en portaient les païennes. I Tiin., ii, 9.Saint Pierre leur fait la même recommandation. IPetr., ni, 3. Les terres cuites et les médailles nous montrent, en effet, que les coiffures des femmes grecques et romainesétaient variées à l’infini (fig. 258, 259 et 260). Daremberget Saglio, Dictionnaire des antiquités grecques et romaines, t. i, fig. 1823-1832, p. 1361; fig. 1857-1871, p. 1368. Les peintures des catacombes attestent, au contraire, que les femmes chrétiennes se" contentaient deséparer leur chevelure en deux bandeaux (fig. 261).J. Spencer Northcote et "W.R. Brownlo’w, Romesouterraine, trad. P. Allard, p. 378, ꝟ. 35, pi. rv.
IV. MÉTAPHORES TIRÉES DELA CHEVELURE. — Les Juifs
empruntaient plusieurs métaphores au nombre et à lanature des cheveux. 1° Ils comparaient à la masse des
cheveux une quantité innombrable. Ps. xxxix (hébreu, XL), 13; lxviii (hébreu, lxix), 5. Aussi, pour montrerque la Providence divine s’occupe des moindres détails, Notre-Seigneur dit-il que tous les cheveux de notre têtesont comptés. Matth., x, 30; Luc, xii, 7. — 2° Le cheveureprésente une chose sans aucune valeur; de là eslvenue, pour indiquer qu’un homme n’aura pas à subir lemoindre dommage, l’expression proverbiale: «On ne toucherapas à un cheveu de sa tête.» I Reg., xiv, 45; II Reg., xiv, 11; III Reg., i, 52; Dan., iii, 94 (hébreu, 27); Luc, xxi, 18; Act., xxvii, 34. — 3° Le cheveu représente unobjet extrêmement mince et difficile à atteindre ou àsaisir. Pour montrer l’habileté des frondeurs de la tribude Benjamin, il est dit qu’ils ne manquaient pas un cheveuquand ils le visaient. Jud., xx, 16. — 4° Une chevelureabondante et soignée est donnée comme un des traits caractéristiquesde l’orgueil. Ps. lxvii (hébreu, lxviii), 22.
E. Beurlier.
- CHÈVRE##
CHÈVRE (hébreu: ’êz, rarement se’îràh, féminin deÈâ’îr, «bouc;» Septante: à’iij; Vulgate: eapra).
1° Histoire naturelle de la chèvre. — La chèvre(fig. 262), femelle du bouc (voir Bouc), est un mammifèrede l’ordre des ruminants et de la famille desbovidés. Elle a les cornes dirigées en haut et en arriére, les jambes robustes et la queue courte. Elle porte deuxmamelles. Son pelage se compose de deux sortes de poils: les uns longs et grossiers, et par-dessous ceux-ci d’autrespoils plus courts, souples et laineux. Ces poils serventà fabriquer des étoffes et des tentures plus ou moinsfines, suivant qu’on emploie ceux de dessus ou ceux de
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262. — Chèvre (Capra membrica).
dessous. La Sainte Écriture parle de rideaux du tabernacleet d’autres étoffes en poils de chèvres. Exod., xxxv, 4, 23, 26; xxxvi, 14; Num., xxxi, 20; I Reg., xix, 13.Voir Cilice. Avec la peau, on fabrique des outres pourla conservation ou le transport des liquides, eau, viii, lait, huile, etc. Voir Outre. La chèvre constituait encore pourles Hébreux une précieuse ressource alimentaire par sonlait, Prov., xxvii, 27, et sa chair, qu’il était permis demanger. Deut., xiv, 4.
2° La chèvre de Palestine. — La chèvre commune, Capra hircus, est représentée en Palestine par deuxvariétés principales. On pourrait s’attendre à trouver denombreux traits de ressemblance entre ces variétés et larace-type de la Capra xgagrus, qui est originaire de laPerse et de l’Arménie, et de laquelle semble provenirla chèvre domestique. Cette ressemblance n’existe pas, etmême les chèvres de Syrie s’éloignent davantage du type C93
CHEVRE
694
primitif que ne le font les autres animaux du même pays.La principale variété est celle de la Capra membrica, reconnaissable à ses fortes cornes, à sa taille plus grandeque celle de nos chèvres, et surtout à ses oreilles pendantesqui ont un pied de longueur. Amos, iii, 12, faitallusion à ces oreilles énormes quand il dit que «lepâtre arrache à la gueule du lion deux cuisses et le boutd’une oreille». Il fallait que cette oreille fût longue pourqu’on put en saisir une partie entre les dents du lion.Les chèvres de Palestine ont presque toujours le poilnoir. Dans le Cantique, iv, 1; vi, 4, les cheveux de l’épousesont comparés aux troupeaux de chèvres qui couronnentle sommet de Galaad. Ces noirs troupeaux pouvaientressembler à une sorte de chevelure posée sur le
tiens, le laboureur était suivi du semeur, puis d’un troupeaude chèvres ou de moutons qui piétinaient la semencepour l’enterrer. Les chevriers faisaient avancer les animauxen chantant quelque refrain, comme le montreune scèn.e empruntée au tombeau de Tl (fig. 263). LesHébreux réunissaient ensemble les chèvres et les brebis, mais seulement pour les garder ou les mener paître.Un bas-relief assyrien (fig. 264) représente des chèvreset des brebis ainsi conduites. La nuit, on les enfermaitdans les mêmes bercails ou les mêmes cavernes, pourles soustraire aux attaques des carnassiers. Voir Brebis, t. i, col. 1915. — Pour les conduire aux pâturages, les bergers d’autrefois procédaient comme font ceuxd’aujourd’hui. Le berger du troupeau mêlé de brebis et
^^fJS^^l^ff^f
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263. — Troupeau de chèvres piétinant un champ ensemencé. Tombeau de Ti, à Saqqara. D’après une photographie.
sommet calcaire de la montagne. — Dans le voisinagede l’Hermon se rencontre une autre variété, la Capraangorensis, aux oreilles et aux cornes plus courtes, aupoil plus long et plus soyeux, mais aux formes plus massives.Sa couleur prédominante est également le noir.La variété appelée Capra sinaitica par les naturalistes, lamême que la Capra beden des Arabes, ne vit que dans lesdistricts les plus sauvages. CJn la rencontre encore aujourd’huidans les ravins de Moab et dans le désert de Juda, près de la mer Morte. Tristram, Fauna and Flora ofPalestine, Londres, 1884, p. 6. La chèvre vit de préférencedans les contrées montagneuses et rocheuses, oùelle trouve sa nourriture sur les buissons. Elle brouteles jeunes rejetons et les feuilles de thym et de petitsarbrisseaux. Elle est ainsi cause que certaines régionsdésertes de Palestine ne peuvent se reboiser, et mêmeque plusieurs espèces végétales, qui couvraient autrefoisles hauteurs, ont totalement disparu entre le Jourdainet la Méditerranée. De nombreux troupeaux de chèvrestrouvent à vivre dans les maigres herbages du désert dusud. Les arides plateaux de l’Arabie ne leur conviennentpas; aussi ne sont-elles pas mentionnées parmi les troupeauxde Job. Elles laissent aux moutons les succulentspâturages des plaines maritimes. Les hauteurs qui occupenttoute la Palestine, d’Hébron au Liban, sont leurséjour préféré, et dès les premiers temps on les y a élevéesen grand nombre.
3° Les anciens troupeaux de chèvres. — La SainteÉcriture mentionne les troupeaux de chèvres de Laban, Gen., xxx, 32; xxxi, 38, ceux de Jacob, qui envoie deuxcents chèvres en présent à son frère, Gen., xxxii, 14, lesmille chèvres du troupeau de Nabal, au Carmel, I Reg., xxv, 2, les chèvres des habitants de Béthulie, Judith, m, 3, etc. Les riches propriétaires n’étaient d’ailleurs passeuls à posséder des chèvres. Comme cet animal trouveaisément sa nourriture, les plus pauvres familles pouvaienten avoir au moins une, ou parfois plusieurs composantun petit troupeau. En face de la nombreuse arméedes Syriens qui envahit le pays sous le règne d’Achab, les Israélites paraissaient être comme «deux petits troupeauxde chèvres». III Reg., xx, 27. — Chez les Égypde chèvres marche toujours le premier. Les brebis suiventdocilement, les unes après les autres, par les cheminsles plus aisés. On voit, au contraire, les chèvres gambaderen désordre, sauter de roc en roc, grimper parles passages les plus abrupts et donner libre carrière àleur humeur vagabonde. S’agit-il de pénétrer dans le bercailou dans la caverne qui sert de refuge pour la nuit?Boucs et chèvres se précipitent de tous les rochers et au
264. — Troupeau de chèvres et de brebis en Assyrie.D’après Layard, Monuments of Nineveh, t. i, pL 58.
besoin bondissent par-dessus le dos des brebis. Pourqufcchaque troupeau occupe en paix la place qui lui revientdans le bercail, le berger est obligé de faire passer lesbrebis d’un côté et les chèvres de l’autre, en se mettantlui-même entre les deux auprès de la porte. C’est cettemanière de faire qui a donné lieu à la comparaison dont sesert Notre-Seigneur, Matth., xxv, 32, 33, pour représenterla séparation des bons et des méchants au jour du jugement.Voir t. i, col. 1871. Tristram, The natural historyof the Bible, Londres, 1889, p. 92; Wood, Bible animais, Londres, 1884, p. 199.
4° Les chèvres dans les sacrifices. — Les chèvres pou695
CHÈVRE — CHEVREAU
vaient être offertes dans les sacrifices. Quand le Seigneurvoulut sceller son alliance avec Abraham, il lui fit immolertrois animaux de trois ans, une vache, une chèvre et unbélier. Gen., xv, 9. On offrait des sacrifices pacifiques dechèvres. Lev., iii, 12-16. L’holocauste d’une chèvre étaitprescrit quand un homme du peuple tombait dans undélit par ignorance, Lev., iv, 28; Num., xv, 27, et quandon avait fait un serment frivole. Lev., v, 6. Néanmoinson ne pouvait offrir l’animal que le huitième jour après
sa naissance. Lev., xxii, 27.
H. Lesêtre.
- CHEVREAU##
CHEVREAU (hébreu: gedî, «qui coupe et arrache» laverdure dont il se nourrit; une fois gedyyâh, la chevrette, Cant., i, 7 (hébreu, 8); Septante: eptço; , èpiçiov; Vulgate: hsedus), le petit de la chèvre. Il occupe une place asseznotable dans la Sainte Écriture. — 1° Tout d’abord, il servait dans les sacrifices. Num., xv, 12. Après sa captivité, Darius ordonna à ses satrapes de fournir aux Juifs desveaux, des agneaux et des chevreaux pour les holocaustes.I Esdr., vi, 9. La victime pascale devait être «un mâlesans tache, d’un an, d’entre les brebis et d’entre leschèvres». Exod., xii, 5 (hébreu). L’usage prévalut dechoisir pour le repas solennel de la Pâque un agneauplutôt qu’un chevreau. Néanmoins Josias fait distribuer
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265. — Offrande d’un chevreau. Cylindre chaldéen.
D’après J. Menant, Recherches sur la glyptique orientale,
t. i, p. 163-164.
au peuple trente mille agneauxet chevreaux pour un festinpascal. II Par., xxxv, 7. Jusque dans les derniers temps, il fut loisible de substituer le chevreau à l’agneau, cequ’on faisait sans doute quand il y avait quelque difficultéà se procurer la victime habituelle. On lit dans le Talmud: «Si quelqu’un dit à son disciple: Va et sacrifie-moi laPâque, et que celui-ci sacrifie un chevreau, qu’il enmange.» Pesachim, viii, 2. Le sacrifice du chevreau etsa présentation au dieu sont figurés sur les cylindreschaldéens et les bas-reliefs assyriens (fig. 265). Cf. Botta, Monument de Nivive, t. i, pi. 43; Maspero, Histoireancienne des peuples de l’Orient, 1895, t. i, p. 681.— 2° Un chevreau servait de salaire ou de présent.C'était un salaire honteux, dans le cas de Juda et deThamar, Gen., xxxviii, 17, 20, 23; un salaire honorable, quand il rémunérait le travail de la femme de Tobie. Tob, II, 20. On payait parfois en chevreaux le champ qu’onavait acheté. Prov., xxvii, 26. Le don d’un chevreau étaitun présent très sortable. Quand Samson va voir Thamnatha, l'épouse qu’il s’est choisie dans le pays philistin, ilemporte avec lui un chevreau pour lui en faire cadeau.Jud., xv, 1. Sur l’indication de Samuel, Saùl rencontreprès du chêne de Thabor des hommes qui portent despains, une outre de vin et trois chevreaux. I Reg., x, 3.Ils se rendent à Béthel, probablement dans l’intentionde présenter ces offrandes au sanctuaire de cette ville.Quelques années après, quand Isaï envoie son fils Davidà Saül pour lui jouer du kinnor, il ne manque pas de lecharger de présents pour le roi. Ces présents se composentaussi de pains, d’une outre de vin et d’un chevreau. I Reg., xvi, 20. — Le chevreau est un petit animal très doux. Autemps du Messie, il habitera avec le léopard, Is., xi, 6,
symbole de l’union de tous les peuples sous la houlettedu divin Pasteur. L'épouse du Cantique, i, 7, fait pailreses chevrettes auprès des tentes des pasteurs, image gracieuse de l'Église qui prend soin des âmes dociles. — 3° Lechevreau servait surtout dans l’alimentation. Sa chairest fort tendre. Le jeune Samson écharpait un lion avecautant d’aisance qu’un chevreau. Jud., xiv, 6. Pour rendrecette chair plus savoureuse, on la faisait cuire dans dulait. C’est ce que pratiquent encore aujourd’hui les Arabes.Toutefois, pour inspirer aux Hébreux l’horreur de toutecruauté inutile, la Loi défendait de faire cuire le chevreaudans le lait de sa mère. Cette prohibition est répétée jusqu'à trois fois. Exod., xxiii, 19; xxxiv, 26; Deut., xiv, 21.On tuait le chevreau de préférence à l’agneau, parce qu’onlaissait grandir ce dernier pour en recueillir la laine, donton tjrait un meilleur profit que du poil de chèvre. C’estpourquoi Jérémie, ii, 40, déclare aux Juifs que le Seigneur les mènera à la mort comme «des béliers avec deschevreaux». Le chevreau était ordinairement le premieranimal qu’on saisissait, quand on voulait préparer rapidement un mets présentable. Lorsque Rébecca veut obtenir pour Jacob la bénédiction qu’Isaac destinait à Ésaii, elle envoie son plus jeune fils au troupeau pour en rapporter «les deux meilleurs chevreaux», et ensuite elleles apprête comme le vieillard les aimait, avec une sauceanalogue à celle qui accommodait la venaison d'Ésaû.Isaac, dont le goût était sans doute émoussé par l'âge, futtrompé d’autant plus aisément, que Rébecca avait mis dela peau velue des chevreaux autour du cou et des mainsde Jacob et qu’elle l’avait revêtu des habits de son frère, pour qu’au toucher et à l’odorat le vieillard aveugle crûtreconnaître son fils aîné. Gen., xxvii, 9-16. Plus tard, Jacob devenu vieux reçut la tunique de son fils Joseph, trempée par ses frères «dans le sang d’un chevreau qu’ilsavaient tué», sans doute pour en faire ensuite leur repas.Gen., xxxvii, 31. Le chevreau est utilisé aujourd’hui encore toutes les fois qu’on a un hôte à recevoir au désert. «Dans toutes les parties sauvages de la Palestine, raconteTristram, chaque fois qu’un voyageur s’arrête dans uncampement arabe ou fait sa visite au scheick du village, on le presse d’attendre, jusqu'à ce que le chevreau puisseêtre tué et préparé. On voit aussitôt, sur le devant mêmede la tente, prendre le chevreau et l’apprêter pour la cuisson. Les femmes l’emportent alors pour le faire cuire, loin du regard, dans le compartiment intérieur. À moinsd'être forcé par la nécessité, l’hôte ne peut refuser d’accepter, sans une excuse raisonnable. S’il tient à passerpour un homme bien élevé, il faut qu’il attende jusqu'àce que le festin soit prêt. Le chevreau fraîchement tuéest extrêmement tendre et bon, et le palais le plus difficile ne peut découvrir de différence entre le chevreau etl’agneau. Le bouc déjà âgé ne fournit pas un bon aliment, bien qu’on le mange au lieu de mouton dans la plus grandepartie de la Palestine.» The natural history of the Bible, Londres, 1889, p. 91. La scène ainsi décrite se lit deuxfois dans le livre des Juges. Quand Gédéon reçoit la visitede l’ange qui lui ordonne d’attaquer les Madianites, il luidit: «Ne vous éloignez pas d’ici, jusqu'à ce que je revienne à vous, avec le présent que je veux vous offrir.Il répondit: J’attendrai ton retour. Gédéon entra doncet fit cuire un chevreau et des pains azymes avec unemesure de farine. Puis, mettant la viande dans une corbeille, et versant le jus dans une marmite, il porta le toutsous un chêne et le présenta à l’ange.» Jud., vt, 18, 19.Lorsque Manué, le Danite, a devant lui l’ange qui luiannonce la naissance de Samson, il lui dit aussi, au nomde sa femme et au sien: «Je vous en prie, agréez maprière; laissez-nous nous retirer et vous apprêter un chevreau attaché à la chèvre.» Jud., xiii, 15. Dans lès deuxcas, l’ange refuse le repas, qui devient alors matière àsacrifice. — Du temps de Notre - Seigneur, le chevreauoccupait toujours bonne place dans les festins. C’est ainsique le frère aîné du prodigue se plaint à son père de n’avoir G97
CHEVREAU — CHIEN
698
jamais reçu de lui un chevreau, pour faire la fête avec
ses amis. Luc, xv, 29.
H. Lesêtre.
CHEVREUIL. Le chevreuil, Cervûs capreolus, est unruminant du genre cerf. Il ressemble au cerf proprementdit par ses formes générales; il en diffère par sa tailleplus petite, ses bois courts et rugueux, son pelage fauveou gris-brun, mais blanc à l’arrière-train. Quelquesauteurs ont supposé que le chevreuil pourrait être l’animal que la Bible appelle 'aqqô, et qu’elle range parmiceux dont il est permis de se nourrir. Deut., xiv, 5. Lachair du chevreuil est, en effet, excellente; mais l’animalest d’une circonspection et d’une agilité qui le rendentfort difficile à saisir. Du reste, il est plus que douteuxque les Hébreux aient jamais connu le chevreuil, soit leCapreolus pygargus du nord de l’Asie, soit 1' 'ahu' desPersans, qui n’est autre que la Gazella subgutturos’a.. —Selon d’autres auteurs, surtout parmi les anciens commentateurs juifs, l"a<jr<jrô serait plutôt le bouquetin, Capra ibex. Ce dernier a été connu des Hébreux, il estvrai; mais la manière dont ils en parlent prouve assezqu’ils n’ont jamais cru possible de s’en emparer, à plusforte raison de le compter au nombre des aliments d’usageordinaire. Voir Bouquetin. — La chèvre sauvage, Capraœgagrus, commune dans les montagnes escarpées de laPerse, pourrait être l’animal en question, si quelqueindice permettait d’affirmer qu’elle est jamais arrivéejusqu’en Palestine. — Tristram, The natural hislory ofthe Bible, Londres, 1889, p. 97, pense que Moïse a puavoir en vue la Capra beden ou sinaitica, espèce dechèvre sauvage qui abonde dans la péninsule sinaïtique.Mais il n’y a encore là qu’une probabilité, et rien n’estcertain en ce qui concerne l’identification de Y 'aqqô.D’après Gesenius, Thésaurus, p. 128, ce nom viendraitdu verbe 'ânâq, et désignerait un animal à l’encolurelongue et mince. Mais quel est cet animal? Les versionsl’appellent tpa^ÉXaso; , tragelaphus, mot composé quisignifie «bouccerf», et ne désigne aucun animal réel.Le sens d' 'aqqô reste donc douteux. Quant au chevreuil, il est à peu près certain qu’il n’en est nullement questiondans la Bible. Dans l’Ecclésiastique, xi, 32, il est vrai, on lit que «la perdrix est amenée dans la cage et lacaprea dans le filet». La caprea peut être soit la chèvresauvage, soit le chevreuil. Mais la «caprea dans le filet» n’existe que dans le texte latin. Dans le texte grec, laperdrix paraît être amenée dans une cage pour servird’appeau. On n’en peut dire autant du chevreuil, d’où ilsuit que l’addition du texte latin a modifié le sens général du texte grec, et que la mention du chevreuil dansl’original hébreu doit être regardée comme plus quedouteuse. Aujourd’hui encore, le Cervus capreolus esttrès rare en Palestine, qui est du reste la région la plusméridionale où il se rencontre. M. Tristram en a vu unsur les crêtes qui sont au sud du Liban, et le capitaineConder un autre au mont Carmel. Tristram, Fauna andFlora of Palestine, Londres, 1884, p. 4.
H. Lesêtre.
- CHICORÉE##
CHICORÉE, une des plantes qui, selon les Juifs, Pesachim, ii, 6, sont comprises dans les merôrîm, «herbesamères,» que l’on devait manger avec l’agneau pascal, et que la Vulgate traduit par «laitues sauvages». Exod., xii, 8; Num., ix, 11. Voir Herbes amères.
- CHIDON##
CHIDON (AIRE DE). Voir Aire 3, t. i, col. 328.
- CHIEN##
CHIEN (hébreu: kéléb, en arabe kelb, du radicalkâlab, il clabauder, aboyer;» Septante: xvwv, xuvâpiov; Vulgate: canis, catellus), mammifère Carnivore, qui nediffère que légèrement du loup et du renard (fig. 266).Il est digitigrade, avec cinq doigts aux pieds de devant, quatre à ceux de derrière. Ses dents sont au nombre dequarante-deux. À l'état sauvage, les chiens hurlent etvivent à peu près à la manière des chacals; ils chassent
par troupes et ne craignent pas alors de s’attaquer mêmeau lion et au tigre. À l'état domestique, auquel il se plietrès aisément, cet animal aboie et se montre le plus intelligent et le plus fidèle des compagnons de l’homme.Il existe un très grand nombre de variétés de chiens.
1. Les chiens dans l’ancien Orient. — 1° En Egypte.— Dès les temps les plus antiques, les Égyptiens ont utilisé le chien. Leurs monuments en représentent plusieursvariétés très distinctes (fig. 267). Le chien propre aupays était le chien-renard à robe fauve, dont on a retrouvé les momies dans plusieurs nécropoles antiques.Cf. t. i, col. 1513, fig. 464. Il partageait avec le chacall’honneur de représenter le dieu Anubis. Voir Chacal.La race de Dongolah avait la taille plus petite et l’allureplus svelte. À la chasse, les Égyptiens se servaient dusloughi ou grand lévrier du nord de l’Afrique et duchien hyénoïde. Ces deux espèces apparaissent sur lesmonuments primitifs qui représentent des scènes dechasse dès la IVe dynastie. Dans les bas-reliefs du tombeau des Beni-Hassan, on voit le chien courant de hautetaille, introduit sous la XIIe dynastie. Wilkinson, Manners and cusloms of the ancient Egyptians, 2e édit.,
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266. — Le chien.
t. iii, p. 22. Le chien de grande taille était appelé paronomatopée ouou et ououou. Pierret, Dictionnaire d’archéologie égyptienne, Paris, 1875, p. 128. Enfin, souscette même dynastie exclusivement, est représentée unerace de bassets d’origine étrangère. Fr. Lenormant, Notes sur un voyage en Egypte, 1870, l re note, p. 1 -4.Pendant leur séjour en Egypte, les Hébreux furent témoinsde la vénération idolâtrique qu’on avait pour les chiensd’Anubis et des usages divers auxquels on employait lesdifférentes variétés de ces animaux. En Chaldée, le chiende chasse, aux membres trapus et à tête de dogue, apparaît sur les plus anciens monuments (fig. 268).
2° En Palestine. — Le chien de Palestine ne diffèrepas aujourd’hui de celui d’autrefois. C’est la même racequi sert aux bergers et qui erre dans les bourgs et lescampagnes. L’animal a les oreilles courtes et pointues, le museau aigu, le pelage et la queue fauves et peu fournis. C’est à peu près le type du chien sauvage, très rapproché du chacal, avec lequel il s’unit assez communément. Par une curieuse exception, les Hébreux et leshabitants de la Syrie n’ont jamais accordé au chien laplace qu’il obtient chez presque tous les autres peuples.Ils tolèrent cet animal comme un voisin méprisable etimportun; mais ils ne l’admettent jamais dans leur familiarité. Aussi chez eux reste-t-il toujours à demi sauvage, alors qu’une domestication plus complète le rendrait aussidoux et aussi familier que les chiens des autres pays. «En Syrie, le chien de berger n’est pas l’intelligent compagnon et le suivant de son maître; il ne sert qu'à garder le troupeau pendant la nuit contre les bêtes sauvages.On entretient habituellement un nombre déterminé de C99
CHIEN
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chiens, jamais moins de six ensemble. Ils couchent horsdu bercail et font retentir leurs aboiements chaque foisqu’on entend les hurlements du chacal. Malgré leursservices, ils sont durement traités et battus, et ils meurentà moitié de faim. Pourtant leur fidélité est inébranlable, sTristram, The natural history of the Bible, Londres, 1889, p. 80, 141. Dans les villes, les chiens «sont l’inun silence qui succède aux aboiements qu’avait occasionnésle premier bruit de vos pas… Au désert, dans lestribus nomades, il y a toujours plusieurs chiens dans uncampement; les uns sont de garde et de la même espèceque ceux des villes; les autres, destinés à la chasse, sontde la race des lévriers frisés. Les premiers sont traitésavec la même négligence que dans les villes; les seconds
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207. — Chiens représentés sur les monuments égyptiens. D’après Champollion, Monuments de l’Egypte, t. iv, pi. 426 et 428.
quiétude des voleurs pendant la nuit et l’effroi des étrangerspendant le jour… Depuis le coucher du soleil jusqu’àson lever, à moins d’être du quartier, il est dangereuxde traverser les rues sans le gardien de chacunedes circonscriptions. Car les chiens, au premier aboiementde leurs sentinelles avancées, se réunissent, s’excitent, et bientôt dévoreraient le malheureux qui seraitsans protection. Le gardien vous précède donc avec unelanterne, il connaît les chiens et il est conna d’eux; ilparle aux plus doux, frappe de sa canne ceux qui ne sedérangent pas assez vite et impose à tous, par son autorité,
sont, au contraire, l’objet des plus grands soins, nourrisavec attention toute l’année, habillés de longues robesl’hiver. Ils sont avec le cheval des êtres de prédilection, parce qu’ils s’associent au plus grand plaisir de l’homme, la chasse à courre». L. de Laborde, Commentaire géographiquesur l’Exode et les Nombres, Paris, 181l, p. 59.Les Hébreux n’ont jamais été grands chasseurs; aussi netrouve-t-on dans la Bible aucune mention du lévrieremployé à la chasse. Quelques commentateurs ont pourtantpensé, à la suite de l’auteur de la Venela, que l’animal «ceint des reins» dont il est parlé dans les Pio
verbes, xxx, 31, n’est autre que le lévrier. Mais cetteinterprétation demeure problématique. Gesenhis, Thésaurus, p. 435, et Rosenmùller, Scholia, Proverbia, Leipzig, 1829, p. 712, croient que l’animal en question est plutôtle cheval de guerre. — Les chiens de Palestine sontgrands aboyeurs quand ils voient des étrangers; mais ilsuffit qu’on ait un bâton à la main pour les tenir en respect.Il faut cependant se défier avec soin des chiens debergers. Dans les villes, ils se nourrissent de tous lesdébris, de toutes les choses immondes et des cadavresd’autres animaux qu’on jette dans les rues. Ils se chargentainsi eux-mêmes de la voirie, au grand profit dé lasalubrité publique. Actuellement encore, il est impossibled’avoir avec soi un chien d’une race étrangère,
26B. — Chiens de ohasse assyriens.
D’après Place, Ninlve et V Assyrie, t. iii, pi. 62 Us.
parce que, sitôt qu’il sort dans la rue, tous les chiensindigènes se précipitent sur lui. Le pays a gardé unetrès belle race de lévriers destinés à la chasse. Socin, Palâstina und. Sijrien, Leipzig, 1891, p. xl, lx. La ragen’atteint qu’assez rarement les chiens de Palestine; maisils n’en sont pas exempts, comme quelques auteurs l’ontécrit.
II. Les chiens dans la Sainte Écriture. — Le chienest nommé une quarantaine de fois dans les LivresSaints. La manière dont les auteurs sacrés en parlentreflète exactement les sentiments qu’on a pour cet animalen Palestine. C’est à peine s’il est fait allusion aux servicesque rend le chien, quand il garde les troupeaux, Job, xxx, 1, ou qu’il aboie à propos pour signaler un danger. Is., lvi, 10. En trois endroits, la Bible mentionne des traitsde mœurs du chien, qui happe l’eau pour boire, Jud., vu, 5; qui accompagne son maître en agitant la queuepour marquer sa joie au retour, Tob., vi, 1; xi, 9 (cettedernière remarque s’applique au chien qui vit en Médîe), et qui lèche les plaies du pauvre Lazare. Luc, xvi, 21.Dans tous les autres passages, l’Écriture parle du chienavec défaveur. — 1° Le chien, animal famélique et vorace.On lui donne à dévorer les cadavres des ennemis égorgés, Ps. lxvii, 24; on abandonna à sa voracité les corpsdes descendants de Jéroboam, III Reg., xiv, 11, et deBaasa, III Reg., xvi, 4; les corps d’Achab, III Reg., xxi, , 19; de Jézabel et de ses descendants, III Reg., xxi, 23, 24; xxii, 38; IV Reg., ix, 10, 36. Au Psaumelviii, 7, 15, les ennemis sont comparés à ces chiens faméliquesqui rôdent le soir tout autour de la ville pour ychercher leur proie. Cf. Rosenmùller, Dos alte und neue
Morgenland, Leipzig, 1818, IVe part., n° 834, p. 7(j; Wood, Bible animais, Londres, 1884, p. 40. Enfin ils sont insatiables.Is., lvi, 11. — 2° Le chien, ennemi dangereux. Leschiens sont considérés comme des assaillants aussi redoutablesque le taureau, le lion et l’aurochs, quand ils s’acharnentcontre une victime. Ps. xxi, 17, 21. Malheur à quiles agace en les saisissant par les oreilles! Prov., xxvi, 17.Ils ne sont pas longs à écharper leur ennemi. Jer., xv, 3.Les chiens se montraient ordinairement si hargneux, queleur silence passait pour le signe d’une tranquillité parfaite.Quand on voulait marquer que tout était calme etque personne n’avait à redouter quoi que ce fût, on disaitproverbialement: «Pas même un chien n’aiguisera salangue contre quelqu’un.» Exod., xi, 7 (Jos., x, 21); Judith, xi, 15. — 3° Le chien, animal méprisable. Onlui abandonnait ce qu’une autre bête avait déjà entamé.Exod., xxii, 31. On n’avait même pas l’idée de lui donnerdu pain, Matth., xv, 26; Marc, vii, 26, et c’est parce queles salles de festins demeuraient ouvertes à tous, que lespetits chiens pouvaient se glisser à la dérobée et happerles miettes qui tombaient sous la table. Matth., xv, 27; Marc, vii, 28. Reaucoup de commentateurs pensent que, quand Notre - Seigneur dit que les chiens venaient lécherles ulcères de Lazare, il ne suppose aucune compassionde la part de ces animaux, mais ajoute un nouveau traità l’affliction du pauvre, incapable de se défendre mêmecontre les chiens. Cf. Fillion, S. Luc, Paris, 1882, p. 297; Knabenbauer, Evang. sec. Lucam, Paris, 1896, p. 473; Stapfer, La Palestine au temps de N.- S., Paris, 1885, p. 219. Les Juifs appelaient du nom de «chiens» lesidolâtres, de même que plus tard les musulmans appelèrentgiaours les chrétiens. Cette injure date de loin.Goliath disait à David: «Tu me prends donc pour unchien?» I Reg., xvii, 43. Abner se plaint qu’on letraite cemme une «tête de chien», c’est-à-dire commece qu’il y a de plus méprisable. II Reg., iii, 8. Abisaïappelle Séméï «chien mort», II Reg., xvi, 9, ce qui estmoins que rien. Quand Salomon dit que «chien vivantvaut mieux que lion mort», Eccle., ix, 4, il oppose leplus abject des animaux au plus noble. Quelquefois, dansles formules hyperboliques familières aux Orientaux, Gesenius, Thésaurus, p. 685, on prenait soi-même parhumilité le nom de chien, IV Reg., viii, 13, et même dechien mort. I Reg., xxiv, 15; Il Reg., ix, 8. — 4° Lechien, animal impur. Chez les Hébreux, le chien étaitregardé comme le type de l’impudence et de l’obscénité.On donnait au débauché le nom de kéléb, et la loi défendaitde recevoir son offrande dans le temple. Deut., xxui, 18.Cf. t. i, col. 1187, sur les «chiens» d’Astarthé. Le textede l’Ecclésiastique, xiii, 22, où il est dit en grec: «Quellepaix entre l’hyène et le chien?» est traduit parlaVulgatede cette autre manière: «Quel accord entre l’hommesaint et le chien?» Notre-Seigneur défend de donner leschoses saintes aux chiens, c’est-à-dire aux impurs.Matth., vii, 6. Saint Paul, Phil., iii, 2, et saint Jean, Apoc, xxii, 15, emploient le nom de l’animal daus le
même sens.
H. Lesêtre.
CHIFFRES. Voir Nombres.
- CHIHOR##
CHIHOR, mot hébreu qui s’écrit de trois manières, l’uvar, ninir et "ihtf, sihôr et Sihôr, et qui signifie «noir», mais qui est employé comme nom propre. — 1° Pourdésigner le Nil, à cause de ses eaux bourbeuses et de laterre noire qu’il dépose au moment de l’inondation, lorsque, comme le dit Virgile, viridem Aïgyptum nigrafecundat arena. Georg., iv, 291. Is., xxiii, 3; Jer., ii, 18.Dans le premier passage, la Vulgate traduit Cliihôr par «Nil», et dans le second par «[eau] trouble», au lieude traduire par «[eau] du Nil». Voir Nil.
2° Dans deux passages, Jos., xiii, 3, et I Par., xiii, 5, l’hébreu emploie les mots èihôr’âsér’alpenê Misraïm, «le Chihor qui est devant l’Egypte», et Sihôr Mi$raïm T 703
CHlHÔR — CHINOISES (VERSIONS) DE LA BIBLE
704 «le Chihor d’Egypte,» pour marquer la frontière méridionalede la Palestine. La Vulgate traduit, Jos., xiii, 3, par fluvio turbido gui irrigat JEgyptum, «le fleuve auxeaux troubles qui arrose l’Egypte,» et I Par., xiii, 5, parSihor. D’après la version du premier passage, saint Jérômea cru qu’il s’agissait du Nil, et plusieurs interprètessont de cet avis, par exemple, Gesenius, Thésaurus, p. 1393. Cependant, comme le Nil n’est pas «devantl’Egypte», mais au milieu même de l’Egypte, et que cefleuve n’était pas la limite de la Palestine, d’autres commentateurscroient avec plus de vraisemblance que Chihorsignifie dans Josué et les Paralipomènes «le torrentd’Egypte», l’ancien Rhinocolure, aujourd’hui ouadi el-Arisch, appelé ordinairement dans l’Écriture nahal Misravni, «ruisseau ou torrent d’Egypte, s et fixant l’extrêmefrontière méridionale de la Terre Promise, Num., xxxiv, 5; Jos., xv, 47; III Reg., viii, 65, etc. Voir Sihor 2 et Torrentd’Egypte.
3° Un autre Chihor est nommé Jos., xix, 26, et il estdistingué du Chihor d’Egypte par l’addition du nom deLibenath ou Libnah. La Vulgate l’a transcrit sous laforme Sihor et l’a séparé de Libnah, prenant ces deuxmots pour les noms de deux villes, Sihor et Lebanath.Le Chihor Lebanatli est d’après les uns le Bélus, aujourd’huiNahr Naaman, du sable duquel les Phéniciensfabriquèrent d’abord le verre; d’après d’autres, un coursd’eau au sud du Carmel, peut-être le Nahr Zerka. Voir
ISlHOR 1. F. VlGOUROUX.
- CHINOISES##
CHINOISES (VERSIONS) DE LA BIBLE. —
|1° Versions catholiques. — Il n’existe aucune éditionicomplète de la Bible en chinois, faite par les catholiques.’On dit qu’il aurait été fait une version des Écritures àune époque très reculée. Une inscription trouvée sur unmonument de la province de Shen-si, en 1625, relateraitqu’un missionnaire chrétien du nom d’Olopen, arrivé enChine en 637 après J.-C, aurait obtenu de l’empereurde faire traduire les Livres Saints. À supposer que le faitfut vrai, on ne sait si la chose fut exécutée; toujoursest-il qu’il ne reste pas trace de cette version. Pourl’Ancien Testament, il n’existe qu’une version du décaloguemosaïque, dont l’auteur est le P. Fr. Brancato, sicilien, mort exilé à Quang-heu, en 1671. Le P. EmmanuelDiaz, portugais, mort en 1659, composa aussi unetraduction semblable des dix commandements. Cataloguscodicum manuscriptorum Bibliothecx regiee, in-f°, Paris, 1739, t. i, p. 389, n™ xxxvi et xxxvii. Pour le NouveauTestament, les essais ont été plus nombreux et plus Complets.En 1548, à (ioa, un chrétien japonais, Anger, appelé ensuite Paul de la Sainte -Foi, traduisit l’Évangilede saint Matthieu en entier sur le texte de la Vulgate. —On trouve aussi des extraits de l’Évangile traduits enchinois dans un ouvrage intitulé Mémoires et notice duSeigneur, en douze fascicules, dont quatre (5 à 8) sontà la Bibliothèque Nationale. Ce livre est différent d’unouvrage représentant en figures Les actions et les miraclesdu Christ avec une courte explication, composé par lesmissionnaires jésuites. En 1740, le P. de Mailla, S. J., publia le Ching kïng kouang i, ou selon la transcriptionadoptée par la librairie des Missions, Chèn kïnkouàng ï, «Explication des évangiles des dimanches etdes principales fêtes de l’année;» il est encore en usage.
— Le British Muséum possède un manuscrit contenantla vie de Notre -Seigneur tirée des Évangiles, suiviedes Actes des Apôtres et des Épitres de saint Paul (saufcelle aux Hébreux, dont il n’y a que le premier chapitre, interrompue peut-être par la mort du traducteur).C’est l’œuvre d’un missionnaire catholique ou d’un Chinoisconverti. M. Hodgson avait fait faire cette copie surl’original, à Canton, en 1737-1738, et l’offrit, en 1739, à sir Hans Sloane, qui le donna au British Muséum. C’estun manuscrit in-f° de 375 feuilles (750 pages notées enchiffres arabes), d’une très belle exécution. Les 107 premières feuilles sont en papier européen épais, le resteest en papier de Chine très fin et, selon l’usage, plié endeux. On signale un Nouveau Testament traduit parJ. Basset, en 7 vol. in-8°, à la bibliothèque de la congrégationde la Propagande, d’après le catalogue des livresde cette congrégation par Andréas Candela. En 1867parut un Nouveau Testament intitulé: Ngotang kiu schetchu Yesu sin wei tchao chu. Nostri Salvatoris DominiJesu Novi Testamenti liber, 4 in-8°; et, en 1871, un Évangile selon saint Luc, texte chinois avec traductioninterlinéaire, par Hamelin, in-8°, Rennes. Dernièrement, en 1892, la librairie de Nazareth, que les Missionsétrangères possèdent à Hong-Kong, a édité Se chè chénKïn i tchoû (Ssé szë ching Kïng ï tchû), Traduction desquatre Évangiles avec des notes par J. Dejean, missionnaireapostolique du Kouang-tong. La même librairie apublié également un abrégé d’histoire sainte. Cf. Ch. Th. deMurr, Diatribe de sinicis SS. Bibliorum versionibus, publié à la suite de Ign. Kœgler, Notitise SS. Bibliorumjudxorum in imperio sinensi, in-8°, 2e édit, Halle, 1805.2° Versions protestantes. — En 1806-1807, DavidBrown, prévôt du collège de Fort -William, fit traduiresaint Matthieu par un chrétien arménien né en Chine, Jean Lassar: on l’imprima à la façon chinoise, c’est-à-direavec planches de bois sur papier plié double.J. Marshman, orientaliste et fondateur de l’établissementdes missionnaires baptistes à Serampore, mort à Cantonen 1834, continua l’œuvre, aidé du même J. Lassar. En1811, il publia saint Marc, imprimé d’abord à la façonchinoise, avec planches en bois, sur 56 feuilles ou doublespages format in-8°; puis avec les types de métal fonduspour l’imprimerie de la mission à Serampore. Abel Rémusaten a fait la critique sévère, mais juste: Noticed’une version chinoise de l’Évangile de saint Marc, publiée par les missionnaires anglais du Bengale, dansle Moniteur universel du 9 novembre 1812. Les autreslivres du Nouveau Testament parurent successivement, de 1813 à 1822. La traduction complète de l’Ancien etdu Nouveau Testament fut achevée en 1822: Bible inChinese translated by J. Lassar and J. Marshman, 5 part.in-8°, Serampore, 1815-1822. — Une autre version futfaite par le D r Morrison; il’s’aida pour le Nouveau Testamentdu manuscrit d’Hodgson, conservé au BritishMuséum, et donna deux éditions du Nouveau Testament: une petite in-12, et une autre in-4°, en caractères cursifsassez élégants. Il termina en 1823, avec l’aide de Milne, la traduction de l’Ancien Testament. La Bible entière, imprimée au collège anglo - chinois de Malacca, en 1823, parut sous le titre Les Livres Saints du ciel spirituel, traduction de la Bible en chinois par Morrison et Milne, 21 cahiers in-12, sur papier de Chine; une nouvelleédition fut donnée en 1834. La version de Seramporeest la plus littérale; celle de Canton plus conforme augoût des Chinois: l’une et l’autre sans notes ni explicationhistorique ou géographique. — Ces versions sontdéfectueuses. Aussi les missionnaires protestants réunisà Hong-Kong, en 1843, émirent-ils le vœu d’une nouvelletraduction. Ils choisirent un certain nombre d’entreeux, qu’ils déléguèrent à cet effet. L’œuvre fut commencéeen 1847; le Nouveau Testament était traduiten 1850, et l’Ancien Testament en 1855: Bible in Chinese, 4 in-8°, Shanghaï et Hong-Kong, 1855, édition tiréeà cinquante mille exemplaires. C’est la version adoptéemaintenant dans les missions protestantes. Une belle éditionde la Bible entière, Ku sin yo ching chu, VeterisNovi Testamenti sanctus liber, fut publiée à Shanghaï, 5 in-8°, 1873, sur papier blanc. Un Nouveau Testament, Sin yo tsiuen chu, Livre complet du Nouveau Testament, a également été édité in-18 carré, sans date. —Enfin, en 1875, parut à Pékin: Old Testament in theMandarin colloquial, in-8°, traduit par Schereschevvsky.Toutes ces versions sont imparfaites: c’est un chinoiseuropéanisé, en général peu correct.
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: n 705 CHINOISES (VERSIONS) DE LA BIBLE — CHISIANUS (CODEX)
Voir J. Darling, Cyclopœdia bibiiographira, 1859, t. ii, Chinese versions of tha Bible, col. 75; The Bible ofevcry Land, in-4o, Londres, Bagster, 1860, p. 5-6; dans Chinese repository, t. iv, octobre 1835, p. 249-261; E. C. Bridgman, Chinese version of the Bible; manuscriptin the British Muséum; one version undertakenin Bengal and another in China, xvith brief noticesof tlie means and measures employée! to publish theScriptures in Chinese previous to A. D., 1830, et dansle t. iv, janvier 1836, p. 393-398; cf. Gùtzlaff, Revisionof the Chinese version of the Bible; necessity of thework, wit/i suggestions respecting the manners in ichichitought to be accomplished; Abel Rémusat, .Sur les traductionsde ta Bible en langue chinoise, dans ses Mélangesasiatiques, in-8o, Paris, 1825, t. i, p. 1-27; H. Cordier, Bibliotheca sinica, in-8o, Paris, 1881, t. i, p. 595.
E. Levesque.
CHIO (grec: Xioz; Vulgate: Chius). L’île de Chio(fig. 269) est mentionnée dans les Actes des Apôtres,
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260. — Monnaie de Chio.
Sphinx assis à gauche: devant, une grappe île raisin.
— É, . AEl’Xl’AO^ XIOX, amphore et corne d’abondance.
xx, 15. En allant d’Alexandrie de Troade à Milet, saintPaul passa par Mitylène; la nuit suivante, le navire quile portait jeta l’ancre en face de Chio, puis le lendemainarriva à Samos. Chio est une des iles de l’archipel silureà l’ouest du golfe de Smyrne, en l’ace de la presqu’îled’Erythrée ou de Karabotitoun. Le liras de mer qui séparela presqu’île de l’île a dix-huit kilomètres dans sa plusgrande largeur. Au nord du détroit se trouve un certainnombre de petites iles rocheuses. L’île est oblongue etrecourbée. Sa plus grande dimension est de cinquante-cinqkilomètres, la largeur est d’environ vingt kilomètres.Le sol est l’orme d’un fond de marbre sur lequel est unecouche peu épaisse de terre végétale. Le climat est douxet salubre. La parlie nord est montagneuse et la partiesud plus basse. Les vins de Chio étaient renommés dansl’antiquité et le sont encore aujourd’hui. Pline, II. iV., xiv, 7. Les habitants prétendaient même avoir connu lespremiers l’art de cultiver la vigne et de faire le vin. Athénée, Deipnosoph., i, p. 26 b. Pline signale égalementparmi les produits de Chio la gomme mastic, encore aujourd’huiun des principaux produits de l’île. Pline, H. N., xii, 17.
Au temps de saint Paul, l’île de Chio appartenait à laprovince d’Asie, mais elle jouissait du privilège de l’autonomie, à cause de sa fidélité à l’égard des Romainspendant la guerre contre Milhridate. Pline, II. N., v. 136; Corpus Inscriptionum grxcarum, n» 2222. Les habitantsde l’île de Chio sont de très habiles agriculteurs et réussissentadmirablement dans le commerce. Les autresGrecs prétendent qu’ils descendent d’une colonie juiveou phénicienne, lis ont, en effet, quelque chose du typesémitique, surtout les femmes. Comme les Juifs, ils semarient entre eux, et les relations commerciales sonlfacilitées par ces liens de parenté. Xous n’avons aucunepreuve directe de l’origine juive des Chiotes; mais il est: remarquable qu’lférode le Grand, qui aimait à protégerles Juifs dispersés dans le monde, se montra d’une particulièrebienveillance envers les habitants de Chio. Dans! un voyage qu’il fit pour rencontrer Agrippa, l’ami d’Auguste, à I.esbos, il fut obligé par le vent du nord de |
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s’arrêter à Chio. Il fit de riches présents à l’île, et fitrelever à ses frais un splendide portique détruit peudant la guerre de Mithridate. Josèphe, Ant.jud., XVI, 11! 2 - — v oir Fustel de Coulanges, Mémoire sur Vile deChio, dans les Archives des missions scientifiques, t. v1856, p. 481-642; D’A. Testevuide, L’île de Chio, dansle Tour du monde, t. xxxvi, 1878, p. 337-368.
E. Beurlier.
CHION. On transcrit souvent de cette manière lenom qui est écrit dans Amos, v, 26, r->r, Kîôn, et quidésigne une divinité, d’après beaucoup de commentateursmodernes. Voir Kion.
CHIQUITILLA. Voir Gikatilia Moïse.
- CHIRINO DE SALAZAR Ferdinand##
CHIRINO DE SALAZAR Ferdinand, jésuite espagnol, né à Cuenca (Espagne) en 1576, mort à Madrid le’t octobre 1616. Il entra chez les Jésuites en 1592, enseignadouze ans l’Écriture Sainte à Murcie, à Alcala et àMadrid, fut qualificateur du Saint-Office, prédicateur d; Lroi Philippe IV, confesseur du comte d’Olivarès. Il refusaénergiquement l’évêché de Malaga et l’archevêché deCharcas (Pérou), que le roi voulut le contraindre d’accepter.On a de lui: 1o Expositio in Proverbia Salomonis, 2 in-f», Alcala, 1618; Paris, 1619-1621, 1625-1626; Cologne, 1621-1622; Lyon, 1636-1637. Cornélius a Lapidedit au sujet dé cet ouvrage: «Post omnes et pra? omnibusfusé et eruditè (scripsit) noster F. a Salazar, quimultam non solum sacram, sed et profanam eruditionemroutine! , ac liberalius ad conceptus élégantes et moralesetiam a gentilibus petitos digreditur.» — 2o Canticumcanticorum Salomonis, allegovico sensu, et propheticamystira, hypermistica expositionc produclum, in-f°, Lyon, 1042. C. Sommkiîvogel.
- CHISIANUS##
CHISIANUS (CODEX). Ce manuscrit grec appartientà la bibliothèque du palais Chigi, à Homo, où il estcoté lî. vii, 45. Voir le fac-similé, tig. 270, contenantDan., xii, 7-13 et la souscription. L’écriture est cursiveet d’une main du XIe siècle, et non du IX», comme onl’a quelquefois dit par suite d’une faute de déchiffrementrelevée par Mabillon le premier. M. Swete croit y reconnaîtrela main d’un calligraplie calabrais, conjecturequi ne paraît pas fondée. C’est un volume de 102 feuilletsgrand formai. Il contient Jérémir, Barneh, les Lamentations, l’épilre de Jérémie, Daniel selon les Septante, une parlie du commentaire dllippolyte sur Daniel, Daniel selon Théodolion, Ezéchiel, lsaïe. — Dans uninventaire dressé en 1706 des manuscrits grecs de lacollection Chigi, et dont on trouvera le texte dans len» lvi, 9 (fol. 109), des Archives Vaticanes, notre manuscritporte le n° 6 et est intitulé «Prophétie inaioresex exaplis Originis» [sic). Nous ne pensons pas que leChisianus soit arrivé à Rome avant le XVIIe siècle, leséditeurs de l’édition sixtine des Septante (1586) ne l’ayantpas connu, ou du moins pas utilisé. Voir notre livre, La Vaticane de Paul III à Paul V, Paris, 1890, p. 87-91.Mais dès le temps du pape Alexandre Vil (1055-1667), qui était de la famille Chigi, Allatius en parle commed’un manuscrit appartenant au pape personnellement, «le manuscrit de NotreSeigneur.» Allatius désiraitl’imprimer, y voyant le pur texte des Septante, tel qu’ilavait figuré dans les Hexaples, et sans les mélanges deleçons que les copistes, qui ont travaillé d’après les Hexaples, y ont, disait-il, arbitrairement et maladroitementintroduites; l’édition devait être imprimée à Paris.Le projet d’Allatius ne fut pas réalisé par lui, non plusque par Bianchini, qui se l’était aussi proposé. Ce futSimon de Magistris qui l’exécuta: Daniel secundumSepluaginta ex letraplis Origenis, Rome, 1772. Cetteédition a été réproduite plusieurs fois, Gœttingue, 1773; Utrecht, 1775; Leipzig, 1844; finalement par Migne, Patr.gr., t. xvi, col. 2767-2906. Dans l’édition de 1772,
II. —’23
707
- CHISIANUS##
CHISIANUS (CODEX) — CHLOÉ
708
on trouve le Daniel des Septante et le Daniel de Théodotion, tels que les contient le Chisianus, plus le texte ducommentaire d’Hippolyte: malheureusement cette reproductionde textes manque de la littéralité scrupuleusequ’on y voudrait trouver. De nos jours on a réédité leDaniel des Septante: Cozza, Daniel secundum LXXinterprètes ex unico Codice Chisiano, Rome, 1877.
il suffit de jeter les yeux sur l’édition de M. Swete, quia imprimé en regard le texte de Daniel, plus Susanne, Bel et le Dragon, à gauche selon les Septante, à droiteselon Théodotion, pour se rendre compte des divergencesdes deux versions, et de l’intérêt qu’il y a à posséderle pur texte des Septante: c’est le service que nousrend le Chisianus, alors que des manuscrits commele Vaticanus, le Marchalianus, V Alexandrinus, ne donnentque Théodotion, suivant un usage consacré déjà autemps de S. Jérôme. Prol. in Dan. t. xxv, col. 493. Deplus, le texte des Septante donné par le Chisianus a deschances d’être un texte de très bon aloi et représentantbien celui que lisait Origène et qu’il a inséré dans sesHexaples. Il s’accorde, en effet, avec le texte syriaquedu Codex SyroHexaplaris Arnbrosianus, lequel estune version littérale des Septante de l’édition hexaplairo, version exécutée, en G16, par Paul Telia. Comme letexte de V Arnbrosianus, le texte du Chisianus porteles obèles et les astérisques, c’est-à-dire les signes critiques, mis par Origène à son texte des Septante. Etentiji le Chisianus, comme Y Arnbrosianus, porte à ladernière ligne de Daniel la souscription suivante, en majusculesgrecques: Écrit d’après un exemplaire quiportait cette annotation: Écrit d’après les tétraples etcollalionné sur eux. — Voir H. B. Swete, The old Testamentin Greek, t. iii, 1894, p. xii. P. Batiffol.
- CHISKIA##
CHISKIA, ou plus exactement Hizqiyyàh ben Manôah, rabbin français, qui composa, vers 1240 ou 1260, un commentairelittéral et cabalistique sur le Pentateuque, intituléHazzeqûni. De là le nom sous lequel l’auteur lui-mêmeest vulgairement connu. Ce commentaire, souventcité, n’est en somme qu’une large compilation d’unevingtaine de commentaires antérieurs, surtout de Raschi.In f», Venise, 1524; in-4o, Crémone, 1559; in-f°, Bâle, 1606, et dans la Bible rabbinique de M. Frankfurter, in-f°, Amsterdam, 1724-1727. Voir Histoire littéraire de laFrance, t. xxvii, 1877, p. 436. E. Levesque.
- CHLAMYDE##
CHLAMYDE (grec: x>. «[i-jç; Vulgate: chlamys).1o Le mot «chlamyde» est employé par les Septante etpar la Vulgate, I Reg., xxiv, 5, 6, 12, pour désigner lemanteau militaire de Saùl; mais ce manteau n’avait pasla même forme que la chlamyde des Grecs et des Romains.Voir Manteau.
2o Dans l’Évangile de saint Matthieu, xxvii, 28, 31, lachlamyde est le manteau militaire des Romains. Les soldatschargés de garder Notre -Seigneur dans le prétoirede Pilate, après l’avoir dépouillé de ses vêtements, placèrentsur ses épaules une chlamyde de pourpre, commeinsigne de sa royauté, qu’ils tournaient en dérision. —. La chlamyde est un manteau d’origine thessalienneou macédonienne. Pollux, Onomasticon, ii, 46; x, 121.D’après Plutarque, Alexandre, 26, c’était une pièce d’étofferectangulaire dont l’un des côtés était arrondi. Pline, H. N., v, 101, ajoute que le côté arrondi formait deuxpans, qui tombaient à droite et à gauche; on appelaitces pans des «ailes thessaliennes», Hesychius et Suidas, au mot ŒrraXixa: ’jmpvye; . Les représentations de la chlamydequi se trouvent sur les vases peints nous montrentl’exactitude de cette comparaison. Museo etrusco gregor., t. ii, pi. lix; cf. Daremberg et Saglio, Dictionnaire desantiquités grecques et romaines, t. i, fig. 1417, p. 1115.La chlamyde fut adoptée par lous les Grecs, qui en firentleur manteau à la guerre, à la chasse et en voyage.Athénée, Deipnosoph., vi, 37, p. 240 c. Pollux, Onomasticon, x, 146. Tantôt ils s’en enveloppaient le haut ducorps et les bras; tantôt ils la portaient attachée autourdu cou par une agrafe. La facilité avec laquelle la chlamydeglissait sur les épaules la rendait commode pourtous les mouvements. Au besoin les Grecs s’en enveloppaientle bras gauche pour se défendre, tandis qu’ilsbrandissaient la lance ou l’épieu de la main droite. Mionnet, Description des monnaies grecques, t. i, p. 578, 830, etc.; Xénophon, Cyneget., VI, 17. — 2. La chlamydefut adoptée par les Romains (fig. 271), qui imitèrentles mœurs grecques; mais l’opinion publique blâma
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271. — Chlamyde.
Statue de l’empereur Claude. Musée du Louvre.
ceux qui portaient ce manteau au lieu de la toge dans lavie civile. Cicéron, Pro Rabirio, x, 27; Valère Maxime, m, 2. Les auteurs grecs, désignent sous le nom de chlamydele manteau militaire des Romains appelé en latinsagum ou paludamentum parce que ce manteau avaità peu près la forme de leur chlamyde. Dion Cassius, lix, 17; lx, 17; lxv, 5, 16, etc. De là ce mot est passédans la langue latine avec le même sens. Plaute, Milesrjloriosus, v, 4, 30; Lampride, Alexandr. Serer., 40; Tacite, Hist., ii, 89; Cod. Theodos., xiv, 10. C’est unde ces manteaux militaires que les soldats placèrent surles épaules de Notre -Seigneur. La couleur de pourpreétait celle du manteau impérial ou royal. Il est probableque les soldats fabriquèrent grossièrement cette chlamydeavec un morceau d’étoffe rouge, car ils ne devaientpas avoir de chlamyde de pourpre à leur disposition.
E. Beurlier.
- CHLOÉ##
CHLOÉ (XXôyj, «herbe verte» ), nom d’une chrétienne.Ce fut par «ceux de la maison de Chloé», c’est-à-direpar ses esclaves ou ses affranchis (cf. Rom., xvi, 10, 11), que saint Paul fut averti des divisions qui s’étaient introduitesdans l’Église de Corinthe, comme nous l’apprendl’Apôtre. I Cor., i, 11. On ne sait absolument rien surelle. On ignore même si elle demeurait à Corinthe ou àÉphèse. La première Épître aux Corinthiens fut écriteà Ephèse. On peut également supposer, comme l’a faitThéophylacte, que Chloé habitait Corinthe, et que quelques-unsde ses gens étaient allés à Éphèse, ou bien qu’elledemeurait à Éphèse et que ses gens y rapportèrent desnouvelles de Corinthe au retour d’un voyage dans cettedernière ville. Voir Alford, The Greek Testament, éditionde 1894, t. ii, p. 476. Certains écrivains, comme saintAmbroise, ont cru à tort que Chloé pouvait être un nomde lieu.
709
CHOAGH — GHODCHOD
710
CHOACH. C’est ainsi qu’on transcrit quelquefois lemot hébreu mn, Ijiôali, qui désigne le chardon. VoirChardon.
- CHOBAR##
CHOBAR (hébreu: Kebdr; Septante: Xo6âp), nomd’un cours d’eau, rivière ou canal de la Chaldée, sur lesrives duquel les Hébreux furent transplantés par Nabuchodonosor; c’est là également qu’Ezéchiel eut ses premièresvisions. Ezech., i, 3; iii, "15; x, 15. Il ne faut pasle confondre avec le Habor mentionné dans IV Reg., xvii, 6; xviii, 11, où furent déportés une partie descaptifs d’Israël sous Osée. On a cru longtemps que c’étaitle Xaêwpa; ou’Aêôppaç des anciens, le Khabour actuel, affluent gauche de l’Euphrate, à la hauteur de Circésium.Rosenmùller, Scholia in Vet. Test., Ezechiel, t. i, p. 54; Keil, Ezechiel, Leipzig, 1868, p. 12; Hitzig, Ezechiel, Leipzig, 1847, p. 4; Calmet, Commentaire littéral, Ezechielet Daniel, in-4o, Paris, 1715, p. 2. Mais le nom de Haboras, en assyrien IJa-bur, ne pourrait pas se transcrire Kebaren hébreu; il exigerait un n (heth) et non un 3 (caph)comme initiale; de plus ce fleuve arrose la partie septentrionalede la Mésopotamie, tandis que l’expressionbiblique «la terre des Chaldéens» en indique toujoursla partie méridionale. Voir Chaldée. — Saint Jérôme supposeque Chobar peut être un adjectif signifiant «fort, puissant» (voir kabbir, dans Isaïe, xvii, 12; xxviii, 2), etdésignerait le Tigre ou l’Euphrate. Comment, in Ezech.prophet., t. xxv, col. 18. Mais Kebar en hébreu n’estjamais employé dans le sens de «puissant». Si l’Euphrateest désigné par le mot «fleuve», Nahar, c’est sans épithète; enfin le contexte d’Ézéchiel paraît bien indiquerun nom propre: c’est pourquoi les commentateurs n’ontpas généralement suivi saint Jérôme. — Comme la Babyloniene renferme pas d’autre fleuve que le Tigre etl’Euphrate, le Chobar désigne évidemment soit l’un desbras du bas Euphrate, soit l’un des canaux multiples quiarrosaient la Chaldée et qui portaient également le nomde nahar ou fleuve. On a même supposé qu’il n’étaitautre que le Nahar Malcha, le canal royal, le principald’entre eux. Pline dit qu’il fut creusé par un architectedu nom de Chobar ou Gobaris, H. N., 1. vi, c. xxx, édit. Lemaire, Paris, 1828, t. ii, p. 689. Cf. S. Bochart, Phaleg, Francfort, 1681, p. 38-39; G. Rawlinson, Theflve great monarchies, Londres, 1879, t. iii, p. 56. Cependantaucun texte babylonien ne nous permet de croireque le nom de l’architecte fût jamais donné au canallui-même: le Chobar, s’appelait en assyrien Kabaru, d’après les découvertes des archéologues américains.Il était situé dans le voisinage de la ville de Nippour «n Babylonie, Palestine Exploration Fund, Quarterlystatement, 1898, p. 55. Voir Habor, 30, t. iii, col. 386.
E. Pannier.
CHODCHOD. Hébreu: kadekôd, Is., liv, 12, olkadkôd, Ezech., xxvii, 16; Septante: ïzamq, Is., liv, 12, et %op-/4p, Ezech., xxvii, 16; Vulgate: jaspis, Is., liv, 12, et chodchod, Ezech., xxvii, 16.
I. Description. — Le rubis oriental est un corindonhyalin d’un beau rouge cramoisi (fig. 272). C’est un composéd’alumine presque pure, colorée par l’oxyde de fer. Sapesanteur spécifique est 4, 283; sa dureté n’est surpasséeque par celle du diamant. Ces qualités, jointes à sa transparence, à son poli et à son velouté, lui donnent lesecond rang parmi les pierres précieuses. Il vient immédiatementaprès le diamant, qu’il dépasse parfois danscertaines conditions exceptionnelles. Il supporte parfaitementl’action du feu sans altération, et même sa couleury gagne en vivacité et en limpidité. Les plus beauxrubis viennent de l’île de Ceylan, de l’Inde et de la Chine.On donne aussi le nom de rubis à des pierres pluscommunes, moins riches en alumine, d’une moindrevaleur, qui sont des variétés du genre spinelle, commeJe rubis oriental est une variété particulière de corindon.
C’est le rubis spinelle, qui tire sur le rouge ponceau, etle rubis balais (altération de Balakschan, nom du lieuqui le fournissait), d’un rouge clair ou rouge groseille.Ch. Barbot, Guide pratique du joaillier, ou Traité despierres précieuses, 4e édit., in-12, Paris, 1888, p. 306-310.IL Exégèse. — Isaïe, liv, 12, annonçant la reconstructionde la nouvelle Jérusalem en pierres précieuses, dit au nom de Dieu: «Je ferai tes créneaux en kadkod;» ce que les Septante, suivis par la Vulgate, ont rendu par «jaspe». Le même mot ne se représente que dans Ezechiel, xxvii, 16, où le prophète nous montre le Syrienexposant sur le marché de Tyr le kadkod avec les perles, la pourpre, le corail, etc. Dans ce dernier passage, lestraducteurs grecs, par ignorance sans doule du sens, transcrivent simplement le mot du texte hébreu, mais
272.
Rubis oriental.
en lisant deux resch, ~a~o, au lieu de deux daleth, 1213: -/op-/ôp. La Vulgate se contente également de transcrirele mot, mais on lisant, comme dans le texte hébreuactuel, deux daleth: chodchod. «Ce que signifie chodchod, je n’ai pu le trouver jusqu’à présent,» dit saintJérôme, Comment, in Ezechielem, 1. viii, c. xxvii, 16, t. xxv, col. 255. Cependant dans Isaïe, liv, 12, il avaittraduit par jaspe; il est vrai qu’en cela, selon son aveu, il ne fit que suivre les Septante. Comment, in Isaiam, t. xxiv, col. 521. Mais cette traduction est inexacte: lejaspe a son nom bien connu en hébreu. Selon l’opiniondominante des exégètes, le kadkod doit s’entendre durubis, que la Bible ne mentionnerait nulle part, s’il n’enest pas question ici. Si l’on rapproche kadkod de kîdod, «étincelle,» Job, xli, 11 (de V3, kîd, «jeter des feux» ),
nous sommes amenés à y voir une pierre brillante. De
plus, le mot arabe &j*Sj£, kadzkadzat, désigne le rougevif. Il est à remarquer que le Targum de Jérusalem rendpar «313-3, kadkedânâ’, le mot red/’efcdeExod., xxviii, 18,
qui signifie «escarboucle», pierre qui par sa couleur rougea de l’analogie avec le rubis. Symmaque traduit kadkôdou plutôt karkod (comme il semble avoir lii, et commeportent encore quelques manuscrits) par -/apyijSâvio; : ce qui n’est pas la calcédoine, mais bien le carbunculuscarchedonius de Pline, H. N., xxxvii, 25. Or ce carbunculuscarchedonius, par son nom spécifique, rappelle lekerkend, dont la traduction arabe d’Aristote dit: «Lekerkend ressemble à l’ynqout roujre (rubis oriental), mais il ne soutient pas comme lui l’action du feu.» Ceserait donc le rubis spinelle ou balais. Clément-Mullet, Essai sur la minéralogie arabe, in-8o, Paris, 1868, p. 54.Si l’on ne peut faire la preuve certaine, il y a donc desraisons de croire que le kadkod est le rubis, au moinsle rubis spinelle ou balais. À l’époque d’Isaïe et surtoutd’Ézéchiel, le rubis oriental, apporté de l’Inde ou de laChine, pouvait très bien être connu dans la Palestine etla Syrie. On sait que Babylone était le plus ancien et leplus important marché de pierres précieuses. Movers, Die Phônizier, t. ii, part. 3, Bonn, 1856, p. 266. Or il
est dit par le prophète, Ezech., xxvii, 16, qu’Aram, c’est-à-direle Syrien, apportait ces pierres précieuses sur lemarché de Tyr. Par Aram on peut très bien entendrela Syrie mésopotamienne. E. Levesque.
- CHODORLAHOMOR##
CHODORLAHOMOR (hébreu: Kedorlâ’ômér; Septante: XoSoMoyoïiép), roi des Élamites. Gen., xiv.Les inscriptions assyriennes nous font connaître l’existenced’une dynastie élamite de Koudourides, ainsi nommésà cause du premier élément, Kutir ou Kudur( forme babylonienne), du nom royal de plusieurs deces souverains élamites; ils
nous apprennent aussi que
l’Asie occidentale, y compris le pays de Chanaan,
fut conquise par ces princes.
— Assurbanipal, roi de Ninive, se vante d’avoir retrouvé et réintégré dans
son temple, vers l’an 650,
où il conquit l’Elam et pilla
Suse, sa capitale, la statue
de la déesse Nanâ, emportée du pays d’Akkad mille
six cent trentecinq ans
auparavant, par Kudur-nanhundi l’Élamite, «qui, confiant dans sa propre force,
avait étendu la main sur
tous les temples» de la
Chaldée. L’invasion de la
Babylonie par Kudur-Nan(mndi eut donc lieu vers
l’an 2285. Ce ne fut pas une
occupation passagère. Car
plus tard KudurMabug,
roi d’Élam, fils de l’Élamite
Simti-Silhak, prend dans
ses inscriptions le titre de
AD-DA MAR-TU, c’est-àdire «prince ( ou conquérant) du pays d’Occident»,
terme par lequel on désignait la Syrie et le pays de
Chanaan, ce roi élamite a
même laissé quelques monuments en Chaldée (fig. 273); ensuite son fils (É)-rim-Aku, roi de Larsa, qui est sans doute l’Arioch de la Genèse (voirArioch), a restauré un bon nombre de temples chaldéens, et cela, dit-il dans les inscriptions dédicatoires, «pour savie à lui, Éri-Aku, roi de Larsa, et pour la vie de Kudur-Mabug, prince d’Élam,» namtvmusu u namti Kudurniabugddda Imutbala. — Chodorlahomor est peut-êtreKudur -Mabug, roi d’Élam et suzerain de la dynastie élamitede la basse Chaldée, comme la Bible nous le représente.Gen., xiv, 4, 5, 17. Le premier élément de sonnom, Kudur, se retrouve dans d’autres noms royauxd’Élam; l’autre élément est le nom d’une divinité de cepays, Lagamar, invoquée dans une inscription du roiKudur-Nanhunti II, et dont la statue fut pillée par Assurbanipaldans la conquête de l’Élam ci-dessus rappelée: ce Lagamar est devenu La’omer dans la ponctuationmassorétique, et Aoyoy.6p dans les Septante.
La Genèse ne nous donne qu’un épisode de la dominationélamite; elle nous représente les populationspalestiniennes comme ayant supporté patiemment le jougétranger jusqu’à la treizième année de Chodorlahomor.Gen., xiv, 1-3. Une révolte, qui eut lieu la treizièmeannée de son règne, lui fit traverser le Tigre et l’Euphrate, et paraître en Palestine la quatorzième année, avec ses trois vassaux, Arioch de Larsa, Amraphel deSennaar et Thadal de Guti (Vulgate: rex gentium). Ilsuivit la route du haut Euphrate à cause du désert qui
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273. — Statuette canéphore
en bronze, portant une dédicace
de Kudur-Mabug à la déesse
ÏTana. Musée du Louvre.
sépare la Mésopotamie de la Palestine, et arriva par lenord, comme plus tard le firent encore les Assyriens etles Babyloniens. Il descendit à l’est du Jourdain, battantd’abord les Raphaïm à Astaroth - Carnaïm, à la hauteurdu lac de Génésareth, les Zuzim à Ham (ou bien «avecceux-là,» comme traduisent les Septante, le syriaque etla Vulgate, suivant une leçon hébraïque légèrement différentede la nôtre, bahém pour behâm), les Émirh à Savé-Cariathaïm, à la hauteur de la mer Morte. Les rois dela Pentapole (Sodome, Gomorrhe, Adamâ, Seboïm etBala-Ségor) les laissèrent passer jusqu’au sud de laPalestine, où ils battirent successivement dans le désertles Horréens et les Amalécites, puis remontèrent sur larive occidentale du Jourdain, et battirent les Amorrhéensà. Asasonthamar-Engaddi, à la hauteur de la mer Morte.C’est alors que les cinq rois les attaquèrent dans la valléede Siddim (Vulgate, Sylvestris), pleine de puits de bitume, et dont il reste encore une portion au sud de lamer Morte. Le roi d’Élam fut vainqueur, et les révoltés, ayant perdu deux de leurs chefs, se dispersèrent et seréfugièrent sur les hauteurs, ce qui permit à Chodorlahomorde piller le pays. Chargés de butin et d’esclaves,
— y compris la famille de Lot, — ils reprirent la route dunord en longeant le Jourdain. Arrivés à Dan, au nord dela Palestine, aux sources du Jourdain, ils furent pris àl’improviste et nuitamment par la troupe d’Abraham etcelle de ses alliés, les tribus chananéennes d’Aner, Escolet Mambré: n’étant plus sur leurs gardes, ils furent facilementdéfaits, leur campement fut pillé tandis qu’ilsprenaient la fuite, abandonnant butin et esclaves, dansla direction du gué de l’Euphrate. Abraham les poursuivitet les harcela jusqu’à Soba, à gauche, c’est-à-dire au nordde Damas. C’est en cet état que Chodorlahomor et sesalliés traversèrent la haute Mésopotamie, la Babylonie, pour rentrer en Chaldée et en Ëlam. Voir Amraphel, Arioch et Thadal. — Voir J. Oppert, Ueber Kedorlaomer, dans les Theologische Studien und Kritiken, 1871, p. 509-512; F. Vigoureux, La Bible et les découvertesmodernes, 6e édit., t. i, p. 481-504; Schrader-Whitehouse, The cuneiform Inscriptions and the Old Testament, 1885, t. i, p. 121-123; Lenormant-Babelon, Histoire anciennede l’Orient, t. iv, p. 91-97; et pour les textes allégués, Menant, Annales des rois d’Assyrie, p. 269; Babylone etla Chaldée, p. 53-56 et 108-110; Schrader, KeilinschriftlicheBibliothek, t. iii, part. i, p. 92-99; p. 110, inscr. c; p. 126, inscr. I; G. Smith, Records of the Past, l re série, Early history of Babylonia, t. iii, p. 19; v, p. 64-75; t. i, p. 90; History of Assurbanipal, 1871, p. 250-251; The cuneiform Inscriptions of Western Asia, t. i, pi. v, n. 16; n. 3; pi. IV, n. 15; t. iv, pi. 36 et b7 tn. 21; t. iii, ꝟ. 23, 1. 8; pi. 35, n. 1, reverse, 1. 8.
E. Pannier.
CHŒNIX, mesure grecque de capacité pour lessolides, x» ™?> l a seule mesure étrangère nommée dansle Nouveau Testament: «Un chœnix de blé se vend undenier,» dit saint Jean dans l’Apocalypse, VI, 6. La Vulgatetraduit chœnix par bilibris, «deux livres.» Sa contenanceétait de 1 litre 079, la 48e partie du médimneattique. On considérait le chœnix comme équivalant à laquantité de nourriture quotidienne nécessaire à un hommesobre. Athénée, Deipnosoph., iii, 54; Hérodote, vii, 187.Saint Jean, en disant qu’un chœnix de blé se vend undenier, marque par là une grande disette; car un denierétait le prix ordinaire du boisseau de blé, c’est-à-dire de8 litres 631 (voir Boisseau). Cicéron, Verr., iii, 81. Ledenier était en même temps le salaire d’une journéed’ouvrier, Matth., xx, 2, de sorte qu’un chœnix de bléabsorbait tout le gain d’une journée de travail.
F. Vigouroux.
CHŒROGRYLLE (hébreu: sâfân, du radical Sâfan, «cacher;» Septante: x «P°ïP’jM» >; , «porc-épic;» Vulgate: Lev., xi, 5; Deut, xiv, 7: chœrogryllus; Ps.ciii, 18: herinacius, «hérisson;» Prov., xxx, 26: lepusculus, «lièvre» ), nom grec du porc -épie conservé par saintJérôme dans sa traduction du Pentaleuque.
1° Identification. — La traduction que les versionsadoptent pour l’hébreu sâfân ne répond pas exactementaux données fournies par les textes bibliques dans lesquelsce mot se rencontre. Moïse proscrit le Sâfân del’alimentation comme étant un ruminant dont les piedsn’ont pas de corne fendue. Le porc -épie et le hérissonne présentent aucune apparence de rumination, et ils ontaux pieds, le premier quatre doigts, le second cinq doigtsdistincts et armés d’ongles. Le lièvre, que la Vulgate confondavec le Sâfân au livre des Proverbes, xxx, 26, réunitles conditions exigées, au moins quant aux apparences.Voir Lièvre. Mais cet animal ne peut être nommé deuxfois de suite avec des noms différents: sâfân au verset 5de Lev., xi, et’arnébét au verset 6. D’autre part, les textesdu Ps. cm (civ), 18, et de Prov., xxx, 26, marquent
274.
Le daman.
comme caractéristique du sâfân qu’il gîte dans les trousdes rochers; le porc -épie et le lièvre habitent, au contraire, dans des terriers, et le hérisson dans les premierstrous venus. Bochart, Hierozoicon, Leipzig, ’1873, t. ii, p. 409, et Piosenmùller, Scholia in Leviticum, Leipzig, 1798, p. 61, ont identifié le Sâfân avec la gerboise. Maiscet animal ne vit, lui aussi, que dans des terriers. Aujourd’huion admet généralement que le sâfân n’est autre quele daman, le thofun du sud de l’Arabie, le wabr du Sinaïet do la Palestine. C’est bien l’animal que saint Jérômeavait en vue, quand il écrivait, Ep. ad Suniarn et Fretellam, evi, 65, t. xxii, col. 861, que le sâfân n’est pasdu tout le porc-épic, comme l’ont cru les versions, maisun petit quadrupède à peu près de même taille, habitantdans les trous des rochers et les creux du sol, et connuen Palestine sous le nom d’àpy.ToV-’Si «ratours,» parcequ’il a quelque chose de ces deux animaux.
2° Histoire naturelle. — Le daman, l’hyrax des naturalistes, malgré sa taille et ses apparences qui le feraientprendre pour un rongeur, appartient zoologiquement àl’ordre des mammifères pachydermes jumentés et à lafamille des hyracidés, dans laquelle se range aussi le rhinocéros.On ne connaît que trois espèces de damans: l’une au sud de l’Afrique, l’Hyrax capensis; une autreen Abyssinie, l’.-lscWiôfcô, que les Arabes appellent «brebisdes fils d’Israël», et enfin une troisième en Syrie, l’Hyrax syriacus (fig. 274). Le daman ressemble extérieurementau lapin et à la marmotte. Il a la tête ronde, le museau obtus, les oreilles petites et la queue si courte, qu’on l’aperçoit à peine. Ses incisives ont la forme d’unciseau, absolument comme celles de l’hippopotame. Safourrure est épaisse, d’un brun fauve ou roussàtre, avecune tache oblongue de couleur plus claire sur le dos, etune teinte moins foncée sous le ventre. Le daman est bassur pattes. Il a quatre doigts à celles de devant et troisà celles de derrière, avec de petits ongles, mais point degriffes. Il se nourrit de fruits et d’herbages. L’animal vitordinairement en troupe. Il ne se creuse pas de terriers, mais habite dans les trous des rochers inaccessibles oudans les amas de pierres. C’est là qu’il fait son nid, qu’ilcache ses petits et qu’il se retire lui-même à la moindre
alarme. Cette habitude lui a valu son nom en hébreu, sâfân, «celui qui se cache.» Le psalmiste a donc raisonde dire, Ps. cm (crv), 18:
Aux chèvres sauvages les cimes des monts, Aux damans l’abri des rochers.
Le daman est incapable de se défendre; mais sa circonspectionest extrême. Au moindre danger, un petit cri estpoussé par celui qui a cru apercevoir l’ennemi, et toute labande s’enfuit et disparait en un clin d’œil. Aussi est-iltrès difficile de s’emparer de l’animal, malgré sa faiblesse.L’auteur des Proverbes, xxx, 24-28, dit du daman:
Il y a sur la terre quatre petits êtres, Que la sagesse a rendus fort sages.
Ce sont les fourmis, les sauterelles, les lézards et
Les damans, peuple faible,
Qui placent leur gîte dans les rochers.
Le daman est commun dans l’Arabie Pétrée, où il semontre aussi timide qu’une souris. Jullien, Sinaï et Syrie, Lille, 1893, p. 149. On le rencontre fréquemment en Palestine, surtout dans les gorges du Cédron, sur les coteauxrocheux à l’ouest de la mer Morte, dans les plaines d’Acreet de Phénicie, au nord de la Galilée et dans tout leLiban, Moïse a défendu de s’en nourrir. Lev., xi, 5; Deut., xiv, 7. Pourtant sa chair n’est pas désagréable, quoiqu’elleait moins de goût que celle du lièvre, et qu’ellesoit plus sèche et plus foncée en couleur. Les Arabes dumont Sinaï l’estiment; - mais les chrétiens d’Abyssinie etles Bédouins mahométans ne la mangent pas. Cf. Tristram, The natural history of the Bible, Londres, 1889, p. 75-77; Wood, Bible animais, Londres, 1884, p. 312-317.3° D’après Moïse. — Le législateur indique deux signesqui doivent faire reconnaître le Sâfân comme animal prohibé: ses pieds ne sont pas fendus et il rumine. Il estcertain que ce signalement n’a aucun caractère scientifique, et qu’il repose sur de simples apparences. Mais cesont précisément ces apparences qui seules pouvaientconstituer pour le peuple un signalement facile à reconnaître.Le daman a quatre doigts aux pattes de devant, ettrois aux pattes postérieures; mais ces doigts sont enfermésdans une gaine de peau et de poils qui ne permetpas de les apercevoir, et c’est à peine si l’on peut lesdistinguer de près par les petits ongles qui les terminent.Le daman n’est pas non plus un ruminant, bien queMoïse lui attribue ce caractère ainsi qu’au lièvre. Il fautobserver pourtant que le verbe hébreu gârar ne signifiepas nécessairement et toujours: ramener les aliments d’unpremier estomac dans la bouche pour les remâcher etles faire repasser dans trois autres estomacs successifs.Le mot gârar est une onomatopée qui désigne originairementle bruit que fait la scie, le racloir, les dents quifrottent l’une contre l’autre, la gorge qui se «gargarise».Il ne se rapporte donc qu’à l’acte extérieur de la rumination.Cf. Gesenius, Lexicon hebraicum, édit. Hoffmann, Leipzig, 1847, p. 203. Ce qui, pour les Hébreux, caractêtérisaitla rumination, n’était pas le passage invisible desaliments à travers quatre estomacs, mais le mouvementvisible des lèvres. Or ce mouvement, qui donne à croireque l’animal mâche sans cesse, existe chez le lièvre, chezle daman et chez beaucoup d’autres quadrupèdes. «Lemot hébreu veut simplement dire «remâcher», et n’impliquepas nécessairement la possession d’un estomacruminant. Mais le législateur parle d’après les apparences, et quand on observe le mouvement continuel desmâchoires du petit animal, comme si ses dénis élaient enperpétuelle activité, on ne peut manquer de reconnaîtrecombien l’expression est naturelle.» Tristram, The natural
history, p. 76.
H. Lesêtre.
CHŒUR (hébreu: maqhêlim, Ps. xxvi (xxv), 12, etmaqhêlôt, Ps. lxvhi (lxvij), 27, de qàhàl, «assemblée;» Septante: ἐκκλησίας; Vulgate: ecclesiæ; — huyyedôṭ, Il Esdr., xii, 8, et ṭôdâh, II Esdr., xii, 31, 39, de yâdâh, «rendre grâces,» Septante: οἱ περὶ αἰνέσεως; Vulgate: chori laudantium), ensemble de personnes réunies pour l’exécution d’un chant. Dans la plupart des cas où lesversions emploient le mot «chœur», χορός, chorus, ilest question d’autre chose en hébreu, surtout de danse, meholâh, Exod., xv, 20; xxxii, 19; Jud., xi, 34; xxi, 21, 23; I Reg., xviii, 6; xxi, 11; xxix, 5, ou mâḥôl, Ps. cxlix, 3; cl, 4; Jer., xxxi, 4, 13; Lam., v, 15. C’est aussi de danse et non de «chœur» qu’il s’agit probablement dans Judith, iii, 10, et saint Luc, xv, 25. Voir danse.Au livre des Juges, ix, 27, l’historien ne mentionne pas des chœurs, mais des hillûlim, «jours de fête» après la moisson. Les chœurs dont il est parlé II Reg., vi, 12, n’existent que dans les Septante, l’itala et la Vulgate. Les maqhêlîm et les maqhêlôṭ, nommés chacun une fois dans les Psaumes, ne sont autre chose que l’assemblée elle-même du peuple réuni pour chanter les louanges du Seigneur. Cf. t. i, col. 1129. Les mots huyyedôṭ et ṭôdâh, la «louange», mis pour la réunion de ceux qui louent, n’apparaissent avec cette acception qu’après la captivité.En somme, il n’existe pas en hébreu de terme spécialpour désigner un chœur de chant. Pourtant il est certainqu’il existait à Jérusalem des corps spéciaux de léviteschargés d’exécuter les chants liturgiques. David établitdes chanteurs dans ce but, IPar., vi, 31; ix, 33; Eccli., xlvii, 11, et les munit d’instruments pour accompagner les voix. I Par., xv, 16, 19, 27. Salomon institua aussi des chanteurs pour le service du Temple, II Par., v, 12, et leur fit fabriquer d’autres instruments. II Par., ix, 11.Ce prince avait même dans son palais un chœur profanede chanteurs et d’instrumentistes. Eccle., Il, 8; 1Il Reg., x, 12. Il est encore question des chœurs du Temple sous Josaphat, II Par., xx, 21; sous Ézéchias, II Par., xxix, 28, et sous Josias. II Par., xxxv, 15. Voir Chanteurs du Temple. Après la captivité, on mentionne avec soin les lévites chargés des chants liturgiques qui reviennent avec Zorobabel, I Esdr., ii, 41; Esdras, I Esdr., vii, 7, et Néhémie, H Esdr., vii, 1; x, 28; xi, 22; xii, 28, etc. Ce qui prouve qu’il y avait une organisation musicale nettement réglée depuis David, c’est que cinquante-trois psaumes et le cantique d’Habacuc, iii, 19 (hébreu), sont adresséslamnaṣêaḥ. Le menaṣêaḥ est le «préposé» au chant, le maître de chœur chargé de préparer et de diriger l’exécution des morceaux. Voir Chef des chanteurs. On ne sait rien sur la manière dont ces chœurs étaient organisés. — Dans le Cantique des cantiques, i, 4; ii, 7; iii, 5; v, 8, 16; viii, 4, apparaît de temps en temps un groupe de jeunes filles qui prennent la parole, et dont le rôle a une lointaine analogie avec celui du «chœur» dans les tragédies grecques. Il n’y a là, en tout cas, qu’un simple artifice de composition littéraire. Cf. col. 189.
H. Lesêtre.
CHOLÉRA, mot grec, x°^^P 1t (de y.olr, , «fiel, bile» ), employé deux fois dans l’Ecclésiastique, xxxi, 23; xxxvii, 33, et conservé dans notre version latine. Il signifie une colique ou dérangement d’entrailles qui provoque une évacuation de bile. Les Septante l’ont employé aussi, Num., xi, 20, pour exprimer «le dégoût et la nausée», zârà’, prélude du vomissement. Dans les deux passages de l’Ecclésiastique, l’auteur sacré dit que l’excès dans le manger produit des vomissements et des coliques, et engage à éviter l’intempérance.
CHOLHOZA (hébreu: Kol-I.iozéh, «tout voyant;» Septante: XolzU, II Esdr., iii, 15, et Xùx’i, IL Esdr., xi, 5), homme de la tribu de Juda, père de Sellum, qui vivait au temps de Néhémie. II Esdr., iii, 15. Il est dit père de Baruch et ancêtre de Maasia, lequel fut désigné par le sort pour habiter Jérusalem au temps de Néhémie.II Esdr., xi, 5. Il est possible que ce soit le même personnage qui est désigné dans ces deux endroits; mais le second Cholhoza, II Esdr., XI, 5, peut aussi être un ancêtre du premier. II Esdr., iii, 15.
E. Levesque.
CHOMER (hômêr), mesure hébraïque de capacité, que la Vulgate traduit ordinairement par corus. Voir Cor.
CHOMPRÉ Pierre, littérateur français, né à Marcy, près de Châlonssur -Marne, en 1698, mort le 18 juillet1760 à Paris, où il tenait une pension pour l’éducationdes jeunes gens. On doit à cet auteur un Dictionnaireabrégé de la Bible pour la connaissance des tableauxhistoriques tirés de la Bible et de Flavius Josèphe, in-12, Paris, 1755. Une seconde édition a paru à Paris, en 1806, in-8° et in-12. — Voir Qujrard, La France littéraire, t. ii, p. 195.
B. Heurtebize.
CHONÉNIAS (hébreu: Kenanyâhù, «celui que Jéhovahprotège,» et par abréviation: Kenanyâh, I Par., xv, 27; Septante: XmvevÎï et XwvEvt’a; , I Par., xv, 27), chef des lévites chargés de porter l’arche de Jéhovah.Quand David transporta l’arche de la maison d’Obédédom, ce fut Chonénias qurprésida à la translation. I Par., xv, 22, 27. Les Septante l’appellent ap-^wv-ctov ô>8wv, I Par., xv, 22, 27: ce que la Vulgate rend par prophétise prœerat, princeps prophétise. Le mot ntite, massa’, employé ici dans le texte original, désigne l’action de porter, Num., iv, 19, 27; II Par., xxxv, 3; il a aussi le sens de «prophétie, prophétie de menace», Is., xiii, 1, et xv, I; d’où les Septante ont dérivé à tort le sens de «chant». Mais ni le sens de prophétie ni celui de chantne s’adapte au contexte. Le premier, au contraire, convient très bien, puisqu’il s’agit du transport de l’arche.On peut donc traduire ce verset: Chonénias était chefdes lévites chargés de porter l’arche; il dirigeait le transport, car il savait tout ce qu’il y avait à faire pour cela. C. Fr. Keil, Chronik, in-8°, Leipzig, 1870, p. 149. Dans 1 Par., xxvi, 29, il est dit que Chonénias et ses fils étaient chargés des œuvres extérieures en Israël, c’est-à-dire qu’en dehors des fonctions du culte divin, ils en avaient d’autres qui regardaient le peuple, celles de scribes et dejuges. Cf. I Par., xxiii, 4.
E. Levesque.
CHORRÉENS. La Vulgate transcrit ainsi, Chorrsei, Gen., xiv, 6, le nom des habitants du mont Séir, qu’elleappelle ordinairement ailleurs Horréens. Gen., xxxvi, 20, 21, 29, 30; Deut., ii, 12, 22. Voir Horréens.
CHOUETTE, genre d’oiseaux de l’ordre des rapacesnocturnes, caractérisés par des yeux très grands à énormes, pupilles, dirigés tous les deux en avant et entourés d’un cercle tantôt complet et tantôt incomplet de plumes hérissées, qui donnent à la tête, déjà grosse par elle-même, un aspect singulier et parfois sinistre. Les chouettes ne sont pas organisées pour le vol prolongé. Elles s’établissent dans les bois touffus, dans les vieux troncs, d’arbres, dans les rochers et les ruines. Elles en sortent au crépuscule pour chasser leur proie, qui se compose de petits oiseaux, de petits quadrupèdes et d’insectes. Dans la Sainte Écriture, il n’est question des chouettes que d’une manière générale, et quelques-unes des espèces qui appartiennent à ce genre ont seules un nom enhébreu. Elles sont rangées parmi les oiseaux impurs.Lev., xi, 16, 17; Deut., xiv, 15, 16. — Les sous-genres, compris dans le genre chouette sont les suivants: lachouette proprement dite, Surnia et Slrix ulula, probablement désignée en hébreu par le mot kôs, comme lachevêche; le duc, comprenant le grand-duc, Stria; bubo, .le moyen-duc ou hibou commun, Strix otus, et le petitduc, Strix scops; le chat-huant, Syrmium; l’effraie, Slrix flammea et Slrix orienlalis; la chevêche. VoirChat-huant, Chevêche, Duc, Effraie, Hibou.
H. Lesêtre.
CHRÉTIEN (xpi<"t» vô; ), nom donné aux disciples. de Jésus-Christ et tiré du titre même de leur Maître, Χριστός. On le trouve trois fois dans le Nouveau Testament. Act., xi, 26; xxvi, 28; IPetr., iv, 16. Voir Christ.Tout d’abord les fidèles s’appelaient entre eux «choisis, élus», ἐκλεκτοί, Rom., viii, 33; xvi, 13; Colos., iii, 12; «disciples,» μαθηταί, Act., ix, 26; xi, 29; «frères,» ἀδελφοί, Act., ii, 29, 37; iii, 17; vi, 3; vii, 2; «saints,» ἁγίοι, Rom., viii, 27; xv, 25; «croyants,» πιστεύοντες, Act., v, 14. Ce fut à Antioche, durant la prédication de saintPaul et de saint Barnabé, vers l’an 43, que pour la première fois ils furent désignés par le nom de «chrétiens».Act., xi, 26. D’après Suidas, édit. Gaisford, t.ii, col.3930, et Malalas, Chronograph., x, t.xcvii, col.378, ce nomleur aurait été imposé par leur premier évêque, Évodius, successeur de saint Pierre à Antioche. C’est là une supposition gratuite. Il est plus probable qu’il leur fut donnépar les gentils qui habitaient Antioche et qui, selon l’usagereçu d’appeler les sectateurs du nom de l’auteur de lasecte, prenant Χριστός pour un nom propre et non pour untitre, appelèrent ses disciples chrétiens, comme on appelait les partisans de César, de Pompée, d’Octave ou d’Hérode, Cæsariani, Pompeiani, Octaviani, Herodiani.Matth., xxii, 16; Marc., iii, 6; xii, 13. Il est à remarquerque le mot χριστιανός, quoique grec, a une terminaisonlatine, comme ceux que nous venons de citer. Les Juifsd’Antioche, qui attendaient encore la venue du Messie ouChrist promis, auraient cru profaner ce nom sacré enl’appliquant aux disciples de celui qu’ils avaient crucifié.Ils les appelaient plutôt avec mépris «Nazaréens». Act., xxiv, 5.
Le nom de «chrétien» n’est donc pas en lui-mêmeun terme de mépris, quoique les habitants d’Antioche, célèbres par leur causticité, Ammien Marcellin, xxi, 14; Philostrate, Vita Apollon., iii, 10; Lucien, De Saltat., 26, aimassent à donner des surnoms et des sobriquets, Procope, De Bell. pers., ii, 8, édit. de Bonn, p.105, et quoiqu’il ait pu être employé plus tard avec une significationdérisoire. Cf. Tacite, Annal., xv, 44. Hérode Agrippa, quil’emploie en plaisantant, Act., xxvi, 28, ne paraît pas yattacher dans cette circonstance un sens injurieux. Cependant saint Pierre suppose qu’il servait aux persécuteursde titre d’accusation, puisqu’il exhorte les fidèles à seglorifier d’avoir à souffrir à cause de lui. IPetr., iv, 16.
Ce fut seulement au iiesiècle que l’usage en devintgénéral et que les fidèles l’adoptèrent comme leur nomauthentique, au point de vue religieux. Mais le seul faitde l’imposition de ce nom aux chrétiens d’Antioche a unetrès grande importance, car il établit que dès lors leschrétiens, jusque-là confondus avec les sectes juives parles païens de Syrie, commencèrent à être distinguéscomme formant une communauté religieuse à part.
Le nom de χριστιανός, christianus, fut plus tard défiguré par le langage populaire et devint χρηστιανός, chrestianus, d’où vient que Suétone, Nero, 16; Claud., 25, appelle le chef des chrétiens Chrestus. De cette altération s’est formé notre vieux français chrestiens. — Parerreur ou piété, les fidèles, certains Pères eux-mêmes, aimaient à faire dériver le mot chrestianus du grecχρηστός, «bon, excellent,» qui leur rappelait les vertus, surtout la suavité et la douceur, dont leur cœur devaitêtre rempli. Tertullien, Apolog., 3 t., i, col.281; S. Justin, Apolog., i, 4, t.vi, col.333; Clément d’Alexandrie, Strom., ii, 4, t.viii, col.949.
P. Renard.
CHRIST (Χριστός), traduction grecque du mot hébreumâšîaḥ, qui signifie «oint» d’huile. — 1o Il est appliquéparticulièrement à Notre-Seigneur, ὁ Χριστός, Matth., ii, 4, etc., le Messie ou Christ par excellence. Joa., i, 41; Matth., i, 16. Χριστός vient de Χρίω, «oindre» avecla main, comme mâšîaḥ vient de mâšaḥ, «oindre» avecde l’huile ou avec un parfum. Les premiers chrétiensconvertis de la gentilité parlaient grec, et à l’exempledes Apôtres ils appelaient souvent simplement le Sauveur ὁ Χριστός; ce mot passa par leur intermédiaire dansla langue latine sous la forme Christus, «Christ.» VoirMessie et Jésus-Christ. — 2o Dans la Vulgate, le motchristus se dit quelquefois de celui qui a été «oint» parune consécration religieuse, et par extension de celui quiest envoyé de Dieu, comme le mot mâšîaḥ hébreu qu’iltraduit. — Dans l’Ancien Testament, mâšîaḥ signifiaitseulement, au sens propre, celui qui avait reçu l’onctiond’huile, cf. IISam., i, 21, tel que le prêtre, qui est appelé Lev., iv, 3, 5, 16; vi, 15 (Septante, 22), hak-kôhên ham-mâšîaḥ, Septante: ὁ ἱερεὺς ὁ χριστός; cf. IIMach., i, 10, οἱ χριστοὶ ἱερεῖς; tel aussi que le roi, ISam., xxiv, 7, etc., qui avait été sacré par l’effusion de l’huile sainte; ce sontsurtout les rois qui sont ainsi qualifiés dans les livreshistoriques. — Par extension, Cyrus, choisi de Dieu pourdélivrer son peuple de la captivité, est appelé l’«oint» de Jéhovah (Vulgate: christus meus Cyrus). — Les patriarches hébreux sont appelés «oints» (Vulgate: christos meos) dans le Psaume cv, 15 (répété IPar., xvi, 22).— Ce titre est donné par excellence au Rédempteur futur.Ps. ii, 2; Dan., ix, 25, 26. Depuis l’époque de Daniel, lesJuifs prirent l’habitude de l’appeler le Messie, et c’estd’eux que nous est venu le nom de Messie, comme celuide Christ nous est venu par les Grecs. Joa., i, 41.
F. Vigouroux.
CHRISTOPHE SILVESTRANO BRENZONI, carme, docteur en théologie, professeur à Venise, à Florence et à Pise, et prédicateur de talent, né à Vérone etmort à Pise, le 20 mai 1608. On a de lui: In psalmum cxxxvi Super flumina Babylonis commentaria, in-8o, Vérone, 1593; en français, in-8o, Paris, 1698; In Cantica canticorum commentaria; In D. Lucam commentaria, Vérone, 1595; In canticum Magnificat lectiones, en italien, in-4o, Vérone, 1593; In Epistolas D. Pauli lectiones, en italien, in-8o, Vérone, 1591.
F. Benoit.
CHROMACE (Saint), évêque d’Aquilée, vers l’an 388, mort vers 406, prit une part active à toutes les discussions théologiques de son époque. Il fut un de ceux quiencouragèrent saint Jérôme à entreprendre sa traductionde l’Ancien Testament, et ce saint docteur lui dédia soncommentaire sur le prophète Habacuc. D’un commentaire de saint Chromace sur saint Matthieu, il ne nousreste que quelques fragments, qui se trouvent avec lesautres œuvres de ce saint évêque au t.xx, col.217-436, de la Patrologie latine de Migne.
B. Heurtebize.
CHRONIQUES. Nom qu’on donne, en traduisant parce mot le titre hébreu, dibrê hay-yâmîm, aux deuxlivres appelés dans la Vulgate, à la suite des Septante, Paralipomènes. Voir Paralipomènes.
Sommaire
(ne fait pas partie du texte original)
- Date de la création du monde
- Date de la création d’Adam
- D’Adam au déluge
- Du déluge à Abraham
- De la vocation d’Abraham à la sortie d’Égypte
- De l’exode à la construction du temple de Salomon
- De la construction du temple de Salomon à sa destruction par les Chaldéens
- De la captivité de Babylone à la naissance de Jésus-Christ
- Durée de la vie de Jésus
- Chronologie de l’histoire des Apôtres
- Tableau chronologique des principaux événements bibliques
CHRONOLOGIE BIBLIQUE. — On ne trouve pasdans la Bible une chronologie toute faite, ni une èreou époque fixe à laquelle commence la numération desannées, et dans ce sens on peut dire, en répétant laparole qu’on attribue à Silvestre de Sacy: «Il n’y a pointde chronologie biblique.» Mais il y a dans l’Écriture deschiffres, des dates, des données chronologiques quipeuvent servir à former un système de chronologie biblique. Il en est de même des monuments égyptiens, quiindiquent seulement les années de règne à l’aide desquelles les chronologistes calculent les temps de l’histoirede l’Égypte. Nous avons donc autant le droit de parlerde chronologie biblique que de chronologie égyptienne.
Mais la Bible ne contient pas une histoire ordinaire; elle est l’œuvre de Dieu; elle a été écrite sous l’inspiration du Saint-Esprit. Il y a donc lieu de se demander sila chronologie biblique est inspirée et si elle fait partiede la révélation divine. Assurément, les écrivains sacrésont écrit, sous l’action divine, des dates et fourni desdonnées chronologiques qui étaient inspirées par Dieuet par conséquent exactes. Ces renseignements, qui faisaient partie de la révélation divine, constitueraient unechronologie révélée, s’il était certain que les auteurs inspirésvoulaient faire connaître l’âge du monde et la suiterégulière des temps en Israël et qu’ils ont indiqué toutesles dates nécessaires. Quelques-uns sans doute onteu le dessein de fixer chronologiquement l’époque desévénements qu’ils racontaient; mais tous n’ont pas eu cesouci, et les chronographes constatent dans leurs écritsbien des lacunes ou de simples approximations chronologiques.La Bible renferme donc des données chronologiquesincomplètes ou insuffisantes pour former unechronologie révélée et certaine. On pourra les agencersystématiquement; le calcul qui en résultera restera problématiqueet sera peut-être fautif; il ne s’imposera àl’assentiment surnaturel d’aucun catholique, qui auratoujours le droit de le discuter et de le rejeter. D’ailleurstous les chiffres de la Bible ne nous sont pas parvenusdans leur intégrité primitive, et les dates se présententà nous avec des variantes telles, que la critique estimpuissante à rétablir avec certitude le texte original.Cette altération évidente des dates augmente encore l’incertitudedes calculs chronologiques. Aussi l’Église catholiquen’a jamais eu de chronologie officielle. Elle a toujourspermis de discuter les variantes numériques du textesacré et de supputer librement la durée des temps bibliques.Nous exposerons brièvement les résultats obtenuspar les chronologistes, en parcourant successivement lesprincipales époques de l’histoire biblique.
I. Date de la création du monde. — La Bible ne lafixe pas; elle dit seulement que Dieu créa le ciel et laterre «au commencement», sans préciser l’époque dece commencement. Elle décrit aussi l’état primordial duglobe terrestre comme un état de chaos, de confusionet de désordre, durant lequel d’épaisses ténèbres couvraientla surface des éléments confondus. Gen., i, 1 et 2.Elle ne dit pas qu’elle en fut la durée. Jusqu’au xixesiècle, on ne distinguait généralement pas la date de la créationdu monde de celle de la création de l’homme, dont ellen’était séparée, pensait-on communément, que par sixjours de vingt-quatre heures. Auparavant cependantquelques esprits plus perspicaces, saint Justin, Apologia I pro christianis, x, t. iv, col. 340; saint Grégoirede Nazianze, Orat. ii, 81, t.xxxv, col.488; Gennade deMarseille, De ecclesiasticis dogmatibus, c. x, t.lviii, col.983; le P.Pétau, De mundi opificio, I, i, c. x, édit.Vivès, p.270, avaient admis une période indéfinie entrela création de la matière première et son organisationdéfinitive. Cf. Motais, Origine du monde d’après la tradition, c. ii, p.17-42. Les interprètes actuels reconnaissentà peu près unanimement que Moïse se tait sur l’espacede temps qui s’est écoulé entre la création primitive etla production de la lumière au premier jour génésiaque.Plusieurs considèrent même les jours de la créationcomme des périodes d’une durée indéterminée (voir Cosmogonie), et tous concèdent aux astronomes et aux géologuesle temps nécessaire à la formation des astres etdes couches géologiques. D’ailleurs, la science pas plusque l’exégèse ne possède aucun moyen d’évaluer ce tempsavec précision et certitude. Les chronomètres sûrs fontdéfaut. Toutefois les géologues, d’accord avec les astronomes, accordent des siècles à la phase stellaire de laterre, et c’est un fait irréfragablement démontré que saphase planétaire remonte à une origine fort ancienne.Les stratifications terrestres, la configuration des continents, les changements de la flore et de la faune, ontexigé des siècles. Voir C. Grand-Eury, Flore carbonifère du département de la Loire et du centre de la France, p.337-345; A. de Lapparent, Traité de géologie, 1reédit., 1883, p.780-786, 941-982, et dans le Correspondant, t.cvii, 1886, P.94-114. Cf. Lavaud de Lestrade, Accord de la science avec le premier chapitre de la Genèse, 1885, p.18-23; Molloy, Géologie et révélation, trad. Hamard, 2eédit., 1881, p.317-326. Les géologues qui s’aventurentà fixer des chiffres aboutissent à des résultats très divergents.Leurs calculs, qui partent d’hypothèses différentes, sont fondés sur le temps nécessaire à l’action des causesactuelles. Mais tout en ayant toujours été identiques dansleur essence, les forces de lu nature ont certainement dûvarier dans leur mode d’action. Leur intensité a été plusou moins puissante, et leurs associations, plus ou moinscomplexes, se sont écartées dans une large mesure descombinaisons actuellement réalisées. Il ne faut donc admettrequ’avec une très grande réserve les résultatsnumériques auxquels divers savants ont prétendu arriver.M.de Lapparent, à qui nous empruntons ces observations, ouvr. cit., p.1254-1256, ne croit pas excéder enévaluant en millions d’années le temps nécessaire auxformations géologiques. Dans cette mesure, les chiffrespourront varier de 1 à 20, parfois de 1 à 100, sans queles résultats extrêmes méritent moins de confiance lesuns que les autres. Il ne serait donc pas déraisonnablede renfermer entre 20 et 100millions d’années la duréedes sédimentations terrestres. Cf. F. Vigouroux, Manuel biblique, 9eédit., 1895, t.i, p.502-505; Les Livres Saints et la critique rationaliste, 4eédit., 1890, t.iii, p.437-451; Constant, Science et révélation, Paris, 1892, p.61-64.
II. Date de la création d’Adam. — Les temps bibliquesne peuvent se mesurer qu’après l’apparition de l’hommesur la terre. Toutefois le texte sacré ne détermine paschronologiquement l’origine de l’homme d’une manièreformelle et précise; nulle part il ne dit: Adam a été crééà telle date. Cette date est le résultat du calcul de toutesles indications chronologiques que contient l’Ancien Testament.Or, en calculant les mêmes données et en employantles mêmes procédés, les chronologistes sont arrivésà des chiffres très divergents. Alphonse des Vignolles, Chronologie de l’histoire sainte, Berlin, 1738, t.i, p.64, a recueilli plus de deux cents calculs différents, «dontle plus court ne compte que 3483ans depuis la créationdu monde jusqu’à Jésus-Christ, et le plus long en compte6984. C’est une différence de trente-cinq siècles.» Riccioli, Chronologia reformata, Bologne, 1669, t.i, p.292, avait dressé un tableau de soixante-dix de ces systèmes.Le P.Tournemine, Dissertationes chronologicæ, à la finde son édition de Ménochius, Avignon, 1768, t.iv, p.120-121, donne les quatre-vingt-douze plus célèbres.L’art de vérifier les dates, Paris, 1820, p.vii-10, enindique cent huit. «Les Juifs modernes placent lacréation en 3761 avant notre ère; Scaliger, en 3950; leP.Pétau, en 3983; Usher (Ussérius), en 4004; Clinton, en 4138; la nouvelle édition (1820) de L’art de vérifier les dates, en 4963; Hales, en 5411; Jackson, en 5426; l’Église d’Alexandrie, en 5504; l’Église de Constantinople, en 5510; Vossius, en 6004; Panvinio, en 6311; les Tablesalphonsines, en 6984.» F. Vigouroux, Les Livres Saints et la critique, 4eédit., t.iii, p.457. Ces chiffres si disparatesproviennent de ce que les chronologistes suiventdes recensions diverses du texte sacré et combinent àleur façon les données chronologiques de la Bible. Nousdiscuterons plus loin les bases de ces systèmes, et nousaurons à déterminer s’il y a lieu d’augmenter, commebeaucoup de nos contemporains le pensent, l’âge del’homme sur la terre. Notre discussion ne sera gênée paraucune décision dogmatique. L’Église romaine, qui achoisi la Vulgate comme édition officielle de la Bible, a maintenu au Martyrologe, qui fait partie de sa liturgie, la date de 5199, tirée des Septante, pour la création del’homme. Les Pères et les exégètes catholiques ont variéà ce sujet, et personne ne conteste aux géologues, auxpaléontologistes et aux chronologistes le droit de chercherscientifiquement la mesure des temps écoulés depuis lacréation de l’homme jusqu’à Jésus-Christ. Cf. H. de Valroger, L’âge du monde et de l’homme d’après la Bible et l’Église, 1869, 2epart., p.75-146.
Certains tenants de l’archéologie préhistorique ont abuséde cette liberté et assigné une antiquité très reculée à l’humanité. M.l’abbé Hamard, qui a fait ici même, t.i, col.195-205, bonne justice de ces exagérations, estime que ni la géologie ni l’archéologie préhistoriquen’obligent à reculer de quelques milliers d’années la datede la création de l’homme. Toutefois nous devons reconnaîtreque tout en repoussant les chiffres fantastiques deM.de Mortillet, des savants catholiques admettent pourl’apparition de l’homme sur la terre une date plus élevéeque celle qui résulte de la plus haute chronologie biblique.M.de Lapparent, dans la Revue des questions scientifiques, octobre 1893, p.402-432, et Bulletin de la Société bibliographique, juillet 1895, p.165-168, pense que l’originede l’homme est interglaciaire et qu’elle remonte, autant qu’elle peut être exprimée en chiffres, à trente outrente-deux mille ans à partir de maintenant. D’autresestiment que l’homme est d’origine postglaciaire, et plusieursfois M.le marquis de Nadaillac a attribué par conjectureà l’existence de l’homme sur la terre une duréede dix à douze mille ans. L’origine et le développement de la vie sur le globe, dans le Correspondant, 10 novembre1888, p.440-452; Les premières populations de l’Europe, ibid., 10 novembre 1889, p.450-457; L’homme, ibid., 25 octobre 1892, p.242-245; Les dates préhistoriques, ibid., 25 novembre 1893, p.632-635. Cf. N. Boulay, L’homme est-il interglaciaire ou postglaciaire? dansla Revue de Lille, avril 1894, p.561-575, mai 1894, p.5-29; L’ancienneté de l’homme en France, ibid., juin et juillet1894, p.135-153, 269-290; Zahm, Bible, science et foi, trad. franç., 1895, p.167-313; P. Schanz, Das Alter des Menschengeschlechts nach der Heiligen Schrift, der Profangeschichte und der Vorgeschichte, dans les Biblische Studien, Fribourg-en-Brisgau, 1896, 1ervolume, 2efasc.; J. Guibert, Les origines, questions d’apologétique, Paris, 1896, p.147-184. Quoi qu’il en soit, nousaurons à examiner plus loin si, à défaut de la géologieet de la paléontologie, l’histoire oblige à hausser la datede l’origine de l’homme et l’âge de l’humanité. Il nousfaudra aussi déterminer à quelle époque biblique l’augmentationchronologique pourrait et devrait se faire.
III. D’Adam au déluge. — Le temps écoulé dans cetintervalle se calcule d’après la généalogie des descendantsd’Adam dans la ligne de Seth. Gen., v, 1-31. Cette généalogiecomprend dix patriarches et neuf générations; elleindique l’âge de l’ascendant à l’époque de sa paternité, le nombre d’années durant lesquelles il a vécu après lanaissance de son fils et la durée totale de sa vie. Enadditionnant les dix chiffres de l’âge des patriarches à lanaissance de leur fils, on obtient facilement la durée dela période. Ce calcul si simple donne cependant dessommes notablement divergentes, parce qu’il est opérésur des dates différentes. Nous possédons, en effet, troisrecensions du Pentateuque; la première est représentéepar la version des Septante, la deuxième par le textehébreu massorétique et la Vulgate de saint Jérôme, et latroisième par le texte hébreu des Samaritains. Le tableausuivant permettra de juger d’un seul coup d’œil la différencedes chiffres:
Noms des patriarches. | Âge à la naissance des fils. |
Grec. | Hébreu et Vulgate. | Samaritain. | |
Adam | 230 | 130 | 130 |
Seth | 205 | 105 | 105 |
Énos | 190 | 90 | 90 |
Caïnan | 170 | 70 | 70 |
Malaléel | 165 | 65 | 65 |
Jared | 162 | 162 | 62 |
Énoch | 165 | 65 | 65 |
Mathusalem | 167 | 187 | 67 |
Lamech | 188 | 182 | 53 |
Noé | 500 | 500 | 500 |
De Noé au déluge | 100 | 100 | 100 |
Total | 2242 | 1656 | 1307 |
On le voit, l’hébreu et le samaritain sont généralementd’accord et présentent avec les Septante une divergencede cent ans pour l’époque de la paternité de plusieurspatriarches et par génération, sauf pour Noé, au sujetde qui les trois textes sont d’accord. Mais il existe entreeux des différences de détails. Le samaritain diminue de100ans l’âge de Jared à la naissance d’Énoch, de 120anscelui de Mathusalem à la naissance de Lamech, et de129ans celui de Lamech à la naissance de Noé; il diffèredonc de l’hébreu de 349ans et des Septante de 935ans.D’autre part, les manuscrits des Septante présentent desvariantes. Nous avons adopté les chiffres du Vaticanus; l’Alexandrinus a vingt ans de plus, et ce total coïncideavec les calculs de Jules Africain. Josèphe a abouti à untotal de 2156. On est réduit à des conjectures pour expliquerl’origine de ces divergences. Elles sont trop nombreusespour se justifier toutes par la maladresse oul’ignorance des copistes. Sans doute rien ne s’altère dansla transcription des manuscrits aussi facilement que leschiffres. Mais s’il fallait attribuer uniquement à cettecause accidentelle les divergences constatées, on ne rendraitpas compte du procédé à peu près régulier d’augmentationou de soustraction de cent années. Aussi est-ilnécessaire, semble-t-il, de soupçonner avec saint Augustin, De Civitate Dei, xv, 13, t.xli, col.453, un remaniementvolontaire des chiffres, sans qu’on puisse direquand, où, par qui et comment il s’est produit. Qui enrendrions-nous responsables, les Juifs de Palestine oules Juifs alexandrins? Les coupables ont-ils procédé paraddition ou par soustraction? Toutes les hypothèses sontpermises. Quelques critiques ont supposé que les Juifsde Palestine avaient réduit l’âge des premiers hommes. «On dirait que l’Israélite ait voulu, en abrégeant systématiquementla durée de la succession des patriarches, couper court à ces généalogies sans fin, qui n’étaientautre chose que des cosmogonies, comme celle de Béroseet de Sanchoniathon, et combattre ainsi le polythéisme, dont elles étaient la source constante.» Ph. Berger, Encyclopédie des sciences religieuses, t.v, 1879, art.Généalogies, p.463. Et F. Lenormant ajoute, Les origines de l’histoire, 2eédit., 1880, t.i, p.276: «Peut-êtreserait-il permis de supposer que c’est vers l’époquede la captivité que les Hébreux, précisément quand ilseurent connaissance des fabuleuses périodes enfantéespar l’imagination spéculative des Chaldéens, se sentirentpris de scrupules devant les chiffres de leurs propreslivres, voulurent réagir contre le danger possible d’unentraînement analogue et raccourcir leur chronologieprimitive, pour empêcher qu’elle ne s’allongeât indéfinimentcomme celle des Gentils.» Paul Pezron, L’antiquité des temps rétablie et défendue contre les Juifs et les nouveaux chronologistes, Paris, 1690, ch.xvi, p.439-440, pensait que le rabbin Akiba avait osé mettre la mainsur les divines Écritures et en avait abrégé les annéesdans le texte hébreu. D’autres critiques ont fait des suppositionsanalogues. Lenormant, qui admet le raccourcissementvolontaire de l’hébreu, croit aussi, ouvr. cit., p.278-282, à un allongement systématique de la part des Septante.Les auteurs de la version alexandrine remanièrent letexte hébreu pour le mettre d’accord avec les calculs desChaldéens, ou des Égyptiens et augmentèrent de cent ansl’âge des patriarches à la naissance de leur premier fils.Saint Augustin, loc. cit., reconnaissait ces retouches intentionnelles; mais au lieu d’en rendre responsable lesSeptante, il les attribuait à un scribe plus récent, qui lesaurait introduites dans sa copie de la version grecque duPentateuque. La recension samaritaine ne serait pas non plus exempte d’altération volontaire, et sa chronologie serait lerésultat d’une combinaison artificielle. Le raccourcissementdu texte hébreu est visible, et il a pour but defaire cadrer les dates ainsi obtenues avec le cycle desannées sabbatiques. Lenormant, Les origines, p.282-283.
Nous pouvons concéder que les chiffres des trois recensions du Pentateuque ne sont pas certains et qu’on peutdésespérer d’en retrouver jamais la véritable leçon. Maisnous n’accorderons pas à Lenormant que les chiffres dedurée énoncés à l’occasion des patriarches antédiluvienssont «des nombres cycliques» (p.272). Nous leur maintiendronsle caractère historique qu’ils avaient dans letexte original et qu’ils auraient encore, si ce texte nousétait parvenu intégralement. Quelques critiques pensentl’avoir retrouvé dans une des trois recensions. Pezronsuivait la version des Septante. Pour le P.de Hummelauer, Commentarius in Genesim, Paris, 1895, p.202-204, elle est certainement fautive, puisqu’elle fait survivreMathusalem de quatorze ans au déluge. Cf. S.Jérôme, Liber hebraicarum quæstionum in Genesim, v, 25, t.xxiii, col.947; S.Augustin, De Civitate Dei, l. xv, 9, t.xli, col.449-450. Ses chiffres sont moins sûrs que ceuxdu texte hébreu. La recension des Samaritains paraîtpréférable même à celle des Massorètes. Elles ne diffèrentque pour Jared, Mathusalem et Lamech. Or, tandis quel’hébreu date la mort de Mathusalem seul de l’année dudéluge, le samaritain fait périr encore Jared et Lamechla même année. Il semble au P.de Hummelauer que lesHébreux ont retouché les chiffres relatifs à ces deux patriarchesafin de ne pas les confondre avec les impies, engloutis par les eaux. Mais il est loisible aussi de supposerque les Samaritains ont arrangé ces chiffres demanière à terminer la vie des trois patriarches la dernièreannée de leur système chronologique. MgrLamy, Commentarium in librum Geneseos, 2 in-8o, Malines, 1883, t.i, p.272, est favorable au texte massorétique, qui représente le texte reçu en Palestine et n’est pasdémontré moins ancien que la recension des Septante.Une conclusion s’impose à tout lecteur impartial, c’est que pour cette période la chronologie biblique esttout à fait incertaine. On discute même, nous l’exposeronsbientôt, la signification chronologique des généalogiespatriarcales, qu’on suppose incomplètes.
IV. Du déluge à Abraham. — La durée de cettepériode est mesurée par la généalogie de Sem, fils deNoé, Gen., xi, 10-26, et se calcule par le même procédéque la longueur de la période précédente. Ici encorenous possédons trois recensions, qui diffèrent l’une del’autre et ne sont pas entre elles dans le même rapportque précédemment. Le tableau suivant résume les donnéesqui servent au calcul:
Noms des patriarches. | Âge à la naissance des fils. |
Grec. | Samaritain. | Hébreu. | |
Sem (après le déluge) | 2 | 2 | 2 |
Arphaxad | 135 | 35 | 35 |
Caïnan | 130 | » | » |
Salé | 130 | 130 | 30 |
Héber | 134 | 134 | 34 |
Phaleg | 130 | 130 | 30 |
Reu | 132 | 132 | 32 |
Sarug | 130 | 130 | 30 |
Nachor | 79 | 79 | 29 |
Tharé | 70 | 70 | 70 |
Abraham (jusqu’à sa vocation) | 75 | 75 | 75 |
Total | 1147 | 1017 | 367 |
Ainsi les trois textes ne se rencontrent que pour lesannées de Tharé et d’Abraham. Le samaritain, qui dansla période précédente était ordinairement d’accord avecl’hébreu, ne le suit qu’une seule autre fois, pour l’âge d’Arphaxad.Il coïncide avec les Septante pour six générations, dont cinq ont chacune cent ans de plus que l’hébreu, et une, celle de Nachor, cinquante ans seulement.Le grec compte une génération de plus que les deuxautres, celle de Caïnan; enfin ses manuscrits présentaientdes variantes, qui ont produit des résultats différents.Eusèbe compte depuis le déluge jusqu’à Tharé945ans; Théophile d’Antioche, 936; le Syncelle, 1070; Jules Africain, 993; Clément d’Alexandrie, jusqu’à lavocation d’Abraham, 1250.
Les nombres de la généalogie de Sem sont plus corrompusencore que ceux de la généalogie de Seth, etla critique est impuissante à les rétablir dans leur étatprimitif. Aucune raison ne nous impose le choix entredes opinions opposées. Aux yeux du P.de Hummelauer, Comm. in Gen., p.341-347, le samaritain est ici moinssûr et moins authentique que précédemment, puisqu’ilindique seul la durée totale de la vie des patriarches decette lignée. La différence de cent ans sur l’âge de l’ascendantà la naissance de son fils est le résultat d’une soustractionou d’une addition. La soustraction aurait été opéréedans le texte hébreu, a-t-on dit, Crelier, La Genèse, 1889, p.82, pour que les patriarches postdiluviens, dont la vieest diminuée, n’aient pas eu leur fils à un âge plusavancé que les patriarches antédiluviens. La raison estfutile, car la liste généalogique de Sem peut omettre lapremière génération de ce patriarche, pour ne parler quede celle des ancêtres d’Abraham. On peut soutenir, pourune raison plus forte, que les chiffres de l’hébreu ont étédiminués. Tandis que ce texte donne à Nachor 29ansseulement à la naissance de Tharé, le samaritain et legrec lui attribuent 79ans. Pourquoi ce nombre inférieuret pas 129ans, si une addition de cent ans avait été faiteaux chiffres précédents? On comprend mieux la variantedans l’hypothèse d’une soustraction. Si on a retranchécent ans aux chiffres supérieurs à la centaine, cette opérationa été impossible sur le chiffre de 79. Le calculateura enlevé cinquante ans seulement et obtenu le nombrede 29années. On a discuté ici, t.ii, col.41-43, l’authenticitéde Caïnan dans les Septante. L’affirmative s’appuiesurtout sur la présence de ce personnage dans la généalogiede Jésus, dressée par saint Luc, iii, 36. Bien quela critique textuelle des Évangiles soit favorable à l’insertionde Caïnan dans cette généalogie par l’évangélistelui-même, plusieurs exégètes catholiques, Calmet, Commentaire littéral, t.vii, 1726, p.467; Fillion, Évangile selon saint Luc, 1882, p.102-103; l’abbé Ch. Robert, dans la Controverse du 15 juillet 1886, p.357-360; leP.de Hummelauer, loc. cit., présument que le nom deCaïnan a été glissé de bonne heure dans le texte de saintLuc par un copiste qui voulait faire concorder l’évangélisteavec les Septante. Cf. Lamy, Comment. in librum Geneseos, Malines, 1883, t.i, p.388-390. Quoi qu’il ensoit de ce point particulier, nous devons conclure unefois de plus que nous ne sommes pas certains de posséderencore les véritables chiffres, écrits par Moïse dansla Genèse, et que nous ne pouvons pas en déduire unechronologie sûre.
Tandis que les commentateurs ont toujours pensé queMoïse avait eu l’intention de donner dans les généalogiesde Seth et de Sem une chronologie réelle, qu’il estimpossible de retrouver aujourd’hui, des apologistes modernesont soutenu que l’auteur de la Genèse n’avait paseu l’intention de fournir les éléments d’une chronologiegénérale. Les chronologistes anciens étaient persuadésqu’il n’y avait pas de lacunes dans la chaîne des générationspatriarcales et que les listes généalogiques étaientcontinues. Or la Bible présente des exemples d’omissionsintentionnelles et de chaînons sautés dans les généalogies.Afin d’avoir trois séries de quatorze noms dans lagénéalogie de Jésus, saint Matthieu, i, 8, omet trois rois, Ochozias, Joas et Amasias, entre Joram et Ozias. La listedes grands prêtres, IEsdr., vii, 1, est certainement abrégée, et il suffit pour s’en convaincre de la comparer avecIPar., vi, 1. Esdras lui-même, IEsdr., vii, 1-5, raccourcitsa propre généalogie, et entre Azarias, qu’il ditfils de Méraioth, et Méraioth lui-même, il omet cinqmembres, Johanan, Azarias, Achimaas, Achitob et Amarias, nommés IPar., vi, 7-14. Or, dans ces généalogiesfragmentaires, les membres disjoints sont cependant réunis par la relation de génération, yâlad ou hûlid, «il aengendré,» ou par le nom de bên, «fils.» Il en résulteque dans la Bible, comme on pourrait le démontrer pard’autres exemples, le verbe yâlad et le nom bên marquentla relation entre un aïeul et un descendant éloigné aussinaturellement qu’entre un père et son fils. L’emploi duverbe yâlad dans la généalogie de Sem n’est donc pasnécessairement une preuve de la continuité des générations, et il permet d’y intercaler, aussi bien que dans lagénéalogie de Jésus en saint Matthieu, des membresomis.
On a opposé, il est vrai, à cette conclusion que la formeparticulière des généalogies patriarcales, dans lesquellesles noms sont encadrés dans deux ou trois séries denombres, exclut l’idée d’une solution de continuité, et ilsemble contraire au sens obvie et naturel du récit mosaïquede traduire Gen., xi, 10, par: «Sem, à l’âge decent ans, engendra un fils de qui est descendu Arphaxad,» alors qu’aux versets 12 et 13 le même nomdésigne Arphaxad lui-même. Cf. de Hummelauer, op. cit., p. 349-350. À cette objection, le P.Brucker, dans lesÉtudes religieuses du 15 octobre 1895, p.267, répondjudicieusement que dans cette interprétation la mêmesignification, parfaitement déterminée, est attribuée aunom d’Arphaxad dans tout le contexte. La métonymien’est pas dans les noms, qui restent toujours les nomsd’individus distincts; elle est dans le verbe genuit, «ilengendra,» qu’il faut entendre au sens de genuit mediate, «il engendra médiatement.» Donc les généalogiespeuvent être discontinues et sauter par-dessus des générations, même quand la mention d’un patriarche estaccompagnée de chiffres d’années. Contre l’hypothèsedes lacunes, MgrGrandclaude, La chronologie biblique des temps primitifs et la science contemporaine, 1895, p.91-107, en a appelé à toute la tradition. Selon lui, tousles Pères de l’Église, en qualité d’interprètes autorisésde la Bible, et à leur suite tous les exégètes catholiquesjusqu’à nos jours, ont reçu les généalogies bibliquescomme la règle absolue des calculs chronologiques et n’yont jamais supposé la moindre lacune. Il y a donc làun sentiment commun, qui ne peut être abandonné sanstémérité, à moins qu’il ne soit évidemment insoutenable.Ce consentement unanime des Pères n’existe pas, puisqu’ilsont interprété diversement les chiffres de la Genèse, et leur avis ne constitue pas un enseignement traditionnelà l’encontre duquel il ne soit pas permis d’aller. Onpeut donc sans témérité soutenir que les généalogiesbibliques ne sont pas continues.
D’ailleurs la discontinuité de la généalogie de Sem, ensoi possible et probable, doit être nécessairement admisesi on veut mettre l’histoire sacrée, du déluge à Abraham, d’accord avec l’histoire profane. Comparée à l’antiquitédes peuples anciens, la chronologie tirée du texte hébraïqueest insuffisante avec ses 367années; celle, pluslongue, des Septante est certainement très étroite, sinontrop restreinte. Nous insisterons peu sur la haute antiquitédes Chinois et des Hindous, car leurs traditionssont certainement fabuleuses. Le P.Gaubil a commencél’histoire datée des Chinois au règne de l’empereur Yao, à l’an 2357 avant notre ère. Toutefois, à cette époque, la Chine était déjà assez peuplée et assez avancée encivilisation; mais le temps nécessaire à l’établissementdu Céleste-Empire se concilie facilement avec la chronologiedes Septante. L’histoire suivie des Hindous neremonte qu’au xvesiècle avant notre ère. Cf. Wiseman, Discours sur les rapports entre la science et la foi, 4ediscours, dans les Démonstrations évangéliques de Migne, t.xv, p.225-252; de Nadaillac, Les dates préhistoriques, dans le Correspondant du 25 novembre 1893, p.619-624. Les assyriologues admettent généralementque les premiers rois de Chaldée ne peuvent tomberbeaucoup au-dessous du xxxe ou même du xlesiècle, c’est-à-dire mille ou même deux mille ans avant l’époqued’Abraham. Quoique les renseignements chronologiquesfournis par Bérose soient en grande partie fabuleux, lahaute antiquité de l’histoire chaldéenne nous est révéléepar des monuments récemment mis au jour. Assurbanipal(668-628) raconte que dans sa conquête de laSusiane, en 633, il ramena à Érech une image de ladéesse Nanâ, que Kudur-Nakhundi en avait enlevée1635années auparavant, par conséquent 2274ans avantnotre ère. Une date plus ancienne est inscrite sur uncylindre de Nabonide, roi de Babylone. En faisant réparerle temple du Soleil, à Sippara, ce prince trouva, àtrente-deux pieds au-dessous du sol, la dédicace composéepar le premier constructeur, Naram-Sin, fils deSargina, 3200ans auparavant. Comme Nabonide régnaitaux environs de 550ans avant J.-C., son calcul reporte lerègne de Naram-Sin vers l’an 3800. Le déluge, qui étaitconnu des Chaldéens et des Babyloniens, remonte doncà plus de 4000ans, car Naram-Sin eut des prédécesseurs, postérieurs à ce cataclysme. Cf. Lenormant etBabelon, Histoire ancienne de l’Orient, 9eédit., t.v, 1887, p.3-7. La chronologie postdiluvienne des Septante, qui est la plus élevée, est donc insuffisante. Lamême conclusion ressort de l’histoire de l’Égypte. Manéthon, prêtre sébennytain du iiiesiècle avant notre ère, attribuait à l’Égypte une antiquité de 30000ans avantAlexandre. En écartant les règnes mythiques, il resteencore trente dynasties historiques, qui commencent àMénès et qui remplissent un espace de 5000ans environ.Or l’histoire de Manéthon, à partir de la XVIIIe dynastie, a été confirmée par les listes royales reproduites par lepapyrus de Turin et sur les tables d’Abydos, de Saqqarahet de Karnak. Néanmoins les égyptologues sont encoreen désaccord au sujet de la durée totale de l’histoireégyptienne, parce qu’ils prennent des points de départdifférents et discutent sur la continuité ou la simultanéitédes dynasties. Si toutes ont été successives, leurhistoire remonte à 5000ans; si beaucoup ont été contemporainesou collatérales, l’histoire peut se rameneraux limites de la chronologie des Septante. Mais il sembleque si quelques-unes ont régné simultanément, la plupartse sont succédé, et la durée de leur existence dépasseles quinze générations que la Bible place entre ledéluge et Moïse. D’ailleurs, fût-il absolument impossiblede déterminer d’une manière précise le commencementde l’époque historique dans la vallée du Nil, il reste démontréque les origines de ce pays sont anciennes. Dèsqu’elle nous est connue, l’Égypte nous apparaît avec unecivilisation très avancée, une religion franchement polythéisteet la prétention d’une durée déjà longue. À neconsidérer que ce qu’elle était au temps de Moïse, «peut-on(sans supposer des lacunes dans les généalogies duchapitre xi de la Genèse) faire tenir dans l’espace dequinze générations la multiplication de l’humanité aprèsle déluge, la dispersion des peuples, l’oubli de la religionrévélée ou naturelle, la naissance du polythéisme et del’idolâtrie, la colonisation de l’Égypte, la formation d’unecivilisation différente de l’asiatique, avec sa langue, sonécriture et sa religion particulières, la différenciation desraces, blanche, noire, bistrée, la succession, très généralementde père en fils, de plus de cinquante rois connuspar leurs monuments pour avoir gouverné toute l’Égypte, sans tenir compte d’un nombre beaucoup plus considérableque ceux-là mentionnent, mais dont nous n’avonspas encore découvert les monuments ni les inscriptions?» E. Pannier, La chronologie des temps primitifs, 1895, p.18.
Si l’histoire profane oblige d’allonger la chronologiebiblique, c’est dans la période qui s’étend du déluge àAbraham que l’augmentation doit se produire. Dans quellemesure est-elle nécessaire, on ne peut le dire avec précision.Quelques égyptologues se reconnaissent seulement «un peu gênés» pour faire coïncider l’histoire d’Égypteavec la chronologie des Septante. F. Robiou, Chronologie de l’Égypte, dans le Dictionnaire apologétique de la foi catholique, de Jaugey, col.1045-1058. D’autres exigentune augmentation de quelques milliers d’années. Lesexégètes ne peuvent pas dire non plus entre quels chaînonsde la généalogie de Sem ils placeront les lacunesnécessaires. Ce ne sera pas entre Noé et Sem, ni entreTharé et Abraham, dont les rapports directs de paternitéet de filiation sont expressément marqués dans l’Écriture; ce pourra être entre les autres anneaux de la listegénéalogique, dont le lien est moins étroit.
Cf. MgrMeignan, Le monde et l’homme primitif selon la Bible, 3eédit., 1879, p.289-359 et 389-397; F. Vigouroux, Manuel biblique, 9eédit., 1895, t.i, p.575-587; id., Les Livres Saints et la critique rationaliste, 4eédit., t.iii, 1890, p.452-480; J. Brucker, La chronologie des premiers âges de l’humanité, et Quelques éclaircissements sur la chronologie biblique, dans La Controverse, 1866; nouvelle série, t.vi, p.375-393; t.vii, p.5-27, ett.viii, p.87-120; E. Pannier, Genealogiæ biblicæ cum monumentis Ægyptiorum et Chaldæorum collatæ, Lille, 1886; abbé de Broglie, Étude sur les généalogies bibliques, dans le Congrès scientifique international des catholiques, Paris, 1889, t.i, p.92-153; MgrLamy, Comment. in lib. Gen., 1883, t.i, p.274-279; Thomas, Les temps primitifs et les origines religieuses d’après la Bible et la science, Paris, 1890, t.i, p.167-210.
V. De la vocation d’Abraham à la sortie d’Égypte.
La Bible indique expressément les principales datesde cette période. Abraham avait soixante-quinze ans lorsqu’ilpartit de Haran pour se rendre dans le pays deChanaan. Gen., xii, 4. Il était centenaire quand la naissanced’Isaac lui fut annoncée. Gen., xvii, 1 et 17; xxi, 5.À l’âge de quarante ans, Isaac épousa Rébecca, et vingtans après naissaient Ésaü et Jacob. Gen., xxv, 20 et 26.Quatre-vingt-cinq années s’étaient donc écoulées depuisl’arrivée d’Abraham en Palestine jusqu’à la naissancede ses petits-fils. Jacob avait 130ans quand il vint enÉgypte. Gen., xlvii, 9. Ses fils demeurèrent dans ce pays430ans. Exod., xii, 40. Tous ces chiffres additionnésdonnent pour la période un total de 645années.
Seule, la date du séjour des Israélites en Égypte est contestée.La version des Septante et le Pentateuque samaritainprésentent, Exod., xii, 40, une variante notable, qui estconfirmée par les Targums du pseudo-Jonathan et deJérusalem: «Le temps que les enfants d’Israël et leurs pères demeurèrent en Égypte et dans la terre de Chanaanfut de 430ans.» Ce nombre a donc son point dedépart à l’arrivée d’Abraham en Palestine. Or, commedepuis cette époque jusqu’à la venue de Jacob en Égypteil s’est écoulé 215ans, le séjour des Hébreux dans laterre de Gessen eut une durée égale de 215années. Josèphe, Ant. jud., II, xv, 2, reproduit ce calcul, et d’aprèsCalmet, Commentaire littéral, Gen., xv, 13, 1724, t.i, p.145, la plupart des commentateurs se rangent à cetavis et suivent la leçon des Septante. Mais cette variantene se lisait pas dans tous les anciens manuscrits de laversion grecque, car saint Théophile d’Antioche, Ad Autolycum, l. iii, no10, t.vi, col.1136, écrit que lesIsraélites ont séjourné 430ans en Égypte. Saint Chrysostome, qui propose la durée de 215ans, In Genesim, Hom. xxxvii, Patr. gr., t.liii, col.344, admet cependantailleurs, In Acta apost., Hom. xvi, Patr. gr., t.lx, col.129, que les Hébreux sont restés dans la terre desPharaons 400ans et plus. Le Talmud de Jérusalem, traitéMeghilla, trad. Schwab, t.vi, 1883, p.218, signale ceverset 40 du chapitre xii de l’Exode comme un des treizepassages que les Septante ont modifiés dans leur traductiondu Pentateuque à cause du roi Ptolémée. D’ailleursles mots: «et de leurs pères…, et dans la terre de Chanaan,» ne cadrent guère avec le contexte, qui ne parleque de l’Égypte, et paraissent être des gloses ajoutées autexte original.
Les tenants de la date la plus courte confirment leursentiment par le témoignage de saint Paul, Gal., iii, 17, et par le peu de longueur de la généalogie de Moïse.Cf. Dom. Palmieri, Comm. in Epist. ad Galatas, 1886, p.141-144. L’Apôtre, en effet, parle incidemment de ladate de la promulgation de la loi, faite 430ans après lapromesse. Mais il ne précise pas le point de départ deces 430années, et au lieu de le prendre à la premièrepromesse de Dieu à Abraham, à son entrée dans le paysde Chanaan, on peut fort bien le rapporter aux promessespostérieures, réitérées à Abraham, Isaac et Jacob.Cf. Beelen, Comment. in Acta Apost., 1850, t.i, p.122-124; Patrizi, In Actus Apost. comment., 1867, p.46-50. Quantà la généalogie de Moïse, on peut à bon droit la considérercomme une de ces généalogies raccourcies dontnous avons parlé. Voir Caath, t.ii, col.1-3.
Le texte hébreu, qui donne une durée de 430ans, n’est pas isolé. Il est reproduit par le Targum d’Onkélos, la Peschito, la Vulgate latine, la version arabe de Saadiaset la version grecque de Venise. Il est confirmé par d’autresdonnées bibliques. Le temps de la captivité des Hébreuxavait été prédit par Dieu à Abraham: «Sache que tesdescendants vivront en qualité d’étrangers dans un paysqui ne leur appartiendra pas; on les asservira et on lespersécutera durant quatre cents ans.» Gen., xv, 13. Cetteprophétie, rappelée par le diacre saint Etienne, Act., vii, 6 et 7, se lit aussi bien dans la version des Septante quedans le texte hébreu, et annonce en nombre rond la duréedu séjour des Israélites en Égypte. Dieu ajoute, ꝟ. 16, quela postérité d’Abraham reviendra en Palestine à la quatrièmegénération (hébreu: dôr). Le mot dôr signifie «période de vie humaine», et peut s’entendre d’un siècle.Des interprètes rattachent aussi à cette prophétie la parolede saint Paul dans son discours à la synagogue d’Antiochede Pisidie. Act., xiii, 19-20. Ils adoptent la leçon de laVulgate, qui au point de vue critique est la meilleure, et ilsentendent le nombre de 450ans environ des 400annéesde Gen., xv, 13, plus les 40ans de séjour dans le désertet les 7 de la conquête de la Palestine par Josué. F. Vigouroux, Manuel biblique, 9eédit., t.ii, p.59, note. Achior, général des Ammonites, rapporta plus tard, Judith, v, 9, à Holopherne, que les Israélites s’étaient multipliés enÉgypte pendant quatre cents ans au point de former unearmée innombrable. D’après quelques commentateurs, Knabenbauer, Comment, in Ezech., 1890, p.56-60; Trochon, Les prophètes, Ézéchiel, 1884, p.46-47, Ézéchiel, iv, 5 et 6, prédirait une seconde servitude d’Égypte, dontla durée est évaluée à 390, plus 40 jours, c’est-à-direà 430années, car les jours désignent les années.
À ces preuves exégétiques, on peut joindre en faveurdu chiffre de 430 un argument tiré de l’histoire d’Égypte.Il est très vraisemblable que Joseph fut amené en Égyptesous les rois Pasteurs, et on pense généralement qu’il aété ministre du pharaon ApapiII, que Manéthon nommeApophis. Cf. F. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6eédit., 1896, t.ii, p.98-101. Or entre le règnede ce roi et celui de Menephtah, sous lequel a eu lieul’exode, «il faut placer d’abord les 150ans au moins qui, d’après les égyptologues, furent nécessaires aux chefsindigènes pour détruire la domination des Pasteurs; puistoute la durée de la XVIIIe dynastie et d’une partie dela XIXe, c’est-à-dire plus de seize règnes, dont deux (ceuxde ThotmèsIII et de RamsèsII) embrassèrent à euxseuls 121ans.» J. Brucker, dans La Controverse du15 septembre 1886, p.111. La durée du séjour des Hébreuxen Égypte a donc été véritablement de 430ans. Par conséquent, si, comme le pense M.Oppert, l’exode eut lieuen 1493 avant J.-C., l’entrée des Israélites en Égypteremonte à 1923, Jacob naquit en 2053, et Abraham arrivaen Palestine en 2138. Mais ces chiffres sont loin d’êtrecertains.
VI. De l’exode à la construction du temple de Salomon..
«Tous les égyptologues, guidés par le synchronismedes époques et par l’ensemble des faits, sont d’accord pour placer la sortie des Hébreux sous laXIXe dynastie, mais ils sont divisés sur le nom du roi souslequel s’accomplit ce grand événement. Pour quelques-uns, comme M.Maspero, c’est SétiII; pour Lepsius, deRougé et Chabas, suivis par presque tous les savants deFrance, d’Angleterre et d’Allemagne, par MM.Lenormant, Sayce, Brugsch, Ebers, etc., c’est MenephtahIer.» F. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6eédit., t.ii, p.236. Cette divergence d’opinions n’influepas notablement sur la date de l’exode. On ne peut, eneffet, la fixer exactement d’après la chronologie des roisd’Égypte, qui est encore trop incertaine. C’est d’après laBible et l’histoire des rois de Juda et d’Israël qu’on ladétermine. M.Oppert, Salomon et ses successeurs, ch.xvii, la rapporte au mois d’avril 1493 avant J.-C. Les autreschronologistes ne s’en écartent que de quelques années: Lauth aboutit à 1491, l’abbé de Moor à 1500.
L’intervalle qui sépare l’exode de la construction dutemple de Salomon est mesuré en chiffres précis, IIIReg., vi, 1; il fut de 480ans selon le texte hébreu, et de 440suivant les Septante. Cette date a été beaucoup discutée.On a contesté son authenticité, on a voulu en faire unchiffre cyclique, parce que 480 est douze fois quarante.Des chronologistes, les uns la trouvent trop faible etveulent l’élever; les autres l’estiment trop haute et veulentl’abaisser. Les premiers se fondent sur la chronologie dulivre des Juges. La durée de chaque judicature est indiquéepar l’écrivain sacré, et la somme totale des chiffresbibliques est de 410ans. Si on y ajoute la judicatured’Héli, qui fut de 40ans, IReg., iv, 18, et l’intervalled’Héli à la quatrième année de Salomon, intervalle quiest de 84ans, on obtient la somme de 534. Avec les 65ansécoulés de la sortie d’Égypte à la mort de Josué, en négligeantles deux chiffres inconnus de la judicature deSamuel avant l’avènement de Saül et du temps qui séparaOthoniel de Josué, on arrive, au plus bas chiffre, à untotal de 599ans. Il coïncide assez exactement avec lasupputation de 592ans que Josèphe compte de la sortied’Égypte à la construction du temple. Ant. jud., VIII, iii, 1. Les commentateurs des Actes, qui dans ce livre, xiii, 20, adoptent la leçon du «texte reçu», accordent àla période des Juges une durée de 450ans et rejettent ladate de IIIReg., vi, 1. Crampon, Les Actes des Apôtres, 1872, p.244-245. Cf. Crelier, Les Actes des Apôtres, 1883, p.158-159. Pour concilier ces données en apparence contradictoires, Danko, Historia revelationis divinæ V. T., 1862, p.213-215, a gratuitement supposé que l’auteur dulivre des Rois, écrivant dans le sens théocratique, a passésous silence les années durant lesquelles les Israélitess’étaient livrés à l’idolâtrie et avaient été réduits enservitude. La seule conciliation valable est d’admettreque plusieurs juges ont été contemporains. Une étudeattentive du texte suggère d’ailleurs cette solution, bienqu’on ne puisse déterminer que par conjecture quelsjuges ont vécu simultanément. Cf. Vigouroux, Manuel biblique, 9eédit., t.ii, p.57-62; Clair, Les Juges et Ruth, 1880, p.10-19; de Hummelauer, Comment. in lib. Judicum et Ruth, 1888, p.12-13; de Moor, La date de l’exode, dans le Compte rendu du troisième congrès scientifique international des catholiques, 1895, 2esect., p.111-115.Des égyptologues ont poussé plus loin l’hypothèse de lasimultanéité des judicatures, et dans le dessein d’établirun synchronisme parfait entre l’histoire sainte et l’histoired’Égypte, ils ont réduit de 300 ou 350années lapériode du désert, de Josué, des Juges et de David.Cf. Lenormant et Babelon, Histoire ancienne de l’Orient, 9eédit., t.vi, 1888, p.208. Mais la chronologie égyptienneau delà de la XXIIe dynastie n’est pas assez sûre pourinfirmer la donnée du livre des Rois, que nous maintenonsjusqu’à preuve contraire. Cf. de Moor, loc. cit., p.117-121. Si donc l’exode a eu lieu en 1493, Salomonaurait commencé à construire le temple du Seigneuren 1013 avant J.-C.; mais les synchronismes de l’histoireancienne semblent établir que ce ne fut que quelquesannées plus tard que Salomon entreprit cette grandeœuvre.
VII. De la construction du temple de Salomon à sa destruction par les Chaldéens.
Les dates de cettepériode ont été notées avec soin dans les deux dernierslivres des Rois. L’auteur, qui a consulté des sources aujourd’huiperdues, donne deux listes royales, celle desrois d’Israël et celle des rois de Juda. Leur conciliationest extrêmement malaisée, et elle suscite des difficultésqui ne sont pas encore résolues. Saint Jérôme, qui lesavait remarquées, écrivait au prêtre Vjtalis, Epist. lii, 5, t.xxii, col.675-676, que s’arrêter à ces questions étaitplutôt l’affaire d’un homme oisif que celle d’un hommestudieux. Sur le trône de Juda, Roboam a régné 17ans, IIIReg., xiv, 21; IIPar., xii, 13; Abia 3, IIIReg., xv, 2; IIPar., xiii, 2; Asa 41, IIIReg., xv, 10; IIPar., xvi, 13; Josaphat 25, IIIReg., xxii, 42; IIPar., xx, 31; Joram 8, IVReg., viii, 17; IIPar., xxi, 20; Ochosias 1, IVReg., viii, 26; IIPar., xxii, 2; Athalie 6, IVReg., xi, 3; IIPar., xxii, 12; Joas 40, IVReg., xii, 1; IIPar., xxiv, 1; Amasias 29; IVReg., xiv, 2; IIPar., xxv, 1; Ozias 52, IVReg., xv, 2; IIPar., xxvi, 3; Joatham 16, IVReg., xv, 33; IIPar., xxvii, 1; Achaz 16, IVReg., xvi, 2; IIPar., xxviii, 1; Ézéchias 29, IVReg., xviii, 2; IIPar., xxix, 1; Manassé 55, IVReg., xxi, 1; IIPar., xxxiii, 1; Amon 2, IVReg., xxi, 19; IIPar., xxxiii, 21; Josias 31, IVReg., xxii, 1; IIPar., xxxiv, 1; Joachaz 3mois, IVReg., xxiii, 31; IIPar., xxxvi, 2; Joakim 11ans, IVReg.,xxiii, 36; IIPar., xxxvi, 5; Jéchonias ou Joachin 3mois et 10jours, IVReg., xxiv, 8; IIPar., xxxvi, 9; Sédécias11ans, IVReg., xxiv, 18; IIPar., xxxvi, 11. Dans leroyaume d’Israël, JéroboamIer régna 22ans, IIIReg., xiv, 20; Nadab 2, ibid., xv, 25; Baasa 24, xv, 33; Éla 2, xvi, 8; Zambri 7jours, xvi, 15; Amri 12ans, xvi, 23; Achab 22, xvi, 29; Ochozias 2, xxii, 52; Joram 12, IVReg., iii, 1; Jéhu 28, ibid., x, 36; Joachaz 17, xiii, 1; Joas 16, xiii, 10; JéroboamII 41, xiv, 23; Zacharie 6mois, xv, 8; Sellum 1mois, xv, 13; Manahem 10ans, xv, 17; Phaceia2, xv, 23; Phacée 20, xv, 27; Osée 9, xvii, 1. Plusieursde ces chiffres ne cadrent pas avec d’autres donnéeschronologiques des livres des Rois et des Paralipomènes.Il n’entre pas dans notre dessein de les discuterici; leur discussion aura sa place dans divers articles dece Dictionnaire. On pourra d’ailleurs consulter J. Oppert, Salomon et ses successeurs, dans les Annales de philosophie chrétienne, t.lxxxviii, 1875, p.258-272, 325-338; t.lxxxix, p.182-197, 339-345; Clair, Les livres des Rois, 1884, t.i, p.187-202; de Moor, La date de l’exode, p.107-111.
Une difficulté plus générale provient de la différenceque présentent les totaux de ces listes dans l’espace deleur coïncidence. Si on additionne, en effet, les chiffresdepuis la première année de Roboam, on commence laséparation des deux royaumes, jusqu’à la sixième annéed’Ézéchias, durant laquelle Samarie fut prise, IVReg., xviii, 10, on trouve pour les rois de Juda une somme de261ans, et pour ceux d’Israël 240ans seulement. II y adonc entre les deux listes un désaccord d’une vingtained’années. On a imaginé de nombreux systèmes de conciliation.Des critiques récents ont diversement allongé lesrègnes de JéroboamII et de Phacée; d’autres ont admisdes associations au trône dans le royaume de Juda. Plusgénéralement, on pense que la succession a été régulièreet constante sur le trône de David, et on introduit dansIsraël deux interrègnes ou périodes d’anarchie. Le premier, qui dura onze ans, est placé entre le règne de JéroboamIIet celui de son fils Zacharie, qui commença à régnerseulement la trente-huitième année d’Azarias ou Ozias deJuda. IVReg., xv, 8. Le second, de neuf années, auraitexisté entre Phacée et Osée. Cf. S. Munk, Palestine, 1881, p.299-301. Mais le texte sacré semble affirmer que cesprinces se sont succédé immédiatement, et il y a peu de vraisemblance qu’à deux reprises différentes le trône d’Israëlsoit resté inoccupé pendant plusieurs années. F. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 5eédit., t.iv, p.117. Ces interrègnes, qui n’ont point de fondementdirect dans la Bible, sont donc des hypothèses, inventées par des chronologistes embarrassés, et ilspeuvent être un indice que la chronologie ordinaire desrois juifs est trop longue.
On a découvert à Ninive un canon chronologique assyrien, qui ne cadre avec les chiffres bibliques qu’à la conditionde réduire d’une quarantaine d’années le total desrègnes des rois de Juda. C’est une liste de personnagesappelés limmu ou éponymes, qui donnaient leurs noms àl’année comme les archontes à Athènes et les consulsà Rome. Elle commence au règne de BinnirarII, en893 avant J.-C., et s’étend au moins jusqu’à 647. F. Vigouroux, ibid., p.38-39. Elle permet donc de contrôler lesdonnées bibliques correspondantes. Si les deux chronologiessont en parfaite concordance pour la prise de Samarie par les Assyriens, en 721, cf. F. Vigouroux, ibid., p.148-150; Fl. de Moor, La date de l’exode, loc. cit., p.90-107, il y a désaccord manifeste entre elles sur plusieurspoints de rencontre. Les savants n’ont pas su jusqu’àprésent s’entendre pour la conciliation des chiffresdivergents. Les uns défendent la chronologie biblique, les autres l’abandonnent. Comme elle est artificielle etque la discordance des chiffres du texte actuel de la Bibleest certainement le résultat des fautes de copistes dansla transcription des nombres, il est permis d’accepter, «provisoirement du moins, que les personnages dont lesnoms se trouvent mentionnés ensemble dans les inscriptionscunéiformes et correspondent aux noms bibliquesont été contemporains, quelque embarras que l’on puisseéprouver d’ailleurs à faire concorder les dates fourniespar la Bible d’une part, par les monuments assyriensde l’autre.» F. Vigouroux, ouvr. cit., p.27. Examinonsles points de contact qui créent difficulté.
D’après la chronologie biblique généralement reçue, Achab, roi d’Israël, mourut l’an 897 avant notre ère. VoirAchab, t.i, col.120. Or les inscriptions assyriennes racontentqu’il fut battu avec les rois confédérés, à Karkar, par le roi de Ninive SalmanasarII, en 854, c’est-à-direplus de quarante ans après la date qu’on assigne à samort. F. Vigouroux, La Bible, etc., t.iv, p.47-51. L’affirmationdes textes cunéiformes est claire et précise etne souffre aucune équivoque, tandis que les calculs deschronologistes bibliques peuvent être erronés. Il faut doncadmettre, semble-t-il, la contemporanéité d’Achab et deSalmanasarII.
Ozias, roi de Juda, régna, dit-on, de 809 à 758. Or lesinscriptions de ThéglathphalasarII nous le montrent enguerre avec ce roi en l’an 742 ou 740, seize ou dix-huitans après sa mort. Manahem, roi d’Israël, occupaitle trône de 770 à 759, et vingt et un ans après la fin deson règne, en 738, le même Théglathphalasar le compteparmi ses tributaires. F. Vigouroux, ibid., p.100-107.Pour maintenir la chronologie biblique, M.Oppert penseque l’Azriyahu des inscriptions n’est pas Azarias ouOzias, père de Joatham et grand-père d’Achaz; mais unusurpateur, le fils de Tabéel, dont parle Isaïe, vii, 6.Quant à Manahem, qui paya tribut à Phul, il est distinctde ManahemII, tributaire de Théglathphalasar. La chronologie biblique, etc., dans les Annales de philosophie chrétienne, t.lxxviii, 1869, p.97-99, 236-242; Salomon et ses successeurs, ibid., t.xc, 1876, p.34-42. Cette explicationest inadmissible, et il faut reconnaître qu’Azarias, roi de Juda, Manahem, roi d’Israël, et Théglathphalasar, roi de Ninive, qui semble devoir être identifié avec Phul, mentionné IVReg., xv, 19-20; IPar., v, 26 (sur cetteidentification, voir Vigouroux, ouvr. cit., p.86-99), sontcontemporains. Cf. G. Maspero, Histoire ancienne des peuples de l’Orient, 5eédit., 1893, p.397-398, note.
Sur un autre point, les documents bibliques et cunéiformes se trouvent encore en désaccord. Le IVe livre desRois, xviii, 13, nous apprend que Sennachérib marchacontre les villes de Juda la quatorzième année du règned’Ézéchias, c’est-à-dire en 713, puisque le roi juif étaitmonté sur le trône en 727. Or, d’après le canon des éponymes, Sennachérib est devenu roi en 705, et son expéditioncontre la Palestine eut lieu en 701. Après son désastrese seraient produites seulement la maladie d’Ézéchias etl’ambassade de Mérodach-Baladan, roi de Babylone.IVReg., xx, 1 et 12. Or Mérodach-Baladan aurait régnéde 722 à 710. La meilleure réponse à cette difficulté estde reconnaître que le récit biblique a interverti les faits.La maladie d’Ézéchias eut lieu réellement la quatorzièmeannée de son règne, puisque le roi vécut quinze ansencore après sa guérison et que son règne dura vingt-neufans. L’ambassade de Mérodach-Baladan lui est postérieureet peut être placée même en 703 ou 702, pendantque ce roi, originaire de la basse Chaldée, après avoirété chassé de Babylone, eût repris possession du trônede cette ville. L’invasion de Sennachérib se fit en 701. Sile livre des Rois met ces trois faits dans un ordre inverse, c’est probablement parce que son auteur a adopté l’arrangementnon chronologique du prophète Isaïe, xxxvi-xxxix.La date, IVReg., xviii, 13, serait déplacée etdevrait venir en tête du récit de la maladie d’Ézéchias.Oppert, Salomon et ses successeurs, loc. cit., t.lxxxix, p.184-185; Clair, Les livres des Rois, t.i, p.209-211; F. Vigouroux, La Bible, etc., t.iv, p.183-215.
Ce fut l’empire de Babylone qui renversa le trône deJuda. Avant sa royauté, Nabuchodonosor fit une campagnecontre Néchao, roi d’Égypte; Joakim, roi de Juda, se reconnut son tributaire. Mais il se révolta et refusa depayer le tribut. Quand Nabuchodonosor arriva en Judée, Joakim était mort et remplacé par son fils Jéchonias. Aubout de trois mois de règne, celui-ci fut emmené encaptivité à Babylone. Son oncle Sédécias fut mis sur letrône; il se révolta à son tour. Nabuzardan assiégea Jérusalem, qui, vaincue par la faim, se rendit en 599, aprèsune longue résistance. Cette date termine la période quenous étudions.
On le voit, la chronologie de l’époque des rois d’Israëlet de Juda n’est pas aussi ferme et aussi assurée qu’onle croit communément. Elle aurait besoin d’être raccordéeavec la chronologie assyrienne. Le P.Brunengo, danssa Chronologia biblico-assira, Prato, 1886, a essayé dele faire et a ramené le commencement du schisme desdix tribus à l’an 930 avant J.-C., au lieu qu’on lui assigneordinairement l’an 976. Pour entrer dans cette voie, nousreproduirons ici la liste chronologique des rois juifs, adoptée par Lenormant et Babelon, Histoire ancienne de l’Orient, 9eédit., t.vi, 1888, p.667: Saül, 1050-1012; David, 1012-973; Salomon, 973-932. Dans le royaumed’Israël: JéroboamIer, 932-911; Nadab, 911-909; Baasa, 909-886; Éla, 886-885; Zambri, 885; Amri, 885-873; Achab, 873-843; Ochozias, 843-842; Joram, 842-830; Jéhu, 830-802; Joachaz, 802-785; Joas, 785-769; JéroboamII, 769-744; Zacharie, 744; Sellum, 744; Manahem, Phacéiaet Phacée, tour à tour renversés et rétablis, 744-732; Osée, 732-724. Chute du royaume d’Israël, en 721. Dansle royaume de Juda, Roboam, 932-915; Abia, 915-912; Asa, 912-870; Josaphat, 870-836; Joram, 836-831; Ochozias, 831-830; Athalie, 830-823; Joas, 823-783; Amasias, 783-764; Ozias ou Azarias, 764-739; Joatham, 739-735; Achaz, 735-729; Ézéchias, 729-688; Manassé, 688-645; Amon, 645-643; Josias, 643-612; Joachaz, 612; Joakim, 612-600; Jéchonias ou Joachin, 600-599; Sédécias, 599.Comparer avec la chronologie la plus communément reçue, qui est reproduite par J. Oppert, Salomon et ses successeurs, dans les Annales de philosophie chrétienne, t.xc, p.212-214, et t.xci, p.208-209, et par F. Vigouroux, Manuel biblique, 9eédit., t.ii, p.98-99.
VIII. De la captivité de Babylone à la naissance de Jésus-Christ.
Pour cette période, une première date est fournie par Jérémie, xxv, 11; mais les commentateursne sont pas d’accord sur le point de départ decette durée de 70ans de captivité. Les uns la font partirde la première déportation, qui eut lieu la quatrièmeannée de Joakim, en 606 (ou 608), selon les calculs ordinaires, et trouvent 70ans jusqu’à l’édit que Cyrus portaen 536 (ou 538), pour rendre aux Juifs le droit de rebâtirle temple de Jérusalem. IEsdr., i, 1. Cf. Clair, Esdras et Nehemias, 1882, p.1-2, et Trochon, Jérémie, 1883, p.165-166. Les autres prennent comme premier terme ladestruction de Jérusalem, IIPar., xxxvi, 21-23, en 599, et comme dernier la reprise de la reconstruction dutemple, qui se fit la deuxième année de Darius, fils d’Hystape, Aggée, i, 1-14, et IEsdr., v, 1, en 519.
Quoi qu’il en soit du commencement de la captivité deBabylone, prédite par Jérémie, la première année de Cyrusà Babylone, en 536, beaucoup de captifs retournèrent enJudée, sous la conduite de Zorobabel et du grand prêtreJosué, et dès leur arrivée ils firent les préparatifs nécessairesà la reconstruction du temple de Jérusalem. Mais, par suite de nombreux obstacles, cet édifice ne put êtreachevé que la sixième année de Darius, c’est-à-direen 516. IEsdr., vi, 15. La septième année d’Artaxerxès, Esdras ramena en Judée d’autres captifs. IEsdr., vii, 7.La vingtième année d’Artaxerxès, Néhémie, échanson dece prince, obtint l’autorisation de rebâtir les murs et lesportes de Jérusalem. IIEsdr., ii, 1-8. On discute aujourd’huisur l’identité de ce roi. La plupart des exégètesadmettent qu’Esdras et Néhémie ont su gagner, à treizeans de distance, les faveurs du même roi, qu’ils identifientavec ArtaxerxèsIer, dit Longue-Main, qui régna de464 à 424. Esdras aurait donc ramené sa caravane en 457, et Néhémie aurait relevé les murailles de Jérusalemen 444, et il serait resté en Palestine jusqu’en 433, latrente-deuxième année du règne. IIEsdr., v, 14. F. deSaulcy, Étude chronologique des livres d’Esdras et de Néhémie, Paris, 1868, p.41-42, et Kaulen, Einleitung in die heilige Schrift, 2eédit., 1890, p.208-211, tiennentpour ArtaxerxèsII, surnommé Mnémon. M.Van Hoonackerdistingue les deux rois. Il pense que Néhémie estrevenu en Judée la vingtième année d’ArtaxerxèsIer, mais qu’Esdras, au lieu d’avoir opéré son retour treizeans auparavant, n’avait relevé la religion juive que cinquante-neufans plus tard, sous Artaxerxès Mnémon (404-358). Voir Artaxerxès, t.i, col.1038-1043. Cf. Revue des questions historiques du 1er juillet 1893, p.5-48; Revue biblique, octobre 1894, p.561-585; avril 1895, p.186-202; Science catholique, 1895, p.135-152, 437-459, 526-544.
Depuis Néhémie, dont la fin n’est pas connue, jusqu’auxMachabées, il s’écoule une période de 260ans surlaquelle nous sommes peu renseignés et dont la Biblene fixe pas la chronologie. Mais les deux livres des Machabéesdatent les événements qu’ils racontent d’aprèsl’ère des Séleucides. Cette ère part de l’automne de 312avant J.-C. Cf. Patrizi, De consensu utriusque libri Machabæorum, Rome, 1856, p.15-41, et H. Waddington, Les ères employées en Syrie, dans les Comptes rendus de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, 1865, p.35-42. Il est donc facile de déterminer les dates deslivres des Machabées. Mathathias se souleva contre AntiochusÉpiphane l’an 145 des Séleucides, par conséquentl’an 167 avant l’ère chrétienne; il mourut l’année suivante.IMach., ii, 70. Son fils Judas fut à la tête de larévolte jusqu’à sa mort, en 161. IMach., ix, 3 et 18. Jonathas, frère de Judas, continua la lutte jusqu’en 143.L’an 142, la première année de Simon, la nation juiveredevint indépendante. IMach., xiii, 41 et 42. Simon, qui mourut en 135, eut pour successeur son fils, JeanHyrcan. IMach., xvi. Cf. Vigouroux, Manuel biblique, 9eédit., t.ii, p.220-221, 255-257, 843-844. Pour la suitede l’histoire juive, la Bible n’indique pas d’autre dateque la mort d’Hérode le Grand. Dans l’intervalle, lesprinces ou rois qui gouvernèrent la Judée furent Jean HyrcanIer, 135-107; AristobuleIer, 107-106; AlexandreJannée, 106-79; HyrcanII, 79-66; AristobuleII, 66-63; HyrcanII rétabli, 63-40; HérodeIer, 40-4 avant l’èrechrétienne.
IX. Durée de la vie de Jésus.
Le commencementde l’ère chrétienne a été fixé au viesiècle, par un moine, Denys le Petit, à l’an 754 de la fondation de Rome.D’après lui, Notre-Seigneur naquit le 25 décembre del’an de Rome 753. Mais il se trompa dans ses calculs etfit commencer trop tard l’ère chrétienne. La date de lanaissance de Notre-Seigneur est controversée. Ce qu’ily a de certain, c’est que Jésus-Christ est né sous Hérode, Matth., ii, 1, au moment où s’exécutait un recensementordonné par Auguste. Luc., ii, 1-5. La détermination deces deux traits du récit évangélique marque l’époque précisede la naissance de Jésus. Selon Josèphe, Ant. jud., xviii, viii, 1, et Bellum jud., i, xxxviii, 8, Hérode arégné trente-sept ans, si on compte les années de sonrègne depuis la reconnaissance de sa royauté par le sénatromain, et trente-quatre, si on calcule son règne effectifà partir de son entrée à Jérusalem. Or le sénat déclaraHérode roi de la Palestine sous le consulat de DomitiusCalvinus et d’Asinius Pollion, l’an 714 de Rome, 40 avantJ.-C. Hérode s’empara de Jérusalem sous le consulat deVipsanius Agrippa et de Caninius Gallus, l’an 717 deRome ou 37 avant l’ère chrétienne. La dernière annéedu règne d’Hérode fut donc l’an 750 de Rome ou 4 avantnotre ère. D’après la durée des règnes de ses fils et successeurs, on peut conclure qu’Hérode mourut avant le7 nisan ou 2 avril de cette année. Si Jésus est né le25 décembre, ce n’a pu être plus tard que le 25 décembre749.
D’autres dates pourront nous apprendre si la naissancede Jésus remonte à quelques années plus tôt. Saint Luc, ii, 1, dit qu’elle eut lieu lorsque fut fait un premierdénombrement du monde romain, Quirinius (Vulgate: Cyrinus) étant gouverneur de Syrie. Or, d’après Josèphe, Ant. jud., xviii, i, 1, Quirinius fut envoyé en Syrie, avec la mission de recenser la Judée, la trente-septièmeannée après la bataille d’Actium, c’est-à-dire environdix ans après la mort d’Hérode, quand Archélaüs futdéposé du trône et la Judée réunie à l’empire. Pour concilierces renseignements en apparence contradictoires, on a forgé toute sorte d’hypothèses. On a donné à πρώτη le sens de προτέρα, qu’il a, sinon dans le Nouveau Testament, du moins chez les auteurs classiques. On a traduit: «Ce dénombrement arriva avant celui qui se fitquand Quirinius gouvernait la Judée.» Mais Th. Mommsen, Res gestæ divi Augusti, 2eédit., 1883, p.161-178, a démontré qu’une inscription, trouvée à Tivoli en 1764, ne pouvait convenir qu’à Publius Sulpicius Quirinius. Orelle affirme qu’il fut deux fois légat de Syrie, iterum Syriam (obtinuit). Il n’est donc plus nécessaire de recourir à l’interprétation, en apparence forcée, de πρώτη dans le sens de προτέρα. Toutefois la difficulté reste, car la première légation de Quirinius en Syrie n’a pu avoir lieu qu’en 751, ou au plus tôt à la fin de 750 de Rome, par conséquent après la mort d’Hérode. Pour la résoudre, on a pensé que le recensement dont parle saintLuc avait été commencé avant l’an 750 de Rome, par legouverneur de ce temps, qui pourrait être Sentius Saturninus, nommé par Tertullien, Cont. Marcion., iv, 19, t.ii, col.405; mais, interrompu par la mort d’Hérode, il neput être achevé que quand Quirinius prit, vers 751, possessionde sa province. Cf. E. Desjardins, Le recensement de Quirinius dans la Revue des questions historiques, 1867, t.ii, p.5-65; Patrizi, Della descrizione universale mentovata da San Luca, Rome, 1876; F. Vigouroux, Le Nouveau Testament et les découvertes archéologiques modernes, 2eédit., 1896, p.89-130. Ainsientendu, le texte de saint Luc confirmerait l’opinion quiplace la naissance du Sauveur avant l’an 750 de Rome. Eneffet, l’édit de recensement général de l’empire a dû être Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/381 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/382 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/383 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/384 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/385 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/386 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/387 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/388 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/389 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/390 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/391 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/392 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/393 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/394 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/395 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/396 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/397 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/398 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/399 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/400 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/401 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/402 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/403