Dictionnaire de la Bible/Tome 3.2.b JÉRÉMIE-JOED - Wikisource (2025)

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Dictionnaire de la Bible

Letouzey et Ané, (Volume III,p.1257-1258-1579-1580).

Tome 3.2.a ISAÏE-JERCAAM

Tome 3.2.c JOËL-KURZENIECKI

JÉRÉMIE (hébreu: Irmeyâhû; Septante: ’Iepeir’a;),nom de huit Israélites.

1. JÉRÉMIE, de la tribu de Juda, originaire de Lobna,père d’Amital qui devint la femme du roi Josias etla mère du roi Sédécias. IV Reg., xxiii, 31; xxiv, 18;Jer., lii, 1.

2. JÉRÉMIE, un des chefs de la demi-tribu de Manassétransjordanique. I Par., v, 24.

3. JÉRÉMIE, un des vaillants soldats de David quiétait allé le rejoindre à Siceleg pendant la persécutionde Saul. I Par., xii, 4.

4. JÉRÉMIE, le cinquième des braves Gadites quis’étaient joints à la petite armée de David, lorsque celui-cise cachait dans le désert de Juda pour échapper auxpoursuites de Saul. I Par., xii, 10.

5. JÉRÉMIE, compagnon de Jérémie 4 et de la mêmetribu, compté, comme le dixième dans la liste des bravesGadites qui s’étaient réunis à David. I Par., xii, 13.

6. JÉRÉMIE, chef d’une des vingt et une familles sacerdotalesqui paraissent être énumérées dans II Esd., x, 28; xii, 1. Il signa avec les autres principaux du peuplel’alliance qui fut renouvelée avec Dieu du temps de Néhémie.II Esd., x, 2. D’après le ꝟ. 12 de II Esd., xii, lechef de la famille sacerdotale de Jérémie, au temps dugrand-prêtre Joiacim, s’appelait Hanania, et ce fut ce dernier(dont le nom est écrit Hanani au ꝟ. 35), qui pritpart à la dédicace des murs de Jérusalem relevés par Néhémie.Voir Hananias 9, col. 15.

7. JÉRÉMIE, père de Jézonias le Réchabite. Jer., xxxv, 3.

8. JÉRÉMIE (hébreu: Irmeyâhû, Jer., i, 1; ou formeabrégée, lrmeyâh, en tête du livre; Dan., ix, 2; Septante: ’Ispsiiîaç; Vulgate: Jeremias; saint Jérôme et autres:therenuas), le second des quatre grands prophètes(fig. 219). Ce nom dérive de rûm et de Jéhovah. SaintJérôme traduit: «celui que dieu a élevé;» Gesenius,Thésaurus, p. 1290: «celui que Jéhovah a établi;» d’autres, tels que J. G. Carpzov, Introductio in V. T.,

[Image à insérer -->]219. — Le prophète Jérémie. Bas-relief d’une des porterde bronze de Saint-Paul-hors-les-Murs. Voir col. 941.D’après S. M. Nicolai, pl. XV.

Nàgelsbach, Hengstenberg,: «celui que Jéhovah a jeté,rejeté» (de rdmdh pour rûm), par allusion à Jer., i, 10.Cette dernière étymologie est peu vraisemblable.

I. Origine et enfance de Jérémie.

Jérémie étaitfils d’Helcias et de race sacerdotale. Jer., i, 1. Clémentd’Alexandrie, Stroni., s, 21, t. viii, col. 849, l’auteur desQusestiones hebraic, I Par., ix, 11, dans les œuvres desaint Jérôme, t. xxiii, col. 1378, et quelques autres auteursont soutenu que son père était le grand-prêlrellelcias, qui, sous le roi Josias, découvrit dans le templele livre de la loi. IV Reg., xxii, 8; II Par., xxxiv, 914-15. La plupart des commentateurs rejettent cette identificationpour deux raisons: —

1° Le père de Jérémien’est jamais appelé grand-prêtre, comme son homonyme,IV Reg., xxii, 8, mais simplement prêtre d’Anathoth.Jer., 1, 1. —

2° Le grand-prêtre appartenait depuis Salomonà la famille d’Éléazar, tandis que les prêtres d’Anathothétaient de la branche d’Ithamar, le plus jeunedes fils d’Aaron. Exod., vi, 23; cf. III Reg., ii, 26. —

Jérémie naquit à Anathoth, petite localité de la tribude Benjamin, au nord-est de Jérusalem. Jos., xxi, 18;Is., x, 30. Voir Anathoth, t. i, col. 550-552. Il appartenaità une famille distinguée, comme on peut le concluredes égards qu’avaient pour lui les rois et les grands,Jer., xxvi, 10, 16, 17, 24; xxxvi, 19; XL, 5-6, et de la considérationdont il jouissait auprès des Chaldéens. Jer.,XL, 1-4. De plus il eut pour secrétaire Baruch, hommed’une condition élevée, ce qui suppose que lui-mêmeappartenait à l’aristocratie. Jérémie dut être élevé dansl’attachement aux traditions mosaïques, et s’appliquer àl’étude des saintes Écritures, tout particulièrement desprophéties d’Isaie et de Michée, si l’on en juge par sonlivre. On peut conjecturer que c’est dans sa jeunesse qu’il

se lia d’amitié avec Nérias, fils de Maasias, gouverneurde Jérusalem, II Par., xxxiv, 8, lequel coopéra avec Helcias et Saphan aux réformes entreprises par le roi Josias.Cette amitié de Nérias porta ses fruits, car ses deux filsBaruch et Saraïas devinrent les disciples de Jérémie.Jer., xxxvi, 4; ii, 59.

II. Vocation au ministère prophétique.

Il étaitencore jeune, na’ar, lorsqu’il fut appelé au ministèreprophétique. Jer., i, 6. Nous savons aussi qu’il n'étaitpas alors marié. Jer., xvi, 2. On peut conclure de làqu’il devait être âgé de 18 à 25 ans au moment de sonappel. Sa vocation au ministère prophétique eut lieu la13° année du règne de Josias, Jer., i, 2; xxv, 3, c’est-àdire en 627 ou 626 avant Jésus-Christ selon la chronologieordinaire, 5 ans avant la découverte du livre de la loi dansle Temple par le grand-prêtre Helcias. Son ministère prophétique dura longtemps et s’exerça principalement souscinq rois successifs, à une époque remplie de troubleset d’agitations, dont il faut dessiner les grands traits.

III. Milieu historique.

Jérémie vécut à une époquetrès troublée. De son temps le royaume de Juda fut presquecontinuellement en hutte aux convoitises de deux puissances rivales: les Égyptiens et les Chaldéens, dont l’influence était tour à tour prépondérante; aux intrigues deces deux peuples il faut ajouter aussi une invasion desScythes qui exercèrent de grands ravages en Palestine.Voir Egypte, t. ii, col. 1603-1621.

Jérémie eut la douleur de voir périr sur le champ debataille Josias, un roi selon le cœur de Dieu, et il déplora amèrement sa mort. II Par., xxxv, 25. Voir Josias. Quelque temps après, Néchao, le vainqueur deJosias, fut battu à son tour à Charcamis par Nabuchodonosor, Jer., xlvi, 2-6, 11, 12, et Joakim, fils de Josias,qui régnait alors sur Juda, dut se soumettre au roi deBabylone. Voir Néchao. S'étant révolté plus tard contrelui, il fut transporté à Babylone. IV Reg., xxiv, 5-10;II Par., xxxvi, 6-9. Son fils et successeur Jéchonias eutle même sort. IV Reg., xxiv, 11-16; II Par., xxxvi, 10;Ézech., i, 1. Voir Joakim et Jéchonias. Nabuchodonosor établit roi à la place de Jéchonias son oncle Matthanias, âgé de 21 ans, qui prit le nom de Sédécias. Sousle règne de ce prince, le rôle de Jérémie devient plusactif. Sédécias n’avait pas tardé à ourdir des intriguesavec Apriès. Voir Apriés, t. i, col. 796.

Le roi de Babylone, après avoir défait le Pharaon, Jer.,xxxvii, 7, alla assiéger Jérusalem. En prévision des tristesévénements qui allaient arriver, Jérémie tenta de quitterta capitale pour se réfugier dans sa ville natale, Anathoth; mais il fut arrêté, roué de coups et emprisonnédans la cour du palais où il recevait une ration de painpar jour pour sa nourriture. Jer., xxxvii, 11-20. Lesiège fut terrible; la famine se joignit à la guerre et auxmaladies pour ravager la population. IV Reg., xxv, 3;1er., xxxviii, 2. Les Juifs s’obstinèrent dans leur défense.— Après un an et demi de luttes et de souffrances, la villefut prise et Sédécias envoyé captif à Babylone. IV Reg.,xxv, 6-7; Jer., lii, 8-11. Voir Sédécias. — Nabuchodonosor délégua un de ses officiers, Nabuzardan, pour détruire la ville. Ce fut le sac et le pillage sans merci; letemple fut dépouillé de ses richesses, les colonnes en furent brisées et les dépouilles transportées à Babylone;le reste de la population qui avait survécu aux horreursdu siège, fut emmené en captivité (fig. 220). IV Reg.,xxv, 4-5, 7-21; II Par., xxxvi, 17-20; Jer., lu 6, 7, 1227. — Après le pillage les Chaldéens se retirèrent laissant le gouvernement à un ami de Jérémie, Godolias,fils d’Ahicam, lequel s'établit à Maspha. IV Reg., xxv,22; Jer., XL, 5. Jérémie devint son conseiller. Jer., XL, 6.Malheureusement Godolias ne tarda pas à être assassinépar Ismæl. IV Reg., xxv, 23-25; Jer., xl, $1-$26. VoirGodolias 3, col. 259. Enfin en 581 le reste de la population tenta une dernière fois le sort des armes; une.dernière défaite et un dernier exil consommèrent la

ruine de Juda. Josèphe, Ant. jud, X, ix, 7; XI, 1. Cettedéportation fut faite par Nabuzardan. — Jérémie marquetrois déportations: 1° la 7e année du règne de Nabuchodonosor, 3023 déportés, Jer., LU, 28; — 2° la 18e annéedu règne de Nabuchodonosor, 832 déportés, Jer., LU, 29;

— 3° la 20! année du règne de Nabuchodonosor, 745 déportés. Jer., LU, 30. En tout 4 600 déportés.

IV. Ministère prophétique.

Jérémie, appelé au ministère prophétique en 696, l’exerça sous cinq rois différents.

1° Sous Josias (639-609). — Depuis sa vocation au ministère prophétique jusqu'à la mort de Josias, l’espaced'à peu près 18 ans, Jérémie apparaît rarement. Nouspossédons quelques renseignements sur sa vie privéedurant cette période: il menait une vie très austère etne prenait part à aucune manifestation. Jer., xvi, 5, 8.

— Bientôt il fut en butte aux persécutions et de ses compatriotes, Jer., xi, 21, et de ses proches. Jer., xii, 6. Ilcombattit les calculs trop humains des Juifs qui espéraient trouver le salut dans l’alliance avec le PharaonNéchao. Jer., ii, 8, 36. Après la mort de Josias sur lechamp de bataille de Mageddo, il ne prévoit que troubleet confusion au sein de la nation. Jer., xxii, 3, 16.

2° Sous Joachaz (609-608). — Durant le règne de Joachaz, Jérémie semble avoir vécu dans le silence et la retraite; en effet dans tout son livre il n’a qu’un mot surce prince. Jer., xxii, 11, 12.

3° Sous Joakim (608-597). — Le rôle de Jérémie esttrès important pendant son règne. Le parti favorable auxÉgyptiens était maître de la situation. Jer., xxv, 18, 19;xxvil. Le prophète s’attire des persécutions parce qu’ilannonce que l’Egypte sera impuissante à défendre Jérusalem contre les Chaldéens. Jer., xviii, -XIX; xxii. La première année du règne de Joakim il faillit être victime dela fureur populaire; il échappa à la mort par l’intervention des princes de Juda. Jer., xxvi. À la suite du désastre de Charcamis (604), le prophète fit promulguer parson disciple Baruch tous les oracles divins. Ce fut Unegrande émotion dans le peuple; aussiJoakim fit-il brûlerle volume contenant les oracles. Jer., xxxvi. Jérémiedicta une seconde fois ses prophéties à Baruch. Jer., xlv.Sur ces entrefaites, il apprit que la captivité de Babylonedurerait 70 ans. Jer., xxv, 8-12. Le prophète prononça aussidivers oracles contre Joakim. Jer., xxii, 19; xxxvi, 30.

4° Sous Jéchonias (597-596). — Le prophète annonçaà ce prince éphémère les malheurs qui lui étaient réservés. Jer., xxii, 24-30. L’oracle s’accomplit à la lettrecomme nous l’avons vu.

5° Sous Sédécias (596-586). — Jérémie annonça quele peuple serait châtié, Jer., xxiv; il consola les captifsde Babylone. Jer., xxix. Consulté, ' secrètement par Sédé- *cias, le prophète lui déclare qu’il n'échappera pas auxcoups des Chaldéens. Jer., xxxviii, 18. Au moment del’invasion chaldéenne, il s’efforça de relever le couragedes Juifs et de soutenir les cœurs abattus; il acheta unchamp à Anathoth, Jer., xxxii, 6-9, parce que Dieu luiavait annoncé, Jer., xxxii, 15, la prospérité future du payssous le règne du Messie. Jer., xxxiii, 11, 16-18. — Aprèsla prise et le sac de Jérusalem, Jérémie tut délivré deprison et eut la faculté d’aller à Babylone avec ses compatriotes ou de rester en Judée; il choisit ce dernierparti et se retira à Masphath. Jer., XL, 6. Ce fut sansdoute à cette époque qu’il composa ses Lamentations,qui ne sont qu’un long gémissement sur les ruines dela cité sainte. Voir Lamentations.

V. Dernières années et mort de Jérémie.

Aprèsle meurtre de Godolias, Jérémie conseilla au peuple derester tranquille en Judée, Jer., xlii; malheureusementil ne fut pas écouté; le peuple accusa de trahison Jérémie et Baruch, Jer., xliii, 3, et les emmena en Egypte;cf. aussi IV Reg., xxv, 26; Jer., xli, 16-18; Johananétait à la tête de ces émigrants. Les Juifs furent bien accueillis par Apriès. Jérémie s’installa à Taphnès, près

de Péluse, dans la Basse-Egypte; les autres s’installèrentà Taphnès, à Migdol, à Memphis, et en général dansle pays du Sud (Phaturès). Jer., xliv, 1. C’est sur cetteterre étrangère que le prophète prononça ses derniersoracles. Jer., xliii, 8-13. il reprit avec énergie l’idolâtriedes Juifs. Jer., xliv. — On ne sait rien d’absolument certainsur ses derniers jours. Une tradition chrétiennerapporte qu’il fut lapidé à Taphnès même par les Juifsirrités. Tertullien, Adv. Scorp., viii, t. ii, col. 137;Pseudo-Épiphane, De vitis Prophetarum, t. xliii,col. 400; S. Jérôme, Adv. Jovin., ii, 37, t. xxiii, col. 335.DansHeb., xi, 37, les commentateurs voient une allusionà la mort de Jérémie.

VI. Caractère de Jérémie.

Il serait difficile de trouverun caractère à la fois plus beau, plus magnanimeet plus simple que celui de Jérémie. Son âme reflètetoutes les tendresses et les émotions. Jérémie nous apparaîtdans ses écrits profondément pieux, pénétré du sentimentde sa faiblesse et de son impuissance. Le coursdes tristes événements dont il fut témoin l’afflige etl’émeut au suprême degré. Pourtant par tempérament ilétait pacifique, et avait horreur de la lutte et du combat;il se serait plu dans la solitude et le silence. Les péchés,les égarements de son peuple et les malheurs quien seront la conséquence, le remplissent de tristesse etd’amertume; aussi fait-il les plus grands efforts pour leramener dans la bonne voie; mais ses efforts sont inutiles.— Si le sentiment de sa faiblesse rendait Jérémiecraintif et timide, la conscience de sa mission prophétiquele remplissait d’un courage capable de braver tousles dangers. Lorsque Dieu lui ordonne de parler et d’annoncerses volontés au peuple, il est comme transformé,et rien ne l’arrête: ni les menaces, ni les insultes, niles supplices, ni les grands, ni les petits, ni les rois, nile peuple ne peuvent l’empêcher de remplir la missionqu’il a reçue d’en haut; c’est un mur d’airain qui résiste àtous les assauts et à toutes les attaques. Jer., i, 18; xv, 20.

VII. Place de Jérémie parmi les prophètes.

Parsa vie, Jérémie fut la figure même de Jésus-Christ, surtoutde ses souffrances et de sa passion. C’est pourquoil’Église, dans sa liturgie, n’a pas craint d’appliquer àNotre-Seigneur un certain nombre de passages qui serapportent directement au prophète lui-même. Le plusconnu de ces passages est Jer., xi, 19 b: «Mettons du boisdans son pain, et arrachons-le de la terre des vivants.»

— De plus il a prophétisé en termes clairs et précisl’œuvre du Messie, l’établissement d’une «nouvellealliance» que, le premier parmi les prophètes de l’AncienTestament, il a appelée de ce nom. Jer., xxxi, 31. Cf.Heb., viii, 8, où l’auteur traduit: testamentum novum, «nouveau testament.» — Enfin Jérémie a dessiné lescaractères de cette nouvelle alliance; le trait distinctifde la nouvelle loi consistera dans les dispositions intérieures;elle ne sera pas gravée sur des tables de pierre,mais inscrite dans le cœur de l’homme. Jer., xxxi, 33.

VIII. Gloire de Jérémie après sa mort.

Autant Jérémieavait trouvé de contradicteurs pendant sa vie, autantil devint populaire après sa mort. Son nom devintsympathique et cher à tout le peuple, surtout depuis lacaptivité jusqu’à la venue de Jésus-Christ, lorsque laprophétie des 70 ans, Jer., xxv, 11; xxix, 10, fut devenueun oracle de consolation. II Par., xxxvi, 21; Dan., ix,2; I Esd., i, 1. L’Ecclésiastique, xlix, 8, 9, et le IIe livredes Machabées, xv, 14, font de lui le plus grand éloge.

— Dans l’ordre de classement adopté par les Talmudistesde Babylone, Jérémie occupe le premier rang, etpasse même avant Isaie. — Enfin, dans le Nouveau Testament,les Juifs frappés des prodiges opérés par Jésus-Christ,expriment leur étonnement et leur admirationen disant, Matth., xvi, 14, qu’il est Jérémie ou quelqu’undes anciens prophètes. Saint Grégoire de Nazianze l’appelle «le miséricordieux»: "Iepeiiîav <7U|iiua8^, Carm.,H, 285, t. xxxvii, col. 1585; saint Isidore de Péluse l’appelle «le plus affligé des prophètes». Epist., 298,t. lxxviii, col. 356.

IX. Autres écrits attribués a Jérémie.

Outre lesprophéties et les Lamentations, on a aussi attribué à Jérémiele Ps. cxxxvi; on a pensé également qu’il auraitcomposé avec Ézéchiel le Ps. lxxiv. Le second livre desMachabées, II, 1, parle des: «Descriptions de Jérémiele prophète;» il est difficile de savoir ce qu’il faut entendrepar là. C’est dans cet écrit qu’il était raconté queJérémie avait caché dans une caverne du mont Nébo letabernacle et l’arche d’alliance. II Mach., ii, 5. Une opinionplus fondée attribue à Jérémie le troisième et lequatrième livres des Bois. Il faut y ajouter la lettre de Jérémie.Bar., vi. V. Ermoni.

    1. JÉRÉMIE (LE LIVRE DE)##


9. JÉRÉMIE (LE LIVRE DE). I. CARACTÈRE DU LIVRE. —Le livre de Jérémie est un recueil de prophéties, faitesà différentes époques et dans un intervalle d’à peuprès 40 ans; elles se rapportent à des objets bien différents,mais le recueil, sans avoir le caractère d’unecomposition d’une seule venue, a cependant un ordre logique.Nous trouvons dans le livre de précieux renseignementssur l’histoire de sa composition. Nous lisonsau chapitre xxxvi que, dans la 4° année du règnede Joakim, Jérémie fit un recueil de ses prophéties.Dieu lui ordonna d’écrire dans ce volume toutes lesparoles qu’il lui avait dites. Jérémie appela. Baruch,fils de Nérias, et lui dicta tous les discours que leSeigneur lui avait tenus. Une année entière paraîtavoir été consacrée à ce travail. Lorsque la rédactioneut été achevée, Baruch lut au peuple assemblépour une fête tout ce qu’il avait écrit. Cette lectureimpressionna beaucoup le peuple, et Michée, fils de Gamarias,alla annoncer cet événement aux princesréunis; les princes ordonnèrent à Baruch d’apporter lelivre et de le leur lire; frappés de cette lecture, après avoirordonné à Baruch de se cacher, ils annoncèrent au roice qui venait de se passer; à son tour le roi se fit lire lelivre, et irrité ordonna de le jeter au feu. Mais Jérémiefit écrire une seconde fois tout le volume détruit, en yajoutant de nouvelles prophéties, et à la suite de ces é énementsJérémie prononça de nouveaux oracles. Onpeut donc affirmer que le recueil fut complété à l’époqueoù Jérémie résidait à Maspha auprès de Godolias, oupendant son séjour en Egypte. Cette seconde partie dela collection contenait naturellement toutes les prophétiesqui racontent tout ce qui est arrivé depuis la5’année de Joakim.

II. Division du livre.

Il s’ouvre par un prologue,

1. et se divise en quatre parties: 1. Béprobation et condamnationd’Israël à cause de ses péchés, n-xvil; —

2. Confirmation de cette réprobation, xviii-xix; —

3. Exécution de la sentence, xx-xlv; — 4. Prophétiescontre les peuples étrangers, xlvi-li. — Le recueil setermine par un appendice historique, lu. — Pour d’autresdivisions, cf. Kilber, Analysis biblica, édit., Tailhan,in-8°, Paris, 1856, t. i, p. 395422; Trochon, Jérémie,in-8°, Paris, 1878, p. 7-10; Cornely, Introduclio specialis,in-8°, Paris, 1887, p. 375.

prologue, i. — Ce prologue raconte la vocation de Jérémieau ministère prophétique; il a été choisi dès le sein desa mère pour accomplir les ordres de Dieu et annonceraux hommes ses volontés, ꝟ. 4-8; — le Seigneur leconsacre, ꝟ. 9, et lui notifie sa mission; elle consiste àarracher et détruire, perdre et dissiper, bâtir et planter,j>. 10; — il lui dévoile l’avenir en général sous deuxfigures symboliques: 1° une branche d’amandier(Vulgate: virgam vigilantem), ꝟ. ll b; 2° une chaudièrebouillante, ꝟ. 13>>; cette chaudière bouillante, ce sontles ennemis qui doivent fondre sur Israël du côté del’Aquilon, jr. 14-16; — enfin Dieu lui promet secours etprotection contre ses ennemis, ꝟ. 17-19.

PREMIERE PARTIE: RÉPROBATION D’iSBAEL, II-XVII. —

Elle se subdivise en deux sections: 1° Causes de la réprobation,ii-xi. — 2° Réprobation définitive, xii-xvii. —1° Causes de cette réprobation, n-xi. — Elles sont aunombre de trois: i. Infidélité d’Israël, ii-ni, 5. — Israëlétait uni à Dieu au moment de la sortie d’Egypte; aussiDieu fut-il plein de miséricorde pour lui durant sonséjour dans le désert; mais ensuite Israël fut infidèle,n, 1-7; ceux qui étaient chargés de conduire le peuple,prêtres, gardiens de la loi, pasteurs et prophètes, furentdes prévaricateurs et lui donnèrent le mauvais exemple,y. 8-9; on se détourne de Dieu pour courir après lesidoles, ce qui est un fait inouï, car jamais aucun peuplen’a abandonné sa religion, ꝟ. 10-13; c’est pourquoiIsraël Sera puni de son infidélité et de son ingratitude;il perdra sa liberté et deviendra esclave des peuplesétrangers; la Judée sera dévastée par les Égyptiens, y.14-21. Il ne faut pas qu’Israël cherche à s’excuser, caril s’est plongé aveuglément dans l’idolâtrie, ꝟ. 22-25;aussi est-il couvert de honte, parce qu’il s’est endurcidans son égarement malgré les avertissementset les châtiments, ꝟ. 26-32; il a été trouvé coupable, et ilsera châtié, ꝟ. 33-37; son crime a été grand; voilà pourquoiil n’obtiendra pas de pardon malgré.ses hypocritesprotestations, iii, 1-5. — 2. Impénitence d’Israël, iii,6-x. — Trois idées fondamentales dominent dans cettesection: Juda n’a pas su profiter du malheur pour fairepénitence et se convertir; bien plus, il a méprisé lesavertissements de Dieu, iii, 6-iv, 4; il a bien vu que Dieua puni les dix tribus schismatiques; il a assisté à lachute de Samarie, mais ces avertissements ne lui ontservi à rien, iii, 6-10; Israël est préférable à Juda; leprophète exhorte Juda à reconnaître simplement ses iniquités,pour qu’il puisse revenir à Jérusalem, ꝟ. 11-17;tous deux, et Juda et Israël, n’ont qu’à se convertir etils obtiendront le pardon de leurs crimes, qui sontl’unique cause de leurs malheurs, ꝟ. 18-25; le salut estencore possible pourvu que Juda fasse pénitence, iv, 14. — Mais Juda ne fait pas pénitence, malgré l’imminencedu danger, iv, 5-vi; le prophète exhorte les Israélites àfuir devant les Ghaldéens, iv, 5-7, et à prendre des vêtementsde deuil, ꝟ. 8, car c’est là l’accomplissement desmenaces divines; Juda est dans la terreur, car laville sainte est assiégée, ꝟ. 9-18; le prophète retrace letableau des ravages causés par les Chaldéens; cette vuele remplit de douleur, ꝟ. 19-31; la cause de ces malheurs,c’est qu’il n’y a plus de justes à Jérusalem, mais seulementdes hypocrites, des idolâtres, des adultères, danstoutes les classes de la société, v, 1-9; les coupablessont destinés à périr par la main d’un peuple étranger,qui viendra de loin, ꝟ. 10-18; ils n’ont pas craint lesmenaces de Dieu; ils ont persévéré dans leurimpénitence et leur aveuglement; les menaces vonts’accomplir, ꝟ. 19-31; l’ennemi arrive, il dévastetout le pays; exhortation à Jérusalem à se convertiret à s’instruire, vi, 1-8; la corruption est universelle,tout le monde est sourd à la voix de Dieu;aussi personne n’échappera-t-il à la vengeance divine,ꝟ. 9-15; tout est inutile: exhortations, menaces; le peupleméprise tout; c’est pourquoi ses sacrifices n’ont aucuneefficacité, ꝟ. 16-21; l’exécuteur des vengeances divinesvient du nord; il ravage tout et n’épargne rien; ilassiège la ville sainte, car elle est coupable, et par conséquentelle a été réprouvée de Dieu, ꝟ. 22-30. — Égarépar une aveugle confiance dans le temple, les sacrifices» t la circoncision, Juda persiste dans son impénitenceet son endurcissement, vii-x; Jérémie reçoit de Dieul’ordre de se tenir sur la porte du temple et de parlerau peuple qui entre et qui sort, vii, 1-2; Juda met toutesa confiance dans le temple; mais le vra: temple deDieu, ce sont les justes qui font le bien et évitent le mal,y. 3-7; le peuple est dans la plus grande illusionlorsqu’il croit qu’il se sauvera, malgré ses péchés, enallant au temple; le temple est devenu une caverne de

voleurs: Dieu l’a déserté, et l’a répudié comme lesanctuaire de Silo; quant à ses adorateurs, ils ont étérepoussés comme Éphraïm, parce que Juda s’est plongédans l’idolâtrie, ꝟ. 8-20; Juda a aussi confiance dans sessacrifices, mais Dieu rejette ses sacrifices, parce que lepeuple n’observe pas les commandements de Dieu,ꝟ. 21-28; Dieu a réprouvé le peuple à cause de son idolâtrie,qui a souillé le sanctuaire, ꝟ. 29-34; les ossementsdes morts eux-mêmes n’auront pas de repos; ilsseront jetés hors de leurs tombeaux, pour expier leursactes idolâtriques, viii, 1-3; rien n’émeut Juda, rien nel’excite à la pénitence; il reste sourd à la voix de Dieu, àlaquelle toutes les créatures obéissent, ꝟ. 4-9; ses fauxsages le trompent, ꝟ. 10-12; c’est pourquoi il périra,ꝟ. 13-17; en vain réclamera-t-il du secours, car ce seratrop tard, ꝟ. 18-22; Jérémie pourrait s’enfuir de la villecoupable, mais Dieu lui ordonne d’y demeurer pour annoncerle châtiment dont elle est menacée, IX, 1-14; lechâtiment qui le Irappera sera terrible, et personne nepourra s’y soustraire, ꝟ. 15-21; la circoncision ne lespréservera pas, car les circoncis seront les premiersfrappés, ꝟ. 22-26; encore plus impuissants seront les fauxdieux à protéger leurs adorateurs, car ces dieux ne sontrien, x, 1-6; il ne faut craindre que le vrai Dieu, et nonles faux dieux, qui ont été fabriqués par la main del’homme; ce sont des idoles destituées de toute puissance,ꝟ. 7-16; Dieu permettra le châtiment, c’est lui quifera ravager le pays d’Israël et déporter ses habitants encaptivité, ꝟ. 17-23; Jérémie supplie le Seigneur de ne pasabandonner complètement son peuple, et de le punir avecéquité, ꝟ. 24-25. — 3. Violation de ï’alliance, xi. —Cetteviolation de l’alliance portera Dieu à rompre l’alliance. Cechapitre sert de transition entre la première et la deuxièmesection; le prophète commence par rappeler l’allianceconclue au Sinai entre Dieu et le peuple, ꝟ. 1-5; lepeuple ayant violé l’alliance, Jérémie, au nom de Dieu,le menace d’un châtiment prochain, et le prévient queses faux dieux ne lui serviront de rien, ꝟ. 6-13; Dieu défendau prophète d’intercéder pour son peuple qu’il compareà un bel olivier qu’il a planté et entouré de soins,mais qui sera consumé sans miséricorde, ꝟ. 14-18; Jérémieraconte les mauvais traitements qu’il a subis de lapart des habitants d’Anathoth, ꝟ. 19; il implore l’appuide Dieu et sa vengeance contre les persécuteurs, jr. 20-23.2° Réprobation définitive d’Israël, xii-xvii. — Cetteseconde section peut se subdiviser en cinq points: i. LeSeigneur est l’ennemi d’Israël, xii. — Le prophète supplieDieu d’exercer sa justice et de punir les impies et lespécheurs, ꝟ. 1-3; tout est dans la désolation à cause despécheurs, sa famille elle-même conspire contre le prophète,y. 4-6; la conspiration et la révolte du peuplecontre Dieu seront punies par les attaques des peuplesvoisins, ꝟ. 7-13; Dieu pourtant châtiera aussi les gentils;s’ils reviennent et se convertissent, ils se réconcilieronttous dans une union finale, ꝟ. 14-16; s’ils ne se convertissentpas, ils périront tous, ꝟ. 17. — 2. Dieu rejette sonpeuple comme inutile, xiii. — Sous le symbole d’une ceinturecachée et pourrie dans les eaux de l’Euphrate, selonles uns, de l’ouadi Farâh, selon les autres (voir Perat),Jérémie décrit les malheurs et les calamités qui menacentles Juifs, ꝟ. 1-11. Autre symbole: de même qu’on remplitdes vases de viii, Dieu remplit le peuple d’un esprit d’ivressepour le briser, ꝟ. 12-14. Dieu supplie Israël de se convertiravant que ce malheur arrive, ꝟ. 15-17; s’il ne se convertitpas, les plus grands malheurs fondront sur lui, ꝟ.18-27. — 3. Dieu est insensible aux prières faites pourson peuple, xiv-xv. — À l’occasion d’une sécheresse extraordinaire,le prophète annonce la famine qui ravagerala population de Jérusalem, xiv, 1-6. Il s’adresse à Dieuet lui demande s’il ne s’intéresse plus à son peuple, y.7-10. Le Seigneur répond et lui défend de prier pour lepeuple; il déclare qu’il n’acceptera plus ses sacrifices,y. 11-12. Jérémie rejette sur les faux prophètes les crimes

de son peuple; c’est pourquoi Dieu prononce contre euxdes menaces terribles, ꝟ. 13-15; il renouvelle aussi sesmenaces contre le peuple, ꝟ. 16-18. Le prophète prieencore Dieu qui est seul capable de sauver: il le suppliede se souvenir de l’alliance conclue avec le peuple;y. 19-22. Dieu ne se laisse pas toucher: il est inexorable;son châtiment s’abattra sur le peuple; tous serontpunis par l’un de ces quatre fléaux: maladie,glaive, famine, captivité; il traitera Juda, comme Judal’a traité lui-même, xv, 1-9; Jérémie se plaint de la situationqui lui est faite, t. 10; Dieu le console et lefortifie en lui promettant son secours contre ses contradicteurs,y. 11-14. Jérémie le supplie de le secourirbientôt, car il lui a toujours été fidèle, ꝟ. 15-18. Le Seigneurlui promet de nouveau sa protection et son secours,y. 19-21. — 4. Le Seigneur fera périr Israël,xvi. — Dieu défend à Jérémie de se marier, à cause desmaux qui accableront les Juifs et leurs familles, ꝟ. 1-9;ils seront emmenés en captivité dans une terre étrangèrepour expier leurs crimes, ꝟ. 10-13; cependant Dieules délivrera de l’oppression du nord, comme il les adélivrés de l’oppression de l’Egypte; de la sorte il manifesterasa puissance aux yeux des gentils, ꝟ. 14-21. —5. Dieu finit par châtier les Juifs, xvii. — Israël airrité Dieu par ses actes d’idolâtrie; c’est pourquoi Dieule livre à l’étranger, ꝟ. 1-4; quiconque met sa confianceen l’homme, périt; au contraire quiconque met sa confianceen Dieu, vit, ꝟ. 5-8; Dieu scrute le fond des cœurs;rien ne lui est caché: il traitera l’impie comme il lemérite, ꝟ. 9-11; il protégera son prophète et remplirases ennemis de confusion, ꝟ. 12-18; le prophète exhorteles Juifs à observer le sabbat; s’ils l’observent, Dieu lesbénira, sinon, il les châtiera, ꝟ. 19-27.

DEUXIEME PARTIE: CONFIRMATION DE LA RÉPROBATION,

Xviii-xix. — Par le récit de deux actions symboliques,cette seconde partie montre que la réprobationd’Israël est irrévocable. — 1° Symbole du potier et de sonvase, xviii. — Le potier et le vase qu’il fabrique sontl’image de la toute-puissance de Dieu; le potier peutbriser et refaire son vase; de même Dieu peut anéantiret sauver la maison d’Israël, ꝟ. 1-6. Dieu peut punir lesJuifs, s’ils persévèrent dans leurs crimes, ou leur rendreleur ancienne prospérité, s’ils se convertissent, ꝟ. 7-10;cependant comme ils persévèrent dans le mal, Dieu lesmenace, par la bouche du prophète, d’une ruine prochaine,y. 11-12. Il adresse à son peuple de durs reproches,et lui annonce de nouveau le châtiment, ꝟ. 13-17;les Juifs profèrent des menaces de mort contre Jérémie,y. 18; Jérémie demande à Dieu de punir ses persécuteurs,et de le délivrer de leurs machinations, ꝟ. 19-23. —2° Destruction du vase de terre, xix. — Jérémie reçoit deDieu l’ordre de prendre un Vase de terre, de se rendredans la vallée d’Ennom et de le briser; c’est la figure dela destruction des Juifs par les Chaldéens; l’idolâtriesera punie, et Jérusalem détruite, ꝟ. 1-11; la ville saintesera souillée comme Topheth, ꝟ. 12-13; dans le parvisdu Temple le prophète prédit de nouveau les châtimentsque mérite l’endurcissement des Juifs, ꝟ. 14, 15.

TROISIÈME PARTIE: EXÉCUTION DE LA SENTENCE, XXxlv. — Cette partie se subdivise en cinq sections: 1° Jugementde Dieu contre les auteurs de la réprobation,xx-xxiii; — 2° Jugement contre le peuple en général,xxiv-xxix; — 3° Prophéties messianiques, xxx-xxxiii;

— 4° Efforts infructueux pour convertir le peuple, xxxivxxxviii;— 5° Accomplissement des prophéties contreJérusalem, xxxix-xlv.

1° Jugement de Dieu contre les auteurs de la réprobation,xx-xxiii. — 1. Oracle contre Phassur, xx. —Le prophète est menacé de mort et jeté en prison parle prêtre Phassur, intendant du Temple, à cause de sesprédictions menaçantes contre Jérusalem, i. 1-2. Le lendemainil est mis en liberté; aussitôt Jérémie renouvelleses prédictions contre Phassur et-les Juifs; il annonce

la captivité de Babylone, ꝟ. 3-6. Le prophète se plaint àDieu des chagrins que lui attire son ministère, ꝟ. 7-10;il espère néanmoins et se console parce qu’il sait que leSeigneur est avec lui, ꝟ. 11-13. II se décourage de nouveauet maudit le jour de sa naissance, j^. 14-18. —2. Oracles contre les rois de Juda, xxi-xxiii, 8. — Sédéciasenvoie Phassur et Sophonie pour le consulter sur lesort de Jérusalem assiégée par les Chaldéens, xxi, 1-3.Jérémie annonce la prise de la ville et l’insuccès desJuifs, ꝟ. 4-7; il n’y aura d’épargnés que ceux qui se livrerontà l’ennemi, ꝟ. 8-10. Il conjure le roi de détournerla colère de Dieu’par l’exercice de la justice, ꝟ. 11-12.Que la ville ne compte pas sur sa force, ꝟ. 13, 14. Lamaison de David ne peut être sauvée que par l’expiationde ses fautes, xxii, 1-9. Le prophète revient en arrière,et annonce le sort de Sellum; il ne reverra jamais sonpays et mourra en exil, ꝟ. 10-12. Joakim, établi roi parNéchao à la place de Sellum, est condamné à mort àcause de ses injustices, ꝟ. 13-19. Il prédit les conséquencesqui découleront de là pour le peuple, ꝟ. 20-23;il annonce les événements qui concernent Jéchonias,soit avant sa déportation, y. tH-il, soit après sa déportation,ꝟ. 28-30. — Dieu consolera son peuple en lui envoyantle Juste qui justifie, le Messie, xxiii, 1-8; leMessie sortira de la race de David; il en sera le germe.Description des caractères du Messie: il fera régnerla paix, la justice et la sagesse. — 3. Oracles contre lesfaux prophètes, xxiii, 9-40. — Les faux prophètes parleurs mauvais exemples et leurs mauvaises maximessont la cause de tous les malheurs et de la corruptionde Juda, ꝟ. 9-15; ils ont trompé le peuple et l’ont égaré;c’est pourquoi la colère de Dieu éclatera sur eux, ꝟ. 16-22;ils éloignent le peuple du culte du vrai Dieu endonnant leurs rêveries comme parole divine, ꝟ. 23-30;ils abusent criminellement de l’onus, c’est-à-dire desmenaces des vrais prophètes, mais Dieu les couvrira dehonte et de confusion, ꝟ. 31-40.

2° Jugement de Dieu contre le peuple en général,xxiv-xxix. — i. Première déportation, xxiv. — Le prophètevoit deux paniers, l’un plein de bonnes figues,l’autre de mauvaises, ꝟ. 1-3; les bonnes figues représententles Juifs captifs à Babylone, les mauvaiseslesJuifs restés en Judée avec le roi Sédécias, ꝟ. 4-8; ilannonce comment Dieu traitera ces derniers, ꝟ. 9-10. —2. Prophéties antérieures concernant la captivité, xxvxxix.— Le chapitre xxv nous reporte à la quatrièmeannée de Joakim. Jugement porté par Dieu contre lepeuple et annonce de la captivité de 70 ans, xxv, 1-11.Voir Captivité (Durée de la), t. ii, col. 237-238. Ilannonce les châtiments des peuples qui ont persécutéJuda sous l’allégorie d’une coupe de viii, ꝟ. 12-29; lemonde entier sera détruit par la colère du Seigneur,y. 30-38. Jérémie continue de lutter contre les faux prophètes;on s’empare de lui parce qu’il avait prédit ladestruction de Jérusalem et du Temple, xxvi, 1-8; ondiscute sa condamnation à mort, ꝟ. 9-11. Pour sa défenseJérémie invoque la mission qu’il a reçue de Dieu, ꝟ. 1215. Le peuple se rappelant les prédictions analogues,faites par les anciens prophètes, se prononce pour Jérémie,y. 16-19. Joakim fait tuer le prophète Urie,y. 20-23. Ahicam sauve Jérémie, ꝟ. 24. Dieu ordonne auprophète de porter des chaînes au cou et d’en envoyeraux rois voisins, xxvii, 1-3; c’est le symbole de la soumissionà Nabuchodonosor; cette soumission est nécessaireà ceux qui veulent échapper à la destruction,y. 4-11. Le prophète donne les mêmes avertissements àSédécias et le met en garde contre les faux prophètes,y. 12-15. Il s’adresse aux prêtres et à tout le peuple et leurannonce que le peuple sera emmené en captivité à Babylone,y, 16-22; confirmation de la prédiction parl’exemple d’Hananie et de Séméi; le faux prophèteHananie prédit la paix à Jérusalem, xxviii, 1-11; ilbrise le joug que Jérémie porté au cou, ꝟ. 12. Dieu

ordonne au prophète de le remplacer par des chaînes defer, ꝟ. 13-14. De la part de Dieu Jérémie annonce àHananie qu’il mourra dans l’année, ꝟ. 15-17. Jérémieécrit aux Juifs déportés à Babylone avec le roi Jéchoniaspour les exhorter à la résignation et les engager à s’établiren Chaldée où ils doivent demeurer 70 ans, xxix,1-10. C’est alors seulement que Dieu les exaucera et lesramènera dans leur patrie, ꝟ. 11-14. Menaces contre lesfaux prophètes et ceux qui les écoutent, ꝟ. 15-19; menacescontre le faux prophète Séméi, qui avait écrit àJérusalem pour demander qu’on mît Jérémie en prison,ꝟ. 24-32.

3° Prophéties messianiques, xxx-xxxiii. — 1. Restaurationdu peuple de Dieu, xxx. — Le prophète annoncel’avenir glorieux réservé aux Juifs; il prédit leur retourdans leur pays, ꝟ. 1-3; il annonce ensuite le grand jourdu jugement du monde et de la délivrance d’Israël parle Messie, ꝟ. 4-11. Dieu guérira un jour les blessuresfaites à Israël, et se tournera contre ceux qui furent lesinstruments de sa vengeance, ꝟ. 12-17. Achèvement etconsommation du salut par le Messie, jl. 18-24. — S. Prophétiede la nouvelle alliance, xxxi. — Ce chapitre estle plus important de tout le livre de Jérémie; il contientla promesse d’une alliance nouvelle substituée à l’ancienneque les Juifs avaient violée. Dieu sauvera lesrestes d’Israël, et les ramènera dans leur patrie, jꝟ. 1-6.Description de ce retour joyeux, J. 7-14. Rachel seraun jour consolée (cf. Matth., ii, 17, 18), car Éphraim seconvertira et le Seigneur aura pitié de lui et le sauvera,ꝟ. 15-27; cf. S. Jérôme, In Jer., xxxr, 22, t. xxiv,col. 880-881, où, à la suite d’autres Pères latins, il entendle ꝟ. 22 de l’Incarnation. Quand le peuple se serarepenti de ses fautes, Dieu fera avec lui une nouvellealliance qui sera tout intérieure (cf. Joa., iv, 23; Heb.,vin, 8); alors il n’y aura plus d’adorateurs de faux dieux;tout le monde reconnaîtra le rai Dieu, le Seigneur, ꝟ.28-35. Israël, dans son ensemble, demeurera toujours lepeuple de Dieu; la ville sainte sera de nouveau rebâtie,et tout ce qui est impur sera purifié, ꝟ. 36-40. — 3. Lechamp d’Analhoth, signe de Vaillance de Dieu avecIsraël, xxxii-xxxiii. — Jérémie enfermé par le roi Sédéciasdans la cour du Temple, xxxii, 1-6, reçoit l’ordred’acheter un champ à Anathoth, ꝟ. 7-14. Le prophètehésite d’abord, car il voit que Jérusalem est sur le pointde tomber entre les mains de Nabuchodonosor, jl. 1525; mais le Seigneur lui assure de nouveau qu’il délivrerason peuple de la captivité, lorsqu’il aura expié sespéchés; c’est alors qu’il conclura avec lui une allianceéternelle, ꝟ. 26-44. Nouvelle promesse de la délivrance dela captivité et de la restauration de Jérusalem, xxxiii, 1-14;l’alliance de Dieu avec son peuple ne sera jamais rompue; «le Germe de David» conservera toujours le trônede Juda et fera régner la justice, puisque son nom est. «Le Seigneur notre Juste», ꝟ. 15-18; la nouvelle alliancessra aussi stable que les lois de la nature, ꝟ. 19-26.

4° Efforts infructueux pour convertir le peuple,xxxiv-xxxviii. — i. Le mépris de la loi cause de laruine d’Israël, xxxiv-xxxv. — Nabuchodonosor assiège laville, et Sédécias court les plus grands dangers, xxxiv,1-7. Le peuple consent à mettre les esclaves en liberté,selon la loi. ꝟ. 8-10; mais il les reprend aussitôt, jp. 11.Jérémie lui annonce qu’il sera captif, ꝟ. 12-22. Le prophètereçoit l’ordre d’aller trouver les Réchabites, de larace des Cinéens, I Par., ii, 55, et de leur offrir du viii,xxxv, 1-5. Les Réchabites refusent pour rester fidèlesaux préceptes de leurs ancêtres, ꝟ. 6-11. Le prophètecompare cette conduite avec l’infidélité de Juda enversDieu, ꝟ. 12-16. Nouvelles menaces contre Juda, ꝟ. 17.Promesses faites aux Réchabites, ꝟ. 18-19. — 2. Malheursd’Israël causés par sa résistance aux propliètes, xxxvixxxviii.— Trois preuves pour démontrer que l’indocilitédu peuple aux enseignements des prophètes est la causede tous ses maux: a) Ce qui s’est passé sous Joakim; il

fait lire ses prophéties par Baruch; le roi irrité jette aufeu le volume, et s’apprête à faire arrêter Jérémie etBaruch; mais Dieu ne permet pas qu’on les trouve;Jérémie annonce au peuple que les menaces se réaliserontponctuellement, xxxvi. — b) La même chose sereproduit à peu près sous Sédécias; le prophète exhorteses concitoyens à se soumettre aux Chaldéens; lui-mêmese réfugie à Anathoth, mais on l’arrête et le jette enprison; il annonce à Sédécias le sort qui l’attend,xxxvii. — c) Nouvelle exhortation à se soumettre à Nabuchodonosor:on jette le prophète au fond d’une citerne,d’où il est retiré par Abdémélech, avec la permissiondu roi; il conseille de nouveau à Sédécias de se rendreaux Chaldéens; le prince refuse de suivre ses conseils,et Jérémie reste en prison jusqu’à ce que la ville tombeentre les mains de l’ennemi, xxxviii.

5° Accomplissement des prophéties contre Jérusalem,xxxix-xlv. — 1. Prise de Jérusalem, xxxix. — La ville deJérusalem est prise, ꝟ. 1-2; Sédécias a les yeux crevéset est emmené à Babylone; la capitale et le temple sontbrûlés, jl. 3-10; Jérémie et Abdémélech échappentà la ruine, ꝟ. 11-18: c’est l’accomplissement des prophéties.— 2. Sort des Juifs restés en Palestine, xl-xlv.

— Même les Juifs restés en Palestine furent châtiés; Jérémie,ayant obtenu la permission de demeurer où il voudrait,se rend près de Godolias à Masphath, XL, 1-6.Un grand nombre de Juifs le suivent dans cette retraite,y. 7-12. Johanan prévient Godolias qu’Ismæl, qui étaitréfugié chez le roi d’Ammon, Baalis, veut le mettre àmort; Godolias ne le croitpas, jl. 13-16, et il est assassinépar Ismæl avec beaucoup d’autres Juifs, xli, 1-7.Ismæl emmène d’autres Juifs prisonniers, lesquels sontdélivrés en route par Johanan, ꝟ. 8-16. Le reste du peuple,malgré les conseils de Jérémie, craignant la vengeancedes Chaldéens, s’enfuit en Egypte et l’emmenade force, xli, 17-xuii, 7. Là ils seront punis de leuridolâtrie et de leur infidélité.par Nabuchodonosor, quiira les atteindre dans leur retraite même, xlhi, 8-XLV.

QUATRIEME PARTIE: PROPHÉTIES CONTRE LES PEUPLES

Étrangers, xlvi-li. — Ces prophéties, qui annoncent deschâtiments réservés aux ennemis du peuple de Dieu,sont au nombre de neuf: 1° contre l’Egypte, xlvi;2° contre les Philistins, xlvii; 3° contre Moab, xlviii;4° contre Ammon, xlix, 1-6; 5° contre l’Idumée, xlix,7-22; 6° contre Damas, xlix, 23-27; 7° contre Cédar etAsor, xlix, 28-33, 8° contre Élam, xux, 34-39; 9° contreBabylone, l-li. Cf. Vigouroux, Les Livres Saints et lacritique rationaliste, 5e édit., t. v, p. 135-140.

épilogue, lu. — Cet épilogue n’est autre chose qu’uneconclusion historique; elle montre comment toutes lesprophéties relatives à la ville sainte se sont accomplies:prise de Jérusalem par Nabuchodonosor après deux ansde siège, jI. 1-6; malheurs de Sédécias, ꝟ. 7-11; incendie dela capitale, ꝟ. 12-13; déportation des habitants, ꝟ. 14-16; enlèvementdes vases sacrés du Temple, ꝟ. 17-23; dénombrementdes trois déportations, ꝟ. 21-30; adoucissementaux maux de Jéchonias, ꝟ. 31-34.

III. Unité du livre.

Quoique les prophéties quisont réunies dans ce livre se rapportent à des époques différenteset traitent de sujets divers, elles sont pénétréesd’une seule et même idée qui en fait un tout et le recueilen a été fait avec un certain ordre. — 1° Les critiquesnégatifs le nient. D’après eux, le livre est composé demorceaux sans cohésion et sans suite. Ils ne peuventcependant s’empêcher d’y reconnaître quelque unité.Driver résume leur opinion de la manière suivante. Ilsuppose que, avant d’arriver à son état actuel, le livrede Jérémie a passé au moins par cinq stades successifs:le premier est représenté par le rouleau de la quatrièmeannée de Joakim, dans lequel le prophète écrhitpar la main de Baruch les prophéties faites durant les23 années précédentes; le second est représenté par lerouleau delà cinquième année de Joakim dans lequel les

mêmes prophéties furent de nouveau écrites avec quelquesadditions. Jer., xxxvi, 32. On peut admettre que cerouleau contenait, à l’exception de quelques gloses ajoutéesplus tard, I, 1-2, 4-19; n-vi; vii-ix, 26; x, 17-25;xi, 1-8; xi, 9-xii, 6; xxi, 11-xxii, 19; xxv; xlvi-xlix;le troisième serait indiqué par I, 3, et embrasserait lesprophéties faites durant les 17 années suivantes, jusqu’àla prise de Jérusalem, à savoir: xiii; xii, 1-10; xxii, 20xxiii,8; xxiii, 9-40; xxiv; xxx-xxxiii (dans sa plusgrande partie); xlix, 34-39; li, 59-64°; quant à xivxvii;xviii-xx, ils pourraient à la rigueur avoir fait partiedu second rouleau; mais ces prophéties ont pu êtreajoutées au troisième stade; au quatrième stade onaurait ajouté les prophéties relatives aux événementsarrivés en 586 av. J.-C.; à savoir: xxxviii, 28 b; xxxix,3-14; xl-xliv; on ne sait s’il faut rapporter à ce stadeles récits biographiques, xxvi; xxxv; xxxvi; xlv (relatifsau règne de Joakim); xxvii-xxix; xxxiv; xxxviixxxviii,28°; xxxix, 15-18 (relatifs à Sédécias); au cinquième,non complété par une seule main, appartiendraient:x, 1-16; l-li, 58; xxxix, 1, 2, 4-13 (les fꝟ. 12, 4-10, abrégés de IV Reg., xxiv, 1, 3, 4-12); lu (appendicehistorique extrait de IV Reg., xxiv, 18 et sq.), etdes gloses disséminées çà et là. Driver, Introduction,p. 270-271.

2° Les exégètes reconnaissent généralement qu’il n’ya pas unité absolue dans les prophéties de Jérémie,comme du reste dans la plupart des livres prophétiques.Ces livres sont des recueils d’oracles, et non une compositionlittéraire faite d’un seul jet; mais il n’en existepas moins dans le livre de Jérémie une unité relative.On y remarque en effet l’unité de sujet: Les talmudistesavaient déjà enseigné que toute la prophétie deJérémie a pour objet la «dévastation» comme celle d’Isaiela «consolation». Il y aurait de l’exagération àprendre cette affirmation à la lettre, car assez souventJérémie parle d’espérance et laisse entrevoir un avenirmeilleur aux Juifs affligés, mais elle contient une partde vérité. Jérémie est le «prophète de la justice divine».Sa mission est de «faire connaître aux Juifs les jugementsde Dieu contre toute la malice de ceux qui l’ontabandonné», Jer., i, 16; «il est établi sur les nationset les royaumes pour arracher et détruire, pour perdreet dissiper, pour bâtir et planter,» Jer., i, 10; la justicedivine remplit toutes ses prophéties; elle en est commele commencement et la fin; il ne se lasse pas de démontrerque le peuple choisi et comblé de tant de bienfaitsde la part de Dieu a mérité la ruine finale par l’abusqu’il a fait de la longanimité divine et par ses nombreusesrechutes. Cette idée de la justice divine gouverneles récits et les oracles de Jérémie et leur imprime unvéritable caractère d’unité. Cornely, Inlroductio spéciale,t. ii, p. 374.

IV. Ordre du livre.

Quant à l’ordre suivi parle prophètedans son recueil, c’est un ordre logique et non unordre chronologique, comme le montre le tableau suivantdes indications chronologiques:

m, 6: «dans les jours de Josias.» xxi, 1: au temps de Sédécias (une des dernièresannées),

xxiv, 1: après la déportation de Jéchonias par Nabuchodonosor.

xxv, 1: «la quatrième année de Joakim.» xxvi, 1: «au commencement du règne de Joakim.» xxvii, 1: «au commencement du règne de Joakim»

(lire de Sédécias, ꝟ. 3, 12).

xxviii, 1: «la quatrième année de Sédécias.» xxix, 2: «après la déportation de Jéchonias.» xxxii, 1: «la dixième année de Sédécias.» xxxiii, 1: au temps de Sédécias.

xxxiv, 1: id.

xxxv, 1: «dans les jours de Joakim.»

xxxvi, 1: «la quatrième année de Joakim.» xxxvii, 1: au temps de Sédécias.

xxxviii, 1: id.

xxxix, 1; «la neuvième année de Sédécias.»

XL, 1: après la déportation du peuple en Chaldée.xlv, 1: «la quatrième annçe de Joakim.» xlvi, 2: id.

xlix, 34: «au commencement du règne de Sédécias.» lu, 31: «la trente-septième année de la transmigrationde Joakim.»

Voici, d’après M. Le Hir, les principes qui auraient présidéà l’ordre adopté dans le recueil des prophéties deJérémie. «On a longuement disserté, dit-il, et avec desrésultats bien divers sur les causes de ce dérangementdans l’ordre des pièces… Sans vouloir prendre parti danscette controverse, j’aimerais mieux penser que le hasardn’y est pour rien, mais que deux principes ont présidéà l’arrangement des chapitres; car d’abord on a suivisouvent l’ordre des matières en joignant ensemble lesprophéties qui se rapportaient au même objet ou à desobjets analogues; une étude attentive du texte ne permetpas d’en douter; secondement, là où cet ordre neparait pas, on peut supposer que les pièces ont été disposéesselon l’ordre des lectures publiques qui se faisaientdans les synagogues. Tel chapitre convenait mieux àtelle fête, à tel anniversaire, à telle saison de l’année.D’après ce point de vue, qu il est impossible de constaterhistoriquement, mais qu’on peut admettre comme unehypothèse vraisemblable, nous aurions dans les prophétiesde Jérémie un livre de leçons disposées selon l’ordreliturgique, où l’on s’est écarté de l’ordre chronologiquetoutes les fois que les besoins de joindre ensemble desoracles analogues ou les autres nécessités du culte l’onteiigë.» Le Hir, Les trois grands prophètes, Paris, 1877,p. 234-235. On peut se rendre compte, au moins en partie,à l’aide de ces principes, des différences qui existent dansl’ordre des chapitres entre le texte hébreu et le textegrec, et dont il sera question plus loin.

V. Authenticité.

Jamais on n’a contesté ni mis endoute l’authenticité du livre de Jérémie en général. Elleest attestée par le témoignage de l’Ecclésiastique: xlix,8; cf. Jer., xx, 1-4; xxxvi, 26; xxxvii, 11-14; Eccli.,xlix, 9; cf. Jer., i, 5, 10; — de Daniel: ix, 2; cf. Jer.,xxv, 11-12; xxix, 10; — d’Eadras: I Esd., i, 1; cf. Jer.xxv, 11-12; cf. aussi II Par., xxxvi, 22; — et du NouveauTestament: Matth., ii, 17-18; cf. Jer., xxxi, 15; Matth.,xxi, 13; cf. Jer., vii, 11; Matth., xxvii, 9; cf. Jer., xviii,20; xix et passim; Heb., viii, 8-9; cf. Jer., xxxi, 31-32;Heb., x, 16; cf. Jer., xxxi, 33. — Mais tout en reconnaissantl’authenticité de la majeure partie de Jérémie,certains critiques nient ou contestent l’authenticitéde quelques chapitres, que nous allons examiner successivement.

I. chapitres x, i-16; xxx-xxxi; xxxiii. — Ils attribuentces chapitres à celui qu’ils appellent le Deutéro-Isaie.Voir Isme, col. 959. — 1° D’après eux, le prophèteZacharie, viii, 7-8, cite Jérémie, xxx, 7-8, 33 (textehébreu), et suppose, viii, 9, que l’auteur à qui il fait sesemprunts est son contemporain. — Mais cet argumentrepose sur une fausse interprétation de Zach., viii, 9; cardans ce passage il n’est pas question de citations d’écrits,mais de discours oraux tenus par des prophètes de sontemps; quant à Zach., viii, 7-8, ce ne sont pas des citations;ces versets sont formés de membres de phrasesqu’on trouve dans les prophètes antérieurs, mais le groupementen est dû à Zacharie lui-même. — 2° On ne peutpas alléguer que ces chapitres se relient tous ensembleet contiennent des prédictions qui rappellent la secondepartie d’Isaie; car l’enchaînement de ces chapitres n’estpas un fait isolé dans la Bible; s’ils rappellent les prédictionsde la seconde partie d’Isaie, c’est que l’objet estle même; parfois différents prophètes ont prédit les

mêmes événements. An surplus tous les critiques reconnaissentdans ces chapitres le style de Jérémie; pourexpliquer cette ressemblance de style, les critiques quirejettent l’authenticité de ces chapitres, sont forcés desoutenir que l’auteur s’est appliqué à imiter le style deJérémie. — 3° Aces arguments généraux contre les chapitresx, 1-16, xxx-xxxi et xxxiii, on ajoute des argumentsde détail. On prétend 1. que l’exhortation à éviterl’idolâtrie, x, 1-16, et la rédaction du jfr. Il en chaldéensupposent un auteur vivant à l’époque de l’exil. —Il est aisé de répondre que l’exhortation à fuir l’idolâtrien’était pas seulement de mise à l’époque de l’exil; elleconvenait aussi à l’époque antérieure, car même à cetteépoque le peuple s’était rendu coupable d’actes idolâtriques.Cf. Jer., xliv, 16-25. Pour ce qui concerne larédaction en chaldéen du J. 11, on pourrait tout au plusconclure que ce passage est une interpolation, ce qu’ontsoutenu bien des commentateurs; mais il est plus simplede dire que c’est une espèce de parenthèse due à Jérémielui-même, qui devait savoir quelques mots de chaldéen;la forme’areqâ’se rencontre dans les inscriptionsaraméennes sur des poids de Ninive (vine siècle avantJ.-C); cf. Corpus inscr. sem., II, I, n. 1, 2, 3 etc.; enmandéen; cf. Noldeke, Handaische Gramrnatik, Halle,1875, p. 73; et dans les inscriptions découvertes à Sendjerli,près d’Alep, et datant du viiie siècle avant Jésus-Christ.Cf. D. H. Muller, Die àllsem. Inschriften vonSendschirli, 1893, p. 41, 54; Noldeke, dans la Zeilschriftder deutschen Morgent dndischen Gesellschaft, 1893,p. 96; Driver, Introduction, p. 255, en note. —2. La ressemblance de style entre Jérémie, x, 1-16 etquelques passages d’Isaie n’a pas lieu d’étonner; si lesconsidérations sur la vanité des idoles se trouvent aussidans la seconde partie d’Isaie, Is., xl, 19-22; xli, 7-29;xliv, 9-20; xlvi, 5-7; la cause en est que le même sujetet les mêmes circonstances provoquent les mêmesraisonnements et les mêmes réflexions. — 3. On nepeut pas invoquer davantage la différence de phraséologiepar rapport au reste de Jérémie; car des idéesdifférentes expliquent très bien une manière différentede parler; de plus s’il y a des différences, il y a aussides ressemblances; par exemple, x, 15, ’et paqâd, «letemps de la visite.» Jer., vi, 15; viii, 12; xlvi, 21; xlix,8; l, 27, 31; li, 18.

il. chapitres xxx-xxxi, xxxiii. — 1° On y trouvel’expression, Jer., xxx, 10, «mon serviteur,» qui estfamilière à la seconde partie d’Isaie. — Elle se trouveaussi dans d’autres endroits de l’Ancien Testament: elleétait assez connue à cette époque; de plus Jérémie a pul’emprunter à Isaie, sans qu’il soit nécessaire d’attribuerces fragments à Isaïe lui-même. — 2° Jérémie parleavec une certaine prédilection des prêtres et des lévites.Jer., xxxi, 14; xxxiii, 18, 22. — Pour le faire il suffisait deconnaître le Deutéronome, xvii, 9-20, et Jérémie leconnaissait. — 3° Quant à la ressemblance de style avecla seconde partie d’Isaie, elle n’est pas plus frappanteici que dans d’autres passages où Jérémie imite les prophètesqui l’ont précédé; dans ces passages Jérémie adonc pu imiter Isaie.

m. chapitres xxrn-zxix. — 1° On allègue contre ceschapitres la forme abrégée de certains mots qu’on y rencontre.— Ce n’est pas là un fait isolé; la double forme:pleine en i.n>, et abrégée en n> se trouve dans d’autres passagesdu livre de Jérémie; ainsi par exemple, forme abrégée,xxi, 1: Malkîyâh,! $efanyàh; xxvi, 18: Mikâydh;xxxv, 3: Ya’âzanyâh; xxxvi, 4: Nêrydh. De plus Osée,1, 1, et Amos, 1, 1, écrivent en forme abrégée les noms desrois qu’Isaïe, i, 1, écrit en forme pleine; dira-t-on pourcela qu’Osée., i, 1, et Amos, i, 1, sont apocryphes? —2° Si Jérémie dans ces chapitres s’appelle «le prophète»,Iian-nàbî, xxviii, 5, 6, 10; xxix, 1, etc., la chose secomprend aisément: en effet dans ces chapitres Jérémietraite des machinations des faux prophètes; il peut

donc énoncer par contraste son vrai titre, son titre,pour ainsi dire, officiel. — 3° Le fragment xxvii, 7, 1621 manque ou se lit différemment dans les Septante.Cela est vrai, mais provient d’un fait particulier dontnous hous occuperons plus loin, à savoir: la doublerecension des prophéties de Jérémie. Qu’il suffise defaire observer ici que, pour rejeter ce fragment parcequ’il manque dans la recension alexandrine, il faudraitprouver que le recenseur massorétique l’a ajouté de sapropre main. Cornely, Introductio specialis, t. ii, p. 401.iv. chapitres l-li. — 1° Ces chapitres contiennentdes prophéties contre Babylone d’une parfaite exactitude:c’est la seule raison pour laquelle ils sont rejetés.On y voit des vaticinia post eventum, parce qu’on affirmel’impossibilité du miracle et de la prophétie, cequ’il faudrait démontrer. De plus, si l’objection valaitpour ces deux chapitres, il faudrait rejeter pour lesmêmes motifs, xxv, 11-14; xxvii, 7, 22; xxix, 10; xxxiii,14-26; xxxix, 1-2, 4-13, qui contiennent des prophétiestrès exactes. — 2° Il n’est pas impossible que ces prophétiessoient de la quatrième année du règne de Sédécias,c’est-à-dire de l’an 593; elles supposent, il estvrai, la destruction du Temple, L, 28; LI, 11, 51; que lesJuifs souffrent en exil pour leurs péchés, l, 4-5, 7, 33, li,34-35; et que Jéhovah est prêt à leur pardonner et à lesdélivrer, l, 20, 34; li, 33 b, 36; mais le prophète en parlantainsi, se sert de ce qu’on appelle le passé ou leprésent prophétique, qui consiste à regarder commepassés ou présents des événements futurs; ce fait se constatechez tous les prophètes. — 3° De ce que Jérémie,xxvii-xxix, combat les faux prophètes qui annonçaient lachute prochaine de Babylone, tandis que, l-li, l’auteurlui-même l’annonce, on ne peut pas conclure que cesdeux derniers chapitres ne sont pas le point de vue deJérémie, car et la situation et le but sont différentsdans xxvii-xxix, Jérémie combat les faux prophètes, etveut que le peuple n’ait aucune confiance en eux, tandisque dans l-li c’est lui-même qui annonce ces lugubresévénements. De plus ces prophéties ont été faites à desépoques différentes, au moins en partie: xxvii, 1-11, autemps du roi Joakim; xxvii, 12-xxix, sous Sédécias; lebut est aussi différent: dans un cas il annonce la captivité,dans l’autre la délivrance: «c Quelle contradictiony a-t-il à admettre, comme le veut l’indication chronologiquedu texte, que, dans la même année, la quatrièmede Sédécias, Jérémie ait, en deux circonstances différentes,parlé de la durée encore longue de l’empire deBabylone, et affirmé que cet empire serait détruit? Cesdeux vérités devaient nécessairement se rencontrer dansses oracles. En énonçant la première, il prémunissaitses concitoyens, déportés à Babylone en même tempsque le roi Jéchonias, contre tout ce qui aurait pu aggraverleur situation. En énonçant la seconde, il faisaitbriller l’espérance dans le lointain et montrait qu’ilfallait avoir confiance dans la bonté divine. Cette doublepensée fait tout le fond de ses prophéties: les Babyloniens,vainqueurs des Juifs coupables, seront eux-mêmesvaincus, et Israël, châtié et repentant, reviendradans sa patrie. Voudrait-on lui faire un reprochede ce qu’en un endroit il appuie sur l’une de ces véritésplutôt que sur l’autre?» Trochon, Jérémie, p. 1213. — 4° On ne saurait dire non plus que le ton joyeux etsatisfait avec lequel l’auteur annonce la délivrance dela captivité ne convient pas à Jérémie qui avait ététraité avec égards par Nabuchodonosor après la prisede Jérusalem, Jer., xxxix etc., qui, même en Egypte,regardait encore le roi de Babylone comme l’instrumentde la Providence, Jer., xliii, 10-13; xliv, 10; car les cassont différents et différentes aussi les fins; quand il seréjouit de la-délivrance, Jérémie s’en réjouit comme dela fin des châtiments de ses compatriotes, et comme dupardon accordé par Dieu à leurs iniquités; au contrairequand il parle de Nabuchodonosor comme accomplissant les desseins de Dieu, il énonce simplement unfait: «On prétend encore que Jérémie, qui partoutailleurs est l’ami des Chaldêens, n’a pu se poser icicomme leur ennemi et prédire leur destruction. Maiss’il a annoncé leurs succès, s’il a prophétisé leur conquêtede Jérusalem et la ruine de sa patrie, ce n’estnullement par affection pour Babylone. Il n’a agi quecomme messager de Dieu. C’est le cœur serré et pleinde tristesse, qu’d prédit cet acte nécessaire de la vengeancedivine, seul moyen d’expier les péchés d’Israël;mais cette mission reçue de Dieu l’empêche-t-elled’aimer sincèrement sa patrie? Non, il ressent une profondeindignation à la vue des cruautés que les Chaldêensexercent contre ses compatriotes. Il annonce souventque Babylone sera punie à cause de sa cruauté, deson orgueil, de son idolâtrie.» Trochon, Jérémie, p. 13.

5° Nous ne nous arrêterons pas à discuter l’objectiontirée de la différence de style et de langue, car, commeJe fait remarquer Hitzig, «cet oracle offre de nombreusestraces de son authenticité, et il y a de sérieuses raisonspour le conserver: l’usage de mots particuliers, l, 6;n, l, 3, 7, 14, 45, 55; les figures employées, li, 7, 8, 34,37, aussi bien que le style, L, 2, 3, 7, 8, 10, spécialementdans des tours de phrase tels que li, 2, la conclusion,li, 57, le dialogue introduit sans aucune formule préparatoire,Li, 51; tout révèle Jérémie d’une manièrefrappante, et ce résultat est confirmé par la date chronologique.» Dans Trochon, Jérémie, p. 12. Pour cesobjections, cf. Driver, Introduction, p. 266-267, et pourd’autres de moindre importance, Cornely, Inlrod. spec,t. ii, p. 399-400.

V. Chapitre lii.

On rejette ce chapitre parce qu’onle regarde comme une addition supplémentaire de IVReg., xxiv, 18-xxv. — Mais la ressemblance entre cesdeux fragments est facile à expliquer, puisque très probablementJérémie est l’auteur de III et IV Reg. — Néanmoinsnous reconnaissons que ce chapitre présente uneréelle difficulté: «Le chapitre lie se termine (ꝟ. 64)par ces paroles: «Jusqu’ici les paroles de Jérémie.» Ils’ensuivrait que Jérémie n’est pas l’auteur de ce récithistorique qui aurait été ajouté en supplément à sonLivre. Il est certain que le style en est différent. Le nomde Joiachin est différent de celui qui est employé parle prophète dans les autres endroits où il le mentionne.Seb. Schmidt a supposé que les membres de la grandesynagogue avaient emprunté ce chapitre au IVe Livredes Rois et l’avaient ajouté ici. Selon Grotius, les chefsdes exilés à Babylone auraient écrit ce chapitre pour enfaire comme une Introduction aux Lamentations quisuivent les prophéties.» Trochon, Jérémie, p. 13, 14.

VI. Intégrité.

Un grand nombre de critiques soutiennentque beaucoup de passages ont été ajoutés sousprétexte que plusieurs d’entre eux ne se trouvent pasdans les Septante, que d’autres sont des répétitions depassages antérieurs, ou bien qu’ils brisent l’enchaînementdu récit ou contiennent des idées étrangères à Jérémie.

Les passages interpolés sont pour Kuenen:
xvi, 1415; xvii, 19-27; xxix, 16-20; xxx, 10-11, 22-24; xxxi, 3537; xxxiii, 2-3; il regarde comme douteux, ix, 23-24,25-26;
xlviii est en partie interpolé particulièrementdans les j). 40-46; 40°», 41 b; 45-47. Cf. Driver, Introduction,^. 273; Stade, dans la Zeitschrift fur die alttest. Wissenschaft,1883, p. 15, 16.

Les deux derniers auteursqui se sont occupés de Jérémie, Cornill et Giesebrecht,suivent Kuenenj et ajoutent d’autres interpolations,comme: i, 3; iii, 17-18; xv, 11-14; xvi, 14-16; xvii, 12,19-27; xxi, 11-12; xxiii, 19-20; xxx, 10-11; 22-24; xxxi,10-14, 35-37; xxxii, 1>>, 2° -5, 17-23; xxxiii, 2-3, 11°>, 1426; XL vi, 27-28; —dans xxvil, Cornill rejette le ꝟ. 7 etune grande partie de 19-22, tandis que Gigsebrecht nerejette que le ꝟ. 7; dansxxix, Cornill omet, 2, 16-20, 223J, tandis que Giesebrecht conserve 16-20. Il est vrai quele texte de Jérémie n’est pas actuellement dans un ordreparfaitement naturel et régulier; il a subi des dérangementset des déplacements comme le prouve la comparaisondu texte des Septante avec le texte hébreu, mais fln’est nullement établi que les passages attaqués parKuenen et ses imitateurs soient des interpolations. VoirDriver, Introduction, p. 273.

VII. Canonicité.

La canonicité du livre de Jérémiea été toujours admise sans hésitation. Les preuves enfaveur de cette canonicité sont:

1° L’insertion aucanon juif: le livre de Jérémie se trouve dans le doublecanon juif: palestinien et alexandrin; c’est dire que lesJuifs l’ont toujours mis au nombre de leurs écritssacrés; voir Canon, t. ii, col 137-143.

2° La traditionjuive: constatée par Daniel, ix, 2, et par II Par.,xxxvi, 20-21 où il est dit que Dieu avait prédit par labouche de Jérémie, la captivité de 70 ans à Babyloneet le retour en Palestine. Cf. Josèphe qui appelleJérémie le «prophète», Ant. jud., X, v, 1.

3° Latradition chrétienne: contenue dans le Nouveau Testament;Notre-Seigneur et les Apôtres citent souventJérémie comme auteur inspiré; voir plus haut: V,col. 1272, et Rom., ix, 20; I Cor., i, 31; II Cor., vi, 18.

4° La tradition ecclésiastique: l’Église a toujours misJérémie au nombre des Écritures canoniques. Voir Canon,t. ii, col. 143-167.

VIII. Texte du livre.

I. texte original.

Letexte original du livre de Jérémie est l’hébreu, mais unhébreu mélangé de mots et de tournures étrangers, enparticulier d’aramaismes; on y trouve des formes dedate récente par exemple: ii, 22: borif pour bar, «alcalivégétal;» — xi, 16: hâmûlâh pour hâmôn, «frémissement;» — xxxvii, 15: sofêr pour sotêr, «juge;» —XL, 2: le pour indiquer un objet proche; — XI, 2, etpassim: ’al pour’él. — On y trouve aussi des formesd’origine habylonienne, par exemple: ii, 22: niktâm,

li, 23: sâgân; — LI, 28: péhâh; — lii, 4; dâyêq;

— d’autres formes irrégulières, comme: iii, 4: qârâ’lîpour la 2 «personne du féminin; — iii, 22: ’âj.ânû; —xiii, 19: hôgelo(; — xx, 11: ’âtî pour’itî; — xxv, 3: ’askêm comme hiphil; — xxvi, 9: nibêld; — xlvi,8: ’obiddh. Cf. Knobel, Jeremias Chaldaizans, Breslau,1831, p. 3, 32. — Le texte hébreu est en généralbien conservé; cependant on constate qu’il a subi quelquesaltérations, et il est possible de rétablir en certainscas la leçon originale, par exemple, v, 28: lo yaslihûpour: ve’yaslîhû, «ils ne prospérèrent pas;» Septante:oùx £xpivav; Peschito: lu’têrso; Vulgate; non direxerunt;— xi, 15: lîdidâfl pour Udîdî, «à mon aimée;» Septante: r? ]Ya7tïi|iÉvr) [*ou; Peschito: Jiàbybfy; Vulgate:dilectus meus; — ibid.: ’âsefâh pour’âiôfâh;Septante: èîioïï)<je; Vulgate: fecil; ibid.: han-nedârimpour hâ-rabbîm, «vœux;» Septante: zifjxi’; — ibid.:ya’âbîrû pour ya’abrû; Septante: àosXoùatv; Peschito:ne’brôn; Vulgate: auferent; — xv, 14: ve ha’âbâdlipour ve’ha âbarfi, «je réduirai en esclavage;» Septante:xataSouXûato; Teschito: v’sê’bdêk; — xxi, 14:6t’’âréyhà, pour be’ya’erâh, «dans ses villes;» Pes; chito:bqorêyh; — xxv, 38: hêréb pour hârôn, «glaive;» Septante: (iaj(ac’pa; ; — Ibid.: Yehôvâh pour ha’yônâh, «le Seigneur;» Peschito: mryô’; Vulgate: Domini, àla fin du $.; — xxvii, 1: Sidqiâhû pour Yehôyâqim,<i Sédécias;» Peschito: Sdôqyo’; — xxviii, 8: û’ie’râ’âbpour û’ie’râ’âh, «à la faim;» Vulgate: et de famé; —xxxiii, 16: ve’zéh semô pour ve’zèh, «et ceci son nom;» Peschito: vehnô Smêh; Vulgate: et hoc est nomen;

xlii, 12: ve’nhamfî pour ve’riham, «et j’aurai pitié;» Septante: y.ai èXevîaw; Peschito: ve’ârhêmkôn; Vulgate:et miserebor; — Ibid.: ’dsîb pour hêsib, «je vous ferairevenir;» Septante: Imaiptyta; Peschito: ve’ûtêbkôn;Vulgate: habitare vos faciam; — xlvi, 15: nos hâfpour: nishaf, «s’enfuit Apis;» Septante: Spuyev [àisbao>] 6 T Aitt; ; — li, 1: Kasdim pour lêb qâmaï «lesChaldêens;» — li, 41: bâbél pour sêsak.

H. le texte des septante. — II existe de grandesdifférences entre le texte massorétique et le texte desSeptante du livre de Jérémie. Elles sont plus considérablesque dans aucun autre livre. Elles consistent en additions,omissions, variations d’expressions et transpositions.— On a calculé que les mots non rendus dans lesSeptante sont au nombre de 2700, un huitième du livretout entier. Les omissions les plus importantes sont:vm, 10-12; x, 5-8, 10; XI, 7-8; xvii, 1-4; xxvii, 13-14,19-22; xxix, 16-20; xxx, 10-11; xxxiii, 14-26; xxxiv,11; xxxix, 4-13; li, 4449; lii, 2-3, 15, 28-30. - Les additionssont sans importance: I, 17; ii, 31. — Les transpositionssont nombreuses; l’ordre est le même jusqu’auchapitre xxv; à partir de là il diffère de la manièresuivante:

HÉBREU ET VULGATE

xxv, 14-38

xxvi, 1-xliii, 13…xliv, 1-30

XLV, 1-5

xlvi, 1-28

    1. XLVII##

XLVII, 1-7

XLvm, 147

XL1X, 1-5

J<l, 7-22,

Id., 23-27…

ld., 28-33

ld., 34-39

L, 1-li, 64

Septantexxxii, 1-24.xxxiii, 1-l, 13.li, 1-30.li, 31-35.

xxvi, 1-28 (contre les Égyptiens),xxix, 1-7 (contre les Philistins).xxxi, 1-44 (contre Moab).xxx, 1-5 (contre les Ammonéens).xxix, 7-22 (contre Édom).xxx, 12-16 (contre Damas),xxx, 6-11 (contre les Arabes),xxv, 14-18 (contre Élam).xxvii, 1-xxviii, 64 (contre Babylone).lu, 1-34 lii, 1-31 (ruine de Jérusalem).

Septante Hébreu et Vulgate

xxv, 14-18 xlix, 34-39 (contre Élam).

xxvi, 1-28 xlvi, 1-28 (contre les Égjptiens).

xxvii, 1-xxvin, 64.. l, 1-li, 64 (contre Babylone).

xxix, 1-7 xlvii, 1-7 (contre les Philistins).

ld., 8-23 xlix, 7-22 (contre Édom).

xxx, 1-5 xlix, 1-5 (contre les Ammonéens).

Jrf., 6-Il Id., 28-33 (contre les Arabes).

Id., 12-16 Id., 23-27 (contre Damas).

xxxi, 1-44 XLvm, 1-47 (contre Moab).

xxxii.1-24 xxv, 14-38.

xxxiii, 1-l, 13… xxvi, 1-xLin, 13.

li, 1-30 xliv, 1-30.

ld., 31-35 xlv, 1-5.

lu, 1-34 lii, 1-34.

Sur les causes de ces divergences, on a émis deux opinionsextrêmes: les uns les attribuent à l’incompétenceet à l’arbitraire des traducteurs grecs, des Septante;ainsi Kueper, Havernick, Wichelhaus, De versionealexanénna, in-8°, Haie, 1847, Graf, Der Prophet Jeremiaerklurt, in-8°, Leipzig, 1862; — d’autres les expliquenten supposant que le texte hébreu actuel et celuidont se servirent les Septante pour leur traduction représententdeux recensions du livre de Jérémie. La véritédoit se trouver dans une opinion intermédiaire, àsavoir: quelques divergences sont dues au fait que letexte hébreu dont se servirent les Septante différait enquelques points de notre hébreu actuel; d’autres seraientdues à la négligence ou à l’inadvertance des traducteursgrecs. Le déplacement des chapitres qui porte surtoutsur les prophéties relatives aux peuples étrangers ad’ailleurs en soi peu d’importance. — Quant à la valeurdes deux textes, les uns préfèrent le texte massorétique;ainsi A. Kueper, Jeremias Librorum Sacrorum mterpresatque vindex, Berlin, 1837, p. 167-202; Graf, op. cit.,t. i, p. xl. Cf. Cornely, Introd. spec, t. ii, p. 371; Trochon,Jérémie, p. 16; Kaulen, Emleitung, 3e édit., Fribourg,1892, p. 364, 365. — D’autres aiment mieux letexte des Septante cf. Trochon, /ere’» me, p. 16; Cornely,

Introd. spec, t. ii, p. 371. —Une opinion intermédiaireattribue aux traducteurs grecs toutes les variantes textuelles;mais quant à l’ordre, elle préfère celui des Septante;cf. Nagelsbach, Der Prophet Jeremia, dans leBibelwerk de Lange, 1868, p. xix; Payne Smith, dans leSpeaker’s Commentary, 1875, v, p. 323; W. R. Smith,The Old Testament in theJewish Church, 2e édit., Londres,1892; Queen’s Pnnters’Bible, publiée par Eyre etSpottiswoode, 3e édit., Londres, 1889. — Sur la questiondes deux textes de Jérémie, cf. F. C. Movers, De utriusquerecensionis vatic. Jeremias Grsec. Alex, et Masor.indole et origine, in-4°, Hambourg, 1837; A. Scholz,Der massoreth. Text und die lxx Veberselzung desBûches Jeremias, Ratisbonne, 1875; E. C. Workman,Tke Text of Jeremiah, Edimbourg, 1889; Driver, dansVExpositor, mai 1889, et H. P. Smith dans le Journalof the Biblical Literalure, 1890, p. 107, recensions del’ouvrage de Workman; A. W. Streane, The doubleText of Jeremiah, Londres, 1896, et parmi les Pèresde l’Église, Origène, Epist. ad Afric., 4, t. xi, col. 55;S. Jérôme, Prolog, in Jer., t. xxviii, col. 848.

IX. Style et langue.

I. style. — Le style de Jérémien’est pas aussi brillant que celui des autres prophètes;l’auteur exprime simplement ses pensées tellesqu’elles se présentent à son esprit, sans recherche et sansaiïectation; le caractère de son style, c’est le naturel etla spontanéité; son seul ornement, ce sont les images etles figures. Jérémie ne connaît ni l’art d’Isaie et d’Amos,ni le travail et le fini d’Ézéchiel. Toutefois il sent vivementce qu’il dit; iv, 19; viii, 18-ix, 1; x, 19-25, xiii, 17;xxiii, 9; — parfois il s’exprime sur un ton pathétique; vi,8, 26; vii, 29; ix, 17-18; xxii. 10, 20-30; xxxi, 15-20; —ses idées manquent d’enchaînement et ses transitionssont brusques; il ne connaît pas l’art de développer sapensée avec symétrie et régularité; une particularité deJérémie c’est l’emploi qu’il fait du Deutéronome: ’xi, 4,il emprunte au Deut., iv, 20, l’image de la fournaise defer pour désigner l’Egypte; — la locution «disperserparmi les nations»; Jer., ix, 16; Deut., iv, 27; — «circoncirele cœur;» Jer., iv, 4; Deut., x, 16; xxx, 6. Cf.Konig, Dus Deuteronomium und der Prophet Jeremiah,in-8°, Berlin, 1839. Bickell signale dans Jérémiedes morceaux poétiques, tels que: xiii, 7-12; xviii, 13,17; l, 23-29. Cf. Carmina Veteris Testamenti metrice,1882, p. 208-210.

h. langue. — La langue est caractérisée: 1° par uncertain nombre de mots et de formes araméens, ii, 33,36; iv, 29, 30; xi, 15; xiii, 19, 21;-xxxi, 21; il y amême un verset tout entier, x, 11, écrit en chaldéen; —2° par de nombreuses répétitions, dont voici les plusimportantes: i, 10 b et xviii, 7 b, 9 b; — i, 18°, 19 et xv,20; II, 15 b et iv, 7 b; — II, 28° et xi, 13°; — iv, 4° et xxi,12 b; — iv, 6 et vi, 1; — v, 9, 29 et ix, 9 (héb., 8); — VI,13-15 et viii, 10-12; — VI, 22-24 et L, 41-43; — vi, 22 b etxxvi, 32 b; — vii, 16 et xi, 14°; — vii, 23°, 24, 25 et xi,4 b, 7°, 8°; - vii, 31-33 et xix, 5, 6, 7 b, ll b; — viii, 2 b,et xvi, 4; xxv, 33 b; — viii, 15 et xiv, 19 b; — rx, 15 b(héb., 14 b) et xxiii, 15; — ix, 16° (héb., 15 b) et xlix,37 b; — x, 12-16 et li, 15-19; — xi. 20 et xx, 12; - xi,23 b et xxiii, 12 b; xlviii, 41 b; xlix, 8 b; — xv, 2 b et xliii,ll b; — xv, 13-14 et xvii, 3, 4 b; — xvi, 14-15 et xxiii,7, 8; — xvii, 20 et xix, 3°; — xvii, 25 et xxii, 4; — xix,8 et xlix, 17 (Édom); L, 13 b (Babylone); cf. xviii, 16, —xxi, 9 et xxxviii, 2; — xxi, 13, 14 et L, 31, 32; — xxiii,5-6etxxxiii, 15-16; — xxiii, 19-20 et xxx, 23, 24; — xxx,10, Il et xlvi, 27, 28; — xxxi, 36-37 et xxxiii, 25-26; —xlvi, 21 b et l, 27 b; — xlviii, 40-41° et xlix, 22, —xlix, 18 et L, 40; — xlix, 19-21 et L, 44-46; — xlix, 26et l, 30; — l, 13° et xix, 8; xlix, 17; — l, 27 b et xlvi,21 b; — L, 30 çt xlix, 26; - l, 31-32 et xxi, 13-14; —L, 40 et xlix, 18; - L, 41-43 et vi, 22-24; — L, 44-46 et.xlix, 19-21; — li, 15-19 et x, 12-16; — 3° par desidiotismes,c’est-à-dire des expressions propres à Jérémie, telles

que: roî’m, «pasteurs,» pour désigner les rois ou lesgouverneurs, ii, 8; iii, 15; x, 21; xii, 10; xxii, 22;XXIII, 1-2, 4; xxv, 34-36; L, 6; — type de locution pour

exprimer la surprise: ha ou hâ’im madû’a,

il. 14, 31; viii, 4-5, 19, 22; xiv, 19; xxii, 28; xux, 1;cf. xxx, 6; — mesubdh, «aversion, apostasie,» n. 19;m, 22; v, 6; viii, 5; xiv, 7; cf. Ose., xi, 7; combinéavec le mpt Israël, iii, 6, 8, 11, 12; — fânâh’oréf ve’lo’fdnîm, «tourner le cou et non la tête,» ii, 27; xviii,17; xxxii, 33; — Idqah mûsàr, «recevoir la correction,» ii, 30; v, 3; yii, 28; xvii, 23; xxxii, 33; xxxv,13; cf. Soph., iii, 2, 7; Prov., i, 3; viii, 10; xxiv, 32; —’dlàli’ol lêb, «monter sur le cœur» [souvent, «sesouvenir s], iii, 16; vii, 31; xix, 5; xxxii, 35; xliv,21>>; rare, excepté, IV Reg., xii, 5; Is., lxv, 17; — serirût, «opiniâtreté, considération,» iii, 17; vii, 24; ix,13; xi, 8; xiii, 10; xvi, 12; xviii, 12; xxiii, 17; cf.Deut., xxix, 18; Ps. lxxxi, 13; toujours suivi de lêb, «cœur;» — du pays du nord pour indiquer le lieu d’oùvient le mal ou l’invasion, vi, 22; x, 22; i, , 9; — du nord,I, 14; iv, 6; vi, 1; xiii, 20; xv, 12; xlvi, 20; xlvii, 2; L,3, 41; li, 48; cf. i, 15; xxv, 9, 26; xlvi, 6, 10, 24; pourindiquer le lieu d’où reviendra Israël, iii, 18 (cf. v,12); xvi, 15; xxiii, 8; xxxi, 8; — les hommes de Judaet les habitants de Jérusalem, IV, 4; xi, 2, 9; xvii, 25;xviii, 11; xxxii, 32; xxxv. 13; xxxvi, 31; on ne letrouve ailleurs que dans IV Reg., xxiii, 2; II Par.,xxxiv, 30; Dan., ix, 7; — sébér gâdôl, «grande destruction,» iv, 6; vi, 1; xiv, 17; XL viii, 3; l, 22; ii,54; cf. Soph., i, 10; — une idée renforcée par la négationde son opposée, IV, 22; vii, 24; xxi, 10 (pour lemal et non pour le bien; aussi xxxix, 16; xliv. 27; cf.Amos, ix, 4); xiii, 10; cf. Ps. xxviii, 5; — kàlâh’âsâh, «consommer, -» IV, 27; v, 10, 18; xxx, 11; — hin.ienî(ou hinnêh’dnoki) …, mébî’, «voici que je viens» v, 15; vi, 19; xi. Il; xix, 3, 15; xxxi, 8; xxxv, IV;xxxix, 16; xlv, 5; xlix, 5; se trouve aussi dans III Reg-,xiv, 10; xxi, 21; IVReg., xxi, 12; xxii, 16; IIPar., xxxiv,24; et trois ou quatre fois dans Ézéchiel; —’ê{ peqad(i, «au temps où je visite (eux, toi, lui)», vi. 15; xlix, 8; L, 31;forme légèrement variée, viii, 12; x, 15; xlvi, 21; L, 27;

— l’année de leur visite, xi, 23; xxiii, 12; xlviii, 44; —rnâgôr mis-sâbîb, «terreur de tous côtés,» vi, 25; xx, 3,10; xlvi, 5; xlix, 29; cf. Ps. xxxi, 14; Lam., ii, 22, avecmes préfixe; —’âsér niqrds $em âldv, «sur quoi monnom est appelé,» pour indiquer la possession (du templeou de la ville) vii, 10, 11, 14, 30; xxv, 29; xxxii, 34;xxxiv, 15; (du peuple) xiv, 9; (de Jérémie lui-même)xv, 16; cf. Deut., xxviii, 10; III Reg., viii, 43; II Par.,vi, 33; vii, 14: Is., lxiii, 19; Dan., ix, 18, 19; Am, ix,12; — hasekkêm … «se lever et … (parler),» vii, 13;xxv, 3; xxxv, 14; (envoyer) vii, 25; xxv, 4; xxvi, 5;xxix, 19; xxxv, 15; xliv, 4; cf. II Par., xxxvi, 15; (testiSer) xi, 7; (enseigner) xxxii, 33; — les villes de Judaet les rues de Jérusalem, vu 17, 34; xi, 6; xxxiii, 10;xliv, 6, 9; — rues de Jérusalem, v, 1; xi, 13; xiv, 16;

— ndtdh’ozén, «incliner l’oreille,» vii, 24, 26; xi, 8;xvii, 23; xxv, 4; xxxiv, 14; xxxv, 15; xliv, 5; ne setrouve que dans Is., lv, 3; — voici que les jours arrivent,et…, vii, 32; ix, 24; xvi, 14; xix, 6; xxiii, 5,7; xxx, 3; xxxi, 27, 31, 38; xxxiii, 14; xlviii, 12; xlix,2; li, 47, 52; ne se trouve que dans I Reg., Il, 31; IVReg., xx, 17; Is., xxxix, 6; Am., iv, 2; viii, 11; ix,13; — la voix de joie et la voix d’allégresse, la voix del’époux et la voix de l’épouse, vii, 34; xvi, 9; xxv, 10;xxxiii, 11; — me’ôn fannîm, «la demeure des chacals,» ix, 11 (héb. 10); x, 22; xlix, 33; ii, 37; — qesûsêfê’dh, «rasés autour des tempes» (épithète decertaine tribu d’Arabes), ri, 25; xxv, 23; xlix, 32; —un verbe renforcé par l’addition de son passif, xi, 18;xvii, 14; xx, 7; xxxi, 4, 18; — te glaire, la peste et lafamine (quelquefois l’ordre est changé), xiv, 12; xxi,7, 9; xxiv, 10; xxvii. 8, 13; xxii, 17, 18; xixii, 24, 36;

xxxrv, 17; xxxviii, 2; xlii, 17, 22; xi.rv, 13; — le glaiveet la famine, v, 12; XI, 22; XIV, 13, 15, 16, 18; xvi, 4;xviii, 21; xiii, 16; xliv, 12, 18, 27; — hinnenî foqêd’al, «voici que je visite…,» xi, 22; xxiii, 2; xxix, 32;xlvi, 25; l, 18; —’âièr hâyâh debar Yehovdh’él…,tournure tout à fait particulière, xiv, 1; xlvi, 1; xlvii,1; xlix, 34; — te’za’âvêh lekol mamlekôf hâ’ârés, «pour ébranler tous les royaumes de la terre,» xv, 4;xxiv, 9; xxix, 18; xxxiv, 17; cf. Deut., xxviii, 25; —des locutions comme: des pêcheurs et ils les pécheront,xvi, 16; xxiii, 4; xlviii, 12; li, 2; — j’allumeraiun feu dans … et il dévorera…, xvii, 27 b; xxi,14 b; xlix, 27; l, 32 b; cf., avec légère variation, Am.,i, 4, 7, 10, 12; II, 2, 5; Ose., viii, 14; — que chacun sedétourne de sa mauvaise voie, xviii, 11; xxv, 5; xxvi,3; xxxv, 15; xxxvi, 3, 7; cf. III Reg., xiii, 33; IV Reg.,xvii, 13; II Par., vii, 14; Ezech., xiii, 22; xxxiii, 11;Jon., iii, 10; Zæh., i, 4; — son (Ion) âme lui (te) seracomme un butin, xxi, 9; xxxviii, 2; xxxix, 18; — ainsiparle le Seigneur, Dieu d’Iraèl, vi, 6, 9; vii, 3, 21;xi, 3, etc.; formule très rare dans les autres prophètes.Cf. Driver, Introduction, p. 275, 276.

X. Prophéties messianiques.

Les éléments christologiquesdu Livre de Jérémie sont assez nombreux etassez importants. Cf. D r Loch et Reischl, Die heiligenSchriften des alten Testamentes, t. iii, Ratisbonne, 1870,p. 17. Jérémie décrit le Christ doux comme un agneauqu’on conduit à la boucherie, xi, 19; il annonce lescomplots et les machinations des prêtres contre le Sauveur,xviii, 16; cf. Matth., xxii, 15; xxvi, 59; Joa., xix, 6; il apréditl’Incarnation dans sa fameuse prophétie, xxxi,22. Femina circumdabit virum; «une femme entoureraun homme.» Les Pères de l’Église, des rabbinsjuifs et les commentateurs chrétiens ont vu dans ce passagela conception du Messie dans le sein de la ViergeMarie.

XI. Enseignements particuliers contenus dans lelivre de Jérémie. — Le livre de Jérémie contient une fouled’enseignements et de leçons utiles: — 1° Sur les attributsde Dieu: sa toute-puissance, v, 22; x, 65; xviii; x xvii,5-8; — sa science infinie, xxxiii, 23, 24; xvii, 5-11; — sabonté et sa miséricorde, iii, 1; xxxi, 2-3, 20; — 2° Surla malice du péché: ingratitude du pécheur, ii, 2-9; —le mépris qu’il a pour Dieu, ꝟ. 10-14; — sa révolte contrela souveraineté de Dieu, ꝟ. 10; — sa perfidie: ꝟ. 21; —son aveuglement, son obstination et son endurcissement,h, 23-27; 33-35; iii, 2-3; cf. aussi: xiii; xvii; xviii, 1223; xxiii; — les suites néfastes ou les châtiments dupéché: la famine, la guerre, la dévastation du pays,l’incendie de la ville sainte et du temple, l’exil et lacaptivité, reviennent souvent dans le livre de Jérémie.Le Hir, Les trois grands prophètes, p. 268-281.

XII. Bibliographie. — 1° Commentateurs catholiques.

— Origène, Romilise in Jeremiam, t. xiii, col. 255-543(dans les œuvres de S. Jérôme, 14 homélies, t. xxv, col.585-691); Selectà in Jeremiam, t. xiii, col. 543^606;S. J. Chrysostome, Homilia in locum Jeremise, x, 23,t. XLi, col. 153-162; Théodoret de Cyr, In Jeremiseprophetiam interpretatio, t. lxxxi, col. 495-759;S. Éphrem, In Jeremiam exploratio, Opéra syriaca, t. ii,p. 48-162; S. Jérôme, Comment, in Jeremiam hbri VI(les 32 premiers chapitres), t. xxiv, col. 679-900;S. Thomas, In Hieremiam expositio, Opéra, édit.d’Anvers, 1612, t. xii; Maldonat, In Jeremiam Commentarium,1609; A. Scholz, Commentar zum Bûche desPropheten Jeremias, Wurzbourg, 1880; Schneedorfer,Dos Weissagungsbuch des Jeremias, in-8°, Prague,1883; Knabenbauer, Comment, in Jeremiam Prophetam,in-8°, Paris, 1889; et les auteurs cités au cours del’article. Cf. Lelong, Bibliotheca sacra, in-f», Paris,1723, t. ii, p. 1121.

Commentateurs protestants.

Zwingle, Complanatio

Jeremise, in-f «, Zurich, 1531; Bucer, Complana->

tiones Jeremise prophetse, Zurich, 1531; Œcolampade,InJeremiam libri très, in-4o, Strasbourg, 1533; Bugenhagen,Adnotationes in Jeremiam, in-4o, Wittenberg,1546; Calvin, Prselectiones in Jeremiam, in-f°, Genève,1563; Osiander, Jesaias, Jerenias et Thretii, Tubingue,1578; Strigel, Conçûmes Jeremise prophétie, in-8o,Leipzig, 1566; Hulsemann, In Jeremiam et ThrenosConimenl., in-4o, Rudolstadt, 1663; Forster, Commentar.inproph. Jeremiam, in-4o, Wittenberg, 1672; S. Schtnidt,Comment, in lib. prophet. Jeremise, in-4o, Strasbourg,1685; H. Venema, Comment, ad lib. prophet. Jeremise,2 in-4o, Lewarden, 1765; J. D. Michælis, Observationesphilologicse et criticm in Jeremise vaticinia, in-4o,Goettingue, 1743; W. Lowth, Commentary upon theProphecy and Lamentationes of Jérémiah, in-4o,Londres, 1718; Schnurrer, Observationes ad vaticiniaJeremise, in-4o, Tubingue, 1793-1794; Eichhorn, Diehebrâischen Propheten, 3 in-8o, Gœttingue, 1816-1820;Roorda, Commentant in aliqua Jeremise loca, Groningue,1824; Dahler, Jérémie traduit sur le texte originalaccompagné de notes, Strasbourg, 1825; Umbreit, PraktischerCommentar ùber den Jeremia, in-8o, Hambourg,1842; Rosenmùller, Scholia, 2 in-8o, Leipzig, 1826;Ewald, Die Propheten des alten Blindes, 2 in-8o, Stuttgart,1840-1841; 2e édit., 3 in-8o, Gœttingue, 1867-1869;F. Hitzig, dans le Kgf. Exeg. Handbuch, in-8o, 2e édit.,Leipzig, 1866; Maurer, Scholia, in-8o, Leipzig, 1835;Keil, dans le Biblischer Kommentar, in-8o, Leipzig,1871; W. NenmdiTm, Jeremiasvonvnathoth; Die Weissagungenund Klageheder des Propheten, 2 in-8o, Leipzig,1856-1858; Payne Smith, dans le Speaker’s Commentary,in-8o, Londres, 1875; Workman, The old Text of Jererniah,Edimbourg, 1889; Cornill, dans Sacred Books ofthe Old Testament de P.Haupt; — sur les chapitres, xxv,xlvi-xlix, Schwally dans la Zeitschrift fur die alttest.Wissenschaft, 1888, p. 177; L. H. K. Bleeker, Jeremia’sProfetieen legen de Volkeren, Groningue, 1894; — sur leschapitres l-li, G. Budde dans les Jahrbùcher fur deutscheThéologie, 1878, p. 428-470, 529-562, et les auteurs citésau cours de l’article. V. Ermoni.

    1. JÉRÉMIEL (voir Jéraméel##


JÉRÉMIEL (voir Jéraméel, col. 1256), fils d’Amélech.Les Septante traduisent: «fils du roi,» mélék signifiant «roi». Le roi Joakim lui donna l’ordre de sesaisir de la personne de Jérémie et de Baruch son secrétaire,pour les mettre en prison; mais l’un et l’autre réussirentà se cacher. Jer., xxxvi, 26.

    1. JÉRIA##

JÉRIA, lévite, chef des Hébronites du temps deDavid. I Par., XXVI, 21. La Vulgate écrit son nomJériaû dans I Par., xxiii, 19; xxiv, 23. Voir Jériaû.

    1. JÉRI AS##

JÉRI AS (hébreu: Ir’iydh, «que Yûh voie!» Septante:Soepouia), fils de Sélémias et petit-fils du faux prophèteHananie. Jérémie, xxviii, 16, avait annoncé à ce dernierque Dieu le punirait de mort à cause de ses prédictionsmensongères. Jérias était probablement pour cette raisonl’ennemi de Jérémie, et l’ayant rencontré au moment oùle prophète allait sortir de Jérusalem par la porte deBenjamin, il l’avait arrêté en sa qualité de chef des gardes,sous le faux prétexte qu’il voulait se rendre aux Chaldéens,et il le conduisit aux princes qui le firent mettreen prison. Jer., xxxvii, 12-13.

    1. JÉRIAÛ##

JÉRIAÛ (hébreu: Yerîyâhû; Septante: ’Ispiâ; Exêtoû;Oùpîocç), lévite, de la branche de Caath, chef de lafamille des Hébronites du temps de David. I Par., xxiii,19; xxiv, 23; xxvi, 31. Dans le second passage, on lit: «Et des fils de Jériau;» il faut corriger, d’après le premierpassage et le troisième: «Et les fils [d’Hébron],Jériaû [le premier].» Le nom d’Hébron est tombé dutexte. Dans I Par., xxvi, 31, la Vulgate écrit le nomde ce lévite Jéria.

DICT. DE Li BIBLE.

    1. JÉRIBAÏ##

JÉRIBAÏ (hébreu: Yeribaï; Septante: IcepiSï), fils’d’Elnaëm, un des braves de l’armée de David. I Par., xi,46.

    1. JÉRICHO##

JÉRICHO (hébreu: Yerêhô, Yerîho Yerihoh; Septante: ’iEptyc’)), ville de Chanaan qui fut donnée à la tribude Benjamin. La qualification de’Ir hat-Tamârïm, «ville des palmiers,» qui est quelquefois ajoutée àson nom, lui est donnée deux fois comme nom propre,Jud., i, 16; iii, 13; cf. Deut., xxxiv, 3; II Par.,xxvil, 15.

I. Nom.

Les interprètes tant anciens que modernesfont ordinairement dériver le nom Jéricho ou bien deYarèha, «lune,» et alors il signifierait «ville de lalune», comme Bethsémès est «la ville de soleil», oubien de riha, «odeur,» et il aurait le sens de «ville desparfums». Cette dernière étymologie paraît la plusprobable. Les significations de «descente dans la plaine,abaissement, exil» ou autres semblables qui lui ontparfois été attribuées, ne paraissent pas justifiées.Cf. S. Jérôme, Grssca fragm. libri nomin. hebr., ii,t. xxiii, col. 1158; Origenianum lexicon nom. hebr.,ibid., col. 1217; Gesenius, Thésaurus, p. 1213; Ad. Neubauer,Géographie du Talmud, Paris, 1868, p. 181;Fùrst, Hebraisches Handwôrterbuch, Leipzig, 1876,p. 160.

IL Situation et emplacements divers occupés parJéricho. — Le village situé dans le Ghôr et appelé actuellementRihâ est invariablement considéré commeidentique à la Jéricho des anciens, ou, pour parler plusexactement, comme l’ayant remplacée et continuée. Lenom de Rihâ, ou er-Rihâ avec l’article, ou’Arihâ, onttoujours été usités chez les Arabes, aussi bien dans lesécrits que dans la langue parlée, pour désigner Jérichodont il est du reste la transcription régulière: ’Arihâest la forme la plus ancienne, celle généralement employéedans les versions arabes de la Bible. Rihâ setrouve d’ailleurs dans les conditions topographiques danslesquelles l’Écriture et l’histoire placent Jéricho. D’aprèsles Saints Livres, Jéricho se trouvait «de l’autre côtédu Jourdain» par rapport aux’Arbô( Moâb, où campèrentles Hébreux avant le passage de ce fleuve, c’est-à-dire àl’occident, en face d’Abelsatim, des monts Abarim, duPhasga et du Nebo. Num., xxii, 1; xxvi, 3, 63; xxxi,12; xxxiv, 15; xxxv, 1; xxxvi, 13; Deut., xxxii, 49;xxxiv, 1; Jos., xiii, 32. Elle était au pied des montagness’étendant vers Béthel et non loin de Galgala, située elle-mêmeà l’est de Jéricho. Jos., ii, 16; iii, 17; v, 10; xvi,1, 7; xviii, 12. Précisant les indications, Josèphe, Ant.jud., V, i, place Jéricho à dix stades (1870 mètres) àl’ouest du campement de Galgala, 4; elle était «dans laplaine», èv ra5: (o, c’est-à-dire dans la vallée du Jourdain,au pied des montagnes rocheuses qui bordent la valléedu côté de l’ouest, à cent cinquante stades (28 050 mètres)de Jérusalem dont il était séparé par un désert rocheuxet stérile, et à soixante stades (11 220 mètres) du Jourdain.Bell. jud., IV, viii, 2, 3.’Arihâ, d’après les auteursarabes, est dans le Ghôr ou vallée du Jourdain, à unejournée de Jérusalem, ou à douze milles (arabes),environ 24 kilomètres de cette ville et à quatre (environ8 kilomètres) du Jourdain. Cf. Yaqoût, Géographie,édit. Ferd. Wûstenfeld, Leipzig, 1866, t. i, p. 227; t. ii,p. 884; Abulféda, Géographie, édit. Rainaud et de Slane,Paris, 1840, p. 236. La Rihû moderne est située sur lalisière occidentale de la vallée du Jourdain, sur le bordseptentrional de l’ouadi Kelt, assez communément identifiéavec la vallée d’Achor, à l’opposé de Tell Râméh,identifié avec Bétharam voisine d’Abelsatim, autour desquellescampèrent les Hébreux, presque en face duDjebel Nébd, le Nébo de la Bible; elle se trouve à10 kilomètres au nord de la mer Morte, 28 kilomètres àl’est-nord-est de Jérusalem, à 2 kilomètres à l’est dupied de la montagne où aboutit la route venant de la ville,

III. - 41

sainte, et à 7 kilomètres et demi à l’ouest de Jourdain,à 2 kilomètres à l’ouest-nord-ouest de Tell Djeldjelldont le nom rappelle l’antique Galgala, à 5 kilomètres aunord-ouest du Deir Elal/ld qui a remplacé Ltethagla, età 4 kilomètres au sud-est du Djebel Qarantâl, le célèbremont de la Quarantaine des chrétiens. La Riffâ moderne,cela ne paraît pas douteux, occupe l’emplacement mêmede la Jéricho du moyen âge et d’Arihâ des anciensArabes; sa position répond ainsi à toutes les données dela Bible qui sont générales. Toutefois on constate quecette position ne répond pas exactement aux indicationsplus précises de l’histoire, antérieures à la conquêtearabe, sur le site de Jéricho, que celles-ci même paraissentlui assigner des places différentes. L’histoire

villes diverses qui se sont succédé sous le nom de Je’richo, occupent un espace considérable (fig. 221).Commençant un peu au nord de la fontaine nomméeaujourd’hui’Ain es-Sulfàn, la fontaine d’Elisée desanciens (voir t. ii, col. 1096), ces ruines se succèdentjusqu’au Khirbet-Qaqùn, situé à 800 mètres au sud del’Ouâd" el-Kelt, sur une étendue de 3 kilomètres ettout autant d’ouest à est, depuis le pied des montagnesjusqu’au delà de Rîl, id, comprise elle-même dans lepérimètre occupé par les décombres: c’est une superficied’environ 900 hectares. Vers l’extrémité nordouestde cet espace, on remarque un tertre allongés’élevant d’une trentaine de mètres au-dessus de laplaine_et du pied duquel, du côté de l’est, sort la fon"*-- a "è *>Roudjoum el-Mogheîfir

A Dsschryvepe des,

221. Carte des environs de Jéricho.

elle-même nous donne la raison de ces divergences-ellenous apprend que, si Jéricho est demeurée dansune même région, elle a plusieurs fois changé de place.

L’«ancienne ville» de Jéricho était, selon Josephe,Bell.jud., IV, viii, 3, qui la distingue par là de la villehérodienne de son temps, prés de la fontaine dont leseaux furent améliorées par un miracle du prophèteElisée. La ville d’Hiel fut élevée à la même place, surles ruines de la ville chananéenne. Cf. Jos., vi, 26;III Reg., xvi, 34. Eusebe et saint Jérôme, De situ etnom. loc. heb., t. xxiii, col. 904, laissent entendre quela ville romano-byzantine de leur époque était différentedes précédentes dont on vojait encore les restes. Cettedernière se trouvait au sud de l’ancienne, sur lesbords de l’Ouadi Kelt et sur le chemin de Jérusalem,entre la Rîfiâ arabe moderne et la montagne, d’aprèsles indications des anciens pèlerins. Cf. Itinerariuma Burdigala Rierusalem usque (333), t. viii, col. 792;Thaodosius, De Terra sancta, Genève, 1877, p. 68;Antoninus Plac, Itinerarium, t. lxxii, col. 905. Voiraussi la carte mosaïque de Mâdaba, t. v, fig. 180.

III. Description.

Ruines.

Les débris des

taine: ce tertre est connu sous le nom de Tell es-Sulfdn.Il a toujours été considéré comme occupant le site dela Jéricho ancienne et primitive. Au printemps des années1907, 1908 et 1909, des fouilles y ont été entreprisessous la direction de M. Ern. Sellin, d’abord professeurà l’université de Vienne, actuellement à cellede Rostock. Elles ont justifié la persuasion générale,confirmé l’exactitude des récits bibliques sur plusieurspoints et éclairci et complété l’histoire. La colline quin’était au commencement qu’une légère élévation naturelledu sol, de 10 mètres environ, s’est exhaussée desdécombresdes constructions qui y ont formé sept mamelonsdont le plus élevé, au nord-ouest, a 24 mètres30 centimètres au-dessus de la source. Distante de500 mètres, c’est-à-dire de plus de trois portées d’arc,de la butte qui forme en quelque sorte la base dumont de la Quarantaine et borde la plaine, à l’ouest,elle était en dehors de toute atteinte des traits de cecôté.

La place était fortifiée par deux remparts parallèlesdistants d’environ 30 mètres. La muraille extérieure,construite à la base du tertre, en suivait les contours, £8

sur une étendue de 770 mètres, affectant la formed’une ellipse irrégulière, ovoïde, inclinée du nord-estau sud-ouest. Le grand axe de l’ellipse mesure310 mètres de long et la plus grande largeur est de165 mètres: l’aire de la cité était ainsi d’environ cinqhectares. — Le rempart n’était pas posé sur le roc,qu’il eut fallu sans doute chercher trop profondément,mais sur une couchée de terre glaise fortement tassée etbattue, de plus d’un mètre d’épaisseur. Sur ce lit deterre faisant l’office de béton, se dressait en talus légèrementrenflé un socle massif et puissant, formé degrandes pierres grossièrement équarries, ayant quelquefoisde 1 à 2 mètres de longueur sur un mètre de largeur;il s’élevait à une hauteur moyenne de 5 mètres.La muraille reposait verticalement sur ce socle. Elle

4 mètres d’épaisseur à la base. Aucune porte n’a étéreconnue dans toute la partie restante. Un renflementde 5 mètres de rajon sur le milieu du côté occidentalfait supposer que là était une tour. Le côté septentrionalest la partie la plus remarquable de toute la fortification.Tout en fléchissant légèrement, le mur de cecôté suit, sur une longueur de 80 mètres, une lignedroite, inclinée de l’ouest-nord-ouest à l’est-sud-est.Son épaisseur est de 3 mètres et demi; il est terminé,à ces deux extrémités, par deux grosses tours de formeet de dimension différentes. Le mur s’élève encorejusqu’à 8 mètres de hauteur. De la tour orientale parun avant-mur de 1 mètre et demi de largeur, distant de3 mètres du précédent, il se développe parallèlementà lui, fléchit en face de l’angle de la tour, au nord223. — Riha, d’appês une photographie de M L. Heidet.

était faite de grandes briques de différentes dimensions,séchées au. soleil. L’épaisseur moyenne du mur estde 2 mètres. Il a été ruiné partout et ne s’élève plusqu’à la hauteur de 2 mètres et demi au plus. Sonélévation primitive devait être au moins double de celledu socle, ce qui portait la hauteur totale du rempartà 15 mètres environ. On n’y a pas constaté de tour,sauf vers son extrémité sud-est où s’élevait une grandeconstruction trapézoïde, ayant 20 mètres à la faceextérieure et 10 de profondeur; de même caractèreque le mur, elle était destinée sans doute à protégerla porte. Celle-ci, selon Josèphe, ii, 3et5, était unique etse fermait le soir. Elle n’a pas été retrouvée; elle auradisparu à l’époque byzantine ainsi que la plus grandepartie de la fortification qui regardait l’Orient, pourfaire place â une série de constructions groupées autourde la fontaine. Celle-ci était incluse par la muraille.

Le rempart intérieur, également effacé sur tout lecôté oriental et par la même cause, est en général d’untravail moins soigné. Le soubassement de pierre entalus n’a guère que 50 à 80 centimètres de hauteur sur

ouest, pour se diriger vers le sud; construit de cecôté occidental sur une distance de 25 mètres, il sembleavoir accompagné le rempart intérieur dans toute sonétendue. — À la base de la tour angulaire précédente,les ingénieurs de l’exploration ont reconnu les restesd’une autre puissante muraille large de 5 mètres et decaractère tout primitif; passant sous l’avant-mur etsous les constructions les plus anciennes, elle se prolongevers le nord-est sur une étendue de plus de30 mètres. Aucun indice précis ne permet de fixerl’époque de cette’première fondation ni ne fait connaîtrela population qui a précédé celle dont nousvenons d’admirer le double rempart. Ce dernierœuvre est similaire aux fortifications de l’antique Mageddo[Tell el-Muteçallim), existantes à l’arrivée deThothmès III et de ses Égyptiens et l’on n’y a remarquéaucune trace d’intervention israélite. À travers l’espacecompris entre ces murs, d’innombrables instrumentsen silex et en bronze ont été recueillis, ainsi qu’unemultitude de pièces de poterie dont plusieurs occupaientencore leur situation première: tous ces restessont marqués aux caractères de l’époque chananéenne

qui a précédé immédiatement l’immigration Israélite.Aussi peut-on affirmer que ces remparts et la ville qu’ilsprotégeaient sont ceux mêmes qu’ont rencontrés Josuéet les fils d’Israël à leur entrée dans la Terre Promise,vers le milieu du xve siècle avant notre ère. — À cemoment, tous les indices qui, dans les autres ruinesexplorées, marquent, par les progrès ou les modifications intervenues dans les industries, le mouvement etles étapes des âges, cessent complètement à Jéricho, etpour plusieurs siècles y attestent l’abandon et la désolation. — Au IXe siècle ou au vuie seulement avec lestraces caractéristiques des influences dites phénicienneet cypriote, reparaissent la vie et l’activité. Un groupe

de formats divers, des pots, des coupes, des plats, desfiltres et jusqu'à un fuseau. Une multitude d’anses portent des estampilles à caractères araméens, parmi lesquelles on remarque souvent le nom divins de Jéhovah,->, Yàh, et trois fois in>, Ydhô, avec l’orthographe desdocuments juifs d'Éléphantine du temps de Néhémieet de Sanaballat. Plusieurs objets archéologiques accusent les époques diverses des dominations persanes etgrecques; aucun n’a été rencontré de la période romaine et hérodienne. — C’est au sud-est du Teil esSultan que se trouvent ceux-ci. Toute cette région duKelt est couverte, jusqu’au delà de tumuli. Des sondages ont fait reconnaître dans plusieurs des restes de

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224. — Fleurs et fruits du Calotropis procera. D’après une photographie de M. L. Heidet.

de constructions Israélites, élevées sur les restes debrique de la ville chananéenne, couvre le mamelondu pied duquel jaillit la source. Les. habitations depierre sont séparées par des rues étroites et secomposent d’ordinaire de chambres de dimensionsréduites autour d’une cour intérieure. Un édificebeaucoup plus considérable dominait la fontaine etformait peut-être la citadelle de la nouvelle cité. Ilavait plus de 30 mètres de développement en longueur,probablement autant en profondeur et ses murs étaientd’environ 1 mètre et demi de largeur. Deux grandessalles rectangulaires de 10 mètres sur 5 occupaient lemilieu et étaient environnées de pièces de 5 mètresde côté.

Les restes de l’installation des Juifs, après le retour dela captivité, se constatent partout, mais particulièrement dans le quartier situé au nord de la grande muraille septentrionale du rempart intérieur. Là, dans deschambres presque intactes on a retrouvé rangés enleur place de grandes jarres à vin ou à huile, des cruches

construction de cette époque (63 avant J.-G.'à 70 après).Dans l’un d’eux, en 1869, le lieutenant Warrenavait trouvé une amphore avec inscription latine. Unde ces tertres recourbé en forme de croissant sembleformé des ruines d’un théâtre. De nombreux aqueducsdu même temps, parcourent la campagne et aboutissentparfois à des piscines aujourd’hui comblées. L’uned’elles, au sud du Kelt, connue sous le nom de birkelMûsa, «l'étang de Moïse», a plus de 200 mètres delongueur et plus de 100 de largeur. À l’ouest de cesdébris, sur le chemin montant à Jérusalem et prèsd’un canal aboutissant à Vouâdi Fârâ, se dresse uneruine ressemblant à un fort avancé; dans son nom debeit Djaber et-lahlâni, plusieurs palestinologuescroient reconnaître le nom de KSiitpoî donné par Hérode l’ancien à une des forteresses bâties par lui à Jéricho. Les descriptions des historiens ne permettent pasde douter que ces ruines dispersées ne soient celles dela Jéricho d’Hérode, visitée plusieurs fois par le Seigneur. — Voir les rapports de M. Ernest Sellin et de

ses collaborateurs dans les Mittheilungen und Nachrichten de la Société allemande de Palestine, Leipzig,1907, t. xxx, p. 65-71; Mittheilungen der deutschenOrient Gesellschraft, n. 40, décembre 1908; n. 41,décembre 1909.

2o Beauté et productions.

La beauté de cette ville,

la qualification de «ville des palmiers <» qui lui étaitattribuée le dit assez, provenait des plantations de cetarbre royal dont elle était environnée. Il continua à fairela gloire et la richesse des diverses villes qui se succédèrent. Cf. Jud.,i, 16; iii, 13.Les espèces decet arbre, autemps de la Jéricho hérodienne, étaient nombreuses et leursfruits les plusestimés pourleur saveur. Josèphe, -BeZÎ./Mci,IV, viii, 3. Larenommée desdattes de Jéricho se répanditavec les Romains aux extrémités du monde. Cf. Pline,Hist. nat., v,14; xiii, 4; Tacite, Hist., v, 6;Oribase, Médicinal collect., i,43; Mischna,Pesahim, iv, 9.Au palmier sejoignent toutesles autres espèces d’arbresfruitiers, d’arbres d’agrémentet de plantes aptes à la culture.Strabon, XVI,H, 41. Josuénomme le blé et le liii, v, 10, 11; II, 6. L’Ecclésiastique,xxiv, 18, exalte le rosier de Jéricho, en le prenant pourl’image de la Sagesse éternelle. L'Évangile nous montrele Sauveur passant sous les sycomores qui bordaient leschemins de cette ville. Luc, xix, 4. Cependant l’arbrele plus précieux qui croissait à Jéricho c'était l’arbre àbaume. Josèphe en cite trois espèces: l’opobalsamum,le cyprus et le myrobolanum, dont les produits uniquesétaient recherchés de l’univers entier. Bell. jud., IV,vin, 3; et. Strabon, XVI, ii, 41; Pline, H. N., xii, 54;Trogue Pompée, dans Justin, xxxvi, 3. Le baumieravait été importé par la reine de Saba et planté à Jéricho au temps de Salomon. Josèphe, Anl. jud., VIII,VI, 6. L'étendue de ces jardins était de 70 stades (13 090mètres) en longueur et de 20 stades (3740 mètres) en largeur. Bell. jud., IV, viii, 3. Leur végétation luxuriante,favorisée par un climat toujours tiède que ne peuventatteindre, à cause de la dépression extraordinaire de lavallée du Jourdain, les frimas, alors même qu’ils sévissent sur les hauteurs voisines, était entretenu par l’abondance des eaux amenées souvent de très loin. Le palmier exigeant un arrosage copieux et les eaux de lafontaine de Jéricho, avant le, miracle d’Elisée, engendrant la stérilité, les eaux des sources appelées aujourd’hui Ain ed-Dûq et 'Ain en-Nû'eiméh avaient dûêtre canalisées et amenées à Jéricho dès les temps les

225. — Fruit desséché du Calotropis.Grandeur naturelle.

plus reculés. Auxanciens aqueducs, Hérode en avait ajoutéde nouveaux. Son fils Archélaùs monta jusqu'à Néara, laNaaratha d'Éphraim (voir Naæatha) pour conduire de làla moitié de ses eaux à ses nouvelles plantations de palmiers. Josèphe, Ant. jud., XVII, xiii, 1. On peut suivreencore aujourd’hui les traces d’un ancien canal qui allait,à 8 kilomètres au nord des fontaines que nous venons denommer et à près de douze de Tell es-Sultân prendreles eaux de 'Ain el-'Aûdjéh pour les apporter auxaqueducs commençant à ces mêmes fontaines qui vontmaintenant encore arroser la campagne, jusqu’au delà dumont de la Quarantaine et du Tell es-Sultân. Plusieursautres canaux partent de 'Ain es-Sul[dn, de la vallée etde la source du Kelt et même de la vallée plus éloignéede Fârâ; les uns toujours en usage, les autres plus oumoins ruinés» sillonnent la plaine et vont se perdre versl’est et le sud.

3o La Jéricho d’Hérode.

C’est au milieu de ces jardins qu’Hérode sema les maisons de plaisance et les palais qui formèrent la Jéricho du ie siècle visitée par le

Seigneur. De grandes et nombreuses piscines furentcreusées aux alentours pour tempérer, par une doucefraîcheur, les brûlantes ardeurs de l'été. Un hippodromeet un théâtre donnèrent à Jéricho l’aspect d’une villegrecque ou romaine. Josèphe, Bell. jud., i, xxi, 4; xxxiii,6, 8; Ant. jud., XV, iii, 3; XVII, vi, 3, 5; viii, 2; cf. Strabon, XVI, ii, 41. D’anciennes forteresses se dressaientdepuis des siècles, près de la ville, pour la protéger;Hérode en fit élever une nouvelle, en un endroit dominant Jéricho; il ne négligea rien de ce qui pouvait enrendre le séjour agréable et sûr et l’appela Cypros, dunom de sa mère. Josèphe, 1 Ant. jud., XVI, v, 2; cf. Bell,jud., i, xxi, 4; Strabon, XVI, ii, 40; I Mach., IX, 50;xvi, 14, 15. — Les matériaux de la ville hérodienne durent servir à la construction de la ville romano-byzantme. La carte en mosaïque de Madaba représente celle-cisous la forme d’une ville importante, flanquée de tours carrées et environnée de palmiers. À une certaine distancede la ville, au nord, se voit une grande construction aveccette inscription TO TOT AriOT EAISAIOÏ", - «le[monument] de saint Elisée.» «Le monument de saintElisée, dit le pèlerin Théodosius, était là où il bénit lafontaine, et sur le monument même est construite uneéglise.» De Terra Sancta, Orient latin, p. 68. Jérichoavait, au ve siècle, des églises et un hospice pour les pèlerins. En ce temps-là encore «elle apparaissait aux yeuxde tous comme un paradis». Antonin de Plaisance, ltineranum, xiii, xiv et xv, t. lxxii, col. 905; Procope, Desedificiis Justinian., v, 9, édit. de Bonn, 1838, t. iii, p.328. Le circuit de la ville était, au témoignage de saintEpiphane, de plus de vingt stades (plus de 3740 mètres).User., lxvi, t. xlii, col. 158.4o Ariha.

À la place de la Jéricho hérodienne et de

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226. — Solanum Sodomeum.

la Jéricho romane-byzantine, l'évêque Arculf, à la fin duvu» siècle, trouve seulement une masse de ruines infor

mes, an milieu desquelles se dressait une constructionsans toit qui passait pour la maison de Rahab. D’autreshabitations s'étaient élevées dans la campagne même:c'était l’Arî{ia des Arabes (Dg. 222). Les descriptions dumoyen âge et des siècles suivants la dépeignent à peu prèstelle que nous verrons la Rihâ de ces derniers temps. Lesjardins n’avaient cependant pas disparu et leur richevégétation continuera longtemps encore à embellir le sitede l’antique Jéricho. Les pèlerins comme les auteurs arabes vantent les plantations de palmiers. Le baumier n’estplus nommé, mais il est remplacé par la vigne aux fruitsprécoces, par le bananier,l’indigo, les plantes odoriférantes, et surtout la canneà sucre. Adamnan, RelatioS. Arculf., t. II, c. xiii,t. xxxviii, col. 799; EI-Moqaddasi (985), dans Goije, Bibhothcca, Fy ma’arifat elvtidlîm, Le de, 1877, p. 17,115; Sœvulf (1102), Relalio,dans Recueil de voyages, dela Société de géographie,t. iv, Paris, 1839, p. 848;Théodorie (vers 1172), Lïbeilus de Locis sanctis, Paris etSaint Gall, 1865, p. 74; Villebrand d’Oldenburg (1211),dans Peregrinaliones mediixvi quatuor, Leipzig, 1873,p. 189, Burchard (1283), ibid.,p.58; Ricoldo(versl290), ibid.,p. 108-109; Vaqoût, Géographie, édit. Wustenfeld, Leipzig, 1866, t. i, p. 227; t. ii,

p. 884; Abou’l-'Féda (1321), Géogmphii, Paris, 1840,p. 236; Félix Fabn (1483), Evagatorium in T* S» peregrinationen, Stuttgart, 1843, t. ii, p. 57-88; Fr.Noé, 0. M. (1508j, Viaggio da Venetia al santo Sepolcro, Venise, 1676, ii, 4.

Jéricho sous la domination ottomane.

Avec

la domination des Ottomans (1517), Jéricho prendson plus triste aspect. Douze mauvaises cabanes, decinq ou six pieds de haut, faites de roseaux, debranchages, de pierres grossières et de terre, formentle village de Rîha Une haie de broussailles épineuses desséchées lui sert de rempart. À côté du village,une construction carrée de douze mètres environ delargeur et de longueur, et de huit de hauteur, ombragée nar un vieux séder, est désignée sous le nom deBordj Rîlfâ, «la tour ou la citadelle de Jéricho.» Dés avant la fin du xvie siècle, les palmiers et lesautres arbres, jusque-là l’ornement et la richessede Jéricho, avaient à peu près complètement disparu;toute la région était devenue un désert envahi parle séder, aux rameaux couverts d'épines. Au heu desfruits variés et succulents, les pèlerins mentionnentla pomme de Sodome, désignant d’abord ainsi le fruitcotonneux de l’asclépiade (fig. 223-225), puis, quand celui-ci a disparu, le fruit trompeur, à la graine noirâtresemblable à du sable: du solanum sodomeun de Linné,le «limon de Lot» des Arabes (fig. 226). Une racine desséchée et flétrie, Vanastahca hierichunlina du mêmenaturaliste, est cueillie pour la rose de Jéricho. Cetteplante, d’une vitalité extraordinaire, s’ouvre et refleuritindéfiniment quand elle est plongée dans l’eau. Le spécimen reproduit ici (fig. 227 et 228) est en la possessionde M. Vigouroux depuis 1874. Parmi ces buissons et cesplantes sauvages, on remarque un arbuste au fruit ressemblant à une grosse olive; les indigènes lui donnentle nom de zaqqûm (fig. 229-231) et du noyau de ce fruitextraient une huile dont ils font surtout usage pour guérir leurs blessures; plusieurs le prennent pour le my227. — Rose de Jéricho desséchée. Grandeur naturelle,

robolanum de Josèphe: ce serait le seul survivant desarbres nombreux cultivi s autrefois dans les célèbres jardins de Jéricho.

État actuel.

La sécurité plus grande dont jouit

le Ghôr depuis 1870 environ a permis à cette localité deprendre un certain essor. Un élégant hospice bâti pourles pèlerins russes, une petite église grecque, plusieurshôtelleries pour les voyageurs, quelques maisons habitées par des colons et un sérdia' ou établissement pourles employés du gouvernement turc, ont commencé àformer près du pauvre village de Ril}â une Jéricho nouvelle. Dans les jardins de création récente arrosés par leseaux amenées de 'Ain es-Sullân, qui l’entourent, les figuiers,les bananiers, les grenadiers,les amandiers, les oliviers, lespêchers, les abricotiers, la vigne, les peupliers, les eucahptus et une multitude de plantespotagères se développent avecune rapidité et dans des proportions souvent extraordinaires. Le bassin de la fontainerestauré en relient les eauxpour mettre en mouvement unmoulin qu’environne un jardin potager ombragé par desbananiers. Une grande partiede l’espace occupé par les ruines a été défriché et déblayéet produit d’abondantes moissons de blé et de doura. Cetteamélioration n’est pas l’ancienne prospérité de Jéricho,elle garantit du moins l’exactitude des descriptions de l’histoire et indique ce que pourrait redevenir Jéricho entre les mains d’un peupleintelligent et laborieux protégé par un gouvernement civilisé. — Voir Boniface Stefani de Raguse (1555), Liber de perenni cultu Terras Sanclse,édit. de Venise, 1575, p. 234-238; de Radzivil(1583), Peregrinatio hierosolynutana, Anvers,1614, p. 97-99; Aquilante Rochetta, Peregrinatione di Terra Santa, Palerme, 1630, p. 183188; Fr. Quaresmius, Elucidatio Terrse Sanclse,t. VI, Peregr. vi, c. x, Anvers, 1639, p. 753-754;Richard Pococke (1737), Voyages, c. viii, trad.de l’anglais, t. iv, Paris, 1772, p. 86-92.

IV. Histoire.

Avant Jésus-Christ.


Jéricho était l’une des villes les plus importantesdu pays de Chanaan à l’arrivée des Hébreux dansla Terre Promise. Elle était gouvernée par unroi, c’est-à-dire par un chef indépendant. Setrouvant la première sur le chemin du peuplede Dieu, elle pouvait s’opposer à son entrée en l’attaquant au passage du Jourdain. Pour sonder les dispositions de ses habitants, Josué y envoya deux explorateurs.Leur présence ayant été dénoncée au roi, ils furent sauvés par Rahab qui les cacha d’abord sous du lin qui séchait sur sa terrasse et les descendit la nuit par une cordele long du mur de la ville, contigu à sa maison. Ils rapportèrent les paroles de cette femme et firent connaîtreau camp l'état de découragement dans lequel se trouvaient la population de Jéricho et les peuples de Chanaan. Jos., h; cf. Yi, 2, xil, 29. Encouragés par ce rapport, les Israélites passent le Jourdain et s’avancentdans la campagne de Jéricho jusqu'à l’endroit qui futensuite appelé Galgala. Là, ils pratiquèrent la circoncision générale du peuple et célébrèrent tranquillement la Pâque. Jos., m-v. Les habitants de Jéricho,effrayés, avaient fermé la porte de la ville et personnen’osait ni y entrer ni en sortir. Jos., vi, 1. Le Seigneur

donna à Josué l’ordre de faire, pendant six jours, letour de la ville, une fois par jour. Les guerriers marchaienten avant, l’arche portée par les prêtres accompagnéspar sept autres prêtres sonnant de la trompettesuivait, et la foule marchait derrière, tous observant leplus prolond silence. Le septième jour on fit sept foisde même le tour de Jéricho. Au septième tour, sur l’ordrede Josué, toute la foule jeta un cri en même tempsque sonnait la trompette, et subitement les murs de laville s’écroulèrent. Saint Paul, Hebr., xi, 30, attribue àla foi des Hébreux le miracle de la chute des murailles

stérile.» Elisée prit un vase neuf, y mit du sel, alla à lafontaine, versa le sel dans l’eau et l’eau devint bonne àboire et ne produisit plus la stérilité, ꝟ. 19-22. — À l’approchedes armées assyriennes commandées par Holopherne,les Juifs de Jérusalem envoyèrent des hommesà Jéricho pour garder l’entrée des montagnes. Judith,iv, 3. — Le roi Sédécias, s’étant enfui de Jérusalem assiégéepar les troupes de Nabuchodonosor, fut arrêté dansla plaine de Jéricho. IV Reg., xxv, 5; Jer., xxxix, 5. —Parmi les Juifs qui revinrent, après la captivité, dans laterre d’Israël, sous la conduite de Zorobabel, se trou228. — Rose de Jéricho ouverte. Grandeur naturelle.

de Jéricho. La ville vouée à l’anathème fut pillée etbrûlée; ses habitants furent tous massacrés, à l’exceptionde Rahab et de ses proches parents recueillisdans sa maison, qui furent conduits au camppar les deux explorateurs. Les richesses de la ville,l’or, l’argent et les vases de métal, furent déposés autrésor sacré, sauf une règle d’or, deux cents sicleset un manteau d’écarlate, dérobés par Achan. Aprèsavoir accompli l’œuvre d’extermination, Josué prononçacontre Jéricho cette imprécation: «Mauditsoit devant Dieu tout homme qui tentera de rétablircette ville de Jéricho et la rebâtira. Il en poserales fondements avec (la mort de] son premierné et il en fermera la porte avec [la mort de] sonplus jeune (ils.» Jos., vi, 2-27. — Dans le partage dupavs, Jéricho, c’est-à-dire son site et son territoire,fut attribuée à la tribu de Benjamin. Jos., xvi, 1,7; xviii, 42, 21. Églon, roi de Moab, assisté desAmmonites et des Amalécites, s’empara de la villedes Palmiers et de toute la campagne de Jéricho.

II les garda dix-huit ans. Il y avait une maison oùil venait chaque année pour recevoir le tribut etles hommages des Israélites. C’est là qu’Aod le poignardaet délivra Israël de sa domination. Jud., iii, 12-30. Lesenvoyés de David à qui Hanon, roi des Ammonites, avaitfait raser la moitié de la barbe, reçurent l’ordre d’attendreà Jéricho qu’elle fût repoussée. II Reg., x, 5; I Par.,xix, 5. — Sous le règne d’Achab, roi d’Israël, et d’Asa,roi de Juda, Hiel de Béthel, de la tribu d’Fphraim, sansse préoccuper de la malédiction prononcée par Josué,rebâtit Jéricho. Abiram, son fils atné, mourut le jourmême où il en posa les nouvelles fondations, et Ségub,son plus jeune fils, le jour qu’il en plaça les portes.

III Reg., xvi, 34. Jéricho appartenait alors, on doit le déduirede ce fait, à la tribu d’Éphraim et au royaume d’Israël.— Un groupe de prophètes avaient à cette époqueleur résidence en cette ville. IV Reg., ii, 5, 15. Élie ydescendit et s’y arrêta avant de se rendre sur les bordsdu Jourdain, d’où il devait être enlevé, j^. 4-6. Après l’enlèvementd’Élie, Elisée y résida, ji. 18. C’est alors queles habitants vinrent trouver le prophète et lui dirent: «Le séjour de cette ville est excellent, comme mon seigneurle voit, mais les eaux en sont mauvaises et la terre

vaient trois cent quarante-cinq «fils de Jéricho». I Esd., ii, 34; II Esd., vii, 36. Ils prirentpart à la reconstruction des murs de Jérusalemet bâtirent la partie voisine, à l’ouest dela tour d’Hananæl. II Esd., iii, 1, 2. — Durantla lutte des Machabées contre les rois séleucides,Bacchide augmenta les fortifications deJéricho et en fit une des places destinées àmaintenir le pays sous le joug des païens.I Mach., IX, 50. — Après la libération duterritoire, Ptolémée, fils d’Abob et gendre dugrand-prêtre Simon, tut préposé à la régionde Jéricho. Simon parcourant la Judée, pourpourvoir à ses besoins, descendit à Jéricho.Ptolémée avait fait construire une petite forteressenommée Doch; il y inv ita son beau-pèreet le fit assassiner, au milieu d’un festin, avecses deux fils, Mathathias et Judas et leurscompagnons (135 av. J.-C). I Mach., xvi, 1116. Le château de Doch, d’après une opinionassez probable, aurait occupé le sommet de lamontagne appelée la Quarantaine qui domineà l’ouest toute la plaine de Jéricho. Voir Doch, t. ii, col.1454-1456. — L’Écriture ne mentionne plus Jéricho quepour raconter le passage du Sauveur en cette ville; nousdevons demander à Josèphe les autres détails concernantson histoire jusqu’à la ruine de Jérusalem. Ptolémée,d’après l’historien juif, assiégé par Jean Hyrcan, fils deSimon, se maintint quelque temps dans la forteresse deDoch, puis s’enfuit en Ammonitide après avoir mis àmort la mère de Hyrcan qu’il retenait dans les fers.Ant. jud., XIII, viii, 1. — Dans la guerre de compétitionentre les fils d’Alexandre Jannée, Hyrcan II, abandonnépar ses soldats sous les murs de Jéricho, dut céder à sonfrère Aristobule II, et s’enfuit à Jérusalem. Ant. jud.,XIV, l, 2; Bell. jud., i, vi, 1. Pompée, poursuivant Aristobule,passa par Jéricho et il détruisit, au dire de Strabon,deux forts qui en protégeaient l’entrée. Ant. jud.,XIV, iv, 1; cf. Strabon, XVI, ii, 40. Elle devient le quatrièmesiège d’une des cinq cours de justice (o-jve6pt’a)établies par Gabinius, lieutenant de Pompée, dans laJudée devenue tributaire des Romains (63 avant J.-C).Ant. jud., XIV, v, 4; Bell. jud., I. viii, 5. ~—

Pendant la lutte soutenue pour l’indépendance de sonpeuple par Antigone, fils d’Aristobule, contre Hérode

Le zaqqûm. D’après une photographie de M. L. Heidet.

et les Romains ses protecteurs (38-37), Jéricho, occupéed’abord par les partisans d’Antigone, est abandonnée àl’approche d’Hérode, pillée et saccagée par les soldatsromains, amenés par ce dernier; peu après, elle est témoinde la défaite et de l’extermination totale de cinqjeunes cohortes romaines et de la mort de Joseph, frèred’Hérode, leur chef. Accouru avec deux légions, pourvenger la mort de son frère, Hérode est attaqué le lendemainpar des partisans d’Antigone, au nombre desix mille hommes, qui lancent des pierres et des flèchesde la montagne, et répandent la crainte parmi les Romains.Hérode est blessé au flanc par une flèche, s’éloignede Jéricho, massacrant les habitants des villagesqu’il rencontre sur son passage, et gagne la Galilée, où! il est rejoint par ses partisans, dont un certain nombreétaient de Jéricho et des alentours. Ant. jud., XIV, xv,3, 10-12; Bell. jud., i, xv, 6; xvii, 1, 4-6. Hérode, devenumaître de la Judée, affectionnait le séjour de cetteville. Il y conviait ses amis dans des villas élevées poureux et désignés par leurs noms et leur offrait des festinset des fêtes. Bell. jud., i, xxi, 4; cf. Ant. jud., XV, iii,3. La reine d’Egypte Cléopàtre, non moins avare qu’impudique,pour prix de ses faveurs, obtint d’Antoine queles revenus du jardin de Baume de Jéricho, alors uniqueau monde et dont les produits recherchés se payaientaux prix les plus élevés, lui fussent affectés. Ant. jud.,XVI, iv, 1; Bell. jud., i, xviii, 5. Cette ville fut témoin d’undes crimes les plus odieux du tyran de la Judée. Jaloux del’estime manifestée par le peuple pour le jeune Aristobule,frère de Mariamne son épouse, et le dernier desMachabées qu’il avait promu souverain sacrificateur, ill’attira à Jéricho et le fit noyer par des soldats gaulois àsa solde, dans un des grands bassins de la ville; il luifit faire ensuite les funérailles les plus pompeuses,auxquelles il assista en versant des larmes hypocritesi(35av. J.-G.).4 «i.yi «i., XV, ii, 3-4; Bell. jud., i, xxii, 2.2o Depuis Jésus-Christ jusqu’à la ruine de Jérusalem.— C’est à Jéricho qu’après avoir fait mourir plusieurs personnes Hérode mourut lui-même d’une mortdigne de sa vie. Voir Hérode 2, col. 647. Après son décès,on remit en liberté les notables de toute la Palestinequ’il avait enfermés dans l’hippodrome pour qu’on lesmassacrât lorsqu’il aurait rendu le dernier soupir, et quesa mort devint ainsi un deuil public. Ptolémée, l’hommede confiance d’Hérode, réunit au théâtre le peuple et lessoldats, leur annonça la mort de leur maître et lut la teneurde son testament qui désignait Archélaus, son aîné,pour roi de Judée. Voir Archélaus, t. i, col. 927. Le cortègefunèbre sortit ensuite de Jéricho. Le corps devaitêtre porté au château d’Hérodium, à deux cents stades(37 kilomètres) de Jéricho (4 av. J.-C). Ant. jud., XVU,vi-vih; Bell. jud., i, xxxiii, 6-9; cf. Bell. jud., II, i, 1.Dans les troubles qui suivirent la mort d’Hérode, Jérichofournissait du renfort aux factieux de Jérusalem,et Simon, un ancien serviteur du roi qui n’avait pascraint de ceindre le diadème, vint piller le palais du roiet l’incendia, ainsi que plusieurs autres constructionsélevées par Hérode dans la région. Archélaus, déclaréethnarque et revenu de Rome, releva le palais de Jérichoavec plus de somptuosité qu’auparavant et apporta plusieursembellissements aux jardins et à la ville. Ant.jud., XVII, x, 2, 6; xiii, 1; Bell. jud., II, iii, 1; iv, 2.La Judée ayant été réduite en province de l’empire, Jérichodevint une des onze toparchies de la nouvelle province,(6 après J.-C). Bell. jud., III, iii, 5; Pline, Hist.nat., v,14. C’est pendant cette période que Jésus-Christ visitaJéricho. Il avait dû y passer plusieurs fois, comme letaisaient ordinairement, pour éviter les Samaritains etleurs vexations, les Juifs de la Galilée montant à Jérusalem;les évangiles mentionnent seulement son dernierpassage, alors qu’il allait célébrer sa dernièrePâque. Zachée, chef des publicains, était monté, à causede la foule et de sa petite taille, sur un sycomore. Jésuslevant les yeux l’invita à descendre et alla loger dans samaison. C’est en cette circonstance que le Sauveur proposala parabole du roi qui va au loin se faire donner unroyaume, faisant, croit-on, allusion à Archélaus dontJéricho devait spécialement garder le souvenir. Luc,

230. — Jeune fille de Jéricho portant une branche de zaqqûm tavec fruits. D’après une photographie de M. L. Heidet.

xix, 1-28. Voir Archélaus, t. i, col. 927. Jésus guéritdeux aveugles à Jéricho. Luc, xviii, 35; xix, 1; Mat th.,xx, 29-30. Voir Aveugle, t. i, col. 1290, 1291. — D’après

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231. — Fnrit du zaqqûm. Grandeur naturelle.

une tradition commune aux chrétiens de tous les ritesdepuis le xiie siècle, le Sauveur aurait accompli sonjeûne de quarante jours, près de Jéricho, dans une desgrottes de la montagne, appelée pour, ce motif mont de laQuarantaine; c’est aussi sur le sommet de cette montagne que le démon l’aurait transporté. Matth., IV, 8;Luc, IV, 5. — Au début du soulèvement contre les Romains, sous le gouverneur Florus, les Juifs s’emparèrent du château de Cypros, et après en avoir massacré lagarnison ils le rasèrent jusqu’au sol (en 64). Josèphe,Bell. jud., II, xviii, 16. — Lorsque fut constituée, aprèsla défaite de Cestius, une nouvelle administration,Joseph, iils de Simon, fut nommé chef de la toparchie de Jéricho (en 65). Bell. jud., II, xx,4. — Fuyant de Gadara prispar Vespasien, les Juifs quiavaient pu échapper à la poursuite de son lieutenant Placidecherchèrent un refuge à Jéricho, «la seule ville en laquelle ilsmettaient quelque espoir de salut, parce qu’elle était bien fortifiée, et avait de nombreux habitants.» Bell. jud., IV, vii, 5.— Vespasien, revenu à Césarée,se dirigea ensuite, par la Judée et la Samarie, sur Jéricho.A son approche, toute la population s'était enfuie dans lesmontagnes, à l’exception d’un petit nombre qui furentmassacrés sans pitié. Le lendemain, Trajan vint de laPérée avec des renforts rejoindre Vespasien. Le généralromain, dont l’intention était d’isoler Jérusalem, établità Jéricho un camp retranché, et construisit plusieursforts dont il confia la garde à des soldats romains de sacompagnie et rentra à Césarée (en 67). Ibid., IV, viii,1, 2. C’est en cette occasion, si l’on doit ajouter foi à l’assertion d’Eusèbe, que la Jéricho hérodienne aurait étédétruite par les Romains. Après le départ de Vespasien,Titus, demeuré seul pour aller mettre le siège devantJérusalem, appela de Jéricho la Xe légion qu’y avait laissée son père; elle reçut l’ordre de s'établir, au mont desOliviers, à six stades à l’orient de Jérusalem. V, i, 6; ii, 3.3o Après la ruine de Jérusalem.

Pendant le sac de

Jérusalem, les Juifs avaient cherché à détruire jusqu’audernier tous les arbres à baume qui se trouvaient seulement à Engaddi et à Jéricho; pour les sauver, lesRomains avaient lutté avec acharnement. En signe deleur triomphe, Vespasien et Titus en présentèrent unau peuple romain. Ces jardins furent réunis au domainede l’Empire et leur culture prit une plus grande extension.Pline, H. N., xii, 25. La dernière année du règne deCaracalla et Géta (217), on trouva à Jéricho, cachés dansdes tonneaux, divers manuscrits hébraïques et grecs del’Ancien Testament; Origène s’en servit pour la cinquièmeédition de ses Hexaples. VoirHEXAPLES, col. 699. Ils provenaient peut-être de l'école des Juifs, Beth Gadîa' ouBelk Gôrîa', souvent vantée dans le Talmud. S. Épiphane,Deponder. et mensur., t. xliii, col. 266, 267; Mischna,Pesahim, iv, 9; Talmud de Jérusal., Sotah ix, 13; cf.Ad. Neubauer, Géographie du Talmud, Paris, 1868, p. 162.— Le christianisme n’avait pas tardé à se développer àJéricho qui était devenu le siège d’un évêché. Le nomde son évoque Janvier se lit dans les souscriptions duconcile de Nicée (325). Plusieurs autres évêques ont prispart aux plus anciens conciles. Voir Lequien, Orienschristianus, Paris, 1740, t. iii, p. 654, 655. — Les souvenirs bibliques de Jéricho y attirèrent de bonne heuredes pèlerins en grand nombre. Les ruines elles-mêmesleur indiquaient le site de l’ancienne ville, et la fontaineétant unique ne pouvait être confondue avec une autre.Plus contestable était la localisation de la maison deRahab que l’on croyait reconnaître, près de la fontaine.Ilinerar. a Burdigala, t. viii, col. 292. Le sycomore de

Zachëe se montrait â droite du chemin en descendant dela montagne; il était renfermé dans une enceinte sanstoit. S. Jérôme, Epist. irm, t. xxii, col. 888; Ilinerar. aBurdigala, ibid.; Antonin. Placent., t. lxxii, col. 905. Au.VIe siècle, l’hospice construit pour les pèlerins par Justinien passait pour la maison de Rahab et l’oratoireSainte-Marie qui lui était annexé, pour la chambre oùcette femme avait caché les explorateurs de Josué. Procope, De ssdificiis Justiniani, t. V, c. ix; Théodosius, Delocis sanctis, 1865, p. 68. Une multitude de chrétiens,dont un grand nombre venus des pays les plus lointains, se fixèrent, à cette époque, à Jéricho et aux alentours pour y mener la vie cénobitique ou solitaire. VoirDoch, t. ii, col. 1455, 1456. — La Jéricho byzantine disparue quand l'évêque gaulois Arculf visita, en 670, lavallée du Jourdain, avait dû être ruinée par les arméesde Chosroès, qui n’avaient rien laissé debout sur leurpassage (614). Le pays de Jéricho, occupé bientôt par lesArabes conquérants (637), s'était rapidement remplid’une multitude d’habitations nouvelles. Adamnan, Delocis sanctis, II, xiii, t. lxxxviii, col. 799. Cette Jérichodes Arabes resta une des principales localités du districtdu Jourdain, qui était un des six de la province de Syrie,et devint la capitale du Ghôr. La culture de la canne àsucre, dont le suc était extrait dans des moulins spéciaux,était la principale industrie A’Arihà (637-1099), El-Khordâbèh, Kitàb el-Masâlîk ou el-Mamalik, Leyde, 1889,p. 57 et 78; el-Moqaddasi, loc. cit., Leyde, 1877, p. 154;174, 175; £l-Yaqoubi, Géographie, Leyde, 1861, p. 113;Yaqoût, loc. cit. La vie chrétienne n’avait pas complètement disparu de Jéricho. Au vine siècle et au ixe, l’on ytrouve encore des habitants chrétiens et des moines, et ilest fait mention de ses évêques. Acta sanctorum, VitaS. Stephani Sabaitm, n. 25, 58, julii t. iii, Paris, 1868,p. 513, 527; Itinera hierosolym. lat., Commemoratorium de Casis Dei, Genève, 1880, p. 303. Les Croisadesramènent à Jéricho les pèlerins de l’Occident qui enavaient à peu près oublié le chemin. Les Francs ne paraissent pas avoir songé à coloniser Jéricho et à luirendre son antique splendeur. Voir Théodoricus, Libellus de locis sanctis, Paris et Saint-Gall, 1865, p. 72-74;Guillaume de Tyr, Hisloria terne transmarinse, t. IX,c. xv, t. CCI, col. 503; Cartulaire du Saint-Sépulcre, n. 28,119, 180, 155, col. 1120, 1213-1224, 1256. - Lorsque lescroisés se furent retirés (1187), la région de Jéricho futinfestée par les voleurs, et les pèlerinages devinrentrares. Willbrand d’Oldenbourg, p. 189. À partir duXIVe siècle, Jéricho n'était guère visitée que deux outrois fois l’an par des caravanes escortées par les soldatsdu gouverneur de Jérusalem. Le village de Rifiâ futdétruit une dernière fois en 1840, par les soldats d’Ibrahim pacha, qui voulait châtier les Rédouins de l’avoirattaqué dans le voisinage, lors de sa retraite de Damas.Avec la sécurité presque complète dont jouit actuellement la région, le mouvement et la vie ont commencéà se manifester de nouveau dans une certaine mesureà Jéricho et autour de la fontaine d’Elisée. La prospériténe pourrait manquer de grandir, si tout le territoire deRîl.iâ avec la plus grande partie de Ghôr n'étaient devenus parties intégrantes du domaine du sultan de Constantinople. — On peut consulter, outre les auteurs déjàcités: Mislin, Les Saints Lieux, c. xxxv, Paris, 1858,t. iii, p. 128-163; F. de Saulcy. Voyage de la TerreSaintè, Paris, 1865, t. i, p. 326-342; V. Guérin, Description de la Palestine, Samarie, Paris, 1874, 1. 1, p. 28-53.Cf. R. Conder, Tent-Work in Palestine, 1879, t. ii,p. 1-34; Liévin de Hamm, Guide-indicateur de la TerreSainte, Jérusalem, 1887, t. ii, p. 297-313; Survey of Western Palestine, Memoirs, Londres, 1882, t. iii, p. 123-223.

L. Heidet.JÉRIEL (hébreu: YérVêl; Septante: 'Iepiri'/), troisièmefils de Thola, un des principaux chefs de la tribu d’Issachar sous le règne de David. I Par., vii, 2.

    1. JÉRIMOTH##


JÉRIMOTH, nom, dans la Vulgate, de neuf Israéliteset d’une ville de la tribu de Juda. Les noms de personnessont écrits de deux manières légèrement différentesen hébreu, de même que le nom de la-ville. LaVulgate a transcrit les trois formes hébraïques tantôtJérimoth, tantôt Jérimuth.

1. JÉRIMOTH (hébreu: Yerîmôf; Septante: ’Iepiu.o-JÔ),quatrième fils de Bêla, l’alné des fils de Benjamin. Sesdescendants habitaient Jérusalem du temps de David.I Par., vii, 7; cf. j>. 2.

2. JÉRIMOTH (hébreu: Yerîmôf; Septante: ’Isptu.oj8),sixième fils de Béchor, le second des fils de Benjamin.Ses descendants habitaient Jérusalem du temps de David.I Par., vii, 8; cf. ꝟ. 2.

3. JÉRIMOTH (hébreu: Yerêmôf; Septante: ’Api|*cJ6),troisième fils de Baria, de la tribu de Benjamin. Safamille demeurait à Jérusalem sous le règne d’Ézéchias.

I Par., viii, 14, 28.

4. JÉRIMOTH (hébreu: Yerîmôf; Septante: ’Iapt|ito6),fils de Musi, chef d’une famille de lévites, de la branchede Mérari, sous le règne de David. I Par., xxiii, 23;sxiv, 30.

5. JÉRIMOTH (hébreu: Yerimôt; Septante: ’l£pi[iâ>6),lévite, cinquième fils d’Héman, chef du quinzième desvingt-quatre chœurs de musiciens qui jouaient dans lescérémonies sacrées du temps’de David. Le chœur qu’ildirigeait, formé de ses fils et de ses frères, se composaitde douze musiciens. I Par., xxv, 4-22.

6. JÉRIMOTH (hébreu: Yerîmôf; Septante: ’IepejjiwO),fils d’Ozriel, chef (nâgîd et èar) de la tribu deNephthali,pendant le règne de David. I Par., xxvii, 19.

7. JÉRIMOTH (hébreu: Yerîmôf; Septante: ’Iepiu-oûO),fils de David et père de Mahalath qui devint l’épouse duroi Roboam, ainsi qu’Abihail, également sa cousine.

II Par., xi, 18. Dans la Bible hébraïque, le chetibporte «Mahalath, fils de Jérimoth», mais c’est une erreurévidente et le keri qui lit «fille» s’impose. Jérimothn’est point nommé dans les listes des fils de Davidcontenues dans I Par., iii, 1-9, et xiv, 4-7.

8. JÉRIMOTH (hébreu: Yerîmôf; Septante: ’Iepipiûe),lévite, un des préposés inférieurs qui avaient la gardedes magasins du Temple où l’on conservait les offrandeset les dîmes sous le règne d’Ézéchias. II Par., xxxi, 13.

9. JÉRIMOTH (hébreu: Yerêmôf; Septante: ’Iapt! i<18),un des fils d’Élam, qui avait épousé une femme étrangèreet qui la renvoya par ordre d’Esdras. I Esd., x, 26.

10. JÉRIMOTH (hébreu: Yarmût, «hauteur;» Septante: ’Iepiu.oû8 dans Jos., x, 35, 23; ’IepixoûO dansJos., x,55), ville de Juda, dans la Séphéla, aujourd’hui Khirbet

Yamxûk.

Description.

Elle est nommée dans le même

.groupe qu’Adullam, Socho et Azéca, c’est-à-dire dansle premier groupe de «la plaine». Jos., xv, 35. Elle «tait à trois heures de marche d’Éleuthéropolis (Beit-Djibrin) et située sur une montagne appelée aujourd’huiDjebel Yarmuk. «Les pentes inférieures sont cultivéesen céréales; plus haut, on s’avance à travers un fourréde broussailles et de plantes épineuses. La montagnes’élève comme par étages successifs qui soutiennentd’anciens murs d’appui. Des débris d’habitation renverséeset d’innombrables petits fragments de poteriesont de tous côtés épars sur le sol. Quant au plateausupérieur, qui formait comme l’acropole de la ville dontle Khirbet Yarmuk offre les vestiges, il était environné

d’un mur circulaire, dont les substructions sont encorevisibles. Les ruines y abondent parmi des touffes de lentisqueset de hautes herbes. De là on jouit d’une vue trèsétendue; car on domine d’au moins trois cents mètres lesvallées voisines.» V. Guérin, Judée, t. ii, p. 272. Quoiquesituée sur une montagne, elle «est comprise au nombredes villes de la [Séphéla], dit M. Guérin, p. 273, parceque plusieurs places mentionnées avec celle de laSéphéla dépendaient du district ainsi nommé, sans êtreelles-mêmes dans la plaine dont elles étaient seulementvoisines».

2 1 Histoire. — À l’époque de la conquête de la Palestinepar Josué, Jérimoth avait un roi, appelé Pharam, quientra dans la confédération formée par Adonisédec, roide Jérusalem, contre les Gabaonites. Jos., x, 3-5. Il futvaincu, avec les quatre rois ses alliés, à la bataille deGabaon et se réfugia avec eux, après sa défaite, dans lacaverne de Macéda. Le vainqueur les y prit et les fit touspérir. Jos., x, 16-28. Jérimoth ainsi conquise fut donnéeà la tribu de Juda, lors du partage de la Terre Promise.Jos., xv, 35. Son nom ne reparaît plus qu’une fois dansl’histoire biblique, après le retour de la captivité.Néhémie nous apprend qu’elle fut réhabitée de son tempspar les fils de Juda. II Esd., xi, 25, 29. Dans ce dernierpassage, la Vulgate écrit le nom de cette ville Jérimuth.

F. Vigouroux.

    1. JÉRIMUTH##


JÉRIMUTH, nom dans la Vulgate, de deux Israélites,dont le nom est en hébreu le même que celui de Jérimoth,ainsi que d’une ville de Juda, dont les consonnessont les mêmes que celles des noms des personnes, maisqui est ponctué différemment dans l’original. Voir Jérimoth.

1. JÉRIMUTH (hébreu: Yerimôt; Septante: ’Api|xo-J0),un des vaillants soldats qui allèrent rejoindre David àSiceleg. I Par., xii, 5.

2. JÉRIMUTH (hébreu: Yerêmôf; Septante: ’Ap[j.<18),un des fils de Zethna, qui avait épousé une femme étrangèreet qui la renvoya sur l’ordre d’Esdras. I Esd., x, 27.

    1. JÉRIMUTH##


3. JÉRIMUTH, nom, dans la vulgate, II Esd., xi, 29,de la ville appelée Jérimoth dans le livre de Josué. VoirJérimoth 10.

    1. JÉRIOTH##

JÉRIOTH (hébreu: Yeri’ôf; Septante: ’Iepu» 6), secondefemme de Caleb fils d’Hesron, d’après les Septante;sa fille, par Azuba, d’après la Vulgate et le syriaque.I Par., ii, 18. Le texte original est altéré dans ce passage.

    1. JERMAI##

JERMAI (hébreu: Yerêmaï; Septante: ’Iepa^.;), Israélitequi vivait du temps d’Esdras et qui répudia la femmeétrangère qu’il avait épousée. I Esd., x, 33.

    1. JÉROBAAL##

JÉROBAAL (hébreu: Yerubba’al, «celui qui luttecontre Baal;» Septante: ’IepoëâaX), surnom donné àGédéon,parce qu’il renversa l’autel de Baal. Jud., vi, 32.Voir Gédéon, col. 147. La Vulgate traduit l’hébreu, rapportantles paroles qui firent donner le surnom de Jérobaalà Gédéon: «Que Baal se venge de celui qui arenversé son autel!» Yarêb, traduit ici par «se venger»,signifie «qu’il plaide, discute, se défende, lutte». —A partir de ce moment, Gédéon est appelé plusieurs foisJérobaal dans la suite du récit, Jud., vii, 1; viii, 29 (35),et dans toute l’histoire de son fils Abimélech. Jud., ix,1-57. Ce nom lui est aussi donné dans I Reg., xii, 11, et IIBeg., xi, 21. Dans ce dernier passage, l’hébreu, II Sam.,xi, 21, porte Yerubéséf, aulieu de Yeruba’al, c’est-à-direque bésêf, «honte,» voir Idole, 8°, col. 818, fut substituépar mépris au nom de Baal.

    1. JÉROBOAM##

JÉROBOAM (hébreu: Yârob’dm; Septante: ’kpo60â|j.), nom porté par deux rois d’Israël.

1. JÉROBOAM I". Il était fils de l’éphraïmite Na-’bath,de Saréda, et avait pour mère Sarva. Saloraonremarqua son heureux naturel et son adressent le nommachef des corvées que les hommes des tribusd’Éphraïm et de Manassé avaient à exécuter pour lecompte du roi. Voir Corvée, t. ii, col. 1032. C’est encette qualité qu’il surveillait les travaux de la constructionde Mello à Jérusalem. Témoin du mécontentementgénéral qu’excitaient dans toute la nation les dépensesexagérées et les entreprises incessantes de Salomon, ilmanifesta ses sentiments et n’eut garde de réprimer lesmurmures de ceux qu’il commandait. Un jour qu’ilsortait de Jérusalem, il se rencontra avec le prophèteAhia. Celui-ci, ayant divisé son manteau neuf en douzeparts, dit à Jéroboam au nom du Seigneur: Il y a dixparts pour toi et une pour le fils de Salomon. Je ne luiôte pas tout, à cause des promesses que j’ai faites àDavid; mais Salomon m’a abandonné pour servir desdieux étrangers. Quant à toi, si tu m’es fidèle, j’affermiraita maison comme j’ai affermi celle de David. VoirAhia, t. i, col. 291. Par cette intervention de son prophète,Dieu autorisait l’opposition qui s’élevait contreSalomon; seulement s’il se plaignait du prince devenuidolâtre, c’était contre le prince trop exigeant que murmuraitle peuple. Ainsi assuré de toutes les approbations,Jéroboam n’eut pas la patience d’attendre que la mortde Salomon amenât une solution qu’Ahia n’avait promiseque pour ce moment. À la première occasion, «illeva la main contre le roi,» c’est-à-dire excita contrelui une révolte. Il ne réussit à rien, parce que son actionétait prématurée. Aussi dutil se dérober par une promptefuite au châtiment qui le menaçait. Il se rendit enEgypte auprès du pharaon Sésac et y demeura jusqu’àla mort de Salomon. Sésac ou Scheschonq accueillit favorablementle fugitif, et même, d’après le texte grec,III Reg., xii, 24, lui donna en mariage Ano, sœur ainéede Thékémina, sa propre épouse. Cette attitude de Sésacvis-à-vis de Salomon, qui avait lui-même épousé uneprincesse égyptienne, peut surprendre au premierabord. Mais il faut se rappeler que la princesse épouséepar Salomon était fille d’un roi de la xxi «dynastie,probablement Psioukhânnit ou Psousennès II. Sésaccommençait la xxii «dynastie. Il n’était pas de familleroyale, mais avait épousé une femme de sang royal etétait devenu, sous le précédent pharaon, le premierfonctionnaire de l’Egypte. Il avait même uni son filsaîné à une fille de Psioukhânnit. Cf. Maspero, Histoireancienne des peuples de l’Orient classique, t. ii, 1897,p. 738, 769, 772. Il n’est pas étonnant cependant queSésac ait eu d’autres idées politiques que son prédécesseur,auquel il ne tenait que par alliance.

A la mort de Salomon, en 975 (ou 938, d’après lachronologie assyrienne) Jéroboam se hâta de revenird’Egypte. Les Septante, qui insèrent un très long morceauentre les versets 24 et 25 de III Reg., xii, sur lesévénements qui se produisirent alors, et sur d’autresque le texte hébreu raconte ailleurs, disent que Jéroboamdemanda à Sésac de l’envoyer en Palestine, etqu’il se rendit à Sarira, dans la montagne d’Éphraim,avec sa femme Ano. On sut son retour, et les mécontentsl’envoyèrent chercher et le mirent à la tête de la dépulationqui alla demander à Roboam d’adoucir le jougque son père avait fait peser sur la nation. Quand lejeune roi eut au contraire imprudemment menacé del’aggraver, le peuple se révolta et la plus grande partiedes Israélites se séparèrent de la maison de David etprirent Jéroboam pour roi. Il ne resta à Roboam quela tribu de Juda et celle de Benjamin qui, aux portesmêmes de Jérusalem, ne pouvait guère se soustraire àla domination de la capitale. Roboam songea tout d’abordà prendre les armes pour soumettre les rebelles; maisle prophète Sémeia lui intima l’ordre de n’en rien faire, «t chacun demeura en paix de son côté. Ce schisme

était lamentable, car il affaiblissait et divisait les forcesde la nation, surtout à une époque où elle allait voir sedresser en face d’elle les deux grandes puissances conquérantesdu vieux monde, l’Assyrie et l’Ég5pte. Mais lesinfidélités de Salomon l’avaient appelé comme un châtimentnécessaire. Dans les vues de la Providence, c’étaitd’ailleurs un moyen de préserver plus sûrement les traditionsreligieuses de la nation, en diminuant le nombrede leurs dépositaires. De plus, le nord devait garantir, pendantla durée de son existence, le royaume du sud contreles invasions assyriennes. Voilà pourquoi le Seigneurs’opposa à la tentative armée de Roboam. Voir Roboam.

Jéroboam fit deSichem et de Phanuel, lII Reg., xii, 25,dans les montagnes d’Éphraim, les places de résistancede son nouveau royaume d’Israël. Malheureusement, auschisme politique il ajouta un schisme religieux. Dans sapensée, son peuple eût fini par retourner à l’obédience deRoboam, s’il eût continué à aller offrir ses sacrifices à Jérusalem,dans la maison du Seigneur. Il fabriqua donc deuxveaux d’or comme symboles de Jéhovah et les érigea auxdeux extrémités de son rojaume, l’un à Béthel, à la frontièreméridionale, l’autre au nord, à Dan. Voir Veaud’or. C’était l’installation officielle de l’idolâtrie, en contradictionformelle avec les conditions posées par Dieu àJéroboam, quand Ahia lui annonça son règne futur.III Reg., xi, 38. En d’autres endroits, des édicules idolâtriquess’élevèrent. Voir Hauts-lieux, col. 449-452. Leslévites disséminés à travers les dix tribus refusèrent dese prêter au service de ces nouveaux sanctuaires. Fidèlesau culte du Seigneur, ils se replièrent en masse dans latribu de Juda, afin de pouvoir continuer à se consacrerau service du Temple. Le roi d’Israël fut donc obligéd’en venir à l’institution d’un nouveau sacerdoce, qu’ilrecruta indistinctement dans toutes les tribus qui luiobéissaient. Il établit aussi des solennités nouvelles,le quinzième jour du troisième mois et le quinzième duhuitième mois, afin d’empêcher son peuple de se rendreaux solennités de Jérusalem. L’apostasie ne futpourtant pas universelle. Beaucoup d’Israélites de toutesles tribus gardèrent leur fidélité à Jéhovah et continuèrentà venir offrir leurs sacrifices à Jérusalem auDieu de leurs pères. II Par., xi, 16.

Dieu envoya des avertissements à Jéroboam. Un jourqu’il offrait l’encensa l’autel de Béthel, un prophète vintlui annoncer qu’un descendant de David tirerait vengeancede cette idolâtrie, et, en preuve de sa parole, ildéclara que l’autel allait se briser et les cendres tomberà terre. Jéroboam étendit la main pour faire saisirl’audacieux; mais son bras fut paralysé et il n’en putrecouvrer l’usage qu’à la prière du prophète. Puis l’autelse brisa et les cendres tombèrent sur le sol.

Abia, fils de Jéroboam, tomba ensuite malade. Le roienvoya sa femme consulter le prophète Ahia, au sujet decette maladie. Averti par Dieu, celui-ci, quoique aveugle,et malgré le déguisement de la reine, la reconnut et luiannonça la mort de son fils et les malheurs qui allaientfondre sur la maison de Jéroboam, à cause de son apostasieet des péchés qu’il faisait commettre par lepeuple. L’enfant mourut. Jéroboam n’en persista pasmoins dans la ligne de conduite qu’il avait adoptée.III Reg., xi, 26-xiv, 20.

Le pharaon d’Egypte ne resta pas indifférent à ce quise passait en Palestine. La cinquième année du règne desdeux princes, Sésac monta d’Egypte à Jérusalem, incapable8e se défendre contre lui, et pilla le trésor duTemple et le trésor royal. Il n’est dit nulle part queJéroboam ait excité le monarque égyptien à venir attaquerRoboam, mais cela est très probable. En tous cas,si l’instinct de domination qui animait Sésac, et l’occasionfavorable qui se présentait pour le satisfaire, suffirentà déterminer le pharaon, son intervention ne fut paspour déplaire au roi d’Israël. Le texte sacré, III Reg.,xiv, 30, dit qu’il y eut toujours guerre entre les deux

rois de Juda et d’Israël. Cette guerre ne paraît pas avoirdépassé les limites d’une sourde hostilité et d’une malveillanceréciproque; car il n’est fait aucune mention d’unelutte à mains armées entre les deux royaumes rivaux.Jéroboam fut habile, à son point de vue tout schismatique,en choisissant Béthel et Dan comme lieux deculte pour le royaume d’Israël, à cause des souvenirsreligieux que rappelaient ces deux localités. Voir Béthel,t. i, col. 1678-1679; Dan, t. ii, col. 1245. Il eut une résidenceà Thersa, III Reg., xiv, 17, voir Thersa, et, selonJosèphe, Ant. jud., VIII, vra, 4, un palais dans chacunedes deux villes de Sichem et de Phanuel qu’il avait fortifiées.Il mourut en 954 (ou en 917), après vingt-deux ansde règne, III Reg., xiv, 20, et put voir successivement lesdeux successeurs de Roboam, Abia et Asa, avec lesquelsil se maintint dans l’attitude hostile adoptée dès lespremiers jours du schisme. III Reg., xv, 6. L’influencede Jéroboam fut des plus pernicieuses au point de vuereligieux. Il fixa le royaume d’Israël, pour toute la suitede ses destinées, dans l’impiété et l’idolâtrie qui affaiblirentses forces et amenèrent prématurément sadestruction. Aussi est-ce toujours au péché de Jéroboamque la Sainte Écriture en appelle quand elle veut expliquerles infidélités et les malheurs de ce royaume.III Reg., xv, 30, 34; xvi, 2, 19, 26, 31; IV Reg., iii, 3;

s, 29, 31, etc.; Eccli., xi, vii, 29.

H. Lesêtre.

    1. JÉROBOAM II##


2. JÉROBOAM II. Il fut le douzième successeur du fondateurdu royaume d’Israél et le quatrième roi de la dynastiede Jéhu.Il succéda à so"n père Joas, en 824 (ou en 783),et eut un règne de quarante et un ans. Au point de vuepolitique, ce fut un prince intelligent et énergique, quisut avec habileté tirer parti des circonstances. Le roide Syrie, Hazæl, s’était défendu assez vaillamment contreles Assyriens, pour que les successeurs de Salmanasarn’osassent plus recommencer les hostilités de sonvivant. Voir Jéhu, col. 1245. Quand Mari monta sur letrône de Damas, en 802, Rammanirar III, roi d’Assyrie,fit une campagne en Syrie, assiégea Mari dans sa capitaleet lui imposa un lourd tribut. L’inscription qui relatece fait compte également parmi les tributaires lesPhéniciens, les Philistins et la terre d’Amri, c’est-à-direle royaume d’Israël. Cf. Vigouroux, La Bible et les découvertesmodernes, 6e édit., t. iii, p. 486-491; Maspero,Histoire ancienne des peuples de l’Orient classique,t. iii, 1899, p. 101, 102. Jéroboam dut se contenter depayer le tribut dans les mêmes conditions que Jéhu.Mais il profita de l’affaiblissement du royaume de Syriepour rétablir de ce côté les anciennes frontières d’Israël.L’historien sacré, IV Reg., xiv, 25, 28, dit que ceprince «rétablit les limites d’Israël de l’entrée d’Émathjusqu’à la mer de la plaine (mer Morte), et qu’il lit rentrersous la puissance d’Israël Damas et Émath, quiétaient à Juda». Sur la mer de la plaine ou d’Arabah,voir Ababah, t. i, col. 820; sur Émath, voir t. it, col1715. Quant à Damas, il ne saurait être ici question dela capitale même, mais seulement du pays à l’est duJourdain, qui avait appartenu à David et à Salomon etétait passé depuis aux mains des rois de Syrie. VoirDamas, t. ii, col. 1228. Une prophétie de Jonas avait annoncéles succès de Jéroboam II. IV Reg., xiv, 25. Cetteprophétie a dû être purement orale, ou bien le texte n’ena pas été conservé; car le livre actuel de Jonas ne contientrien qui se rapporte directement au royaume d’Israël.Voir Jonas.

Au point de vue religieux, le règne de Jéroboam IIest résumé en un mot: «Il fit ce qui est mal devantle Seigneur et il ne s’éloigna pas des péchés de Jéroboam,fils de Nabath, qui fit pécher Israël.» IV Reg.,xrv, 25. Les prophètes Amos et Osée, qui étaient contemporainsde Jéroboam II, ne manquent pas de stigmatiserl’idolâtrie d’Israél, tout en reconnaissant la prospéritétemporelle du royaume, qui ne fut jamais plus

grande que sous ce roi. Amos, ii, 6-16, décrit la corruptionmorale qui règne dans Israël; la rapacité dontfont preuve les grands du pays, iii, 9, 10; l’oppressiondes pauvres par les riches, iv, 1-3; l’idolâtrie persistanteet les châtiments qui fondront un jour sur Israël,iv, 4-13; vii, 1-9. À cause de ces prédictions, Amos futdénoncé à Jéroboam comme conspirateur par un prêtrede Béthel, qui lui conseilla du reste de fuir dans le paysde Juda. En réponse à cette dénonciation, Amos annonçaà ce prêtre les maux qui allaient le irapper ainsi quesa famille, et la captivité qui menaçait Israël. Am., xii,10-17. Cf. viii, 11-ix, 10. Osée, i, 4, annonce que Dieuva faire cesser le règne de la maison d’Israël, à laquelleil reproche vivement son culte de Baal, en comparantl’idolâtrie à une fornication honteuse, ii, 2-17; iv, 12-19.Il s’adresse directement à la maison du roi, qui estdevenu comme un piège pour ses sujets, v, 1-7, maisreconnaît que la corruption d’Israël est incurable, vi,4-vn, 7. Il fait allusion aux avances que la cour de Samarien’a cessé de faire aux Égyptiens, sous JéroboamIer, et aux Assyriens, sous Jéhu, et déclare que le périlpour Israël viendra précisément de là. Ose., xii, 11, 12;xiv, 4. Tout le reste de la prophétie d’Osée est consacréà la description de l’idolâtrie d’Israël et à la prédictiondu châtiment qui va infailliblement arriver, mais n’empêcherapas ensuite la miséricorde de s’exercer sur unpetit nombre. Ose., xi, 9-11; xiii, 14-18; xiv, 4-8. Malgréle schisme d’Israël, le Seigneur continuait donc à luienvoyer des prophètes pour le prémunir contre l’idolâtrie.Ose., iii, 10, 11. Jéroboam ne se mit guère en peine deleurs menaces. Sa prospérité matérielle, Ose., xii, 8, 9,et ses conquêtes sur la Syrie lui semblaient une approbationde sa conduite; il prenait plaisir à se mêler à ceuxqui vivaient de débauche, et il «tendait la main auxmoqueurs», c’est-à-dire à ceux qui n’avaient plus aucunefoi dans le Dieu de leurs pères et trouvaient que Baalet les veaux d’or étaient plus commodes à servir queJéhovah. Ose., viii, 5, 6. Josèphe, Ant. jud., IX, x, 1,dit de lui qu’il «se montra plein de mépris pour Dieuet souverainement dédaigneux de toutes les lois, adorateurdes idoles, appliqué à mille affaires absurdes etétrangères, et cause de maux innombrables pour lepeuple d’Israël». La Sainte Écriture ne mentionne aucunerelation entre Jéroboam II et les deux rois de Judases contemporains, Amasias et Azarias. Il mourut en

783 (ou en 743).

H. Lesêtre.

JÉROHAM(hébreu: Yerôliam), nom de sept Israélites.

1. JÉROHAM (Septante: ’IspEiier.X; Alexandrinus: ’Ispoâ|j.), de la tribu de Lévi, père d’Etcana et grand-pèrede Samuel, descendant de Caath. I Reg., i, 1. Sur lesdifférents noms donnés à son père Éliu-Éliab, voirÉLiAB 4, t. ii, col. 1665.

2. JÉROHAM (Septante: ’Ipoâjjt), benjamite, chefd’une famille considérable de cette tribu qui s’établit àJérusalem. 1 Par., viii, 27.

3. JÉROHAM (Septante: ’IepoSoajA), benjamite, pèrede Jobania, peut-être le même que Jéroham 2. I Par.,vin, 27.

4. JÉROHAM (Septante: ’Ipadqj.), prêtre, descendantd’Aaron, fils ou petit-fils de Phassur, et père d’Adaïa, dela famille d’Emmer. Emmer était chef de la seizièmeclasse sacerdotale au temps de l David. I Par., ix, 12.Dans II Esd., xi, 12, Jéroham est nommé comme pèred’Adaïa. Voir Adaïa 4, t. i, col. 170.

5. JÉROHAM (Septante: ’Ipoâji), père de plusieursvaillants hommes qui allèrent se joindre à David pendantqu’il était à Siceleg. Il était de Gedor. I Par.,xii, 7. ^

6. JÉROHAM (Septante: Ipwoté), de la tribu de Dan;son fils Ezrihel fût chef de la tribu de Dan sous le règnede David. I Par., xxvii, 22.

7. JÉROHAM (Septante: 'Itap&y.), père d’Azarias, quifut un des chefs qui aidèrent le grand-prêtre Joïada àfaire reconnaître Joas comme roi de Juda. II Par.,xxiii, 1.

1. JÉRÔME ('lEptivu(i.o; ; Vulgate: Hieronyrnus),général de l’armée d’Antiochus "V Eupator, roi de Syrie. Voir Hiéronyme, col. 707.

    1. JÉRÔME (SAINT) (Eusebius Hieronyrnus)##


2. JÉRÔME (SAINT) (Eusebius Hieronyrnus), père etdocteur de l'Église latine. — I. Vie. — Saint Jérôme naquit, suhant l’opinion la plus probable, vers l’an 340, àStridon, sur les confins de la Dalmatie et de la Pannonieanciennes. On a beaucoup discuté au sujet de l’exacteidentification de la ville de Stridon; la question sembleaujourd’hui résolue en faveur de la cité moderne de Grahovo Polje, en Dalmatie, par les récentes recherches deMa' F. Bulic, Wo lag Stridon, dans Festschrift fur OttoBenndorꝟ. 1899, p. 276-280; cf. Analecta Bollandiana,t. xviii, 1899, p. 260-261. Des parents de saint Jérôme,que l’on sait avoir été de fervents chrétiens, le nom seuldu père, Eusèbe, est connu. Selon l’usage encore fréquentau ive siècle, Jérôme ne reçut le baptême qu’assez tard, pendant son premier séjour à Rome, vers 363. Les parents deJérôme, qui étaient dans l’aisance, firent donner à leurfils les premiers éléments des lettres, à Stridon même;ensuite ils l’envoyèrent à Rome, où il est, en 354, l'élèvedu grammairien Donat. C’est là qu’il puisa l’amour ardent qu’il professa toujours pour les auteurs de l’antiquité classique et qu’il acquit cette parfaite connaissance de la langue latine, qui a fait de lui, suivantl’expression de M. Goelzer, «l’ancêtre de nos grandshumanistes.» Étude lexicographique et grammaticalede la latinité de S. Jérôme, in-8°, Paris, 1884, Introduction, p. 9. Après avoir parcouru le cycle des études,grammaire, rhétorique, dialectique, philosophie, Jérômeentreprit, avec son ami Bonose, un voyage dans les Gaules et demeura assez longtemps à Trêves. De là il passaquelque temps à Aquilée, où il se trouvait en 373. Onignore pour quel motif Jérôme quitta assez brusquement cette dernière ville pour se rendre, avec quelquescompagnons, à Antioche, en Syrie. Il n’y resta guère,mais se retira, à quelque distance de la cité, dans ledésert de Chalcis; il y vécut cinq ans (373-378) dans lespratiques de la plus austère pénitence. Rentré à Antioche, il y fut ordonné prêtre par l'évêque Paulin. S’ilaccepta cette dignité, il n’en exerça jamais les fonctions.Vers 380, Jérôme est à Constantinople, où il rencontresaint Grégoire de Nazianze, avec lequel il eut de fréquentsrapports et qui semble avoir exercé une grande influence sur la direction de ses études et les tendances desa doctrine exégétique et théologique. Quand, après lesjnode de 381, saint Grégoire de Nazianze eut résigné lesiège de Constantinople, le séjour de cette ville pesa àJérôme, et il fut heureux d’accepter l’invitation du papeDamase qui l’appelait à assister au synode convoquépour 382 à Rome. L’activité de Jérôme dans la Villeéternelle se signala d’abord par une polémique contrela communauté des Lucifériens; il entama ensuite avecle pape une savante correspondance sur divers sujetsd’exégèse et y commença son grand travail de revisiondu texte biblique. C’est à Rome aussi qu’il contracta cesrelations demeurées célèbres avec d’illustres et saintesfemmes, Marcella, Paula, Eustochium, et qu’il composa son traité contre Helvidius pour défendre le dogmede la perpétuelle virginité de Marie. Le 2 décembre 384,le pape Damase mourut, et Jérôme fut écarté de la chancellerie pontificale. Dégoûté de Rome, où il commençait à être en butte à la calomnie. Jérôme quitta pour

toujours la Ville éternelle, et, accompagné de son frèrePaulinien, du prêtre Vincent, de Paula, d’Eustochiumet d’autres vierges chrétiennes, il partit, en 385, pour laPalestine. Après avoir visité les Lieux Saints, il alla sefixer définitivement à Bethléhem, où il demeura jusqu'àsa mort, c’est-à-dire environ pendant trente-cinq ans.Les premiers temps de son séjour à Bethléhem furent laborieusement occupés par un nombre considérable de travaux sur la Bible. Saint Jérôme repritl'étude del’hébreuet y joignit celle du chaldéen. En même temps, il dirigeait dans les voies de la perfection un grand nombrede moines et de vierges chrétiennes qui étaient venusse placer sous sa direction spirituelle. Vers la fin durve siècle, Jérôme eut à soutenir contre Ruûn une lutteterrible à propos des doctrines d’Origène. La controverseavec saint Augustin, qui se débattit à peu près au mêmetemps, fut plus chrétienne, quoique très vive également.Pendant les dernières années de sa vie, saint Jérôme s’attaqua, avec toute la vigueur de son esprit, aux erreursde Pelage. Il s'éteignit, accablé de vieillesse, près dela grotte de la Nativité, le 30 septembre 420.

II. Travaux scripturaires de saint Jérôme. —De tousles pères de l'Église, saint Jérôme est assurément l’un desécrivains les plus féconds et les plus ingénieux. Nousn’avons à nous occuper iciquedeses travaux scripturairesqui, du reste, constituent l'œuvre la plus importante et laplus considérable de son activité littéraire. On peut diviser en trois catégories l’ensemble des immenses étudesde saint Jérôme sur l'Écriture Sainte.: I. Traductionset révisions. II. Commentaires. III. Travaux divers surla Bible. Nous dirons ensuite quelques mots: IV. desœuvres perdues et des apocryphes de saint Jérôme, etV. nous donnerons une idée générale de la doctrineexégétique du grand docteur.

I. traductions et REVISIONS.

Saint Jérôme traduisit: 1° de Vhébreu l’Ancien Testament; cette versionconnue sous le nom de Vulgate fut commencée à Bethléhem en 391 et terminée en 404 (t. xxviii et xxix): 2°du grec des Septante, saint Jérôme revisa le Psautier,une première fois à Rome en 383 (t. xxix, col. 119-398),et une seconde fois à Bethléhem en 388 (t. xxix, col. 117398); du même texte des Septante, saint Jérôme donnaune revision du livre de Job, faite à Bethléhem vers 389(t. xxix, col. 59-114); 3° du chaldéen, on possède de saintJérôme la traduction des livres de Tobie et de Judith,faite à Bethléhem en 398 (t. xxix, col. 23-60); 4° du grec,saint Jérôme revisa la version du Nouveau Testament, àRome, de 382 à 385 (t. xxix, col. 525-872).

Les Évangiles.

Dans sa préface à la revision des

quatre Evangiles, dédiée au pape Damase, saint Jérômes’explique nettement sur les principes qui l’ont guidédans ce travail (t. xxix, col. 525-530). Il ne s’occupera pasde l’Ancien Testament, car le texte latin est traduit dela version des Septante. Quant aux Évangiles, à l’exception de celui de saint Matthieu, ils ont été écrits engrec, il faut donc chercher à revenir au texte grec primitif. Peut-on déterminer sur quels manuscrits grecssaint Jérôme a opéré? MM. J. Wordsworth et H. J.White ont démontré que ces exemplaires sont de deuxsortes, les uns ne se rattachent à aucune famille demanuscrits aujourd’hui existants; les autres sont apparentés à nos codices» Bi. Cf. Novum TestamentumDomini NostH Jesu Christi latine secundum editionemS. Bieronymî ad codicum manuscriptorurn fidenirecensuit J. Wordsworth and H. J. Wbite. Pars prior,quatuor Evangelia, Oxford, 1889-1898, p. 657-658; E. vonDobschùtz, dans la Zeitschrift fur wissenschaftlicheThéologie, 1889, t. xxiv, p. 334-335; O. von Gebhardt,dans la Theologisclie Literaturzeitung, 1899, p. 656.Quant au texte latin de Vltala qui servit à la revisionde saint Jérôme, c’est probablement celui du CodexBrixianus (f). En somme, cette recension latine sert debase, le traducteur la garde et ne la modifie, d’après le

texte grec, que lorsque le sens lui paraît mal rendu;même en ce cas, il ne traduit pas toujours du grec,mais choisit, parmi divers textes latins qu’il avait à sadisposition, les leçons les plus rapprochées du grec. Cf.Wordsworth et White, Nouv. Test., p. 663, 665; Julicher,Neutestamentliclie Einleitung, p. 389; Grûtzmacher,Hieronymus, Leipzig, 1901, p. 217-218. À la revision desquatre Evangiles, saint Jérôme ajouta également lescanons d’Eusèbe. Voir Eusèbe, t. ii, col. 2051. Ce travailde saint Jérôme marque un grand pas dans l’histoire dela critique textuelle de la Bible. Pourtant, il faut biensignaler des lacunes dans cette œuvre. Si la revisionsemble complète pour les Évangiles de saint Matthieu,saint Marc et les premiers chapitres de saint Luc, ellelaisse à désirer pour la seconde partie de ce dernierÉvangile et les premiers chapitres de celui de saint Jean.L’auteur se relève dans la seconde partie de l'Évangilede saint Jean. En somme, malgré certaines correctionsinutiles et d’autres insuffisantes, la revision du texte deYltala faite par saint Jérôme est une œuvre pleine detact, qui fournit au monde latin un texte des Évangilesbasé sur une critique solide. Voir l’ouvrage déjà cité deJ. Wordsworth et H. J. White; G. Hoberg, De S. Hieronymi ratione inlerpretandi, in-8°, Bonn, 1886; Fr. Kaulen, Geschichte der Vulgata, in-8°, Mayence, 1868;Id., Handbuch zur Vulgata. Eine systematische Darstellung ihrer lateinischen Sprachcharakters, in-8°,Majence, 1870; H. Ronsch, ltala und Vulgata, in-8°,Marburg, 1869; 2e édit., 1874; S. Berger, Histoire de laVulgale pendant les premiers siècles du moyen âge,in-8°, Paris, 1893; E. von Dobschutz, Studien zur Textliritik der Vulgate, in-8°, Leipzig, 1894.

Traduction des Psaumes sur le grec.

L’ancien

texte latin des Psaumes qui avait été traduit sur la versiondes Septante, fut aussi revu par saint Jérôme, d’abord àRome, en 384, ensuite à Bethléhein, entre les années 386et 391. De la première revision sortit le Psalterium romanum qui fut en usage à Rome, jusqu’au règne desaint Pie V, et dont sont extraits le Venite exsultemusde l’Invitatoire du Bréviaire et les citations des Psaumesqui se rencontrent dans le missel. Ce premier travail futexécuté, au témoignage de saint Jérôme lui-même, d’unefaçon un peu hâtive, Psalterium Romss dudum posilus emendaram… hcet cursim magna illud ex partecorrexeram, t. xxix, col. 119. Il semble en outre que les copistes altérèrent assez rapidement le nouveau texte. Aussi,à la prière de Paula et d’Eustochium, Jérôme entrepritune seconde revision qui donna le Psalterium gallicanum, ainsi nommé parce qu’il fut d’abord adopté dans lesGaules. C’est celui qui a été inséré dans la Vulgate etdont on se sert au Bréviaire. La revision du Psautierfut entreprise d’après les principes qui avaient guidé saintJérôme dans celle des Evangiles. On n’a pas réussi àdéterminer l’exemplaire des Septante qui servit à la première revision des Psaumes; pour la seconde, saint Jérôme eut recours aux Hexaples d’Origène, dont il utilisal’exemplaire original, trouvé dans la bibliothèque del'église de Césarée, en Palestine. Cf. Catalog., c. 75,Patr. Lat., t. xxiii, col. 685, et Comment, in Titum, 3,t. xxvi, col. 595. Cette fois, il employa, pour signaler sescorrections, des signes diacritiques: l’obèle-i. désigneles mots qui ne se trouvent que dans le Septante et quene renferme point le texte hébreu; l’astérisque X" indique les termes du texte hébreu omis par les Septante;ces derniers sont empruntés à la version de Théodotion.Ces additions d’après le texte hébreu constituent la principale différence de la première et de la seconde revisiondu Psautier. Pour le reste, il n’y a que quelques divergences d’expressions. Ainsi, Ps. vii, le Psautier romaina: Secundum innocentiam manuum mearum, le Psautier gallican: Secundum innocentiam meam; Ps.xxviii,on lit dans la révision romaine: lex Dommi irreprehensibilis, qui devient dans le Psautier gallican: lexDomini immaculata; Ps. xxiii, tandis que la premièrerevision porte: Cohibe linguam tuam, la seconde dit:Prohibe linguamtuam; ¥s. xxxiv, absorbuimus eum duPsautier romain est dans l’autre: devoravimus eum.

Première version de Job.

Presque immédiatement après la seconde revision du Psautier, saint Jérôme

entreprit la traduction du livre de Job, d’après la version grecque des Septante. Le système suivi est lemême que celui de la seconde revision des Psaumes,et les Hexaples d’Origène ont également servi de base.Les obèles et les astérisques sont encore conservés dansdeux des manuscrits (Bodléienne 2426 et Tours 18) quirenferment ce travail de saint Jérôme. Voir P. de Lagarde, Mittheilungen, t. ii, Gœttingue, 1887, p. 189237. Un troisième manuscrit a été trouvé, il y a peud’années, à la bibliothèque de Saint-Gall. Voir Caspari,Dos Buch Job in Hieronymus Ueberselzung aus deralexandnnischen Version nach emer St. GallenerHandschrift sœc. viii, Christiania, 1893, et Id., Ueberdes Hieronymus Vebersetzung der alex. Version desBuchs Job in einer Sanct Gallener Handschrift desachten Jahrhundert, dans les Actes du huitième congrès des orientalistes, part, ii, p. 39-51.

Traductions sur l’hébreu.

Ces premiers travaux

de revision et de traduction avaient préparé saint Jérômeà la grande œuvre qui est son principal titre de gloire,la version de tout l’ancien Testament d’après le textehébreu. Cette entreprise de longue haleine fut exécutéeà Bethléhem; elle semble avoir été commencée vers l’année 390 et terminée en 405. Voici dans quel ordre futfaite cette traduction de la Vulgate. Les premiers livrestraduits furent ceux de Samuel et des Rois; saint Jérômeles fit précéder du célèbre morceau connu sous le nomde Prologus galeatus dédié à Paula et à Eustochium.Suivit ensuite la version du livre de Job et des Prophètes, à laquelle s’ajouta une troisième traduction desPsaumes, cette fois directement d’après 1 hébreu. Versla fin de 393, il envoie à ses amis Chromatius ei Héliodore la traduction des Proverbes, de l’Ecclésiaste etdu Cantique des cantiques. Pendant les deux annéessuivantes, saint Jérôme traduisit les livres d’Esdras, dela Genèse et des Paralipomènes; suivirent alors, jusqu’en404, l’Exode, le Lévitique, les Ncmbres et le Deutéronome; enfin l’année 405 vit paraître la version de Josué,des Juges, de Ruth, d’Esther, de Tobie et de Judith,ainsi que les appendices de Jérémie, Daniel et Esther.La traduction de la Sagesse, de l’Ecclésiastique et de» deux livres des Machabées qui se lisent dans la Vulgatene sont pas de saint Jérôme. Sa version du Psautier surl’hébreu n’est pas non plus entrée dans notre Bible latine, mais seulement sa revision appelée Psalteriumgallicanum.

Quel jugement faut-il porter sur saint Jérôme commetraducteur de la Bible? Il convient avant tout de rendre hommage au caractère grandiose de cette œuvre età la persévérante énergie avec laquelle elle fut doussée jusqu’au bout. On ne saurait nier non plus quesaint Jérôme s’est donné beaucoup de peine pour réussir dans son œuvre. Ainsi, pour le livre des Paralipomènes, il étudia chaque mot avec son professeur d’hébreu. D’autres fois, le travail semble avoir été trop hâtifet l’on a quelque raison de se délier d’une activité quitraduisait le livre de Tobie en un jour. En tout cas, l'œuvre de saint Jérôme est restée, et, après tant de sièclesécoulés, c’est encore la Vulgate qui, pour un grandnombre d’esprits, constitue le canal par lequel ilsreçoivent l'Écriture Sainte. Peu esclave du mot dansd’autres traductions qu’il entreprit, Jérôme, en ce quiconcerne la Bible, traduit aussi littéralement que possible, car pour l'Écriture Sainte, dit-il, même le motpeut contenir un mystère. En général, le traducteur avictorieusement résolu la difficulté de rendre en latin.

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JÉRÔME

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les particularités d’un idiome aussi éloigné de lui quel’hébreu, et l’on peut "dire que souvent la latinité desaint Jérôme a gardé très appréciable la marque del’idiome hébraïque. S il est aisé aujourd’hui de releverdans la version de saint Jérôme des faiblesses et desinexactitudes, qui appellent la rectification, il seraitinjuste d’oublier qu’il fut le premier à ouvrir la voie,que l’œuvre qu’il entreprit était vraiment considérableet que les ressources dont il disposait ne peuvent pasentrer en comparaison avec celles que l’érudition contemporainefournit à nos travaux.

II. commentaires.

Les traités de saint Jérôme surl’Écriture se divisent en deux catégories, les commentairesoriginaux et quelques autres traduits d’Origène.

Commentaires originaux.

De 386 à 387, saint Jérôme

commenta plusieurs épîtres de saint Paul, cellesaux Galates, aux Éphésiens, à Tite et à Philémon. —1. Par son étendue et la profondeur de l’interprétation,le commentaire sur l’épître aux Galates est une desœuvres capitales de saint Jérôme. Ce fut l’explicationassez étrange qu’il donne de la discussion de saint Paulavec saint Pierre, Gal., ii, 11-14, qui lui attira une vivepolémique avec saint Augustin. Jérôme pense que lacontroverse entre les deux apôtres fut une scène concertéed’avance. Contre cette interprétation qui, en fait,est peu vraisemblable et n’a guère rallié de suffrages,l’évêque d’Hippone protesta vigoureusement. — 2. Letraité sur l’épître aux Éphésiens fut écrit très rapidement,et saint Jérôme nous apprend qu’il lui arrivaparfois d’aboutir à un total de mille lignes par jour;inlerdum per singulos dies usque ad numerum milleversuum pervenire. Aussi relève-t-on, dans le commentaire,des défaillances de doctrine. Si, d’une part,saint Jérôme combat énergiquement, Eph., i, 4, l’opiniond’Origène sur la préexistence des âmes, de l’autre, illaisse passer sans critique un certain nombre de théoriesfranchement origénistes. Cf. Eph., i, 21; v, 29, etc.

— 3. Très court et très hâtif est également le commentairesur l’épître à Tite, qui fut de même composé enpeu de temps. De ce commentaire le passage le pluscélèbre est celui où saint Jérôme admet, à propos duch. I, 5, qu’aux temps apostoliques les termes presbyteret episcopus ne désignaient qu’une seule et même dignité.Dans son étude sur {’Organisation des égliseschrétiennes jusqu’au milieu du iiie siècle (Congrèsscientifique international des catholiques, Paris, 1888,t. ii, p. 305), le P. De Smedt a examiné cette thèse desaint Jérôme. En rapprochant l’opinion exprimée dansle commentaire sur l’épître à Tite d’autres passages,surtout du Dialogus contra luciferianos, 9, t. xxiii, col.164, 165, le P. De Smedt a pu conclure très justementque sur le point en question les idées de saint Jérômen’étaient pas nettement arrêtées. — 4. Dans le commentairesur l’épître à Philémon, saint Jérôme défend l’authenticitéde cette épître que d’aucuns prétendaient insignifiante,trop restreintee d’intérêt trop minime pourêtre digne de l’Apôtre. La grande preuve d’authenticitéqu’il donne est que Marcion lui-même a admis cettelettre; quant aux preuves intrinsèques qu’il ajoute, ellessont assez faibles. — 5. En 389-390, saint Jérôme achèvele commentaire sur l’Ecclésiaste, commencé à Rome surles sollicitations de Blésilla. C’est le premier des commentairesbibliques sur l’Ancien Testament où saint Jérômeaffirme son originalité et s’aflranchit des opinionsdes anciens exégetes. Sans s’attacher à aucune autre autorité,il traduit et explique, d’après le texte original, laversion des Alexandrins, sauf dans le cas où elle s’éloignetrop du texte primitif. Rarement il a tenu compte des traducteursgrecs Aquila, Symmaque ou Théodotion. Sansdoute, à cause de l’abus de l’explication allégorique, saintJérôme ne semble pas avoir donné de l’Ecclésiaste uneinterprétation rigoureuse. — 6. Quelques années après cetravail, en 392, saint Jérôme mit la main à des commentaires sur les prophètes. Il commença par Nahum, t. xxv,col. 1231-122; Michée, ibid., col. 1151-1230; Sophonie,ibid., col. 1337-1387; Aggée, ibid., col. 1387-1416, et Habacuc,ibid., col. 1273-1335. L’interprétation allégorique dominedans ces commentaires, et les critiques verbale ethistorique ont trop peu de part aux explications de saintJérôme. Néanmoins, surtout dans les traités sur Sophonieet Habacuc, il se rencontre bon nombre d’observationstrès fondées et qui constituent encore aujourd’hui d’excellentstémoignages de l’ancienne tradition juive etchrétienne. C’est dans le commentaire sur Sophonie, i,15, t. xxv, col. 1353-1354, que se lit la page célèbre sur laruine de Jérusalem, l’une des plus éloquentes qu’ait écritessaint Jérôme. — 7. Le commentaire sur Jonas fut composévers 395-396 et dédié àChromatius. Ce travail donnalieu à une correspondance entre saint Augustin et saintJérôme, Ep. 104, 112, 131, t. xxii, col. 831, 916, 1124: l’évêqued’Hippone y loue le solitaire de Belhlèhem d’avoirnettement établi le dogme du péché originel. — 8. À lamême époque, parut le commentaire sur Abdias. Ilsemble que saint Jérôme a, deux fois, entrepris ce travail,car dans la préface, il dit: In adolescentia meaprovocatus ardore et studio Scripturarum allegoriceinterpretatus sum Abdiam prophetam cuius historiamnesciebam, t. xxv, col. 1097. Sa première manière nesemble pas avoir complètement disparu, car le commentairesur Abdias qui parut vers 395, dédié à Pammachius,n’est nullement exempt d’explications arbitraireset fantaisistes. — 9. Saint Jérôme préluda àl’explication du prophète Isaie par une étude sur lesdix visions ou Onera (e. xiii-xxiii), dans lesquellesIsaie prédit la ruine de Babylone, de Moab, de Damas,de l’Egypte, etc. Ce travail fut plus tard repris et insérétout entier sans aucune modification dans le commentairesur Isaie; il en forme le livre V. Dans ce traitéaussi, l’interprétation historique laisse beaucoup à désireret la fantaisie s’est trop souvent donné libre cours.Le commentaire complet sur Isaie parut entre 408 et410, c’est le plus important et le plus étendu des commentairessur l’Ancien Testament; il est divisé en dix-huitlivres. L’explication est complète et approfondie,tant en ce qui concerne les interprétations personnellesqu’en ce qui a rapport à l’exposé des opinions des devanciers.Ce n’est pas à dire qu’il n’y ait point encorede-ci de-là quelques abus d’interprétation allégorique,mais, en général, le sens littéral est bien saisi et, àdiverses reprises, l’auteur signale, avec un rare bonheur,la force et la beauté du texte hébreu. — 10. Nous avonsréuni les observations à présenter sur les deux commentairesd’Isaie, mais avant l’achèvement de cette œuvre,en 398, ~relevant d’une grave maladie qui avait duré douzemois, saint Jérôme, sur la prière d’Eusèbe de Crémone,dicta en quinze jours un commentaire surl’Évangiledesaint Matthieu, t. xxvi, col. 15-218. Voici comment ilcaractérise lui-même cette œuvre: Historicam interpretationem... digessi breviter, et interdum spiritualisintelhgentix flores miscui, perfeclum opus reservansin posterum. Ce travail trop hâté, commel’atteste l’histoire de sa composition, ne semble pas absolumentà l’abri des critiques qui ont été dirigées contrelui. Cf. Zockler, Hieronymus, p. 213-214. Toutefois, iln’est pas impossible d’interpréter en bonne part certainesexpressions parfois un peu étranges. Voir R. Simon,Histoire critique des principaux commentateursdu Nouveau Testament, p. 215. — 11. Les commentairessur Zacharie, Malachie, Amos, Osée et Joël virent le jouren 406. Le premier, divisé en trois livres, est dédié àExupère de Toulouse: c’est une des œuvres les moinsréussies de saint Jérôme, qui n’a guère contribué àéclaircir les obscurités du texte de Zacharie. Dans lecommentairesur Malachie, il y a surtout à relever l’opinionémise, dans la préface, que ce prophète ne seraitautre qu’Esdras, à rencontre de l’idée d’Origène, qui se

basant sur l’étymologie y voyait un ange. — 12. Le commentairesur Amos, qui a été bien étudié par G. Baur,Der Prophet Amos, I817, p. 141, est un des bons travauxde saint Jérôme. Il comprend trois livres dédiés à Pammachius.Tout ce traité abonde en remarques excellentes.— 13. On ne peut en dire autant du commentairesur Osée et sur Joël; le premier est par endroitsfort obscur, et dans le second l’explication allégoriquedomine d’une façon abusive. — 14. Si, dans le traité surDaniel, l’auteur s’est "proposé d’expliquer certains passagesparticulièrement obscurs, en fait, cependant, l’ouvragea bien le caractère d’un commentaire perpétuel;mais les endroits les plus difficiles sont développés avecplus d’étendue, par exemple la prophétie des soixante-dixsemaines (c. îx, 24-27). On constate, au cours du commentaire,assez peu d’interprétations personnelles; c’estplutôt une collection des opinions antérieurement émisespar Clément, Origène, Jules Africain, Hippolyte, Eusèbeet Apollinaire. À diverses reprises, saint Jérôme défendcontre Porphyre le caractère prophétique du livre deDaniel, surtout dans la préface. Quelques interprètes ontcru que saint Jérôme contestait l’authenticité de l’histoirede Susanne et de Bel et du dragon. Cette manière devoir n’est plus admissible depuis le travail si approfondique le P. A. Delattre, S. J., a consacré à cette question:Les deux derniers chapitres du livre de Daniel, dansles Éludes religieuses, 1878. Le savant exégète a nettementdémontré que certaines expressions de saint Jérômepeuvent très naturellement s’expliquer et n’entamentd’aucune façon le caractère inspiré des dernierschapitres du livre de Daniel. Notons aussi que la valeurdu commentaire de saint Jérôme est encore relevée parles nombreux extraits qu’il renferme d’historiens grecset latins aujourd’hui perdus. Cf. surtout au chapitre xi.

— 15. L’étude de saint Jérôme sur le prophète Ézéchielfut écrite entre les années 410 et 452. Ce travail très étenduest divisé en dix-huitlivres. Aussi longtemps que l’auteurse borne à l’explication historique, il fournit à l’exégèsed’utiles et importantes contributions, et sous ce rapportl’interprétation de la fameuse vision des ossements,xxx vii, 1-1 4, où il voit une prophétie de la résurrection nationaled’Israël, est un modèle du genre. Il n’en est pas demême, quand saint Jérôme se laisse aller à sa tendanceà l’interprétation tropologique, et de ce procédé leschapitres i, ix, xvi, xl-xlviii ont eu particulièrement àsouffrir. — 16. Le dernier des commentaires de saintJérôme sur les prophètes est celui de Jérémie, composéde 415 à 420 et mené seulement jusqu’au ch. xxxii, caril fut interrompu par la mort du grand exégète. On doitregretter vivement de ne point posséder cette œuvre enson entier. Si, pour la profondeur et l’abondance desaperçus nouveaux, ce commentaire peut rivaliser avecceux dlsaie et d’Ézéchiel, d’autre part, il l’emporteparce qu’il s’y rencontre beaucoup moins d’explicationsarbitraires et forcées. Les fréquentes allusions à la controverseavec Pelage donnent aussi à ce commentaireune importance particulière. — 17. On doit encore àsaint Jérôme un commentaire sur l’Apocalypse. Ce traitéa été reconnu naguère par E. J. Haussleiter, Die Kommentaredes Victorinus, Tichonius und Hieronymus zurApokalypse, âansZeitschriftfurkirchlicheWissenschaftund kirchl. Leben, t. vii, 1886. p. 239-570, dans la Summadicendorum (Patr. Lat., t. xcvi). En somme, le commentairede saint Jérôme sur l’Apocalypse aurait pour basele traité perdu de Tichonius sur le même sujet et unremaniement du traité sur l’Apocalypse de Victorin dePettau. — 18. À deux reprises différentes, saint Jérômeparle des Commentarioli qu’il avait composés sur lesPsaumes, t. xxiii, col. 432. Vallarsi pensait que ces commentairesdonnés verbalement avaient été recueillis pard’autres, sans la participation directe de saint Jérôme àleur rédaction, et que de là était sorti le Breviarium inPsalmos. Voir t. xxii, col. xxyii, et t. xxvi, col. 855. Il

y a peu d’années, dom Germain Morin a trouvé dansdes manuscrits d’Épinal, de Paris, de Grenoble et deNamur des commentaires sur les Psaumes attribuésà saint Jérôme et intitulés tantôt Excerpta de Psalterio,tantôt Enchiridion beati Jeronimi in Psalmis. Il les apubliés et, dans une introduction fort documentée, établi,avec beaucoup de sagacité, que les Excerpta dePsalterio n’étaient pas autre chose que les petits commentairessur les Psaumes, commentarioli, dont parlesaint Jérôme lui-même. Voir G. Morin, Anecdota Maredsolana,t. ii, part. 1, Sancti Hieronymi qui deperditihactenus putabantur commentarioli in Psalmos,Maredsous, 1895. G. Morin pense que ces commentairesont été composés à Bethléhem avant l’année 393.

Traductions de commentaires.

Outre les commentairesoriginaux sur bon nombre de livres de l’ÉcritureSainte, on doit encore à saint Jérôme la traductionlatine de plusieurs traités d’Origène. — 1. De 379 à 381,durant son séjour à Constantinople, il traduisit leshomélies d’Origène sur Isaie, Ézéchiel et Jérémie. Laversion des homélies sur Isaie a tous les caractères d’uneœuvre de début; le style est encore inculte et le textesouvent peu clair. Il s’y rencontre assez d’expressionslittéralement traduites du grec, qu’on ne retrouve plusdans la latinité de saint Jérôme à l’époque de sa complèteformation. — 2, La version des quatorze homéliesd’Origène sur le prophète Jérémie est mieux réussie.Bien que l’on ne possède pas encore de texte latin établiselon toutes les exigences de la critique, la traductionde saint Jérôme a une réelle importance. Elletémoigne de l’excellence du manuscrit grec que le traducteuravait à sa disposition, et en outre constitue uneœuvre fort méritoire. La version n’est pas absolumentlittérale, saint Jérôme y a suivi son programme habituel:Non verbume verbo, sed sensum exprimere de sensu.M. Klostermann a examiné de très près la version faitepar saint Jérôme des homélies d’Origène, et sa conclusionest des plus favorables au sujet de la valeur et del’intérêt sur le travail. Die Veberlieferung der Jeremiahomil’iendes Origenes, dans Texte und Untersuchungen,Neue Folge, t. i, 1897, Heꝟ. 3, p. 19-31. Par une séried’exemples topiques, M. Klostermann a montré qu’enbien des cas la traduction de saint Jérôme demeure letémoin de leçons meilleures que celles fournies par lesmanuscrits grecs aujourd’hui à notre disposition. — 3.La traduction de deux homélies d’Origène sur le Cantiquedes cantiques fut faite par saint Jérôme à Borne,entre les années 382 et 384. Dans sa préface au papeDamase, le traducteur déclare qu’il a songé davantage àrendre fidèlement le texte qu’à le revêtir des ornementsde la rhétorique. Comme on ne possède plus l’originald’Origène, la version de saint Jérôme est doublementprécieuse; elle marque un grand progrès sur la traductiondes homélies sur Isaie. Par la grande vogue dont cetravail de saint Jérôme a joui au cours du moyen âge, onpeut juger de l’accueil qui dut lui être fait à son apparition.Cf. Grûtzmacher, Hieronymus, p. 212-213. — 4. Lestrente-neuf homélies d’Origène sur l’Évangile de saintLuc furent traduites à Bethléhem entre 388 et 391. C’estla fidèle interprétation du texte grec, et saint Jérôme,cette fois, ne semble pas même avoir pris la peine d’adoucir,comme il l’a fait ailleurs, certaines opinions unpeu étranges ou des expressions incorrectes du grandAlexandrin.

III. Travaux sur la Bible.

À cette catégorie serattachent les Interpretationes fiebrseorum nominum,le Liber de situ et nominibus locorum hebraicorum etles Qumstiones hebrawae in libro Geneseos. Ces diverstraités furent composés à Bethléhem entre 386 et 391. —1. Les Interpretationes hebrssorwm nominum sont unlexique disposé par ordre alphabétique, où l’auteur apour but d’expliquer le sens de certains termes hébreux.Il est à peine besoin de le dire, devant les progrès de la

science philologique, ce travail nous semble aujourd’huipresque puéril. Aussi certains écrivains se sont-ils donnéle facile plaisir de tourner en ridicule les explicationsde saint Jérôme. M. Zockler, Hieronymus, p. 169,malgré ses préjugés confessionnels, a été plus équitableet a bien précisé le point de vue auquel il faut juger letravail de saint Jérôme. Ce n’est pas une œuvre de philologie,et saint Jérôme a eu bien plutôt pour but defournir des interprétations mystiques et symboliquesque de procéder à une stricte explication des nomshébraïques. — 2. Le Liber de situ et nominibus locprumkebraicorum n’est pas autre chose que la versionde l’Onomaslicon d’Eusèbe. Toutefois saint Jérôme y aintroduit certaines corrections et ajouté quelques noticesqui témoignent de connaissances topographiques réelles.A cause de son grand intérêt archéologique, cet importanttravail a été souvent réédité et commenté. VoirB. Rohricht, Bibhotheca geographica Palestine, 1890,p. 3-4. — 3. Les Quxstiones hebraicse in lïbro Geneseossont appelées par saint Jérôme lui-même Opus novum ettam Grsecis quam Latinis usgue ad id locorum inaudilum.Aujourd’hui encore ce traité a gardé toute sa valeuret fournit pour la critique biblique d’excellentesindications. L’auteur y présente une suite d’observationssur les passages les plus difficiles et les plus importantsde l’ancienne version latine de la Genèse. Ces observationssont accompagnées de corrections tirées des diversestraductions grecques et du texte original. En dépit dequelques erreurs de détail, d’explications forcées etd’étymologies fausses, les Qusestwnes hebraicx demeurentun des meilleurs traités de saint Jérôme. AussiM Zockler, qui est pourtant un juge sévère, a exprimé leregret que saint Jérôme n’ait pas interprété de la mêmefaçon les autres livres de l’Ancien Testament. Hieronymus,p. 172. — 4. Parmi les lettres de saint Jérôme,plusieurs constituent de véritables traités d’exégèse. Lalettre 18 au pape ûamase, t. xxii, col. 361-376, s’occupede la vision d’Isaie et du séraphin. L’auteur y donne,d’après son propre témoignage, les explications du Juifqui lui avait appris l’hébreu. Toutefois, plusieurs de cesinterprétations se retrouvent chez Origène, et des lorson est amené à se demander si saint Jérôme a voulusciemment donner le change sur ses sources et attribuerà un Juif ce qu’en réalité il devait à Origène, Cf. Grutzmacher,Hieronymus, p. 189. Hypothèse peu plausible,bien que saint Jérôme, qui ne nomme pas Origène dansle traité, s’y montre son parfait disciple par l’interprétationallégorique de l’Écriture, toutefois avec un certainéclectisme et sa tendance à adoucir ses expressionsmoins compatibles avec le dogme. C’est le témoignageque lui rend Rufin lui-même. Contra Hieronymum, ii, 4,t. xxi, col. 601. Origène avait vu dans les deux séraphinsqui entourent le trône de Dieu le Fils et le Saint-Esprit.Cette explication pouvant être interprétée contre ledogme de la Trinité et l’absolue égalité des personnes,saint Jérôme proposa une autre explication. Celui qui estassis sur le trône est le Christ, cf. Apocal., xii, 45, et ilest entouré de deux anges. — 5. Le P. Amelli croitavoir retrouvé en 1900 dans les manuscrits n. 342 et 345du Mont-Cassin une autre rédaction du même traité desaint Jérôme sur la vision d’Isaïe. Dans sa lettre n. 84,t. xxii, col. 745, saint Jérôme affirme que, vingt ans auparavant,il avait réfuté la véritable interprétation d’Origène.On avait toujours pensé jusqu’à ce jour que ce passagedésignait l’Épître xviii à Damase, que nous venonsd’analyser. Cf. Grutzmacher, dans la 3e édition de laRealencyclopädie fur protestantische Théologie, art.Hieronymus. Il faut bien reconnaître aujourd’hui, depuisla découverte du P. Amelli, qu’outre l’Epistola ad Darnasum,de Seraphim et êalculo, n. 18, il existe sur lemême sujet un opuscule, où sont réfutées plus péremptoirementet plus directement les idées d’Origène. LeP. Amelli a récemment publié ce traité (S. Hieronymi

DICT. DE LA BIBLE,

tractalus contra Origenem nunc prîmum edidit AmbrosiusH. Amelli, Florence, 1901), et il en a donné un résuméfort étendu dans les Sludi religiosi, mai-juin 1901,p. 193-204. Un trattato di S. Girolamo scoperto nei codicidi Montecassino. Ce traité fut, d’après le P. Amelli,écrit à Constantinople et semble être celui auquel saintJérôme fait allusion, quand il écrit: De hoc visione anteannos circiter triginta, cura essem Constantinopoli, etapud virum eloquenlissimum Gregorium Nazianzenum,tune ejusdem urbis episcopum sanctarum Scripturarumstudiis erudirer, scio me breveni dictasse subitumquetractalum, ut et experimentum caperemingeniolimei, etamicisjubentibus obedirem. Comment,in ls., vi, t. xxiv, col. 91-92. La thèse du P. Amelli n’apas toutefois rencontré l’adhésion unanime, et M. Mercati,qui n’est point convaincu que le traité récemmentdécouvert ait saint Jérôme pour auteur, ne saurait entout cas y voir une œuvre écrite à Constantinople en381. Voir Revue biblique, juillet 1901, t. 385-392. — Citonsencore les lettres xx, t. xxii, col. 373-79, où saintJérôme explique le mot Osanna; xxi, col. 379-394, intituléeDe duobus filiis, commentaire de la parabole del’enfant prodigue; xxvi, col. 430-431, explication des motsAlléluia, Amen, Mai-an atha; xxviii, col. 433-435, Devocediapsalma; TLXix, col. 435-441, DeEphod et Theraphim;xxx, col. 441-445, De alphabeto hebraico Psalmicxviii; xxxiv, col. 448-451, explication de quelques versetsdu Psaume cxxvi; xxxvii, 461-463, critique du commentairede Rheticius d’Autun sur le Cantique des cantiques;lui, col. 540-549, lettre à Paulin sur l’étude de1 Écriture Sainte, qui est tout un programme; lv, col.560-565, lettre à Amand de Bordeaux, où saint Jérômecommente divers passages de l’Écriture Sainte; lix, col.586-589 intitulée De diversis quæstionibus Novi Testamenti;lxiv, col. 607-622, contenant l’explication des vêtementssacerdotaux des Juifs et de diverses cérémoniesqui s’accomplissaient dans le temple de Jérusalem; lxv,col. 622-639, explication du Psaume xliv; lxxii, col.672-676, s’occupe de certains points de clironologie desrègnes de Salomon et d’Achaz; lxxiii, col. 676-681;Epistola de Melchisedech; lxxiv, col. 682-685, interprétationdu jugement de Salomon relatif aux deux courtisanes;lxxviii, col. 698-724, lettre célèbre De zlii mansionibuslsrælitarum in deserto et très importantepour la géographie de l’Exode; evi, col. 837-867: cettelettre est à rapprocher de la revision des Psaumes, ellecontient à peu près cent cinquante corrections sur diverspassages du Psautier; cxii, col. 916-931, lettre à saintAugustin, où saint Jérôme défend plusieurs de ses opinionsexégétiques, surtout son interprétation de la lettreaux Galates; exix, col. 966-980, interprétation du passagede l’Apôtre: Omnes quidem dormiemus; cxx, col. 9801006, vrai traité d’exégèse où saint Jérôme répond auxdouze questions posées parHédibia; cxxi, col. 1006-1038,réponse à onze questions d’Algasia; cxxix, col. 1099-1107,explication du sens à attacher à l’expression terra pronnssionis;CXL, col. 1166-1179, interprétation du Ps.lxxxix. Sur les lettres de saint Jérôme, voir A. Ebert,Geschichte der christhch-lateinischen Ltteratur, Leipzig,1874, p. 188-91.

IV. Œuvres perdues et apocryphes. — On a retrouvéla grande partie des œuvres de saint Jérôme, dont il adressé lui-même le catalogue. Restent perdus jusqu’à cejour une traduction en grec et en latin de l’Evangilearaméen selon les Hébreux et sept traités sur les Psaumesdepuis le dixième jusqu’au seizième. La version del’Évangile selon les Hébreux est signalée par saint Jérômelui-même, De vir. M., 2, t. xxiii, col. 611, et M. Harnacka relevé, dans les œuvres de saint Jérôme, toutes lescitations qui peuvent donner une idée de ce travail,en faisant toutefois remarquer que saint Jérôme aparfois confondu avec l’Évangile selon les Hébreuxle texte hébraïque de saint Matthieu. Voir A. Harnack,

III-r 43

Gesehichte der altchristlichen Litteratur, 1893, p. 8-10.D’après M. Zockler, Hieronymus, p. 178, les traités surles Psaumes: In Psalmos a decimo usque ad decimumsextum tractatus septem, t. xxiii, col. 717, Catalog.c. 135, seraient probablement une version d’un commentaired’Origène. Quelque hasard heureux fera peut-êtreun jour découvrir ces sept traités, comme ceux qui ontpermis à dom Morin et au R. P. Amelli de retrouverles Commentarioli sur les Psaumes et la première explicationde la vision d’Isaïe.

Versions apocryphes.

Les divers éditeurs des

œuvres de saint Jérôme ont publié sous son nom uncertain nombre de travaux que la critique moderne n’apas laissés au compte du grand docteur. Voir Zockler,Hieronymus, p. 471.

On a attribué à saint Jérôme la traduction de neufhomélies d’Origène sur Isaie. Vallarsi, t. iv, p. 1097-1144.Cette hypothèse n’estplus soutenable. Voir Zockler, Hieronymus,p. 87, note 2. Le Breviarium in Psalmos, t. xxvi,col. 821-1570, n’est pas non plus l’œuvre de saint Jérôme.Vallarsi croit pouvoir reconnaître dans ce travail desrestes d’explications verbales données par saint Jérôme endiverses circonstances et recueillies par ses disciples. Plusrécemment Dom Germain Morin a étudié d’une façonapprofondie le Breviarium in Psalmos et déterminé avecgrande sagacité la part qui y revient à saint Jérôme. AnecdotaMaredsolana,t. iii, part, i, p. iii-iv. — 2. Ne sont pasnon plus du grand docteur les Qusestiones hebraicee inlibros Regum et in libros Paralipomenon, t. xxxiii,col. 1329-1402, ni les Commentani in Evangelia,t. XXX, col. 531-644. h’Exposilio interlinearis libri Job,xxiii, t. col. 1407-1470, dont il existe quatre recensionsdifférentes, est, dans sa forme la plus ancienne, d’un disciplede saint Jérôme nommé Philippe. Ct. Zockler, Hieronymus,p. 471. Si Érasme et Amorbach tenaient encoresaint Jérôme pour l’auteur des Commentaires pélagienssur les Épitres de saint Paul, t. xxx, col. 645-902, cetteopinion est aujourd’hui, et depuis longtemps du reste,complètement abandonnée. Voir Fr. Klasen, PelagianischesCommentar zu 13 Briefen des hl. Paulus, dans leTheolog. Quartalschrift, t. lxvii, 1885, p. 244-317, 531-577.

V. Saint Jérôme exégète. —Nous avons dit plus haut ceque fut saint Jérôme comme traducteur de la Bible; ilnous reste à dire un mot de sa valeur comme exégète,et de ses opinions scripturistiques. Au sujet de l’inspiration,saint Jérôme ne mettait pas sur le même rangles livres de l’Ancien Testament qui ne figurent pas dansle canon des Juifs et ceux qui y sont contenus. Ce jugementdu grand docteur a été réformé par la traditioncatholique et en particulier par le décret du concile deTrente. Toutefois, en pratique, saint Jérôme a maintesfois accordé aux livres deutérocanoniques la même autoritéqu’aux autres parties de l’Écriture Sainte. Voir Trochon,La Sainte Bible. Introduction générale, m «part.,t. i, p. 149. Quant à la véracité des Livres Saints, saintJérôme professe une opinion qui peut donner la solutionde certaines difficultés qu’au nom de l’histoire onsoulève contre l’exactitude de certains faits bibliques.Le saint docteur rappelle à diverses reprises, In Jerem.,xxviii, 10, 15, t. xxiv, col. 855; In Matth., xiv, 8, t. xxvi,col. 98, que l’écrivain sacré rapporte certains faits, nonpas d’après la réalité historique, mais d’après l’opinioncourante. Cf. A. Largent, Saint Jérôme, p. 174-177. Unedes qualités maîtresses de l’exégèse de saint Jérôme,c’est le souci qu’il a de l’interprétation réelle; en plusieurscirconstances, il affirme ses principes à cet égard;voir par exemple Comment, in Isaiam, præf. lïb. r,t. xxiv, col. 155: Scienliam quærimus Scripturarum;et Ep. un, adPaulinum, t. xxii, col. 514: Vitiosissimumdocendi genus, depravare sententias et ad voluntatemsuam Scripluram trahere repugnantem. Aussi saintJérôme réprouve-t-i! nettement le système d’interprétationallégorique. Toutefois, saint Jérôme n’a pas toujours

été conséquent avec lui-même sous ce rapport, et il reconnaîtdeux sens aux passages de l’Écriture qu’il explique,l’un littéraire et historique, l’autre allégorique etsymbolique. Saint Jérôme a même parfois égalé sinondépassé toutes les hardiesses de l’interprétation allégoriqued’Origène. Il faut bien reconnaître aussi quel’exégèse du grand docteur se ressent parfois de l’incroyablerapidité avec laquelle il acheva certains de sescommentaires. Rien d’étonnant donc à ce qu’il dut parfois,de son propre aveu: dwtare quodcunque in buccamvenerit. Comment, in Abdiam, t. xxv, col. 1118.Tons les travaux de saint Jérôme ne se distinguent pasnon plus par un caractère de vraie originalité; plu*sieurs ne constituent qu’une compilation de diversesopinions émises par les passages qu’il interprète, et aureste c’était là l’idée qu’il se faisait d’un commentairebiblique: Commentarii quid operis habent? Alteriusdicta edisserunt, quæ obscure scripta sunt, piano sernionemanifestant, multorum sententias rephcanl, …ut prudens lector, cum diversas explanaliones legeritet multorum vel probanda vel tmprobanda didiceritjudicet quid verius sit. Cf Apol. adversum Rufinum,c.xvi, t. xxiii, col. 409-410. D’autre part, si le caractère tropcompilateur des essais de saint Jérôme nous a fréquemmentprivés de ses vues personnelles sur certaines questions,nous lui devons de nous rendre compte pluscomplètement de l’ancienne littérature scripturistique.Plusieurs travaux et fragments d’Origène, Apollinaire,Didyme et d’autres ne sont plus connus que par lesextraits qu’en donne saint Jérôme.

J. Van den Gheyn.

    1. JÉRON##

JÉRON (hébreu: ’Ire’ôn; Septante: Kepwé; Alexandrinus: ’Iapitiv), ville de Nephthali, aujourd’hui Yaron.Elle est nommée seulement une fois dans l’Écriture,Jos., xix, 38, entre Enhasor et Magdalel. «Yaron a uneimportante ruine… C’est un tertre couvert de très beauxmatériaux, où des restes notoirement chrétiens se mêlentà d’autres qui semblent provenir d’un

temple paien… Au

pied du tertre sont

des couvercles de sarcophages à acrotères

présentant une sorte

de cloison au milieu.

Au-dessous est un beau

puits rond, à escalier,

bâti en pierre de taille.

Plus bas encore est

une piscine, avec une

construction, sorte de

sacellum, à côté. A

l’angle de la porte de

la mosquée métualie,

il y a un bloc dont

deux côtés sont visibles (fi g. 232). Sur l’un

de ces côtés se voit un

palmier bien sculpté;

sur l’autre, une inscription, très régulièrement gravée, malheureusement mutilée

dans le sens de sa longueur.» E. Renan, Mission de Phénicie, in-4°, 1864,p. 680-681. Au sud-ouest de la ville sont de grandes citernesqui ont été taillées dans le roc. Un peu plus loinà l’ouest on trouve aussi des tombeaux également creusésdans le roc et des sarcophages. Survey of the WesternPalestine, Memoirs, t. i, p. 259-260.

F. Vigouboux.

JÉROSOLYMITE fl£po<roXu|i(-n; ç; Vulgate: Jerosolymita),habitant de Jérusalem ou originaire de cette

232. — Sculpture antique de la portede la mosquée de Yaroun. D’aprèsThe Survey of Western Palestine,Memoirs, t. i, p. 259. 1317

JÉROSOLYMITE — JÉRUSALEM

.1318

ville. — 1. L’auteur de l’Ecclésiastique, Jésus, fils deSirach, était Jérosolymite. Eccli., l, 29. — 2. Tous les «Jérosolymites» allaient se faire baptiser par saintJean-Baptiste. Marc, i, 5. — 3. Quelques Jérosolymites(Vulgate: quidam ex Jerosolymis) se demandent à lafête des Tabernacles si Jésus n’est pas celui que les chefsdu peuple voulaient tuer. Joa., vii, 25.

    1. JERSIA##

JERSIA (hébreu: Ya’ârésydh, «que Yâh nourrisse I» Septante: ’Iapaaéa), benjamite, un des fils de Jéroham 2,famille importante de Jérusalem. I Par., viii, 27. «JÉRUEL (hébreu: Yerû’êl; Septante: ’Iepu^X), désert(midbar, sprinoç) mentionné II Par., xx, 16. Dans ce passage,un Lévite, Jahaziel (voir Jahaziel 2, col. 1106) annonceà Josaphat, roi de Juda, qu’il rencontrera les Ammonites,les Moabites et avec eux des Maonites, «à l’extrémitéde la vallée, vis-à-vis du désert de Jéruel.» Cestribus pillardes s’étaient rassemblées au sud de la merMorte pour aller attaquer Jérusalem. C’est, par conséquent,dans cette région qu’il faut chercher le désert deJéruel, mais jusqu’ici il n’a pas été identifié. Il résulteseulement des données du texte, que le désert de Jéruelétait le nom d’une partie du désert de Juda entre Engaddiet Thécué. II Par., xx, 2, 20. Les Arabes qui serendent du sud de la mer Morte à Jérusalem suiventencore aujourd’hui la rive occidentale de la mer Mortejusqu’à Engaddi, puis, après avoir traversé un passagedifficile, inclinent à gauche vers Thécué. Voir Éd. fiobinson,Bxblical Researches, 3 in-8°, Londres, 1856, t. ii,p. 480-487. — Dans le désert de Jéruel se trouvait unlieu d’observation, ham-mispéh, spéculum, d’où l’onpouvait surveilller au loin la route. II Par., xx, 24. C’étaitsans doute une éminence qui se dressait au milieudu pays. Les combattants de la tribu de Juda découvrirentde là les cadavres de leurs ennemis jonchant au loinle pays; ils s’étaient entre-tués après avoir attaqué lesIduméens. II Par., xx, 22-24. F. Vigouroux.

    1. JÉRUSA##

JÉRUSA (hébreu: Yerûid’, «possédée;» Septante: ’Iepovaô), fille de Sadoc, femme du roi Ozias et mère duroi Joatham de Juda. IV Reg., xv, 33; II Par., xxvii, 1.

    1. JÉRUSALEM##

JÉRUSALEM (hébreu: Yerûsâlaim; Septante: ’lEpou<raXY)ti; Nouveau Testament: ’Iepouo-aMin et ta’Ieponô’Xvfia;Vulgate: Jérusalem et Jerosolyma), capitalede la Palestine. Elle tient la première place dans l’histoiredu peuple juif, dont elle fut le centre politique etreligieux, et dans les annales du christianisme, puisqu’ellea été le théâtre de la Rédemption. Nous rattachonsaux trois points suivants: noms, topographie ethistoire, en les subdivisant selon les exigences du sujet,tous les renseignements que comporte cette ville, unedes plus célèbres du monde.

I. Noms.

Jérusalem est appelée en bébreu Dbwn»,

- t:

Yerûsâlaim. L’orthographe défective du mot se rencontred’un bout à l’autre de l’Ancien Testament, à l’exceptionde cinq passages où, selon la Massore, il est pleinementécrit, D’birr! ’, YerûSâlaim, I Par., iii, 5; IIIPar., xxv, 1;

xxxii, 9; Esth., ii, 6; Jer., xxvi, 18, et encore y a-t-il,sur ce point, désaccord entre les différents manuscritset les différentes éditions. Cf. Gesenius, Thésaurus,p. 628, 629. Cette particularité se trouve de même avecle hé local, nnSurTU, III Reg., x, 2; IV Reg., ix. 28;

Is., xxxvi, 2; Ézech., viii, 3, excepté II Par., xxxii, 9,où on lit na’")wn>, avec yod. Les anciennes monnaies

tï- t:

hébraïques (fig. 233 et 234) donnent l’une et l’autre des

deux écritures, w(^U4<^, tfjwvv, YerûSalem, etV/<?/Avfi^/7/, oi’umi, YerûSâlaim. Cf. F.W. Madden,Ilistory of Jewisk coinage, Londres, 1864, p. 43-45. Cettedernière est celle des Talmuds, — L’étjmologie du nom

est un sujet fort controversé. Que signifie d’abord lepremier élément Yerû? On a voulu le rattacher à la racineyârê’, «craindre,» ou au verbe râ’âh, «voir.» Mais le sens: «ils craindront la paix» ou «ils verrontla paix (Sâlem)» est aussi difficile à expliquer que lacontraction elle-même. Reland, Palsestina, Utrecht,1714, t. ii, p. 833, suivi par Ewald, Gesehichle des VolkesIsraël, Gœttingue, 1866, t. iii, p. 165, note 4, décomposeYerûSâlaim en YerûS, «possession, héritage» (de yâras, «posséder, hériter» ), et Sâlaim, «de la paix,» juste dénominationque Salomon, «le pacifique,» aurait lui-mêmeappliquée à l’antique Jébus. Outre que cette dernière

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233. — Sicle de Simon Machahée.

bs» ")W> SpTF, «sicle d’Israël.» Coupe, aw, s l’an 2.»

nwnpn D>btn"l’, «Jérusalem la Sainte.» Verge fleurie d’Aaron

conjecture estarbitraire, il faudrait alors, suivant le géniede la langue hébraïque, que le schin supprimé fût compensépar le daguesch, ce qui n’existe pas. Gesenius,Thésaurus, p. 629, pense que yerû vient plutôt de yârâh, «fonder,» et donne à Yerûsâlaim le sens de «fondementde la paix», Friedensgrund, comme on dirait enallemand. Cette interprétation serait conforme à celle de

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234. — Monnaie de Barcochébas.

Jiyaw, «Simon,» surnommé Barcochébas (132 de notre ère).Temple tétrastyle. Au-dessus, une étoile, faisant probablementallusion au surnom de Barcochébas ou Bar-Kokab, «fils del’étoile.» — R DbiPlV rninb, «délivrance de Jérusalem.» Loulab et cédrat.

Saadia, qui, dans certains passages de l’Ecriture, Is.,xliv, 28; Li, 17; lxii, 1, 6, a traduit par f^LwJ’i, b,dâr es-salâm, «la maison de la paix,» et, Is., XL, 2, parf ^luuJI A-ôiX-o, medînat es-salâm, ce la ville de la paix.» Cf. J. Fùrst, Hebrâisches und Chaldàisches Handwôrterbuch,Leipzig, 1876, t. i, p. 547. Quant à la secondepartie du mot, nSw, Sâlaim, la ponctuation nous indique

un qeri perpétuel et nous montre que, pour les massorètes,la vraie forme était la forme pleine, D>W, Sâlaim.Ils la regardaient sans doute comme un plurieldérivé de nbtf, sâléh, >bnr, sâlaï, «repos,» dans le genre

de D>otf, sâmaîm, «les cieux,» et de d» d, tnaim, «les

-T

eaux,» ou comme un duel, d’où serait venu par contractionnbtf, ëâlêm. Quelques auteurs prétendent que

le duel s’applique justement aux deux parties de Jérusalem,la haute et la basse ville.

Nous croyons qu’il ne faut pas s’appuyer trop exclusivementsur l’orthographe massorétique, et que, pouravoir la véritable forme du nom, comme aussi peut-êtresa vraie signification, il faut le suivre à travers ses différentestranscriptions. La plus ancienne que nous connaissionsactuellement est celle que nous ont transmiseles tablettes de Tell el-Amama, où il est plusieurs fois

question d’U-ru-sa-lim. Cf. H. Winckler, Die Thontafelnvon Tellel-Amarna, Berlin, 1896, p. 303-315, lettres180, lignes 25, 46, 61, 63; 181, 1.49; 183, 1. 14; 185, 1. 1.Voir Histoire, col. 1377. Nous trouvons de même dansles inscriptions cunéiformes assyriennes Ur-sa-li-im-mu

(sa = d), T£zT ^ - «=ïf AiiHff--**. Cf. Prismede Taylor ou cylindre C. de Sennachérib, CuneiformInscriptions of Western Asia, t. i, p. 38, 39, col. iii,ligne 20; Fried. Delitzsch, Assyrische Lesestûcke, 2e édit.,Leipzig, 1878, p. 102; E. Schrader, Die Keilinschriftenwnd das À Ue Testament, Giessen, 1883, p. 290. Le nomaraméen est nbum», Yerûselêm. Cf., i, Esd., iv, 20, 24; v,

4, 14; Dan., v, 2. Les Septante ont de même traduituniformément par’Iepooo-aX^i;. Cf. Hatch et Redpath,Concordance to the Septuagint, supplément, Oxford,1900, fasc. I, p. 81, 82. La forme’Ispoo-<51.-ujji.a est plusrécente; elle se rencontre dans les livres des Machabées,i Mach., i, 14, 20, etc.; Il Mach., i, 1, 10, etc., et

existe dans le Nouveau Testament concurremment avec

— t’Ijpou<raX^[i.. La version syriaque donne eà*».50), ’UriSlem, qui se rapproche davantage de l’assyrien. Les Arabes,sans employer l’antique dénomination hébraïque, laconnaissaient cependant; Yakût, en effet, mentionne les’' f a’formes fJu*o.jl, ’Urîsalam ou’UrUalum, et fLù>, Sallam, Sallum, comme les différents noms de la cité sainteà l’époque des Juifs. Cf. Guy Le Strange, Palestine underthe Moslems, Londres, 1890, p. 83; F. Muhlau etW. Volck, W. Gesenius Handwôrterbuch, Leipzig, 1890,

p. 357. Les versions arabes offrent également p^Liojjj»,YerûSalâm. Rappelons enfin que, une fois dans la Bible,Ps. lxxvi, 3 (texte hébreu), et, d’après plusieurs, uneautre fois dans Gen., xiv, 18, Jérusalem est simplementappelée oVjr, Sdlêm, d’où le grec SdXujjia, Josèphe,

"T

Ant. jud., i, x, 2, et le latin Solyma. De ce que nousvenons de dire, il est permis de conclure que la secondepartie du nom devait être, dans sa vraie forme, Salentou Salim..Comme, d’un autre côté, ce nom existaitavant l’entrée des Hébreux en Palestine, et que le premierélément Ur, Uru signifie, d’après les syllabairescunéiformes, «ville,» hébreu’îr, il est sans doute plussimple d’expliquer l’étymologie de Jérusalem par «villede Salem >, . A. H. Sayce, dans Thevcademy, 7févrierl891,p. 138, a supposé que Salim était le nom d’une divinité.Cette opinion est combattue par d’autres. Cf. Zimmern,dans la Zeitschrift fur Assyriologie, 1891, p. 263. Lorsquel’hellénisme eut envahi les Hébreux, on défigura quelquepeu le mot grec pour lui donner un sens intelligible, ’Iepo<j<Aunâ, e l a sainte Solyme.» Cf. Josèphe, Bell. jud., Vl, x.Outre les noms primitifs d’U-ru-sa-lîm et de Sdlem,Jérusalem porta les suivants. À l’époque de Josué, desJuges et de David, elle s’appelait Jébus, hébreu: Yebûs,Jud., xix, 10, 11; I Par., xi, 4, 5; ’îr hay-Yebûsi, «laville du Jébuséen,» Jud., xix, 11, ou simplement hay-Yebûsî,Jos., xv, 8; xviii, 16, 28; Septante: ’IeëoOj.Voir Jébus, Jébuséens, coh 1209, 1210. — Le nom symboliqued’Ariel, hébreu, ’Ârî’êl, «lion de Dieu» ou «foyer de Dieu»; Septante: ’ApirjX, lui est donné parIsaîe, xxix, 1, 2, 7. Voir Ariel 5, 1. 1, col. 956. — Considéréecomme le sanctuaire de Dieu, elle est appelée’îr’Elôhîm, «la cité de Dieu,» Ps. xlv (hébreu, xlvi), 5; l lrYahvéh sebâ’ô(, «la cité de Yahvéh des armées,» Ps.XL vu (hébreu, xlviii), 9; ’îr haq-qôdéS, «la ville sainte,» Neh., II, 18. Cette dernière dénomination, r| àyt’a uô), iç,se retrouve dans le Nouveau Testament, Matth., iv, 5;xxvii, 53; Apoc, xi, 2. C’est de là que vient le nomarabe qu’elle porte actuellement, ^^JvjLH, ElrQuds, «laSainte.» On rencontre aussi dans les chroniques arabesBeit el-Muqaddas ou Beit el-Mugdis, «la sainte mai-Son,le sanctuaire.» — L’empereur Hadrien, après l’avoir

rebâtie, l’appela JElia Capitolina’. Ce nom d’Mlia, AtXâx,est habituellement employé par Eusèbe et S. Jérômedans YOnomasticon. Mais le nom sacré d’iherusalem,comme on disait au moyen âge, ou de Jérusalema subsisté jusqu’à nos jours dans la bouche des chrétiens,rappelant à leur cœur les plus grandes merveilles queDieu ait accomplies sur terre.

II. Topographie.

i. topographie moderne. —1o Situation géographique.

Jérusalem est à 31o46’30°

de latitude nord, et32o52’52o de longitude est, à 52 kilomètresà vol d’oiseau (62 par la route) de Jaffa, à 22 dela mer Morte (environ 38 par la route de Jéricho), à30 d’Hébron et 50 de Naplouse. Elle occupe un des plateauxde la chaîne montagneuse qui traverse la Palestinedu nord au sud et en forme comme l’épine dorsale.Son point culminant est à 775 mètres (790 suivant quelques-uns) au-dessus de la Méditerranée et 1168 (ou 1183)au-dessus de la mer Morte. Bien que très élevé, il n’atteintpas l’extrême hauteur de la chaîne, qui, à Hébron,va jusqu’à 927 mètres. Aussi la ville est-elle entouréede collines qui constituent comme une enceinte de fortificationsnaturelles. En dehors d’une première ceinturequi la couvre immédiatement, et dont les forcesprincipales sont le mont Scopus au nord (831 mètres) etla montagne des Oliviers à l’est (818 mètres), elle estprotégée, à une petite distance, par une série de fortsavancés, Nébi Samuîl (895 mètres), Tell el-Fûl (839 mètres) au nord, Beit Djâla (820 mètres) au sud. Elle resteplus ouverte du côté de l’ouest, où l’on remarque cependantencore quelques hauteurs importantes. Le poète sacréavait donc raison de dire, Ps. cxxiv (hébreu cxxv), 2(d’après l’agencement des vers proposé par G. Bickel 1, CarminaVeteris Teslanienh metrice, Inspruck, 1882, p. 90):

Jérusalem est solidement établie,

Des montagnes l’entourent.

Il faut néanmoins tenir bien compte des cotes que nousvenons de donner. La ville sainte n’a rien, par exemple,de l’aspect d’Athènes, qui s’étale au milieu d’une plainefermée de trois côtés par des montagnes, dont les massessuperbes la dominent complètement. Elle est resserréedans un groupe compliqué de collines d’inégale hauteur,qui en rendent l’accès difficile et la défense aisée;aussi Tacite, Hist., v, 11, l’appelle-t-il arduam situ. Poury arriver du côté de l’ouest, il faut, à partir de la Séphélah,gravir une série d’échelons qui s’étagent plus oumoins doucement; mais, du côté de l’est, la montée estabsolument raide. Comme d’ailleurs, vers le sud et lenord, l’altitude n’est dépassée que par quelques points,et que le pays en’général est à un niveau inférieur, l’expression «monter à Jérusalem», souvent employée parl’Écriture, est donc parfaitement exacte. Cf. II Reg., xix,34; III Reg., xii, 28; xiv, 23; Matth., xx, 17, 18; Marc, xv,41, etc. Du plateau sur lequel la ville est bâtie, les eauxs’en vont, par un double versant, vers la Méditerranéeet vers la mer Morte (fig. 235, 237).

Jérusalem est reliée à toute la Palestine par un résea» de routes qui y aboutissent comme à un centre. Voir lacarte des environs de Jérusalem. De Jaffa, en dehors duchemin de fer, qui fait un assez long circuit à traversasvallées avant d’atteindre la ville sainte, une routacarrossable passe par Ramléh, Latrîm, Qariyet el-Enahet Qolûniyéh. Plus haut, un chemin se dirige parLydda,vers Djimzu, où il se bifurque pour aller, d’un côté,vers Beit Nûba, Biddu, Beit-Iksa, et, de l’autre, versBeit Vr (Béthoron) et El-Djib (Gabaon). De Gaza, l’onmonte par Dhikrin où* Beit Djibrin, d’où les sentiers sedivisent à travers la montagne. D’Hébron une routecarrossable passe près de Bethléhem. Une autre vientde Jéricho, reliant Jérusalem au Jourdain, à la merMorte et à la région transjordane. Enfin, vers le nord,se trouve la route séculaire qui vient de la Galilée etde la Samarie. Nous ne parlons que des voies princi

pales, qui, de la côte méditerranéenne", de l’Egypte, dudésert, des pays de Moab et de Galaad, de la plaine d’Esdrelon,donnent accès à l’antique capitale de la Judée-Unfait à remarquer cependant, c’est que Jérusalem esten dehors de la voie militaire et commerciale que fréquentèrentles armées et les caravanes qui allaient del’Egypte vers Damas et l’Assyrie. Dieu, qui voulut isolerson peuple au milieu du monde païen, voulut aussi placersa capitale comme un nid d’aigle au sein de rochersabrupts. C’est pour cela sans doute qu’il ne choisit pas

exigences d’une place forte. Le roi comprit son importance,s’en empara et en fit, pour des siècles, le boulevardpolitique et religieux de la nation. Pour bien saisircette importance, il nous faut maintenant examiner avecsoin les conditions naturelles du terrain sur lequel estbâtie Jérusalem.

Configuration et nature du terrain.

Jérusalem

occupe un plateau allongé, entouré de trois côtés, à l’est,au sud et à l’ouest, de ravins profonds, qui lui donnentl’aspect d’un promontoire. Voir la carte et les coupes du

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237. — Plan des environs de Jérusalem.

Sichem, située pourtant au centre même de la TerreSainte, presque à égale distance des frontières septentrionaleet méridionale, de la Méditerranée et du Jourdain,dans une vallée des plus fertiles, mais dans unpays beaucoup plus ouvert que la Judée. Il n’en est pasmoins vrai cependant que la position même de Jérusa3em devait attirer l’attention de David, au moment d’étailirle siège de son royaume. Tant qu’il ne régna quesur Juda, Hébron était sa capitale toute naturelle. Mais,des qu’Israël se fut rangé sous son sceptre, il dut reporterplus haut le centre de sa domination. Or, les deuxtribus qui, jusque-là, s’étaient disputé la royauté, étaientTJenjamin et Juda. Juste sur la frontière des deux setrouvait l’antique Jébus, qui, par les caractères physiquesdont nous allons parler, répondait d’ailleurs aux

terrain (fig. 236-237). Ces ravins naissent à peu de distanceau nord de la ville, et ils se rejoignent au sud, àenviron 200 mètres au-dessous de leur point de départ;d’abord simples plis de terrain, ils se creusent très rapidement.Celui de l’est, qui, dans sa partie supérieure,porte le nom d’Ouadi el-Djôz, puis, entre la cité sainteet le mont] des Oliviers, celui d’Ouadi Silti Mariam,forme la vallée du Cédron. Après quelques contours pendantlesquels, peu marqué encore, il descend d’une quarantainede mètres, il se dirige à angle droit vers le sudet se creuse peu à peu comme un véritable fossé. Sur ladroite vers la porte de Saint-Etienne, ses bords s’élèventà une hauteur de trente-cinq à quarante mètres. Au-dessous,la vallée se resserre graduellement et baisse deplus en plus. Un peu avant d’arriver en lace de l’angle </3 «T-’-V-r

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7, — Plan de Jérusalem et des environs, avec les courbes de niveau. D’après le Survey of Western Palestine. Jérusalem.

sud-est dn Haram esch-Sehérif, elle est comprimée entreles flancs des collines. De son point d’origine jusqu’à cetendroit, elle a baissé de près de cent mètres. Contournantensuite l’angle sud-est de l’ancien mont Moriah,elle longe, en s’élargissant, le pied de la colline d’Ophel,qui descend elle-même graduellement vers le sud. Bientôt,enfin, après une longueur totale d’environ deux kilomètres,elle fait sa jonction avec l’Ouadi er-Rebàbi ouvallée de Hinnom. Voir Cédron 1, t. ii, col. 380. Cettedernière commence à l’ouest de Jérusalem, à la piscineappelée aujourd’hui Birket Mamillah, à une altitudede 783 mètres. Après avoir suivi d’abord la direction dusud-est, elle descend vers le sud, en longeant la colline

principales. Voi* coupes CD, GHC’est l’idée généralequ’en donnent Josèphe, Bell. jud-> V, iv, 1, et Tacite,Hist., v, 11; c’est l’impression que produit immédiatementla vue qu’on découvre soit du sommet de la portede Damas, soit de la terrasse des sœurs de Sion. On lavoit traversée du nord au sud par une vallée recourbée,large et profonde, les maisons s’étageant sur les pentes,surtout du côté occidental. Cette vallée, qui s’étend dela porte de Damas à la piscine de Siloé, et dont nousne connaissons pas le nom primitif, est celle que l’onappelait à l’époque romaine le Tyropceon, ou «le quartierdes fromagers», Elle forme une dépression beaucoupplus sensible que toutes les autres malgré"

238. — Jérusalem. Vue prise de l’est-nord-est. D’après une photographie de M. L. Heidet (1901).A gauche, le mur oriental du Temple et la mosquée d’Omar. Au milieu, le clocher du Moristan. À droite, le clocher de l’église Saint-Sauveur.A Fextrémité, à droite, Notre-Dame-de-France. Au-dessous de la ville, la route à droite est celle qui mène à Anathoth;celle de gauche conduit à Béthanie et à Jéricho. Au-dessous, la vallée du Cédron. L’éminence à gauche est le Vin Gahlxi, prolongementdu mont des Oliviers.

habituellement nommée le mont Sion, puis, en la contournant,elle reprend la direction de l’est et vientaboutir à la vallée du Cédron. La réunion des deuxravins, à une altitude de 600 à 610 mètres, forme unassez large carrefour, borné au nord-ouest par desjardins en terrasses, au sud-ouest par les champs d’IIaceldamaet la montagne du Mauvais Conseil, et à l’estpar le mont du Scandale. Le fond de la vallée est ici àprès de cent vingt mètres au-dessous de la plate-formedu Temple. Ces deux ravins, courant entre deux chaînesparallèles de hauteurs, constituent donc comme lesfossés naturels de Jérusalem, qui n’est accessible, àpeu près de plain-pied, que du côté du nord.

En examinant le plateau lui-même sur lequel est bâtiela ville, nous arrivons à constater, malgré les monumentsqui le recouvrent et les bouleversements qu’il asubis, que son niveau n’est pas égal partout, mais qu’ilest irrégulièrement coupé par des vallées. Au premieraspect, Jérusalem paraît bien assise sur deux collines

l’énorme quantité de décombres qui, dans la suite dessiècles, lui ont enlevé sa profondeur primitive. Elledécrit une sorte de croissant au milieu du terrain, délimitantdeux massifs de forme, d’étendue et de hauteurinégales. Mais, outre cette vallée centrale, il y en a detransversales, qui permettent de reconnaître, dans lacolline occidentale comme dans la colline orientale, deséminences distinctes. Celle de l’ouest est séparée endeux par une vallée peu profonde et peu large qui descendde la citadelle actuelle, laissant au nord le Saint-Sépulcre,au sud le quartier arménien et le Cénacle.Voir coupe AB. La partie méridionale forme un rectangle,presque un carré, avec une proéminence au nordest;la partie septentrionale, en raison de la courbe dela vallée centrale, a presque la forme d’un losange terminéde deux côtés par les vallées, des deux autres parles murs actuels de la ville. «La colline orientale formedans sa partie sud un triangle dont la pointe est à lafontaine de Siloé, la base contre le mur actuel de l’en

ceinte du Haram csch-Schérif. Là, par une dispositionsingulière des roches, elle tourne pour suivre la valléecentrale, de l’orient au nord-ouest, jusque près de la finde l’enceinte du côté du nord; une légère dépression durocher, allant de l’ouest à l’est, se contond, avant derejoindre le Cédron, avec une vallée venue du nord quiforme, à l’établissement de Sainte-Anne, la piscine deBethesda. De plus, environ 150 mètres plus loin, vers lenord, une coupure, agrandie artificiellement, mais existantavant les œuvres d’art, termine au nord la collineorientale; c’est à ce point, derrière la masse rocheusequi surplombe l’enceinte du Haram, que se trouve ladouble piscine des sœurs de Sion. Dans leur églisemême, commence le rocher d’une quatrième colline,nommée Bézctha. Il est à remarquer que les deux collinesdu nord, celle du Saint-Sépulcre et celle qu’onest convenu d’appeler plus spécialement Bézetha, où setrouve la mosquée des derviches, se continuent séparémenten dehors de la ville actuelle: on a dû, pourmettre le mur en saillie par rapport à l’extérieur, pratiquerde larges coupures dans le rocher. Si l’on veutmaintenant comparer l’une à l’autre dans leur ensemble,la colline orientale et la colline occidentale, il faut reconnaîtreque la colline de l’ouest domine celle de l’est,dans toute son étendue, surtout si l’on compare l’uneavec l’autre les deux parties du sud qui portaient l’ancienneville. La vallée qui les sépare étant courbe enforme de croissant, aucune des deux collines ne peutêtre dite parfaitement droite; mais celle de l’occident,surtout dans son extrémité, méridionale, terminée ausud et à l’ouest par deux vallées droites, est droite surson axe, tandis que la colline orientale, suivant pour ainsidire le mouvement de la vallée centrale, terminée àl’orient par des vallées presque parallèles à celle dumilieu, affecte d’une manière remarquable la forme d’uncroissant.» J. Lagrange, Topographie de Jérusalem,dans la Revue biblique, 1892, p. 20.

Les éminences sur lesquelles Jérusalem est bâtie peuventdonc en somme se décomposer ainsi. La plus vasteest ^elle du sud-ouest, communément appelée montSion (775 mèlres d’altitude). Au nord se trouve cellequi renferme le SaintSépulcre et dont le niveau n’estguère différent. Dans la colline orientale, on distinguetrois plateaux diminuant de hauteur du nord au sud:Bézétha (767 mètres), Moriah (742 mètres) ou la montagnedu Temple, et Ophel, colline triangulaire resserréeentre le Cédron et la vallée de Tyropœon. Cette dernière,plane à sa partie supérieure, s’incline rapidement ausud par une série d’étages; sa longueur est d’environ500 mètres et sa largeur moyenne d’une centaine demètres. Voir coupe EF. Nous ne parlons pas de la collineA’Acra que bon nombre d’auteurs placent à tort aunord du quartier juif, entre l’église du Saint-Sépulcre etle fond de la vallée qui traverse la ville du nord au sud,là à peu près où se trouve le sérail actuel. Acra faitpartie d’un problème topographique que nous n’avonspas à discuter ici. Les ingénieurs anglais ont relevétous les détails de nivellement à travers la ville sainte.Cf. Survey of Western Palestine, Jérusalem, Londres,1884, p. 274-292; voir la carte de VOrdnance Survey, oula réduction qu’en donne le Palestine ExplorationFund, Quarlerly Statement, Londres, 1889, p. 62.

La ville de Jérusalem est assise sur un terrain calcairequi plonge légèrement vers la mer Morte. Les couchessupérieures, appelées de leur nom local Ndri et Kakùli,se trouvent sur le sommet et les pentes de la montagnedes Oliviers. Le nâri, sorte de calcaire tabulaire jaunâtreet parfois rougeàtre, est identifié avec les bancsnummulitiques qu’on rencontre sur le Garizim et leCarmel. Le kakùli est une pierre tendre, blanchâtreavec silex, coquillages marins et fossiles, exploitée endivers points des environs comme pierre de construction.Au-dessous, la roche comprend des coliaiie» à

rudistes, dont la partie supérieure se compose d’assisesde calcaire marmoréen très compact, gris-clair, dont lacassure montre des sections de gastéropodes qui ontleur têt spathifié (actéoneïles, nérinées, etc.). On donneà celui-ci le nom de metzéh. On le voit apparaître surle sommet du Moriah, au Calvaire, près des portes deJaffa et de Damas; dans ses bancs a été creusée la grottede Jërémie. Sous le mezzéh est une épaisse couche calcaired’un beau blanc, très tendre au sortir de la carrière,mais durcissant à l’air et fournissant des matériauxtrès solides de construction. On la désigne sousle nom de mélékéh, qui rappelle le terme de banc royalsi souvent employé par nos carriers français. On voitencore au nord de la ville d’anciennes et vastes carrièresd’où l’on a tiré cette pierre, qui a servi aux grandiosesconstructions de l’ancien Temple. Ces excavations souterrainesétaient appelées dans l’antiquité même cavernesroyales. Voir Carrières, t. ii, col. 319-322 et fig. 97,col. 321. Enfin, aux environs de Jérusalem, les calcairescrétacés renferment à leur base des ammonites dontcertaines espèces sont de taille considérable. Ces calcairesà rudistes, qui s’étendent sous la ville sainte etaux alentours, et particulièrement le mélékeh, dont lescouches sont épaisses, ont eu un rôle important dansson histoire. C’est dans ces roches qu’ont été creusésréservoirs, aqueducs, caveaux funéraires, excavationsde toute sorte qui ont servi à l’entretien de la vie ouaux dépouilles de la mort. C’est de là, peut-on dire, quela ville elle-même est sortie. Pour la géologie, cꝟ. 0.Fraas, Aus dem Orient, Stuttgart, 1867, p. 49-67; Ducde Lujnes, Voyage d’exploration à la mer Morte,t. iii, Géologie, par M. Lartet, Paris (sans date), p. 8185; Palestine Exploration Fund, Quarlerly Statement,Londres, 1887, p. 50.

Description de la ville.

i. Aspect général.

— Jérusalem est une ville singulière, non seulement parla majesté de ses souvenirs, mais encore par l’étrangetéde son aspect. Des vieilles cités du monde oriental, seuleelle est restée debout. Memphis n’est plus qu’un champde palmiers, Thèbes, un amas de ruines gigantesques,Babylone et Ninive des collines dont il faut ouvrir lesflancs pour retrouver les vestiges de l’antiquité. Assurémentla ville sainte n’est plus ce qu’elle était au tempsde David, des prophètes et du Christ. Rebelle néanmoinsà tous les rajeunissements qu’ont subis Athènes et Rome,elle garde toujours son air d’austère vieillesse. Ignorantla vie fiévreuse, le bruit et les plaisirs de nos capitales,elle a le silence qui convient à la gardienne d’un tombeau.Perdue dans un désert de pierres, au fond duquels’étendent les eaux infécondes de la mer Morte, ellesemble dormir dans son enceinte de vieilles murailles.Alors que le Nil et l’Euphrate faisaient la gloire et lajoie des antiques cités qu’ils arrosaient, aucun fleuve nel’embellit et ne reflète la majesté de ses monuments;ce n’est que par métaphore que le psalmiste a dit: «Lecours d’un fleuve réjouit la cité de Dieu.» Ps. xlv(hébreu, xlvi), 5. C’est du mont des Oliviers qu’il fautla contempler pour la bien juger dans son ensemble. Aupremier plan, dans le périmètre des murs crénelés, seprésente la vaste esplanade de l’ancien Temple, surlaquelle se dresse aujourd’hui l’imposante et magnifiquemosquée d’Omar, avec sa coupole, ses faïencesémaillées, ses mosaïques coloriées. Puis viennent lesmaisons, qui se pressent les unes contre les autres,surmontées de petites coupoles rondes, ou de terrasses,échelonnées sur le penchant des deux collines, et reflétantdiversement la lumière qui les monde. Au-dessuss’élèvent çà et là des minarets, de hauteur et de formevariées, puis les grandes coupoles des synagogues et deséglises, parmi lesquelles domine celle du Saint-Sépulcre.Cet aspect a quelque chose de gracieux, si on le compareà l’intérieur de la ville, où un labyrinthe de ruesétroites, irrégulieres, mal pavées, glissantes et peu pro

près, se ramifie au milieu de constructions aux mursvieux, mal bâtis, crevassés, dépourvus d’enduits. Desportes basses, à demi brisées, quelques fenêtres discrètementgrillées donnent sur les rues, qui, en plusieursendroits, particulièrement où il y a des bazars, sontcouvertes de voûtes percées à jour ou de toiles qu’onétend pour arrêter les rayons du soleil.

S. Enceinte et portes. — Jérusalem est entourée d’uneenceinte qui forme une espèce de trapèze irrégulier,dont les côtés les plus longs sont au nord et au sud.(Voirie plan, fig. 237.) Cette enceinte, composée de murshauts de 12 à 15 mètres sur une largeur d’environ unmètre, est fortifiée de tours et de bastions, avec desangles rentrants et saillants; le circuit est de 4870 mècolonne monumentale qui l’ornait autrefois ou s’élevaitdans les environs. Avant le xiiie siècle, elle s’appelaitporte de Saint-Étienne, parce que l’église dédiée à cemartyr était près de là. Défendue par deux avant-corps,surmontée d’une série de mâchicoulis couverts, dominéseux-mêmes par de légers créneaux accouplés, elleprésente un beau spécimen de l’architecture duxvie siècle. Des fouilles ont prouvé qu’elle était bâtiesur l’emplacement d’une autre, plus ancienne, car on atrouvé, outre une piscine, un reste de mur, allant del’est à l’ouest, composé de blocs à refends. Les grosblocs de pierre qui servent de base aux petites toursdont elle est flanquée à droite et à gauche, faisaientautrefois partie des antiques tours des femmes. Cf. Jo240. — Porte de Damas (Bâb’el-’Amûd).

très; on peut facilement le parcourir en une heure environ.Elle décrit sur ses différents côtés plusieurssinuosités, excepté à l’est, au-dessus de la vallée deJosaphat, où elle suit une ligne régulière. Elle n’enfermepas tout l’ensemble des collines qui portaientautrefois la ville; elle laisse en dehors une bonne partiedes hauteurs méridionales. Élevée par le sultan Soliman,en 1534, elle paraît répondre assez exactement auxmurailles des croisades, avec des vestiges plus anciensen différents points. Elle est percée de huit portes, dontune est murée; nous les examinerons successivement.La muraille du nord présente une ligne ona-lée quisuit pittores’quement les couches crétacées sous-jacentesprofondément entaillées et bizarrement contournées.Une porte nouvelle, dite Bâb Abdùl Hamîd, a été pratiquéeen 1889 dans l’angle nord-ouest. Plus haut, versle milieu du rempart, se trouve la belle porte de Damasou Bâb’el-’Amûd, «la porte de la colonne» (fig. 240).Le premier nom lui vient de ce qu’elle débouche surla route qui conduit, au nord, vers la capitale de laSyrie; le secçnd fait sans doute allusion à quelque

sèphe, Bell. jud., V, ii, 2. Plus loin, en se dirigeant versl’angle nord-est, on atteint une poterne appelée ported’Rérode, ou Bâb es-Sâhiri, ou Zahiréh. Ouverte parHérode Agrippa dans un puissant bastion, Ibrahimpacha la fit murer en partie, tout en conservant unepetite entrée dans l’épaisseur de la maçonnerie.

La façade orientale de l’enceinte, c’est-à-dire cellequi suit la vallée du Cédron, est des plus intéressantesà étudier. Les soubassements de la muraille sont évidemmentd’une haute antiquité: ce sont d’énormespierres, longues de plusieurs mètres, admirablement-jointes et taillées en bossage. Les parties supérieuressont plus modernes et, çà et là, lesTurcs ont grossièrementbouché les brèches avec des moellons placéssans ordre. Une seule porte est percée de ce côté: lesArabes l’appellent Bâb el-Asbàt; les chrétiens BâbSilti Maryam, «porte de Madame Marie, «parce quele chemin qui part de là descend vers le Tombeau dela sainte Vierge (fig. 2M).On la nomme encore Porte deSaint-Etienne, soit parce qu’il y avait peut-être dansles alentours un oratoire dédié au premier martyr,

soit parce qu’une fausse tradition du moyen âge plaçaitdans la vallée le lieu de sa lapidation. De dimensionsassez restreintes, elle est dominée par une éléganteguérite armée de mâchicoulis, portant de chaque côtédeux niches ogivales. À gauche et à droite, deux lionsen demi-relief se regardent et mettent une patte sur unécu arrondi. De ce point jusqu’à l’angle sud-est s’étendl’enceinte qui servait à protéger la ville et à soutenir lesgigantesques terrassements sur lesquels s’élevait leJemple. Là, les vieilles assises sont encore visibles àune très grande hauteur, avec des pierres énormes dontles assemblages sont parfaits et dont la taille a résisté

cette muraille constituée par d’énormes pierres admirablementassemblées, taillées en bossage et reposantdirectement sur le roc. Cf. Wilson et Warren, The recoveryof Jérusalem, in-8°, Londres, 1871, p. 135-159;Survey of Western Palestine, Jérusalem, Londres,1884, p. 141-158.

Vers l’angle du sud, le rempart a une très grandeélévation, et la pente de la vallée devient extrêmementraide. On a de la peine à suivre le pied de l’enceinte, quiremonte alors, en décrivant une ligne irrégulière, versl’ouest, c’est-à-dire vers la colline dite de Sion. Deuxportes sont actuellement ouvertes dans la muraille mé241. — Porte de Sainte-Marie (Bâb Sitti Maryam) ou Porte de Saint-Étienne.

au temps. Au milieu de ce rempart, se trouve la porteDorée ou Bâb ed-Dâhiriyéh, la plus remarquable detoutes par la profusion de ses ornements. Elle estmurée depuis longtemps, parce qu’une tradition, toujoursvivante chez les Musulmans, prétend qu’un conquérantchrétien entrera un jour par là, un vendredi,et leur enlèvera Jérusalem. Elle se composeextérieurement de deux pieds-droits surmontés de chapiteauxsculptés, supportant deux arcades dont les archivoltesoffrent des moulures chargées d’ornements,d’acanthes ou de rinceaux de feuillages. Le capitaineWarren, qui a fait des fouilles devant cette porte, en atrouvé une autre plus ancienne, dont les fondementsétaient à onze mètres environ sous terre. Les remparts,en effet, du côté de l’orient, descendent à une énormeprofondeur sous le sol. C’est ce qu’ont prouvé les travauxdu même explorateur, qui, après avoir creusé àl’angle sud-est un puits profond de 26 mètres, terminépar une galerie horizontale, a rencontré la base de

ridionale. Pour celles qu’on appelle Double, Triple, Simpleporte, voir Temple. La première que l’on trouve envenant de l’est se nomme Bâb el-Moghâribéh ou desMaugrebins; elle est située à peu près au centre del’ancienne vallée de Tyropœon. La seconde Bâb enNebiDdûd, «porte du prophète, David,» ou encore porte deSion, est dans une tour de l’enceinte. Flanquée de deuxniches élégantes, surmontée de rosaces et d’entrelacsgracieux, elle a deux battants garnis de fer, et, selonune inscription, date de l’an 947 de l’hégire (1510-1541).Enfin, à l’occident, la muraille, fortifiée de distanceen distance, vers le sud, par de grosses tours carrées,est percée d’une seule porte appelée par les Européensporte de Jaffa, par les Arabes Bâb el-Khâlil, «ported’Hébron» (fig. 242); là, en effet, aboutissent les routesqui conduisent à ces deux villes. Cette ouverture a trèspeu d’ornements, mais elle est assez spacieuse; les portesgarnies de fer, sont énormes. C’est un des passages lesplus fréquentés de la ville. Tout près est la citadelle, el

Qala’ah (fig. 243), qu’on a faussement nommée châteaude David. Elle occupe un carré irrégulier, long de 133 mètres,du sud au nord, et large de 100 mètres de l’est àl’ouest. C’est un assemblage de tours carrées, primitivemententourées d’un fossé, qui existe encore en grandepartie. Les soubassements se composent d’une épaissemuraille qui s’élève du fond du fossé en formant unangle d’environ 45 degrés. La tour principale, appeléepar les Francs tour de David, est celle du nord-est. Ceténorme quadrilatère, long de 21 m 40 et large de 17, estbâti, jusqu’à une hauteur de 12 mètres, à partir dupied, en grosses pierres à refends, mais à surface brute,moins grandes que celles de l’enceinte du Haram. Cesondements sont donc anciens, comparés surtout aux

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242. — Porte de Jaffa (Bâb el-KhâKl).

assises supérieures, dont l’ensemble s’élève de 10 mètresplus haut, et qui ont à peu près l’apparence des autresmurailles voisines, de construction moderne. Du côtéextérieur, la citadelle est défendue par des glacis anciensréparés par Ibrahim pacha. À l’intérieur, elle neprésente rien de bien remarquable, si ce n’est quelquesgrandes salles fort délabrées servant aujourd’hui de caserneet d’arsenal. Cf. C. Schick, Der Davidsthurni inJérusalem, dans la Zeilschrift des Deutschen Paldstina-Vereins,Leipzig, 1. 1, 1878, p. 226-237, avec plans. Signalonsenfin, à l’angle nord-ouest de la ville, les restes d’uneforteresse dite Qasr Djdlûd, «. forteresse de Goliath.» Les vestiges les plus anciens comprennent au sud lessoubassements d’une forte tour quadrangulaire; on reconnaîtencore quatre assises de grosses pierres en taillelisse. Quatre gros piliers, composés de blocs à bossage,forment le centre de cette construction.

3. Intérieur: rues et quartiers; monuments et souvenirs.— En pénétrant à l’intérieur de la ville, onremarque que «les habitations, en général très petites,sont établies sur un plan tout à fait spécial. À cause de

la rareté du bois de construction, elles n’ont ni plancherni toit, mais le premier étage et la terrasse supérieuresont entièrement en pierre. À cause des pluies abondantesde l’hiver, dans cette région de la Palestine, lesterrasses sont recouvertes de coupoles hémisphériquesqui présentent un aspect singulier lorsqu’on regarde laville du haut d’un monument élevé. Comme ces voûtes,si elles avaient une portée trop considérable, n’offriraientpas une solidité suffisante, les chambres sont en généralassez petites, presque carrées et à peu près toutesd’égale grandeur. Les escaliers, toujours excessivementétroits, partent d’une cour minuscule et aboutissent àun palier extérieur qui permet de circuler autour del’habitation. Quelques-unes de ces maisons datent évidemmentde l’époque des croisades et présentent encoredes entrées voûtées en ogive, des portes sculptées, desécussons armoriés, des fenêtres à meneaux, à accoladesgarnies de moucharabiéhs élégants et finement découpés». Lortet, La Syrie d’aujourd’hui, dans le Tour dumonde, t. xlii, 1881, p. 102.

Dans le dédale des rues qui coupent la ville en différentssens, il est facile de distinguer plusieurs lignesprincipales, dont la régularité, conforme au mouvementdu terrain, rappelle les grandes artères d’autrefois. Elleslimitent en partie et les collines que nous avons décriteset les quartiers dont nous allons parler. (Voir le plan,fig. 244.) La première va directement du nord au sud,de la porte de Damas à la porte de Sion, prenant lenom de Tariq Bâb el-Amûd dans la partie septentrionaleet celui de Tarîq Hâret en-Nébi Daûd dans la partieméridionale. Elle suit la direction de la longue avenuebordée de portiques, construite dans JEXia Capitolinasous l’empereur Adrien, et dont on a retrouvé des vestigesdans les nombreux tronçons de colonnes qu’onaperçoit non loin des couvents des Abyssins et desCoptes, à l’est du Saint-Sépulcre. La seconde coupecelle-ci transversalement, en allant de l’ouest à l’est, dela porte de Jaffa à l’une des portes du Haram, appeléeBâb es-Silsiléh ou «porte de la Chaîne». Elle suit lepli de terrain qui sépare le mont Sion de la colline septentrionale.La troisième marque la direction de la valléedu Tyropœon, partant de la porte de Damas pourretomber directement dans la Tarîq Bâb es-Silsiléh etaboutir par certaines ramifications à la porte des Maugrebins.Une quatrième enfin va de Bâb Sitti Maryam,à l’est, rejoindre cette dernière à l’ouest, séparant lemont Moriah de Bézétha; une partie constitue ce qu’onappelle la Voie douloureuse, qui, après un coude versle sud-est, continue du côté de l’occident.

Division de Jérusalem, en quatre quartiers. — Premierquartier: quartier des chrétiens. — Il est situé au nordouest,dans l’angle compris entre la porte de Jaffa etcelle de Damas. Couvents et maisons sont groupés autourde l’édifice le plus vénérable de la ville, la basiliquedu Saint-Sépulcre. Au temps de Notre-Seigneur,le Calvaire était en dehors des remparts, comme nousle montrerons plus loin, en parlant de la topographieancienne de la sainte cité. Tout près était le tombeauqui reçut le corps ensanglanté du Sauveur, et d’où ilsortit vivant et glorieux. C’est donc sur ce petit coin deterre qu’eurent lieu les dernières scènes de la Passion.C’est dans une citerne voisine que sainte Hélène, dit-on,découvrit la vraie Croix. Voir Croix, t. ii, col, 1130.Ces trois endroits, véritables sanctuaires marqués parla piété des fidèles et une constante tradition, furentenfermés, sous Constantin, dans la magnifique basiliquesi célèbre sous le nom de Saint-Sépulcre. Pour lesdétails, voir Calvaire, t. ii, col. 77; Sépulcre (Saint).A l’est du Saint-Sépulcre sont les couvents des Abyssinset des Coptes. Vers le nord-est, se trouve le couventgrec de Saint-Caralombos, et, vers le sud-est, l’établissementrusse. En construisant ce dernier, on découvrit deuxpans de murs anciens, dont l’un était dirigé de l’ouest à

l’est, l’antre du sud au nord, chacun d’eux ayant un seuilde porte antique; un arc byzantin de grandioses proportionsfut déblayé. Cf. Guthe, Die Ausgrabungen aufdem russischen Platz im Frûhjahr, 1883, dans, la Zeitschriftdes Deutschen Palàstina-Vereins, Leipzig, t. viii,1885, p. 247-259, pl. vi, vu; C. Schick, Weitere Ausgrabungenauf dem russischen Platz, dans la même revue,t. xii, 1889, p. 10-18, pl. i-iv. Suivant certains auteurs,ces murs appartiendraient à la seconde enceinte de Jérusalem.Ils proviennent plutôt, selon d’autres, du Martyriumqui faisait partie de la basilique constantiniennedu Saint-Sépulcre. Quelques-uns enfin cherchent à concilierles deux sentiments et voient ici un tronçon del’atrium bâti sur l’emplacement et probablement avec

deux couvents. Sur le Morislàn, on peut voir: PalestineExploration Fund, Quarterly Statement, Londres,1872, p. 100; 1875. p. 77-81; 1889, p. 113-114; 1895,p. 248-249; VVilson et Warren, The recovery of Jérusalem,Londres, 1871, p. 268-274; Survey o{ WesternPalestine, Jérusalem, p. 254-261; Zeitschrift desDeutschen PaldstinaVereins, Mittheilungen, 1895,p. 6-7; M. Hartmann, Der Murïstân von 800 bis 1500,et C. Hoffmann, Die Besitzergreifung und Verwerthungdes Johanniterplatzes in Jérusalem 1869-1898,dans la même revue, Mittheilungen, 1898, p. 65-80,avec plans, p. 75 et 78.

A l’ouest du Saint-Sépulcre, les Grecs schismatiques,très puissants en Palestine, ont leur quartier central.

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243. — Citadelle (El-Qalaah) et Tour de David.

les magnifiques assises judaïques de la deuxième muraille.Cf. V. Guérin, Jérusalem. Paris, 1889, p. 260;Germer-Durand, La basilique du Saint-Sépulcre, dansla Revue biblique, Paris, 1896, p. 329; Lagrange, L’inscriptioncoufique de l’église du Saint-Sépulcre, dans lamême revue, 1897, p. 645. Sur les environs immédiatsdu Saint-Sépulcre, on peut voir dans la Zeitschrift desDeutschen Palastma-Vereins, t. viii, 1885, pl. vii, unexcellent plan dressé par C. Schick.

Au sud de la basilique s’étend une grande place rectangulaireet pleine de ruines, appelée Moristdn, nomarabico-persan qui veut dire «hospice». Charlemagne,au commencement du ixe siècle, fonda là pour les pèlerinslatins un hospice qu’il enrichit d’une magnifiquebibliothèque et confia à la garde des moines bénédictins.Après diverses vicissitudes, on éleva en cet endroit unhôpital, qui passa aux chevaliers de Saint-Jean, appelésdans la suite chevaliers de Rhodes et de Malte. En 1869.la moitié orientale du Moristân a été donnée à laPrusse, qui a relevé l’église. La partie occidentale appartientaux Grecs schismatiques, qui y ont construit

Le patriarcat renferme une bibliothèque très riche enmanuscrits grecs et syriaques. Les couvents sont ceuxde Saint-Michel, de Saint-Nicolas, de Panagia Méléna, deSaint-Démétrius, et le grand couvent. Plus bas et parallèleau Moristân, se trouve un vaste réservoir appelé BirketHammam el-Batrâk, dont nous parlons plus loin (régimedes eaux). À l’extrémité de l’angle formé par lesmurailles sont les établissements catholiques: le grandcouvent des Pères Franciscains, avec une église paroissialedédiée au saint Sauveur, la Casa Nuova, maisondans laquelle ils reçoivent les pèlerins, le patriarcatlatin, qui renferme une belle église dédiée au saint nomde Jésus, et enfin les écoles des Frères. Un dernier pointà remarquer, à l’angle nord, formé par les rues Khotel-Khanqah et Tariq Bàb el-Amûd, c’est ce qu’on aappelé la Porte judiciaire, celle par laquelle Notre-Seigneurserait sorti de la ville pour aller au Calvaire. Ona cru en reconnaître les restes dans de grosses pierresvisibles dans les pieds-droits soutenant la voûte du Sûqes-Semani, ou «bazar de l’huile». Près de là, dansune chapelle, on voit encore debout une colonne anti

que qu’on rattache à cette porte. Cet emplacement escontesté. Voir plus loin: Topographie ancienne.

Second quartier: quartier arménien. — Il s'étend ausud du quartier précédent. Plus abandonné encore quecelui-ci, il renferme cependant quelques ruelles intéressantes, avec des passages voûtés, des constructions pittoresques, quoique souvent fort délabrées. La partie quitouche les murailles, au sud de la caserne turque, estoccupée par de grands jardins. À l’est de la citadelle,se trouve l'église anglicane du Christ. Plus bas sontl'église et le couvent des Arméniens. Cette dernière ala forme d’une croix grecque et est dédiée à saintJacques le Majeur. Elle contient, en effet, dans le côtéseptentrional, une petite chapelle bâtie sur le lieu où,suivant la tradition, cet apôtre aurait été martyrisé. Cf.Act. xii, 2. La demeure du patriarche, le séminaire, unhospice, une bibliothèque remarquable par ses manuscrits, les couvents des religieux et des religieuses, unpetit musée constituent un vaste ensemble d'édifices. Al’est du musée, on montre l’emplacement de la Maisond’Anne, Joa., xviii, 13-24, sur lequel s'élèvent deuxoratoires contigus, appartenant aux religieuses arméniennes schismatiques. On prétend que, dans l’intérieurde la chapelle proprement dite, il y avait autrefois unolivier auquel le Sauveur aurait été attaché avant d'êtreconduit chez Caiphe. L'Évangile ne dit rien de semblable. À 115 mètres plus bas, en droite ligne, mais endehors de l’enceinte, la chapelle d’un couvent arménienest construite à l’endroit où se trouvait la Maison deCaiphe. Matth., xxvi, 57; Joa., xviii, 24. À l’intérieurdans le mur de l’abside, au sud de l’autel, une portedonne sur une chambre très étroite, qui marque le lieuoù Jésus fut gardé, tourné en dérision et frappé par lesserviteurs et les ministres du grand-prêtre. L’authenticité de la maison de Caiphe est acceptée comme soutenue par une tradition qui remonte au IVe siècle. Cf.Ilineranum a Burdigala Hierusalem usque (333), dansT. Tobler, Itmera Terrée Sanctæ, Genève, 1877, t. i,p. 17. La distance qui sépare ce point de la maisond’Anne n’empêche pas que les vestibules des deux demeures n’aient pu être, au temps de Notre-Seigneur,réunis par une cour commune. Dans l’angle nord-est dumême quartier, les Syriens jacobites ont construit unechapelle et un couvent sur l’emplacement présumé dela Maison de Jean-Marc, où saint Pierre, miraculeusement délivré, serait venu frapper en sortant de prison.Cf. Act., xii, 12-17.

Troisième quartier: quartier des Juifs. — Il couvre toutle penchant oriental du mont Sion et une bonne partiede la vallée du Tyropœon; il est très peuplé, et d’uneextrême malpropreté. On y voit plusieurs synagogues,dont quelques-unes surmontées d’une grande coupole.Presque tous les jours, principalement le vendredi, lesmalheureux enfants d’Abraham s’en vont pleurer sur lesrestes du Temple, au mur des Lamentations. Ce pande muraille est une partie de l’enceinte occidentale duHaram esch-Schérif; il est compris entre le Mehkéméli(tribunal turc) et une maison particulière. Sa longueurest de 48 mètres, sa hauteur de 18. Les neuf premièresassises se composent de blocs énormes, plusieurs à refends. Au-dessus, il y a quinze assises de pierres pluspetites. Parmi les blocs, dont quelques-uns sont fortdégradés, il en est qui ont jusqu'à quatre ou cinq mètresde longueur. Cette antique construction remonte, pourle moins, à Hérode le Grand; quelques auteurs luiassignent même une origine salomonienne. Cf. Perrotet Chipiez, Histoire de l’art dans l’antiquité, t. iv,Paris, 1887, p. 176-218. Au nord du lieu des Lamentations, est un petit jardin dans lequel on voit un arcantique, qui repose sur deux murs presque complètement enfouis dans la terre. C’est probablement celui dela Porte de l’Angle, ainsi appelée de l’angle que formaitla première enceinte septentrionale de Jérusalem, à

l’endroit où elle se réunissait au portique occidental duTemple. À l’extrémité méridionale de la même muraille,à 12 mètres environ de l’arête angulaire, émerge labase d’une arche, dite arche de Robinson, du nom decelui qui l’a découverte. Large de 15 mètres et demi,reposant sur d'énormes pierres longues de 6 à 8 mètres, elle formait la tête d’un viaduc qui, en franchissantle Tyropœon, reliait l’esplanade du Temple à la villehaute. La distance jusqu'à la colline opposée est de91 mètres. On a retrouvé, en ce même endroit, les vestiges d’un pont plus ancien et un aqueduc qui, taillédans le roc vif, courait du nord au sud sous les débrisde l’arche. Plus haut, près duMehkéméh et de la porteBâb es-Silsiléh, on voit une autre arche signalée pourla première fois par Tobler, mais souvent désignée sousle nom d’arche de Wilson. Elle est bien conservée ethaute de 6™70 sur 15 d’ouverture. Elle s’appuie, à l’est,sur le mur du Haram et, à l’ouest, sur un pilier massif.Elle supporte les maisons qui bordent le côté nord dela rue Tariq Bâb es-Silsiléh. Elle servait donc aussi àunir le Temple à la colline occidentale. Cf. Wilson etWarren, The recovery of Jérusalem, p. 76-111.

Quatrième quartier: quartier musulman. — Il occupele centre et le nord de la ville: il est relativement assezpropre et régulièrement construit. La population y esttrès dense. Dans la partie centrale, entre le Saint-Sépubreet le Haram, nous n’avons à signaler que le nouveau Serai,près duquel était l’ancien hôpital de Sainte-Hélène, et,plus haut, le vieux Serai, qui sert actuellement de prison. Au commencement de la rue Tariq es-Serai, unepierre noire placée dans le mur d’un bâtiment indique lelieu présumé où Simon le Cyrénéen fut chargé de lacroix du Sauveur. Un peu plus loin dans la même rue,on a, à droite, la Maison dite de sainte Véronique. L'égliseneuve que les Grecs unis y ont construite s'élève sur lesruines d’une plus ancienne. En revenant dans la rueHôch Akhia Bég et remontant vers le nord, on rencontrel’Eglise du Spasme, qui appartient aux Arméniens catholiques. La rue qui tourne ensuite à l’est, séparant lemont Moriah de Bézétha, est le commencement de laVoie douloureuse. Il nous suffit de dire ici que l’authenticité de cette voie traditionnelle dépend avant tout de lasolution d’un autre problème topographique, l’emplacement du prétoire de Pilate. Voir Prétoire. Il en est demême pour l’Arc de l’Ecce Homo, qui est à cheval surla rue, et du haut duquel Pilate aurait montré le Sauveur flagellé, couronné d'épines et revêtu du manteaude pourpre, en disant à la multitude: «Voilà l’homme.» C’est un grand arc en plein cintre, dont la partie supérieure avec la petite construction qui le domine, estmoderne, mais dont les pieds-droits et l’archivolte sontromains. Le pied-droit sud est engagé dans le mur septentrional du couvent adjacent habité par des derviches.Cette arcade se prolonge par un cintre plus petit, quel’on a retrouvé dans l'église voisine des Dames de Sion.C’est au fond de la chapelle, derrière l’autel, qu’on remarque cet arc collatéral nord, dont le pendant ou collatéral sud a complètement disparu. L’ensemble de cemonument, dont l' arc de l’Ecce Homo formait la partiecentrale, est regardé par des archéologues distinguéscomme un arc de triomphe postérieur à l'époque de laPassion. À l’intérieur du monastère des sœurs de Sion,on voit un dallage antique que beaucoup considèrentcomme le Lithostrotos ou Gabbatha de l’Evangile. Joa.,xix, 13. On y trouve également l’entrée d’une anciennepiscine, divisée en deux branches parallèles, dirigées dunord-ouest au sud-est. La plus longue, celle de l’ouest,a 6 mètres de largeur environ et 50 mètres de longueur, l’autre, 39 mètres seulement. Elles sont creuséessans le roc et leurs voûtes en plein cintre sont construites avec des pierres d’un assez grand appareil. Lerocher, du reste, présente, du côté de l’hôpital autrichien, de nombreuses excavations. Cf. Survey of Wes

tern Palestine, Jérusalem, p. 302-307. En avançant versl’est, on arrive à VEglise de la Flagellation et du couronnementd’épines, qui appartient aux Franciscains. Al’ouest de l’atrium, sont les ruines d’une autre petiteéglise ancienne. La caserne actuelle d’infanterie occupel’emplacement de la forteresse Antonia, qui formait lecoin nord-ouest de l’enceinte du Temple. Voir Antonia,t. i, fig. 178, col. 711. À l’extrémité orientale de la rue,près de la porte Bâb Sitti Mariam, se trouve le grandBirket Israïn, longtemps regardé comme la piscine Probatique;nous le décrivons plus loin. Au nord, s’élève labasilique de Sainte-Anne, construite sur le lieu où,d’après une tradition, saint Joachim et sainte Anne avaientleur habitation, en partie creusée dans le roc, en partiebâtie avec des murs. Au premier siècle avant notre ère,elle était en dehors de la ville, sur le flanc sud-est duBézétha; la troisième enceinte, faite par Hérode Agrippa,l’enferma dans l’intérieur de la sainte cité. L’église atrois nefs avec trois absides à l’orient. Dans la nef méridionale,un escalier conduit au sanctuaire souterrainoù était la maison de Joachim et d’Anne, et où, suivantde nombreux témoignages anciens, ces saints eurentleur tombeau. Cette basilique a été donnée à la Franceaprès la guerre de Crimée et confiée à la garde desmissionnaires d’Alger ou Pères blancs, qui ont là unséminaire grec. Cf. L. Cré, Recherche et découverte dutombeau de saint Joachim et de sainte Anne, dans laRevue biblique, Paris, 1893, p. 215-274. L’atrium renfermedes tronçons de colonnes, des chapiteaux, desfragments de corniches et des plaques de marbre, quiproviennent des fouilles faites pour découvrir la piscineProbatique. C’est, en effet, à cinquante pas de là, vers lenord-ouest, que l’on a retrouvé l’antique piscine de Béthesdaou Bethsaide. Joa., v, 1-9. Voir Bethsaide 3, t. i,col. 1723. — Le reste de la ville, à l’est, est occupé par leHaram esch-Schérif: c’est l’ancienne esplanade duTemple. Voir Temple. En dehors de l’enceinte, au midi,se trouve le cénacle. Voir Cénacle, t. ii, col. 399.

Environs de la ville.

Jérusalem ne pouvait,

dans l’étroite enceinte qui la resserre, donner asile auxnombreuses colonies étrangères qu’y attire, depuis uncertain nombre d’années, la grandeur de ses souvenirs.Aussi s’est-il formé, en dehors des murailles, principalementau nord et à l’ouest, comme une nouvelle ville,où les grandes nations de l’Europe et les différentesreligions ont leurs représentants, couvents, hospices, etc.Voir le plan de Jérusalem, fig. 244. Quelques-unsde ces établissements conservent, après les avoir relevés,de précieux restes de l’antiquité chrétienne. Lesdominicains français, en particulier, occupent, à peude distance au nord de la porte de Damas, le terrainsanctifié par la mort de saint Etienne. Act., vii, 5658. Après avoir mis au jour, il y a quelques années,les ruines de la basilique élevée par l’impératriceEudoxie sur le lieu de la lapidation du premier martyr,ils ont bâti une église sur les fondements del’antique sanctuaire. Aux alentours, dans l’euclos même,on a retrouvé des tombes, des pierres funéraires avecinscriptions grecques, des chambres sépulcrales, dontl’une possède un magnifique pavé en mosaïque, au milieuduquel est dessiné un agneau entouré de lis. Cf.Palestine Exploration Fund, 1891, p. 211-218, avec carteet plans; P. M. Séjourné, La Palestine chrétienne, dansla Revue biblique, 1892, p. 118-122; Découverte d’un tombeauà Saint-Élienne, dans la même revue, 1892, p. 258261; M. J. Lagrange, Une tradition biblique à Jérusalem,même revue, 1894, p. 452-481; Saint Etienne etson sanctuaire à Jérusalem, in-8°, Paris, 1894. Lesfranciscains sont les gardiens séculaires des souvenirsde la Passion dans la vallée du Cédron, c’est-à-dire duJardin de Gethsémani, elve la Grotte dite de l’Agonie.Voir Gethsémani, col. 229, fig. 47, 48. Ces lieux vénérablessuffiraient, à eux seuls, à sanctifier la colline des

Oliviers, au pied de laquelle ils se trouvent. Mais parmitoutes celles qui entourent Jérusalem, elle a le privilèged’avoir été marquée par les pas, les entretiens etles larmes du divin Maître. Ce sont ses pentes qu’il asi souvent gravies; c’est là qu’il s’est assis pour converseravec ses apôtres, là qu’il a pleuré sur la cité infidèle,de là qu’il est monté au ciel. Voir Oliviers (Montdes). Les autres montagnes ne rappellent, par leurnom, que de tristes traditions. Le mont du Scandale,ou Djebel Baten el-Hauâ, qui fait suite à celui des Oliviersvers le sud, est ainsi nommé parce que Salomony érigea, croit-on, des autels aux divinités étrangères.Cf. III Reg., xi, 7; IV Reg., xxiii, 13. C’est sur le versantoccidental de ces hauteurs qu’est situé le villagede Siloé. Voir SiLOÉ. La montagne du Mauvais-Conseil,ou Djebel Deir Abu Tôr, au midi, rappelle, d’après unetradition qui ne remonte pas au delà du xive siècle, lavilla que le grand-prêtre Caiphe aurait eue là, et où leconseil des Juifs rassemblé aurait décidé de faire condamnerJésus à mort. C’est sur la pente nord-est decette colline qu’on place généralement le champ d’Haceldama.Voir Haceldama, col. 386, fig. 92. Au nord, lemont Scopus, dont le nom (de axoTtéu, <t regarder deloin, considérer attentivement» ) indique bien la situation,marque le point stratégique d’où tous les conquérantssont partis pour attaquer la ville sainte.

Si maintenant nous examinions en détail chacune deces hauteurs qui entourent Jérusalem, qu’y trouverions-nous,en dehors des souvenirs bibliques que nous venonsde signaler? Des excavations de toute sorte, grottes,citernes, tombeaux. Non loin de la muraille septentrionale,est la grotte dite de Jérenue, qui n’est autrechose que le prolongement des cavernes royales mentionnéesplus haut. On voit, en avant, quelques tronçonsde colonnes. L’intérieur présente une petitechambre, de forme presque ronde, avec une voûte soutenuepar un pilier et renfermant, à l’ouest, le tombeaud’un sultan. Derrière, il en est une autre qui,depuis le XVe siècle, est considérée comme le lieu oùJérémie écrivit ses Lamentations et où il fut enseveli.Mais le plus intéressant à étudier, ce sont les cavernesfunéraires très nombreuses qui ont été creusées dansle roc partout aux alentours de la cité et qui formentcomme une vaste nécropole souterraine. Nous n’indiquonsici que les plus importantes et les principauxgroupes; pour les détails, comme pour la nature et laforme des tombeaux chez les Juifs, voir Tombeaux. Aunord de la ville, sont les hypogées connus sous le nomde Tombeaux des Rois, en arabe Qubûr el-Molûk, etlombeaux des Juges, ou Qubûr el-Quddt. On en a découvertd’autres dans les environs, sur le mont Scopus,dans Vouadi el-Djôz, prés de la grotte de Jérémie, etc.Cf. Palestine Exploration Fund, Quarterly Statement,1886, p. 155-157; 1892, p. 13-16; 1896, p. 305-310; 1897,p. 105-107; 1900, p. 54-61; 75-76; Revue biblique, 1899,p. 297-304, Il y a même une de ces tombes que quelquesprotestants ont voulu faire passer pour le vrai sépulcrede Notre-Seigneur. Voir Calvaire, t. ii, col. 84. Cf.Pal. Explor. Fund, Quart. Statement, 1892, p. 120-124.A l’est, près de la grotte de l’Agonie, une église recouvrele Tombeau de la sainte Vierge. Sur la montagne desOliviers se trouvent de curieuses catacombes et le Tombeaudit des Prophètes. Cf. Pal. Explor. Fund, Quart.St., 1889, p. 180-184; 1893, p. 128-132; 1901, p. 309-317;Revue biblique, 1901, p. 72-88. Dans la vallée de Josaphat,on voit les monuments appelés Tombeaux d’Absalom(fig. 10, 1. 1, col. 98), de Josaphat (voir Josaphat,3), de Saint Jacques (voir fig. 201, col. 1087) et de Zacliarie(voir Zacharie). Au sud, la colline qui domineVouadi er-Rebàbi est percée de nombreuses grottesfunéraires. Cf. Pal. Expl. Fund, Quart. St., 1900, p.225-218; 1901, p. 145-158, 215-226. Enfin, à l’ouest, surla colline nommée Kikôforiéh, on a fait une découverte^ I.clouz<yetvno. tSttaa.

JERUSALEM MODERNE

Dictionnaire de la Hiblc

Echelle:

frnp Jhifrânoif- /bris.

-çr

du plus haut intérêt pour l’archéologie, en mettant aujour l’une des plus belles sépultures des environs deJérusalem, que l’on croit être le «monument d’Hérode» dont parle Josèphe, Bell. jud., V, xii, 2. Voirfig. 134, col. 647. Cf. Revue biblique, 1892, p. 267-272;Pal. Expl. Fund, Quart. Stat., 1892, p. 115-120, avecplans et gravures. Malheureusement, ces hypogées antiquessont presque tous d’un mutisme désespérant. Onpeut voir cependant Germer-Durand, Épigraphie chrétiennede Jérusalem, dans la Revue biblique, 1892,p. 560-588. — Voir dans la Zeitschrift des DeutschenPalâstina-Vereins, 1895, p. 148-172, et pl. IV, la cartedétaillée des environs de Jérusalem avec la liste et l’explicationdes noms.

5o Climat.

Les conditions de la vie, dans toute contrée,

dépendent naturellement du climat. Or, Jérusalemest à une altitude et dans une situation qui la distinguent,sous ce rapport, de la plaine maritime, de lavallée du Jourdain et même des montagnes de Galilée.Cependant, comme les autres parties de la Palestine, ellene connaît que deux saisons, celle de la sécheresse etcelle des pluies. Celle-ci se divise en trois périodes: les premièrespluies qui humectent la terre; les pluies abondantesde l’hiver, qui saturent le sol, alimentent lessources, remplissent bassins et citernes; les pluies printaniéresqui permettent aux moissons et aux plantes desupporter les chauds débuts de l’été. Elle s’étend, enrègle générale, de la fin d’octobre au commencementde mai. On a constaté qu’il tombe moins d’eau à Jérusalemqu’à Nazareth, ce qui peut tenir au déboisementde la Judée. Cf. L. Anderlind, Der Einfluss der Gebirgswaldungenim nôrdlichen Palâstina auf die Vermehrtengder wâsserigen Niederschlâge daselbst, dans laZeitschrift des Deutschen Palâstina-Vereins, t. viii,1885, p. 101-116. Lorsque le Bîr Éyûb, situé au sud-estde la ville, dans la vallée du Cédron, vient à déborder,les habitants se réjouissent, voyant là un indice d’excellenterécolte et une sorte de garantie contre la pénuried’eau pendant l’été. Il paraît cependant, d’après de soigneusesobservations, que ce fait n’est pas tant dû à laquantité de pluie tombée depuis le commencement dela saison qu’aux chutes abondantes pendant un courtespace de temps. L’absence ou l’insuffisance des pluiespeut avoir les résultats les plus fâcheux pour l’alimentationdes habitants. Voir Pluie. Les mois de janvier etde février sont surtout froids et pluvieux. Cf. J. Glaisher,On the fall of rain at Jérusalem in the 32 years from1861 lo 1892, dans ePal. Expl. Fund, Quart. Stat., 1894,p. 39-44, avec diagramme, p. 40. La neige tombe habituellement,mais presque toujours en petite quantité, et ellefond rapidement. Parfois cependant, elle tombe en bourrasques,et reste plus ou moins longtemps dans lescreux, sur les pentes des collines que ne visite pas lesoleil. La plus basse température qu’on ait constatée àJérusalem est de 3* centigrade au-dessous de zéro, et laplus haute de 44*4. Du commencement de mai à la find’octobre, le ciel est presque constamment sans nuage.A l’approche de l’été, il s’élève encore des brouillards,mais au cœur de la saison ils disparaissent tout à fait etl’atmosphère est ordinairement d’une admirable pureté.Le vent du nord est froid, celui du sud chaud, celuide l’est sec et celui de l’ouest humide; les vents intermédiairesparticipent en proportion à ces différentesqualités. Lorsque, durant l’été, il y a peu de vent plusieursjours de suite, la chaleur devient très grande etl’air excessivement sec. Ordinairement une forte brisesouffle de l’ouest dans l’après-midi; elle ne se fait sentirà Jérusalem que quelques heures après avoir porté safraîcheur le long de la côte méditerranéenne. Après lecoucher du soleil, elle s’affaiblit, pour se relever bientôt,et elle continue pendant une bonne partie de la nuit àrafraîchir la terre brûlée. Quand elle fait défaut, ou nesouffle que doucement, les nuits sont d’une chaleur qui

BICX, DE LA BIBLE,

abat. C’est là une des conditions atmosphériques quidistinguent Jérusalem de Jaffa ou d’un autre point de lacôte. Alors que la ville sainte, sous les durs vents d’est,dans les journées très chaudes, est insupportable, la citémaritime est en comparaison fraîche et agréable. Lesvents du sud et de l’est, venant de contrées brûlantes etsans eau, exercent une influence pernicieuse; c’estcelui du sud-est qui a tous les caractères du sirocco.Pendant les nuits d’été, il y a souvent de fortes rosées,apportées par les vents d’ouest qui viennent de la mer.

— Cf. Th. Chaplin, Observations on the climate of Jérusalem,dans le Palestine Exploration Fund, QuarterlyStatement, 1883, p. 8-40, avec de nombreuses tablesd’observations météorologiques portant sur vingt-deuxannées, 1860-1882. On trouve dans la plupart des annéesde ce recueil le résultat de semblables observationsVoir, pour plus de détails, Palestine (climat).

6o Régime des eaux.

Au climat se rattache le régime

des eaux, et si, dans tous les pays, cette question a uneimportance capitale, elle est encore d’un plus haut intérêten Palestine et à Jérusalem en particulier. La villesainte, comme nous l’avons vu dès le commencement,ne jouit du bienfaisant voisinage d’aucun fleuve. LeCédron n’est qu’un torrent temporaire. Les roches calcairessur lesquelles est bâtie la cité, laissent à peinepénétrer l’eau du ciel. Le peu qu’elles en gardent estamené par leur déclivité aux points les plus bas. Il n’ya, en effet, que deux sources d’eau potable. La premièreest celle qui est appelée’Ain Umm ed-Déredj (voirt. iii, fig. 49), «Source mère des degrés,» parce qu’ony descend par deux escaliers taillés dans le roc, ouencore Ain Sitti Mariam, «Source de Madame Marie» ou «Fontaine de la Vierge», d’après une tradition quine commence qu’au xiv» siècle; c’est l’antique Fontainede Gihon, située sur le flanc oriental de la collined’Ophel; elle communique par un canal souterrainavec la piscine de Siloé, à 335 mètres plus loin versle sud-ouest. C’était, en cas de siège, la seule sourceutilisable pour Jérusalem. Voir Gihon, col. 239, etSiloé. La seconde est le Bîr Eyûb, ou «Puits deJob», situé au confluent des deux vallées de Cédronet do Hinnom; c’est l’ancienne En-Rogel, III Reg., i, 9,un puits plutôt qu’une source proprement dite. VoirRogel. Il y a bien dans les souterrains du couvent deYEcce-Homo une petite source qui vient du nord,mais l’eau en est saumàtre; peut-être’n’est-elle quele résultat de suintements. La vallée du Tyropoeon adonné passage à certaines eaux, à une époque trèsancienne. Mais, en somme, d’après l’histoire et la naturedu terrain, les habitants de Jérusalem n’ont jamaispu guère compter que sur la source d’Ophel. Malgrécela, suivant la remarque de Robinson, Biblical Researchesin Palestine, Londres, 1856, t. i, p. 323, laviile ne paraît avoir manqué d’eau dans aucun dessièges qu’elle eut à soutenir, tandis que toutes les arméesassiégeantes souffrirent de la soif. C’était doncpar des moyens artificiels qu’elle s’approvisionnait,c’est-à-dire par des citernes, des réservoirs et desaqueducs.

1. Citernes.

Quand l’eau de source est insuffisante,on est obligé d’utiliser la pluie du ciel. C’est ce qu’onfit de tout temps et ce qu’on fait encore en Palestinemieux peut-être qu’en tout autre pays. Le sol de Jérusalem,en particulier, est, on peut dire, criblé de trouscomme une éponge. Toute maison importante a sa citerne.Les eaux de pluie, recueillies sur les terrasses oudans les cours, sont conduites par des tuyaux à des cavitésartificielles, bâties en pierre, recouvertes d’unevoûte, avec une petite ouverture à la partie supérieure.Cette forme, destinée à empêcher une trop rapide évaporation,est précisément ce qui distingue la citerne de lapiscine, qui est à ciel ouvert. Un grand nombre de ces citernesparaissent remonter à une haute antiquité; à peine

IU. - 43

peut-on déblayer une cinquantaine de mètres de terrain sans en découvrir au moins une. Il y en a degrandes dimensions, comme celle du couvent copte,à l’est du Saint-Sépulcre, à laquelle on descend parquarante-trois degrés taillés dans l’intérieur du rocher.Le sol du Haram esch-Schérif est rempli de ces excavations qui étaient indispensables au service liturgiquede l’ancien Temple. Voir Citerne, t. ii, col. 787.

2. Piscines.

L’intérieur de la ville renferme plusieurs' grands réservoirs ou piscines. À l’ouest du Moristân, au milieu d’un groupe de maisons, se trouve leBirket Hammam el-Batràk, «l'étang du bain du patriarche,» flg. 245, ainsi nommé parce qu’autrefois il alimentait le bain que le patriarche avait a l’angle sud-est.

porte Saint-Etienne, est une longue tranchée parallèleau mur septentrional de Haram, et qu’on nomme BirketIsraïn. Cet «étang d’Israël» mesure 110 mètres delong sur 40 de large et environ 25 de profondeur. Il estaujourd’hui complètement à sec ^l en grande partieobstrué par une énorme quantité de décombres et d’immondices. Des fouilles ont montré que le fond estformé d’une couche très dure de ciment, reposant surune certaine épaisseur de béton, établi lui-même, soitsur le roc, soit sur un pavé en pierres, à un niveau inférieur à celui des autres citernes du Haram. Les paroisne sont pas taillées dans le roc, mais construites engrosses pierres. Le mur méridional est revêtu d’unemaçonnerie en petit appareil, sous laquelle apparaissent

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245. — Birket Hammam, el-Batràk. D’après une photographie.

Sa profondeur n’est pas considérable) 3 mètres seulementau-dessous du niveau de la rue, mais sa longueur est de73 mètres et sa largeur de 44 mètres. Des travaux exécutés dans le couvent Copte, qui le borne du côté dunord, ont montré qu’il s'étendait encore de 18 mètresdans ce sens. Les murs qui l’enserrent paraissent anciens; ils présentent à l’angle sud-est de grosses pierresde taille. Le fond est de nature rocheuse et en partiecouvert de petites pierres; le rocher a été nivelé àl’ouest. En été, il est presque desséché et son eau esttoujours impure. Il est alimenté par le Birket Mamillah,situé à 650 mètres plus loin, à l’ouest, en dehors de laporte de Jaffa, et qui lui envoie ses eaux au moyen d’unaqueduc souterrain. Ce réservoir est laxo).v|J16ï18pa 'Ap/j-ycaXov de Josèphe, Bell. jud., V, xi, 4. On l’a aussi appelé «piscine d'Ézéchias»; cette origine est aujourd’huicontestée. — Nous avons signalé plus haut les deuxpiscines parallèles qu’on voit encore dans les sous-solsdu couvent de VEcce-Hotno: à l’angle sud-ouest de labranche occidentale s’ouvre un conduit souterraincreusé dans le roc et amenant autrefois l’eau dans l’enceinte du Temple. Voir le plan dans le Palestine Exploration Fund, Quart. Stat., 1880, p. 35. — Près de la

par endroits les blocs massifs d’une construction antique.A l’extrémité ouest on aperçoit deux arcades, formantl’ouverture de deux passages voûtés. Voir flg. 525, t. i,col. 1729. Celui du sud, qui est long de 40 mètres, estfermé par un mur en maçonnerie. Celui du nords’ouvre, après un parcours de 36 mètres, dans un autrepassage voûté, de construction moderne, courant dunord au sud, et ayant près de 23 mètres de profondeur.Le trop-plein de cette piscine s'écoulait autrefois versl’est par un passage souterrain de 14 mètres de longueur. Cf. Palestine Expl. Fund, Quart. Stat., 1880,p. 39-40; Survey of Western Palestine, Jérusalem,p. 122-126; Wilson etWarren, The Recovery of Jérusalem, p. 189-196. Le Birket Isram a longtemps étéregardé comme étant la piscine Probatique ou de Bethesda; mais il n’est plus permis maintenant de soutenir cette identité. Voir Bethsaïde 3, t. i, col. 1723.C’est, croit-on, Hérode le Grand qui le creusa et le construisit, afin de pouvoir, en cas de nécessité, rempliren grande partie la piscine Struthia, ï) ExpouOiov xoXujag-fjôpoc, Josèphe, Bell. jud., V, xi, 4, ou profond et largefossé qu’il avait fait autour de l’Antonia pour la rendreinaccessible aux ennemis.

1349

JERUSALEM

135&

En dehors de la ville, nous trouvons à l’ouest le BirketMamillah (fig. 246), qui n’a pas de source et est destinéà recevoir l’eau pluviale. Il a 89 mètres de long, 59 delarge, et 6 de profondeur. On voit des traces de degrésdans les angles du sud. Il est creusé en partie dans leroc vif, et ses parois sont, de plus, renforcées d’un mur;il y a, en outre, des contreforts aux murs du sud et del’ouest. Le canal d’écoulement, qui est maçonné, setrouve dans le bas, au milieu du côté oriental, et descendde là, en serpentant, vers la ville où il entre, unpeu au nord de la porte de JafFa, pour alimenter leBirket Hammam el-Balràk. Ce réservoir est la «piscinedes serpents», ïj twv "Oq>eo>v èmxaXounIvj) xoXv|Aëïj6pa,dont parle Josèphe, Bell. Jud., V, iii, 2. Ce n’est pas,comme on l’a cru, la Piscine supérieure de la Bible.

Les eaux vives étaient amenées par des aqueducs, dontles vestiges existent encore. Voir Aqueduc, t. i, col. 797.

— Cf. Robinson, Biblical Researches in Palestine, X. i,p. 323-348.

II. topographie ancienne.

Jérusalem, on le voit,n’a plus guère que des souvenirs de l’antiquité biblique;des monuments, on peut dire qu’il ne reste pas pierresur pierre. La vieille cité des rois de Juda, d’Hérodemême, est ensevelie sous les édifices des deux puissancesreligieuses qui, depuis dix-neuf siècles, se sont disputécette terre sainte entre toutes, le christianisme et lemahométisme. À part quelques points incontestables, etce sont les plus importants, bon nombre ont été localiséspar une tradition qui n’est pas toujours à l’abri dela critique. Est-il donc impossible cependant de retrou246. — Birket Mamillah. Daprês une photographie.

Is., vii, 3. — Plus bas, dans la vallée de Hinnom, est leBirket es-Sultdn, le plus grand de Jérusalem, car il a170 mètres de longueur et 67 de largeur. On a utilisépour ce vaste réservoir le fond de la vallée, en y construisantdeux forles murailles tranversales au nord etau sud, et en creusant entre elles jusqu’au rocher. Sa(Construction dénote qu’il a peu d’importance et qu’il estd’une date peu reculée. Il fut restauré au xvie sièclepar le sultan Soliman, d’où son nom d’«étang du Sultan». Cf. C. Schick, Birket es-Sultan, dans le Pal. Expl.Fund, Quart. Stat., 1898, p. 224-229, avec plans. — Al’extrémité sud de la colline d’Ophel, se trouve laPiscine de Siloé, destinée à recevoir les eaux de Y AinSitti Mariant. Elle a, avec cette dernière source, unrôle important dans l’élude de la topographie ancienne."Voir Siloé (Piscine de) et ce que nous disons plus loin.’— Enfin, au nord-est, près de la porte Saint-Étienne,on voit le Birket Sitti Mariant, qui a 29 mètres environde longueur, 23 de largeur, 4 de profondeur. Il n’a aucunintérêt historique.

3. Aqueducs.

Comme l’eau recueillie dans les citerneset les piscines était en danger de se corrompreou de s’évaporer rapidement, on songea de bonne heurea capter des sources assez éloignées, au sud de Bethléhera.

ver sous les débris du passé les vestiges de la vieilleJérusalem, de retracer les lignes de ses enceintes successives,de marquer l’emplacement probable de sesprincipaux monuments, de nous représenter, en un mot,son antique physionomie? Non certainement, et c’estune question qui, de nos jours plus que jamais, préoccupe,passionne même les esprits adonnés à l’étude dela Bible et de l’archéologie sacrée. Catholiques et protestants,en Angleterre, en Allemagne et en France, suiventavec intérêt les moindres découvertestamentes parles fouilles récentes et luttent à l’envi dans ce bellumtopographicum où nos religieux français de Jérusalemont, depuis plusieurs années, pris une part aussi activeque brillante. Nos guides dans ces recherches sont naturellementla Bible et l’historien Josèphe; l’autorité dece, dernier peut être douteuse quand il traduit à sa façonles données scripturaires, mais elle est incontestablelorsqu’il parle en témoin oculaire. Les fouilles accompliesen ces derniers temps, bien qu’incomplètes, n’enont pas moins jeté un certain jour sur plus d’un pointdu problème. Il faut ajouter, du reste, que, si Jérusalem,comme toutes les vieilles cités, a subi de profonds bouleversements,le terrain archéologique est plus exactementdélimité qu’en aucun autre lieu du monde, puis

qu’elle a toujours été circonscrite par les fossés naturelsqui l’entourent. En essayant de reconstituer l’ancienneville, nous n’entendons donner que les derniers résultatsde la science, dont plusieurs pourront être, par desrecherches ultérieures, ou confirmés ou modifiés. Pourplus d’ordre, notre étude ira de l’origine de Jérusalemà la captivité, et de la captivité à la ruine de la ville parles Romains.

De l’origine à la captivité.

Que fut le noyau primitif

de la ville sainte? Aucun témoignage historiquene nous l’apprend. Deux choses cependant durent attirerles premiers habitants: la source qui s’échappe desflancs de la colline orientale, aujourd’hui’Ain Vmm ed-Déredj,et la colline elle-même, celle d’Ophel, qui, resserréeentre deux profondes vallées, peu étendue et parconséquent facile à défendre, présentait une forteressetoute naturelle. Peut-être y eut-il là dés le commencementune sorte de douar ou Ifâsêr, entouré d’un petitmur de pierres, avec une tour de garde, pour protégergens et troupeaux. Voir Haséroth, col. 445. On peutfaire là-dessus d’ingénieuses hypothèses. Cf. C. Schick,

nemi peut s’avancer jusqu’au pied des fortifications sansêtre arrêté par aucun obstacle. C’est toujours par là, onle sait, que Jérusalem a été prise. Ce que l’on recherchaitdans l’antiquité, c’étaient plutôt des ravins qui,tout en rendant difficile l’accès du fort, simplifiaientl’œuvre de l’homme obligé de compléter celle de la nature.Et tel est précisément l’avantage de la collineorientale, plus restreinte, mieux délimitée, entourée àl’ouest, au sud et à l’est par des vallées bien plus profondesautrefois qu’aujourd’hui. C’est là un point trèsimportant à remarquer: des fouilles ont permis de constaterque les ravins du Tyropœon et du Cédron ont étéen partie comblés par les décombres qui s’y sont accumulés.Dans le premier, le sol actuel est à 20, et, danscertains endroits, à près de 30 mètres au-dessus du solancien; dans le second, la différence, sans être aussiconsidérable, est encore de 8 à 10 mètres. Vers leCédron, le roc, dont le pied est maintenant caché sousdes éboulis, descendait autrefois presque à pic; le Tyropœon,sans se creuser autant, n’en formait pas moinsun fossé très redoutable à l’ennemi. Il suffit de jeter les

247. - Coupe de la vallée du Tyropœon, d’après le Pal. Expl. Fund, Quart. Stat., 1897, p. 179.

Die Baugeschichte der Sladt Jérusalem, vordavidischeZeit, dans la Zeitschrifl des Deutschen Palastina-Vereins,t. xvi, 1893, p. 237-246.

i. Sous David, Salomon et les premiers rois deJuda. Première enceinte. — Une question plus difficileet très vivement débattue de nos jours est celle-ci:Où se trouvait la forteresse de Sion des Jébuséeus,devenue plus tard la Cité de David? Cf. II Reg., v, 7-9.La solution du problème est souverainement intéressantepour l’histoire et la topographie de la ville, puisquec’est précisément par ce point que commencèrent lesagrandissements successifs qu’elle reçut. Deux opinionssont en présence. L’une place Sion, sur la colline du sudouest,qui, depuis de longssiècles, en porte le nom.L’autre regarde la colline du sud-est commeJe véritableemplacement de l’antique Jébus. Voir Sion. C’est à cettedernière que nous nous rangeons, comme plus conformeà l’Écriture dûment interprétée, à l’histoire et aux exigencesde la topographie. Par sa situation et ses dimensions,Ophel répond mieux à l’idée que nous pouvonsnous faire d’une acropole toute primitive. Ce qui, à premièrevue, semble contre elle, milite plutôt en sa faveur.Le plateau occidental est, il est vrai, plus élevé; mais,à une époque où l’artillerie était inconnue, on ne craignaitpas d’être dominé. Il est beaucoup plus large,mais aussi beaucoup plus difficile à défendre. Sanscompter les nombreux soldats qu’il eût fallu pour garderles trois côtés protégés par les escarpements, le côténord n’eût pu être garanti que par une longue et hautemuraille flanquée de tours puissantes. Cette partie septentrionalesuit la pente générale du terrain, et l’enyeui sur les figures 247, 248, pour se rendre compte deces détails. Le terrain a été sondé, à l’ouest d’Ophel, surune ligne assez étendue, A, B, descendant de la collineoccidentale pour remonter sur le coteau oriental (fig. 247et 249), et, à l’est, sur trois points différents, A, B, C (lig.248 et 249). Cf. Palestine Exploration Fund, QuarterlyStatement, 1886, p. 198; 1897, p. 179. La bourgade chananéennepouvait étager ses maisons sur la pente méridionalede la colline où le roc aplani formait une suitede petites terrasses. «Il n’y avait guère à protéger, pardes murs, que le côté nord; or, l’espèce d’isthme parlequel cette colline se rattache au corps des monts deJuda était plus étroit que celui qui y relie la colline occidentale.Le mont Moriah n’a qu’une très faible largeur,et ce qui le rétrécissait encore, tout près de son pointculminant, c’était un ravin, aujourd’hui comblé, quiallait rejoindre obliquement la rive droite du Cédron.L’existence de ce pli du sol a été démontrée par lesfouilles récentes; une partie a été utilisée pour formerle réservoir qui est connu sous le nom de Birket-Isræl,tandis que le reste du creux a été caché sous les substructionsdu temple.» Perrot, Histoire de l’art, Paris,1887, t. iv, p. 165. Enfin, la seule source de Jérusalemse trouve sur la colline orientale; or, dans un pays aridecomme la Judée, on devait avant tout s’assurer la possessiond’une fontaine qui coulât en tout temps. On nepouvait, en cas d’attaque, l’abandonner à l’ennemi.Peut-être même, dès cette époque, une rigole à ciel ouvertconduisait-elle les eaux à la piscine inférieure. Audessousde cette piscine, sur les pentes voisines, jusquevers le Bir-Éyiib, pouvaient s’étendre les jardins de la

ville jébuséenne. Ces avantages naturels expliquent commentla citadelle put, si longtemps, tenir bon contreles deux tribus de Benjamin et de Juda, entre lesquelles «lie était placée, et pourquoi David la convoita et en fitle noyau de sa cité.

Josèphe, Ant.jud., VII, iii, 2, nous dit que David, une

248.

Coupes de la vallée du Cédron, d’après le Pal. Expl.Fund, Quart. St., 1886, p. 198.

fois maître de la place, renferma dans une enceinte laville basse, tt|v xi-no itôXiv, en la réunissant à la citadelle,i axpa; il forma ainsi «un seul corps», êv o-ûp-a, qu’ilentoura de murs et dont il confia la garde à Joab. C’estJe commentaire de ces paroles de II Reg., v, 9: «Davidhabita dans la citadelle, qu’il appela cité de David, et ilbâtit tout autour depuis le Mello et intérieurement.» Cf.1 Par., xi, 8. Mello doit indiquer un ouvrage de défense,lour ou rempart, qui protégeait la ville vers le nordouest,du côté de la vallée du Tyropœon. Voir Mello.

C’est donc sur la colline orientale que le jeune roi construisitson palais. II Reg., v, 11. On sait comment plustard il acheta d’Oman le Jébuséen le terrain situé aunord et qui est le prolongement du coteau. II Reg., xxiv,18-25. Ce fut le premier agrandissement de la ville, àmoins que, dès ce temps, elle n’ait déjà commencé des’étendre sur la colline occidentale. En tout cas, c’estlà que Salomon éleva sur un plan grandiose le Templeet ses dépendances. Il dut, pour cela, aplanir le terrainet le soutenir par de puissantes murailles, qui servirenten même temps de défense à la ville. Les fondementsde ces murs de soutènement subsistent encore en parlie,comme l’ont prouvé les fouilles anglaises pratiquées àl’angle sud-estdu Haram. Voir fig. 250. La première assiserepose sur le rocher, à une profondeur de 24 mètres.m-dessous de la surface du sol. Les assises suivantesont de l m 05 à l m 30 de hauteur. Les blocs, longs de 1 à

mètres, sont taillés en bossage d’un excellent appareilet si bien conservés qu’on les dirait placés d’hier.L’une des pierres porte, peintes en rouge, des lettresphéniciennes. Cf. Wilson et Warren, The Recovery ofJérusalem, p. 135-153. Cette origine salomonienne n’estcependant pas admise par tous les auteurs. Cf. Perrot, Histoirede l’art, t. iv, p. 212-213. Au moyen de ses magnifiquespalais, Salomon réunit la cité d’Ophel aux constructionsreligieuses faites sur le Moriah. Il est difficile,en effet, de chercher ces palais sur le Sion actuel. S’ily avait eu cet intervalle entre la maison du roi et cellede Dieu, si les deux édifices avaient été reliés par uneœuvre d’art passant au-dessus de la vallée de Tyropœon,le texte sacré, si abondant en détails pour le reste, aurait

1 jit au moins quelque allusion à cette particularité. Or, onn’y trouve pas un mot qui indique que, pour aller du palaisau Temple, il fallait quitter une colline pour une autre.A cetargument négatif, on peut ajouter ce passage d’Ézécliiel,XLiir, 8: «Les rois d’Israël ont mis leur seuilprès de mon seuil, leurs poteaux près de mes poteaux,et il n’y a qu’un mur entre eux et moi.» À lui seul, leTemple, avec ses annexes, devait remplir toute la largeurdu mont, de l’est à l’ouest. Il est donc naturel de supposerque la demeure rojale fut construite au sud de l’enceintesacrée, entre celle-ci et la cité dont les maisons.s’étageaient sur les pentes méridionales de la colline,nie était voisine de la source où elle devaits’approvisionner.du large fond de vallée où les rois eurent leur jardin,et, de la ville au palais, on n’avait qu’un pas à faire.Ce détail topographique est absolument confirmé parl’Écriture. Ainsi, lorsque Jérémie, dans une des coursdu Temple, prophétise la ruine de Jérusalem, et que lal’oule s’ameute autour de lui, en poussant des cris demort, il est dit que, attirés par le bruit, «les princesîle Juda montent de la maison du roi à la maison de.léhovah.» Jer., xxvi, 10. L’expression «monter» estinexplicable si l’on place le palais royal sur la collineoccidentale, plus élevée, nous l’avons vii, que le montMoriah. De même, quand Joas a été couronné roi, onle «fait descendre» (hébreu yôridù, forme hiphil deydrad, «descendre» ) du temple au palais. IV Reg., xi, 19.Les deux mots, au contraire, sont parfaitement justesdans l’hypothèse que nous défendons. La demeure duroi ne pouvait occuper qu’une terrasse située un peuau-dessous de celle du Temple, puisque le roc s’abaissedu nord au sud. Le palais de David était plus près quecelui de Salomon du pied de la colline. Nous pouvonsdonc, en somme, nous faire cette idée des édifices élevésau-dessus de la cité de David, où se pressaient déjà lesunes contre les autres les maisons de la ville basse: «Tout en haut sur l’esplanade la plus éloignée de laville, le Temple et ses cours; plus bas, le palais, sur laterrasse, ou, pour mieux dire, sur les terrasses intermédiaires.Il n’est pas vraisemblable que les différentsquartiers de l’habitation royale aient été tous posés surun même plan horizontal; à les distinguer par des difleLégendeCite deSswid

Mars de David et de Saloznon ( l 1 * Enceinte!Mors dSzechias et de Manasse. ( 2e Encemte)Travaux d flepode Je Crand.Mut dvgPtppa ( 3e Enceinte),Enceinte actuelle

ïtMe

19. — Jérusalem ancienne et ses différentes enceintes.— Les deux coupes A, B, à l’ouest d’Ophel, marquent la ligne suivant laquellea été faite la coupe de la vallée du Tyropœon, fig. 247. — A, B, C, à l’est, indiquent les trois coupes de la vallée du Cédion,fis. 248.

rences de niveau, qui pouvaient être d’ailleurs assezlégères, l’architecte avait un double avantage: d’unepart, il suivait plus docilement le mouvement ascensionneldu terrain, et, de l’autre, il obtenait un effetplus grandiose; il évitait que les parties antérieures decet ensemble couvrissent et vinssent masquer les édiJ^Tt-w’m -^% ?S^^^gÊr£

fices placés en arrière, dans le voisinageimmédiat du Temple.» Perrot, Histoirede l’art, t. iv, p. 400.

Le Temple, monument religieux et national,une fois élevé, donna une grandeimportance à la ville, qui continua à seprolonger sur la colline occidentale. Denouveaux murs de fortification furent nécessaires.Josèphe, Ant. jud., VIII, vi, 1,nous apprend que Salomon augmenta

les remparts, les renforça et les munitde tours énormes. L’Écriture, III Reg.,XI, 27, ajoute que les travaux entreprissur le Mello excitèrent les mécontentementsdu peuple.

Bientôt cependant la division du

royaume en ceux de Juda et d’Israëlporta un coup funeste à Jérusalem, quicessa de s’agrandir. Les successeurs deSalomon n’eurent sans doute qu’à réparerou fortifier son œuvre, comme lefirent Ozias et Joatham. II Par., xxvi, 9;xxvii, 3. La Bible ne nous donne pointde tracé proprement dit pour cette partiede la première enceinte. Josèphe, Bell,jud., V, iv, 2, comble cette lacune dans ladescription suivante: «Le plus anciendes trois murs était inexpugnable à

250. — Mur de l’angle sud-est du Haram, d’après The Becovery0/ Jérusalem, p. 35.

cause des vallées et de la hauteur des collines surlesquelles il était bâti. À l’avantage naturel on avaitajouté de puissantes fortifications, David, Salomon etles rois leurs successeurs s’étant beaucoup employés à cetravail. Commençant du côté du nord à la tour diteHippicus, le mur s’avançait jusqu’à’l’endroit appeléXyste, se joignait ensuite à la salle du Conseil, et seterminait ainsi au portique occidental du Temple. Del’autre coté, à l’occident, il commençait à la même tour,

se prolongeait à travers la région appelée Bethso jusqu’àla porte des Esséniens. Ensuite, du côté sud, iltournait au delà de la piscine de Siloé, puis de là, ducôté de l’orient, il s’inclinait vers la piscine de Salomon,atteignait un lieu que l’on appelle Ophla, et ainsi sejoignait au portique oriental du Temple.» Rien de plusfacile que de suivre ce tracé. La tour Hippicus, point dedépart, était une des trois qu’Hérode le Grand avait faitbâtir à l’angle nord-ouest de la ville supérieure tellequ’elle existait de son temps; elle devait être sur l’emplacementde la citadelle actuelle, la plus rapprochée dela porte de Jaffa. Le Xyste, qui, chez les Grecs et lesRomains, désignait une galerie couverte, se trouvaitauprès du pont qui unissait la ville haute au Temple, etdont on voit encore l’amorce (arche de Wilson). Cf. Josèphe,Bell. jud., VI, vi, 2. Le mur passait au nordpour se joindre à la salle du Conseil, assez bien représentéepar le Mehkéméh ou tribunal actuel, et se terminaiten formant angle sur le portique occidental duTemple, près de la porte appelée aujourd’hui Bâb es-Silstléh.La Bible signale deux portes dans cette murailleseptentrionale, qui existait certainement déjà en 840avant J.-C. Nous lisons, en effet, II Par., xxv, 23: «Joas,roi d’Israël, prit Amasias, roi de Juda, à Bethsamès, etil l’amena à Jérusalem; il détruisit le mur de cette villedepuis la porte d’Éphraim jusqu’à la porte de l’Angle,400 coudées.» Cf. IV Reg., xiv, 13. Comme la deuxièmeenceinte ne fut bâtie que plus tard, sous Ézéchias etManassé, il s’agit bien ici de la première et de la murailleseptentrionale, qui, n’étant pas, comme les autres,protégée par de véritables précipices, était la plus facileà détruire et la plus importante à démolir pour unennemi. D’ailleurs, le nom d’Éphraim indique la directionnord, le pays vers lequel on allait en sortant par laporte en question. De même la porte de l’Angle est, parson nom, marquée à l’angle que formait le mur entombant perpendiculairement sur l’enceinte du Temple.Elle donnait accès dans le chemin qui suivait le fondde la vallée du Tyropœon. Les deux portes, d’après letexte sacré, étaient séparées par une distance de 400 coudées,soit 210 mètres. Or, en partant de la dernière etmesurant cette distance vers l’ouest, on arrive exactementà l’artère principale qui va du sud au nord de Jérusalemet qui, dans la première enceinte, devait aboutir à laporte d’Éphraim. Josèphe, Bell. jud., V, iv, 2, indiqueune troisième porte, appelée Gennath, dans la murailleseptentrionale; elle se trouvait sans doute, nous leverrons, à l’extrémité occidentale.

Si maintenant nous descendons de ce point ou de latour Hippicus vers le sud, nous rencontrerons la «portede la Vallée», par laquelle Néhémie sortit pendant la nuit.II Esd., ii, 13. On la place un peu au-dessous de la portede Jaffa actuelle, à l’angle sud-ouest de la citadelle,débouchant dans cette profonde vallée qu’il faut traverserpour aller vers Bethléhem. La «porte des Esséniens»,mentionnée par Josèphe, à l’extrémité du quartier Bethsoou «maison des ordures», correspond à la «porte Sterquiline» de Néhémie, qui l’indique à mille coudées ou525 mètres de la précédente. II Esd., iii, 13. Cette distancenous conduit à l’angle sud-ouest de la colline occidentale,là où M. BHss a découvert un fragment de murancien avec une porte indiquée par trois seuils superposés,par conséquent d’époques successives, et placéeau-dessus d’un égout qui débouche dans la vallée quelquesmètres plus loin. De là, la muraille du sud s’enallait directement vers l’est, faisant seulement les légerscontours qu’exige la nature du sol. Les divers textesrelatifs à la topographie de la ville sainte ne signalentrien jusqu’à la «porte de la Fontaine», auprès de laquelleNéhémie nous montre la piscine de Siloé, le jardin duroi et les degrés de la cité de David. II Esd., iii, 15. Làencore, au point ou la colline tourne pour remonter aunord, M. Bliss a trouvé un mur qui offre les mêmes

variétés d’appareil que dans les autres parties, une portequi compte trois seuils comme celle d’en haut, et unetour située dans l’angle, de manière à défendre la porteet le saillant formé par le changement de direction dumur. À partir de l’angle sud-est du Temple, l’enceintede la ville se confondait-elle avec celle de l’enceintesacrée, ou bien construisit-on un mur en avant pourprotéger cette dernière? La question est controversée.D’après M. Schick, Die Baugeschichte der Stadt Jérusalem,dans la Zeitschrift des Deutschen Palâstina-Vereins,1894, t. xvii, p. 13, les fortifications s’écartaientun peu de la muraille du Temple. Arrivées à la hauteurde ce que nous appelons la porte Dorée, elles remontaientvers l’ouest en suivant la dépression naturelle qui existelà, et venaient se terminer à l’angle nord-ouest duTemple, où elles étaient appuyées par deux tours quenous retrouverons mentionnées sous les noms de Méahet Hananéel. Cf. P. M. Séjourné, Les murs de Jérusalem,dans la Revue biblique, 1895, p. 37-47. Les fouilles deM. Bliss ont jeté un jour tout nouveau sur la ligneméridionale de l’enceinte; bien que trop tôt interrompueset que le résultat définitif ne puisse en être donné,elles n’en sont pas moins du plus haut intérêt. VoirPalestine Exploration Fund, Quarlerly Statement,1894, p. 169-175; 243-265; 1895, p. 9-25; 235-248; 305320; 1896, p. 9-22; 298-305; 1897, p. 11-26; 91-102, avecde nombreux plans.

Sur la cité de David, on peut voir: W. F. Birch, Zion,the City of David, dans le Quarlerly Statement, 1878,p 178-189; The City and Tomb of David, même revue,1881, p. 94-100; The City of David and Josephus, ibid.,1884, p. 77-82; The approximate position of the castleof Zion, ibid., p. 1886, p. 33-34; von Alten, Zion, dans laZeitschrift des Deutschen Palâstina-Vereins, 1879, p. 1847; Die Davidsstadt, ibid., 1880, p. 116-176; Klaiber,Zion, Davidsstadt und die Akra innerhalb der altenJérusalem, ibid., 1880, p. 189-213; 1881, p. 18-56; 1887,p. 1-37; C. Schick, Die Baugeschichte der Stadt Jérusalem,ibid., 1893, p. 237-246; 1894, p. 1-24; M. J. Lagrange;Topographie de Jérusalem, dans la Revue biblique,1892, p. 17-38.

2. Sous les derniers rois de Juda: deuxième enceinte.

— À la chute du royaume d’Israël, les Hébreux quiréussirent à s’échapper vinrent pour la plupart seréfugier à Jérusalem, qu’il fallut dès lors agrandir.D’un autre côté, on pouvait craindre pour la ville saintela ruine qui venait de frapper Samarie; l’invasion assyriennemenaçait. Il fallait se prémunir contre l’attaque.Ce fut l’œuvre du pieux roi Ezéchias, et l’une des plusimportantes. Elle se résume, d’après l’Écriture, II Par.,xxxil, 3-5, 30, en trois grandes entreprises: réparerles murs et fortifier les parties faibles, amener dansl’intérieur de la cité, par des canaux souterrains, leseaux de l’extérieur et les soustraire à l’ennemi, enfinétendre l’enceinte de la ville. Des aqueducs, captant lessources des environs, suppléaient, nous l’avons vii, àl’aridité du sol de Jérusalem; mais rien de plus facileà un assiégeant que de les intercepter. La principale,sinon l’unique source capable d’alimenter directementla place, c’est-à-dire, la fontaine de Gihon ou de laVierge, était en dehors des murailles. Si, par des travauxantérieurs, les assiégés pouvaient y puiser à l’abri destraits de l’ennemi, elle n’en restait pas moins égalementau pouvoir de celui-ci. C’est pour cela qu’«Ezéchiasboucha la sortie des eaux de Gilion d’en haut, et lesdirigea par-dessous, à l’occident de la cité de David».II Par., xxxii, 30; IV Reg., xx, 20. Il fit donc creuser dansla colline d’Ophel la galerie souterraine qui communiqueavec la piscine de Siïoé, et dont l’inscription hébraïque,découverte en 1880, décrit l’exécution. Voir Aqueduc,t. i, col. 804. Il chercha sans doute aussi à utiliser lesprovisions que pouvaient fournir quelques-unes despiscines environnantes.

Quant à l’agrandissement de la ville, il ne pouvait sefaire que du côté du nord, puisque partout ailleurs lesvallées y mettaient obstacle. L’Écriture ne déterminepas plus le tracé de cette deuxième enceinte que celuide la première. Josèphe, Bell. jud., V, iv, 2, nous endonne une description malheureusement trop laconique: «Le deuxième mur, dit-il, avait son point de départ àla porte qu’on nomme Gennath et qui appartenait aupremier mur; enveloppant seulement la région septentrionale,il se prolongeait jusqu’à l’Antonia.» Les deuxpoints d’attache de la nouvelle muraille sont donc nettementindiqués. Le dernier, situé au nord-ouest duTemple, n’oifre aucune difficulté. Pour retrouver le premieret suivre de là les vestiges des fortifications, faisonsappel à la topographie et à l’archéologie, dont leslumières valent mieux que les raisons de convenancetrop souvent apportées. Destiné à couvrir toute la régionseptentrionale par rapport à l’ancienne ville, le murnouveau devait, d’après le relief du sol, tel qu’on le peutconstater aujourd’hui encore en cette région, s’amorceraussi près que possible de l’angle nord-ouest, déjà protégésans doute par quelque édifice antérieur à la tourHippicus. Le nom de Gennath donné à la porte septentrionalepermet de supposer qu’elle ouvrait sur des jardins(hébreu: gan, gannâh). Or, d’après Josèphe, Bell,jud., V, ii, 2, les jardins bordaient la ville au nord, etla tradition chrétienne, conforme aux données évangéliques,a placé dans le jardin de Joseph d’Arimathie,au nord-ouest de la cité, le tombeau de Notre-Seigneur.Comme, d’autre part, on établit volontiers une porte derempart à l’abri d’une ou de plusieurs tours, on peut fortbien croire que celle dont nous parlons était défenduepar le voisinage d’Hippicus ou de ses antécédents. C’estd’après ces vraisemblances solides que plusieurs savantsla placent dans la courtine qui, au temps de Josèphe,reliait les deux tours Hippicus et Phasæl. Cf. C. Schick,Die zweite Mauer Jerusalems, dans la Zeitschrift desDeutschen Paldstina-Vereins, t. viii, 1885, p. 272,pi. VIII; Das Tfialthor im alten Jérusalem, dans lamême revue, t. xiii, 1890, p. 35, pl. i. Si ces conjecturesn’ont été jusqu’ici positivement confirmées par aucunedécouverte archéologique, elles trouvent cependant unsérieux point d’appui daus les vestiges de l’antiquité quimarquent de ce côté le commencement de la deuxièmeenceinte. En 1886, en effet, on mit à jour, à l’extrémiténord du Mauqâf, dans l’alignement de la rue SchuaiqatAllân, un mur en grandes pierres de taille, percé deportes, qui se prolongeait d’est en ouest jusqu’à l’entréede la rue Istambuliyéh, où il était rencontré obliquementpar un mur beaucoup plus puissant et dont quelquesblocs énormes étaient appareillés à refend. Voir fig. 251.Après une interruption peu considérable, la ligne de cemur était recouvrée, plus au nord, sur une étendue d’environtrente mètres. Deux à trois assises demeuraientpartout en place, les blocs rappelant par leur forme etleurs proportions les meilleures parties de la «Tourde David». À l’extrémité méridionale, un angle deconstruction massive, disposée en talus comme un revêtementd’escarpe, fut découvert en même temps; il semblaitavoir couvert l’angle d’incidence de la muraille surl’enceinte primitive. C’est un point décisif dans la questionde l’embranchement du second mur. Cf. SelahMerrill, Récent discoveries at Jérusalem, dans le PalestineExploration Fund, Quarlerly Statement, 1886,p. 21-24; C. Schick, The second Wall, dans la mêmerevue; 1887, p. 217-221; 1888, p. 62-64. En 1900, durantla construction de l’université orthodoxe du couventde Saint-Dimitri, on a trouvé le rocher presque à fleurde sol le long de la rue Istambuliyéh. Au contraire, enavançant vers l’est, on a constaté une énorme et brusquedépression, indice peut-être d’un ancien fossé, qui seraiten parfaite relation avec les vestiges du mur relevé àl’angle nord-ouest de la rue hareï el-Mauâzin et plus à

l’est au débouché de cette rue sur la rue des Chrétiens.Le mur se prolongeait en droite ligne vers le Morislàn,qui en a conservé des traces. Lorsque, en effet, on jeta lesfondements]du temple protestant, qui a succédé à SainteMarie-Latine (1893), on Vaperçut que l'église avait étéposée presque sans fondations sur les décombres. À peuprès exactement dans le grand axe de l'édifice, on rencontra un mur puissant, orienté d’ouest en est, présentant dans les parties sauves un appareil soigné engrands blocs, la plupart à refend. On le regarda dès lorscomme un reste de la seconde enceinte. Cf. C. Schick,The second Wall of ancient Jérusalem, dans le Pal.Explor. Fund, 1893, p. 191493; 1894, p. 146.

Du Moristàn, en remontant vers le nord, on retrouveun vestige important de la même muraille, dans l'étaà fait droit. Le mur dans cette direction est d’un appareil assez semblable à celui du gros mur auquel il estlié. Il s’interrompt avant d’avoir atteint le bord d’unseuil de porte antique a, dont l’autre extrémité étaitaccostée par un saillant aujourd’hui ruiné en partie,visible toutefois encore sur le front d’un autre mur, bc,qui n’offre aucun rapprochement avec ceux que nousvenons d'étudier. On incline à croire que ee seuil deporte représente, au moins par son emplacement, uneouverture, probablement intérieure, de la secondeenceinte. ABCD seraient les débris d’un saillant extérieurdestiné à couvrir l’entrée et à protéger un point faiblede la muraille, qui laisserait ainsi le Calvaire et le SaintSépulcre à une centaine de mètres à l’ouest. Cf. C. Schick,New excavations in Jérusalem, dans le Pal. Expl. Fund,

P"Nn

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251. — La deuxième enceinte de Jérusalem. D’après la Revue biblique, 1902, p. 33.

blissement russe-situé à l’est du Saint-Sépulcre. Il y alà un groupe de ruines fort complexes, que nous n’avonsfait qu’indiquer plus haut, col. 1338. Il nous suffira d’yremarquer les points suivants. Voir fig. 252. Un grosmur AB se développe du nord au sud sur une longueurde près de dix mèlres. Il est formé de deux ou trois assisesde blocs à refend dont les dimensions varient de m 70 à2 mètres. L’assise inférieure repose sur le roc vif dresséen escarpe, dont on a régularisé la crête au moyen dehlocs plus petits, sans refend, et par des entaillesoù sont encastrées les pierres d’appareil. Un autre murAC court d’ouest en est et vient tomber sur l’extrémitéméridionale du premier, en formant au point À un anglelégèrement ouvert. Sa base repose également sur leTocher, mais il n’a qu’une seule assise de blocs à refend.Au-dessus, la muraille, en petit appareil lisse, se rétrécit;mais le soubassement offre une similitude parfaite avecle mur AB. Voir fig. 253. Ce dernier n’a qu’une ouverture;l’autre en a trois, celle du milieu représentant peut-êtreune porte primitive. Le mur D qui tombe perpendiculairement sur la ligne AC n’est visible aujourd’hui que danssa partie supérieure. Un retour d'équerre dans la murailleforme à l’orient de la ligne AB un angle qui n’est pas tout

1888, p. 57-60, pl. 1-3; Das Stadtviertel der Grabeskirche,der Lauf der zweiten Marier Jérusalem, dans la Zeitschrift des Deutschen Palâstina-Vereins, t. viii, 1885,p. 259-273, avec plan restitué de cette partie de l’enceinte,pi. ix et x. Au delà du quartier du Saint-Sépulcre, leparcours des murailles est moins facile à suivre. On acependant signalé, le long de la Voie douloureuse, notamment aux stations dites de Véronique et de Simonle Cyrénéen, divers débris de constructions antiques,présentant les caractères qui ont servi à rattacher entreeux les tronçons de muraille relevés depuis la tourHippicus. Cf. E. Pierotti, Jérusalem explored, Londres,1864, t. i, p. 33-34; C. Schick, Veronica’s House, dansle Pal. Expl. Fund, 1896, p. 214-215. Enfin, l’existenceA& la contrescarpe du fossé qui isolait la muraille duBézétha. depuis l’hospice autrichien jusqu'à VEcce-Romo,offre de sérieux motifs pour établir le passage de ladeuxième enceinte parallèlement à la rue du Vieux-Sérailou Tariq Serai ei-Qadinijusqu'àl’Antonia, dont le site,à l’angle nord-ouest du Haram, est incontestable.Cf. H. Vincent, La deuxième enceinte de Jérusalem,dans la Revue biblique, 1902, p. 31-57. La ligne d’enceinte que nous venons de décrire n’a évidemment

rien d’absolu ni de définitif; des études et des découvertesfutures peuvent la modifier. Elle a au moins lemérite de s’appuyer sur les données archéologiques etl’examen attentif du terrain. On remarquera commentelle laisse en dehors de la ville le Calvaire et le Saint-Sépulcre,dont l’authenticité est par là même garantie,non par des arguments a priori, mais par une méthoderigoureuse et scientifique.

Les travaux continuèrent sous le règne de Manassé.Mais quelle fut au juste l’œuvre de ce roi? Il est difficilede le dire en présence d’un texte obscur: «Après cela,lisons-nous II Par., xxxiii, 14, il bâtit le mur extérieur

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252. — Restes d’anciens murs dans l’établissement russe.

de la cité de David à l’occident de Gihon, dans le torrent,et dans la direction de la porte des Poissons, etautour d’Ophel, et il l’éleva beaucoup.» Si Gihon désigneici la vallée du Cédron, il s’agit peut-être d’un avantmurplacé près du fond de la vallée, tandis que l’ancienmur suivait la crête de plus près. Si Gihon est la fontaineelle-même, il faut placer la construction à l’occidentde la colline d’Ophel, le long de la vallée du Tyropœon,dans la direction de la porte des Poissons, qui,nous le verrons tout à l"heure, était à l’extrémité nordde cette dépression. Mais, dans ce cas, Manassé ne filque relever la partie méridionale qui existait déjà dutemps d’Ézéchias. Elle formait l’un des deux murs quienfermaient la piscine de Siloé et que mentionnait Isaie,xxir, 11, lorsqu’il disait: «Vous avez fait un bassinentre les deux murs pour les eaux de la vieille piscine.» On avait donc déjà pensé à fortifier par un double rempartce point vulnérable, le plus bas de la ville et conservantla pro ision d’eau. La «porte entre les deux murs» donnait sur les jardins du roi, «sur la voie qui conduit

au désert,» c’est-à-dire du côté du Jourdain, et c’estpar là que, pendant le siège de Jérusalem par 1 armée deNabuchodonosor, les guerriers et Sédécias s’enfuirent.IV Reg., xxv, 4. L’existence de cette double muraille aété constatée par les fouilles de M. Bliss. Le gros murqui se dirige au nord-est est certainement très ancien etremonte à la période juive. Cf. Palestine Expl. Fund,Quarterly Statentent, 1895, p. 305-320. M. Schick, DieBaugeschichte der Stadt Jérusalem, dans la Zeitschriftdes Deutschen Palâstina-Vereins, 1894, p. 21, pense quela Bible, II Par., xxxiii, 14, indique un triple travail deManassé. Le premier comprendrait un mur allant, àl’ouest d’Ophel, de la pointe méridionale de la collinejusqu’au Mello au nord, ou bien plutôt se détournant,au bout de 200 mètres environ, pour aller rejoindre versl’est l’antique rempart jébuséen. Le second serait unouvrage avancé défendant les abords de la porte desPoissons; le troisième, un pan de muraille élevé aunord-est d’Ophel, se rattachant, d’un côté à la cité deDavid, de l’autre au coin sud-est du palais royal, qui, surce point, eût été également protégé par un double mur.Voir la carte, fig. 249.

Pour terminer cette étude de Jérusalem avant lacaptivité, il nous reste à jeter un coup d’œil sur lesportes dont son enceinte était percée et les principalestours dont elle était flanquée. Elles sont presque toutesclairement indiquées dans II Esd., m; xii, 31-39, oùnous assistons à leur reconstruction par Néhémie.L’ordre même suivi par l’auteur sacré est notre meilleurguide pour connaître leur emplacement.

1° La porte du Troupeau (hébreu: sa’ar has-sô’n;Septante: tc-jXïj ïj icpoâaTixïî). II Esd.’, iii, 1, 31 (hébreu,32); xii, 38 (hébreu, 39). Il faut la chercher dans l’intérieurdu Haram actuel, au nord, un peu plus bas peut-êtreque la porte appelée aujourd’hui bâb-el-’atm. Ellese trouvait ainsi dans la direction de la piscine Probatique.

2° La porte des Poissons (hébreu: sa’aihad-ddgîm?Septante: ti-jàt] ï] ïj^uvipoi, ou i-/6uîxTJ, II Par., xxxiii,14; II Esd., iii, 3; xii, 38 (hébreu, 39); Soph., i, 10, àl’ouest de la tour Hananéel, dans la vallée de Tyropœon.

3° La porte Ancienne (hébreu: sa’ar ha-yesdndh;Septante: ti-jX?]’Io-ocvâ selon le Codex Vaticanus, xouAtaavâ suivant VAlexandrinus et le Smaiticus), Il Esd.,m, 6; xii, 38 (hébreu, 39), à l’angle que formait lamuraille en descendant vers le sud en face de la collinedu Saint-Sépulcre, dans l’alignement de la rue actuelleHâret Bdb el-’Amûd; k moins qu’on ne place là la ported’Éphraim, dont il n’est rien dit au chapitre m deNéhémie. Le texte relatif à cette porte offre matière àcritique. Voir t. i, col. 553-554.

4° La porte de Benjamin (hébreu: Sa’ar Binyâmin;Septante: wjr Bevtotquv). Jêr., xxxvii, 12; Zach., xiv, 10.Quelques-uns l’identifient avec la porte Ancienne;d’autres avec la porte d’Éphraim. Vo: r 1. 1, col. 554, 1599.

5° Importe d’Éphraim (hébreu: sa’ar’Éfraîm; Septante:icûXï)’Eippaiu, ), II Esd., viii, 16; xii, 38 (hébreu,39), en ligne droite au-dessous de la «porte Ancienne»,à l’angle formé par la muraille lorsqu’elle retournevers l’ouest. Elle correspondait ainsi à l’antique ported’Éphraim qui appartenait à la première enceinte. IVReg., XIV, 13; II Par., xxv, 23. Voir t. ii, col. 1881.

6° La porte de l’Angle (hébreu: sa’ar hap-pinnâh;Septante: m-rt zra yuvia;), mentionnée dans Jérémie,xxxi, 38, devait se trouver sur l’emplacement de la citadelleactuelle et correspondre peut-être à l’ancienneporte Gennath. Zacharie, xiv, 10, l’appelle «porte desangles» (hébreu: Sa’ar hap-pinnim; Septante: jcûXyjt<ôv Y<im<ûv)’; elle était, en effet, dans cette hypothèse,entre l’angle rentrant et l’angle saillant des remparts.Elle était défendue par la tour des Fourneaux. Suivantcertains auteurs, nous l’avons vii, la porte de l’Angledans la première enceinte, IV Reg., xiv, 13; II Par., , xxv, 23; xxvi, 9, était à l’extrémité opposée, près lamuraille du Temple. Voir t. i, col. 599.

7o La porte de la Vallée (hébreu: Sa’ar hag-gaya’; Septante:πύλη τῆς φάραγγος), II Par., xxvi, 9; II Esd., ii, 13, 15; iii, 13, au sud de la citadelle actuelle.

8o La porte Sterquiline (hébreu: sa’ar hâ-’aspôt;Septante: πύλη τῆς κοπρίας), II Esd., II, 13, iii, 13, 14; xii, 31, au sud-ouest de la colline occidentale; c’est la porte des Esséniens de Josèphe, Bell. jud., V, iv, 2.

9o La porte de la Fontaine (hébreu: sa’ar hd’aïn; Septante, πύλη τῆς πηγῆς, II Esd., iii, 15; πύλη τοῦ Ἀίν, II Esd., II, 14; πύλη τοῦ αἰνεῖν, II Esd., XII, 36 [hébreu, 37]), au sud-est, c’est-à-dire au-dessous de la piscine de Siloé.

10o La porte entre les deux murs (hébreu: Sa’arbên iia-hùmôfaim; Septante: πύλη ἡ ἀνὰ μέσον τῶν τειχῶν; IV Reg., xxv, 4; πύλη ἀνὰ μέσον τοῦ τείχους καὶ τοῦ προτειχίσματος, Jer., xxxix, 4; lii, 7), probablement unepetite porte située entre la double muraille qui enfermaitla piscine de Siloé, comme nous l’avons vu plushaut.

11o La porte des Eaux (hébreu: Sa’ar ham-niaim;Septante: πύλη τοῦ ὕδατος), II Esd., iii, 26; viii, 1, 3, 16; xii, 36 (hébreu, 37), au nord-est de la colline d’Ophel.

12o La porte des Chevaux (hébreu: Sa’ar has-sûsîm; Septante: πύλη τοῦ ἵππων), II Par., xxiii, 15; II Esd., iii,28; Jer., xxii, 40, vers l’angle sud-est de l’enceinte duTemple, vis-à-vis le palais royal et ce que l’on a appeléles écuries de Salomon. Voir t. ii, col. 682.

13o La porte Orientale (hébreu: sa’ar ham-mizrâl):Septante: πύλη τῆς ἀνατολῆς;), II Esd., iii, 29, entre laprécédente et la suivante.

14o La porte Judiciaire (hébreu: sa’ar ham-rnifqâd; Septante: πύλη μαφεκάδ), II Esd., iii, 30 (hébreu, 31), peut-être sur l’emplacement de la porte Dorée actuelle.

On cite encore: la porte Première (hébreu: sa’ar hâri’Sûn; Septante: πύλη ἡ πρώτη)), Zach., xiv, 10; la porte du Milieu (hébreu: sa’ar hat-(âvék; Septante: πύλη ἡ μέση), Jer., xxxix, 3; la porte des Tessons on du Potier (hébreu: Sa’ar ha-harsit; Septante: πύλη τῆς χαρσείθ; Vulgate: porta-fictilis), Jer., xix, 2; la porte de la Garde (hébreu: sa’ar ham-mattdràh; Septante: πύλη τῆς φυλακῆς), II Esd., XII, 38 (hébreu, 39), qui sontinconnues ou doivent être identifiées avec l’une oul’autre des précédentes.

Les tours principales étaient: au nord, la tour de Hananéel (hébreu: migdal lfânan’êl; Septante, Codex Vaticanus: πύργος Ἁνανεήλ, II Esd., iii, 1; xii, 38; Cod. Alexandrinus et Vaticanus: πύργος Ἁναμεήλ, II Esd., iii, 1; xii, 38; Jer., xxxi. 38; Zach., xiv, 10), à l’angle nord-ouest de l’enceinte du Temple, où fut plus tard l’Antonia. À côté, vers l’est, était la tour d’Êmath (hébreu: migdal ham-Mê’àh), II Esd., iii, 1 (Vulgate:tvrris Centum cubitorum); xii, 38 (hébreu, 39). Voir Émath 4, t. ii, col. 1723.

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253. — Angle A des anciens murs trouvés dans l’établissement russe. Vue prise du sud avant la restauration.

Il y a là des difficultés textuelles qui feraient regarder l’existence de cette tourcomme problématique. Cf. H. Vincent, La tour Méa, dans la Revue biblique, 1899, p. 582-589. À l’ouest, le rempart était protégé par la tour des Fourneaux ou des Fours (hébreu: migdal hat-tannûrîm; Septante: πύργος τῶν θανουρίμ). Enfin, à l’est, défendant le palais royal, était la tour Saillante (hébreu: migdal hay-yôsé’; Septante: πύργος ὁ ἐξέχων). II Esd., iii, 25, 26, 27.

Nous avons établi cette seconde enceinte sur les donnéesqui nous paraissent les plus solides, sans entrerdans les différents systèmes. On peut voir: Sayce, The topography of præ-exilic Jerusalem, dans le Palestine Expl. Fund, 1883, p. 215-223; Conder, Jerusalem of the Kings, même revue, 1884, p. 20-29; Birch, Notes on prae-exilic Jerusalem, ibid., 1884, p. 70-75; Schick,The second wall of ancient Jerusalem, ibid., 1893, p.191-193; Die zweite Mauer Jerusalems, dans la Zeitschrift des Deutschen Palästina-Vereins, 1885, p. 259-273, pl. viii; Die Baugeschichte der Sladt Jerusalem,même revue, 1894, p. 1-24, pl. i; F. Spiess, Die neueste Construction der zweiten Mauer Jerusalem und Josephus,ibid., 1888, p. 46-59.

2o De la captivité à la ruine de Jérusalem (70).


Tous ces ouvrages de défense ne sauvèrent pas de lavengeance divine la ville coupable de tant de prévarica

tions. En 587 avant J.-C, l’armée de Nabuchodonosorbrûla le Temple et le palais royal, rasa les maisons, démolitles remparts et emmena le peuple captif à Babylone.Mais Jérusalem devait se relever de ses ruines,pour recevoir un jour le Sauveur du monde, qui voulaiten faire le théâtre de son sacrifice.

4. Du retour de l’exil à Rérode le Grand.

Au boutde 71 ans, le Temple fut reconstruit par Zorobabel;mais les murs de la ville restèrent abattus jusqu’en 445avant J.-C, époque à laquelle Néhémie vint pour lesrelever. Il les refit sur leurs anciennes bases, en sorteque la seconde Jérusalem fut bâtie sur les fondementsde la première. Pour comprendre ce qui est dit au

vers le nord jusqu’à leur point de départ. Sur cetterestauration, voir C. Schick, Nehemia’s Mauerbau inJérusalem, dans la Zeitschrift des Deutschen Palâslina-Vereins,1891, p. 41-62, pl. n.’La seconde Jérusalem maintint constamment son périmètrejusqu’en l’année 42 de l’ère chrétienne, laissanten dehors le mont Bézétha et la colline du Calvaire.Elle subit cependant quelques modifications intérieures.Anliochus IV Épiphane, roi de Syrie, après avoir saccagéet profané le Temple, envoya plus tard des gens pourbrûler la ville et détruire ses murs. C’est alors que lesSyriens «fortifièrent la ville de David avec une grandeet forte muraille, et ils en firent leur citadelle», xa’i

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254. — Arche de Wilson. D’après The Recovery of Jérusalem, p. 76.

deuxième livre d’Esdras sur l’état des fortifications auretour de l’exil, ii, 11-15, sur leur reconstruction, iii,4-31, sur leur dédicace, xii, 27-39, il suffit de se reporterà la description que nous venons de faire. L’enceinteresta la même avec ses portes et ses tours. Les Chaldéensn’avaient pas démoli partout la muraille de fond encomble; certaines parties même, celles que ne mentionnepas l’auteur sacré, étaient sans doute restées plus oumoins intactes. Il fut donc facile aux Juifs d’en suivrele pourtour et de la ramener autant que possible à sonétat antérieur. La restauration, commencée par la portedu Troupeau, au nord, se continua vers l’ouest; puis, dela tour des Fourneaux, elle descendit vers le sud, pourretourner à l’est vers la colline d’Ophel. Là, la Bible,II Esd., iii, 15, 16, nous fait remarquer que les mursde la piscine de Siloé furent refaits, que l’enceinte passaitdevant «les degrés qui descendaient de la cité deDavid» et longeait «le tombeau de David», détails quicorroborent l’opinion d’après laquelle il faut chercher «la cité de David» sur la colline orientale. Après lasource de Gihon, les ouvriers poursuivirent leur œuvre

èfévETO a-jToïç eîç ôéxpav. I Mach., i, 35 (grec, 33). Pendantvingt-cinq ans, ils habitèrent cette forteresse, quitint en suspens les destinées de la cité sainte. Ils luidonnèrent, de même que les autres Grecs habitant Jérusalem,le nom à’Acra qui signifie simplement «citadelle» et s’appliqua en même temps à la colline qui la portait.Bon nombre d’auteurs, oubliant cette origine, ont faitd’inutiles efforts pour retrouver le mont Acra et luiassigner sa place parmi les autres collines sur lesquellesest bâtie la ville. Ils l’ont ordinairement indiqué, avecla ville basse de Josèphe, entre le Saint-Sépulcre et lefond de la vallée du Tjropœon. Voir fig. 237, col. 13251326. h’Acra était plutôt située sur la colline orientale,c’est-à-dire sur celle que Josèphe, Bell. jud., V, IV, 1,nous représente au delà de la vallée du Tyropœon. Aprèsavoir, en effet, mentionné celle qui portait la ville haute,et qui était de beaucoup la plus élevée et la plus droitedans le sens de la longueur, il ajoute: c L’autre collines’appelle Acra, est recourbée aux deux extrémités etsoutient la ville inférieure. En face de cette dernièreétait une troisième colline, naturellement plus basse

que Acra, et séparée par une large vallée, auparavantdifférente: dans la suite, au temps où les Asmonéensrégnaient, ils comblèrent la vallée, voulant réunir la

255. — Arche de Wilson. D’après The Recoveryo Jérusalem, p. 81.

était tout près du Temple, si près que, comme nousvenons de le voir, on fut obligé de la détruire pourqu’elle ne dominât point celui-ci. Nous lisons égalementI Mach., iv, 41, que Judas Machabée, après savictoire sur Lysias, montant à Jérusalem pour purifierle Temple, voulut que les prêtres ne fussent pas troublésdans leurs cérémonies et pour cela commanda à seshommes de combattre ceux que les Syriens avaientlaissés dans leur forteresse. Sous le règne d’AntiochusÉpiphane, on construisit à Jérusalem, au pied de lacitadelle, un gymnase et une éphébée. I Mach., i, 15;II Mach., iv, 9, 12. Voir Gymnase, col. 369; Éphébée,t. ii, col. 1830. Les Asmonéens élevèrent la tour Baris,qui lit plus tard partie de la forteresse Antonia. Cf. Josèphe,Ant. jud., XV, xi, 4. Ils se bâtirent ensuite, dans lecoin nord-est de la ville haute, un palais qui avoisinaitet dominait le Xyste. Cf. Josèphe, Bell. jud., II, xvi, 3.2. À l’époque d’Hérode le Grand.

Jérusalem devaitnaturellement bénéficier des idées de grandeur et de lamunificence qui portèrent Hérode à enrichir la Palestinede magnifiques monuments. L’œuvre principale de sonrègne fut la restauration du Temple. Nous n’avonspoint à rechercher ici les agrandissements et embellissementsqu’il apporta à l’enceinte et à l’édifice sacrés.Voir Temple. Mais nous devons dire comment, à cetteépoque, l’esplanade du Moriah était reliée à la collineoccidentale. Ce n’est pas que les travaux entrepris pourfranchir la vallée du Tyropœon remontent seulement àcette date. Il serait étonnant que, dans les âges précédents,on n’eût pas eu la pensée d’unir par un viaducquelconque les deux parties de la ville. Mais les donnéeshistoriques et archéologiques otîrent ici à notre étude

ville au Temple, et ayant travaillé le sommet de l’Acra,ils le rendirent plus bas, de sorte que le Temple ledominait.» Il ressort de ce texte que la troisième colline,qui semble bien correspondre à celle où l’on voudraitvoir Acra, en est tout à fait distincte. Mais si l’acropolesyrienne était à l’orient, à quel point précis laplacer? Tel est le problème, et il n’a jusqu’ici reçuaucune solution certaine. D’après le texte de I Mach., i,35, il faudrait la chercher sur l’Ophel, «la cité de David,» où se trouvait autrefois déjà la forteresse jébuséenne, etc’est ce que font plusieurs auteurs. Mais, d’autre part,Josèphe, Ant. jud., XIII, vi, 6, nous dit que Simon,ayant attaqué l’Acra de Jérusalem, la mit au niveau dusol, pour qu’elle cessât d’offrir aux ennemis un refuged’où ils faisaient beaucoup de mal aux Juifs. Mieux quecela même, il crut devoir abaisser le mont sur lequelelle était bâtie, et qui dominait le Temple. Le peupleconsulté se mit à l’œuvre, et, par un travail incessant,nivela si bien la montagne, que le Temple finit par l.idominer. Cet abaissement ne pouvait s’effectuer sui’l’Ophel, qui était beaucoup plus bas que le Moriah; ausud du Temple, il n’y avait que l’esplanade artificiellecréée par Salomon et qui était à un plan inférieur.L’œuvre, au contraire, pouvait s’accomplir au nord, onle mont Moriah s’élève assez considérablement. Et, effectivement,en face de la troisième colline dont nous venonsde parler, à l’extrémité nord-ouest et dans l’enceinteactuelle du Haram esch-Schérif, on a remarquéun rocher qui a été taillé, nivelé, abaissé. Son altituden’est plus que de 740 mètres: il était donc, comme le ditJosèphe, devenu plus bas que le Temple, dont le solétait de 744 mètres. Mais, avant cet abaissement, il devaitatteindre, comme le rocher voisin sur lequel reposaitl’Antonia, au moins 750 mètres, peut-être davantage,et, par conséquent, la colline d’en face, dont L(hauteur moyenne est de 737 à 744 mètres, était naturellementplus basse, taraivikEpoç <p’j<jei. On peut croirealors, dans cette hypothèse, que l’expression «cité deDavid», I Mach., i, 35, a un sens large et comprend leMoriah et l’Ophel.

, Ce qu’il y a de certain, c’est que l’Acra des Syriens

Arche de Robinson. D’après une photographie.

une base plus solide. Josèphe, Ant. jud., XIV, iv, 2;Bell. jud., II, xvi, 3, parle d’un pont qui allait duTemple à la ville supérieure et rejoignait le Xyste, placeornée de colonnades, voisine, comme nous venons de le

dire, du palais des Asmonéens. D’autre part, parmi lesplus curieux vestiges de l’antiquité que les fouilles ontmis à jour, il en est deux qui nous permettent d’apprécier les travaux au moyen desquels on pouvait traverserde plain-pied le Tyropœon. Ce sont les arches appeléesdu nom des deux explorateurs, Wilson et Robinson,qui en ont dégagé les fondations. Nous n’avons fait queles signaler en parcourant la ville, voir col. 1342; ellesméritant d’arrêter en ce moment notre attention. L’archede Wilson, au-dessous de la porle du Haram, nomméeBâb es-Silsiléh, a 13 mètres de largeur et est construitede blocs qui ont de deux à quatre mètres de longueur.Voir fig. 254. Le long du Harnm, sur lequel elle s’appuieà l’sst. on a trouvé, à sept mètres de profondeur, dansuns tranchée pratiquée du côté sud, une masse de I

tentrional, et c’est après ce remaniement que l’archeaurait été construite. On croit ce viaduc contemporainde la dynastie iduméenne, mais il a été réparé à l'époquebyzantine. L’arche de Robinson, à 12 mètres au nord del’angle sud-ouest, possède encore trois rangs de vonssoirs, occupant une largeur de ÎS^SO. Voir fig. 256. Lepilier, bâti sur le rocher, à 12 ln 80 au-dessous de lanaissance de l’arche, mesurait 15 m 50 de long sur 3 W 60d'épaisseur. Il n’en reste que les deux assises inférieureset une partie de la troisième. Elles sont formées de beauxblocs en bossage, taillés comme ceux du mur du sanctuaire, à l’angle sud-ouest. Entre ce pilier et le mur duHaram, à 17 mètres au-dessous de la surface du sol, etde niveau avec la base du pilier, on a retrouvé un ancienpavé, en pierre calcaire, s’inclinant légèrement à l’est,

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257. — Arche de Robinson, d’après le Palest. Expl. Fund, Quart. St., 1880, p. 14.

voussoirs et de pierres ayant évidemment appartenu àune arche plus ancienne. Voir fig. 255. À 13 nl 20 et à15 m 30, l’eau s’est rencontrée, coulant du nord au sud;peut-être était-elle autrefois recueillie dans le canaldont nous parlerons tout à l’heure. Le mur du Haramest ici formé de beaux blocs à bossage semblables à ceuxdu mur des Lamentations. À partir des fondations, onne compte pas moins de 21 assises, de 1 mètre à l m 20de hauteur, admirablement conservées. Le pilier del’arche, à l’ouest, est composé de sept assises de pierrestaillées, mesurant de m 95 à l m 25 de hauteur,semblables à celles que l’on voit au-dessus des pierresà bossage de la place des Pleurs. La hauteur de cettemaçonnerie est de 7 mètres environ, la largeur tle 4 m 35.Une galerie, pratiquée à la base même du roc, a montréqu’il incline à l’est. Une tranchée ouverte à l’ouest dupilier a fait découvrir une chambre voûtée munie d’uneîenêtre murée, derrière laquelle s'étend une série devoûtes à arches semi-circulaires, situées dans le prolongement de l’arche. Elles sont sur une double ligne, lesvoûtes du sud ayant 7 mètres de largeur et celles dunord, 6 m 30, ce qui donne à peu près la largeur del’arche de Wilson. La partie méridionale est la plusancienne et constituait probablement la chaussée originelle. On l’aurait agrandie, en y ajoutant le côté sepsur lequel gisaient les voussoirs tombés de l’arche. Voirfig. 257. Il repose sur une énorme couche de débris,au-dessous de laquelle on a découvert deux voussoirsd’une arche tombée, dont l’un mesure 2 m 10 de longueur,et plus de 1 mètre de largeur et de hauteur. Ces voussoirs gisaient à travers la voûte d’un canal creusé dansle roc, situé à 24 mètres au-dessous de la surface actuelledu sol, et courant du nord au sud, parallèlement aumur du Haram. C’est cet aqueduc qui devait recevoir leseaux dont nous avons constaté la présence sous lepremier viaduc. En tournant maintenant nos regardsdu côté de l’ouest, nous remarquerons à 75 mètresdu mur du Haram, les restes d’une colonnade forméede piliers reposant sur le roc, à 5 m 40 au-dessous dusol, et construits en beaux moellons d’un grès tendre.Des débris d’arches ont été retrouvés entre ces piliers,qui se prolongent vers l’est et formaient sans doute unviaduc de niveau avec l’arche de Robinson. Nousaurions donc ici les restes de deux ponts d'époquedifférente; le premier, dont une partie est visible encore,serait du temps d’Kérode, le second, dont deux voussoirs gisent au fond du ravin, serait beaucoup plusancien. «On ne nous donne pas de détails sur laforme et la taille de ces voussoirs; mais il est difficilepourtant de ne point conclure de ces observations

qu’à une époque antérieure au système de l’appareil àrefends, un pont aurait été jeté, mais à un niveau plusbas, entre la colline occidentale et celle du Temple.

258.— Plan de la citadelle. D’après C. Schick, dans la Zettschriftdes Deutschen PalastinaVerems, 1890, p. 64.

Ce premier pont ne pourrait alors appartenir qu’autemps des rois de Juda; il remonterait peut-être àSalomon lui-même. Élèves des Égyptiens et desAssyriens, les maîtres des Juifs, les Phéniciens, connaissaientle principe de la voûte; ils ont pu l’appliquerici dès le xe siècle.» Perrot, Histoire de l’art,t. iv, p. 168. Cf. Palestine Exploration Fund, Quart.Slat., 1880, p. 9-30, avec plusieurs plans; Wilson et Warren,The Recovery of Jérusalem, p. 76-111; Warren etConder, Survey of Western Palestine, Jérusalem,p. 173-209.

A l’angle nord-ouest de l’esplanade du Temple,Hérode éleva la forteresse Antonia, à laquelle furentjoints des appartements de toute nature, des cours àportiques, des bains, en sorte que, par sa magnificence,elle semblait un palais. Cf. Josèphe, Bell. jud., V, v, 8.Pour la rendre inaccessible, il la fit séparer du montBézétha par un fossé très large et très profond. VoirAntonia, t. i, col. 712. Il se bâtit, en outre, une splendidemaison royale dans l’angle nord-ouest de la villehaute, sur l’emplacement actuel de la caserne turqueet du jardin des Arméniens. Il l’entoura d’un mur trèsélevé, flanqué, au nord, de trois tours qui étaient d’unestructure et d’une hauteur remarquables, et qu’il appela:Hippicus, du nom d’un de ses amis; Phasaël, en mémoirede son frère aîné; et M ariamne, pour perpétuerle souvenir de sa seconde et malheureuse femme, qu’ilavait éperdûment aimée. L’intérieur du palais étaitd’une richesse extraordinaire, plein de bosquets, d’ombreet de fraîcheur. On peut voir la description qu’en faitJosèphe, Bell. jud., V, iv, 4. La tour nord-ouest de lacitadelle peut répondre à la tour Hippicus. Voir fig. 258.Celle-ci, au dire de Josèphe, Bell. jud., V, iv, 3, étaitun carré de 25 coudées (environ 13 mètres) de côté, cequi concorde assez avec les dimensions de la constructionactuelle. Celle du nord-est, appelée communémenttour de David, représente bien par sa forme et sastructure inférieure, la tour Phasæl, à laquelle Josèphe,

ibid., donne quarante coudées (environ 21 mètres) enlongueur et en largeur. Elle a, en réalité, 21 mètres delong sur 17 de large, ce qui constitue une différenceassez légère. À partir du pied, dans le fossé, elle estbâtie, jusqu’à une hauteur de 12 mètres, pn grossespierres à refends, mais à surface brute; la rainure abien été creusée, mais la table centrale qu’elle embrassen’a pas été aplanie. Voir fig. 259. Les blocs unis sansmortier sont placés de manière que celui de dessus estposé en travers de celui de dessous. Toute cette vieillepartie est massive, sauf un petit couloir au côté ouest.Les assises du haut sont de construction moderne; nousn’en avons pas moins là le plus beau spécimen desanciennes tours de Jérusalem, dont les soubassementsreposaient sur le roc ou sur un cube de maçonneriemassive. Cf. C. Schick, Der Davidsthurm m Jérusalem,dans la Zeitschrift des Deutschen Palàstina-Vereins,1878, p. 226-237, pl. i-ni. Quant à la tour Mariamne,elle avait, selon Josèphe, ibid., 20 coudées (10 mètres50) de côté; c’était la plus petite, mais la plus belleintérieurement. Occupait-elle la place de celle quise trouve près de la précédente, au sud? Nous nesavons.

Hérode bâtit à Jérusalem un théâtre, et, dans la vallée,un très grand amphithéâtre. Josèphe, Ant. jud., XV,vin, 1. M. Schick a découvert, il y a plusieurs années,les vestiges d’un théâtre ancien, situé au sud de la ville.Si l’historien juif ne parle pas de l’intérieur même dela cité, nous avons là certainement la place du monumentélevé par le roi iduméen. Cet emplacement setrouve au sud de Vouadi er-Rebâbi, au sud-ouest deBir Éyûb. Les collines qui s’étagent de ce côté sont

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259. — Tour de David. D’après une photographie.

séparées par deux vallées profondes, descendant del’ouest à l’est vers Vouadi en-Nar. Voir la Carte desenvirons de Jérusalem, de C. Schick, dens la Zeitschrift

des Deut. Pal.-Vereins, 1895, pl. 4. La premières’appelle ouadi esch-Schama, la seconde, ouadi Yasûl.C’est sur le flanc méridional de la première qu’on rencontre l’hémicycle qui dessine encore les contours duthéâtre. Voir fig. 260. L’endroit était choisi à merveille.Les parois de la colline, formées d’un rocher tendre, ontété taillées de manière à porter directement les gradins.Comme tous les anciens théâtres romains, celui-ciregardait le nord, pour éviter le trop grand soleil, et lesspectateurs avaient devant les yeux le magnifique panorama de la ville. L’hémicycle avait un diamètre d’environ45 mètres. De toutes ses splendeurs, il ne reste plusrien; on n’a retrouvé que deux pierres taillées en corniche. Cf. C. Schick, Herod’s amphithéâtre, dans lePal. Expl. Fund, Quart. Stat., 1887, p. 161-166, avecplan et coupes. On a constaté que l’acoustique y estexcellente. Cf. Germer-Durand, Le théâtre d’Hérode à

260. — Théâtre d’Hérode. D’après le Palest. Expl. Fund,Quart. Stat., 1887, p. 1C2.

Jérusalem, dans les Échos de N.-D. de France, Paris,avril 1896, p. 72.

Il est facile maintenant de se représenter la villesainte, telle qu’elle était au temps de Notre-Seigneur.Avec ses hauts murs flanqués de bastions, ses nombreuxpalais, et surtout son enceinte sacrée, elle devait offrirun coup d’oeil splendide. Le Temple la dominait de toutela magnificence de ses richesses, comme de la majestéde l’idée religieuse qu’il représentait. Avec ses portiquesaux immenses colonnes, son revêtement de marbreblanc, les aiguilles d’or qui couronnaient le sanctuaire,il ressemblait, vu de loin, à une montagne de neige,teintée de pourpre et d’or par les rayons du soleillevant. Josèphe, Bell. jud., V, v, 6. S’il faut en croirele même historien, ibid., V, iv, 3, les murailles de lapremière enceinte avaient 60 tours, celles de la secondequatorze. Mais, par suite de la prospérité qu’elle acquitsous Hérode, la ville, franchissant le cercle de pierresqui l’enfermait, ^'étendit vers le nord. Le mont Bézétha,tout le territoire voisin de la eolline du Golgotha secouvrirent peu à peu de maisons et de jardins, dontl’ensemble devait offrir aussi un très bel aspect. VoirJardins, col. 1130. Jérusalem était donc une cité imposante, bien qu’elle eût à l’intérieur des rues étroites ettortueuses, rattachées cependant comme aujourd’hui,croyons-nous, par des artères principales que la naturedu terrain doit avoir tracées de tout temps. Outre la placeprincipale, sur laquelle était le Xyste, elle avait encorela place des Bouchers, celle des Ouvriers en laine, lemarché supérieur. Cf. Mischna, Erubhin, c. S, hal. 9;Josèphe, Bell. jud., V, viii, 1. Elle possédait surtout unnombre presque incroyable de synagogues. Il y en avait

460 ou même 480, d’après le Talmud de Jérusalem,Mégillah, fol. 73 6; Ketuboth, 35 b. «On comprend cechiffre exorbitant, lorsqu’on sait qu’aujourd’hui, dansles villes musulmanes, le nombre des mosquées n’estpas moins considérable. Chaque famille a pour ainsidire la sienne. Les synagogues de Jérusalem étaientcertainement la propriété exclusive des grandes familles,et surtout des corporations. Il y en avait une, par exemple, appelée synagogue des chaudronniers. De plus, lesétrangers de passage dans la ville avaient à leur usagela synagogue spéciale de la contrée d’où ils venaient; ily avait les synagogues des Cyrénéens, des Ciliciens, desAsiatiques, des Alexandrins. Act., VI, 9. Dans celle-cion employait la langue grecque et on lisait la traductiondes Septante. Talm. de Jérus., Sota, 21 6. Toutes cessynagogues étaient très fréquentées et chaque matin, aulever du jour, les rues se remplissaient de femmes, describes, de Pharisiens, leurs tefilhn attachés sur lebras, se rendant à leur synagogue préférée. <> E. Stapfer,La Palestine au temps de Jésus-Christ, Paris, 1885,p. 61. Et c’est sur cette ville qu’un jour le divin Maîtrepleura. Luc, xix, 41.

3. Troisième enceinte (de l’an 45 à l’an 70). — Lesagrandissements dont nous venons de parler nécessitèrent une nouvelle enceinte, pour abriter les quartiersrécemment formés. Ce fut le roi Hérode Agrippa Ierqui entreprit ce travail colossal. Grâce à Josèphe, Bell,jud., V, iv, 2, nous pouvons suivre exactement lesdéveloppements de la troisième muraille. Voir fig. 249.Partant de la tour Hippicus, elle s'étendait, au nord,jusqu'à la tour Pséphina. De forme octogonale, celle-ci,par son élévation et l’emplacement qu’elle occupait, étaitla plus haute de Jérusalem, en sorte que, de son sommet, on pouvait, au lever du soleil, voir la Judée depuisl’Arabie jusqu'à la Méditerranée. Josèphe, Bell. jud.,V, IV, 3. Elle se trouvait à l’angle nord-ouest de la villeactuelle, là où l’on a retrouvé les restes d’une ancienneforteresse dite Qasr Djâlûd, «forteresse de Goliath,» sur le terrain où les frères de la Doctrine chrétienneont bâti leurs écoles. Cf. Pal. Expl. Fund, Quart. Stat.,1878, p. 78; C. Schick, Die antïken Reste an derNordwestmauer von Jérusalem, dans la Zeilschrift desDeut. Pal.-Vereins, 1878, p. 15-23, avec plan, pl. iv;Survey of Western Palestine, Jérusalem, p. 264-267.De là, l’enceinte passait devant le monument d’Hélène,reine des Adiabéniens, puis par les cavernes rojales, quisont en face de la grotte de Jérémie. Voir Carrières,t. ii, col. 319. Arrivée à la tour angulaire, près du monument du Foulon, elle allait, par la vallée du Cédron, seréunir à l’ancien mur, c’est-à-dire à l’angle nord-est del’esplanade du Temple. Comme on le voit, elle suivaità peu près exactement l’alignement de la muraille septentrionale de la ville actuelle, depuis la porte de Jaffajusqu'à la porte Bâb Sitti Mariant. Josèphe, dans lemême passage, ajoute que la cité eût été inexpugnable,si cette troisième enceinte eût été terminée commeHérode Agrippa Ier l’avait commencée. Les blocs depierre que celui-ci avait employés mesuraient, en effet,20 coudées (10-40) de long sur 10 coudées (5o» 20) de large,en sorte qu’il n’aurait pas été facile de les briseravec le fer, ni de les ébranler avec les machines. Craignant d'éveiller les susceptibilités de Claude César, leroi suspendit ce travail, que les Juifs achevèrent plustard sous Agrippa II, en donnant au mur une hauteurde 25 coudées et en se servant de blocs de pierre demoindres dimensions. Malgré sa force imposante, laseconde Jérusalem devait bientôt tomber sous les coupsde Titus, comme la première avait succombé sous ceuxde l’armée de Nabuchodonosor.

La Jérusalem biblique finit avec Titus; nous n’avonsdonc pas à pousser plus loin notre étude. De son noyauprimitif, c’est-à-dire de la colline du sud-est, elle s’estsuccessivement étendue sur les hauteurs voisines, qu’elle Jérusalem. — Vue prise du Mont des Oliviers (1901), d’après une photographie de M. Dissaro.

a fini par enfermer dans sa triple enceinte. Au momentoù nous la quittons, elle a atteint des limites qu’elle nedépassera plus au cours de sa longue histoire. La richessede ses monuments fait revivre sa gloire d’autrefois, sousSalomon. À part le Temple, qui sera décrit en son lieu,nous avons essayé de la reconstituer à ses différentsâges, dans ses lignes essentielles. Dans cet ensemble decollines, de maisons, de palais, bientôt un seul pointfixera les regards du monde, d’un monde nouveau. Cen’est pas le Temple, qui va disparaître pour toujours,mais un petit monticule entouré de jardins, près d’unedes portes de la ville, le Golgotha. Marqué du sang dela Rédemption, il restera un instant enseveli sous lesruines de la cité déicide, mais pour ressusciter daus lagloire, comme Celui qui voulut y réaliser les figures del’Ancien Testament et en faire le berceau de la NouvelleAlliance.

III. Histoire.

Jérusalem tient une telle place dansla vie du peuple hébreu, que son histoire complèteserait presque l’histoire du peuple lui-même. Nousn’avons à rappeler ici que les événements qui la concernent directement. Après avoir, dans les pages précédentes, résumé les principales phases de son passé aupoint de vue archéologique, il ne nous reste qu'à consigner les faits les plus mémorables qui se sont accomplis dans son sein. L’ordre que nous suivrons sera lemême.

I. de l’omginb À la capti virÉ. — 1o Avant David. —A quelle époque et par qui fut fondée Jérusalem? L’histoire ne nous le dit pas. Josèphe, Bell. jud., VI, x, enattribue la première origine à Melchisédech, qui, aprèsy avoir dressé un autel, changea le nom primitif deSalem, SdXujioc, en celui de Jérusalem, 'IspoirtiAUjia, ou «la sainte Solyme». Nous avons là, sans doute, l'échod’une tradition ancienne, mais elle semble aussi fragileque l'étymologie qu’elle vient appuyer. Saint Jérôme,Epist. lxxiii, t. xxii, col. 680, la rejette et soutient quela ville dont Melchisédech était roi se trouvait dansles environs de Scythopolis ou Bethsan (aujourd’huiBétsâri). Il ne nie pas, cependant, que Jérusalem ait étéanciennement appelée Salem. Cf. Epist. lxxiri, t. xxii,col. 677. Un certain nombre d’exégètes partagent l’avisdu saint docteur. D’autres pensent, malgré ces autorités, que le récit de la Genèse, xiv, 18, nous transportebien à Jérusalem, sans pour cela en assigner la fondation à celui qui en était le prêtre-roi, à Melchisédech. Voir Salem. De l'époque d’Abraham à la conquêteisraélite, l'Écriture garde le silence sur la cité chananéenne. Une découverte très importante faite enEgypte, à Tell el-Amarna, en 1887, a en partie comblécette lacune. Les lettres assyriennes qu’on y a trouvéesnous montrent que, vers 1400 avant l'ère chrétienne,par conséquent avant l’exode des Hébreux, Urusalimcomptait déjà parmi les principales villes du midi dela Palestine. Elle avait à ce moment pour gouverneurAbd-kiba, vassal du pharaon Amenhotep, de la dixhuitième dynastie. Le préfet se plaint auprès de sonsuzerain des incursions d’un certain peuple nommé lesJfabiri, peut-être les Hébreux, qui ont poussé l’audacejusqu'à assiéger Jérusalem. Il demande des secours avecinstance. Cf. H. Winckler, Die Thontafeln von Tellel-Amarna, Berlin, 1896, lettres 179-185, p. 302-315;H. Zimmern, Palûstina um dos Jahr 1400 vor Chr.nach neuen Quellen, dans la Zeitschrift des DeutschenPalâstina-Vereins, 1890, t. xiii, p. 138-142; Fr. Hommel,Die altisrælitische Ueberlieferung in inschriftlicherBeleuchtung, Munich, 1897, p. 155-160. Jérusalem étaitdonc alors, comme le pays de Chanaan, tributaire del’Egypte, soumise au gouvernement égyptien. Cf.A. J. Delattre, Le pays de Chanaan, province de l’ancien empire égyptien, dans la Revue des Questionshistoriques, 1896, t. lx, p. 5-94. Voir Palestine.

Lorsque les Hébreux entrèrent dans la Terre Promise,

D1CT. DE LA BIBLE.

la ville qu’ils devaient rendre si célèbre était au pouvoir d’une peuplade chananéenne, les Jébuséens, ets’appelait Jébus. Voir Jébus, Jébuséens, col. 1208,1209. Le roi était Adonisédech,» le seigneur de la justice,» dont le nom, par la forme et le sens, rappellecelui de Melchisédech, «roi de justice.» Effrayé de laprise de Jéricho, de Haï, de la défection des Gabaonites,sentant déjà la menace de l’invasion, ce prince voulutopposer une digue au torrent dévastateur. Il fit unealliance avec les rois d’Hébron, de Jérimoth, de Lachiset d’Eglon, et vint mettre le siège devant Gabaon, pourla châtier et tout à la fois empêcher les autres villes desuivre son exemple. Mais Josué, prévenu à temps, délivra les assiégés et mit à mort le chef de la ligue avecses confédérés. Jos., x, 1-27; xii, 10. Malgré celle délaite, les Jébuséens défendirent valeureusement leurcité, qui échappa au pouvoir des Israélites et servit delimite aux deux tribus de Juda et de Benjamin. Laligne frontière passait, en effet, au sud, par la vallée deHinnom, laissant la ville à la seconde de ces tribus.Jos., xv, 8, 63; xviii, 28. Voir Benjamin 4, et la carte,t. i, col. 1589. Cette circonstance explique comment lesdeux voisins se la disputèrent après la mort de Josué.Juda l’attaqua une fois avec succès, il s’en empara,passa les habitants au fil de l'épée et la livra auxflammes. Jud., i, 8. Cependant, les Jébuséens restèrenten possession de leur citadelle, sur la colline de Sion,et habitèrent avec les enfants de Benjamin. Jud., i, 21.Leur nombre même s’accrut tellement que Jérusalempouvait être appelée «la ville d’une nation étrangère».Jud., xix, 12.

2o Sous David.

La cité demeura donc entre les

mains des Jébuséens pendant tout le temps de la domination des Juges et durant le règne entier de Saûl.Mais David, devenu maître de tout Israël, voulut enfaire sa capitale. Avec son coup d'œil de soldat et d’administrateur, il jugea tout de suite le parti qu’il pouvaittirer de cette place, qui, par sa position et ses avantagesnaturels, semblait désignée pour être le boulevard politique et religieux de la nation. Voir plus haut, col. 1320,1321. C’est lui qui, en somme, peut être appelé le vraifondateur de Jérusalem. Mais il fallait déloger les habitants de leur forteresse, et ce n'était pas chose facile.Ceux-ci avaient une telle confiance dans la force inexpugnable de Sion (voir plus haut Topographie ancienne,col. 1352), que, lorsqu’ils virent le jeune roi s’approcheravec une armée considérable, ils répondirent à sonaudace par une orgueilleuse moquerie: les aveugles etles boiteux suffiraient pour défendre les remparts. Ilsse repentirent bientôt de leur insolence. David, irritéde cette insulte, opyiaOsi;, dit Josèphe, Ant jud., VIII,m, 1, promit de nommer général en chef de toute l’armée celui qui, le premier, escaladerait la forteresse etterrasserait le Jébuséen. CefutJoab qui obtint la récompense. Sion tomba entre les mains de David, qui en fitsa résidence, sa «cité». II Reg., v, 6-9; I Par., xi, 4-7.C’est la première fois qu’apparaît dans l’histoire ce nommémorable de Sion, qui représentera bientôt et dans lasuite des siècles la demeure de Dieu sur la terre.

Le premier soin du conquérant fut d’entourer saville, c’est-à-dire la colline sud-est, de solides muraillesqui la reliaient à la citadelle. Mais l'événement quimarquait si heureusement les débuts du jeune princeeut son retentissement chez les peuples voisins. Iliram,roi de Tjr, envoya bientôt à David une ambassade,avec des bois de cèdre et des ouvriers pour lui bâtir unpalais. II Reg., v, 11; I Par., xiv, 1. La demeure royale,élevée sur une des terrasses d’Ophel, devenait une nécessité pour recevoir la famille toujours croissante dufils d’Isaï. II Reg., v, 13-16; I Par., iii, 5-9; xiv, 3-7.Jérusalem était désormais la capitale du royaume deplus en nlus affermi; elle allait devenir le centre religieux de la nation en recevant l’arche d’alliance. Le roi

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voulut, en effet, avoir près ue lui l’arche sainte, symbolede la présence divine. Il la fit transporter avec la plusgrande solennité sur la colline de Sion, dans un tabernacle construit à côté du palais, " ce fut un jour d’allégresse et de prières pour le peuple tout entier. II Reg.,vi, 1-49; I Par., xv, xvi. La puissance royale s'étenditensuite peu à peu par la soumission des Philistins, letribut imposé aux Moabites, la défaite du roi de Soba,des Syriens de Damas, des Iduméens. Toutes ces victoires avaient apporté à Jérusalem d’immenses quantités d’or, d’argent, de cuivre et d’autres métaux. Davidconçut le projet de les consacrer au Seigneur, en luiélevant un magnifique temple, mais cette gloire étaitréservée à son fils. Une tentation d’orgueil le poussaen même temps à ordonner le recensement de sonpeuple. La punition de cette faute fut une peste épouvantable, qui fit périr 70 000 hommes. Déjà l’ange exterminateur, debout entre ciel et terre, au-dessus de l’airedu Jébuséen Oman, étendait sa main contre Jérusalempour la frapper, lorsque Dieu, ému de pitié, l’arrêta.Pour remercier le Seigneur de la cessation du fléau,David acheta l’aire, qui était située sur le mont.Moriah,et y dressa un autel, sur lequel il offrit des holocaustes.

II Reg. xxiv; I Par., xxi. Ne pouvant construire leTemple, il voulut au moins en préparer les matériaux.Les pierres, taillées par de nombreux ouvriers, furenttransportées à Jérusalem. Il fit venir de Tyr et de Sidonune grande quantité de bois de cèdre, entassa d’immenses provisions de cuivre et de fer, et accumula l’oret l’argent pour cette œuvre qui avait été le rêve de sapiété. I Par., xxii. Avant de mourir, il en donna leplan à son fiis Salomon, puis «il s’endormit avec sespères et il fut enseveli dans la cité de David». III Reg.,il, 10. C’est donc là, sur la colline d’Ophel, qu’ilfaudrait chercher le tombeau du saint roi. Cf. ClermontGanneau, Recueil d’archéologie orientale, Paris, 18961897, t. ii, p. 254-294, et Comptes rendus de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, Paris, 1897,p. 383-427.

3/s Sous Salomon. — Le règne de Salomon futl'époque la plus brillante pour Jérusalem. Nous avons ditplus haut, col. 1354-1359, quels furent les travaux de ceprince par rapport à l’enceinte de la ville. Son œuvreprincipale fut le Temple, qui, par la richesse des matériaux et des ornements, par le goût et l’art qui présidèrent à sa construction, devint une des merveilles'du monde. Voir Temple. Le Moriah fut vraiment lamontagne sainte, le rendez-vous de tous les pieuxIsraélites; chaque jour, le sacrilice s’y consommait, auchant des cantiques sacrés, de la main des prêtres etdes lévites, merveilleusement organisés par David. Lademeure de son père ne parut plus suffisante à Salomon; gendre d’un pharaon, il voulut que la princesseégyptienne habitât un palais qui 1 ne fût pas trop inférieur à ceux de Tanis ou de Memphis. Celui qu’il bâtitfut le digne pendant du Temple, près duquel il s'élevait. Tous les bâtiments étaient compris dans unemême enceinte, limitée de tous côtés par un mur qui,à l’est et à l’ouest, dominait de haut les deux vallées duCédron et du Tyropœon. Le premier monument quel’historien sacré place dans cette enceinte, c’est celuiqu’il appelle le palais du «Bois-Liban», ainsi nomméparce que la plus grande partie des matériaux dont ilétait fait avait été tirée des forêts de cette montagne.

III Reg., vii, 2. Le rez-de-chaussée formait une vastesalle hypostyle. Il y avait ensuite le portique du trône,où le roi rendait la justice, et les bâtiments d’habitation,qui ne pouvaient manquer d’occuper un très vasteespace. Ces groupes d'édifices, sommairement décrits,III Reg., vii, 1-12, se succédaient sur les terrasses ducoteau. Pour en essayer la restitution, il faudrait faireune part trop considérable à la conjecture. On peutvoir cependant B. Stade, Geschichle des Volhes Israël,

Berlin, 1887, 1. 1, p. 311-326, avec plan, p. 305; Der Textdes Berichtes ùber Salomos Baulen, 1(111) Reg, , T-ril,dans la Zeilsckrift fur die alttestamentliche Wissenschaft, Giessen, 1883, p. 129-177; Perrot, Histoire del’art, t. iv. p. 402-408. En dehors des édifices expressément nommés dans l'Écriture, la tradition attribueaussi à Salomon de grands travaux d’utilité publiqueet, en particulier, la construction de réservoirs et d’aqueducs destinés à pourvoir abondamment Jérusalemd’eau potable. La flotte qu’il fit construire à Asiongaberet le commerce qu’il entretenait avec les peuples voisinsfirent affluer dans sa capitale les trésors des pays lointains, or, argent, métaux, objets rares et précieux. Larenommée de sa sagesse y attira la reine de Saba.IIIReg., x. Malheureusement, à la fin de sa vie, il selaissa corrompre par l’amour des femmes, païennespour la plupart, et, pour leur complaire, il éleva destemples, des bosquets, des autels et des idoles à leursfausses divinités. III Reg., xi, 1-8. On a voulu voirdans un très curieux monument découvert au villagede Siloam, près de Jérusalem, la chapelle égyptienneque Salomon aurait bâtie pour que la reine pût s’yadonner au culte de ses pères. Cf. F. de Saulcy, Voyageautour de la mer Morte, Paris, 1853, t. ii, p. 306-313,pi. xlii. Cette hypothèse est peu vraisemblable. La disposition intérieure du monolithe est plutôt celle d’unetombe. Cf. Perrot, Histoire de l’art, t. iv, p. 346-356.D’après ce simple résumé de la vie du grand roi, onpeut se faire une idée de l'éclat dont brillait Jérusalemà cette époque.

Sous les rois de Juda.

Cette gloire s'éclipsa

avec celui qui l’avait portée à son apogée. Le schisme desdix tribus enleva à Jérusalem une partie de sa couronne,elle ne fut plus reine que de Juda et de Benjamin,comme l’avait prédit le prophète Ahias. III Reg., xi, 2939. Les jours de l'épreuve ne tardèrent pas à venir. Avecce changement politique, une nouvelle période allaits’ouvrir dans l’histoire du peuple de Dieu. La cité sainte,isolée d’Israël par le veau d’or que Jéroboam établit auxfrontières du nouveau royaume, III Reg., xii, 26-29,diminuée ainsi dans son autorité religieuse, devait enmême temps, par l’affaiblissement de sa puissance, devenir le point de mire des peuples étrangers et subirleur choc, jusqu’au jour où ils l’auront complètementécrasée. Les richesses accumulées dans la ville de Davidet de Salomon devaient d’ailleurs tenter les rois voisins.Ce fut le pharaon d’Egypte, Sésac, qui, le premier, vintla dépouiller. La cinquième année du règne de Roboam,il marcha contre elle avec 1200 chariots et 60000 cavaliers, sans compter une multitude de soldats auxiliaires.Pénétrant dans le Temple et le palais royal, il emportatous les trésors qu’ils renfermaient. III Reg., xiv, 25-26;II Par., xii, 2-9. Plus tard, l'éthiopien Zara, à la têted’une immense armée, envahit la Judée, sous le règned’Asa. Celui-ci, plus prudent et plus vaillant que Roboam, n’attendit pas d'être bloqué dans sa capitale pourse défendre. Il marcha au-devant de l’ennemi, l’extermina, et rentra à Jérusalem avec un magnifique butin.II Par., xiv, 9-15. Il restaura alors l’autel qui était devantle vestibule du Temple, rassembla tous ses sujets, auxquels se mêlèrent des Israélites, et offrit de nombreuxsacrifices. Il brisa une honteuse idole élevée par sa mèreet la brûla dans la vallée du Cédron. III Reg., xv, 13;II Par., xv, 8-16. Bientôt cependant, après avoir enrichila maison du Seigneur et le palais royal, il ne craignitpas d’aliéner une partie de ces trésors pour acheterl’alliance de Bénadad, roi de Syrie, contre Baasa, roid’Israèl. III Reg., xv, 18; II Par., xvi, 2-3. Le règne deson fils, Josaphat, fut une ère de prospérité pour Juda.Le pieux monarque s’efforça de faire fleurir la paix,l’ordre et la justice à Jérusalem, comme dans toutes lesvilles de ses États. Il y établit un tribunal suprême composé de prêtres, de lévites et de chefs de familles, chargé

de décider en dernière instance tous les cas difficilesdans les affaires religieuses, administratives et civiles.Les Philistins et les Arabes lui apportaient des présentset des tributs. Son seul tort fut de s’allier avec Achab etd’accepter pour son fils Joram Athalie, digne fille del’impie et cruelle Jézabel. IL Par., xvii, 10-13; xix, 4-11.Il sut, par sa confiance en Dieu, repousser une invasionde Moabites, Ammonites et autres peuples. II Par., xx,1-30. Joram, qui lui succéda, inaugura son règne par lemassacre de ses six frères, puis il éleva des autels auxfaux dieux et rétablit à Jérusalem l’idolâtrie que sonpère s’était efforcé d’extirper. La punition divine ne sefit pas attendre. Les Arabes et les Philistins pénétrèrentdans la terre de Juda, vinrent jusque dans la capitale,pillèrent le trésor du roi, emmenèrent ses femmes etses fils, à l’exception du plus jeune. II Par., xxi, 4, 11,16, 17. Quelques auteurs cependant pensent que Jérusalemne fut pas atteinte. Cf. Keil, Chronih, Leipzig, 1870,p. 300. Après la mort d’Ochozias, Athalie usurpa le trône,et, pour régner seule, n’hésita pas à exterminer la racede David, en égorgeant ses propres petits-fils. Un seul,Joas, fut soustrait à sa haine et au massacre, caché etélevé furtivement dans l’un des appartements du Temple,puis, plus tard, proclamé roi. Au jour de cette proclamationsolennelle, Athalie, entendant de son palaisles cris de joie et le son des trompettes, courut auTemple, mais elle s’enfuit bientôt épouvantée et fut miseà mort à la porte des Chevaux. II Par., xxii, 10-12;XXIII.

Sous le gouvernement de cette triste reine, Jérusalemavait vu le culte de Baal prévaloir contre celui de Jehovah,et les dépouilles du Temple servir au sanctuairepaien. II Par., xxiv, 7. Après le couronnement de Joas,le peuple lui-même détruisit les idoles et leurs autels.II Par., xxiii, 17. Plus tard, le roi, voulant réparer lamaison du Seigneur, employa aux restaurations l’argentqui provenait des dons volontaires de la piété de sessujets. IV Reg., xii, 4-15; II Par., xxiv, 4-14. Mais, aprèsla mort de Joiada, il s’abandonna à l’idolâtrie et fit périrZacharie, qui lui reprochait ce crime. Dieu ne tardapas à venger le sang du martyr. Hazæl, roi de Syrie,envahit le territoire de Juda, marcha contre Jérusalem,massacra les chefs du peuple, et ne s’éloigna que lorsqueJoas eut acheté sa retraite avec les trésors du Temple etdu palais royal. IV Reg., xii, 17-18; II Par., xxiv, 23-24.Sous Amasias, ce fut Israël qui saccagea, le Temple etle palais, emporta à Samarie l’or, l’argent et les vasesprécieux qui s’y trouvaient, et détruisit 400 coudées dumur septentrional de la ville. IV Reg., xiv, 13-14; II Par.,xxv, 23-24. Le long règne d’Ozias releva la prospéritématérielle de Juda. Le roi s’empara d’Elath, sur le golfeÉlanitique, et en fit un marché important pour son commercedans la mer Rouge. Il remporta également dessuccès sur les Philistins, les Moabites et les Ammonites.IV Reg., xiv, 22; Il Par., xxvi, 2-8. À Jérusalem, il réparales murailles et fortifia par de puissantes tours lecôté des remparts où les Israélites avaient ouvert unesi large brèche. II Par., xxvi, 9. Mais la ville sainte, àcette époque, fut éprouvée par un tremblement de terre,auquel font allusion les prophètes Amos, i, 1, et Zacharie,xiv, 5, et qui est mentionné par Josèphe, , À «£. jud., IX,x, 4.

Joatham continua les travaux de son père et bâtit surOphel, complétant sans doute le rempart de ce côté.II Par., xxvii, 3. Son fils, Achaz, retomba dans l’idolâtrie,consacra ses propres enfants aux faux dieux dansla vallée de Ben-Hinnom et offrit à ceux-ci des victimessur les hauts-lieux. IV Reg., XVl, 3-4; II Par., xxviii, 2-4.Pour le punir de son impiété, Dieu envoya contre luiRasin, roi de Syrie, et Phacée, roi d’Israël, qui vinrentmettre le siège devant Jérusalem. IV Reg., xvi, 5. Isaïe,vu, 6, nous apprend que leur dessein était de s’emparerdu royaume de Juda et d’y installer un roi vassal, le fils

de Tabéel. C’est dans cette circonstance que le prophètefut envoyé auprès d’Achaz, qu’il rencontra «à l’extrémitéde l’aqueduc de la piscine supérieure», et qu’il fitla fameuse prédiction de V’Almah. Is., vii, 3, 14. Voir’Almah, t. i, col. 390. La capitale résista aux effortscombinés des deux rois. Mais Achaz, effrayé de la puissancedes ennemis et ne comptant, en dépit des promesseset des menaces des prophètes, que sur lesressources de la politique humaine, envoya à Théglathphalasar,roi d’Assyrie, des ambassadeurs et des présentspour le prier d’accourir à son secours. Il obtint ce qu’ilavait demandé, et quand la guerre de Syrie eut été terminéepar la chute de Damas, il alla rendre hommageà son suzerain dans la ville conquise. IV Reg., xvi, 7-10;II Par., xxviii, 16. Mais cette honteuse faiblesse et cessacrifices ne le préservèrent point de l’oppression deson protecteur, dont l’Écriture nous laisse supposer lesintentions par rapport à l’assujettissement de Juda etde Jérusalem. IV Reg., xvi, 17-18; II Par., xxviii, 20-21.Heureusement, pour réparer tant de malheurs, Dieususcita le pieux roi Ézéchias, qui détruisit les hautslieux, brisa les idoles, rouvrit le Temple, le purifia, lerendit au culte du vrai Dieu, en un mot fit revivre à Jérusalemla religion du Très-Haut dans toute son anciennesplendeur. IV Reg., xviii, 1-8; II Par., xxix, xxx, xxxiC’est à cette époque, 722 ou 721, que finit le royaumed’Israël. Jusqu’à la chute de Samarie, la cité de Davidavait été à l’abri des attaques des Assyriens, maisl’heure était venue où elle allait trembler à son tourdevant les soldats de Ninive, dont la puissance l’enfermaitcomme dans un cercle de fer. Ézéchias, confianten Jéhovah, ne craignit pas cependant de secouer lejoug et refusa de payer le tribut au roi d’Assyrie. IVReg., xviii, 7. C’était un acte de révolte; mais l’orgueildu suzerain fut encore plus profondément blessé parl’accueil empressé que le roi de Jérusalem fit, quelquetemps après, aux ambassadeurs de Mérodach-Baladan,roi de Babylone, ennemi de l’Assyrie. Cette ambassadefut même pour Ézéchias une occasion de vaine complaisance,en lui faisant étaler la magnificence de ses trésors.IV Reg., xx, 12-13. Isaie le blâma de cette faute,et, dans l’une des plus étonnantes prophéties de nosLivres Saints, lui annonça qu’un jour viendrait oùtoutes ces richesses seraient emportées à Babylone, oùses descendants seraient pris et emmenés comme eunuquesdans le palais du roi de Babel. IV Reg., xx,14-18; Is., xxxix. Michée, iv, 10, annonçait le mêmechâtiment, mais avec promesse de la délivrance. Nousverrons bientôt la réalisation de ces oracles. Cependant,à l’heure présente, l’ennemi qu’avait à redouter Ézéchias,c’était le roi d’Assyrie, Sennachérib. En 701, il se miten marche pour ramener à l’obéissance le roi de Jérusalemet les princes ligués avec lui. Celui-ci, craignantpour sa couronne et sa capitale, envoya de riches présentsau redoutable monarque, qui assiégeait Lachis etdont l’ambition ne fut pas satisfaite par ces dons. Unfort détachement de l’armée assyrienne, à la tête duquelse trouvaient le tartan, le rab-saris et le rab-Sdqêh,arriva bientôt sous les murs de Jérusalem. Les officiersninivites s’arrêtèrent près de l’aqueduc de la piscinosupérieure, non loin du palais royal, et parlementèrentcour amener la ville à capituler. Encouragé par Isaïe,Ézéchias refusa de se soumettre et se prépara à larésistance. Sennachérib, apprenant que le roi d’Ethiopie,Tharaca, s’avançait pour le combattre, voulut enfinir avec la capitale de Juda. Mais il n’eut pas le tempsd’en commencer le siège; un ange exterminateur fitpérir une partie de son armée. IV Reg., xviii, 13-37;xix>IIPar., xxxii, 1-22; Is., xxxvi, xxxvii. Sur cettecampagne de Sennachérib, cf. Prisme de Taylor et Inscriptionsdes Taureaux, Cuneiform Inscriptions ofWestern Asia, 1. 1, pl. 38-39; t. iii, pl. 12; E. Schrader,Die Keihnschriften und dos Alte Testament, Giessen,

1883, p. 288-301; F. Vigouroux, La Bible et les découvertesmodernes, 6e édit., Paris, 1896, t. iv, p. 14-65.Ézéchias, du reste, tout en s’appuyant sur Dieu, n’avaitpas négligé de prémunir la ville sainte contre l’attaquedes Assyriens par les travaux que nous avons signalésplus haut, col. 1359.

Manassé marqua le commencement de son règne, leplus long de la monarchie judaïque, par l’impiété laplus révoltante. IV Reg., xxi, 1-9; II Par., xxxiii, 1-9.Dieu justement irrité fit entendre ses menaces par lavoix des prophètes: «Voilà, dit-il, que je vais fairetondre sur Jérusalem et sur Juda de tels maux que lesoreilles en tinteront à quiconque les entendra. Etj’étendrai sur Jérusalem le cordeau de Samarie et lepoids de la maison d’Achab, et j’effacerai Jérusalem,comme ont coutume d’être effacées les tablettes, et, enl’effaçant, je tournerai et ferai passer très souvent le st lesur sa face.» IV Reg., xxi, 12-13. Cf. Jer., XV. Manassé futtributaire d’Assaraddon, roi d’Assyrie, comme nous l’apprendune inscription cunéiforme. Cf. Prisme briséd’Assaraddon, col. v, ligne 13, Cuneifornt Inscriptionsof Western Asia, t. iii, p, 16; F. Vigouroux, La Bible etles découvertes modernes, t. iv, p. 71. Il le fut égalementd’Assurbanipal. Cf. Cylindre c; E. Schrader, DieKeilinschnften unddas Alte Testament, p. 355; F, Vigouroux,ouv. cité, t. iv, p.’87. Plus tard, ayant tenté desecouer le joug, il fut pris et conduit prisonnier à Babylone,où était alors Assurbanipal. Là il se repentit desa conduite passée, et Dieu, touché de ses prières, leramena à Jérusalem. II Par., xxxiii, 10-13. Rentré enpossession de ses États, il s’efforça de réparer les mauxqu’il "avait causés au peuple par son impiété et sescruautés, il restaura et fortifia les anciens murs. II Par.,xxxiii, 14-16. Voir plus haut, col. 1363.

Le royaume de Juda touchait à sa fin. Amon fut tuépar ses serviteurs après deux ans de règne. Josias, sonfils, fut le seul qui, dans ces derniers temps, se signalapar sa piété et sa vertu. Il purifia et répara le Temple,abolit et détruisit bois sacrés, autels, idoles, tout ce quiavait souillé la ville sainte. IV Reg., xxii, xxiii, 1-25;II Par., xxxiv, xxxv. Joachaz ne lui succéda que pendanttrois mois. Joakim, après avoir, pendant trois ans,payé le tribut aux Babyloniens, essaya de secouer lejoug. Nabuchodonosor vint pour le réduire par la force,mais quand il arriva en Judée, Joakim était mort etremplacé par son fils Jéchonias. Le nouveau roi nerésista pas longtemps; au bout de trois mois de règne,il se livrait, corps et biens, avec toute sa famille, auconquérant. Celui-ci, sans pitié, prit des otages, fitdéporter tous les habitants de distinction, au nombre dedix mille, et ne laissa dans Jérusalem que les pluspauvres. Il emmena Jéchonias en Babylonie, et luidonna pour successeur son oncle Sédécias. IV Reg.,xxiv, 1-17; II Par., xxxvi, 1-10. Ce dernier se révolta àson tour, sous l’influence du parti égyptien. Nabuchodonosorvoulut en finir avec les Juifs et retourna enPalestine. Cependant le siège de Jérusalem fut quelquetemps retardé par les menaces d’intervention du roid’Egypte, Apriès, de la XXVIe dynastie. Le roi deBabylones’arrêta à Réblatlia pour contenir les ennemis aunord et envoya contre la capitale de la Judée une arméeconsidérable sous les ordres de Nabuzardan. La villerésista héroïquement, pendant deux ans. Pressée par lafamine, elle se trouva réduite à la dernière extrémité.Une brèche ayant été pratiquée, les gens de guerres’enfuirent la nuit par la porte qui était entre les deuxmurs, près des jardins du roi, au sud de la collined’Ophel. Sédécias s’échappa également; mais, poursuivipar les Chaldéens, il fut pris dans la plaine de Jéricho,conduit à Réblatha auprès de Nabuchodonosor, qui luifit crever les yeux et l’emmena enchaîné à Babylone.Enfin, l’armée chaldéenne procéda à l’entière destructionde Jérusalem, incendia le Temple, le palais du

roi et les maisons des particuliers, abattit les murailles,égorgea les principaux habitants et emmena le reste encaptivité, laissant seulement les pauvres et les cultivateurs.IV Reg., xxiv, 18-20; xxv; JI Par., xxxvi, 11-21.C’est en 587 que la cité de David et le Temple deSalomon tombèrent sous les coups de l’ennemi ouplutôt sous ceux de la justice divine. Assis en face deces ruines, qui lui arrachaient des larmes, Jérémie laissaéclater la douleur de son âme dans ses immortellesLamentations. Les prophètes, du reste, avaient annoncédepuis longtemps et de la façon la plus précise le sortréservé à la cité infidèle; les limites de cet article nenous permettent pas de la suivre à travers leurs oracles.S’ils ont flagellé ses crimes, ils ont aussi chanté sesgloires, prédit ses admirables destinées. Dieu voulaitla punition et non l’anéantissement. C’est d’ailleurs unevéritable merveille que le petit royaume de Juda et sacapitale aient pu se maintenir si longtemps, pendantprès de cinq siècles, au milieu de complications sansnombre, à une époque où les plus grands empires disparaissaientet se succédaient avec une effrayante rapidité.L’épreuve fut de courte durée, les promessesdivines s’accomplirent avec autant de certitude que lesmenaces.

77. DU RETOUR DE L’EXIL À LA RUINE SE JÉRUSALEM

(70). — Sur les bords des fleuves de Babylone, Jérusalemresta l’affection la plus chère des enfants de Juda,dont le cœur répétait avec tristesse ces sublimes accents:

Si je t’oublie, ô Jérusalem,

Que ma droite s’oublie elle-même!

Que ma langue s’attache à mon palais,

Si je cesse de penser à toi,

Si je ne place Jérusalem

Au-dessus de toutes mes joies!

Ps. cxxxvi (hébreu, cxxxvii), 5-6.

Les prophètes étaient là pour maintenir la pureté deleur foi et la fermeté de leurs espérances. Les promessesdivines s’accomplirent dans le temps marquépar Jérémie, xxv, 11-13; xxix, 10.

1. Le retour de l’exil; reconstruction du Temple et dela ville. — La délivrance, attendue dans le silence et leslarmes, arriva l’an 536 avant J.-C. Cyrus, roi de Perse,publia un édit qui permettait aux Hébreux, ses sujets,de retourner en Palestine et de rebâtir le Temple.I Esd., i, 1-4. Quarante-deux mille Juifs se mirentaussitôt en marche pour la Judée, sous la conduite deZorobabel, rapportant les vases d’or et d’argent queNabuchodonosor avait enlevés de Jérusalem et que Cyrusleur fit restituer. I Esd., i, 5-11. Leur premier soin,après avoir pourvu à leurs habitations, fut de rétablirl’autel des holocaustes et les sacrifices prescrits par laLoi. I Esd., iii, 1-6. La seconde année après leur retour,ils jetèrent les fondements du second Temple.Mais, pendant que le peuple poussait des cris de joieen voyant sortir de terre les premières assises de cegrand édifice, les vieillards, qui avaient jadis contempléla magnificence de l’ancien, pleuraient et gémissaient.I Esd., iii, 7-13. Après bien des difficultés suscitées parles Samaritains, le Temple fut achevé, puis consacré,l’an 516. Il était loin d’offrir l’aspect imposant du premier,mais sa gloire devait être plus grande, comme leprédisait Aggée, ii, 10. Zacharie, de son côté, annonçaitla gloire extraordinaire que le Messie devait mettre aufront de la ville sainte:

Tressaille de joie, fille de Sion!Pousse des cris, fille de Jérusalem!Vois: ton roi vient vers toi.

n est juste et sauveur,

Humble et monté sur un âne,

Sur le poulain de l’anesse.

Zach., rx, 9. Cf. Mata., xxi, 5.

C’est, en effet, la figure du Christ qui va dominer toutela seconde partie de cette histoire.

Cependant, Jérusalem restait avec ses murailles démantelées.En 445, Néhémie obtint d’Artaxerxès l’autorisationde les relever. Muni de lettres pour divers fonctionnairespersans, il se mit en route avec une petitecaravane. Arrivé dans la ville sainte, il s’empressa defaire l’inspection des murs, de nuit, pour ne pas éveillerl’attention des ennemis des Juifs. Sortant par la portede la Vallée, il descendit vers le sud, puis tourna àl’est, vers la porte de la Fontaine, pour remonter versle nord et revenir à son point de départ. Partout, cen’étaient que décombres, obstruant le passage en plusd’un endroit. Il s’adressa ensuite aux prêtres, auxprinces de la nation, et les pressa de se mettre à l’œuvre.II Esd., il. Avec un remarquable talent d’organisation,il partagea les murs en diverses zones, dont il distribuala construction aux diverses parties de la population.II Esd., ni. Ce récit devient facile à comprendre avecla topographie ancienne, telle que nous l’avons exposéeplus haut. Voir col. 1355, et carte, col. 1367. Quand lesremparts s’élevèrent à moitié de leur hauteur, desexplosions de colère succédèrent, dans le camp ennemi,aux railleries de la première heure. Moabites, Ammonites,Arabes, Samaritains, excités par Tobie et Sanaballat,harcelèrent les Israélites. Néhémie arma sesouvriers, qui «d’une main travaillaient et de l’autre tenaientl’épée». Ardents au travail, où ils se relayaientà des heures fixes, ils ne quittèrent pas leurs vêtementstant que dura la construction. II Esdr, iv. Le généreuxchef eut à lutter tout à la fois contre des ennemis qui,après la violence, employèrent la ruse, contre les magistratset les grands de son propre peuple, qui pratiquaientl’usure et exploitaient la détresse populaire.Tant de prudence, de fermeté et d’intégrité eurent leurrécompense. Le 25 «jour du mois d’élul, le mur étaitterminé: le travail avait duré cinquante-deux jours.II Esd., v, vi. Mais il fallait peupler la nouvelle ville, etil importait de n’y laisser habiter que des Juifs de purerace. Néhémie élimina tout élément étranger et décidaqu’un homme sur dix, désigné par le sort, quitterait sarésidence des champs pour aller habiter Jérusalem.II Esd., vu; xi, 1, 2. Tout en travaillant à la sécurité età la prospérité matérielle de la capitale, il n’oublia pasque la nation élue ne pouvait être reconstituée que parl’observation de la Loi. Il fit lire solennellement la Loiau peuple rassemblé sur la place qui était devant laporte des Eaux. La fête des Tabernacles fut célébrée,l’alliance avec Dieu renouvelée. II Esd., viii, ix, x. Enfin,réconciliée avec Jéhovah, Jérusalem pouvait désormaisespérer que ses murailles la protégeraient d’une manièreefficace. Elle en fit la dédicace solennelle par uneprocession dont les deux chœurs, partis du même point,firent en sens opposé le tour des remparts et se rencontrèrentdevant le Temple, où de nombreuses victimesfurent immolées. II Esd., xii, 27-42. Néhémie, ayant terminésa mission, retourna auprès du roi; mais il revintplus tard dans la ville sainte, où de graves abus s’étaientintroduits. Avec son énergie habituelle, il ne craignit pasd’employer la force pour les corriger et punir les violateursde la Loi. II Esd., xin. Esdras acheva cetteœuvre de restauration. Un firniau royal lui donna l’autoritéde gouverneur, avec pouvoir d’établir des magistratset des juges. Il fut, avec Zorobabel et Néhémie, undes instruments de la Providence pour le relèvement dupeuple juif. I Esd., vu-x.

2. D’Alexandre aux Machabées.

Les Hébreux, sansavoir retrouvé leur autonomie politique, vécurent enpaix dans la nouvelle Jérusalem. Leurs obligations seréduisaient à payer des impôts au satrape et à fournirun contingent de troupes auxiliaires. Cette situation nefut pas modifiée lorsque, après la conquête de Tyr,en 332, Alexandre le Grand devint maître de la Palestine.Pendant ce siège mémorable, il avait envoyé» nelettre au grand-prêtre Jaddus, pour lui demander des

secours; mais celui-ci refusa noblement de violer leserment qu’il avait prêté au roi Darius. Maître de Tyr,puis de Gaza, le conquérant macédonien, avant de sediriger vers l’Egypte, marcha contre Jérusalem, pour lapunir d’avoir osé résister à sa volonté. Mais, arrivédevant la ville, il s’adoucit en présence du grand-prêtre,dont la majesté l’impressionna, et qui lui montra les passagesde Daniel relatifs à ses conquêtes. Il alla avec lepontife dans le Temple, demanda qu’on offrit pour luiun sacrifice et laissa aux Juifs toute liberté de vivre selonleurs lois, leur faisant même remise du tribut pourchaque année sabbatique. Tel est, du moins, le récit deJosèphe, Ant. jud., XI, viii, 3-6. Après la mort d’Alexandre(323), la Palestine fut, pendant de longues années,une pomme de discorde entre la Syrie et l’Egypte.Ptolémée Sôter se rendit, par la ruse, maître de Jérusalem,en y pénétrant un jour de sabbat, sous prétextede vouloir y sacrifier. Il la traita avec beaucoup decruauté, et un grand nombre de Juifs furent transportésen Egypte. Josèphe, Ant. jud., XII, i. Ptolémée Philadelphe,qui lui succéda, se montra bienveillant à l’égarddes Israélites. C’est lui qui, suivant le récit d’Aristée,aurait fait venir de Jérusalem les soixante-douze interprèteschargés de traduire en grec les Livres Saints.Sous Ptolémée Évergète, le grand-prêtre Onias II ayantrefusé de payer le tribut annuel de vingt talents auquelil était assujetti, le souverain menaça de s’emparer dela Judée. Pour détourner forage qui allait fondre sur laville sainte et toute la contrée, Joseph, fils de la sœurd’Onias, engagea son oncle à se rendre en Egypte afind’apaiser la colère du roi. Sur son refus, il y alla lui-même,après avoir recueilli l’argent nécessaire pourpayer à Ptolémée la somme qui lui était due. Ant. jud.,XII, iv, 1-3. C’est à cette époque que naquirent parmiles Hébreux les sectes des Pharisiens et des Sadducéens,dont l’influence allait devenir si grande à Jérusalem.

Après avoir été pendant un siècle sous la dominationdes Ptolémées, la ville tomba au pouvoir des Séleucides,d’abord transitoirement, puis d’une façon durable. Prise,l’an 203, par Antiochus III le Grand, roi de Syrie, ellefut reprise, en 199, par Scopas, général égyptien, qu>commandait l’armée de Ptolémée Ëpiphane. Ce généralen se retirant, laissa une garnison dans la citadelle;mais bientôt (198) il fut vaincu par Antiochus. Les Juifsalors se soumirent au vainqueur, lui ouvrirent lesportes de la capitale, fournirent des vivres à ses troupes,et l’aidèrent à chasser la garnison égyptienne. En reconnaissancede ces services, le roi leur accorda diversprivilèges. Ant. jud., XII, iii, 3. En 187, il eut pour successeurson fils Séleucus IV Philopator. Celui-ci, pourpayer aux Romains le tribut annuel auquel son pèreavait été condamné, "ordonna à son premier ministre,Héliodore, d’aller puiser cette somme dans le trésor duTemple à Jérusalem. Mais une intervention divineempêcha cette profanation. II Mach., ni. Des compétitionssanglantes, à propos du pontificat suprême, éclatèrentensuite dans la ville sainte et y jetèrent ledésordre et le trouble. Sous Antiochus IV Épiphane,Jason, frère du grand-prêtre Onias III, convoitait lasouveraine sacrificature et, pour l’obtenir, il fit au roide grandes promesses d’argent. Le prince syrien agréacette proposition et, sans respect pour la loi juive, ildéposa Onias et le fit partir en exil. Le nouveau grandprêtretravailla alors de toutes ses forces à l’hellénisationde Jérusalem et à la propagation de l’esprit païen. Il fitbâtir un gymnase, et l’on vit des prêtres mêmes abandonnerle service de l’autel pour aller s’exercer aux jeuxpaïens. I Mach., i, 12-16; II Mach., IV, 1-17. Antiochusvint à Jérusalem, et y fut reçu magnifiquement. CependantJason fut bientôt supplanté, et remplacé par uncertain Ménelas, qui dut lui-même céder la place à Lsimaque.L’immoralité et le mépris de la loi dmne

augmentaient toujours dans la cité de David. De sinistresprodiges semblaient présager pour elle des désastreseffrayants. Jason, qui s'était réfugié au pays des Ammonites, ayant entendu dire qu’Antiochus venait de mourirpendant sa seconde expédition contre l’Egypte, crutl’occasion favorable pour rentrer en possession du souverain pontificat. À la tête d’un millier d’hommes, maisavec la connivence des partisans qu’il avait gardés parmiles Juifs infidèles, il s’empara de Jérusalem, où le sangcoula à grands flots. Malgré sa victoire et ses sanglantesreprésailles, il ne put reprendre le pouvoir, et s’enfuitde nouveau. Peut-être apprit-il qu’Antiochus n'était pasmort, et qu’il marchait contre lui à la tête d’une arméeimposante. II Mach., iv, 21-29; v, 1-10.

C’est à ce moment, en effet, que le roi de Syrie intervint, dans le dessein d'étouffer les insurrections desJuifs. En 170, il s’avança vers Jérusalem et la prit d’assaut. Des milliers d’habitants furent massacrés ou vendus en esclavage. Le Temple fut profané et dépouillé desvases sacrés les plus précieux. I Mach., i, 17-29; II Mach.,v, 11-23. Deux ans plus tard, une nouvelle expéditionde ce prince en Egypte ayant été arrêtée par l’intervention des ambassadeurs romains, il résolut de déchargertoute sa rage sur la cité judaïque. Une armée nombreuse,sous la conduite d’Apollonius, fut envoyée en Palestine,Jérusalem fut prise une seconde fois. Un grand nombrede Juifs furent mis à mort, les plus beaux édifices incendiés, les remparts démolis en plusieurs endroits. Uneredoutable forteresse, véra, fut bâtie non loin du Temple.Voir plus haut, col. 1368. Le Temple lui-même fut consacré à Jupiter Olympien et devint le théâtre de scènesde débauche. Non seulement le sacrifice perpétuel cessa,mais on immolait sur l’autel des animaux immondes.Une persécution cruelle s’exerça contre tous ceux quiosèrent résister aux ordres du roi, dont le but étaitd’amener les Juifs à l’apostasie. L’observation de la religion juive, de la circoncision en particulier, fut interdite sous peine de mort. Tous les exemplaires de la loiqu’on put trouver furent détruits. Deux femmes quiavaient été accusées d’avoir circoncis leurs enfantsfurent menées publiquement par la ville avec ces enfants pendus à leur sein, et ensuite furent précipitéesdu haut des murailles. IMach., i, 30-67; II Mach., vi,1-11. Parmi les Israélites, un bon nombre ayant déjàperdu la foi de leurs pères, se soumirent à la volontéimpie du roi; d’autres succombèrent devant la cruautéde la persécution. Mais, à côté des apostats et des lâches,il y eut aussi des martyrs, dignes précurseurs de ceuxqui devaient plus tard verser leur sang pour JésusChrist, le vieillard Éléazar, les sept frères Machabées,et leur mère. II Mach., vi, 18-31; vii, 1-42. Tous ceuxqui le purent s’enfuirent dans le désert ou dans lesmontagnes.

3. Sous les Machabées.

C’est du milieu de cesfuyards que partit le mouvement de résistance et delutte, lutte gigantesque, la plus belle de l’histoire juive,une des plus belles de l’histoire du monde. Le prêtreMatathias, avec ses cinq fils, avait quitté Jérusalem audébut de la persécution. Autour de lui se rangèrentbientôt tous les Israélites fidèles, qui voulurent combattre pour la religion et la patrie. Après sa mort (166),son troisième fils, Judas Machabée, lui succéda dans lecommandement militaire. Plusieurs fois vainqueur desarmées syriennes, il conduisit ses troupes à Jérusalem(164). Voyant le sanctuaire désert, l’autel profané, lesportes brûlées, et, dans le parvis, les arbres poussantcomme dans un bois, il s’empressa de tout purifier etde tout refaire. Un nouvel autel des holocaustes fut consacré et le culte rétabli comme autrefois. L’enceintesacrée fut environnée de hautes murailles pour opposerplus de résistance aux ennemis qui occupaient encoreî'Acra. I Mach., iv, 36-61; II Mach., x, 1-8. Judas profitades événements qui se passaient en Syrie après la mort

d’Antiochus Épiphane, pour essayer de chasser de cettecitadelle la garnison sans cesse occupée à infester tousles alentours du Moriah, à molester ceux qui entraientdans le Temple ou en sortaient. Antiochus Eupator, pourdégager sa troupe, réunit une armée très nombreuse,au-devant de laquelle le héros machabéen ne craignitpas de marcher. Mais, voyant l’impossibilité de résisterà des forces infiniment supérieures, celui-ci se repliavers Jérusalem, poursuivi par le vainqueur, qui mit lesiège devant la ville, dressant contre elle ses machinesde guerre. Les Juifs la défendirent vigoureusement,mais les vivres vinrent à manquer et les combattantscommencèrent à se retirer. Sur ces entrefaites, ayantappris que Philippe, nommé par Antiochus Épiphane,sur son lit de mort, tuteur du jeune roi et régent duroyaume, était revenu de Perse avec son armée et voulait s’emparer du pouvoir, Lysias persuada à AntiochusEupator de faire la paix avec les Juifs. Celui-ci y consentit, mais, avant de partir, violant le serment qu’ilavait fait, il pénétra dans la ville et ordonna de démolirles fortifications qui entouraient le mont Sion, c’est-àdire les travaux de défense que les Israélites y avaientélevés. I Mach., vi; II Mach., xiii. En 162, Démétrius IerSoter, s'étant emparé du trône de Syrie, envoya Bacchide avec des troupes pour faire reconnaître Alcimecomme grand-prêtre. Ce général s’efforça d’abord, avecson protégé, de surprendre la bonne foi de Judas, maisne put y réussir. Après son départ, le Machabée repritdes forces et réorganisa son armée. Alcime obtint duroi de Syrie l’envoi de Nicanor avec de nouvellestroupes. Nicanor se montra perfide et cruel. Judas lebattit une première fois dans les environs de Jérusalem;puis, dans une grande bataille, livrée près de Bethoron,le chef syrien fut tué et son armée presque entièrementdétruite. I Mach., vu; II Mach., xiv, xv. Judas était denouveau maître de tout le pays. C’est à ce moment que,pour s’assurer une protection efficace, il conclut unealliance avec les Romains. I Mach., vin. Il ne prévoyaitpas que ceux dont il recherchait les faveurs auraientbientôt fait de mettre la main sur ce petit coin de terreet que la ville sainte tomberait un jour sous leurscoups. Démétrius, du reste, désireux de venger ladéfaite et la mort de Nicanor, renvoya Bacchide enPalestine avec une nouvelle armée. Judas l’attaqua,mais, accablé par le nombre, le héros tomba sur lechamp de bataille. I Mach., ïx, 1-22.

Jonathas, son frère, lui succéda (161-143). Il livra,près du Jourdain, une autre bataille à Bacchide,qu’il contraignit à se réfugier dans VAcra de Jérusalem.I Mach., ïx, 43-49. Il profita d’un moment où Démétrius Ier, menacé par Alexandre Balas, recherchait sonamitié, pour réparer les murs de la ville et relever lesfortifications de Sion. I Mach., x, 1-11. En 145, ilchercha à s’emparer de la citadelle que les Syriensoccupaient encore et dressa contre elle plusieurs machines de guerre. I Mach., XI, 20. L’honneur de cettevictoire définitive était réservé à son frère Simon.Jonathas bâtit alors une très haute muraille entre laforteresse et la ville, afin de les séparer entièrement etde couper toute communication entre elles. I Mach.,xii, 36. Tombé traîtreusement entre les mains deTryphon à Ptolémaide, il fut remplacé par Simon, quiacheva les travaux commencés à Jérusalem. I Mach..xiii, 1-10. Celui-ci se déclara en faveur de Démétrius ii,qui lui confirma le pontificat et proclama l’indépendance, l’entière autonomie politique du peuple juif. Decette année 142 commença pour la nation une ère nouvelle. I Mach., xiii, 34-42. Simon s’empara de la citadellesyrienne et détruisit ainsi le dernier vestige de la domination étrangère. Il fortifia en même temps la montagne du Temple. I Mach., xiii, 49-53. Sous son gouvernement sage et énergique, Jérusalem et le pa^svirent une prospérité qu’ils ne connaissaient plus

depuis longtemps. I Mach., xiv, 4-15. L’an 138, AntiochusVII Sidètes, roi de Syrie, lui octroya le droit debattre monnaie. Le nom de «Jérusalem la Sainte» parutalors sur le «sicle d’Israël». Voir fig. 233, col. 1318.D’autres pièces rappelèrent «l’affranchissement deSion». Voir fig. 261. Simon, assassiné avec deux de ses

261. — Monnaie de Simon Machabée.’2în 731N ruitf, «Année quatrième. Demi-sicle.» Deux faisceauxde branches avec feuilles (loulab), entre lesquels est un cédrat.

— b). JVS nbNîb, «l’affranchissement de Sion.» Palmier portantdes dattes. De chaque côté, une corbeille remplie de fruits.

fils par son gendre Plolémée, eut pour successeur sontroisième fils, Jean Hyrcan, échappé au massacre (135).I Mach., xvi, 11-23. Le nouveau «grand-prêtre desJuifs», comme il se fait appeler sur ses monnaies, voirfig. 211, col.H65, ne fut pas longtemps tranquille. À la nouvellede la mort du dernier des cinq frères Machabées,Antiochus Sidètes vint, avec une armée formidable,mettre le siège devant Jérusalem, qu’il entoura de septcamps retranchés. Chaque jour, il renouvela les assauts.Jean Hyrcan, craignant de manquer de vivres, sedébarrassa des bouches inutiles. Il finit par conclure untraité de paix avec le roi, en s’engageant à lui donnerdes otages et cinq cents talents. Suivant Josèphe, Anl.jud., XIII, viii, 4, pour se procurer de l’argent, ilouvrit le tombeau de David et en tira trois milletalents. «Il est peu probable, dit V. Guérin, Jérusalem,p. 68, que jamais, à aucune époque, on ait pu enfouirdans la chambre sépulcrale de David, comme en réservepour l’avenir, des trésors d’une telle importance. Il est-aussi peu facilement admissible que, même dans le seinde la ville et au milieu des ravages et des bouleversementsqu’elle avait si souvent subis, ce tombeau, s’ilavait contenu des richesses semblables, n’ait pas tentédavantage l’avarice des vainqueurs.»

Durant le pontificat et la principauté de Jean Hyrcan,Jérusalem goûta une paix bienfaisante. C’est peut-êtrele mausolée de ce grand-prêtre que Josèphe mentionneplusieurs fois, Bell. jud., V, vi, 2; vii, 3; ix, 2, etc.,parmi les monuments voisins de la ville. Son fils etsuccesseur, Judas Aristobule (106), fut le premier àprendre le titre de roi. Mais il ne régna qu’un an, etsa mort fut un bonheur pour la nation, car il se renditcoupable des plus grandes cruautés, même à l’égard desa mère et de ses frères. Le trône fut occupé par sonfrère Alexandre Jannée (105-78). Ce prince étendit leslimites du royaume, mais à Jérusalem, il était détesté detous, particulièrement des Pharisiens, qui, pendant la fêtedes Tabernacles de l’année 95, l’insultèrent publiquementdans le Temple, où il offrait le sacrifice en qualitéde grand-prêtre. Pour se venger, il fit massacrer6000 Juifs. Josèphe, Anl. jud., XIII, XIII, 5. Dans uneautre circonstance, il fit crucifier sous ses yeux huitcents prisonniers des plus influents de la nation. Ant.jud., XIII, xiv, 2. À sa mort, Alexandra, sa veuve, pritles rênes du gouvernement et les tint pendant neufans (78-69). Elle confia le souverain pontificat à soniils Hyrcan, qui lui succéda sur le trône, aux acclamationsdes Pharisiens. Mais son autre fils, Aristobule,ambitionna aussi la couronne, et ayant vaincu Hyrcan,

fut proclamé roi à Jérusalem. Ant. jud., XIII, xvi;XIV, i, 2. Peu après, Hyrcan, sollicité par l’iduméenAntipater, attaqua et défit Aristobule. La guerre auraitpu durer longtemps entre les deux frères, si la causen’avait été soumise au jugement de Pompée, généralromain, qui se trouvait à Damas. L’alliance contractéeavec Rome, il y a cent ans, renouvelée depuis, va seterminer par la mainmise de la toute-puissante métropolesur la capitale de la Judée.

4. La conquête romaine.

L’an 63, Hyrcan II etAristobule II plaidaient donc leurs droits respectifsdevant Pompée. Ce dernier remit sa décision à uneépoque ultérieure. En attendant, il s’en alla soumettreArétas en Arabie, puis il s’avança vers Jérusalem.Aristobule, pour s’assurer son appui, lui promit alorsde lui livrer la ville et une somme considérabled’argent. Pompée envoya Gabinius pour les recevoir;mais ce général se vit fermer les portes de la placesans rien toucher. Irrité, Pompée marcha lui-mêmecontre Jérusalem. Les partisans d’Aristobule, décidés àla lutte, s’emparèrent de l’enceinte du Temple, et,coupant le pont qui le mettait en communicationavec la cité, se préparèrent à soutenir l’assaut. Les partisansde Hyrcan, au contraire, ouvrirent au Romain lesportes de la ville et du palais royal, qui furent occupéspar Pison, lieutenant de Pompée. Celui-ci établit soncamp au nord du Temple, fit combler le fossé creuséde ce côté, éleva des aggeres, construisit de hautestours, et fit jouer de puissantes machines apportées deTyr. Au bout de trois mois, il ouvrit une brèche etmassacra 12000 Juifs. Pénétrant ensuite dans l’intérieurdu Temple, et même dans le Saint des Saints, ilen admira la construction, les objets sacrés et lestrésors qui y étaient enfermés; mais il ne les pillapoint, et, le lendemain, ayant fait purifier ce monument,il ordonna d’y offrir de nouveaux sacrifices.Avant de s’éloigner, il rendit à Hyrcan le souverainpontificat, lui enleva le titre de roi, qu’il remplaça parcelui d’ethnarque, le mit sous la dépendance du gouverneurde Syrie et rendit le pays tributaire des Romains.Ant. jud., XIV, iv. En réalité, le pouvoir était exercépar Antipater, qui, lors de la campagne de César enEgypte, lui rendit de grands services (48). Cette campagneune fois terminée, César confirma [Hyrcan danssa dignité, lui permit de relever les fortifications deJérusalem renversées par Pompée, mais en mêmetemps il confia à Antipater la charge de procurateur dela Judée. Ant. jud., XIV, viii, 5. Celui-ci en profitadans l’intérêt de sa propre famille, et nomma son filsaîné Phasæl gouverneur de Jérusalem, et Hérode gouverneurde la Galilée, promotions qui furent très malvues des Juifs. L’an 43, il mourut empoisonné, et lepays redevint le théâtre de luttes et de compétitionssanglantes. L’an 40, Antigone, le plus jeune fils et leseul survivant d’Aristobule II, s’étant allié avec lesParthes, marcha contre Jérusalem et réussit à laprendre. Il mutila Hyrcan, qu’il envoya chargé dechaînes chez les Parthes, et fit tuer Phasæl. Hérode,qui avait pu s’enfuir, se rendit à Rome et fut proclaméroi des Juifs par un décret du Sénat romain. Ant. jud.,XIV, xiii, xiv. Mais il lui fallut trois années de lutteset le concours des armées romaines pour faire reconnaîtresa royauté. L’an 37, il vint assiéger Jérusalem etcampa près de la ville. S’approchant des murs, vers le

nôrd, il procéda au siège de la même manière que

Pompée, donnant l’ordre d’élever trois aggeres, surlesquels on construisit des tours. Durant ces préparatifs,il alla en Samarie épouser Mariamne; puis ilrevint avec de nouvelles troupes. Le général romainSosius lui amena, de son côté, plusieurs légions. Hérodefit approcher les machines et battre les murs. Les Juifsréparèrent aussitôt les brèches et s’efforcèrent, par descontre-mines, de neutraliser les progrès de leurs adver

saires. Cependant en quarante jours le premier murfut emporté; le deuxième le fut peu après. Les fortificationsqui entouraient le Temple tombèrent; l’ennemise rendit maître du parvis extérieur et de la villebasse. Les Juifs repoussés se réfugièrent dans leparvis intérieur et dans la ville haute et furent définitivementvaincus. Les Romains et les Hérodiens, exaspérésà cause de la longueur du siège, mirent tout àfeu et à sang. Hérode, impuissant à arrêter le pillageet le massacre, supplia le général romain de ne pasl’établir roi d’une solitude, et, à force de promesses etd’argent, parvint à affranchir la malheureuse cité dela rapacité et de la fureur des soldats. Antigone, chargéde chaînes, fut conduit à Antioche devantMarc-Antoine,qui ordonna de le décapiter. Ant. jud., XIV, xv, 14;xvi. Avec lui s’éteignit le dernier rejeton de la branchedes Asmonéens, le dernier roi de race juive. Voir lig. 262.5. D’Hérode le Grand à la destruction de Jérusalem.

— Si le règne d’Hérode fut un véritable régime deerreur, son œuvre à Jérusalem, au point de vue desmonuments, fut vraiment grandiose; nous l’avons exposéeplus haut, col. 1370. Avec ce prince, l’hellénismemonta sur le trône. La vie publique, l’industrie, les’P-_

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262. — Monnaie d’Antigone.

[BAEI]AEQ3 ANTirONOr. Couronne. — R). jmn n>nno[a]>TTl>[n "13m S"IJ]n, «Mathathias le grand-prêtre et la communautédes Juifs.» Deux cornes d’abondance.

relations commerciales, les réjouissances, l’organisationde l’armée, tout subit l’influence dominante du géniegrec, excepté la pensée et la vie religieuses, qui sedébattaient entre deux sectes puissantes, celle des Pharisienset celle des Sadducéens. La nation juive étaitdéchirée par les factions, en même temps qu’elle portaitle joug de l’étranger, joug que rendaient encore plusintolérable les instincts sanguinaires et les capricesinsensés de son roi. Tous ces malheurs lui faisaientdésirer ardemment la délivrance messianique. La pléuitudedes temps était venue. Le Messie parut sur laterre, non pour réaliser des espérances charnelles, maispour établir le vrai royaume de Dieu. Hérode touchaità la fin de sa vie, lorsque Notre-Seigneur naquit àBethléhem. Le vieux monarque reçut les Mages à Jérusalem,et, à la nouvelle de la naissance d’un roi desJuifs, craignant pour son trône, il voulut englober lenouveau-né dans un affreux massacre. Matth., ii, 1-18.Il mourut peu de temps après, laissant pour successeurson fils Archélaus, dont les débuts furent marqués parune révolte qui éclata contre lui dans l’enceinte duTemple, pendant les fêtes de la Pàque, et qui fut apaiséepar le meurtre de 3000 séditieux. Après avoir perdu sontitre de roi, pour ne conserver que celui d’ethnarque,ce prince fut déposé au bout de dix ans, et son territoirerattaché à la province de Syrie. L’empereur Tibère,qui succéda à Auguste l’an 14 de l’ère chrétienne, nommaValérius Gratus procurateur de la Judée. Celui-ci administrapacifiquement cette province pendant onze ans,puis il eut pour successeur Ponce-Pilate. Luc, iii, 1.Pilate transféra de Césarée à Jérusalem les quartiersd’hiver de son armée, et souleva le mécontentementgénéral en exposant dans la ville sainte les enseignesromaines surmontées de l’aigle et ornées de l’image del’empereur. Les troubles se renouvelèrent, lorsqu’on le

vit approprier une partie des offrandes du Teirple à laréparation des aqueducs. Ant. jud., XVIII, iii, 1, 2.

C’est sous le gouvernement de ce procurateur queJésus-Christ vint plusieurs fois à Jérusalem et y consommason sacrifice. Tous les détails que nous avonsdonnés plus haut, col. 1370-1376, permettent de suivre lesprincipaux récits de l’Évangile. Nous avons reproduitautant que possible la physionomie matérielle de laville sainte à cette époque. Pour la phjsionomie intellectuelle,morale et religieuse, voir Pharisiens, Sadducéens,Scribes, Sanhédrin, etc. Cf. E. Stapfer. LaPalestine au temps de Jésus-Christ, Paris, 1885, p. 255448. La passion du Sauveur, sa mort, sa résurrection etson ascension glorieuse sont les actes du plus granddrame qui se soit accompli sur la terre et ont fait deJérusalem, qui en a été le théâtre, une cité unique aumonde. C’est do là que doivent partir les rayons quivont transformer l’humanité. Cf. Is., ii, 1-5.

Au jour de la Pentecôte, Jérusalem, remplie de Juifsde la dispersion, entendit la parole des Apôtres, sortistransfigurés du Cénacle. JDe nombreux convertis embrassèrentla religion du Christ. Act., il. Les premiersfidèles s’organisèrent alors en communauté, se rassemblantpour la prière et le sacrifice. Les Apôtres, multipliantleurs prédications et leurs miracles, furent jetésen prison par ordre du grand-prêtre. Miraculeusementdélivrés, ils prêchèrent de nouveau malgré les défenses,les menaces et les mauvais traitements, heureux d’êtretrouvés dignes de souffrir pour le nom de Jésus. Act., v,12-42. Le diacre Etienne fut le premier à donner sonsang pour la nouvelle doctrine. Act., vi, 8-15; vil. Voirplus haut, col. 1343. À cette époque, une violente persécutions’éleva contre l’église de Jérusalem; les fidèles,a l’exception des Apôtres, furent dispersés en diversendroits de la Judée et de la Samarie. Ac., tvin, 1. L’an 35,saint Pierre confia cette église à saint Jacques le Mineur,et alla visiter la chrétienté naissante d’Antioche.Vers la fin de cette même année, le nouveau préfet deSyrie, Vitelhus, ordonna à Ponce-Pilate d’aller se justifierà Rome des plaintes que les Samaritains et lesJuifs avaient formulées contre lui. L’année suivante, ilse rendit lui-même à Jérusalem pour les fêtes de Pâque,et déposa Caiphe, le principal ennemi des chrétiens.Ant. jud., XVIII, iv, 2, 3. Tibère étant mort, en l’an 37,CaïusCaligula, qui lui succéda, établit Hérode Agrippa Ier,pelit-fils d’Hérode le Grand, roi des tétrarchies dePhilippe et de Lysanias, et bientôt de celles d’HérodeAntipas. En 41, Caligula fut tué. Claude, proclamé empereurà sa place, nomma Agrippa roi de toute laPalestine.

Agrippa I «r, mis ainsi en possession du royaumequ’avait gouverné son grand-père, entra solennellementà Jérusalem, l’an 42, et suspendit dans le Temple unechaîne en or qui lui avait été donnée par Caligula, lorsde sa sortie de prison à Rome et comme un souvenirde sa captivité. Ant. jud., XIX, vi, 1. Pour plaire auxJuifs, il fit décapiter saint Jacques le Majeur, frère desuint Jean l’évangéliste, et il mit en prison saint Pierre,qui, pendant la nuit, fut délivré par un ange. Act., xil,1-19. C’est ce prince qui commença la troisième enceintede la ville. Voir plus haut, col. 1376. Au commencementde l’année 44, il mourut misérablement àCésarée. Act., xii, 23; Ant. jud., XIX, viii, 2. La Palestineredevint une province romaine administrée parCuspius Fadus. L’an 45, une grande famine désola lepays. Hélène, reine d’Adiabène, convertie à la foi juive,allégea les souffrances du peuple à Jérusalem, dans lecourant de l’année 46, en distribuant aux pauvres dublé et des fruits secs. Pendant son séjour dans cetteville, elle se fit élever, dans les environs, un magnifiquemausolée, où furent transportés ses restes et ceux deson fils. Ant. jud., XX, ii, 6; iv, 3. En 49, saint Pierrerevint d’Antioche pour présider; le premier concile, au

quel prirent part saint Jacques le Mineur, saint Paul etsaint Barnabe. Act., xv, 1-30. C’est à cette époque, selonl’opinion la plus commune, que la Sainte Vierge mourutà Jérusalem. Félix, affranchi de Claude, remplaça,en 52, le procurateur Cumanus, rappelé à Rome. Fatiguédes remontrances du grand-prêtre Jonathan, quilui reprochait les désordres de sa vie, il le fit assassinerpar l’un des nombreux sicaires qui commençaient àenvahir et à terroriser la ville. Celle-ci se remplitd’imposteurs qui cherchaient à tromper le peuple pours’élever au pouvoir; partout régnaient la confusion etl’anarchie. En l’année 58, saint Paul se rendit à Jérusalem,où il fut surpris dans le Temple par ses ennemis,qui s’emparèrent de sa personne et soulevèrent le peuplecontre lui. Le tribun Lysias l’arracha à la fureur de lamultitude et le fit conduire par des soldats à Césarée.L’Apôtre ne devait plus revoir la ville sainte. Act., xxi,17-40; xxiii, 23-35. Porcius Festus succéda à Félixcomme procurateur de la Judée (60-62). Pendant cetemps, Hérode Agrippa II, fils d’Agrippa Ier, qui avaitété reconnu par les Romains roi de la Batanée etd’autres provinces, avec la surveillance du Temple et ledroit de nommer le grand-prêtre, termina la troisièmeenceinte que’son père avait commencée. L’an 62, Albinusfut envoyé en Palestine, pour remplacer PorciusFestus qui était mort. Avant son arrivée, le grandpretreAnanus fit mettre à mort l’apôtre saint Jacquesle Mineur, évêque de Jérusalem. Peu de temps après cemartyre, un simple paysan, nommé Jésus, fils d’Ananus,commença à proférer sans interruption des malédictionsterribles contre la ville et contre le Temple. Il semit tout à coup à crier: «Voix de l’Orient, voix del’Occident, voix des quatre vents, voix contre Jérusalem,voix contre le Temple, voix contre le peuple; malheur àJérusalem.» Nuit et jour, pendant sept ans, il répéta lesmêmes menaces, bien qu’il eût été arrêté, frappé et flagellépar ordre d’Âlbinus. Il ne cessa qu’en l’année 70, - où iltomba mort, atteint par une pierre, pendant le siège dela ville. Bell. jud., VI, v, 3. De plus, l’an 65, des signeseffrayants apparurent au-dessus de Jérusalem. Ibid.Gessius Florus, le dernier procurateur romain, mit lecomble à son impopularité, en faisant massacrer, l’an 66,plus de 3000 Juifs, dans les rues de la cité. Bell. jud.,II, XIV, 9. Il n’en fallut pas davantage pour que tous leshabitants se soulevassent comme un seul homme contrel’autorité romaine. Les insurgés s’emparèrent de la tourAntonia et y égorgèrent la garnison romaine. CestiusGallus accourut aussitôt avec toutes les forces dont ildisposait; mais les Juifs le battirent, d’abord à Gabaonet ensuite sous les murs mêmes de Jérusalem.

Chargé par l’empereur Néron de cette nouvelle guerre,Vespasien se disposa à aller comprimer le mouvementinsurrectionnel qui menaçait d’envahir toute la Palestine.Avant de marcher sur la ville, il réduisit peu àpeu sous le joug la Galilée et la Pérée, puis, pénétranten Judée, il établit son camp à Emmaus, pour se rendremaître de la route de Jaffa à Jérusalem. Mais, proclaméempereur en juillet de l’année 69, il laissa à son filsTitus la mission de poursuivre la guerre.

6. Les derniers jours de Jérusalem.

Au lieu des’unir pour la défense, les habitants de la malheureusecité se divisèrent en trois factions. L’une était commandéepar Éléazar, qui s’était retranché dans l’enceinteintérieure du Temple; l’autre était dirigée par Jean deGischala, qui occupait les portiques et les parvis extérieurs;la troisième avait à sa tête Simon, fils de Gioras,qui régnait en despote dans la ville haute et la plusgrande partie de la ville basse. Bell. jud., V, I. Au printempsde l’an 70, Titus vint établir son camp à Gabaath-Saul(Tell el-Fûl), à cinq kilomètres au nord de Jérusalem.Le 1o mars, il disposa sa nombreuse armée surle mont Scopus. En même temps, la Xe légion, quivenait de Jéricho, reçut l’ordre d’occuper le mont des

Oliviers, où elle réussit à s’établir solidement malgréles attaques des Juifs. Bell. jud., V, H. Cependant lesfactions continuaient la lutte intestine, celle d’Éléazarfut entièrement défaite; il n’en resta donc plus quedeux, celle de Jean de Gischala, retranchée dans lesfortifications du Moriah et de Bézétba, et celle de Simondans les forteresses de la colline occidentale. Titus commandade couper tous les arbres au nord de la ville, etd’y préparer le terrain pour l’attaque, puis il disposales machines de guerre près des remparts. Le 31 mars,l’enceinte construite par Agrippa (voir fig. 249) céda auxcoups répétés des béliers. Le général romain, maître dela ville neuve, de Bézétha, y transporta sa* camp, surle lieu que l’on appelait camp des Assyriens. Il commençaensuite l’attaque de la seconde enceinte, danslaquelle, au bout de cinq jours, une brèche fut ouverte;mais il lui fallut encore quatre journées de combatscontinuels et acharnés pour se rendre maître de cettenouvelle position et en chasser les ennemis. Aprèsquelque temps de repos, il se mit en mesure d’attaquerla ville haute et la tour Antonia, dont la possession

263 — Judxa capta.

IMP. CAES. VESPASIAN. AVG. P. M. TP.. P.P.P. COS. III.Tête laurée de Vespasien. — ni. 1VDAEA CAPTA. Palmier.A gauche, un Juif debout, les mains attachées derrière le dos;auprès de lui des boucliers. À droite, la Judée en pleurs. Enexergue, S. C. (Senatus consulta).

devait lui ouvrir l’accès du Temple. Jean de Gischala etSimon rivalisèrent d’efforts, d’habileté et d’audace pourneutraliser et contreminer les tentatives des Romains.Titus ordonna alors à ses troupes d’environner la villeentière d’un mur de circonvallation, afin d’empêchertoute communication entre les habitants et le dehorset de les réduire ainsi par la famine. Cette ligne d’investissementfut achevée en trois jours, et, dans la villeainsi enfermée, la famine fit bientôt d’horribles ravages.Le 29 mai, la tour Antonia tomba au pouvoir des Romains,qui, après l’avoir renversée, attaquèrent l’enceintedu Temple. Le mur septentrional fut emporté, leportique livré aux flammes. Enfin, le 10 du mois d’Ab,qui répond à notre mois de juillet, un soldat romain,malgré les ordres formels de Titus, jeta un tisonenflammé dans l’une des salles qui entouraient le sanctuaire.L’incendie se propagea, et bientôt le Temple,qui était à juste titre l’orgueil du peuple juif, nefut plus qu’une ruine. Il y avait juste six siècles etdemi que les Babyloniens avaient détruit celui de Salomon.La ville basse et la ville haute furent prises peuaprès; tout fut mis à feu et à sang. Pendant ce siège,qui dura près de sept mois et qui fut l’un des plussanglants que mentionne l’histoire, une foule innombrablede Juifs succombèrent, moissonnés par le glaive,la maladie et la famine. Ceux qui survécurent furentfaits prisonniers ou vendus comme esclaves.Leur capitalefut rasée de fond en comble, à l’exception des toursHippicus. Phasæl et Mariamne, qui devaient restercomme les témoins de la puissance de la place et de lavaillance des Romains. Après la ruine de Jérusalem,ceux-ci firent frapper des monnaies représentant au

revers la Judée captive, sous la forme d’une femme enpleurs, assise sous un palmier. Voir fig. 263. — Pour lesdétails, cf. Josèphe, Bell. jud., V, VI, VII, I, 1; F. deSaulcy, Les derniers jours de Jérusalem, in-8o, Paris, 1866,S’jI fallait en croire Josèphe, Bell. jud., VI, ix, 3, onzecent mille Juifs succombèrent pendant ce siège, et quatrevingt-dix-septmille furent faits prisonniers. La populationde Jérusalem a été de tout temps difficile à déterminer,mais ces chiffres, qui supposent une immense multituded’habitants, sont exagérés. Il est vrai que, à l’époquedes fêtes pascales, les pèlerins affluaient dans la villesainte, et que les Orientaux ont une extrême facilité às’entasser sur un étroit espace. Malgré cela, il ne fautpas oublier que les limites de l’enceinte, même dans saplus grande étendue, sont en somme assez restreintes.Quant à la population normale, en temps ordinaire, lestémoignages de l’Écriture et de l’antiquité nous fontpresque entièrement défaut. Hécathée d’Abdère, cité parJosèphe, Cont. Apion., i, 22, évaluait le nombre deshabitants sous Alexandre le Grand à cent vingt mille.Plusieurs auteurs regardent ce chiffre comme un maximum,le minimum pouvant être porté à quatre-vingtmille. D’autres pensent que l’antique capitale de la Judéea pu avoir jusqu’à deux cent ou deux cent cinquantemille âmes. Cf. C. Schick, Studien uber die Einwohnerzahldes alten Jérusalem, dans la Zeitschrift desDeutschen Palàstiiia-Vereins, 1881, t. iv, p. 211-221.

Conclusion. Jérusalem dans l’histoire du monde. —Ainsi périt, sous le poids de ses fautes, de ses divisions,et surtout de son déicide, la Jérusalem juive, dont leSauveur avait annoncé la ruine. Luc, xix, 43, 44. Comparéeaux grandes cités de l’ancien monde, elle gardeune physionomie et une grandeur qui ne peuvent manquerde frapper un observateur impartial. Elle n’a rieneu, en somme, de ce qui fait la gloire de Ninive et deBabylone, de Thèbes et de Memphis, d’Athènes et deRome, ni l’étendue, ni la magnificence du site, ni lapuissance militaire, ni l’éclat des monuments, à part leTemple, pour lequel encore elle a été tributaire desnations voisines. Loin de voir ses rois et ses princeslui apporter les dépouilles des peuples vaincus, elle aplutôt été sous le joug des grands empires qui l’avoisinaient.Aucune ville au monden’a peut-être subi plusd’assauts, soutenu plus de sièges. Elle n’a rien créédans les arts ni dans la littérature humaine. Sa gloirelui vient donc de la place qu’elle tient dans l’histoirereligieuse du monde. Au sein des ténèbres du paganisme,la petite colline de Sion produit l’effet d’unphare lumineux, d’où la connaissance et la religion duvrai Dieu ont projeté leurs rayons. Jérusalem a étévraiment sur la terre «la cité de Dieu», Ps. lxxxvi(hébreu lxxxvii), 3, image vivante de sa Providence,théâtre des manifestations de sa puissance et de sasagesse, de sa bonté et de sa justice, jusqu’à la consommationdu sacrifice suprême qui a marqué la fin del’ancien monde et l’aurore du nouveau. Elle reste toujoursla ville sainte des Juifs, dont le dernier bonheurserait d’y mêler leurs cendres à celles de leurs pères.Mais elle est devenue comme la patrie originaire detous les chrétiens que le Christ y a enfantés sur lacroix. Sous la plume des Apôtres, comme autrefoissous celle des prophètes, et dans le langage de la liturgiecatholique, elle s’est transformée en la figure del’Église et du ciel. Gal., ix, 26; Heb., xii, 22; Apoc., Jii,12; xxr, 2, 10.

IV. Bibliographie.— Un volume suffirait à peine pourla bibliographie complète de Jérusalem; ce serait laliste, et elle est longue, de presque tous les voyageursqui ont visité la Terre Sainte. Cf. R. Rohncht,Bibhotheca geographica Palxstinx, in-8o, Berlin, 1890.Isous n’avons à indiquer ici que les auteurs récents dontles ouvrages ont une plus grande importance. Du reste,les derniers résultats de la science sont plutôt consignés

dans les revues spéciales, anglaises, allemandes, françaises,que nous avons souvent citées au cours de cet article. —Poujoulat, Histoire de Jérusalem, 2 in-8o, Paris, 1841;5*édit., 1865; G. Williams, The HolyCity, 2e édit., 2 in-8o,Londres, 1849; J. Fergusson, An essay on the ancienttopography of Jérusalem, in-4o, Londres, 1847; T. Tobler,Topographie von Jérusalem, 2 in-8o, Berlin, 1853;

E. Robinson, Biblical Researches in Palestine, 2e édit.,Londres, 1856, 1. 1, p. 221-433; F. de Saulcy, Voyageautourde la Mer Morte, Paris, 1852, t.n, p. 188-375; Voyage enTerre Sainte, Paris, 1865, t. i, p. 93-144. 345-410; t.n,p. 1-217; F. Thrupp, Ancient Jérusalem, in-8o, Cambridge,1855; Th. Barclay, Jérusalem and environs, Philadelphie,1856; The City of the great King, or Jérusalem,as it was, as it is and as it is to be, in-8o, Philadelphie,1858; H. W. Altmûller, Jérusalem nach seiner ôrthchenLage und bedeutungsvollen Gesc/» c/(fe, in-8o, Cassel, 1859;

F. N. Lorenzen, Jérusalem, Beschreibung meiner Reisenach dem Heihgen Lande, in-8o, Kiel, 1859; W. K. Tweedie,Jérusalem and its environs, in-8o, Boston, 1860;H. Thiele, Jérusalem, seine Lage, seine heiligen Stàttenund seine Bewohner, in-8o, Halle, 1861; F. Gerdes,Naar Jeruzalem en het Heilige Land, 3 in-8o, Rotterdam,1863-1864; Th. Lewin, Jérusalem, a sketch ofthe city and temple, in-8o, Londres, 1861; The siège ofJérusalem by Titus etc., in-8o, Londres, 1863; E. Pierotti,Jérusalem explored, 2 in-4o, Londres, 1863;M. de Vogué, Le Temple de Jérusalem, in-4o, Paris,1864; Appendice, p. 109-129; A. Rhodes, Jérusalem asit is, in-8o, Londres, 1865; C.W. Wilson, The ordnanceSurvey of Jérusalem, 2 in-f°, Southampton, 1866;Wilson et Warren, The Recovery of Jérusalem, in-8o,Londres, 1871; A. Wartensleben, Jérusalem, Gegenwartigesund Vergangenes, in-8o, Berlin, 1870; J. W.Rolland, Sinai and Jérusalem, in-4o, Londres, 1870;W. Besant et E. H. Palmer, Jérusalem, the city ofHerodand Saladin, in-12, Londres, 1872; W. Elgner,Jérusalem und seine Umgebung, in-4o, Leipzig, 1873;Tyrwhitt Drake, Modem Jérusalem, in-8o, Londres,1875; J. N. Sepp, Jérusalem und das Heilige Land,3o édit., 2 in-8o, Ratisbonne, 1878; Ch. Waren, UndergroundJérusalem, in-8o, Londres, 1876; T. Flaminio,Un mese a Gerusalemmee net suoi dintomi,in-8o, Milan, 1878; W.M. Thomson, The Land and theBook, Londres, 1881, t. i, Southern Palestine andJérusalem, p. 415-567; Warrèn et Conder, Survey ofWestern Palestine, Jérusalem, in-4o, Londres, 1884,et vol. de pl.; V. Guérin, Jérusalem, in-8o, Paris, 1889;D. Zanecchia, La Palestina d’oggi, trad. franc., in-12,Paris, 1899, 1. 1, p. 117-529. Clermont-Ganneau.-ircftéeologicalResearches in Palestine during the years 18731874, in-4o, Londres 1899, t. î; Mislin, Les LieuxSaints, Paris, 1876, t. n; Lortet, La Syrie d’aujourd’hui,in-4o, Paris, 1884, p. 219-308; Chauvet et Isambert,Syrie, Palestine, Paris, 1887, p. 243-341; F. Liévin deHamme, Guide-Indicateur de la Terre Sainte, Jérusalem,1887, t. i, p. 143-470; A. Socin et E. Benzinger,Palestine et Syrie, Leipzig, 1893, p. 21-112;G. A. Smith, Jérusalem, 2 in-8o, Londres, 1908.

Cartes et plans. — H. W. Altmûller, Reliefplan vonJérusalem, Cassel, 1858; C. M. van de Velde, Pion ofthe Town and environs of Jérusalem, constructed fromthe English Ordnance Survey and measurementsvon T. Tobler, in-f°, Gotha, 1858; J. T. Barclay, Mapof Jérusalem and environs, in-f", Philadelphie, 1858;W. Wilson, The Ordnance Survey of Jérusalem, Southampton,1866; Zimmermann, Karten und Plane zurTopographie des alten Jérusalem, Bâle, 1876.

Numismatique. — F. W. Madden, History of Jewishcoinage, in-8o, Londres, 1864; Id., Coins oftheJews,ia-4°, Londres, 1881; F. de Saulcy, Numismatique dela Terre Sainte, in-4o, Paris, 1874, p. 69-109.

< A. Legendbe.

    1. JÉSAAR##

JÉSAAR (hébreu: Ishâr, i huile;» Septante:Tcraaâp), second fils de Caath, de la tribu de Lévi.Num., iii, 19. Il est appelé partout ailleurs dans la Vulgate Isaar. Voir Isàar 1, col. 936.

    1. JÉSAARITES##

JÉSAARITES (hébreu: Imy-Isharî; Septante:6 'luaxàp; Vulgate: /esaarite), lévites descendant d’Isaar,dans la branche de Caath. Num., iii, 27. Du temps deDavid, cette famille avait pour chef Salémoth, I Par.,xxiv, 22 (Voir Isaari, col. 936), et Chonénias qui, avecses frères, gardait les trésors de la maison de Dieu.I Par., xxvi, 23-29. Dans ces deux versets, la Vulgateles appelle Isaarites. Voir ce mot, col. 936.

    1. JÉSAIAS##

JÉSAIAS (hébreu: YeSa’eyâhâ; Septante: 'Iaiaç,'Iwiita), quatrième fils d’Idithun, un des chantres de lamaison de Dieu sous la direction de son père, du tempsde David. Il était chef du huitième chœur qui comprenaitdouze chantres. Son nom, écrit par la Vulgate Jesaiasdans I Par., xxv, 15, est écrit Jeseias au ꝟ. 3 du mêmechapitre. En hébreu, ce nom ne diffère pas de celui duprophète Isaie. Voir Isaie, col. 941.

    1. JÉSAMARI##

JÉSAMARI (hébreu: lëmeraï; Septante: 'lactpapi),quatrième fils d’Elphaad, de la tribu de Benjamin; ilhabitait Jérusalem. I Par., Vin, 18.

    1. JESANA (hébreu##


JESANA (hébreu.YeSândh, «l’ancienne;» Septante: ïi’lEtruvà), ville des montagnes d'Éphraim, quifaisait nartie du royaume d’Israël. Elle fut prise, maispour peu de temps, cf. III Reg., xv, 17, avec ses dépendances et avec deux autres villes, Béthel et Éphron, parAbiu, roide Juda, sous Jéroboam 1er, roi d’Israël. II Par.,xiii, 19; cf. xv, 8. Elle n’est nommée que dans ce passage de l'Écriture. Josèphela mentionne aussi, Ant.jud.,XIV, XV, 12, sous le nom de Vla-âvaç, comme ayant étéle théâtre d’une victoire d’Hérode le Grand sur Pappas,général de l’armée d’Antigone, mais il ne donne aucundétail qui permette d’en fixer le site. Plusieurs exégètesmodernes croient qu’il faudrait lire aussi YeSdnâh,I Reg. (Sam.), vii, 12, au lieu de haS-Sên (Vulgate: Sen)que porte le texte hébreu actuel. Il est dit, dans ce passage, que Samuel éleva une pierre, qu’il appela ÉbenÉzer, «la pierre du Secours,» entre Masphath et Sen,en mémoire de la victoire que les Israélites avaient remportée là sur les Philistins. —Quoi qu’il en soit, Jesana aété identifiée par M. Clermont-Ganneau, Notes sur taPalestine, dans le Journal asiatique, avril-mai 1877,p. 490-501. C’est le 'AinSinia actuel, village de deux centshabitants, à cinq kilomètres environ au nord de Béthel,alimenté d’eau par une source qui coule dans l’ouadiSinia. Les flancs de la colline sont tapissés d’oliviers etde figuiers plantés en terrasses. On y remarque denombreux tombeaux taillés dans le roc. Sur la ported’entrée de l’un d’eux est une inscription hébraïque encaractères carrés, anciens, découverte par M. Drake en1872, et portant: «Hananya, fils d'Éléazar.» VoirV. Guérin, Samarie, t. ii, p. 38; Palestine ExplorationFund, Quarterly Slatement, 1877, p. 206-207; Survey ofWestern Palestine, Memoirs, t. ii, 1882, p. 291, 302;Fr. Buhl, Géographie des alten Palàshna, 1896,p. 173-174. F. Vigouroux.

    1. JESBA##

JESBA (hébreu: Jëbah; Septante: 'Izaêâ), père,c’est-à-dire fondateur d’Esthamo, dans la tribu de Juda.I Par., iv, 17. La Vulgate fait de lui le septième filsd’Ezra, mais le texte original, d’ailleurs fort obscur enGet endroit, semble faire de lui un fils de Méred parBéthia, la fille d’un pharaon. I Par., iv, 18. Voir Esthamo l, t. li, col. 1971.

    1. JESBAAM##

JESBAAM (hébreu: Yaëob'âm), un des principauxchefs de l’armée de David qui tua trois cents ennemis.

I Par., xi, 11. Dans ce passage (Septante: 'IeueëaSâ utôc,'Axajtâv), il est appelé fils d’Hachamoni (voir ce mot,col. 388). Il est dit au chapitre suivant que Jesbaam deCarehim fut un des guerriers qui allèrent rejoindreDavid exilé à Siceleg. I Par., xii, 6 (Septante: Eoéoxàjixoù oî KopCtai). Il paraît vraisemblable que c’est le mêmeque le fils de Jesbaam déjà nommé et qui est distinguéla première fois par le titre de fils d’Hachamoni et laseconde par celui de Carehim. Sur la manière dont ilfaut entendre ce mot, voir Carehim, t. ii, col. 259. Lenom de Jesbaam apparaît une troisième fois, I Par.,xxvii, 2 (Septante: 'Icrêoâç) comme chef de la premièredivision de l’armée de David, composée de 24 000 soldats.Là, il est appelé fils de Zabdiel, et la Vulgate écrit sonnom Jesboam au lieu de Jesbaam. Il est possible que cesoit Jesbaam Hachamoni de Carehim désigné par une qualité nouvelle, mais ce n’est pas certain. — Dans II Reg.,xxiii, 8, qui contient la liste des forts de David parallèleà celle de I Par., xi, le nom de Jesbaam est tout à faitdéfiguré; il devient Yôséb bas-sébét, que la Vulgate traduit: Sedens in cathedra sapientissimus, et il tue huitcents hommes (au lieu de trois cents), si l’on traduit:'âdinô hâ-'ésnû (au lieu de hâ-'èsnî) par «coup de salance» contre huit cents hommes. D’autres, lisant, avecle keri: hâ-'ésni, prennent les deux mots hébreux pourun nom propre, celui d’Adino l’Hesnite, et attribuent àcet Adino la mort des huit cents hommes. Voir Adino,t. i, col. 218. II Sam. (Reg.), xxiii, 8. Le passage est fortobscur, mais il est plus probable que 'admô n’est pasun nom propre.

    1. JESBACASSA##

JESBACASSA (hébreu: Yosbeqasâh; Septante:'Ieoêao-axà), lévite, de la famille d’Héman, qui dirigeaitle seizième chœur des chantres sacrés du temps deDavid. I Par., xxv, 4, 24.

    1. JESBIBENOB##

JESBIBENOB (hébreu: Ubi-benôb; Septante:'IsuiTÎ Iv toï; èxyiîvoi; ; Alexandrinus: 'lza6 h Nôë),géant philistin, de la race d’Arapha, dont la lance pesaittrois cents sicles et qui était armé d’une épée neuve. Illut tué par Abisai, trère de Joab, au moment où il attaquait David. II Reg., xxi, 16-17. Beaucoup de critiquespensent aujourd’hui qu’Isbibenob n’est pas un nompropre, mais qu’il faut lire, en conservant l’orthographedu chelib pour le premier mot: vay-yéSbû (au lieu dukeri: va-isbi) be-Gôb (en corrigeant Nob en Gob); «etils demeurèrent avec lui (David) à Gob.» Cf. Gob, col. 258.

    1. JESBOAM##


JESBOAM, fils de Zabdiel. I Par., xxvii, 2. VoirJesbaam.

    1. JESBOC##

JESBOC (hébreu: Isbâq; Septante: 'Ieugtix etSoêâx), cinquième fils d’Abraham et de Cétura. Gen.,xxv, 2; I Par., i, 32. Il fut le père de la tribu de cenom, qui habita l’Arabie septentrionale. Cette tribu estnommée dans une inscription de Salmanasar III, roid’Assyrie. Il énumère parmi ses alliés, dans sa premièrecampagne (859 avant notre ère), Buranatê de la terre deYasbuk (mat Ia-as-bu-qa-aï). Inscript, du monolithe,col. I, ligne 54. Voir Frd. Delitzsch, dans la Zeilschnft furKeilschriftforschung, 1885, t. ii, p. 92; Eb. Schrader,Keilinschriftliche Bibliothek, 1889, t. l, p. 158; Ed. Glaser, Skizze der Geschichte und Géographie Arabiens,Berlin, 1890, t. ii, p. 446. La terre de Yasbuk ne nousest pas autrement connue.

    1. JESCHA##

JESCHA (hébreu: Iskdh; Septante: 'Ieer^â), filled’Aran et nièce d’Abraham, sœur de Lot et de Melcha.Gen., xi, 59. La tradition juive l’identifiait avec Sara.Josèphe, Ant. jud., 1, vi, 5; Targum du Pseudo-Jonathan,in Gen., xi, 29; S. Jérôme, Qusest. in Gen., t. xxiii,col. 956 (Sarai cognomenlo Jecsan, S-jâmy.ov). Cette identification est une hypothèse sans preuves. 1399

JÉSÉIAS — JÉSIMON

(1400

    1. JÉSÉIAS##


JÉSÉIAS, nom, dans la Vulgate, de deux Israélites.Voir Isaie, col. 941.

1. JÉSÉIAS (hébreu; YeSa’eyâh; Septante: ’Itaiâç),fils de Phaltias, d’après la Vulgate et les Septante; filsd’Hananias et frère de Phaltias d’après l’hébreu. Il étaitde la tribu de Juda et petit-fils ou arrière-petit-fils deZorobabel. I Par., iii, 21.

    1. JÉSÉIAS##


2. JÉSÉIAS, nom dans la Vulgate, I Par., xxv, 3, dufils d’Idithun qu’elle appelle, I Par., xxv, 15, Jésaias.Voir Jésaias, col. 1397.

    1. JÉSÉMA##

JÉSÉMA (hébreu: lsmd’; Septante: ’Isunâv), secondfils d’Étam, de la tribu de Juda. Peut-être est-ce un nomde localité. I Par., iv, 3.

    1. JÉSER##

JÉSER (hébreu: Yêsér; Septante: ’laaâap; ’Iensp et’Ad-^p), troisième-fils de Nephthali, et petit-fils de Jacob,chef de la famille des Jésérites. Gen., xlvi, 24; Num.,xxvi, 49; I Par., vii, 13.

    1. JÉSÉRITES##

JÉSÉRITES (hébreu: hay-Iserl; Septante: ô’Isaîpt;Vulgate: Jesentse), descendants de Jéser, un des chefsde famille de la tribu de Nephthali. Ils furent recensésdans le pays de Moab par Moïse. Num., xxvi, 49.

    1. JÉSÉSI##

JÉSÉSI (hébreu: Yesisaï; Septante: ’Ieuaî), fils deJeddo, de la tribu de Gad. Ses descendants furent recensésdans le pays de Galaad du temps deJoatham, roide Juda. I Par., v, 14, 16-17.JÉSI (hébreu. Jse’î), nom de quatre Israélites.

1. JÉSI (Septante: ’I<rejju: rjX; Alexandrinus: ’Ieuet’),fils d’Apphaim et père de Sésan, descendant d’Hesron, dela tribu de Juda. I Par., II, 31.

2. JÉSI (Septante: 2si), père de Zoheth et de Benzoheth,de la tribu de Juda. Certains commentateursl’identifient avec Jési 1, mais leur postérité n’est pas lamême. I Par., iv, 20.

3. JÉSI (Septante: ’Is<ri)> père de Phaltias, de Naarias,de Raphaia et d’Oziel, de la tribu de Siméon, qui,sous le règne d’Ézéchias, allèrent attaquer les Amalécitesqui s’étaient établis sur le mont Séir, les battirentet s’y fixèrent eux-mêmes. I Par., iv, 42.

4. JÉSI (Septante: Est; Alexandrinus: ’Ieusi), un deschefs de la demi-tribu de Manassé transjordanique.I Par., v, 24.

    1. JÉSIA##

JÉSIA, nom, dans la Vulgate, de trois Israélites quien hébreu s’appellent Issîyâh et Iêsiyahû. Deux autres,dont le nom en hébreu est le même que Jésia, sontappelés dans la Vulgate Jésias et Josué 6.

1. JÉSIA (hébreu: Usîyâh; Septante: ’Ie<jîa), le dernierdes fils d’Izrahia, de la tribu d’Issachar, un des chefsde sa tribu sous le règne de David. I Par., vii, 3.

2. JÉSIA (hébreu: Issîydhû; Septante: ’I^)(rouvi;Alexandrinus: ’Itala), benjamite qui alla rejoindre Davidà Siceleg et fut un de ses vaillants soldats. I Par.,Xii, 6.

3. JÉSIA (hébreu: Issîyâh; Septante: ’laii), lévite,de la famille de Caath. I Par., xxiii, 20; xxiv, 25.

    1. JESIAS##

JESIAS (hébreu: Issiyâh; Alexandrinus: Ieac’ac),lévite, descendant d’Eliézer, fils de Moïse. Sous le règnede David, il était chef de la famille de Rohobia. I Par.,

xxiv, 21. La Vulgate l’appelle Isaias dans I Par., xxvi,25. Voir Isaie 3, col. 985.

    1. JÉSIEL##


JÉSIEL, fils aîné de Nephthali. Num., xxvi, 48. Ile «-tappelé Jasiel dans Gen., xlvi, 24, et I Par., vii, 13. VoirJasielI, col. 1139.

    1. JÉSIÉLITES##

JÉSIÉLITES (hébreu: hay-Yahse’êli; Septante:4’A<rn)>! ’), famille descendant de Jésiel (Jasiel) qui futdénombrée par ordre de Moïse dans le pays de Moab.Num., xxvi, 48.

    1. JÉSIMON (hébreu ha-Yesimôn##


JÉSIMON (hébreu ha-Yesimôn, avec l’article, «le désert;» Septante:?] èpvjjjioç dans les Nombres; ô’Ie<7<raiuôç,I Reg., xxiii, 19, 24; 6’Ie<7<reu.o<;, IReg., xxvi, 1, 3), nomde deux déserts dans l’Écriture. La Vulgate a conservéle nom hébreu Jesimon dans les Rois, excepté I Reg.,xxiii, 19, où elle l’a traduit par «désert». Au livre desNombres, elle a traduit, à la suite des Septante, pardesertum, Num., xxi, 20, et par sohlvdo, Num., xxiii,28. Dans ces deux passages du livre des Nombres, le nomde Jésimon sert à déterminer, une première fois, la situationdu mont Phasgah et, une seconde, la situation duPhogor: il est dit du sommet de ces deux montagnesqu’elles sont «vis-à-vis de Jésimon». — Dans le premierlivre des Rois, Jésimon désigne une partie du désert deJuda, dans le voisinage de Ziph et de Maon. — Le mothébreu Yesimôn se lit dans sept autres passages de laBible hébraïque, où il est employé en parallélisme(excepté Ps. LVIH, 8) comme synonyme de nudbdr, «ledésert.» Deut., xxxii, 10; Ps. lxviii, 8; lxxvio,40; evi, 14; cvii, 4j(hébreu); Is., xiiil, 19, 20. Exceptédans les trois derniers passages, où il y a tout auplus une allusion indirecte à la sortie d’Egypte,Yesimôn dans les quatre premiers est dit, commemidbdr, du pays qu’ont traversé les Israélites pourse rendre dans la Terre Promise. Mais il y a cette différenceentre l’emploi de Yesîmon dans ces endroits,d’une part, et dans les Nombres et les Rois, de l’autre,qu’il est toujours précédé de l’article dans ces deux dernierslivres, tandis qu’il ne l’est jamais dans les Psaumeset dans Isaie, non plus que dans le Deutéronome. Onpeut conclure de là que le Jésimon dont parle Moïsedans le Pentateuque et le Jésimon dont il est questiondans l’histoire de David sont deux localités qui avaientspécialement reçu le nom par excellence de Jésimon,sans doute à cause de leur aridité caractéristique. Il ya, en effet, entre le midbdr et le yesimôn, quoique l’unet l’autie signifient «désert», cette différence, que celui-làsignifie «un lieu désert», mais quiproduitde l’herbe, «un pacage,» tandis que yesimôn est un lieu sec, désoléet qui ne produit rien. Voir Désert, 1o et 4o, t. ii,col. 1388 et 1390.

1o Le Yesîmôn. des Nombres, xxi, 20; xxiii, 28, étaitsitué dans le pays de Moab, au nord de la mer Morte, àl’est du Jourdain et non loin de son embouchure, dansle G hôr-el-Belqa actuel et dans le voisinage de Betlijesimoth(aujourd’hui’Atn Sûeiméh), t. ii, col. 1686,mais il n’est pas possible d’en déterminer plus exactementla position. Une ancienne inscription assyriennedu roi Assurbelkala, fils de Théglathphalasar Ier, vers1001 avant J.-C, mentionne un district de Palestineappelé Yasumum qui est peut-être le Yesimôn duPentateuque. Voir Fr. Hommel, Die altisræhlischeVberhefening, in-12, Munich, 1897, p. 197, 255.

2o Le Yesimôn du premier livre des Rois se trouvait,d’après les données de l’auteur sacré, au nord et vis-àvisde la colline d’Hachila (col. 390), près de Ziph,I Reg., xxiii, 15, 19; xxvi, 1-3, et également au nord dudésert de Maon. Ziph et Maon étant connus (voir ces deurmots), on peut fixer approximativement, mais non d’unemanière précise, la situation de Jésimon dans ces paragesau nord-est de la ville de Carmel. Les déserts de Ziph et 4401

JËSIMON — JÉSUA

de Maon sont un midbdr, c’est-à-dire des pâturages,mais le terrain qui s'étend entre eux et la mer Morte,en se dirigeant vers Engaddi, est un yesimôn, une terredésolée et aride. Voir Survey of Western Palestine,Memoirs, 1883, t. iii, p. 299; F. Buhl, Géographie deralten Palâstina, 1896, p. 96. M.'J. A. Smith, HistoricalGeography of Holy Land, in-8°, Londres, 1894, p. 312314, fait de Jésimon (par ce nom, il entend le désert deJuda en général) la description suivante qui nous donneune idée exacte de cette région désolée, surtout dansla partie voisine de la mer Morte: «Dans l’Ancien Testament, dit-il, cette terre (le désert de Judée) est appeléele Jésimon, mot signifiant «dévastation», et aucun termene peut mieux exprimer son aspect sauvage et bouleversé.Sa superficie est d’environ trente-cinq milles sur quinze(cinquante-six kilomètres sur vingt-quatre). Nous yarrivâmes de Maon. Les terres cultivées à l’est d’Hébroncèdent rapidement la place à des collines et à des valléessans eau, couvertes de genêts et d’herbe. Nous employâmes tout notre après-midi à traverser à chevalcette région. Les puits sont rares; presque tous sont desciternes d’eau de pluie, jalousement gardées pendantl'été par leurs propriétaires arabes. Pendant une heureou deux, nous ne fîmes que monter et descendre lesflancs d'éminences escarpées, chacune plus nue que laprécédente. Nous descendîmes ensuite par des pentesrocheuses à une grande plaine, où nous laissâmesderrière nous les dernières herbes, de couleur grisâtre,et les chardons; il y avait déjà deux heures que nousn’avions plus rencontré de troupeaux de chèvres. Destouffes d’arbustes rabougris, des plantes épineuses etdes plantes rampantes, c'était là tout ce qui soulageaitla vue au milieu de la nudité de ce sol sombre ou jaunâtre, composé de sable, de menus débris de calcaireet de gravier. Les couches de terrain étaient commetordues; les chaînes montagneuses couraient danstoutes les directions; les collines au nord et au sudparaissaient de gigantesques amoncellements de poussière; celles qui étaient voisines avaient l’air d’avoir étédéchirées comme par l'éruption des eaux. Quand nousne marchions pas sur des débris, le calcaire étaitéclaté et écaillé. Souvent le sol sonnait creux;quelquefois les pierres et le sable glissaient en quantitésous les pieds des chevaux; d’autres fois le roc vif étaitnu et érodé, surtout dans les gorges qui étaient nombreuses et qui étaient ardentes et brûlantes comme desfournaises; au loin, à l’est, courait la chaîne des montagnesde Moab et, devant elles, nous apercevions, de temps entemps, la mer Morte, dont le bleu foncé, par de la le désert,était pour nos yeux un rafraîchissement. Nous chevauchâmes ainsi pendant deux heures, jusqu'à ce que la merapparût soudain dans toute sa longueur, et le chaos quenous venions de traverser s'éboula et se brisa, parune descente de douze cents pieds (461 mètres), amasde calcaire, de cailloux et de marne, de rocs escarpés,de crevasses et de précipices, jusqu’au bord de l’eau.Tel est Jésimon, le désert de Judée. Il transportel’aspect ravagé et la désolation de la vallée de lamer Morte jusqu’au cœur du pays, jusqu’au pied dumont des Oliviers, à deux heures des portes d’Hébron,de Bethléhem et de Jérusalem.» Cf. ibid., p. 513,564-566. F. Vigolroux.

    1. JESMACHIAS##

JESMACHIAS (hébreu: hmakyâhû, «que Jéhovahsoutienne!» Septante: S «(iax( «), lévite qui fut chargéavec plusieurs autres, sous le règne d'Ézéchias, de la gardedes magasins du Temple où étaient renfermées les offrandes et les dimes. II Par., xxxi, 13.

    1. JESMAÏAS##

JESMAÏAS (hébreu: Iima’eyahû, «que Jéhovahexauce!» Septante: S» ixaias), fils d’Abdias, chef de latribu de Zabulon pendant le règne de David. I Par.,xxvii, 19.

1402

    1. JESPHA##

JESPHA (hébreu: Updh; Septante: 'Ito-qxz), secondfils de Baria, de la tribu de Benjamin. I Par., viii, 16.

    1. JESPHAM##

JESPHAM (hébreu: ISpân; Septante: 'Uaf&v),fils aîné de Sésac, de la tribu de Benjamin. I Par.,vm, 22.

    1. JESRAELI##

JESRAELI (hébreu: hay-lêre'éll; Septante: "U*pasXfefj;), nom ethnique dont la vraie lecture est douteuse. II Reg., xvii, 25. Dans I Par., ii, 17, on lit Ismaélite, au lieu d’Israélite que porte le texte hébreu, et deJesraélite que donnent les) Septante et la Vulgate. Cequalificatif est appliqué à Jéthra, père d’Amasa. Voir

JÉTI1RA.

    1. JESSE##

JESSE, nom du père de David et d’une région del’Egypte dans la Vulgate.

1. JE88É, une des formes, en latin et en français,du nom d’Isaî, père de David, appelé ailleurs Isaî. Cetteorthographe est employée quatre fois dans l’Ancien Testament, Ps. lxxi, 20; Eccli., xlv, 41; Is., xi, 1, 10, etcinq fois dans le Nouveau Testament. Matth., i, 5 (deuxfois); Luc, iii, 22; Act., xiii, 22; Rom., xv, 12. Voir Isaï,col. 936.

2. JE88É, nom qui est donné dans la Vulgate, Judith,1, 9, à la terre de Gessen. Les Septante portent avec raisonWaip. Le roi d’Assyrie envoya des messagers aux habitants du pays, comme à ceux de beaucoup d’autres contrées, pour se faire payer tribut, mais ils relusèrent.Voir Gessen, col. 218.

    1. JESSUI##

JESSUI (hébreu: Uvi), nom de deux Israélites.

1. JESSUI (Septante: 'Ieo-JX, 'Ieooû et 'I<rovt)i troisièmefils d’Aser et petit-fils de Jacob, père de la famille desJessuites. Gen., XLVi, 17; Nurn., xxvi, 44; I Par., vii, 30.

2. JESSUI (Septante: 'Ieaato-j), second fils du roi Saûlpar Achinoam. I Reg., xiv, 49. Son nom est omis dansla généalogie de la famille de Saûl, I Par., viii et IX, etil n’est pas non plus question de lui dans le récit de labataille de Gelboé, I Reg., xxxi.ee qui porte à supposerqu’il était mort en bas âge.

    1. JESSUITES##

JESSUITES (hébreu: hay-Iivi; Septante: 4 'Icerovf;Vulgate: Jessuitœ), descendants de Jessui dans la tribud’Aser qui furent recensés dans le pays de Moab. Nurn.,xxvi, 44.

JÉSU (Taniïj;), fils d'Éliézer et père d’Er, un des ancêtres de Notre-Seigneur dans la généalogie de saint Luc,m, 29.

    1. JÉSUA##

JÉSUA, nom de trois Israélites dans la Vulgate. Leurnom est écrit différemment en hébreu, mais le radicalest toujours le même. La Vulgate a transcrit plusieursdes noms qui ont la même orthographe en hébreu parJostie, Jesite, Jésus.

1. JÉSUA (hébreu: ISvâk; Septante: 'IecwJot et Sovfa),second fils d’Aser et petit-fils de Jacob. Gen., xlvi, 17;I Par., vii, 30. Jésua n’est pas nommé dans la généalogie d’Aser, contenue dans Nurn., xxvi, 44-47.

2. JÉSUA (hébreu: Yëtiîa"; Septante: 'Itjto-j), descendant d’Aaron qui devint le chef des prêtres à qui échutle neuvième rang dans l’ordre du service divin sous lerègne de David. I Par., xxiv, 11. Ce sont peut-être sesdescendants, de la branche de Jadaîa, qui revinrent decaptivité avec Zorobabel. I Esd., ii, 36. Dans ce passagela Vulgate donne à Jésua le nom de Josué. 14Q3 JÉSUA — JÉSUITES (TRAVAUX DES) SUR LES SAINTES ÉCRITURES 1404

3. JÉSUA (hébreu: Yêsâa’; Septante: ’I/)<roii), lévitequi revint avec Zorobabel de la captivité de Babylone,s’occupa du chant sacré avec d’autres lévites et aidaEsdras et Nchémie dans leur œuvre de restauration.II Esd., xti, 8. Voir aussi I Esd., ii, 40; iii, 9; II Esd.,m, 19; viii, 7; rx, 4, 5; x, 9; xii, 24. Dans tous cespassages, Jésua est appelé par la Vulgate Josué. Gommepresque partout les mêmes noms de lévites y sont groupésensemble, on peut en induire que c’est toujoursde Jésua qu’il s’agit. — Dans II Esd., xii, 24, nous lisons: «Josué fils de Cedmihel,» mais ce doit être une altérationdu texte pour «Josué et Cedmihel», comme dans lesautres passages analogues. Voir Cedmihel, t. ii, col. 370.

    1. JÉSUÉ##

JÉSUÉ, nom d’un Israélite et d’une ville dans laVulgate.

4. JÉSUÉ (hébreu: YêSûa’; Septante: ’Iïjdouç), un deslévites qui, du temps du roi Ézéchias, avaient été chargésde distribuer sous la direction de Coré, dans les villessacerdotales, la part qui revenait à chacun des prémiceset des offrandes faites au sanctuaire. II Par., xxxi, 14-15.

2. JÉSUÉ (hébreu: Yêsû’a; Septante: ’Irio-oCi), ville dela partie méridionale de la tribu de Juda. Elle n’estnommée qu’une fois dans l’Écriture. Il est dit, II Esd.,xi, 26, qu’elle fut réhabitée après la captivité de Babylonepar des membres de la tribu de Juda. Son nom nese lit point dans les listes du livre de Josué. On a supposéqu’elle pouvait être la même que Sema’(Vulgate:Sama), Jos., XV, 26, mais c’est une hypothèse qui ne reposeque sur la ressemblance fort imparfaite du nom.Les explorateurs anglais de la Palestine ont proposéd’identifier Jésué avec les ruines de Klurbet S’aivéh,à l’ouest le Tell’Arad et au sud de’Attir sur la limitedu désert de Bersabée. La position convient assez bien,puisque Jésué, d’après l’énumération de Néhémie, étaitdans le voisinage de Bersabée et de Malada. «KhirbetS’awéh est situé sur le sommet d’une colline proéminentecouronnée de ruines, consistant en restes de fondationset eft monceaux de pierres. La colline est entourée d’unmur bâti en gros blocs de cailloux agglomérés. D’autresruines de même’nature existent dans la vallée au dessous.» Survey of Western Palestine, MemoirsA883, t. iii,p. 409-410; cf. p. 404. F. Vigouroux.

    1. JÉSUITES##

JÉSUITES (TRAVAUX DES) SUR LES

SAINTES ÉCRITURES. C’est à des écrivainsétrangers à la Compagnie de Jésus qu’il convient dedemander un jugement d’ensemble sur les travaux desjésuites en matière biblique. Protestants et catholiquess’accordent à reconnaître leur importance. Au xvie siècle, «l’exégèse a été cultivée surtout par les jésuites, dontles ouvrages, souvent réimprimés au cours du xvii «, ontéclipsé tous les autres.» Ed. Reuss, Geschichte desN. T., 5e édit., Augsbourg, 1874, t. ii, p. 293. — «Interpræcipua hujus Societatis décora référendum est, quodmulta theologicarum disciplinarum lumina atque columinaproduxerit, nec ullum fere studiorum biblicorumgenus, de quo non quidam illius sodalium variisnominibus præclarissime promeriti fuerint.» Danko, DeScript, comment., Vienne, 1867, p. 335. — «Le protestantismeobligea les docteurs catholiques à s’occuperdorénavant davantage de l’interprétation littérale, etmoins de l’interprétation allégorique et mystique desSaintes Écritures. Les jésuites, institués par saint Ignaceen 1534, tinrent le premier rang parmi les défenseursde la Bible contre les erreurs nouvelles. Leur Ratiostudiorum recommande l’étude du grec, de l’hébreu etdes autres langues orientales dans le but de mieux comprendreet de mieux expliquer les Saintes Écritures.» Vigouroux, Manuel bibl., 11e édit., t. i, n° 215, p. 357.

Dans son Nomenclator literarius (41n-8°, edit. altéra,

Inspruck, 1892-1899), le P. Hurter, S. J., retraçant le tableaude la renaissance des études scripturaires pendantle siècle qui a suivi le concile de Trente, de 1563 à1660, énumère plus de 300 auteurs catholiques dont lesouvrages traitent des choses bibliques. Or on compte surce nombre 80 jésuites. — Le lecteur trouvera des renseignementsbiographiques et une bibliographie complètedans les notices particulières que ce Dictionnaireconsacre à chacun des exégètes; on ne prétend donc pasfournir dans le présent article une énumération complètedes travaux bibliques exécutés par les religieux dela Compagnie de Jésus. On s’est plutôt attaché à préciserles origines et le développement historique de ces travaux,comme aussi la méthode et l’esprit d’après lesquelsils ont été conduits.

I. Origines des études bibliques chez les jésuites.

— I. leçons d’écriture sainte. — Quand saint Ignacede Loyola et ses neuf premiers compagnons vinrent demanderà Paul III (octobre 1537), de les employer auservice et à la défense de l’Église, les études bibliquescommençaient à sortir de l’état de langueur où elles se trouvaientdepuis un siècle. Pressés de réagir contre l’actionprotestante, qui s’était tout particulièrement portée dece côté des sciences ecclésiastiques, le cardinal Cajétan(† 1535), Sante-Pagnino († 1541), Vatable († 1547), Clarius(† 1555) et d’autres encore venaient de donner aux étudesscripturaires un nouvel essor, en mettant, aux mainsdes théologiens et des fidèles cultivés, des textes et desversions plus exactes. Il restait néanmoins une lacuneà combler en faveur du peuple chrétien. À l’exemple deLuther, les prédicants de la Réforme prenaient commethème ordinaire de leurs discours le texte même de laBible. Ils affirmaient que toutes leurs doctrinesy étaient contenues et reprochaient bien haut auxpapistes de dérober les Livres sacrés aux simples fidèles,de peur que cette lecture ne tournât à leur confusion.

— À ces prétentions des novateurs, les premiers jésuites,en particulier les PP. Lainez, Le Jay et Salmeron, répondentpar un nouveau genre de prédication. Il consisteà exposer publiquement dans les églises le texteinspiré. C’est ce qu’on appela dès le début la leçond’Écriture Sainte. La méthode en est simple. On faitchoix d’un livre biblique et on l’explique d’unbout à l’autre d’une façon continue. Les auditeurspeuvent au besoin apporter le texte et en suivre l’explicationsur la lettre elle-même. Chaque leçon se divise endeux parties; c’est d’abord l’exposition exégétique avecses conclusions doctrinales ou encore son apologie;viennent ensuite les applications morales en rapportavec le passage expliqué. Prise en elle-même, la leçond’Écriture Sainte n’était pas précisément une nouveauté.On trouve déjà quelque chose d’analogue au xme siècle,mais surtout au xrve. Voir t. ii, col. 1466. Ce qu’ily avait d’original, dans cette institution, c’est que laleçon ne s’adressait pas seulement à des étudiants enthéologie ou à des religieux, mais à tous les fidèles; ellene se faisait plus en latin et dans une école, mais dansles églises et en langue vulgaire.

L’année de son arrivée à Rome (1537), le bienheureuxPierre Le Fèvre fut chargé par Paul III d’enseignerl’Écriture Sainte à l’université romaine dite de laSapience, tandis que Jacques Lainez se voyait confierla chaire de théologie scolastique. Orlandini, Hist. soc.Jesu, p. 1, t. ii, n. 33, in-f°, Rome, 1615. Mais les leçonsd’Écriture Sainte proprement dites semblent avoir commencéau cours de la mission qu ils entreprirent tousdeux en 1539 dans les États de Parme et de Plaisance,à la suite du cardinal légat Ennio Filonardi. Lettre deLainez à saint Ignace, 16 sept. 1540. Dans une autre lettreadressée de Venise, le 5 août 1542, à saint Ignace, leP. Lainez nous fait connaître le succès qui s’attacha toutd’abord à ce genre de prédication: «Je m’étais déterminé,ainsi que je l’ai écrit à V. R., à donner des leçons 1405 JÉSUITES (TRAVAUX DES) SUR LES SAINTES ÉCRITURES 4406

d'Écriture Sainte.J’ai commencé Je jour de Saint-Jacques,à expliquer, dans l'église du Saint-Sauveur, l'Évangile selon saint Jean. Le nombre des auditeurs était satisfaisant: on en a compté, m’a-t-on dit, quatre cents; onremarquait parmi eux le révérendissime nonce apostolique, un évêque grec, et beaucoup de membres dela noblesse. Tous se sont montrés satisfaits. Le mercredisuivant je fis la leçon avec un pareil nombre d’auditeurs,bien qu’elle n’eût pas été annoncée. Après la leçon, unetrentaine de gentilshommes vinrent me demander, dela part des administrateurs de l’hôpital, de transférer laprédication à l’un des jours de la semaine; parce queles jours de fêtes les sénateurs devaient tenir le conseil.Je me suis donc déterminé à donner trois leçons’d'Écriture Sainte chaque semaine. Dimanche dernier, il y aeu plus de mille auditeurs, et l’on comptait parmi euxles hommes les plus distingués par leur noblesse oupar leur fortune. Le nombre va toujours croissant; et,j’espère, avec l’aide de Dieu, recueillir des fruits desalut. t> Il devait, en 1547, à Florence, donner de nouveau ces leçons sur saint Jean.

Cependant le P. Claude Le Jay se livrait en Allemagneau même ministère et avec un égal succès. Vers 1542, ildonna à Ratisbonne des leçons sur l'épître aux Galates;et en 1551 il expliqua à Vienne l'épître aux Romains.C’est à dessein qu’il avait choisi l’une et l’autre de cesépltres, dont les Luthériens abusaient pour soutenirl’inutilité des bonnes œuvres et la justification par lafoi toute seule. Lettre du B. Canisius auP.Polanco, deVienne, 7 août 1552; Orlandini, Hist. Soc. Jesu, p. I,t. XI, 41; J.-M. Prat, Le P. Claude Le Jay, in-8,Lyon, 1874. Vers la même époque, en 1546, le B. PierreCanisius lui-même donnait à Cologne des leçons publiques sur les évangiles et les épltres de saint Paul àTimothée. Vita del B. Pietro Canisio dal P. GiuseppeBoero, Rome, 1864, p. 42. Mais de tous les premierscompagnons de saint Ignace, celui qui se distingua leplus par ses leçons d'Écriture Sainte, fut sans aucun douteAlphonse Salmeron. Il en avait fait comme son ministèrepropre. Les seize volumes de «Commentaires» qu’il nousa laissés sur le N. T., Madrid, 1597, sont le résumé desleçons qu’il fit au peuple pendant plus de trente ans.C’est à Vérone, en 1548, que Salmeron semble avoirdébuté avec quelque éclat dans ce genre de prédication. «Le matin, il prêchait au peuple sur un sujet de morale, et le soir, il exposait devant un auditoire d'élitequelque passage de la Sainte Écriture, propre à confirmer la doctrine catholique et à réfuter les nouvelleserreurs.» L’année suivante (1549), il exposa, à Bellune,les épltres de saint Paul; et vers la fin de la mêmeannée, il commençait à l’université d’Ingolstadt, enBavière, l’explication de l'épître aux Romains, tandisque le P. Le Jay y commentait les Psaumes. En 1551nous trouvons Salmeron à Naples où il expose l'épîtreaux Galates dans l'église de Sainte-Marie-Majeure; puisl’année d’après ce fut le tour du Discours sur la montagne et des Béatitudes. Il reprend ces mêmes leçonsen 1558 et en 1561, à Rome, où, en qualité de vicaire,il remplace momentanément le P. Lainez, généralde la Compagnie. Le B. Bernardin Realino écrivaiten 1566 à son père au sujet des leçons d'ÉcritureSainte que Salmeron venait de reprendre à Naples: «Notre supérieur, le R. P. Salmeron, continue à interpréter, les dimanches et les fêtes, le livre de la Genèse.Il a un nombreux auditoire de gentilshommes et dedocteurs. Je remercie Dieu d'être entré dans la Compagnie du vivant d’un tel homme, véritable colonne dela vérité catholique.» Vers cette même époque, leP. Salmeron fut, en matière d'études scripturaires, lemaître souvent consulté, toujours écouté, du cardinalAntoine Carafa, celui-là même qui devait plus tard présider la commission chargée de préparer une éditioncorrigée de la Vulgate.

Avec quel soin Alphonse Salmeron se tenait au courant des questions qu’il avait à traiter, nous le savonspar une lettre qu’il adressait, le 20 juin 1572, au P. Jérôme Nadal: «J’ai demandé à Sa Sainteté, par l’intermédiaire du cardinal Carafa, la permission de lire leslivres des hérétiques pour les réfuter dans mon ouvrage.Notre Saint-Père a bien voulu accéder à mon désir,comme Votre Révérence le verra par la lettre ci-jointedu cardinal et par la copie du privilège des trois cardinaux inquisiteurs. Je voudrais donc qu’on m’envoyât lesnotes de Bèze sur le N. T., ainsi que les commentairesdes hérétiques sur les quatre évangiles et sur le livredes Actes des apôtres. Je vous serais reconnaissant deme procurer ces livres, au plus tôt.» Quand Salmeronsollicila pour ses commentaires la revision en usagedans la Compagnie, le P. général Éverard Mercuriandésigna à cet effet Robert Bellarmin, alors tout absorbépar un cours de controverse au Collège romain. Pendant ses vacances, de mai à octobre 1580, l’illustrecontroversiste revisa les quatre premiers livres; les huitsuivants furent revus par le P. Jacques Paëz († 1583);le P. Fogliani devait achever ce travail de revision. LeP. Salmeron mourut à Naples le 13 février 1585. Quelques jours après, le B. Bernardin Realino écrivait àl’un de ses frères: «Ce père était fort docte en la languegrecque, en la langue chaldéenne et en la langue syriaque. Il savait par cœur toute la Sainte Écriture. Il aécrit sur tout le Nouveau Testament; c’est-à-dire sur lesquatre Évangiles, les Épitres de saint Paul et celles desautres Apôtres; enfin sur le livre de la Genèse. Il aassisté au concile de Trente comme théologien du papeet s’y est fort distingué.» Voir J. Boero, Vie duP. Jacques Lainez, suivie de la biographie du P. Alphonse Salmeron, traduite de l’italien par le P. Victorde Coppier, S. J., in-8°, Lille, 1894. — Les leçons d'ÉcritureSainte ne disparurent pas avec les premiers jésuites.Jusqu'à la fin du siècle dernier elles furent en usagedans les principales églises de la Compagnie; et aujourd’hui même elles ont lieu régulièrement au Gesù deRome.

II. l’exégèse et la TnÉoi.oaiE. — L’année mêmeoù saint Ignace et ses compagnons prononçaient àParis leurs premiers vœux (1534), Jean Maldonat naissait en Estramadure. Il était destiné à marquer aupremier rang des exégétes du xvi° siècle. On sait avecquel éclat il enseigna pendant trente ans la philosophieet la théologie à Paris. Quand des intrigues vinrentmettre fin à un succès qui rappelait celui des grandsscolastiques du xiii» siècle, l’humble religieux en profita pour se retirer au collège de Bourges et s’y livreraux études bibliques, qui toujours avaient eu ses prédilections (1577). C’est là qu’il composa son incomparablecommentaire sur les Évangiles, édité pour la premièrefois à Pont-à-Mousson (1596-1597), et qui a eu depuisplus de vingt éditions. On pourra sans doute le mettre àjour en plus d’un endroit, mais jamais il ne sera démodé. On ne sait ce qu’il faut le plus admirer dans Maldonat, ou de sa vaste érudition, ou de son ferme bon sens.Chez lui, l’exégèse est à la fois sûre et large. Il connaîtles Pères, sait le cas qu’il faut faire de leur sentiment,sans que pour cela il méconnaisse jamais les exigencesdu texte. Sans dédaigner les applications mystiques,il s’attache au sens littéral. R. Simon et Bossuet ont faitl'éloge de ses commentaires. Ennemi de tous les excès,Maldonat ne craignait pas de réagir à l’occasion contrecertains catholiques, qui se déclaraient réfractaires àdes explications plausibles, uniquement parce qu’ellesavaient été proposées tout d’abord par des protestants.— Vers le milieu du xvie siècle, la faculté de théologiede l’université de Paris s’attardait encore dans une méthode qui, tout au moins, ne répondait plus aux besoinsdu moment. On se bornait à commenter le Maitre dessentences, s’altacbant de préiérence aux questions sub4407 JÉSUITES (TRAVAUX DES) SUR LES SAINTES ÉCRITURES

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tiles, fussent-elles oiseuses. L’étude des sources véritablesde la théologie: Écriture Sainte, Pères et Conciles,était manitestement insuffisante. Pierre d’Ailly, Gerson,Nicolas de Clémangis avaient bien prolesté, mais sans résultatappréciable. Un siècle après eux, Jean Major subissaitencore la tyrannie de la routine. Devant l’hérésie menaçante,il fallut bien réformer l’enseignement et rendreà l’exégèse la place qu’elle avait perdue dans les étudesthéologiques. Jean Clichtoue donna le branle qui futsuivi par Jean Gagnée, Jean Arborée et d’autres. Maisla méthode restait encore imparfaite. — Ce fut alors queMaldonat commença ses leçons au collège de Clermont,à Paris. Durant son premier cours, de 1565 à 1569, lesSentences restèrent encore la base <Je son enseignement,mais il suivait le texte assez librement et ne traitait pasles questions de la même manière que les autres. Il établissaitles propositions qu’il jugeait véritables par despreuves tirées de l’Écriture, des Pères, des Conciles etdes actes du saint-siège. Il se proposait constamment deréfuter le calvinisme. Dans son second cours, c’est-à-direà partir de 1570, il abandonna les Sentences et exposala théologie sur un plan nouveau dont toute lafaculté subit l’heureuse influence. Cette’méthode devaitbientôt recevoir sa consécration dans l’ouvrage du P.Petau sur les dogmes théologiques. Cf. J.-M. Prat, Maldonatet l’Université de Pans, au XVIe siècle, Paris,1856; surtout livre II, chap. i et îv; livre IV, ch. m;Crevier, Histoire de l’université de Paris depuis ses originesjusqu’à l’année 1600, 1 in-8°, Paris, 1761, t. iii,p. 181. Dans un discours prononcé le 9 octobre 1571,à l’occasion de l’ouverture des cours, Maldonat s’expliquelui-même sur la part qu’un étudiant en théologie doitfaire à l’Écriture Sainte: «L’Écriture étant la principaledes sources théologiques, pourrions-nous mieux commencernotre travail matin et soir qu’en exploitant sesrichesses? À mon sens, ceux qui laissent de côté l’Écri rture, pour s’adonner exclusivement à l’étude de je nesais quels auteurs, ne sont pas des théologiens. Ceuxqui ne lui consacrent que la moindre et la dernière partiede leur temps, appelez-les théologiens, s’ils y tiennent;pour moi, ce ne sont que des théologiens malavisés et sans méthode. Voulez-vous suivre mon conseil 1Une fois vos exercices de dévotion achevés, consacrez lapremière heure du matin à lire le Nouveau Testament,et la première du soir à lire l’Ancien. Si vous savezl’hébreu et le grec, lisez-les respectivement en hébreuet en grec. Vous y gagnerez du même coup d’acquérirdes notions historiques et théologiques, et d’entretenirdes connaissances linguistiques. Le reste de votretemps, employez-le à suivre les cours, à les repasser, àprendre vos notes, à disputer, à lire les auteurs, à rédigerdes dissertations sur des points particuliers. Cesdivers exercices renferment tout le programme de votreformation théologique.» Maldonah Opéra var. theol.,Paris, 1677, t. i, p. 26-27.

III. LE CONCILE DE TRENTE ET LA CORRECTION DB

LA VULGATE. — Le concile de Trente donna une siheureuse impulsion aux études scripturaires que lesiècle d’après marque parmi les plus brillantes époquesde l’exégèse. Les jésuites comptèrent six des leurs parmiles théologiens de l’illustre assemblée. Cependant leP. Le Jay eut seul une part active à la préparation decette quatrième session où on déclara l’authenticité dela Vulgate (18 avril 1546). Il était arrivé à Trente dès lecommencement de décembre 1515, en qualité de procureurdu cardinal Othon Truchsess, évêque d’Augsbourg.Lainez, Salmeron, Covillon, Canisius et Polanco nevinrent que plus tard.

Le plus considérable des travaux bibliques exécutés auXVIe siècle est sans contredit l’édition corrigée de la Vulgateque le concile avait décidée dans son décret Insuper(Concil. Trid., sess. IV). On sait que cet importantobjet a occupé, avec plus ou moins d’activité, les pontificats de Pie IV, saint Pie V, Grégoire XIII, Sixte V, UrbainVII, Grégoire XIV, Innocent IX et Clément VIII(1559-1592). Dans la commission instituée par Pie IV etprésidée plus tard par le cardinal Ant. Carafa, celle-làmême qui, en 1587, édita l’Ancien Testament d’après lesSeptante, par manière de prélude à l’édition de la Vulgate,on voit figurer, à des moments divers, les PP.Emmanuel Sa, François Tolet et Robert Bellarmin. Voirle P. Couderc, S. i., Le vénérable cardinal Bellarmin,2 in-8°, Paris, 1893. Grégoire XIII voulait leur adjoindrele P. Maldonat, mais celui-ci mourut à Rome, peu dejours après son arrivée (1583). Quand, sous le pontificatde Sixte V, le travail de revision fut mené avec le désirarrêté d’aboutir au plus tôt (1585-1590), François Toletrésidait au Vatican, où il fut pendant vingt-deux ansprédicateur pontifical, avant d’être élevé au cardinalat,ce qui n’eut lieu que sous Clément VIII (1593). Le papeavoua un jour à l’ambassadeur de Venise, Badoer, qu’ilfaisait lui-même ce travail de correction définitive et qu’ilsoumettait chaque feuillet, une fois terminé, au P. Toletet à quelques augustins très forts en ces matières.Ceux-ci les revoyaient et les expédiaient ensuite à l’imprimerie.Devant les vues personnelles et inflexibles deSixte V, le rôle des reviseurs se bornait le plus souventà laisser passer. C’est bien ce que donne à entendre, endes termes manifestement exagérés, Olivarès, l’ambassadeurd’Espagne, quand il écrit à son maître Philippe II,le 7 mai 1590: «Tolet pense que cette édition profiteraplus aux hérétiques qu’aux fidèles.»

Il ne semble pas que Bellarmin se soit associé auxtravaux de la première commission avant son retour duvoyage qu’il fit en France, à la suite du légat Gætani,c’est-à-dire avant 1590. Douze ans plus tard (1602), dansune lettre à Clément VIII. il nous fait connaître son jugementsur l’œuvre et la méthode de Sixte V. «VotreBéatitude sait à quel danger Sixte V s’exposa lui-mêmeet toute l’Église, lorsqu’il entreprit la correction desSaints Livres d’après les lumières de sa science particulière;et je ne sais vraiment pas si jamais l’Église acouru un plus grand danger.» Tout le monde sait lapart qu’eut Bellarmin dans la résolution prise par GrégoireXIV, en 1591, de mettre au pilon l’édition sixtine,parue l’année précédente, d’en retirer les quelques exemplairesdéjà en circulation, et de reprendre à nouveautout ce travail de revision. Il fut l’âme de la nouvellecommission constituée à cet effet, et qui, dans la villade Zagarolo, sous’la présidence du cardinal Marc-AntoineColonna, mena si rapidement le travail à bonnefin. Il était achevé vers le commencement d’octobre 1591;mais le 14 de ce même mois, Grégoire XIV venait à mourir.Clément VIII, élu le 30 janvier 1592, devait avoir lagloire de publier la correction définitive de la Vulgate.A cette fin il nomma un comité suprême, dont l’avis devaitêtre sans appel; il se composait des cardinaux Valier,Borromée et du P. Tolet. «Ceux-ci lui laissèrent toutle poids et la responsabilité de cette affaire. Tolet avecson esprit juste et précis, son érudition vaste et sûre,sa science de la théologie et de l’exégèse, était, sans contredit,le plus capable de la conduire à bonne fin.» F. Prat, La Bible de Sixte V, dans les Études religieuses,t. l, p. 565; t. li, 1890, p. 35,. 205. Voici le billetdu pape qui donnait à Tolet plein pouvoir en cettematière: «Clément VIII, pape. — Nous ordonnons d’imprimercette édition de la Bible, d’après les correctionsindiquées par la congrégation, Nous en remettant aujugement du P. François Tolet, de la Compagnie deJésus, à qui Nous déléguons, à cet effet, Notre autorité.Pour la correction typographique, Nous la confionsà la fidélité et au savoir du F. Ange Rocca, de l’ordrede Saint-Augustin.» C’est dans ces conditions quel’édition définitive de la Vulgate, dite Sixto-Clémentine,parut le 9 novembre 1592. Sa Præfatio ad lectorem,qui est de Bellarmin, confesse loyalement 1409 JÉSUITES (TRAVAUX DES) SUR LES SAINTES ÉCRITURES 4410

qu’elle n’a pas la prétention d’être de tout point parfaite.

Le décret du concile de Trente sur l’authenticité dela Vulgate a été, dès le début, matière à controverse entrecatholiques. Les jésuites ont en général soutenu l’opinionmodérée, celle qui a fini par triompher; à savoirque ce décret ne met pas la Vulgate à la place ou au-dessusdes textes primitifs, ni même des autres versionsnon latines. Tel a été le sentiment de Lainez, cité par Mariana,Pro edit. vulg., c. xxi, dans Migne, Curs. Script.Sacr., t. i, col. 839; de Salmeron, Opéra, t. i, proleg. 3,p. 24; de Bellarmin, De edit. latina. Vulg.; quo sensua concilio Trident, definitum sit, ut ea pro authent.habeatur, ~Wuvzbovtrg, 1749, édit. P.Widenhofer, S. J. Ilest vrai que le P. Frévier, S. J., écrivit contre cet opusculepour en contester l’authenticité: La Vulgate authentiquedans tout son texte, 1753. On peut citer encore enfaveur de l’opinion modérée: Serarius, Proleg. Bibhc,c. XIX, 12, p. 118, Mayence, 1612; Pallavicini, Histor. conciliiTria., I. VI, c. xv, n. 1 et 99; et surtout Mariana,dans la dissertation que nous venons de citer, col. 739877. De nos jours les PP. Patrizi, Corluy, Franzelin etCornely ont écrit dans le même sens.

IV. PRINCIPES GÉNÉRAUX D’EXÉGÈSE. — 1° Au début

du xviie siècle, le procès de Galilée est comme un épisodedans l’histoire des théories alors en cours surl’interprétation traditionnelle du texte biblique. Quelquesjésuites, et en particulier Bellarmin, créé cardinalpar Clément VIII, en 1599, furent mêlés à cette affaire.Lors de son premier procès devant le tribunal du Saint-Officeet la S. C. de l’Index (1615-1616), l’illustre Florentintrouva beaucoup de bienveillance auprès de Bellarmin,chargé de l’examiner. «Préoccupé de la nouvellethéorie, le cardinal consulta les quatre mathématiciensles plus renommés du Collège romain, les PP.Clavius, Griemberger, Malcozzo et Lembo qui rendirentà Galilée un témoignage favorable. En conséquence il seborna à lui conseiller de présenter sa théorie ex suppositioneet non d’une manière absolue; de donner àsa propagande un caractère plus calme; surtout de nepas appuyer son opinion sur l’Écriture Sainte.» Couderc,Le vén. cardinal Bellarmin, t. ii, p. 178. Il fautlire la lettre que le cardinal Bellarmin écrivit alors(12 avril 1615) au P. Foscarini, carme; elle s’adresse autant,ou même plus, à Galilée qu’à son ami. Il ne niepas que l’Écriture se puisse entendre en ce sens, maisil attend des preuves; jusque-là il doutera. «Or, dansle cas de doute, on ne doit pas abandonner l’interprétationde l’Écriture donnée par les SS. Pères.» Telleétait aussi l’opinion du P. Fabri, S. J. C’est dans cesconditions que Bellarmin donna à Galilée l’attestation du16 mai 1616 qui commence par ces mots: «Galilée n’aabjuré entre nos mains, ni entre celles de personne àRome ou’ailleurs, que nous sachions, aucune de sesopinions ou doctrines; il n’a pas non plus reçu de pénitencesalutaire.» — Quand se produisit devant l’Inquisitionle procès de 1633, Bellarmin était mort depuisdouze ans. «Les jésuites d’alors ont été considérés parGalilée et ses amis, comme les plus actifs promoteursdu procès qui allait s’engager; mais rien ne justifie cetteaccusation. L’ardeur bien connue des Pères de la compagniede Jésus pour la défense des décisions de l’autoritéecclésiastique explique la vivacité que montrèrent quelques-unsd’entre eux, tels que les PP. Grassi, Scheineret Inchofer; mais Galilée comptait des partisans parmiles jésuites, comme dans les autres ordres religieux.» J.-B. Jaugey, Diction, apolog., p. 1332.

2° La question préliminaire de savoir s’il n’.y a qu’unseul sens littéral pour un même passage de l’Écrituren’est pas sans influence sur l’exégèse. Du XVe sièclejusqu’à la fin du xviii’, la grande majorité des auteurss’est prononcée en faveur de la pluralité. Sur ce pointles auteurs jésuites se sont divisés. Ont écrit dans le sensde l’opinion commune, pour la pluralité des sens lirté

raux: Bellarmin, De verbo Dei, iii, 3; Serarius, Proleg.bibl., xxi, 12; Salmeron, Proleg. 8; Bonfrère, Præloquia,c. xx, sect. v; Molina, Valentia, Vasquez, In Sum~mam D. Thomse, p. 1, q. I, a. 10. — Contre la pluralité:Maldonat, In Isaiam, Lin, 4; In Jerem., XXXI, 15;Ribera, In Oseam, xi, n. 3-13; Pererius, In Genesimi, reg. I 1. C’est l’opinion qui a justement prévalu. Cf.Patrizi, De interpret. bibl., t. I, p. 15-51; Cornely, Introd.gêner, in S. S., 1. 1, n° 198.

3° D’une façon générale, on peut dire que, tout en restantconservatrice, l’exégèse des jésuites a su s’inspirer d’unprincipe de saint Augustin, souvent répété par saintThomas: à savoir que l’intelligence du texte bibliquedoit profiter de tous les progrès que réalise la sciencehumaine. De ce chef, elle a été sur plus d’un point initiatrice.

C’est ce qu’on remarque par exemple dans l’histoiredes diverses interprétations de l’hexaméron de Moïse.Les quatre règles dont, au xvie siècle, Pererius, S. J.,faisait précéder son commentaire sur la Genèse, sontd’une conception à la fois ferme et large, et elles gardentaujourd’hui encore toute leur valeur. Cf. Fr. de Hummelauer,In Gènes., 1895, p. 57. En s’inspirant desmêmes règles trois siècles plus tard, le P. Pianciani, S.J., pourra sur ce terrain engager exégèse catholiquedans une voie toute nouvelle. In historiam creationismosaicam commentatio, Naples, 1851; Cosmogonianaturale comparata col Genesi, Rome, 1862.

V. LES PREMIERS PROFESSEURS D’ÉCRITURE SAINTE.

— L’historien de la compagnie de Jésus, Orlandini, Hist.soc. Jesu, nous a gardé les noms de quelques-uns deceux qui à l’origine professèrent avec un certain éclatle cours ordinaire d’Écriture Sainte dans les universitésou les collèges des jésuites. Les’noms de ces pionnierspeuvent prendre place dans un dictionnaire de la Bible.Déjà en 1537, au lendemain de leur arrivée à Rome, lepape Paul III avait chargé le bienheureux Pierre LeFèvre d’enseigner l’Écriture Sainte à l’université romainede la Sapience, tandis que Jacques Lainez recevaitla chaire de théologie scolastique. Ils y restèrent deux ans.Hist. soc. Jesu, part. i, t. ii, n» 33. En 1548, le P.JérômeNadal professa l’hébreu au collège de Messine; leP. André Frusy, un Français, ne tarda pas à lui succéder(t. VIII, n° 13). Le même devint en 1553 professeurd’Jicriture Sainte au Collège romain (t. XIII, n» 2). En1556, le P. Jean Covillon, de Lille, explique les Psaumesà l’université d’Ingolstadt (t. XVI, 23, 24). Ch. H. Verdière,S. J., L’université d’ingoldstadt, 2 in-8°, Pans,1887. La même année, le P. Robert Claysson est professeurau collège de Billom (Auvergne) (t. XVI, n°37).En 1552, aux débuts mêmes du collège de Naples, leP. Pelten y enseigne le grec et l’hébreu. En 1576, aucollège de Pont-à-Mousson, le P. Toussaint Roussel,remplacé l’année suivante par le P. Sager, expliquependant trois ans l’Épitre aux Romains, 1577-1579. VoirEug. Martin, L’université de Pont-à-Mousson, 15721168, in-8°, Paris, 189-1, p. 340-341. Nous ne serions nicomplet ni juste, si, aux noms de ceux qui ont péniblementouvert parmi nous le sillon des études bibliques,nous n’ajoutions pas le nom du cinquième général dela compagnie, Claude Aquaviva, qui fut l’inspirateurintelligent et infatigable de toutes les entreprises quiont honoré les jésuites au cours des vingt-cinq dernièresannées du xvie siècle. C’est par son ordre que fuiexécutée l’édition princeps des œuvres de Maldonat etde Salmeron; et c’est encore à ses soins que nousdevons le Ratio studiorum dont il va être question. Ilsemble d’ailleurs que ses connaissances personnelsellui aient permis d’imprimer avec compétence unedirection aux travaux scripturaires. Une circonstance dela vie de Salmeron le donne à penser. «C’était unevéritable intimité, qui unissait Salmeron à Aquaviva.Salmeron avait besoin du Nouveau Testament grecIII. - 45 14Il JÉSUITES (TRAVAUX DES) SUR LES SAINTES ÉCRITURES 1412

syriaque; il en fit la demande à Rome. Aquaviva luienvoya sur-le-champ le sien, s’en privant dans ses propresétudes. Salmeron l’en remercia par une lettreque nous possédons.» J. Boero, Vie du P. Alph. Salmeron,p. 298.

II. La législation de la compagnie de Jésus en matièred’Écritdbe Sainte. — C’est à dessein que noustraitons en seeond Heu ce qui concerne l’organisationméthodique des études bibliques dans la compagnie; car,sur ce point, la théorie est venue après la pratique. Tousles travaux, ou peu s’en faut, dont nous avons déjà parlé,sont antérieurs à l’établissement définitif des règles quidevaient régir ce genre d’études. Avant d’être écrites, lesrègles du professeur d’Écriture Sainte se trouvaient déjàassez uniformément observées. Voir l’abbé Eug. Martin,L’université de Pont-à-Mousson, t. III, c. ii, § 1,p. 340, l’a bien montré pour le collège de Pont-à-Mousson,fondé en 1575. — L’année même qui suivit lamort du P. Salmeron, paraissait à Rome la premièreébauche du Ratio studiorum de la compagnie de Jésus.Elle avait pour titre: Ratio atque institutio studiorumper sex Patres ad id jussu R. P. Prmposit. generalisdeputatos conscnpta. I. H. S. Romse, in Collegio Soc.Jesu. Anno Dni MDLXXXVI. Excudebat Franc. Zannetus,cum facultate Superiorum. Or, dans cette rédactionprovisoire, au chapitre intitulé De Scripturis, on seplaint de ce que la compagnie n’a pas encore pleinementréalisé ce que les constitutions prescrivent relativementaux études bibliques. Il faut prendre garde à un engouementexcessif pour la théologie scolastique; en particulier,il est regrettable que, dans les régions transalpines,ceux qui veulent se mettre au courant des questionsconcernant la Bible soient obligés de recourir auxouvrages des protestants, avec péril pour leur foi. Laprédication, au lieu de s’alimenter à sa source naturellequi est l’Écriture, s’égare en de vaines subtilités et ende froides déclamations tirées de la philosophie ou del’histoire profane. Voici la conclusion: «À ce mal il nesaurait y avoir d’autre remède que le zèle diligent dessupérieurs à étendre, promouvoir, faciliter les étudesbibliques, et à encourager de toute façon ceux qui y sontspécialisés: spécialité de grande conséquence, et quidemande de puissantes aides, langues, érudition variée,connaissance de l’antiquité, et théologie scolastique, afinde pouvoir s’exprimer avec orthodoxie et propriété.’» Tout l’esprit de la législation des jésuites en la matièretient dans cette phrase. — Cette législation se prend detrois sources: a) des constitutions de saint Ignace(1550); b) du Ratio studiorum (rédrction définitive,1599); c) des décrets des congrégations générales tenuesà diverses époques. Le Ratio studiorum ne fait querégler en détail ce qui se trouve marqué dans les constitutions.Quant aux décrets des congrégations, ils précisent,complètent, et surtout remédient aux abus survenus.Voici le résumé de ces prescriptions.

I. DIGNITÉ ET EXCELLENCE DE CETTE ÉTUDE.

Quand

saint Ignace énumére les diverses branches de l’enseignementqu’on donnera dans les universités et les grandscollèges de la Société, il met en première ligne la théologiescolastique et l’Écriture Sainte. Constit., part. IV,c. xil, § 1. Voilà pourquoi la 5° règle du provincial,Rat. stud., débute en disant: «Qu’il mette une grandediligence à promouvoir l’étude des saintes Lettres.» LaXIIIe congrégation générale, tenue en 1687, s’aperçutavec douleur que la compagnie ne comptait plus d’exégètecomparable à ceux qui avaient illustré en grandnombre le siècle brillant qui va de Salmeron (fl585) àMenochius († 1655). Elle fit un décret, le xv «, pour conjurerle général de promouvoir activement les étudesbibliques, selon les besoins de chaque province. Ledécret se termine en ces termes: «Enfin, que la sciencesciipturaire, qui a toujours été est si particulière estimedans la compag» ife, garde parmi bous la place qui lui

revient, comme à l’âme de la théologie et à une culturesouverainement nécessaire dans les ministères propresde la compagnie.»

II. QUALITÉS ET CONNAISSANCES DES PROFESSEVIIS

d’écriture sainte et d’hébreu. — Pour s’acquitterde sa tâche, le provincial choisira comme professeursd’Ecriture des hommes «non seulement versés dans lalinguistique (ce qui est de première nécessité), maisaussi pourvus de connaissances suffisantes en théologieet dans les autres sciences religieuses, en histoire etdans les diverses branches de l’érudition, et, autant quepossible, bien doués au point de vue littéraire». Rat.stud., reg. prov. 5 a. Il faut donc que celui qu’on appliqueà cet enseignement ait au préalable, 1° une théologiesûre, 2° une connaissance étendue des langues et del’antiquité, 3° de la littérature jointe à une élocution facileet même brillante. Quiconque est tant soit peu aucourant de ce qui concerne l’enseignement biblique conviendrasans peine que cette règle est formulée aecune pleine compréhension du sujet.

Le professeur d’Écriture doit être théologien.


C’est qu’en effet, la Bible n’est pas un livre ordinaire;ses pages inspirées sont une des sources de la théologie.En portant sur l’arche de la parole divine unemain téméraire, on s’expose au châtiment dont fut frappéOza. D’ailleurs les textes religieux de la Bible ne se présententpas au lecteur avec ordre et méthode; et leurintelligence est singulièrement facilitée par une synthèsepréalable des doctrines qu’ils renferment. Voilà pourquoi,aux termes mêmes des constitutions, part. IV,c. VI, 4, l’étude spéciale de l’Écriture ne doit pas précéderla théologie scolastique. Les exégètes jésuitesn’ont pas en général la réputation d’être téméraires. Nele devraient-ils pas précisément à la méthode qui leurest ici prescrite?

2° Dans la préparation de l’exégète, la part faitepar l’Institut à l’hébreu et aux langues orientalesest considérable. Saint Ignace avait écrit dans sesconstitutions: «Comme, à notre époque surtout, tantl’étude que l’utilisation de la théologie exige la connaissancedes belles-lettres, ainsi que des langueslatine, grecque et hébraïque, il y aura dans ces partiesdes professeurs capables en nombre suffisant. De plus,pour les autres langues, telles que la chaldaïque,l’arabe et l’indienne, suivant la diversité des pays et desraisons qui militent en faveur de leur enseignement, onverrait à leur donner des titulaires.» Part. IV, c. XII,2. C’est de ce texte que se sont inspirées toutes les autresprescriptions relatives à l’enseignement des languesbibliques. — Le professeur d’hébreu doit être autantque possible, le même que celui qui enseigne l’Écritureou, tout au moins, un théologien, la connaissance decette langue étant principalement utile pour l’exégèse.Rat. stud., reg. prov. 7°. Les supérieurs restent jugesde l’opportunité qu’il peut y avoir à mettre l’étudede l’hébreu avant, pendant ou après la théologie, Const.,part. IV, c. xiii, 4; il pourrait même faire partie de l’enseignementlittéraire, au même titre que le grec. Const.,part. IV, c. xii, 2, et xiii, decl. B. Les autres langues orientalesqui aident à mieux comprendre le texte ou les versionsde la Bible, ont toujours été en honneur dans laSociété, Rat. stud., reg. prof. ling. heb. 6°, où leurétude était singulièrement favorisée par les jésuites missionnairesen Orient qui écrivaient sur ces idiomes, ourevenaient même les enseigner en Europe. Le P. JérômeNadal, Schol.in Constit-, édit. 1883, p. 81, nousapprend que Pie IV ordonna d’enseigner l’arabe au collègeRomain.

Saint Ignace avait trop d’expérience pour s’imaginerque la connaissance des langues suffit à préparer desexégètes tels que l’Église en attend. Il savait que cettescience préliminaire n’est qu’un outil dont l’usage dépendde la main qui le manie. Aussi bien a-t-il écrit à ce 4413 JÉSUITES (TRAVAUX DES) SUR LES SAINTES ÉCRITURES UU

sujet une déclaration qui vaut la peine d’être citée enentier: «Il convient qu’ils aient pris quelque grade enthéologie, ou qu’ils en soient convenablement intruits;qu’ils aient de plus l’intelligence des docteurs etdes décisions de l’Église, afin que l’étude des languesleur soit utile et non nuisible. Du reste, si l’on envoyait d’assez humbles et d’assez fermes dans la foi,pour qu’ils n’eussent rien à redouter de l’étude deslangues, le supérieur pourrait alors user de dispense etla leur permettre, dans la vue soit d’un bien général,soit d’un bien particulier.» Const., part. IV, c. vi, 5,decl. D. Ce n’est pas que saint Ignace redoutât l’interprétationgrammatieo-historique, puisque c’est à celaque tendent naturellement la linguistique et l’histoirede l’antiquité; mais il se défiait de la présomptiond’esprit qui porte à croire que cette science profanesuffit à comprendre pleinement la Bible. «Un des points que doivent se proposer ceux des nôtresqu’on applique à l’étude des langues est la défense dela version approuvée par l’Église. y> Const., part. IV,c. vi, 5. Cf. Rat. stud., reg. prof. S. S. 2°, et reg.prof. ling. hebr. 2°. Une pareille insistance se ressentévidemment de l’époque où ces textes ont été rédigés.Il n’est pas hors de propos de rappeler ici un fait assezcaractéristique. À l’endroit des constitutions que nousvenons de citer, saint Ignace, s’inspirant de sa modérationordinaire, avait écrit dans le texte autographe:en cuanto se pudiere (quoad ejus fieri poterit, «autantque faire se pourra» ); ce qui était une formule irréprochable.La première congrégation générale, tenue en1558, deux ans après la mort de saint Ignace, usant dudroit que le fondateur et le siège apostolique lui avaientdonné, retrancha de la rédaction primitive l’incise:autant que faire se pourra. On en donna la raison: «c’est que la Vulgate est partout défendable aux termesdu décret du concile de Trente.» 1 Congr. gen., decr.xxvii. Il est difficile de conjecturer quelle influencedécisive a pu subitement amener une congrégation présidéepar Lainez, et au sein de laquelle marquait Salmeron,à modifier un texte rédigé postérieurement audécret du concile, sans aucun doute d’après leur propreconseil, et soumis depuis 1550 à leur approbationindividuelle.

3° On comprend aisément que la connaissance deslangues et des choses de l’antiquité soit indispensable àl’exégète; mais pourquoi le Ratio studiorum souhaitet-ilque le professeur ait encore de la littérature et même,si c’est possible, de l’éloquence, c’est-à-dire une élocutionfacile et ornée, qui s’élève sans trop de peine à lahauteur du sujet à traiter? L’Écriture étant un ensemblede livres écrits dans tous les genres, depuis la poésielyrique jusqu’à l’histoire la plus prosaïque, il est souverainementimportant que celui qui l’interprète ne seméprenne pas sur le caractère même de chacun de ceslivres. Une erreur sur ce point capital fausserait l’interprétationdu livre entier. N’est-ce pas précisément parce côté que certaines époques brillent moins que d’autresdans l’histoire de l’exégèse? Par exemple, la connaissancedes langues et la culture littéraire ont manqué aumoyen âge. Son exégèse s’en est forcément ressentie. —Le professeur, mais surtout celui qui donne en publicdes leçons d’Écriture Sainte, doit être à même d’interpréterdignement le texte biblique. Il serait intolérablequ’il exposât dans le même style, sur un ton uniforme,Isaie et l’auteur des Paralipomènes.

111. LA MÉTHODE QUE DOIVENT TENIR LES PROFESSEURS

d’écriture sainte ET d’bébreu. — 1° Le professeurd’hébreu s’attachera à rendre aussi fidèlement que possiblele texte primitif de la Bible. Rat.stud., reg. prof.Jing. heb. 1*. Il mènera de front les rudiments de lagrammaire et l’explication d’un livre choisi parmi lesplus faciles de l’Ancien Testament. Reg. 3°. Qu’il ne sepréoccupe pas tant de l’enchaînement des idées, ce qui

est le propre de l’exégète, que de préciser la valeur desmots, les idiotismes, les règles du langage, etc. Beg. 4°.Il aura recours aux autres langues apparentées avecl’hébreu. Reg. 6°.

2° La première règle du professeur d’Écriture définitbien en quoi consiste le principal de sa tâche: «Qu’ilfasse état que son rôle est d’expliquer les divines Écrituresselon leur sens naturel et littéral, propre à confirmerla foi et les règles de la morale; et cela avec piété,science et autorité.» Rat. stud., reg. prof. S. S. l a;cf. et 3° m. C’est la loi du sens littéral en vue de lathéologie et de la prédication. Il n’en appellera aux textesprimitifs et aux versions antiques que lorsqu’il y a vraimentprolt à le faire. Reg. 4°. Quand les Pères et lesDocteurs sont unanimes, «surtout quand ils parlent entermes exprès, qu’ils traitent ex professo de questionsscripturaires ou dogmatiques, le professeur d’ÉcritureSainte ne s’écartera pas de leur sentiment. Si les Pèresne sont pas d’accord, entre leurs diverses interprétations,on préférera celle qui depuis de longues annéesparait rallier l’ensemble des docteurs et la faveur del’Église.» Reg. 7° et 8°. L’interprétation traditionnelleest tantôt la règle de notre foi et tantôt une lumièrepurement directive selon les conditions diverses où ellese présente à nous. Cette loi, bien comprise, n’est pasun obstacle au progrès véritable des études bibliques.L’histoire est là pour en témoigner. — Le professeur nes’égarera pas dans les fantaisies rabbiniques, dans desquestions infinies de géographie et d’histoire, dans l’énumérationdes sens mystiques, comme aussi dans les controversesthéologiques. De tout cela il ne retiendra, avecsobriété, que ce qui lui paraîtra vraiment utile. Reg. 9 a,10°, 14°, 15°, 16°. Qu’il ne s’attache pas avec une foi aveugleà la vocalisation massorétique; il en fera, à propos,la critique au moyen de la Vulgate, des Septante et desanciens interprètes. Reg. Il». — Il évitera de traiter lesquestions qui sont de son domaine d’après la méthodescolastique. Rat. stud., reg. prof. S. S. 13°.

IV. DISTRIBUTION DES MATIÈRES ET DURÉE DEScours. — 1° Tous les théologiens, à l’exception de ceuxqui seraient sans aptitude aucune pour cette langue,suivront le cours d’hébreu pendant un an. Rat. stud.,reg. prov. 8°. Pratiquement cet enseignement se donneaux théologiens de première année. Une académiepermet, à ceux qui ont le talent et le goût, de poursuivrecette étude. Rat. stud., reg. prov. 8°, et reg.rect. 7*.

2° Tous les théologiens doivent fréquenter le coursd’Écriture Sainte pendant deux ans; ils auront chaquejour une classe d’une heure. Rat. stud., reg. prov. 6°.Cf. Congr. gen. VII, decr. xxxiii, n° 7. Ce qui se faitpendant la troisième et la quatrième année de théologie.Il y aura de plus une répétition par semaine, et de tempsà autre des exercices plus solennels, soit en classe, soitau réfectoire par manière de lecture publique. Rat.stud., reg. prof. S. S. 19°, 20°. Au début de chaque annéeon expliquera une partie de l’introduction généraleavec les règles d’herméneutique. Le reste du tempssera consacré à l’exposition continue d’un ou de plusieurslivres de la Bible, mais en alternant, de façonqu’une année ce texte d’explication soit pris de l’AncienTestament et l’année suivante du Nouveau. Rat.stud., reg. prof. S. S. 12°, 17°, 18°.

3° Le temps consacré à l’exégèse pourra paraître tropcourt; mais il faut savoir qu’après la théologie on donneà ceux qui sont destinés à la prédication ou au haut enseignementdeux années de travail privé, spécialementconsacré à l’étude de l’hébreu, de l’Écriture et des Pères.Rat. stud., reg. prov. 8° et 10°. De plus, «tous doiventassister à la leçon d’Écriture Sainte, quand il s’en faitdans notre église.» Reg. com. 2°. Voir ConstitutionesSocietatis Jesu, latine et hispanice, dernière édit.,Madrid, 1892; Ratio atque inslilulio studiorum Socief dM5 "" JÉSUITES (TRAVAUX DES) SUR LES SAINTES ECRITURES IMG

latis Jesu,; dem. édit., Tours, 1876; Décréta congregationumgeneralium, édit. d’Avignon, 1830.

III. Vue d’ensemble sur les pbikcipaux ouvrages- -Enréunissant dans une même collection les meilleurstravaux publiés par les Jésuites, on obtiendrait unesorte de Bibliotheca biblica où les diverses branchesde la science biblique seraient, ce semble, avantageusementreprésentées. Au reste, c’est ce qui est déjàen partie réalisé dans le Scripturse Sacrse cursus completus,Migne, Paris, 1837-1840. On y voit figurer les ouvragesde vingt jésuites. Nous donnons ici la liste destraités ou commentaires, qui pourraient entrer danscette bibliothèque. Ceux que l’abbé Migne a rééditéssont suivis des initiales SSC, avec le chiffre du volume.D’ordinaire nous ne citerons que l’édition princeps. Il aparu meilleur de conserver aux auteurs le nom latin,sous lequel ils sont plus connus. Il va sans dire que cestravaux, pour être rangés ici sur un même plan, n’ontpas tous une égale valeur. On peut voir comment ils sontrespectivement appréciés dans R. Simon, Hist. crit. descommentât, du Nouv. Test., Paris, 1693; L. Dupin, Bibliothèqueuniverselle des auteurs ecclésiastiques, Paris,1686-1704; D. Calmet, Dict. hist.- crxt. chronol. géogr.et littéral de la Bible, Paris, 1730; Le Long-Masch, Bibliothecasacra, Paris, 1778-1790, et dans le présent Dictionnairede la Bible; comme aussi dans les diversesintroductions historiques, par exemple celle du P. RodolpheCornely, Historica et cntica Introductio in U. T.libros sacros, t. i, p. 674-702, Paris, 1885.

I. TRAITÉS D’INTRODUCTION À L’ÉTUDE DE L’ÉCRITURE.

— 1° Histoire des textes et règles d’herméneutique:A. Salmeron, Commentarii in historiam evangelicam,t. i, Prolegomena, Madrid, 1598; Nie. Serarii Prolegomenaoiblica, Mayence, 1612; J. Bonfrerius, Prseloquiain Scripturam sacram, Anvers, 1625, SSC. t. I;H. Goldhagen, Introductio in sacr. Script, utriusqueTestamenti, Mayence, 1765.

2° Sur l’autorité de la Vulgate: Bellarminus, De edvtionelatina Vulgata; quo sensu a concilio Tridentinidefinitum sit, ut ea pro authentica habeatur, Wurzbourg,1749, édit»; par le P. Widenhofer; en 1753, leP. Frévier répond à cette publication par une brochure:La Vulgate authentique dans tout son texte, plus authentiqueque le texte hébreu, que le texte grec quinous restent, Rouen. On trouve dans les Mémoires deTrévoux (1753) plusieurs répliques à cette brochure;elles peuvent être du P. Berthier. La même année, leP. Casini publie De sanctis libris Vulgatse editionisSixti V et Clementis VIII. PM. auctoritate recognitis.Mais la dissertation qui est restée classique en la matièreest celle de Mariana, Pro editione Vulgata, Cologne,1609, SSC. t. i. En outre, Bellarmin, De verbo Deïliber II, c. x, passe en revue les principaux passagesde la Vulgate incriminés par les protestants. Zillich(† 1758), Concordia Vulgatse cuni hebr. textu, Wurzbourg,_1756.

Édition et critique des textes.

Herm. Goldhagen,

Nov. Test, grsece, Mayence, 1753; Alter, Nov. Testant,ad cod. Vindob. grrnce, Vienne, 1787. Voir dansce dictionnaire, t. i, col. 422, ses remarquables travauxde critique. On sait que Jean de Harlem († 1578), trèsversé dans le grec, le syriaque et le chaldéen, a beaucoupaidé Arias Montanus pour l’exécution de la Polyglotted’Anvers (1569-1572).

Traductions en langues vulgaires.

Le P. Bouhours,

aidé des PP. Besnier et Le Tellier, a donnéune traduction française, Le N. T. traduit en françaisselon la Vulgate, Paris, 1698-1703; Ign. Weitenauer,traduction allemande avant 1783; peu après Mutschelle(† 1800) en donne une autre dans la même langue;Kaldi († 1634), traduction hongroise; Steyer († 1692),traduction en bohémien; Louis de Azevedo ([ 1634) atraduit le N. T. en langue amharique.

Grammaires et lexiques.

Bellarminus, Institution

nés linguse hebraiese, Rome, 1578; Nie. Abram, Epitomerudimentorum linguse hebraiese versibus latinis breviteret dilucide comprehensa, Paris, 1645; Fr. Haselbauer,Lexicon hebr. chald., Prague, 1743; Ferd. Reisner(† 1789), Lexicon eruditionis hebraiese, etc., Augsbourg,1777; Didac. Quadros, Enchiridion seu manuale hebr.,ad usum seminarii Matritensis, Rome, 1733; Ign. Weitenauer,Hierolexicon hnguar. orient, hebr. chald et syr.,Augsbourg, 1759; Id., Lexicon biblicumin quo explicanturVulgatse vocabula et phrases, Augsbourg, 1758, etde nombreuses éditions postérieures; Lud. Ballester,Onomatographia swe descriptio nominum varii et peregriniidiomatis, quæ alicubi in latma Vulgata edit.occurrunt, Lyon, 1617.

Concordances.

a) Concordances réelles: Ant. de

Balinghem, Sacra scriptura in locos communes morumet exemplorum novo ordine distributa, Douai, 1621, etplusieurs fois rééditée; Petrus Eulard, Bibliorumsacrorum concordantiae morales et historiese, Anvers,1625. — b) Concordances verbales: H. de Raze, Ed. deLachaud et J -B. Flandrin, Concordanliarum S. Scriptursemanuale, Lyon, 1852, et souvent rééditée; toutrécemment, H. Peultier, Etienne, Gantois, Concordan-Uarumuniversse Scripturse Sacrse thésaurus, Paris,1897. Toutes ces concordances, si l’on en excepte la dernière,sont plutôt faites à l’usage des prédicateurs.

n. commentaires sur l’écriture. — 1° Commentairescomplets sur l’Ancien et le Nouveau Testament.

— Cornélius a Lapide († 1637) a commente toute l’Écriture,à l’exception de Job et des Psaumes. L’édition’princepsest celle d’Anvers, [1614-1645; elle a été suivie devingt autres. Dans ces éditions postérieures on reçoit d’ordinairepour Job le commentaire de Pineda ou celui deCorderius; pour les Psaumes, le commentaire de Bellarminou celui de Le Blanc. Après Cornélius à Lapidec’est à Serarius, Sanctius et Lorin que nous devonspeut-être le plus grand nombre de commentaires. —Les scoliastes se sont bornés à des explications brèveset précises sur le texte biblique. Ce sont: EmmanuelSa († 1596), Jean Mariana († 1621), Jacques Gordon(† 1641), Etienne Ménochius († 1655) et Jacques Tirin(† 1636). On sait que les notes de ces scoliastes ontdéfrayé bon nombre des éditions modernes destinées auxfidèles cultivés.

Commentaires sur des livres particuliers.


i. Pentateuque, a) Commentaires d’ensemble: Cornéliusa Lapide, In Pentateuchum, Anvers, 1616, SSC.t. v, vi, vii; Jacobus Bonfrerius, In Pentaleuchum,ers,

1625. — 6) Commentaires particuliers: Bened. Pererius,Commentariorum et disputationum m Genesim,tomi quatuor, Rome, 1589-1598; Sebast. Barradas,Itinerarium filiorum Israël, Anvers, 1612; Joannes Lo-,rinus, Comment, in Levit., Num. et Deuteron., Lyon,1619, 1662, 1625.’— 2. Josue: Nicol. Serarius, Josueab utero ad usque tumulum hbns quinque explanalus,Mayence, 1609, 1610. — 3. Juges et Buth: Nicol. Serarius,Judices et Ruth explanati, Mayence, 1609, oumieux encore Jacob. Bonfrerius, Josue, Judices etRuth, Paris, 1631, SSC. t. viii; Caspar Sanctius, In libr.Ruth commentarius, cum duplice appendice, Lyon,1628. — 4. Rois: Casp. Sanctius, Comment, et paraphr.in libros Regum, Lyon. 1623, SSC. t. ix, x, xi. — 5.Paralipomènes:Nie. Serarius, 1613; Casp. Sanctius, 1624;Jac. Bonfrerius, 1643. — 6. Esdras: Casp. Sanctius,Comment, in libros Ruth, Esdrse et Nehemise, Lyon,1628. — 7. Tobie: Jacob. Tirinus, In Tobiam commentarius,cum translatione ex grseco, Anvers, 1632, SSC.t. xii. — 8.Esther: Steph. Ménochius, In librwmEsthercommentarius, Cologne, 1630, SSC.t. xiii. — 9. Judith:Nie. Serarius, In hbrum Judith commentarius cumtranslatione ex grseco, Mayence, 1599, SSC. t. xii. —10. Job: Bal th. Corderius, In libi Job comment-, 1417 JÉSUITES (TRAVAUX DES) SUR LES SAINTES ÉCRITURES 1418

Anvers, 1646, SSC. t. xiii, xiv; Joan. de Pineda, CommentarioruminJob UbriXIII, Madrid, 1597. — 11. Psaumes:Thom. Le Blanc, Analysis Psalmorum davidicorum,Lyon, 1665-1677; Rob. Bellarminus, In Psalmoscomment., Rome, 1611; et par la suite plus de trenteéditions; Berthier, Les Psaumes traduits en françaisavec des notes et des réflexions, Paris, 1775. SSC. t. xiv,xv et xvi contiennent des extraits considérables de Bellarminet de Berthier. — 12. Proverbes: Corn, a Lapide,In Proverbia Salomonis prolegom., Anvers, SSC. t. xvi;Ferd. Quir. de Salazar, Proverbia Salomonis, Paris,1619, 1621. — 13. Ecclésiaste: Joan. de Pineda, Commentantin Ecclesiastem, Séville, 1619. — 14. Cantique:Corn, a Lapide, Compendium sive synopsis sensuslitteraliset genuini Cantici canticorum, Anvers, 1638, SSC.t. xvii. — ib.Sagesse: Jac. Lorinus, Comment, m Sapientiam,Lyon, 1607. — 16. Ecclésiastique: Em. Sa, In Ecclesiasticumcommentarius, Anvers, 1598, SSC. t. xvii. —17. Sur les quatre grands Prophètes: Casp. Sanctius;Lyon, 1612-1621; Hier. Pradus et J. B. Villalpandus, InEzechielem et templum ab eo descriplum, Rome, 15961604; Bened. Pererius, In Damelem, Rome, 1587;Didac. de Celada, In Susannam daniehcam cum appendicede Maria Virgine in Susanna figurata, Lyon,1656. — 18. Sur les xii petits Prophètes: Franc. Ribera’,Comment, in Prophelas minores et Baruch, Lyon,1621. — 19. Machabées: Cornel. a Lapide, In libr.Machabseorum comment., Anvers, 1645, SSC. t. XX. —"20. Evangiles: Joan. Maldonat, In quatuor Evangeliacommentarius, édition princeps, par les soins de Frontondu Duc, Pont-à-Mousson, 1596; dernières éditions:Mayence, 1874 + et Barcelone, 1882. Entre ces deux termes,plus de vingt autres éditions, mais dans celles postérieuresà 1607 on a substitué le texte corrigé de laVulgate clémentine, d’où il résulte que parfois le commentairen’est pas en harmonie avec le texte; SSC.t. xxi. Alph. Salmeronis, Commentani in Evangelic.histor., vol. H-x, Madrid, 1598-1602, et Cologne, 1602,1612-1615; Franc. Toletus, In Joannis Evangehum,Rome, 1588; In xii priora capila Lucse, Rome, 1600. —21.’Actes des Apôtres: Joan. Lorinus, In Actus apostolorum,Lyon, 1605; Casp. Sanctius, Comment, in Actus;<iccessit disputalio de S. Jacobi itemque Pétri et Pauhin Hispamam adventu, Lyon, 1616. — 22. Saint Paul:Bened. Justiniani, In omnes B. Pauli epistolas, Lyon,1612; Corn, a Lapide, In omnes D. Pauli epistolas,Anvers, 1614; Franc. Toletus, In epislol. ad Romanos,Rome, 1602; Franc. Ribera, In Epist. ad Hebreeos, Salamanque,1598. — 23. Épîtres catholiques: Nicol. Serarius,In Epist. cathol. commentarius, Mayence, 1612; Joan.Lorinus, In Epist. cath. Joannis et Pétri, Lyon, 1609,1619. — 24. Apocalypse: Ludov. de Alcazar, Vesligatioarcani sensus in Apocalypsi; cum opusculo de sacns,pondenbus et mensuris, Anvers, 1614-1619; il y joignitle commentaire des passages parallèles: Job,xxviii-xl; Ezech., i, x, xxxviii-xl; Dan., vu-xi, Joèt, m;Habac, m; Zach.. i-vii: Ineas Veteris Test, partes quasrespicit Apocalypsis libri quinque cum opusculis demalis medicis, Lyon, 1631; Franc. Ribera, In Apocalypsim,avec un appendice de cinq livres De iis quee «d Templum pertinent, Lyon, 1593.

Au xvine siècle, plusieurs jésuites italiens ont publiéleurs Leçons d’Écriture Sainte. Ce sont Zucconi f 1720,Guicciardi f 1739, Calino f 1749, Rossi f 1760, Peverellif 17t >6, Granelli f 1778, Nicolai f 1784, Mantovanif 1785; et, plus près de nous, Finetti-j-1842, Parisii-1859, Curci f 1891.

III. THÉOLOGIE SCMPTVRAIRE, HISTOIRE SACRÉE, APO-ZOGÉTIQUE,ARCHÉOLOGIE BIBLIQUE. — 1° Théologie. —Henric. Marcellius, Theologia Scripturse divines,Bruxelles, 1658, SSC. t.i; Martin. Becanus, Analogia Veteriset Novi Testamenti, Mayence, 1620, SSC. t.n; Jos.Acosta, De Christo in Scnpturis revelato libri novem,

Rome, 1590, SSC. t.n; Lud. BallesteT, Hierologia, sivedesacro sermone, continens summam alque compendiumpositivas theologise; fere omnia quæ in sacra scripturatractantur attingens; innumera ejus loca lingueshebraicee præsidio explicans, Lyon, 1617; Kilber, Analysisbiblica, Heidelberg, 1773-1779, et nouvelle éditionParis, 1856, dans laquelle le P. Tailhan a ajouté auxprophéties messianiques de l’Ancien Testament de nombreusesréférences patrologiques.

Vies de Jésus-Christ.

Dans ce genre de littérature

sacrée, divers essais ont été tentés par: Montereul(j- 1646), La vie du Sauveur du monde Jésus-Christ;Georges Heser († 1686), Vilse D. N. J. Christi monotessaronevangelicum; Guérin († 1736), Le texte desquatre évangélistes réduit en un corps d’histoire; Chr.Ries († 1822), Vita Dei hominis J. Christi; le P. deLigny († 1789), dont l’Histoire de la vie de N.-S. Jésus-Christ,Avignon, 1774, est de tous les ouvrages de cegenre celui qui a eu le plus de succès; le P. HenryColeridge, La Vie de notre vie, The Life of our life,traduit de l’anglais par le P. Jos. Petit, S. J., et l’abbéPh. Mazoyer, 19 in-12, Paris, 1888-1899.

Histoire sacrée.

Is. Jos. Berruyer, Histoire du

peuple de Dieu depuis son origine jusqu’à la venue duMessie, etc., Paris, 17L8; Histoire du peuple de Dieudepuis la naissance du Messie jusqu’à la fin de la synagogue,Paris, 1753; Histoire du peuple de Dieu, troisièmepartie, ou Paraphrase des Épîtres des Apôtres d’aprèsle commentaire latin du P. Hardouin. Sur l’histoire etla valeur de ces ouvrages, voir Berruyer, 1. 1, col. 1628.Plusieurs des dissertations du P. Tournemine († 1739)se réfèrent à ce même sujet, qui a d’ailleurs sollicité laplume d’un grand nombre d’autres. Les meilleurs travauxsont par ordre de dates: Philippi († 1636), Desacra chronologia; Salianus († 1640), Annales historiéssacrée; Joan. Rho ({- 1662), Hommes illustres VeterisTestamenti; Mascarell (-j- 1730), De chron. sacra; Mahy(fl744), Histoire du peuple hébreu; Steinhart († 1743),Historia sacra; Szdellar († 1745), De chronologia V. T.;Kwiatkowski († 1747), Historia Vet. et Nov. Testamenti;Calino (-(-1749), Historia et chronol. V. T.; Jos.Reeve († 1820), History of holy Bible; Finetti († 1842),Storia del Testant, antico; Secco († 1874), Storia delAnticoeNovo Testamento; Rrunengo (-j- 1891), L’imperodi Babiloniae di Ninive secondo% monumenti cuneiformicomparali colla Bibbia, Prato, 1885.

Apologétique.

Didac. Quadros, Palsestra biblica,

Madrid, 1723-1731; Fr. Xav. Widenhofer, Sacres Scriptursedogmatice et polemice exphcatse, Wurzbourg, 1749;Kraus († 1772), Verbum Dei scriptum ab apparentibuscontradictionibus defensum; Herm. Goldhagen, Vindiciesharmonicee, criticse et exegelicse in Sacras Scripturasutriusque Testamenti, Mayence, 1774-1775; Veith,Scriptura sacra contra incredulos propugnata, Augsbourg,1780-1797, SSC. t. lv; Erasm. Froehch, Annalesregum et rerum Synes, Vienne, 1744; De fontibushistoriée Syriee in Ixbris Machab., Vienne, 1746.

Archéologie.

Nie. Abram, Pharus Veteris Testamenti,

Paris, 1648; Athan. Kircher, Arca Noe, Amsterdam,1675; Turris Babel, Amsterdam, 1679; Se.Sgambata († 1652), Archiv. Veteris Testamenti; Gasp.Hartzheim; Explicatio fabularum et superstitionum,quarum mentio m sacra Scriptura, Cologne, 1724;flerm. Goldhagen, Meletema biblico-philologicum dereligions Hebreeorum, Mayence, 1759.

Dans l’énumération qui précède, on n’a guère tenucompte que des auteurs qui ont écrit, avant la suppressionde la Compagnie vers la fin du xviiie siècle (1773).Quand elle revint à la vie, après la tourmente révolutionnaire(1814), les circonstances l’obligèrent à s’attacheravant tout à l’éducation de la jeunesse et à laprédication, afin de réparer plus rapidement les ruinesaccumulées par trente ans d’impiété. Les études exégë1419 JÉSUITES (TRAVAUX DES) SUR LES SAINTES ÉCRITURES 1420

tiques ont forcément souffert de cette situation. Parmiles jésuites qui ont le plus contribué à leur relèvementau cours du xixe siècle, il est juste de mettre au premierrang le P. Fr. Xavier Patrizi (1797-1881) et le P. JosephCorlny (1834-1896). Le premier a publié un assez grandnombre de monographies, mais ses deux ouvrages principaux,et qui resteront, sont: 1° Institutio deinterpretationeScripturarum sacrarum libri duo, premièreédit., Rome, 1844, et dernière édition, Rome, 1876; 2° DeEvangeliis libri très, Fribourg-en-Brisgau, 1852, 1853;excellent travail de critique textuelle, où l’on trouve denombreuses dissertations d’une exceptionnelle valeurtant pour l’exégèse que pour l’apologie du NouveauTestament. Le P. Corluy, en outre des articles parusdans diverses revues, a publié: 1° Spicvlegium dogmatwo-biblicumseu Conwientarius in selecta S. S. locaquss ad demonstranda dogmata adhiberi soient, ^ in-8°,Gand, 1884-1885; 2° Commentarius in EvangeliumS. Joannis, in-8°, Gand, 1878; 2e édit., 1880. — Bien quenous nous soyons fait une loi de ne pas nousoccuper ici des auteurs encore vivants, cet article doitfaire au moins mention de l’œuvre considérable entrepriserécemment par quelques Pères de la compagniede Jésus, pour donner en latin aux catholiques de touspays un cours complet d’Écriture Sainte: Introduction,commentaires, concordances et dictionnaires, CursusScripturse Sacrss auctoribus R.Comely, J. Knabenbauer,Fr. de Hummelauer, aliisque Soc. Jesu presbyleris,Paris, 1885. L’œuvre est encore en cours de publication.h’Introduction du P. Cornely, qui remplit les troispremiers volumes de la collection, a déjà conquis unegrande autorité. Le succès, dont elle jouit dans les écoles,en témoigne suffisamment. — Les jésuites, qui dirigentl’Université Saint-Joseph à Beyrouth (Syrie), ont publiéet exécuté sur leurs propres presses une nouvelle traductionarabe de la Sainte Écriture (1876).

IV. Liste chronologique des auteurs jésuites quiont; écrit sur les choses bibliques. — L’année indiquéeest celle de leur mort. On trouvera sur chacund’eux une notice biographique et bibliographique tantdans ce dictionnaire que dans la Bibliothèque des écrivainsde la compagnie de Jésus, par les PP. de Backeret Sommervogel (1890-1900); ou encore dans le P. Hurter,S. J.: Nomenclator hterarius recenlioris théologiescatholicte; 2e édit., 4 in-12, Inspruck, 1892-1899.

XVI’siècle. — Joannes Harlemius (de Harlem), batav.,1578. Hieronymus Natalis, hisp., 1580. Joannes Covillonius,gai., 1581. Joannes Maldonatus, hisp., 1583. AlphonsusSalmeron, hisp., 1585. Franciscus Ribera, hisp., 1591.Hieronjmus Pradus, hisp., 1595. Joannes Ferdinandus,hisp., 1595. Emmanuel Sa, lusit., 1596. Franciscus Toletus,hisp., 1596. Blasius Viegas, hisp., 1599. JosephusAcosta, hisp., 1599.

xvii’siècle. — J. Bapt. Villalpandus, hisp., 1608.Mart. Antonius Delrio, belg., 1608. Nicolaus Serarius,germ., 1609. Benedictus Pererius, hisp., 1610. Ludovicusde Alcazar, hisp., 1613. Joannes Hajus, belg., 1614.Vincentius Regius, sicut., 1614. Christophus de Castro,hisp. 1615. Sebastianus Barradas, lusit., 1615. ArnoldusCatheus, batav., 1620.Joannes Freyre, lusit., 1620. RobertusBellarminus, ital., 1621. Benedictus Justiniani, ital.,1622. Augustinus de Quiros, hisp., 1622. Didacus Daza,hisp., 1623. Martinus Becanus, belg., 1624. JoannesMariana, hisp., 1624. Ludovicus Ballester, hisp., 1624.Ludovicus de Ponte, hisp., 1624. Cosmas Magalianus,lusit., 1624. Franciscus de Mendoza, lusit., 1626. CasparSanctius (Sanchez), hisp., 1628. Hieronymus Sopranis,ital., 1629. Octavianus de Tufo, ital., 1629. BenedictusFernandius, lusit., 1630. Antonius Ballinghem, belg.,1630. Petrus Lanselius, belg., 1632. Joannes Lorinus,gall., 1634. Georgius Kaldi, hung., 1634. Ludovicus deAzevedo, lusit., 1634. Adamus. Contzen, germ., 1635.Jacobus Tirinus, belg., 1636. Thomas Massutius, ital.,

1636. Henricus Philippi, germ., 1636. Petrus Eulard,belg., 1636. Franciscus Pavone, ital., 1637. Cornélius aLapide, belg., 1637. Joannes de Pineda, hisp., 1637.Jacobus Salianus, gall., 1640. Jacobus Gordon, scot.,1641. Jacobus Bonfrerius, belg., 1642. Joannes Tollenær,belg., 1643. Joannes Phelippæus, belg., 1643. GabrielAlvarez, hisp., 1645. Paulus Sherlock, hibern., 1646.Ferd. Quir. de Salazar, hisp., 1646. Nicolaus Lombard,gall., 1646. Bernardinus Montereul, gall. 1646. Didacusde Bæza, hisp., 1647. Alexander Pellegrinus. ital.,1617. Petrus Maucorps, gall., 1649. Salvator de Léon,hisp., 1649. Hieronymus Guevara, hisp., 1649. Balthasar,Corderius, belg., 1650. Adrianus Crommius, belg., 1651.Joannes Robertus, belg., 1651. Nicolaus Caussin, gall.,1651. Joannes Burghesius (Bourgeois), belg., 1653. LucasVellosus, lusit., 1653. Andréas Pintus Ramirez, lusit.,1654. Olivarius Bonartius, belg., 1654. Scipio Sgambata,ital., 1655. Philippus Massaria, sicut., 1655. Stephanus.Menochius, ital., 1655. Nicolaus Abram, gall., 1655.Rudolphus a Corduba, hisp., 1655. Fabricius Britius,ital., 1656. Jo. Bapt. Uwens, belg., 1657. Joannes dePifia, hisp., 1657. Joannes Eusebius Nieremberg, hisp.,1658. Lucas de Arcones, hisp., 1658. Gregorius Ferrari,ital., 1659. Alphonsus Flores, hisp., 1660. Didacus deCelada, hisp., 1661. Petrus Gorse, gall., 1661. Joannes.Rho, ital., 1662. Henricus Marcellius, belg., 1664.Joannes Besson, gall., 1665. Albinianus de Rajos, hisp., .1667. Petrus Alois, ital., 1667. Joan. Erard. Fullonius,belg., 1668. Ignatius Zuleta, hisp., 1668. Thomas LeBlanc, hisp., 1669. Antonius Velasquez, hisp., 1669. Antoniusde Escobar y Mendoza, hisp., 1669. Franc. Zidronde Azevedo, ital., 1670. Georgius Mentzius, germ., 1672.Jacobus Lobbetius, gall., 1672. Ludovicus Janinus, gall., .1672. Petrus des Champsneufs, gall., 1675. HenricusMayer, germ., 1675. Henricus Kircher, germ., 1675.Franciscus Basellus, ital., 1678. Jacobus de Montefrio,ital., 1678. Athanasius Kircher, germ., 1680. EmmanuelNaxera, hisp. 1680. Josephus de Ormaza, hisp., 1680.Franciscus Vavasseur, gall., 1681. Joannes Bissel, germ.,1682. Petrus Oliva (Olivier), gall., 1684. Franciscus Duneau,gall., 1684. Josephus de Tamayo, hisp., 1685.Andréas Gérard, gall., 1686. Georgius Heser, germ., 1686.Nicolaus Talon, gall., 1691. Mathias Steyer, bohem., 1692.xviw siècle. — Domimcus Bouhours, gall., 1702.Caspar Kuemmet, germ., 1706. Ludovicus Alvarez, lus.,1709. Hieronymus Ragusa, sicut, , 1715. Guido Scheffer,bohem., 1717. Ferdinandus Zucconi, ital., 1720. JacobusAyroli, ital., 1721. Martinus Brictius, pol., 1727. StephanusThiroux, gall., 1727. Car. Joannes de Lattaignant,gall., 1728. Vincentius Mascarell, hisp., 1730. ChristophorusBerlanga, hisp., 1731. Christophorus Grangel,hisp., 1732. Nicolaus Guerin, gall., 1736. Jos. Renatus.Tournemine, gall., 1739. Antonius Guicciardi, ital., 1739.Michæl Languedoc, gall., 1742. Joannes Seidel, germ.,1742. Stephanus Souciet, gall., 1744. Franciscus Sydellar,croat., 1745. Didacus Quadros, hisp., 1746. FranciscusSteinhart, germ., 1746. Petrus Kwialkewski, pol.,1747. Laurentius Thekal. bohem., 1748. Antonius Remy,belg., 1748. Csesar Calino, ital., 1749. Jacobus Pires,belg., 1750. Anna-Jos. Neuville, gall., 1750. GasparHartzheim, germ., 1750. Franciscus Oudin, gall., 1752.Andréas Patrono, ital., 1752. Ludovicus Eschborn,germ., 1753. Antonius Casini, ital., 1755. FranciscusHaselbauer, bohem., 1756. Jacobus Gremner, germ.,1757. Nicolaus Zillich, germ., 1758. Erasmus Frœlich,germ., 1758. Isaac Jos. Berruyer, gall., 1758. Franc.Xav. Widenhofer, germ., 1759. Quiricus Rossi, ital.,1760. Antonius Pluche, gall., 1761. Petrus Curti, ital.,1762. Franciscus Zeleny, mor., 1765. Barthol. Peverelli,ital., 1766. Josephus Conradi, bohem., 1767. LeopoldMauschberger, germ., 1767. Matthias Purulich, croat.,1768. Jacobus Maciejowski, germ., 1769. Martinus Kurzeniecki,pol., 1769. Joannes Granelli, ital., 1770. Cara1421

    1. JÉSUITES##

JÉSUITES (TRAVAUX DES) — JÉSUS-CHRIST

"U22

lus Jos. Frévier, gall., 1770. Josephus Khell, germ.,1772. Wenceslaus Kraus, mor., 1772. Ignatius Schunk,bav., 1773. Joannes Slesina, ilal., 1775. Petrus Azzoni,pohem., 1777. Benedictus Beeckmans, belg., 1780. IgnatiusKreussler, germ., 1780. Guil. Franc. Berthier, gall.,1782. Henricus Kilber, germ., 1783. IgnatiusWeitenauer,bav., 1783. Thomas Holtzclau, germ., 1783. AlphonsusNicolai, ital., 1784. Petrus Janowka, bohem, 1784.Antonlus Vogt, germ., 1784. Paulus Mantovani, ital.,1785. Leopold Tirsch, bohem., 1788, Jos. Julian. Monsperger,germ., (peu après 1788). Ferdinandus Reisner,bav., 1789. Franciscus de Ligny, gall., 1789. AndréasFriz, germ., 1790. Joan. Nepom. Schæffer, germ., 1790.Petrus Guerin du Rocher, gall., 1792. Joannes Jung,germ., 1793. Herman Goldhagen, germ., 1794. IgnatiusNeubauer, bav., 1795. Laurentius Veith, bav., 1796.Aloysius Keller, helv., 1796. Emmanuel de Azevedo,lus., 1796. Franciscus Cabrera, hisp., 1799. SebastianusMutschelle, bav., 1800.

Hl! siècle. — Josephus Weissenbach, helv., 1801.Franc. Car. Alter, germ., 1804. Eriprand. Giulari, ital.,1805. Xaverius Bettinelh, ital., 1808. Matthias Engstler,germ., 1811. Josephus Reeve, angl., 1820. Petrus Jos.Picot de Clorivière, gall., 1820. Christianus Ries, germ.,1822. Franc, de Paula Schrank, bav., 1835. FranciscusFinetti, ital., 1842. Rosarius Pari, sicut., 1859. Joan.Bapt. Pianciani, ital., 1862. Henricus Roux de Raze,gall., 1863, Geminianus Mislei, ital., 1867. AlexanderBourquenoud, helv., 1868. Franc. Xaverius Patrizi, ital.,1881. Régis Champon, gall., 1883. Xaverius Pailloux,gall, , 1887. Josephus Brunengo, ital., 1891. Carolus MariaCurci, ital., 1891. Henricus Coleridge, angl., 1893.Josephus Corluy, belg., 1896. A. Durand.

    1. JESURUN##

JESURUN (hébreu: YeSurûn; Septante: fiyamuxlvoç;Vulgate: dilectus, rectissimus), nom donné à Israël. Cemot ne se lit que quatre fois dans la Bible hébraïqueet toujours dans des morceaux poétiques. Deut., xxxii,15; xxxiii, 5, 26; Is., xuv, 2. Il est formé de yasar,a le juste,» comme Zebûlùn de zdbal, «habiter,» etYedutûn (Idithun), «louant,» de yâdâh, «louer.» W. Stærk, Studien zur Religionsund Sprachgeschichtedes alten Testaments, 2 in-8°, Berlin, 1899, Heft ii,p. 74. Les opinions sont d’ailleurs très partagées sur lamanière dont il faut expliquer et interpréter ce mot.D’après la plupart des hébraïsants modernes, c’est undiminutif (’lirpa^îffxoi; a traduit le Codex Grmcus Venelus) comme qui dirait, justulus, rectulus, et il faut} voir un terme de tendresse, signifiant «mon cherpetit peuple». La Vulgate semble l’avoir compris dansce sens, en rendant Yesûrûn par dilectus, dans le Deutéronome.Elle n’a fait d’ailleurs que suivre les Septantequi ont traduit partout: faanr l ii.ivoi. Cf. Gesenius,Thésaurus, p. 642. De quelque manière qu’on. l’explique,quoique quelques exégètes aient cru que yeëûrûn estune altération du mot Israël, la dérivation de ydsdr nepeut être sérieusement contestée. Voir J, Knabenbauer.Comment, in ls., 1887, t. ii, p. 146; Fr. de Hummelauer,Deuleron., 1901, p. 522; D. B. Duhm, Das Buch Jesua,in-8 «, Gœttingue, 1892, p. 304. F. Vigouroux.

    1. JÉSUS##

JÉSUS, nom de Notre-Seigneur Jésus-Christ et deplusieurs Israélites, dont le nom en hébreu ne diffèrepas de ceux que la Vulgale a appelés Jésua, Jésué,Josué. Voir ces noms. Le nom d’Isaie renferme lesdeux mêmes éléments composants que le nom hébreucomplet: Yehô ou Ydhû et le verbe yâsa’, «sauver,» mais placés dans l’ordre inverse. Voir Isaïe, col. 941.

1. JÉSUS, forme du nom de Josué, fils de Nun, dansplusieurs passages de la Vulgate. Eccli., xlvi, 1; I Mach.,H, 55; II Mach., xii, 15; Act., vil, 15; Heb., iv, 8; Jud.,ꝟ. 5. Voir Josué, 1.

2. JÉSUS FILS DE SIRACH flrjffo-j;-j’to; Seipdtx),auteur de l’Ecclésiastique, comme cous l’apprend leprologue du livre et l, 27; li, 1. Il était de Jérusalem.Eccli., L, 27. On a supposé qu’il était prêtre, d’aprèsEccli., vil, 31-33; l, 1-23, ou médecin, à cause de cequ’il dit de la médecine, Eccli., vi, 16; x, 11-12; xviii, 20;xxxvin, 1-15.; xlhi, 24, mais ce sont des hypothèsesdouteuses. Voir Ecclésiastique, t. ii, col. 1544. Le livre del’Ecclésiastique est appelé par les Pères grecs la Sagessede Jésus fils de Sirach, ou plus brièvement la Sagessede Sirach, du nom de son auteur. Voir t. ii, col. 1543.

3. JÉSUS FILS DE SIRACH était aussi le nom dupetit-fils de l’auteur de l’Ecclésiastique, qui traduisitson ouvrage en grec, d’après l’auteur de la SynopsisScripturse Sacrie, qu’on trouve dans les œuvres desaint Athanase, Patr. Gr., t. xxviii, col. 376-377, maison ignore sur quoi est fondée son affirmation. VoirEcci.esiastiq.ul, VI, t. ii, col. 1547.

4. JÉSUS, grand-prêtre, fils de Josédec. Il est ainsiappelé par la Vulgate dans Eccli., xlix, 14; dans Aggée,i, 1, etc., et dans Zacharie, iii, 1, etc. Dans les deuxlivres d’Esdras, il porte le nom de Josué. Voir Josué 4.

5. JÉSUS, compagnon de saint Paul, surnommé’IoîJ<xza;, Justus, «le Juste.» Il était à Rome avec l’Apôtrequand celui-ci écrivit de Cette ville aux Colossiens, et ilest nommé parmi ceux qui envoient leurs salutationsaux fidèles de Colosses. Col., IV, 11. Voir Tillemont, Mémoirespour servira l’histoire ecclésiastique, 1701, t. i,p. 293. D’après la tradition grecque, il était un dessoixante-douze disciples, devint évêque d’Éleuthéropoliset convertit toute la population de cette ville à la foi.Voir Acta sanctorum (20 juin), junii t. iv (1707), p. 67.

    1. JÉSUS-CHRIST##

JÉSUS-CHRIST (*Iï)(roO «Xpi<rr<Sç; Vulgate: JésusChristus), le Fils de Dieu, seconde personne de la sainteTrinité, qui a pris une nature humaine pour vivre au milieudes hommes et les racheter par sa mort (fig. 265).

Division de l’article. — I. Différents noms de Jésus-Christ.— I. NOM PRINCIPAL: — l°Jésus, col. 1423.

— 2° Christ, col. 1424. — il. ses autres noms: —1° Noms dans V Ancien Testament, col. 1425. — 2° Dansle Nouveau, col. 1426.

II. La préparation a sa venue, p. 1427. — i. figures,col. 1427. — u. prophéties, col. 1429: — 1° Ordrechronologique, col. 1430. — 2° Ordre logique, col. 1431.

— 3° Leur force, col. 1434. — m. attente du messiepar les juifs, col. 1436.

III. Sa naissance, son enfance, sa vie cachée. —I. avant sa naissance: — 1° Préexistence, col. 1441.

— 2° Annonciation, coviM. — 3° Visitation, col. 1442.

— II. nativité et enfancb: — 1° Naissance, col. 1442.

— 2° Présentation au Temple, col. 1443. — d’Adorationdes Mages, col. 1443. —4° Séjour enÉgypte, col. 1443. —5° Croissance, col. 1444. — 6° Voyage à Jérusalem,col. 1444. — /II. vie cachée, col. 1445.

IV. Son ministère public, col. 1415. — i. inauguration,col. 1445. — II. en galilée, col. 1447: — 1° Premièremission, col. 1447. — 2° Seconde mission, col. 1448.

— 3° Crise messianique, col. 1450. — 4° Dernier séjouren Galilée, col. 1452. — ni. hors de Palestine, col. 1453.

— IV. À Jérusalem, col. 1455: — 1° Seconde Pâque,col. 1456. — 2° Fête des Tabernacles, col. 1457. —3° Fête de la Dédicace, col. 1459. — 4° Résurrection deLazare, col. 1459. — 5° Dernier voyage à Jérusalem,col. 1460.

V. Sa manière de vivre, col. 1461. — I. ses relations,Col. 1461 — II. SA VIE JOURNALIÈRE, Col. 1464.

VI. Sa dernière semaine.

I. dimanche des rameaux,col. 1466. —h. lundi saint, co. 1467. — m. mardi saint,

COl. 1468. — WMERCREDI SAINT, col. 1469. — V. JEUDI

    1. SAINT##

SAINT, COl. 1471. — VI. VENDREDI SAINT, COl. 1473 — VII.SAMEDI SAINT, Col. 1478.

VII. Sa vie ressuscitée.

i. jour de la résurrection,col. 1478. — II. entrb la résurrection et l’ascension,col. 1480. — /II. ASCENSION, col. 1480.

VIII. Son enseignement.

i. dogmatique. — 1° Trinité,col. 1480. — 2° Messie, col. 1481. —. 3° Royaumede Dieu, col. 1482. — 4° Vie surnaturelle, col. 1484. —5° Destinée humaine, col. 1485. — 1T. MORALE, col. 1486.

— III. SOURCES DE CET ENSEIGNEMENT, col. 1487. —

1° Écriture, col. 1487. — 2° Rien de saint Jean-Baptiste,p. 1488. — Ni des Esséniens, col. 1489. — Ni des Pharisiens,col. 1489. — 3° Tout de son Père, col.

! ERA ESMGŒSWtTVZ DMA

HESVCHRD AEAGARO REGI’EBESSj^MISSA

205. — Portrait de Notre-Seigneur soi-disant envoyé à Abgar,roi d’Edesse. Voir Abgar, t. i, col. 40. Vatican.

IV. méthode.

1° Autorité, col. 1491. — 2° Connaissancedes cœurs, col. 1492. — 3° Adaptation, col. 1492.

— 4° Paraboles, col. 1494.

IX. Sa divinité.

I. prophéties accomplies, col.1497. — 1<> Leur accomplissement non naturel, col. 1498.

— 2° Prophéties faites par Jésus-Christ, col. 1499. —11. AFFIRMATION DE JÉSUS-CHRIST, col. 1501. — /II. miracles.— 1° Variété, col. 1503. — 2° Signification, col.1504. —3° Symbolisme moral, col.1507. — îr. résurrection,COl. 1507.— V. CARACTERE DE JÉSUS-CHRIST, Col. 1510.

X. Jésus-Christ, d’après l’enseignement desApôtres. — I. vis du sauveur, col. 1512. — II. sa divinité,col. 1513. — /II. le rédempteur, col. 1513. —iv.

LB MÉDIATEUR, Col. 1514. — V. LE CHRIST ET L’ÉGLISE,COl. 1514. — VI. LE CHRIST ET LE CHRÉTIEN, Col. 1515. —VU. LE RÈGNE DE JÉSUS-CHRIST, coi. 1515.

XI. Ce que disent de Jésus-Christ les anciens historiensprofanes, col. 1516. — 1° Josèphe, — 2° Tacite, —3° Suétone, — 4° Pline, col. 1517.

XII. Bibliographie, col. 1517.,I. Ses différents noms.

I. son nom principal.

— 1° Jésus. Ce nom a en hébreu la forme Yêsûa’, abrégéede la forme primitive Yehôsûa’, «Jéhovah est le salut.» En grec, il devient "Ir)<ro3c, par l’adoucissement de la

gutturale. — Il avait été déjà porté par un assez bonnombre de personnages bibliques, dont aucun d’ailleursne le déshonora par sa conduite. Il fut, entre autres,tantôt sous sa forme complète, Exod., xvil, 9; Agg., i,1, etc., tantôt sous sa forme abrégée, II Esd., viii, 17;xii, 1, etc., le nom de Josué, fils de Nun, le conquérantde la Palestine, que les versions appellent aussiquelquefois Jésus, Eccli., xlvi, 1; I Mach., ii, 55, etc., etaussi celui du premier grand-prêtre en exercice aprèsle retour de la captivité. I Esd., ii, 2; Josèphe, Ant.jad., XI, iii, 10. Le mot YehôhYa est composé des deuxsubstantifs Yehô, abrégé de Yehôvâh, «Jéhovah,» ou «Jahvéh», et yesua’, abrégé en sûa’, «salut, s du radicalyâsa’, & sauver.» L’Ecclésiastique, xlvi, 1, 2, fait allusionà la signification de ce nom quand il dit de Josué que, «conformément à son nom, il fut grand pour le salutdes élus. «Eusèbe, Dem. ev., iv, t. xxii, col. 333, dit que’IïiuoOç veut dire Maw uwTr]0ta, c’est-à-dire ©eo0 o-wt’iip: ’a.Clément d’Alexandrie, Psedag., iii, 12, t. viii, col. 677, etS. Cyrille de Jérusalem cherchent bien à expliquer’Iïjffoûç par le verbe grec lao{i.at, «guérir», d’où l’onriç, «guérison;» mais ce dernier écrivain reconnaît que levrai sens du mot est celui de (rw-riip, «sauveur.» Catech., x,13, t. xxxiii, col. 677. — Le nom de Jésus ne fut pas donnéarbitrairement au Fils de Dieu. C’est le Père qui lechoisit et manifesta son choix par les anges envoyés àMarie, Luc, i, 31, et à Joseph, Matth., i, 21. Le secondmessager justifie même ce nom en annonçant que sasignification répond à la mission de celui qui doit leporter: aùrôç yàp tsiinti, «car celui-ci sauvera.» Jésusfut le nom personnel du Fils de Dieu incarné. Le peuplele connaissait et l’interpellait sous ce nom, Marc, x, 47;Luc, xvii, 13; xviii, 38; Joa., i, 45; xii, 21; le Sauveurrépondit lui-même: «C’est moi,» aux gardes du Templequi le cherchaient sous le nom de Jésus de Nazareth,Joa., xviii, 5-8, et ce fut celui que Pilate inscrivit officiellementsur la croix. Joa., xix, 19. Comme ce nomreprésente excellemment la personne, d’après l’ordremême de Notre-Seigneur, Matth., vii, 22; Marc, ix, 37,38; xvi, 17; Luc, ix, 49, c’est «au nom de Jésus» queles Apôtres opéraient des miracles. Act., iii, 6; iv, 30;XVI, 18. Aussi proclament-ils que tout s’incline devantce nom, Phil., ir, 9, 10, et qu’il est, selon sa signification,le nom procurant le salut. Act., iv, 12.

2° Christ. Voir Christ, t. ii, col. 717. Ce mot reproduiten grec l’hébreu mâsîah, qui a le même sens queXpeoTÔ’ç, «oint.» Cette nouvelle appellation signifie quele Fils de Dieu a été «oint» ou consacré par le Pèrepour une fonction spéciale. Les rois et les prêtres recevaientune onction sensible. Voir Onction. Les prophètesétaient investis de leur fonction par une onction spirituelle,c’est-à-dire par une action spéciale de l’Espritde Dieu. Notre-Seigneur a été oint comme roi, commeprêtre et coirrae prophète, mais cette onction a été toutespirituelle. Ps. xliv, 8; Is., lxi, 1; Dan., IX, 24; Luc,iv, 18; Heb., i, 9. Le nom de «Christ» se rapportedonc en Notre-Seigneur à la fonction, comme le nom de «Jésus» à la personne. — Dans le Nouveau Testament,les deux noms sont assez souvent unis ensemble pourdésigner le Sauveur. Il en est ainsi presque exclusivementdans les deux Épitres aux Thessaloniciens, lestrois Épîtres pastorales, l’Épitre à Philémon, les Épitresde saint Pierre, de saint Jean et de saint Jude. Sienplus fréquemment cependant, le nom de «Christ» estemployé seul, sans apposition du nom de Jésus ou dequelque autre substantif. En pareil cas, les Évangélisteset saint Luc dans les Actes ajoutent invariablement l’article,ô Xpiorôç, «le Christ;» Saint Paul met l’article88 fois, mais l’omet 117 fois; l’omission est surtout fréquentedans les Épitres aux Romains, aux Corinthiens,aux Galates et aux Philippiens; l’article prédomine dansles Épitres aux Éphésiens, aux Colossiens et aux Hébreux.Saint Pierre omet 6 fois l’article devant XpidToç,

et l’emploie 3 fois. Dans l’Apocalypse, sur quatreexemples, l’article ne manque qu’une fois. Il ressort delà que l’usage de l’article devant Xpiamç est de beaucoupplus fréquent que son omission, et qu’il est plusconforme à l’origine du mot et à l’habitude des écrivainssacrés d’appeler Notre-Seigneur «le Christ», que simplement «Christ».

ji. ses avtres noms. — 1° Dans V’Ancien Testament:1. Abi-’ad, toxttip to-j uiXXovroç aiûvo;, pater futurisseculi, Is., IX, 6, nom donné par le prophète au Messiefutur. L’hébreu signifie «père d’éternité», c’est-à-direpossesseur et maître de l’éternité, tant pour lui-même,puisqu’il est éternel par sa nature divine, voir Éternité,t. ii, col. 2001, que pour les âmes qu’il doit racheter et-associer à son éternité en leur conférant l’immortalité.C’est à se second sens que songent surtout les anciennesversions. — 2.’Adôn, xOpioç, dominus, Ps. cix (ex),1, titre donné par David au Messie, que Jéhovah investitde sa puissance. Le mot’âdôn désigne ordinairementle maître qui possède, le seigneur auquel on doit obéissance.Gen., xxiv, 12; ls., xxxvi, 9, etc. Le Messie estdonc maître et seigneur par rapport au roi David. —3. David, AaésS, David, nom attribué au Messie lui-mêmepar le prophète Ézéchiel, xxxiv, 23, 24; xxxvii,21. — 4.’Ébéd, Soûàoî, servus. Is., xlii, 1; Zach., iii,8. Par sa nature humaine, Jésus-Christ est le serviteuret l’esclave de Jéhovah. Voir Esclave, t. ii, col. 1928.

— 5.’El, ©£<5c, Deus, «Dieu,» Is., IX, 6, titre qui serapporte à la nature divine du Messie. Voir’El, t. ii,col. 1627, et Revue biblique, 1893, p. 339-340. — 6. Gibbôr,io-^upôç, fortis, le «fort», le héros. Voir Géants,col. 137. Is., ix, 6. Ce titre fait allusion à la toute-puissancedu Dieu fait homme. Ps. xxiii (xxiv), 8. On réunitquelquefois en une seule expression les deux motsd’Isaie, ix, 6: ’El gibbôr, «Dieu fort.» Chacun desdeux termes n’en garde pas moins toute sa valeur. LesSeptante ne traduisent que le second mot. — 7. Hokmâh,<roçfa, sapientia, la Sagesse éternelle de Dieu, son intelligenceinfinie, son Fils. Prov., viii, 12, 22. Voir Sagesse.— 8.’Immânû’El, ’E[i[i.avour|X, Emmanuel, «Dieu avec nous.» Is., vii, 14. Voir Emmanuel, t. ii,col. 1732. — 9. Mal’ak hab-berît, ôaYY^oc ™i; 81a6ïjxr|;,angélus testamenti, «l’ange de l’alliance» nouvelleque Dieu doit contracter avec son peuple régénéré.Voir Alliance, t. i, col. 387. — 10. Pelé’, Oau^aaTÔc,admirabilis, «admirable,» Is., IX, C, à cause des merveillesqui signaleront la naissance, la vie, la mort, larésurrection et le règne de Jésus-Christ. — 11. Ro’éh,reoifi^v, pastor, Ezech., xxxiv, 23, le «pasteur» uniquequi régira le nouveau peuple de Dieu. Voir Pasteur. —12. Sadîq, Sîxaioç, justus, le «juste» par excellence, celui<jui porte en soi la sainteté divine et qui doit la communiqueraux hommes. Is., li, 5; Jer., xxiii, 5. — 13. SarSâlôm, à’p/Mv s’tpï)Vï]c, princeps pacis, le «prince de lapaix», Is., IX, 6, celui qui apporte la paix sur la terreen réconciliant l’homme avec Dieu. — 14. Sémah, Sv90ç,germen, le «germe», le Messie comparé à un rejetonqui fleurira sur la terre. Jer., xxiii. 5; xxxiii, 15; Zach., .m, 8 (Vulgate: Onens). Voir Germe, col. 212. —15. Silôh,ri àitoxei’iisva au™, qui nuttendus est, Gen., xlix, 10,terme par lequel Jacob mourant désigne le Messie danssa prophétie à Juda. Voir Siloh. — 16. Yehovâh Sidqênu,xupio; ’IwseSéx, Dominus justus noster, «Jéhovah notrejustice.» Jer., xxiii, 6. Ainsi attribué au Messie, quisauve et justifie les hommes, le nom de Jéhovah impliquela divinité de ce Messie. Voir col. 1244. — 17. Yesû’âh, .aut-r^çiiov, salvator, le «salut», ou, dans le sens concret,le «Sauveur». Is., xii, 3; xlv, 8. Ce titre se rapporte àla mission rédemptrice du Messie et prélude à son nomde «Jésus». — 18. Yô’ês, «rifiëouXoc, consiliarius, le «conseiller», Is., rx, 6, le Messie en tant que confidentdes volontés du Père et chargé de les faire connaître auxhommes. Aux titres qu’Isaîe donne au Messie, les Septante

ajoutent cet autre: (lefiXric pouXîjî a-yy-eXo;, «ange du

grand conseil;» par contre, ils suppriment le mot «Dieu»,par crainte sans doute de laisser croire aux païens queles Juifs admettaient l’existence de plusieurs dieux.

Dans le Nouveau Testament.

1.’Ajuvôç to5

®£o5, Agnus Dei, «Agneau de Dieu.» Joa., i, 29. VoirAgneau de Dieu, t. i, col. 271. — 2.’AtoittoXoc, aposlolus. «apôtre,» Heb., iii, 1, c’est-à-dire «envoyé», titrequi convient à Jésus-Christ comme envoyé du Père. —

3.’Ap^iepe-Jç, pontifex, «pontife.» Heb., iii, 1; iv, 14,15; v, 10; vii, 26; ix, 11. Jésus-Christ est le pontife, legrand-prêtre de la Loi nouvelle, parce qu’il réalise, pourla gloire de Dieu et le salut des hommes, ce que lesanciens pontifes n’ont pu que figurer. — 4.’Ap^tTioiji^v,princeps pastorum, «le chef des pasteurs,» I Pet., v,

4, celui dont tous les pasteurs des âmes tiennent leurmission. Voir Pasteur. — 5. AQ, la première et la dernièrelettre de l’alphabet grec, c’est-à-dire le principe etla fin de toutes choses. Apoc, i, 8. Voir À El Û, t. i,col. 1. — 6. BoKJiXziç, rex, «roi.» Notre-Seigneur revendiquelui-même ce titre d’une manière absolue, en ajoutantque son royaume n’est pas de ce monde. Joa.,xviii, 37. Ses accusateurs lui reprochent de s’être dit «roi des Juifs), Luc, xxiii, 2; Joa., xix, 21, ce quiétait un des noms traditionnels du Messie, et c’est le titreque Pilate inscrit sur la croix. Matth., xxvil, 37; Marc,XV, 26; Luc, xxiii, 38; Joa., xix, 19. — 7. AiôsurxaXoî,magister, «maître,» Matth, , xxiii, 8, celui qui enseigneà des disciples et dirige leur vie. Voir Maître. —8.’E7ti! Txo7ro5, episcopus, le «surveillant» des âmeschrétiennes. I Pet., ii, 25. — 9.’Iepeûç, sacerdos, «prêtre» selon l’ordre de Melchisédech, offrant le sacrifice dupain et du vin. Heb., v, 6; vii, 17. — 10. Ka9°)YY)’rijç,magister, «chef,» celui qui mène les autres. Matth.,xxiii, 10. — 11. Kûpioç, Dominus, le «Seigneur». Joa.,xiii, 13; xxi, 7. C’est par ce mot grec que les Septanteont rendu le nom ineffable de Yehôvàh. Dans le NouveauTestament, il sert à désigner Jésus-Christ. — 12. A6yoç,Verbum, le «Verbe, la Parole». Joa., i, 1. Voir Verbe.

— 13. Me<j{ttjç, ntediator, le «médiateur» entre Dieu etles hommes, Heb., viii, 6; ix, 15; xii, 21, celui qui, parsa mort, a ménagé la réconciliation entre Dieu offenséet l’homme pécheur. — 14. Mea-uiaç, Messias, le «Messie». Joa., i, 42. Voir Messie. — 15. Movo-jevï];, umgenitus,le Fils «unique» du Père, Joa., i, 14, 18. — 16.Nupiçtoc, sponsus, V «époux». Matth., ix, 15; Joa., iii,29. Sous ce titre, Jésus-Christ est considéré dans sonunion avec l’humanité rachetée et devenue l’Église, sonépouse. Voir Église, t. ii, col. 1600, et Cantique descantiques, t. ii, col. 194. — 17. Etot^v, pastor, «pasteur.» Heb., xiii, 20; I Pet., iꝟ. 25. Voir Pasteur. —

18. IIpoipTJr/){, propheta, «prophète.» Luc, vii, 16.A la suite d’un éclatant miracle de résurrection, INotre-Seigneurest salué du nom de «grand prophète», c’est-à-direde celui qui vient parler et agir au nom de Dieu. —

19.’PaëSi, rabbi, appellation tirée de l’hébreu rab, «grand, supérieur,» et qui signifie «mon grand, monseigneur». On appelait ainsi les docteurs de la Loi. Cetitre est donné plusieurs fois à Notre-Seigneur par ceuxqui veulent le traiter respectueusement. Matth., xxvi, 25^Marc, IX, 4, etc. — 20.’PaSëouvs, rabboni, même titreque le précédent, de rabbôn, «seigneur.» Marc, x, 51;Joa., xx, 16. — 21. Scûtqp, salvator, «sauveur.» C’estl’indication de la mission de Jésus-Christ. Luc, II, 11;Joa., IV, 42. — 22. ï"io’;, Filius, «Fils,» mot quiindique le rapport qui existe entre Jésus-Christ etson Père éternel, Tlbç ©eoû, Filius Dei, «Fils deDieu.» Matth., xvi, 16; Joa., vi, 70; IX, 35, etc. VoirFils de Dieu, t. ii, col. 2253. Le même mot sert aussi àmarquer les rapports qui existent entre Jésus-Christ etl’humanité, à laquelle il appartient par son incarnation:Tîô; àv6p<oitov, Filiui hominis, «Fils de l’homme,» Matth., x, 23, etc.; voir Fils de l’homme, t. ii; col. 2258;

— ses rapports avec sa Mère: Yibt Mapîaç, FiliusMarias, «Fils de Marie,» Marc, VI, 3; — ses rapportsavec son père adoptif: Yiôç’luxxrjf, Filius Joseph, «Filsde Joseph,» Luc, iii, 23; Joa., i, 45, etc.; — enfin sesrapports avec ses ancêtres: l’îbs’A6paà|A, ulôç Aavi’5,Filius Abraham, Filius David, «Fils d’Abraham,» Matth., i, 1, «Fils de David,» Matth., i, 1, 20; ix, 27;Marc, x, 47; Luc, xviii, 38, etc.

II. La préparation a sa venue.

L’apparition duFils de Dieu sur la terre ne s’est pas produite à l’improviste.C’est par Jésus-Christ seul que les hommesont pu parvenir au salut, même avant sa venue. Il a doncété nécessaire que ceux qui l’ont précédé eussent de luiquelque idée. C’est pourquoi, dans l’Ancien Testament,le Père éternel a pris soin qu’il fût montré à l’avance,afin que les hommes pussent avoir la foi dans les méritesfuturs de sa rédemption. Aussi est-il dit que les anciensjustes «sont morts dans la foi, avant d’avoir vu s’accomplirles promesses, mais du moins les apercevant deloin et les saluant». Heb., xi, 13. D’autre part, àraison des exigences de la rédemption, l’avènement duFils de Dieu devait s’opérer dans l’infirmité de la chairet dans l’humilité d’une condition obscure. Commentreconnaîtrait-on le Dieu dépouillé de sa gloire? Commentaccepterait-on le scandale de ses abaissements, de sessouffrances et de sa mort? Le Père y pourvut en traçantà l’avance, dans l’Ancien Testament, le portrait decelui qu’il devait envoyer. Ce portrait, dont les élémentss’ajoutaient progressivement les uns aux autres, commepour tenir en haleine la foi et l’espérance de l’ancienmonde, représentait un Messie à la fois Dieu et homme,puissant et glorieux par sa divinité, mais obscur, humiliéet souffrant dans son humanité. Les détails sur sa vie aumilieu des hommes étaient assez circonstanciés pourqu’aucun esprit attentif et de bonne foi ne pût seméprendre. Les traits qui se rapportaient aux abaissementsétaient même gravés si profondément dans cettehistoire anticipée, que, tout au moins en les retrouvantdans la réalité, on ne pût s’empêcher de reconnaître queces abaissements étaient voulus. Pour tracer ce portrait,qui devait plus tard aider les hommes à reconnaître sonFils et leur Sauveur, Dieu se servit de deux moyens, lesligures et les prophéties.

i. les figures. — On désigne sous le nom de «figures» certains personnages ou certaines choses de l’AncienTestament qui, par des traits plus ou moins nombreux,représentent à l’avance les personnages ou les chosesdu Nouveau. Cette ressemblance n’est pas fortuite etl’assimilation n’est pas arbitraire. Il y a là un desseinde Dieu sur lequel saint Paul revient plusieurs fois: «Toutes ces choses ont été faites pour nous figurer nous-mêmes... Toutes ces choses leur arrivaient en figure(t’jttij’.wî); elles ont été écrites pour notre avertissement.» I Cor., x, 6, 11. Les anciennes cérémonies «sontl’ombre des choses futures dont le Christ est le corps».Col., ii, 17. «La Loi n’avait que l’ombre des biens futurset non l’image même des choses.» Heb., x, l.aParmi cesfigures, beaucoup se rapportent personnellement à Jésus-Christ.Il n’est guère de personnage important del’histoire d’Israël, ni d’institution mosaïque qui nefournisse quelque trait dont on pourrait tirer parti pourcaractériser la personne ou la mission du Sauveur.Nous ne nous arrêterons qu’aux figures principales, àcelles surtout qui sont signalées par Notre-Seigneur oupar les auteurs sacrés.

Personnages figuratifs.

1. Adam. Jésus-Christ

est pour l’humanité rachetée ce qu’Adam a été pourl’humanité déchue. Il a été le «second Adam», principede vie comme le premier avait été principe demort. I Cor., xv, 22, 45. Le premier Adam était lafigure, tûiuoç, forma, de celui qui devait venir. JRom.,v, 14. Voir Adam, t. i, col. 177. Cf. S. Irénée, Conl.Userez., iii, 22. 3, t. vii, col. 958.

2. Abel. Il figure Jésus-Christ, dont le sacrifice futagréable à Dieu, et qui, lui aussi, mourut innocent,victime de la haine fraternelle. Le sang d’Abel estmentionné à propos du sang de Jésus-Christ. Heb., xii,24. Voir Abel, t. i, col. 29.

3. Noé. Ce patriarche sauve l’humanité au moyende l’arche, comme Jésus-Christ sauve le monde aumoyen de son Église. Voir Arche de Noé, 1. 1, col. 926.

4. Abraham. Il eut la promesse de la bénédictionpour sa race et pour toutes les nations de la terre. Gen.,xxii, 18. Cette bénédiction est apportée par Jésus-Christ,Gal., iii, 16-18, qui est le père de tous les chrétienscomme Abraham a été le père de tous les croyants. VoirAbraham, t. i, col. 81.

5. Melchisédech. Il représente Jésus-Christ par saroyauté et son sacerdoce, par son sacrifice composé depain et de viii, par l’hommage que lui rend Abraham,etc. Heb., v, 6, 10; vi, 20; vii, 1-17. Voir Melchisédech.

6. Isaac. Comme lui, Jésus-Christ porte le bois deson sacrifice et est immolé par la volonté de son Père,ainsi qu’Isaac l’eût été sans l’intervention de l’ange.Jac, ii, 21. Voir Isaac, col. 935.

7. Joseph. Toute l’histoire de ce patriarche, chéri deson père, vendu par ses frères, emprisonné et méconnu,puis exalté et devenant le salut des siens et de tout unpajs, est une touchante figure de la vie de Jésus-Christ.Le nom égyptien que le pharaon donne à Joseph, Safnatpa’enêah, Gen., xli, 45, et qui signifie «abondance dela vie», ou «nourriture, sauveur de la vie», ou encore «fondateur de la vie», convient aussi excellemment àJésus-Christ. Voir Joseph 1.

8. Moïse. Par son rôle de libérateur, de chef et delégislateur des Hébreux, Moïse est la figure de Jésus-Christ.De plus, il annonce formellement la venue dugrand prophète auquel il se compare lui-même. Deut.,xviii, 15; Act., iii, 21; vii, 37. Enfin, le Christ souffrantest encore représenté par Moïse qui prend part volontairementaux épreuves de son peuple, appelées de cenom caractéristique: 6ve181(7pt>{ toO XpioToû, improperiumChristi, «l’outrage fait au Christ.» Heb., xi, 26.

9. Aarqn. Sa vocation, sa dignité, son sacerdoce, sessacrifices sont la figure des prérogatives sacerdotales deJésus-Christ, grand pontife de la Loi nouvelle. Heb., v,4; cf. viii, 1-6; ix, 6-14.

10. Job. Il figure naturellement le Christ souffrant etabandonné des siens.

11. David. Il est le type du Messie par ses épreuves,sa royauté, ses victoires, ses cantiques et ses sentiments.Le Sauveur se laisse appeler «t fils de David», ce quisuppose certaines ressemblances entre lui et son ancêtre.Matth., ix, 27. Voir David, t. ii, col. 1323.

12. Jérémie. Par ses épreuves et par son amour pourson peuple, par ses prophéties et par son autorité personnelle,il est un tjpe du Messie. Aussi les Juifs sedemandent-ils si Jésus-Christ ne serait pas Jérémierevenu au monde. Matth., xvi, 14.

13. Jonas. C’est Notre-Seigneur lui-même qui signaledans Jonas la figure de sa prédication, Matth., xii, 41,Luc, xi, 32, et de sa sépulture suivie de sa résurrectionau bout de trois jours. Matth., xii, 39, 40; xvi, 4; Luc,xi, 29, 30.

L’honneur d’avoir été, par quelques traits, des typesdu Messie, pourrait encore être attribué à beaucoupd’autres personnages, Jacob, Josué, les Juges, Samuel,Salomon, Zorobabel, etc.

Choses figuratives.

1. Agneau pascal. Saint Paul

dit formellement: «Le Christ, notre pâque, a été immolé.» I Cor., v, 7. Notre-Seigneur, désigné par saintJean-Baptiste comme l’Agneau de Dieu, Joa., i, 29, 36, sassocie l’institution de la sainte Eucharistie au repas dela Pàque, afin d’indiquer qu’il veut être une nourriturepour l’homme comme l’agneau pascal. Matth., xxvi, 26.Saint Jean applique à Notre-Seigneur, mort sur la croix,

ce qui était prescrit pour l’agneau pascal, dont on nedevait pas briser les os. Joa., xix, 36; Exod., xii, 46.

2. Arche d’alliance. Symbole de la présence de Dieuau milieu de son peuple, elle figure Jésus-Christ, le «Dieu avec nous a. Voir Arche d’alliance, 1. 1, col. 923.

3. Bouc émissaire. Comme le bouc émissaire, Jésus-Christa été chargé des péchés des hommes, Is., lui, 6,et il a été rejeté «hors de la porte», Heb., xiii, 12, poursouffrir; mais c’est comme le second bouc, immolé parle grand-prêtre, qu’il a été mis à mort. Voir Bouc émissaire,t. i, col. 1873.

4. Buisson ardent. Tout en symbolisant le peuplehébreu que ne consume pas le feu de la persécution enEgypte, voir Buisson ardent, t. i, col. 1970, le buissonardent est encore considéré par l’Église comme la figuredu Verbe s’incarnant dans le sein de Marie, sans entamersa virginité. Cf. Ant. 3 ad Laudes in Circumcis.Dom.

5. Colonne de nuée. Cette nuée avait pour fonction deconduire Israël à travers le désert et de l’abriter contrele soleil. Elle était aussi comme le trône de Dieu aumilieu de son peuple. Voir Colonne de nuée, t. ii, col.851. Saint Paul voit dans cette colonne, qui dirige lesHébreux à travers la mer Rouge, une figure du Christ,qui fait passer les chrétiens par les eaux du baptême.ICor., x, 1, 2.

6. Échelle de Jacob. Le saint patriarche voit dans unsonge une échelle qui atteint le ciel et sur laquellemontent et descendent les anges, messagers de la Providencedivine auprès des hommes. Gen., xxviii, 12.Notre-Seigneur s’applique à lui-même cette figure: «Vous verrez le ciel ouvert et les anges de Dieu montantet descendant sur le Fils de l’homme.» Joa., i, 51.Lui-même devient, par son incarnation, l’intermédiairenécessaire entre Dieu et les hommes.

7. Manne. Notre-Seigneur la mentionne comme letype de son Eucharistie, et c’est par comparaison avecla manne qu’il explique aux Juifs les qualités de lanourriture qu’il leur destine. Joa., VI, 31-52.

8. Rocher du désert. Pour désaltérer les Hébreuxdans le désert, Moise frappa le rocher et l’eau jaillit.Exod., xvii, 6. Or, dit saint Paul, «le rocher, c’était leChrist,» I Cor., x, 4, qui désaltère les âmes par sa doctrine,sa grâce et son Eucharistie.

9. Sacrifices. Toutes les immolations liturgiques del’ancienne Loi, que leur but ait été latreutique, propitiatoire,impétratoire ou eucharistique, ont été des typesvariés de l’unique oblation de Jésus-Christ. Heb., x,1-14. Voir Sacrifices.

10. Serpent d’airain. «De même que Moise a élevéle serpent dans le désert, ainsi faut-il que le Fils del’homme soit élevé, afin que quiconque croit en lui nepérisse pas, mais ait la vie éternelle.» Joa., iii, 14, 15;Num., xxi, 9. Voir Serpent d’airain.

11. Tabernacle. On offrait autrefois des victimes dansle Tabernacle pour l’expiation des péchés. Jésus-Christest lui-même un tabernacle plus parfait, qui n’est pasconstruit de main d’homme et dans lequel il obtientpar son sang la rédemption définitive. Heb., IX, 11, 12.Sa chair est elle-même comparée au voile du sanctuaire.Heb., x, 20. Voir Tabernacle.

12. Toison de Gédéon. C’est encore l’Église qui signaledans le miracle de la toison de Gédéon une figure del’incarnation. Ant. 2 ad Laudes in Circumcis. Dom.Cf. S. Justin, Dialog. cum Tryphon., 40-43, t. VI, col.562-570; Huet, Dénionst. évang., dans les Démonst. évang.de Migne, 1834, t. v, col. 909-924; Curci, Lezioni soprai quatlro Evangeli, Florence, 1874, t. i, p. 81-84.

il. les prophéties. — Notre-Seigneur indique lui-mêmeaux Juifs le témoignage formel que lui rendent lesÉcritures, c’est-à-dire l’Ancien Testament parlant de luiprophétiquement, et il met ce témoignage en parallèleavec ceux que lui rendent saint Jean-Baptiste et son

Père, dont il fait les œuvres. «Vous scrutez (Ipsuvàte) lesÉcritures, en vous imaginant qu’en elles vous avez la vieéternelle; or ce sont elles qui rendent témoignage demoi… Celui qui vous accuse, c’est Moise lui-même, enqui vous espérez. Car si vous aviez foi en Moïse, vousauriez sans doute également foi en moi; c’est de moi eneffet qu’il a écrit. Mais si vous ne croj ez pas à ses écrits,comment croirez-vous à mes paroles?» Joa., v, 39-47.La conclusion évidente qui ressort de ce passage, c’estqu’il y a dans les écrits de l’Ancien Testament des traitsqui se rapportent directement à Notre-Seigneur, quidoivent servir à le faire reconnaître comme Messie etmême préparer les Juifs à croire en ses paroles. Cestraits sont d’ailleurs assez saillants pour que le Sauveurpuisse reprocher à des docteurs, qui scrutent les Écritures,de ne les avoir pas aperçus. On doit conclure demême de cette autre parole du Sauveur aux mêmes interlocuteurs: «Abraham, votre père, a tressailli de joiepour voir mon jour.» Joa., viii, 56. D’où est venu àAbraham ce désir qui l’a rempli de joie et qui le faisaitaspirer à la venue du Rédempteur, sinon de la promessequi lui a été faite et qui, conséquemment, visaitdirectement le Messie? Gen., xii, 3. Cf. S. Irénée,Conl. hæres., iv, 5, 5, t. vii, col. 986. Notre-Seigneurdaigna lui-même expliquer les prophéties messianiquesaux deux disciples d’Emmaus: «Et commençant parMoïse et par tous les prophètes, il leur expliquait, danstoutes les Écritures, ce qui le concernait.» Luc, xxiv,27. Enfin, il fit la même leçon aux Apôtres réunis et «leur ouvrit le sens afin qu’ils comprissent les Écritures». Luc, xxiv, 44-47. Il y a donc incontestablementdans les écrits mosaïques et dans ceux des prophètesdes passages qui se rapportent personnellementà Jésus-Christ. Pour le nier, il faudrait prendre les parolesde Notre-Seigneur dans un sens tout opposé ausens très clair qu’elles présentent naturellement. Cf.Encyclique Providentissimus, t. i, p. x.

Prophéties selon l’ordre des temps.

Les prophéties

messianiques peuvent être recueillies d’après l’ordredans lequel elles ont été inspirées. Cet ordre a l’avantagede faire ressortir le développement progressifdes révélations divines, depuis les promesses généralesfaites au premier homme et aux patriarches, jusqu’auxdescriptions circonstanciées de David et d’Isaie. Voici,dans cet ordre, autant du moins qu’on peut l’établir, lasérie des prophéties concernant le Sauveur:

1. Période patriarcale.

1° En même temps que lechâtiment du premier péché, Dieu annonce le Sauveurfutur, qui sera de la race de la femme et par qui cette raceécrasera la tête du serpent. Gen., iii, 15. — 2° La consolationfuture passera par Noé, Gen., v, 29, et ce sont ensuiteles tentes de Sem que Dieu choisira pour y habiter.Gen., ix, 27. — 3° La bénédiction de toutes les nationsviendra par Abraham, Gen., xii, l-7; xiii, 14-17; xvii, 1-9;xviii, 17-19; xxii, 16-18; par Isaac, Gen., xxvi, 1-5, etpar Jacob, substitué intentionnellement à son aîné Ésaû.Gen., xxviii, 10-15. — 4° Jacob a douze fils; c’est le quatrième,Juda, qui est marqué comme devant être le dépositairede l’autorité jusqu’à ce que vienne le Rédempteuret «celui à qui les peuples doivent obéir». Gen.,xlix, 8-12. — 5° Balaam voit de loin l’étoile qui sortira deJacob et le sceptre qui se lèvera d’Israël pour soumettretoutesles nations étrangères. Num., xxiv, 17. — 6° Moïse^annonce la venue du prophète, semblable à lui, qu’ilfaudra écouter. Deut., xviii, 15-19. — Il résulte de cespremières révélations qu’un descendant de Juda viendraun jour pour être le Sauveur du monde et le dominateurdes peuples.

2. Période royale.

1° Anne, mère de Samuel, saluede loin le roi et le Christ que Dieu enverra. I Reg., ii,10. — 2° La maison de David sera pour toujours affermiesur le trône par le Messie futur qui sera son descendant.II Reg., vii, 16; III Reg., xi, JJ6. — 3° David and431

JÉSUS-CHRIST

4432

nonce avec détail les gloires du Messie et anssi ses souffrances. Ce Messie sera Fils de Dieu, Ps. ii, 7; le roipuissant, redoutable aux méchants, doux aux humbles,Ps. lxxii (lxxi); le prêtre et le dominateur des peuples, Ps. cix (ex); mais en même temps il sera lavictime volontaire pour le péché, Ps. xl (xxxix), 7-9; ilsera accablé de tourments et souffrira une mort affreuse,Ps. xxii (xxi), lxix (lxvih), mais sortira glorieux dutombeau. Ps. xvi (xv), 10. — 4° Salomon célèbre la Sagesse éternelle et personnelle qui doit se manifester aumonde. Prov., viii, 22-ix, 6. Le Cantique des cantiqueschante l’union du Christ avec son Église. Voir Cantiquedes cantiques, t. ii, col. 196. — 5° Un Psalmiste de lamême époque parle aussi de cette union mystique etsalue le Christ du nom de Dieu. Ps. xlv (xliv), 7. Avecces prophéties, «l’idée du Messie purement humain faitplace à celle d’un Messie-Dieu. L’homme s'était trouvétrop imparfait pour réaliser l’idéal promis. C’est Jéhovah lui-même qui revêt la forme du Messie… Il s’agittoujours d’un roi d’Israël, d’un descendant de David;mais, en même temps, d’un seigneur élevé au-dessus deschérubins et recevant l’hommage de l’univers entier.» Meignan, David, Paris, 1889, p. 207.

3. Période prophétique.

1° Abdias, 21, annonce, engénéral, que «des sauveurs viendront sur le mont Sion.» — 2° Joël, ii, 28-32, prédit l’effusion de l’Esprit de Dieusur toute chair. — 3° Amos, ix, 11, prophétise le relèvement de la tente de David. — 4° Osée parle avec détailde la conversion d’Israël, iii, 5, et de la royauté duMessie futur, xi, 1. — 5° Michée montre les peuplesaccourant à Jérusalem, la ville du salut, Iv, et leMessie naissant à Bethléhem, v, 2. — 6° La prophétiemessianique d’Isaie est très étendue. Elle porte sur lanaissance du Messie et sur son nom, vii, 14; sur ses attributs divins, ix, 6; sur sa descendance de David, XI,1; sur son empire universel, xvi, 5; xviii, 7; xxivxxvii; sur son caractère de pierre angulaire, xxviii, 16;sur l'âge d’or qu’il ramènera sur la terre, xxxv; sur sonprécurseur, xl, 1-11; sur sa qualité de serviteur de Jéhovah, xlii, 1-9, de lumière des nations et de salut d’Israël, xlix. Elle insiste sur le sacrifice rédempteur, L, 5,S, sur les tourments et la mort volontaire du Messie.lui. À ce prix seront assurées la fondation de l'Église,la conversion des peuples et la victoire définitive du Christ,liv, lv, lx, lxi, lxiii, lxv, lxvi. — 7° Nahum, i, 15,annonce la prédication évangélique. — 8° Jérémie préditl’infidélité d’Israël, ii, 13-28; le sacrifice du Messie, ii,19, le «germe» et le vrai pasteur que Dieu doit susciter, xxiii, 4-8; xxxiii, 14, 15; il fait allusion à la douleurde Rachel, près de Rama, xxxi, 15, et à l’incarnation,xxxi, 22. — 9° Baruch, iii, 24-38, chante la venue duMessie au milieu des hommes. —10° Ézéchiel prophétisela conversion des Juifs, xi, 14-21; xxxvi, 16-32, et l’avènement du vrai pasteur, xxxiv, 23-31, qui doit régirIsraël, xxxvii. — 11° Daniel voit la petite pierre qui doitrenverser le colosse de l’idolâtrie, ii, et le Fils de l’hommedevenant maître des empires, vii, 13, 14. Il annonce l'époque de sa venue et le châtiment d’Israël infidèle, IX.

— 12° Aggée, ii, 1-10, promet à ses contemporains que leMessie entrera dans le nouveau temple qu’ils bâtissent.

— 13° Zacharie salue le Messie à Sion, ii, 8-13, le «germe», iii, 8, qui doit élever le vrai temple du Seigneur, vi, 9-15, le roi sur sa pauvre monture, ix, 9,source de grâce à Jérusalem, xiii, 1; xiv. — 14° Le dernier prophète, Malachie, annonce le précurseur qui doitie suivre à plus de quatre siècles de distance, iii, 1; ilparle du sacrifice qui remplacera tous les autres,i, 10, 11, et de la conversion finale des Juifs, iv, 5, 6.

Prophéties selon l’ordre de leur accomplissement.

Les prophéties messianiques peuvent aussi être

présentées dans l’ordre même de leur accomplissementau cours de la vie du Sauveur. On voit alors avec quelleexactitude les traits du modèle décrit à l’avance corresI

pondent à ceux de la réalité, quoique, parmi ces prophéties, les unes aient été écrites dans le sens littéral,et les autres dans le sens spirituel.

1. Patrie du Sauveur. «Et toi, Bethléhem Éphrala,petite entre les milliers de Juda, de toi sortira pour moicelui qui doit dominer sur Israël, et dont l’origine remonte aux temps anciens, aux jours de l'éternité.» Mich., v, 2; Matth., ii, 6; Joa., vii, 42. Voir Bethléhem,1. 1, col. 1691.

2. Ancêtres du Messie. Abraham, Isaac, Jacob, Juda,David ont été désignés comme ancêtres du Messie.Gen., xii, 3; xxii, 18; xxvi, 4; xxviii, 14; xlix, 8-12;I Par., xvii, 11. Jésus-Christ est né de leur race. Matth.,i, 2-6; Luc, iii, 31-34.

3. La Vierge, mère du Messie. «Une vierge concevraet enfantera un fils, et elle l’appellera Emmanuel.» Is.,vu, 14; Matth., i, 18-25; Luc, i, 27-34. Voir Emmanuel,t. ii, col. 1732.

4. La présence du Messie dans le temple de Zorobabel. «La gloire de cette dernière maison sera plusgrande que celle de la première, et c’est dans ce lieuque je donnerai la paix.» Agg., Il, 9; Luc, ii, 22.

5. L’adoration des mages. «Les rois de Tharsis etdes îles paieront les tributs, les rois d’Arabie et de Sabaoffriront des présents; tous les rois se prosternerontdevant lui.» Ps. lxxii (lxxi), 10-15; Is., lx, 3-6; Matth.,n, 1-11.

6. Le massacre des Innocents. «On entend des crisà Rama, des lamentations et d’amers gémissements;Rachel pleure ses enfants et ne veut pas être consolée,parce qu’ils ne sont plus.» Jer., xxxi, 15; Matth., Il, 18.

7. Le précurseur. «Voici que j’enverrai mon messager, qui préparera le chemin devant moi. Aussitôt entrera dans son temple le Seigneur que vous cherchez etl’ange de l’alliance que vous désirez. Voici qu’il vient.» Mal., iii, 1; iv, 5; Luc, i, 5-25, 57-80.

8. Prédication de Jean-Baptiste. «Une voix crie:Préparez dans le désert le chemin de Jéhovah, aplanissez pour notre Dieu une route dans les lieux arides,etc.» Is., xl, 3-5; Matth., iii, 1; xiv, 1-10; Marc, i, 2-4;Luc, iii, 3.

9. Débuts de la prédication évangélique. «Lestemps à venir couvriront de gloire la terre voisine de lamer (de Galilée), au delà du Jourdain, le territoire desnations. Le peuple qui marchait dans les ténèbres voit

'une grande lumière, etc.» Is., ix, 1; Matth., iv, 13-15.

10. Guérisons miraculeuses. «Alors les yeux desaveugles s’ouvriront, les oreilles des sourds entendront;le boiteux sautera comme un cerf et la langue du muets’agitera joyeuse.» Is., xxxv, 5, 6; Matth., xi, 5.

11. Prédication de l'Évangile. «L’esprit de Jéhovahest sur moi; car Jéhovah m’a oint pour porter la bonnenouvelle aux malheureux; il m’a envoyé pour guérirceux qui ont le cœur brisé, proclamer aux captifs laliberté, aux prisonniers la délivrance, et publier l’annéede grâce de Jéhovah.» Is., lxi, 1; Luc, iv, 18.

12. Douceur et humilité du Sauveur. «Voici monserviteur que je soutiendrai, mon élu en qui je mets macomplaisance. J’ai placé mon esprit sur lui: il annoncera la justice aux nations; il ne criera point, il n'élèvera pas la voix et ne la fera pas entendre dans les rues.Il ne brisera pas le roseau cassé et n'éteindra pas lamèche qui fume encore.» Is., xlii, 1-3; Matth., iii, 17;xii, 18; xvii 5; Marc, i, 11; Luc, iii, 22; Matth., xi,29; Joa., viii, 11.

13. Entrée triomphale à Jérusalem. «Sois transportée d’allégresse, fille de Sion! Éclate en cris de joie, fillede Jérusalem! Voici que ton roi vient à toi, juste et victorieux, humble et monté sur un âne, sur un ânon, lepetit d’une ânesse.» Zach., ix, 9; Matth., xxi, 4, 5.

14. L’Eucharistie. «Les malheureux mangeront et serassasieront… Tous les puissants de la terre mangerontet eux aussi se prosterneront.» Ps. xxii (xxi), 27, 30. «Tu es prêtre pour toujours, selon l’ordre de Melchisédech.» Ps. ex (cix), 4. «En tous lieux est offert à monnom l’encens et une hostie pure.» Mal., i, 11; Matth.,ixvi, 26-29; Marc.xrv, 22-25; Luc, xxii, 15-20.

15. Agonie du Sauveur. «Mon cœur tremble en moi,et les terreurs de la mort m’assiègent; la crainte etl’épouvante m’assaillent et le tremblement se saisit demoi.» Ps. lv (liv), 5, 6; Matth., xxvi, 3646; Marc, xiv,32-42; Luc, xxii, 39-46.

16. La trahison de Judas. «Celui-là même avec quij’étais en paix, qui avait ma confiance et qui mangeaitmon pain, lève le talon contre moi.» Ps. xli (xl), 10. «Ils pesèrent pour mon salaire trente sicles d’argent.Jéhovah me dit: Jette-le au potier, ce prix magnifiqueauquel ils m’ont estimé.» Zach., xr, 12, 13; Matth., xxvi,47-50; xxvii, 3-10; Marc, X£V, 43-45; Luc, xxii, 47, 48;Joa., xviii, 2-6.

17. Condamnation du Sauveur. «Pourquoi les nationss’agitentelles, … pourquoi les rois de la terre se soulèvent-ils... contre Jéhovah et contre son Christ?» Ps. ii,2. «De faux témoins se lèvent: ils m’interrogent sur ceque j’ignore et me rendent le mal pour le bien.» Ps. xiiv (xxxiv), 11-12; Matth., xxvi, 57-€6; Marc, xiv,53-64; Joa., xviii, 19-24.

18. Les outrages et les supplices de la passion. «J’ailivré mon dos à ceux qui me frappaient et mes joues àceux qui m’arrachaient la barbe. Je n’ai pas détournémon visage des opprobres et des crachats.» Is., l, 6;Matth., xxvi, 67-68; Marc, xiv, 65; Luc, xxii, 63-€5.

Ils mettent du fiel dans ma nourriture et, pour étan

rie, à la brebis qui se tait devant ceux qui la tondent;il n’a point ouvert la bouche. Il a été enlevé par l’angoisseet le châtiment, et, parmi ceux de sa génération,qui a cru qu’il était retranché de la terre des vivants etfrappé pour les péchés do son peuple?… Il a plu àJéhovah de le briser par la souffrance. Après avoirlivré sa vie en sacrifice pour le péché, il verra une postérité... Il partagera le butin avec les puissants, parcequ’il s’est livré lui-même à la mort, qu’il a été mis aunombre des malfaiteurs, qu’il a porté les péchés debeaucoup d’hommes et a intercédé pour les coupables.»

— Les prophéties concernant la passion du Messie sontles plus remarquables par leur nombre et par la précisionde leurs détails, afin que le mystère de la croix,qui devait être un scandale pour les Juifs, I Cor., i, 23,ne pût cependant être méconnu. Au début de sa Passion,le Sauveur fait comprendre à saint Pierre que c’est lemoment où doivent s’accomplir les Écritures qui annoncentses souffrances. Matth., xxvi, 54. Cf. Joa., xix, 28.

19. La résurrection. «Vous ne laisserez pas monâme dans le Se’ol et vous ne permettrez pas que celuiqui vous aime voie la corruption; vous m’indiquerez lesentier de la vie.» Ps. xv, 10, 11; Matth., xxviii, 59; Marc, xvi, 9-11; Joa., xx, 11-18.

20. La rémission des péchés. «En ces jours-là, unesource sera ouverte à la maison de David et aux habitantsde Jérusalem, pour le péché et pour l’impureté.» Zach., xiii, 1; Matth., ix, 2, etc.

21. L’ascension. «Assieds-toi à ma droite, jusqu’à ceque je fasse de tes ennemis l’escabeau de tes pieds.»

cher ma soif, ils m’abreuvent de vinaigre.» Ps. lxix j Ps. ex (cix), 1; Marc, xvi, 19.

(lxvih), 22; Matth., xxvii, 48; Marc, xv, 36; Joa., xix,29. Il y a surtout deux prophéties capitales sur la passiondu Sauveur. L’une est contenue dans le Psaume xxii(xxi), dont Notre-Seigneur daigna proférer le premierverset sur la croix et dont il indique ainsi l’importancemessianique. En voici les principaux traits:

Tous ceux qui me voient se moquent de moi,

Ils ont la raillerie sur les lèvres et branlent la tête:

c II s’est conûé en Jéhovah, qu’il le sauve!

Qu’il le délivre s’il l’aime!»…

Ne t’éloigne pas de moi, car l’angoisse est proche,

Et personne n’est là pour me secourir.

De nombreux taureaux m’environnent…

Ils ouvrent contre moi leur gueule

Comme un lion rugissant et dévorant.

Je suis comme l’eau qui s’écoule,

Et tous mes os sont disjoints…

Voici que des chiens m’assaillent,

Une troupe de brigands m’assiègent,

Ils percent mes mains et mes pieds,

Je pourrais eompter tous mes os;

Et eux me regardent et me considèrent,

Ils partagent entre eux mes vêtements

Et tirent ma tunique au sort.

Matth., xxvii, 35-44; Marc, xv, 24-32; Luc, xxiii, 3343; Joa., xix, 18-24. L’autre prophétie se lit au chapitrelui d’Isaie; elle porte surtout sur l’attitude duMessie pendant sa passion et sur les effets de sa mort: «Il n’avait ni beauté ni éclat pour charmer nos regards,et son aspect n’était pas fait pour nous plaire. Mépriséet rebuté des hommes, homme de douleur et habitué àla souffrance, pareil à quelqu’un dont on détourne lavue, nous l’avons dédaigné, sans faire cas de lui. Cependant,il a porté nos souffrances et il s’est chargé de nosdouleurs. Nous l’avons considéré comme puni, frappéde Dieu et humilié; mais il était blessé pour nos péchés,brisé à cause de nos iniquités. Le châtiment qui nousassure la paix est tombé sur lui, et c’est par ses blessuresque nous sommes guéris. Nous étions tous errantscomme des brebis, chacun s’égarait dans une voie particulière;Jéhovah l’a frappé pour notre iniquité à tous.Il a élé maltraité et opprimé et il n’a pas ouvert labouche, semblable à l’agneau qu’on mené à la bouche22. La descente du Saint-Esprit. «Je répandrai monesprit sur toute chair; vos fils et vos filles, prophétiseront... Même sur les serviteurs et les servantes, en cesjours-là, je répandrai mon esprit.» Joël., Il, 28, 29;Act., ii, 2-18.

23. Conversion des gentils. «Lève-toi (Jérusalem),sois éclairée, car ta lumière arrive et la gloire de Jéhovahse montre sur toi. Vois, les ténèbres couvrent laterre et l’obscurité les peuples; mais sur toi Jéhovah selève, sur toi sa gloire apparaît: les nations marchent àta lumière et les rois à l’éclat de tes rayons. Jette lesyeux tout autour et regarde: tous s’assemblent et viennentvers toi.» Is., lx, 1-4; Act., xi, 18.

Force des prophéties.

1. Telles sont les principales

prophéties concernant Jésus-Christ. Elles tirent leurforce de leur clarté, de la variété de leurs auteurs et dela manière dont elles s’adaptent au personnage qui en estl’objet. «Quand un seul homme aurait fait un livre desprédictions de Jésus-Christ, pour le temps et pour lamanière, et que Jésus-Christ serait venu conformémentà ces prophéties, ce serait une force infinie. Maisil y a bien plus ici. C’est une suite d’hommes, … qui,constamment et sans variation, viennent, l’un en suitede l’autre, prédire ce même avènement.» Pascal, Pensées,II, vi, 13, édit. Guthlin, Paris, 1896, p. 177. Et,cette variété de peintres ne nuit en rien à l’unité dutableau. «Dans cette multitude de peintres, se servantde pinceaux différents, chacun d’eux contemple le mêmepersonnage; mais aucun d’eux ne voit sa physionomietotale. Ils annoncent tous le même événement; maisnul ne l’annonce tout entier. Ils se lèvent à leurheure; ils donnent un trait, un coup de pinceau; puisils disparaissent sans se douter de ce qu’est ce trait, cecoup de pinceau dans l’ensemble… Et cependant, deces touches multiples, de ces coups de pinceau si divers,jetés sur la toile, de siècle en siècle, naît une peintured’une unité si profonde, qu’on sent bien qu’il y a unemain unique sous toutes ces mains, un regard souverainqui voit le tout et qui, seul, a le secret de cettepeinture anticipée et lumineuse du Christ qui va venir.» Bougaud, Le christianisme et les temps présents,Paris, 1878, t. iii, p. 516. Cf. S. Irénée, Cont. hxres.,

iv, 33, 10, t. vii, col. 1079. — 2. Parmi ces textesmessianiques, la plupart sont pris dans le sens littéral, c’est-à-dire qu’ils ne se rapportent à aucun autrepersonnage que le Messie futur. D’autres textes sontpris dans le sens spirituel, se rapportant à un premierobjet, puis, dans un sens supérieur et figuratif, auMessie. C’est ainsi que le texte: «Vous ne briserezaucun de ses os,» Exod., xii, 46; Num., ix, 12, est entendu de Jésus-Christ par saint Jean, six, 36. Lesparoles: «Je serai pour lui un père et il sera pourmoi un fils,» II Reg., vii, 14, dites à propos de Saloinon, sont ensuite appliquées au Fils de Dieu. Heb., i,5. David célèbre l’ascension de l’arche sur le montSion: «Tu montes en haut, traînant les captifs à tasuite, tu reçois les présents des hommes, même desrebelles,» Ps. lxviii (lxvii), 19, et saint Paul appliquedirectement ces paroles à l’ascension du Sauveur.Eph., iv, 8, etc. Enfin il arrive quelquefois que les écrivains du Nouveau Testament allèguent comme textesprophétiques des passages qui ont littéralement un autresens dans l’Ancien Testament. La parole d’Osée, xi, 1: «J’appelai mon fils hors de l’Egypte,» dont saint Matthieu, ii, 15, signale l’accomplissement au retour de l’enfant Jésus, après son exil, est une prophétie dans lesens spirituel; elle a trait originairement à la sortied’Egypte des Hébreux. Le même Ëvangéliste, parlantdu séjour de Notre-Seigneur à Nazareth, dit que c’estpour l’accomplissement de ce qui a été écrit par les prophètes: «Il sera appelé nazaréen.» Matth., ii, 23. Oraucun prophète ne fait mention du séjour du Messie àNazareth. Mais Isaie, xi, l, appelle le Messie nêsér, <s. rejeton,» et d’autres, puisque samtMatthieu vise plusieursprophètes, lui donnent le nom équivalent de sémah, «germe.» Jer., xxiii, 5; Zach., iii, 8 (Vulgate: Oriens).Ce nom suffit à l'écrivain sacré pour justifier son allusion.On trouverait un autre exemple d’accommodation encorebeaucoup plus saillant en comparant Deut., xxx, 11-14,avec la citation que saint Paul en fait et l’argumentqu’il en tire. Rom., x, 4-9. Dans les textes de cette dernière espèce, il nous serait difficile de reconnaître àpremière vue des prophéties messianiques. Si lesApôtres leur ont attribué cette valeur et s’ils ont raisonné en conséquence, c’est que ce genre d’interprétation avait des bases réelles et qu’en tous cas il étaitaccepté comme parfaitement démonstratif par leurs contemporains. Or, l’un des buts principaux des écrivainssacrés du Nouveau Testament était de faire accepterJésus-Christ comme le Messie, en montrant en lui laréalité de ce qu’avaient annoncé les prophètes. Il leurétait donc loisible de se servir, dans certains cas, desrapprochements qu’autorisait sans difficulté l’exégèse deleur temps. Pour nous, qui avons tant d’autres arguments à notre disposition, nous pouvons nous en teniraux prophéties messianiques dont le sens littéral estdémontrable ou dont le sens spirituel est suffisammentautorisé, et négliger celles qu’acceptait au temps desApôtres une exégèse moins rigoureuse que la nôtre. —3. À prendre les prophéties messianiques dans leur sensobvie et naturel, on est logiquement obligé de reconnaître qu’elles ont en vue un homme et non une collectivité quelconque. Quand, par exemple, Jérémie,xxxru, 16-18, écrit: «David ne manquera jamais d’unsuccesseur assis sur le trône de la maison d’Israël; lesprêtres et les lévites ne manqueront jamais devant moide successeurs, pour offrir les holocaustes, brûler l’encens avec les offrandes et faire les sacrifices quotidiens, «les Juifs étaient exposés, en s’en tenant au sens littéral,à compter sur une dynastie perpétuelle qui assureraitleur prospérité et sur un sacerdoce lévitique non moinsdurable. Mais, près de deux siècles avant Jérémie,Isaïe avait formellement présenté cette descendanceroyale de David, destinée à régner à jamais, sous lestraits d’un enfant nouveau-né, qui était en même temps

I le Dieu fort, l’Emmanuel, en un mot le Messie hommeet Dieu. Is., vii, 14; ix, 6; xi, 1; xvi, 5, etc. — Le Messieest encore annoncé par les prophètes comme «serviteurde Jéhovah». Ce serviteur apparaît comme prophète,prédicateur de la vérité, en butte à la souffrance et victimede la mort pour les péchés de son peuple, sans qu’ilsoit rattaché à la descendance de David, ni investi de laroyauté. Mais ce serviteur ne peut être collectivementni le peuple d’Israël, ni même l'élite de ce peuple.Isaïe, xlix, 6, distingue très nettement le serviteur d’avecle peuple: «C’est peu que tu sois mon serviteur pourrestaurer les tribus de Jacob et convertir les restesd’Israël: je t'établis pour être la lumière des nations.» D’ailleurs, on convient généralement que le chapitre Lindu même prophète décrit des souffrances individuelleset nullement celles d’une collectivité. Il faudrait endire tout autant du psaume xxi. Ce qui prouve encorece vrai sens des prophéties messianiques, c’est qu’ellestrouvent dans la vie de Jésus-Christ une explicationet une réalisation pleinement satisfaisantes, tandisqu’entendues d’un peuple ou d’une collectivité quelconque, elles cadrent mal avec l’hisloire et ne s’expliquent qu'à condition d'être dénaturées. — 4. Quelqueopinion qu’on puisse adopter sur la date où ont été formulées les prophéties messianiques, on est forcé d’admettre qu’elles sont toutes antérieures d’au moins quatrecents ans à Jésus-Christ. Là est leur valeur probante.Peu importe, d’ailleurs, qu’elles aient été plus ou moinsbien comprises par leurs auteurs, qu’elles aient été entendues par les Juifs dans un sens ou dans l’autre. Lesprophéties ne s’expliquent clairement, pour l’ordinaire,qu'à la lumière des événements. Jésus-Christ est venu,il a vécu et il est mort comme l’avaient dit les prophètes,et, du même coup, sa vie a expliqué les prophéties et lesprophéties ont prouvé son caractère messianique. —Sur les prophéties messianiques, voir S. Justin, Dialog.cum Tryphon., 5X1-55, 66, 108, t. vi col. 586; cf. Freppel, S. Justin, Paris, 1869, p. 387-390; S. Augustin, Deav. Dei, xviii, 28-35, t. xli, col. 584-596; Huet, Démonst.evang., dans les Démonst. évang. de Migne, t. v, col.487-934; Stanhope, Défense de la religion chrétienne,ibid., 1843, t. vi, col. 530-542; Hooke, De vera religione,dans le Cursus theol. de Migne, 1853, t. iii, col. 66-149;Meignan, Les prophéties messianiques, Paris, 1858;Les deux premiers livres des Rots, Paris, 1878; David,Paris, 1889; Les prophètes d’Israël, Paris, 1892; Reinke,Die messianischen Weissagungen bei den Propheten,Giessen, 1859; Tholuck, Die Prophelen und ihre Weissagungen, Gotha, 1860; Morisot, Le Christ avant Bethléem, Paris, 1870; Castelli, Il Messia secundo gli Ebrei,Florence, 1874; Bougaud, Le christianisme et les tempsprésents, Paris, 1878, t. iii, p. 518-558; Trochon, Introduction générale aux prophètes, Paris, 1883, p. lixcxiv; Schelling, Vaticinia messiana in modum chrestomathix hebraicw, , Ljon, 1883-1884; De Bolle, Christologia Antiqui Testamenti, Evere, 1884; Frz. Dehtzsch,Messianische Weissagungen in geschichtlichen Folge,Leipzig, 1890; De Broghe, Questions bibliques, Paris,1897, p. 321-380.

m. l’attente du messie par les juifs. — 1° Époquede la venue du Messie. — Deux prophéties permettaientaux Juifs de savoir à peu près exactement l'époque àlaquelle paraîtrait le Messie. —1. La première était cellede Jacob annonçant que «le sceptre ne sortirait pas deJuda ni le bâton de commandement d’entre ses pieds» jusqu'à ce que vienne celui qu’on attendait. Gen., XLIX,10. Cette prophétie semblait très claire en elle-même;mais l’histoire montre que son accomplissement souffrit des intermittences. Tout d’abord, le sceptre n’estmis aux mains de Juda qu'à l’avènement de David. Ceroi et son fils Salomon commandent seuls à toute la nation. Leurs successeurs ne régnent que sur deux tribus.La captivité vient interrompre ce règne. Zorobabel, qui

préside au retour des exilés, est le petit-fils ou le petit-neveudu roi de Juda, Jéchonias, I Par., iii, 19; Matth.,i, 12; il est réellement le chef de la nation, quoiqu’il nesoit qu’un simple gouverneur de province sous l’autoritédu roi de Perse. Néhémie, qui vient ensuite, appartientvraisemblablement à la tribu de Juda, mais n’exercequ’un pouvoir subordonné. Près de trois siècles plustard, les Machabees régnent plus réellement pendant environl’espace d’un siècle, mais ils sont de la tribu deLévi. Enfin, en l’an 40, un étranger iduméen, Hérode,reçoit du sénat romain le titre de roi de Judée. Peu detemps après, le peuple juif achève de perdre son indépendanceet cesse pour toujours de former un corps denation. C’est à ce moment-là même que Jésus-Christ,fils de David, de la tribu de Juda, prend spirituellement,et pour toute la suite des siècles, le sceptre de son ancêtre.Les Juifs, avec les fausses idées qu’ils se faisaientd’un Messie conquérant, n’avaient pas compris la prophétiede Jacob dans son sens véritable. Ils n’en attendaientpas moins le Messie vers l’époque où il est venuen effet. — 2. La prophétie de Daniel, ix, 20-27, avaitbeaucoup plus de précision. Avant l’événement, il estvrai, elle pouvait prêter à quelque hésitation, mais cettehésitation se limitait à un champ très restreint. Si l’annéeexacte de l’apparition du Messie ne pouvait êtredéterminée, l’époque générale pouvait l’être avec certitude,à sept ou huit années près. Voir Daniel, t. ii,col. 1277-1282, et Revue biblique, 1892, p. 65-79; 1893,p. 439-440.

Les derniers livres inspirés.

Sans rien ajouter

d’essentiel aux anciennes révélations des prophètes, ceslivres s’y référaient cependant et entretenaient ainsi lafoi au Messie attendu. L’auteur de l’Ecclésiastique ne parlepas expressément de celui que l’on espère; mais il estfacile de reconnaître l’expression de l’attente généraledans les paroles de sa prière: «Renouvelez les prodiges,reproduisez les merveilles… Brisez la tête deschefs ennemis qui disent: Il n’y en a pas d’autre quenous! Rassemblez toutes les tribus de Jacob… RemplissezSion de vos oracles ineffables et votre peuple devotre gloire. Rendez témoignage à ceux qui sont vos créaturesdepuis le commencement et réveillez les prédictionspubliées en votre nom!» Eccli., xxxvi, 6-17. Il ya là un appel à l’intervention de Dieu de qui Israël attendla délivrance, comme l’ont promis les anciens prophètes.— Dans le livre de la Sagesse, la notion de laSagesse personnelle s’inspire de la définition des Proverbes,vin, 22, et fait déjà pressentir le Logos de saintJean. Sap., vii, 24-29. Mais surtout l’auteur sacré trace,des persécutions et de la mort du Juste, un tableaupresque évangélique, qui montre le dessein de la Providencede ne pas laisser perdre de vue l’idée d’un Messiesouffrant: «Que notre force soit la loi de la justice: cequi est faible ne semble bon à rien. Traquons donc lejuste, puisqu’il nous est inutile, qu’il est opposé à notremanière d’agir, nous reproche de violer la loi et nousfait honte avec les fautes de notre conduite. Il prétendposséder la science de Dieu et même s’appelle fils deDieu. Il se fait le révélateur de nos pensées. Sa vuemême nous est insupportable, parce que sa vie n’est pascomme celle des autres et qu’il se conduit tout autrement.Nous passons à ses yeux pour des êtres futiles, ils’abstient de notre manière de vivre comme d’une immoralité,préconise la fin des justes et se vante d’avoirDieu pour père. Voyons donc si ce qu’il dit est vrai; faisonsl’épreuve de ce qui lui arrivera et nous verronsbien comment il finira. S’il est vraiment fils de Dieu,Dieu prendra sa défense et l’arrachera aux mains de sesadversaires. Infligeons-lui les outrages et les tourments,nous nous rendrons compte de sa constance et nousconstaterons sa patience. Condamnons-le à la mort laplus honteuse; on verra alors ce qu’il faut penser de sesdiscours.» Sap.* ii, 11-20. C’est, tracé au vif, tout le

programme des Juifs qui ont condamné et mis à mortleur Messie.

Les apocryphes juifs. — En dehors des livres inspirés,l’idée messianique se retrouve dans les écrits juifs oud’inspiration juive dont la composition précède ou suitde près l’époque évangélique. Mais cette idée est complexe.Elle comprend un certain nombre de notions qui,de fait, se rattachent étroitement à l’œuvre messianique,et sont également formulées dans le Nouveau Testament.— 1. Des troubles et des désordres de toutessortes se manifesteront d’abord dans le monde physique,le monde social et le monde moral. Apoc. Baruch., 70,2-8; IV Esd., vi, 24; ix, 1-12, xiii, 29-31; MischnaSota, ix, 15. Ces idées semblent s’appuyer sur Osée, un,13, et Dan., xii, 1 (hébreu): «Ce sera une époque dedétresse telle qu’il n’y en a pas eu depuis qu’il existe desnations jusque maintenant.» — 2. Elie apparaîtra ensuitecomme précurseur. Eduioth, viii, 7; Baba mezia,i, 8; ii, 8; iii, 4, 5. Il est fait allusion à ce rôle d’Éliedans le Nouveau Testament. Matth., xvii, 10-12; Marc,ix, 10-12; Joa., i, 21-25. Voir Eue, t. ii, col. 1675-1676.

— 3. Alors viendra le Messie, pour remporter la victoiresur les puissances ennemies. Orac. Sybil., iii, 652-656;Psalm. Salom., xvii, 24-41; Philon, De præmiu etpœnis, 16. On l’appelle «oint», ou «messie», Henoch,xlviii, 10; lii, 4; Apoc. Baruch., xxix, 3; xxx, 1, etc.;Psalm. Salom., xvii, 36; xviii, 6, 8; Beracholh., i, 5;Sota, ix, 15; «fils de l’homme,» Henoch, xlvi, 1-4;xlviii, 2; lxix, 26, 27, etc.; «élu,» Henoch, xlv, 3, 4;xlix, 2; li, 3, 5, etc.; cf. Luc., xxiii, 35; «fils de Dieu,» Henoch, cv, 2; IV Esd., vii, 28, 29; xiii, 32, 37, 52;xiv, 9; «fils de David,» Psal. Salom., xvii, 5-23;IV Esd., xii, 32. En tous ces passages, il est nettementquestion d’un être individuel, d’un personnage qui seraun «roi saint», àyvbç ava£, venant fonder sur la terreun royaume immortel. Orac. Sybil., iii, 48-50, 652-656.Les livres juifs sont formels sur la personnalité du Messie.Ce n’est donc ni sur leurs interprétations, ni surl’exégèse impartiale des textes bibliques qu’on peuts’appuyer pour soutenir que le «messie», le «fils del’homme», etc., ne désignaient pour les auteurs sacrésque la nationalité israélite prise, collectivement. Cf.Daniel, t. ii, col. 1273; Fabre d’Envieu, Le livre du prophèteDaniel, Paris, 1890, t. ii, 1 «part., p. 595-598.On croyait d’ailleurs que le Messie apparaîtrait subitement,sans qu’on sût d’où il venait. Joa., vii, 27. Quantà l’idée d’un Messie souffrant, on ne la trouve que trèsexceptionnellement chez les auteurs juifs, et encore dansdes écrits postérieurs à la prédication évangélique.Sanhédrin, 936, 98 a. Dans saint Justin, Dxalog. cuniTryph., 89, 90, t. vi, col. 690, Tryphon confesse que leMessie doit souffrir, ainsi qu’il est clairement annoncédans les Écritures; il conteste seulement qu’il puissesouffrir sur une croix. Mais on peut dire que, dans lestemps immédiatement antérieurs à Jésus-Christ, pasplus que durant sa vie, les Juifs n’ont jamais acceptél’idée que leur Messie pût souffrir. Cf. Wunsche, Yssûrêham-màSiah oder die Leiden des Messias, Leipzig, 1870.

— 4. Le combat définitif sera livré aux puissances ennemies.Orac. Sybil., iii, 663; IV Esd., xiii, 33; Henoch,xc, 16. L’ennemi spécial du Messie doit être l’Antéchrist,Apoc. Baruch., 40, l’Armilus du Talmud. Buxtorf, Lexic.on chald. et talm., col. 221-224. — 5. Ces puissancesseront anéanties. Assumptio Mosis, x; Apoc. Baruch.,xxxix, 7-xl, 2; lxxii, 2-6; IV Esd., xii, 32, 33; xiii,37, 28, 35-38. — 6. Jérusalem sera renouvelée. Ce pointde vue a sa raison d’être dans les anciennes prophéties.Is., uv, lx; Ezech., xl-xl viii, Agg., ii, 7-9; Zach., ii, 617 (Vulgate, 1-13); cf. Apoc. Baruch., IV, 2-6; IV Esd.,x, 44-59. Henoch, lui, 6; xc, 28, 29. — 7. Les dispersésd’Israël seront rassemblés. Psal. Salom., xi; xvii, 34;IV Esd., xiii, 37-49. Cf. S. Jérôme, In Joël., iii, 7, t. xxv,col. 982. — 8. La Palestine sera le centre du grand »

royaume messianique universel. Ce grand royaume auraDieu pour chef suprême. Orac. Sybil, iii, 704-706, 756759; Psal. Salom., rvn, 1, 38, 51; Josèphe, Bell. jud., II,vin, 1. La Palestine devient alors le siège d’un roi quicommande au monde entier. Orac. Sybil., M, 698-726,766-783; Henoch, XC, 30, 37; Apoc. Baruch., lxxii, 5;Assumptio Mosis, x, 8. On prend ainsi à la lettre ce quia été dit par les prophètes dans un sens spirituel. Is.,xi, 10; xlii, 1-6; liv, 4, 5; Jer., iii, 17; xvi, 19; Soph.,h, 11; iii, 9; Zach., ii, 13; viii, 20; xiv, 9, etc. Dans ceroyaume, on jouira de tous les biens; ce sera le retourde l’âge d’or. Orac. Sybil., iii, 371-380, 620-623, 743-750,787-794; Apoc. Baruch, xxix, 5-8; lxxiii, 2-8; lxxiv,1; Henoch, x, 18, 19; Philon, De præmiis et pœnis, 15,16, 20. £t la durée de ce royaume sera sans fin. Orac.Sybil., iii, 49, 50, 766; Psal. Salom., xvii, 4; Henoch,ixii, 14. Ces idées sur le futur royaume palestinien percèrentjusque dans le monde païen et furent signaléespar Tacite, Hist., v, 13, et Suétone, Vespas., 4. Cf.Josèphe, Bell. jud., VI, v, 4. — 9. Il y aura une rénovationdu monde, une itaXiYY&veuta. Matth., xix, 28;Henoch, xlv, 4, 5; Apoc. Baruch., lxxiv, 2, 3; Berachoth,i, 5. — 10. Ensuite viendra la résurrection,Henoch, li, 1; Psal. Salom., iii, 16; xiv, 2; Apoc.Baruch., xxx, 1-5, L, 1-u. 6; IV Esd., vii, 32; Sanhédrin,x, 1; Aboth, iv, 22, pour les âmes justes qui sontdéjà dans l’autre vie, Josèphe, Ant. jud., XVIII, i, 3; cf.S. Justin, Dial.cum Tryphon., 5, t. vi, col. 488; ce quin’exclut pas la résurrection générale pour le jugement.Sanhédrin, x, 3; Aboth, IV, 22. — 11. Enfin, le jugementdernier décidera pour l’éternité du bonheur ou dumalheur de chacun. Apoc. Baruch., L, 4; li, 4, 5;IV Esd., vii, 33-44; Henoch, xcviii, 7, 8; civ, 7; Aboth,H, 1, etc. — Toutes ces idées représentent la croyancedes Juifs par rapport au Messie et à son règne. Elless’inspirent des écrits des prophètes, mais transportentsouvent dans le domaine temporel ce que les écrivainssacrés ont annoncé dans un sens purement spirituel.Cf. Soloweyczjk, La Bible, le Talmud et l’Évangile,Paris, 1875, p. 100-115. C’est ce qui fait que la questionposée par Pilate au Sauveur: «Es-tu le roi des Juifs?» pouvait être entendue soit dans un sens purement messianiqueet spirituel, soit dans un sens temporel. Notre-Seigneur,pour dissiper l’équivoque, demande à Pilates’il parle ainsi d’après d’autres ou de sa propre initiative.Les autres, les princes des prêtres, donnaient alors à cetitre une portée politique. Pour lui, il se dit roi, maisdans un sens qui ne peut offusquer le procurateur. Joa.,xviii, 34-38. Cf. Schurer, Geschichte des jûdischen Volkes,Leipzig, 1898, t. ii, p. 498-556, et les auteurs qu’ilcite, p. 496.

4o Le vrai sens des prophéties messianiques.

Les

traces de ces croyances sont manifestes dans plusieurspassages de l’Évangile; les Apôtres ou les J uifs y parlentsuivant les idées qui ont cours, et parfois Notre-Seïgneurles approuve; d’autres fois, il est obligé de redresserleurs croyances erronées. Ainsi: 1, de grandescatastrophes doivent se produire; le Précurseur signaleavec raison «la colère à venir», Matth., iii, 7, et «lacognée à la racine de l’arbre». Luc, iii, 9. Mais la vengeancene doit s’exercer qu’après le déicide, à la ruinede Jérusalem. Matth., xxiv, 4-22; Marc, xiii, 5-20; Luc,xxi, 8-24. C’est du reste dans cet ordre que Daniel, IX,26, 27, avait annoncé les événements. — 2. Élie estattendu. On demande à Jean-Baptiste s’il n’est pas Élie,Joa., i, 21, et, après la mort du précurseur, plusieurscroient que Jésus lui-même est Élie. Marc, VI, 15; Luc,ix, 8. Les Apôtres remarquent que les scribes comptentsur un retour préalable d’ÉHe. Matth., xvii, 10. Notre-Seigneurrépond qu’en effet Élie est déjà venu, Matth.,xvii, 12; Marc, ix, 11, 12, en la personne de Jean-Baptiste,qui avait en lui l’esprit et la puissance de l’ancienprophète. Luc, i, 17. — 3. Les prophéties qui marquent

l’époque du Messie ont été suffisamment comprises. Aumoment où paraît Notre-Seigneur, Jes princes des prêtresne sont pas étonnés que les mages parlent de la naissancedu «roi des Juifs», c’est-à-dire du Messie, et sans hésiter ilsenvoient à Bethléhem pour le trouver. Matth., ii, 2. Laseule chose qui les trouble, c’est que des étrangersconnaissent avant eux cet événement. La Samaritainesait que le Messie va venir. Joa., iv, 25. Jean-Baptisteenvoie ses disciples demander à Jésus-Christ s’il est «celui qui doit venir», Matth., xi, 3; les Juifs adjurentle Sauveur de leur dire s’il est le Christ, Joa., x, 24, etle peuple le salue en cette qualité. Joa., vii, 26; Matth.,xi, 2-5. Tous se croient donc bien à l’époque marquéepour la venue du Messie. Sur son origine, on se réfèretantôt à la prophétie qui le fait venir de Bethléhem,Matth., ii, 6; Joa., vii, 42, ce qui exclut naturellementNazareth, Joa., 1, 46; vil, 52; tantôt à cette croyance, inspiréesans doute par lsai’e, lui, 8 (Septante), qu’on nesaura pas d’où vient le Messie. Joa., vii, 27. Quant àl’idée d’un Messie souffrant, elle répugne visiblement àtous les personnages évangéliques, qui, sur ce point, partagentcomplètement les préjugés de leurs contemporains.Quand Notre-Seigneur annonce sa passion et sa mort, lesApôtres sont décontenancés, saint Pierre observe avecinsistance qu’un pareil dénouement n’est pas possible,Matth., xvi, 22; Marc, viii, 33, et la foule oppose audivin Maître cet axiome que, «d’après la loi, le Christdemeure éternellement.» Joa., xii, 34. La remarque quefait à ce sujet l’évangéliste permet de conclure qu’on necroyait pas à l’accomplissement de cet oracle d’Isaie,lui, 1, qui commence par les mots: «Qui a cru à notreprédication?» Joa., xii, 37, 38. En livrant son Maître,Judas partageait sans doute cette persuasion; de là sonétonnement quand il vit mener Jésus à la mort. Matth.,xxvii, 3. Aussi, dans son entretien avec les disciplesd’Emmaus, Notre-Seigneur s’applique-t-il à établir que,contrairement aux idées reçues, il fallait que le Christsouffrît. Luc, xxiv, 26. Il est certain que, sous l’empirede ces préjugés, les Apôtres n’avaient rien compris auxannonces réitérées que Jésus-Christ leur avait faites de sapassion et de sa résurrection. Quand saint Jean veutexpliquer la foi tardive que Pierre et lui-même ont prêtéeau fait de la résurrection, il dit seulement: «Ils nesavaient pas encore l’Écriture,» Joa., xx, 9, sans mêmeque sa pensée se reporte alors aux prédictions si précisesdu Sauveur. — 4. Le combat contre les puissances ennemiesest livré par Jésus-Christ contre le démon, qui seplaint que le Sauveur vient le perdre. Luc, iv, 31. —5. La puissance anéantie est celle du démon, le princede ce monde qui sera jeté dehors. Joa., xii, 31. — 6. LaJérusalem renouvelée ne sera pas la cité terrestre, maisla cité céleste et spirituelle, qui est l’Église, la Jérusalemnouvelle. Apoc, iii, 12 j xxi, 2. — 7. Les dispersésd’Israël, ce sont les autres brebis qui ne sont pas dubercail du Sauveur, qu’il se propose lui-même de rameneret qui écouteront sa voix. Joa., x, 16. L’idée quele Messie puisse se tourner vers les gentils choque manifestementles Juifs. Matth., xxi, 43, Joa., vii, 35. —8. Enfin, le grand royaume, c’est celui dans lequel Jésus,descendant de Jacob et de David, doit régner sans fin.Luc, r, 32, 33. Lui-même salue Jérusalem commela «cité du grand roi», Matth., v, 35, et envoie sesApôtres pour publier 1’«Évangile du royaume»,Marc, I, 14, et le «royaume des cieux», Matth., iv, 17;x, 7; ou «royaume de Dieu». Marc, I, 15; Luc, iv, 43;x, 11; Joa., iii, 5. Ce royaume est d’ordre tout spirituelet ne ressemble pas à ceux de ce monde. Joa., xviii, 36oMais les Apôtres, pas plus que les Juifs, ne l’entendentainsi. Le tentateur traduit fidèlement leur pensée quandil fait passer les royaumes de ce monde sous les yeuxdu Sauveur et lui dit: «Je te les donnerai tous!» Matth., IV, 8, 9. C’est bien là la royauté que rêvent lesJuifs. Les deux fils de Zébédée osent demander les deux

premières places dans ce royaume. Matth., xi, 21.Notre-Seigneur a beau dire que le royaume de Dieu,royaume tout spirituel, existe déjà au milieu des Juifs,depuis le commencement de la prédication évangélique.Luc, xvii, 20-21. Les deux disciples d’Emmaùs avouentqu’ils espéraient que Jésus de Nazareth «rachèteraitIsraël», Luc, xxiv, 21, c’est-à-dire le délivrerait dujoug des nations et le mettrait à leur tête. Bien plus, aujour même de l’Ascension, les Apôtres en sont encore àposer cette question: «Seigneur, est-ce à présent quevous allez rétablir le royaume d’Israël?» Act., i, 6.C’est, d’ailleurs, comme chef de ce royaume que le Messieest appelé roi des Juifs, et ce titre de «roi desJuifs» est donné à Notre-Seigneur, tantôt sérieusement,Matth., ii, 2; xxvii, 11; Marc, xv, 2; Luc, xxiii, 3;Joa., xviii, 33; tantôt par dérision. Matth., xxvii, 29, 37;Marc, xv, 9, 12, 18, 26; Luc, xxiii, 37, 38; Joa., xviii,39; xix, 3, 14, 19. C’est pourquoi les grands-prêtresprotestent contre cette attribution. Joa., xix, 15, 21. — Al’époque où vint Notre-Seigneur, les Juifs attendaientdonc. vraiment le Messie, celui qu’avaient annoncé lesprophètes, mais dont la notion avait été assez gravementdéfigurée par les préjugés nationaux.

III. Nativité de Jésus, son enfance et sa vie cachée.— I. avant la naissance. —1° La préexistence.

— Saint Jean commence son Évangile en disant ce qu’estdans l’éternité celui qui a voulu apparaître dans letemps. Dans le principe, alors que Dieu créa le monde,Gen., i, 1, déjà le Verbe était. Il est donc antérieur àtout ce qui a été créé. Il était itpôç tôv ©eôv, «près deDieu,» c’est-à-dire près du Père, par conséquent distinctde lui, et Dieu lui-même, possédant la nature divine.Par rapport à la créature, il est auteur de touteschoses, sans exception; c’est donc par son Verbe que lePère a créé le monde. En lui était la vie, vie qui est lalumière des hommes et leur salut. Le Verbe est doncl’auteur de la grâce aussi bien que de la nature. S’il atout créé, sans qu’aucun être put venir à la vie autrementque par lui, c’est aussi lui qui illumine tout de salumière surnaturelle, sans que les ténèbres de l’erreuret du mal puissent l’empêcher de luire, Sap., vii, 10,30; Joa., xii, 35, ou veuillent être éclairées par elle.Joa., iii, 19; Rom, , 1, 21. Jean-Baptiste a été envoyépour rendre témoignage à ce Verbe et attirer le regarddes hommes sur cette lumière. Mais celui que Jean-Baptistea montré préexistait à tous les hommes. Ilétait la lumière qui éclaire tout homme, et cettelumière venait maintenant en ce monde, Èp-/du.evov elçtov xô(Tjji.ov, mots que la Vulgate, probablement avecmoins de raison, applique à l’homme lui-même. Venanten ce monde, dans le domaine qui lui appartient, cettelumière vivante est méconnue et rejetée. Ceux-là seulsla reçoivent qui, ne se contentant pas des aptitudes etdes désirs de la vie purement naturelle, obtiennent deDieu une vie supérieure, par la foi en ce Verbe quis’est fait chair. Voir Incarnation, col. 863, et Verbe.Le Verbe fait chair a donné aux hommes des preuvesde sa venue: il a habité parmi eux et ils ont pu l’entendre,le voir, le toucher, I Joa., i, 1; et pour faire reconnaîtresa qualité de Fils unique du Père, il a laissé éclatersa gloire et s’est montré rempli de grâce et de vérité.Joa., 1, 1-14. C’est par ces quelques traits que saint Jeanprélude à l’histoire de Jésus-Christ, publiant tout d’abordsa divinité et attribuant la méconnaissance de cettedivinité à l’état d’esprit de ceux qui ne veulent pas selaisser élever à la vie surnaturelle. — Voir Knabenbauer,Evang. sec. Joan., Paris, 1898, p 62-85; W. Baldensperger,Der Prolog des vierten Evangelium, Fribourg-en-Brisgau,1898; Revue biblique, Paris, 1899, p. 151-155,232-248; 1900, p. 1-29, 378-399.

L’Annonciation.

Avant que son Fils apparaisse

sur la terre. Dieu, qui a fait taire les prophètes depuisquatre cents ans, intervient à nouveau pour avertir qu’en

fin le grand événement va se produire. Tout d’abord,c’est la naissance du précurseur qui est annoncée. Luc,I, 5-25. Celui-ci sera l’enfant du miracle, car Elisabethsa mère est déjà avancée en âge. Il naîtra de race sacerdotale,marquant ainsi la principale raison d’être dusacerdoce lévitique, qui a été de préparer le Messie parle culte figuratif rendu à Dieu. Voir Jean-Baptiste,col. 1156. L’ange Gabriel, le messager de l’incarnation,voir Gabriel, col. 23, est envoyé, six mois plus tard, à lavierge Marie, descendante de David, dans la ville de Nazareth,et lui annonce le choix que Dieu a fait d’elle.L’enfant auquel elle donnera le jour sera le Fils du Très-Hautet il occupera à jamais le trône de David, doublecaractère que les prophéties ont attribué au Messie. Surune question bien naturelle de Marie, l’ange, après avoirindiqué la fin. fait connaître le moyen que Dieu se proposed’employer. L’incarnation se produira par l’opérationdu Saint-Esprit. Ce sera là une muvre de puissance,qui vient d’avoir un prélude démonstratif, la conceptionextraordinaire d’Elisabeth. Marie, alors, donne son assentiment.Luc, i, 26-38. Voir Annonciation, t. i, col.649-654. À ce moment même s’opère le mystère de l’incarnation.Cf. V. Rose, La conception surnaturelle deJésus, dans la Revue biblique, 1899, p. 206-231; Bardenhewer,Zur Geschichte der Auslegung der Worle Luc,i, 34, dans le IV’Congrès scient, internat, des catholiques,Fribourg, 1897, IIe sect., p. 13-22. Sur la généalogiede Jésus et sa descendance de David, voir Généalogiede Jésus-Christ, col. 166-171.

La Visitation.

Considérant la.nouvelle que l’ange

lui a donnée comme une sorte d’invitation, Marie se rendauprès de sa cousine Elisabeth, qui salue en elle la «mère de son Seigneur». La Vierge exhale alors sessentiments dans un cantique tout inspiré des penséesdes prophètes. Luc, I, 39-55. Cf. G. Morin, dans la Revuebiblique, 1897, p. 286-288; A. Durand, L’originedu Magnificat, dans la Revue biblique, 1898, p. 74-77;1901, p. 630-631. Le séjour de Marie auprès d’Elisabethaboutit à la naissance de Jean-Baptiste, sans que le textede saint Luc, i, 56, permette d’établir si, oui ou non,elle assista à cet événement. Cf. Knabenbauer, Etang,sec. Lue., Paris, 1896, p. 88.

L’hésitation de saint Joseph.

Saint Joseph était

uni à Marie par le mariage. Voir Fiançailles, t. ii, col.2231. L’état dans lequel il vit bientôt son épouse le troublaet il songea à la quitter. Un ange l’avertit de ne rienen faire. Ce qui était en elle venait du Saint-Esprit. Josephdut néanmoins exercer l’office de père en imposantson nom à l’Enfant, et ce nom était Jésus, parce que cetenfant devait sauver le peuple de ses péchés. Matth., i,18-21. À Marie, l’ange avait annoncé Jésus comme Fils deDieu et héritier du trône de David. Mais ce second titrene doit pas pas être pris dans un sens temporel, et Josephest averti que l’Enfant qui va naître sera un sauveur,venu pour racheter les péchés. — Joseph obéit àl’ordre du ciel et demeura avec Marie. La prophétie de Michée,v, I, désignait Bethléhem comme le lieu de la naissancedu Messie; cependant Marie résidait à Nazarethet n’avait aucune raison de quitter cette ville. Le recensementordonné par l’empereur Auguste l’obligea à partirpour Bethléhem avec Joseph. Voir Cyrinus, t. ii, col.1188-1191. — Sur la date de la naissance de Notre-Seigneuret sur celle des principaux événements de sa vie,voir Chronologie biblique, ix, t. ii, col. 734-736.

JJ. la nativité et l’enfance. — 1° La naissance.

— Marie et Joseph arrivèrent à Bethléhem, voir Bethléhem,1. 1, col. 1691-1694, et, ne trouvant point de placedans le khan, voir Caravansérail, t. ii, col. 253-255, ilsse retirèrent dans une grotte, servant d’étable aux animaux.Voir Étable, t. ii, col. 1989; Ane, t. i, col. 572;Bœuf, col. 1837. C’est là que le divin Enfant vint aumonde pendant la nuit et que Marie le coucha dans lacrèche. Voir Crèche, t. ii, col. 1107-1109. Avertis par

III. - 40

des anges qu’il leur était né un «Sauveur, le SeigneurChrist», des bergers du voisinage vinrent lui rendreleurs hommages et répandirent la nouvelle tout autourd’eux. Voir Berger, iii, t. i, col. 1618. Huit jours aprèssa naissance, l’Enfant fut circoncis, voir CIRCONCISION,t. ii, col. 772-779, et on lui donna le nom de Jésus. Luc,n, 1-21. Cf. Ramsay, Was Christ born in Bethléhem?Londres, 1898. Pour l’iconographie, voir Max Schmid,Die Darstellung des Geburt Christi in der bildendenKunst, Stuttgart, 1890.

La présentation au Temple.

Le quarantième

jour, Jésus fut porté au Temple pour y être présenté auSeigneur et racheté par l’offrande de deux oiseaux; carle premier-né appartenait à Dieu. Par sa venue au Temple,le Sauveur réalisa la prophétie d’Aggée, II, 1-10. Lasainte Vierge accomplit de son côté les rites de purificationauxquels l’obligeait légalement sa maternité. VoirImpureté légale, i, 5°, col. 858. Le vieillard Siméon intervintpour saluer en l’enfant Jésus le Sauveur, «lumièrepour éclairer les nations et gloire du peupled’Israël;» puis il prédit à Marie les douleurs dont cetEniant serait pour elle l’occasion et les contradictionsauxquelles il serait lui-même en butte. Siméon rappelaitainsi, sous l’influence du Saint-Esprit, la notion du Messiepersécuté et souffrant. Voir Siméon. La prophétesseAnne vint aussi rendre témoignage à l’Enfant. Luc, ii,22-38. Voir Anne, t. i, col. 630.

L’adoration des Mages.

Des mages venus d’Orient

arrivèrent à Jérusalem, après la naissance de l’enfantJésus, à jine époque que l’on ne peut déterminer, maisqui suivit cette naissance de deux années au plus, ettrès probablement de beaucoup moins. Matth., ii, 16. VoirMages. Ils demandèrent où était né le «roi des Juifs»,dont ils avaient vu l'étoile en Orient. Voir Étoile desmages, t. ii, col. 2037. On les renseigna, d’après la prophétiede Michée, v, 2. À Bethléhem, ils trouvèrent l’Enfantdans une maison, l’adorèrent et lui offrirent desprésents. Matth., ii, 1-12. Ces étrangers réalisaient déjàla parole de Siméon saluant le Messie comme la «luornièrepour éclairer les nations». Luc, ii, 32.

Le séjour en Egypte.

Hérode, qui sentait toujours

son trône mal affermi, savait que les Juifs attendaientun Messie, qu’ils se représentaient comme unroi temporel. Aussi fut-il effrayé de la requête des mages.Avec une hypocrisie et une cruauté qui étaient dans soncaractère, voir Hérode, col. 641-646, il chercha à se renseignersur le nouveau roi, puis fît massacrer tous lesenfants de Bethléhem jusqu'à l'âge de deux ans, comptantavoir ainsi fait périr celui qu’il redoutait. Voir Innocents,col. 879. Mais un avertissement divin avait éfédonné à Joseph, qui s’enfuit en Egypte avec l’Enfant etsa mère et y demeura jusqu'à la mort d’Hérode, arrivéeen mars 750 de Rome, 4 ans avant l'ère chrétienne. Ladurée de ce séjour ne peut être fixée, parce qu’on neconnaît ni la date de la naissance du Sauveur, ni cellede l’arrivée des mages. On ne sait pas davantage en quelendroit d’Egypte résida la sainte Famille. Voir Egypte,t. ii, col. 1620. Après la mort d’Hérode, Joseph reçut unnouvel avertissement divin et quitta la terre d’exil. Maisil craignit de se rendre en Judée, où régnait Archélaus,fils d’Hérode, voir Archélaus, t. i, col. 927, et il retournaà Nazareth, où il habitait avec Marie avant levoyage à Bethléhem. Matth., ii, 12-23. Le séjour en Egypten’est pas mentionné par saint Luc, qui, le passant soussilence, fait retourner la sainte Famille à Nazareth aprèsla présentation. Luc., ii, 39. Il procède ainsi pour aller droità son but, qui est de parler du séjour de Jésus à Nazareth.Peut-être aussi veut-il dire qu’aussitôt après laprésentation, la sainte Famille partit pour Nazareth, etque de là elle revint s'établir à Bethléhem, où les magesse présentèrent ensuite, et où saint Joseph songeaitencore à retourner après l’exil d’Egypte. Matth., Il, 22.. 5° La croissance de Jésus. — Saint Luc en parle deux

fois. Après le récit de la présentation, il dit que «l’enfantcroissait et se fortifiait, plein de sagesse, et la grâcede Dieu était sur lui, an' aix6, in Mo».Luc, ii, 40. Leprogrès n’est ici indiqué que dans l’ordre corporel;quant à l'âme de l’Enfant, elle était pleine de sagesse,par suite de son union personnelle avec la divinité, etla grâce de Dieu, c’est-à-dire sa faveur, sa complaisance,son infinie libéralité s’exerçait envers cet Enfant quis’appelait le «Fils de Dieu». Lorsque Jésus eut atteintsa douzième année, «il progressait,» dit encore saintLuc, ii, 52, «en sagesse, en âge et en grâce devant Dieuet les hommes.» La sagesse est ici en progrès; ce progrèscomportait-il une infusion de plus en plus abondantedes dons divins dans l'âme de Jésus, et un développementréel de ses facultés intellectuelles? SaintAthanase et quelques autres Pères l’ont cru. «C'étaitl’humanité seule qui croissait en sagesse, s'élevant peuà peu au-dessus de la nature humaine, rendue divine,devenant et apparaissant à tous comme l’instrument dela sagesse dont la divinité se servirait pour agir et briller.» S. Athanase, Orat. m cont. Arian., 53, t. xxvi,col. 435. Cette manière d’entendre le texte de saint Lucparaissait fournir un argument plus solide contre lesAriens, en leur montrant que la perfection grandissaitsans cesse en Jésus-Christ. Des auteurs modernes ontadmis cette interprétation. Schanz, Comment, ùb. dosEvang. des heil. Lucas, Tubingue, 1883, p. 148. Mais laplupart des Pères et des théologiens n’ont cru enNotre-Seigneurqu'à un progrès réel de sagesse, celui de lascience expérimentale, provenant des rapports croissantsde la nature humaine du Sauveur avec les choses créées.Quant à la science intuitive, résultant de l’union hypostatique,et à la science infuse, communiquée par la divinitéà l'âme de Jésus, elles auraient été parfaites dèsle début, et il n’y aurait eu progrés que dans leurs manifestations,proportionnées à l'âge de Notre-Seigneur. Ilsuffit qu’il en soit ainsi pour justifier l’expression desaint Luc. Il n’est pas nécessaire d’ailleurs de supposeren Notre-Seigneur, considéré comme homme, la connaissanceactuelle de toutes choses; mais son âme, en rapportimmédiat avec la source infinie de toute science,pouvait y puiser instantanément et sans effort tout cequ’elle voulait connaître. Cf. Pétau, De incarn. Verbi,XI, ii, 1-12; S. Thomas, III», q. vii, a. 12; Suarez, Disp.in m part. S. Th., xviii; Bisping, Erklàr. des Evang.nach Lucas, Munster, 1868, p. 208-212, etc. — La croissanceen âge peut aussi comprendre la croissance entaille; le mot grec, T)Xtxc’a, a les deux sens. C’est unecroissance toute physique. — Il est dit enfin que l’enfantcroissait «en grâce devant Dieu et les hommes». Ils’agit ici d’un progrès que les hommes peuvent constater.La grâce, c’est ce qui rendait Jésus de plus en plusagréable à Dieu, par les vertus qu’il pratiquait et les méritesqu’il acquérait, et de plus en plus aimable auxhommes, par un ensemble de qualités qui le faisaientbien venir de tous, sans cependant trahir sa nature divine.

Le voyage à Jérusalem.

À l'âge de douze ans,

Jésus fut conduit à Jérusalem par ses parents pour lafête de la Pâque. Le voyage se faisait dans des conditionstelles que le divin Enfant put rester dans la villeà l’insu de Marie et de Joseph. Voir Caravane, t. ii,col. 249-250; Fêtes juives, col. 2218; Paque. Au bout detrois jours, ceux-ci le retrouvèrent dans le Temple, interrogeantles docteurs et les émerveillant par sa prudenceet ses réponses. À une observation de sa mère,qui prit alors la parole en vertu d’une autorité supérieure,à certains égards, à celle de Joseph, Jésus répondit: «Ne saviez-vous pas qu’il me faut m’occuper desaffaires de mon Père?» Luc, II, 40-50. Cette réponse démontreque Jésus enfant a pleine conscience de sa qualitéde Fils de Dieu et des devoirs qu’elle lui impose.S’il se renferme pendant de longues années dans le siR

lence et l’obscurité, ce n’est donc ni par ignorance, nipar impuissance, mais uniquement parce qu’il le veut./II. LA VIE cachée. — Après son retour de Jérusalem,Jésus vécut soumis à ses parents. Luc, ii, 51. Il continua à recevoir dans la famille l'éducation qui se donnait habituellement. Voir Éducation, t. ii, col. 1595-1598.Il apprit par conséquent un métier et choisit naturellement celui de son père adoptif, qui était charpentier.Voir Charpentier, t. ii, col. 601. On le connut plustard sous le nom de «fils du charpentier» et «charpentier» lui-même. Matth., mi, 55; Marc, vi, 3. Il exerça cemétier jusqu'à l'âge d’environ trente ans, où il commença son ministère public II suit de là que lui, quiavait à s’occuper des affaires de son Père, y travaillaitde la sorte, ainsi qu’au salut des hommes, aussi efficacement qu’il eût pu faire par des œuvres plus éclatantes.

— Bien qu’appelé «premier-né» de Marie, Luc, ii, 7,Jésus fut son fils unique. Ceux que les évangélistesappellent «frères de Jésus» ne sont que ses cousins.Voir Frère, t. ii, col. 2403-2405. — Pour suppléer ausilence des évangélistes sur l’enfance et la vie cachée duSauveur, des auteurs du premier siècle ont imaginé desrécits plus circonstanciés, le «Protévangile de Jacques%l' «Évangile de saint Thomas», l' «Évangile arabe de l’enfance». Sur la valeur de ces récits, voir Évangiles apocryphes, t. ii, col. 2115-2116. — Cf. Lagrange, Le récit del’enfance de Jésus dans saint Luc, dans la Revue biblique, 1895, p. 160-185; Chauvin, L’enfance du Christ,Paris, 1901.

IV. Ministère public.

La durée exacte du tempsque Jésus-Christ a consacré à la prédication de sonEvangile ne nous est pas connue, bien que la paraboledu figuier stérile, Luc, xiii, 7, donne à penser quecette durée a été probablement d’un peu plus de troisans. Cf. Knabenbauer, Evang. sec. Lucam, Paris, 1896,p. 411, et t. ii, col. 735. Aussi, dans ce résumé de lavie publique du Sauveur, nous abstiendrons-nous desuivre l’ordre chronologique des faits, tel qu’il a puêtre établi pour une période évangélique de trois ans etdemi. On trouvera les faits disposés dans cet ordre àl’article Évangiles (Concorde des), t. ii, col. 2099-2114.Nous préférons les grouper en tenant surtout comptedes milieux dans lesquels Notre-Seigneur a porté labonne nouvelle, ce qui nous permettra de justifier lesdifférences que l’on remarque entre les procédés d'évangéhsation que décrivent les synoptiques et ceux quel’on constate dans les récits de saint Jean.

I. L’INAUGURATION DE LA PRÉDICATION ÉVANGÉLIQUE.

— Pendant la première période de sa vie publique, le Sauveur se présente dans les divers milieux qu’il se proposed'évangéliser, mais sans donner encore à sa prédicationtout son essor. Il ne veut pas interrompre brusquementle ministère de Jean-Baptiste; c’est seulement aprèsl’emprisonnement du Précurseur que lui-même commencera à prêcher sa doctrine. Matth., iv, 12; Marc,1, 14.-1° La prédication de saint Jean-Baptiste. — «Ences jours-là,» c’est-à-dire à une époque indéterminéeavant l’apparition de Notre-Seigneur au milieu des foules,le Précurseur prêchait la pénitence. Il invitait les hommesà se préparer à la venue de quelqu’un qui serait plusgrand que lui, et vis-à-vis duquel il se jugeait indigne deremplir même le rôle d’esclave. Matth., iii, 11; Marc, i,7; Luc, iii, 15. Voir Jean-Baptiste, col. 1157.Il baptisaitdans l’eau du Jourdain. Voir Baptême, t. i, col. 14341435. Mais en même temps il avertissait que le Messiebaptiserait dans le Saint-Esprit. Voir Lagrange, Bethanieou Bethabara, dans la Revue biblique, 1895, p. 502-512.

, — 2° Le baptême de Jésus. — Venu de Galilée, Jésus seprésenta un jour au baptême de Jean. Celui-ci protesta. qu’il avait plutôt à recevoir le baptême de Jésus qu'à luidonner le sien. Mais le Sauveur déclara qu’il y avait là un< actedejustice à accomplir. Pendant que Jean le baptisait,la voix du Père désigna Jésus comme son «Fils bien-aimé»,

et le Saint-Esprit descendit sur lui. Matth., iii, 13-17;Marc, i, 9-11; Luc, iii, 21-23. À ce signe, Jean reconnut que Jésus, dont il n’ignorait pas la mission divine et le caractère messianique, allait commencer à seprésenter publiquement comme le Messie. Joa., i, 33.Cf. Knabenbauer, Evang. sec. Matth., Paris, 1892, t. i,p. 136. De plus, en recevant le baptême de Jean, Jésushonorait le ministère du Précurseur et donnait à entendreque, s’il prenait sa place, ce n'était pas pour évincer unconcurrent, mais pour continuer et parfaire une œuvreque Jean n’avait eu que la grâce de préparer. Cf. Bornemann, Die Taufe Chnsti durch Johannes, Leipzig,1896. — 3° La tentation au désert. — L’Esprit qui étaitdescendu sur Jésus le conduisit immédiatement audésert où, à la suite d’un jeûne de quarante jours, ledémon vint le tenter. L'œuvre de la rédemption commençait ainsi par une lutte avec Satan, comme avaitcommencé jadis l'œuvre de la déchéance. Le but du tentateur était de se renseigner sur la personnalité qu’il avaitdevant lui. En quel sens Jésus avait-il été appelé «Filsbien-aimé» de Dieu? N'était-il pas le Messie? En succombant à la tentation, Jésus eût naturellement rassuréSatan. Mais, au contraire, il repoussa ses offres et rappelades textes de l'Écriture qui opposaient au tentateur unefin de non-recevoir, sans pourtant lui fournir aucunelumière décisive sur la question qu’il avait intérêt àrésoudre. Quand, plus tard, Notre-Seigneur fit à sesApôtres la coniidence de ce qui s'était passé entre lui etSatan, il dut, pour se mettre à leur portée, raconter latentation sous une forme des plus concret^. Mais oncroit communément que la suggestion diaboliquen’atteignit que l’imagination du Sauveur, sans pouvoirdu reste ni inquiéter l’esprit, ni troubler la conscience,ni produire le moindre ébranlement dans la volonté.Impuissant, ce jour-là, à obtenir la solution qui l’intéressait, le démon interviendra souvent dans le coursde la vie publique du Sauveur, afin de poursuivre sonenquête. Matth., iv, 1-11; Marc, I, 12-13; Luc, iv,1-13. Cf. A. G. Ammon, Tentator Satanas confutalus aD. N. J. C, dans le Thésaurus de Hase et Iken, Lejde,1732, t. ii, p. 159-174; L. Fillion, Évangile selon saintMatthieu, 1878, p. 82-87. — 4° Le témoignage de JeanBaptiste. — Cependant les membres du sanhédrinavaient délégué plusieurs des leurs auprès de Jeanpour l’interroger. Celui-ci déclara qu’il n'était ni leMessie, ni Elie, ni le prophète (6 K^ofr^i^c), Deut., xviii,15, mais qu’il préparait la voie à celui qui devait venir.Quand Jésus reparut sur les bords du Jourdain, il ledésigna comme «l’agneau de Dieu» et montra qu’ilreconnaissait en lui le Messie. C’est alors que s’attachèrent à Jésus ses cinq premiers disciples, Jean,André, Simon-Pierre, Philippe et Nathanæl, appelé aussiBarthélémy. La mission de Jean touchait ainsi à sonbut: il avait annoncé la enue imminente du Messie,préparé les âmes par la pénitence à le recevoir, baptiséet enfin montré le Rédempteur en personne. Joa., i,19-51. — 5° Les noces de Cana. — Ainsi présenté auxIsraélites par son Précurseur, Jésus se rendit immédia tement dans la Galilée, qui allait devenir le théâtre leplus habituel de ses prédications et où il avait desseind’inaugurer son œuvre messianique. Il assista à desnoces à Cana et y lit son premier miracle, en changeantl’eau en vin. Voir Cana, t. ii, col. 110. Le résultat futque «ses disciples crurent en lui», c’est-à-dire commencèrent résolument à le regarder comme le Messie,non plus seulement sur la. parole de Jean, mais sur laconstatation de sa puissance surnaturelle. Joa., ii, 1-12.— 6° Le premier séjour à Jérusalem. — Après un courtséjour à Caphafnaum, le Sauveur monta à Jérusalem,à l’occasion de la Pâque, et se rendit au Temple. VoirP. Aucler, Le Temple de Jérusalem au temps de N.-S.J.-C, dans la Revue biblique, 1898, p. 193-206. D y fitacte d’autorité en chassant les marchanda qui s'étaient 141-7

JÉSUS-CHRIST

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établis dans la «maison de son Père», et il accomplitdifférents miracles qui lui gagnèrent d’autres disciples.Joa., ii, 13-25. Parmi ceux-ci fut un membre du sanhédrin,Nicodème, qui vint s’entretenir de nuit avec Notre-Seigneur.Ce fut l’occasion pour le divin Maître deformuler son premier enseignement doctrinal. L’hommequi veut entrer dans le royaume de Dieu, dit-il, doitrenaître, c’est-à-dire recevoir une nouvelle vie, et cettevie lui sera communiquée par le Fils de l’homme, qui, unjour, sera élevé comme le serpent d’airain au désert.Joa., iii, 1-21. Voir Nicodème. — 7° Retour par laSamarie. — Après avoir quitté Jérusalem, le Sauveurs’arrêta quelque temps en Judée et commença à faireadministrer le baptême par ses disciples. Puis il repritsa route vers la Galilée et passa par la Samarie. C’est làqu’auprès du puits de Jacob il conversa avec la Samaritaine,l’amenant peu à peu à désirer l’eau vive de laVérité, parlant à sa conscience et lui révélant enfin qu’ilétait le Messie attendu. Parmi les gens du pays, beaucoupcrurent en lui. Joa., IV, 1-42. — 8° L’emprisonnementde Jean-Baptiste. — Les disciples du Précurseur s’étaien témus en voyant les disciples de Jésus se mettre à baptiser.Leur maître, se servant d’une comparaison familière,leur expliqua que Jésus, était l’époux, tandis quelui-même n’était que l’ami de l’époux, par conséquentson serviteur et son introducteur. Voir Fiançailles, i,7°, t. ii, col. 2230. Jésus était le Fils envoyé par lePère; il convenait donc à Jésus de grandir et à Jeande s’éclipser. Joa., iii, 22-36. Peu après, le Précurseurfut «jeté en prison par Hérode. Luc, iii, 19-20.Jusqu’à cet événement, Jésus s’était comme tenu sur laréserve. II avait répondu au témoignage de Jean en manifestantsa qualité de Messie, mais s’il avait parlé, c’étaittoujours dans un cercle assez restreint. Toutefois, il està remarquer qu’il avait tenu à paraître dans les principauxendroits qui devaient bientôt recevoir la semenceévangélique, d’abord en Galilée, puis à Jérusalem, enJudée et enfin, en Samarie. Son ministère se trouvaitainsi inauguré dans les différents milieux où il allaitdésormais s’exercer dans toute sa plénitude.

II.’L'ÉVANGÉLISATION DE LA GALILÉE. — La plus

grande partie, de la vie publique de Notre-Seigneur sepassa en Galilée. C’est là qu’il donna à la prédicationévangélique sa forme la plus populaire, la plus simpleet la plus touchante. Il avait ses raisons pour choisirce pays comme le théâtre ordinaire de son activité messianique.A cause de leur origine et de leur contactplus fréquent avec les étrangers, les Galiléens avaientl’esprit ouvert, le commerce aimable, les mœurs simpleset honnêtes. Leur caractère était ardent, prompt à ladécision, quelquefois téméraire et emporté. Le méprisdont ils étaient l’objet de la part des Judéens les poussaità prendre en beaucoup de choses le contre-pied des coutumesde la Judée. Ils devaient, être très flattés que leMessie résidât de préférence parmi eux et, par le faitmême, ils se montrèrent plus disposés à accepter sa doctrine,à la propager et à la défendre. Voir Galilée, col.93; Galiléen, col. 95, 96. L’évangéhsation de la Galiléea fourni aux trois Évangiles synoptiques le thème principalde leurs récits et, selon toute probabilité, le canevasde la prédication apostolique à travers le monde.1° Première mission en Galilée.

Aussitôt après

l’incarcération de Jean-Baptiste, Notre-Seigneur se mità prêcher <c l’évangile du royaume». Il parlait dans lessynagogues, où tout homme instruit était habituellementinvité à se faire entendre. Voir Synagogue. On l’écoutaitavec grande satisfaction. Marc, I, 14, 15; Luc, iv,14, 15. Il n’y eut alors d’excepdfen qu’à Nazareth. Pardéférence pour ses compatriotes, Jésus’voulut lesvisiterdes premiers. La jalousie locale"prit ombrage des succèsinattendus du «fils de Joseph», et le divin’MaîtreIl’échapoa que par miracle à la brutalité de ceux qui,pourtant, avaient été si longtemps les témoins de ses

vertus. Luc, iv, 16-30. À Cana, il accueillit la demanded’un chef venu de Capharnaum pour implorer la i, ’iiérisonde son fils sur le point de mourir. Il guérit le m iladeà distance. Ce miracle eut pour effet de frayer la voie àl’Évangile dans cette ville populeuse. Voir Capharnaum,t. ii, col. 201, 202. Jésus y arriva bientôt après pour yprêcher la pénitence et l’approche du royaume descieux. Joa., iv, 46-54; Matth., iv, 13-17. Il y choisit définitivement,sur les bords du lac, Simon, André, Jacqueset Jean, pêcheurs de poissons dont il voulait faire des «pêcheurs d’hommes». Ce choix avait été immédiatementprécédé d’une pêche miraculeuse, qui rendit invinciblel’appel du Maître et donna aux nouveaux élusquelque idée du ministère qui allait leur être assigné.Matth., iv, 18-22; Marc, i, 16-20; Luc, v, 1-11. La villede Capharnaum était comme un centre d’où Jésus rayonnaitdans toute la région. Matth., iv, 23; Marc, I, 35-39;Luc. iv, 42-44. Sa parole, accompagnée de miracles,soulevait l’enthousiasme dans toute la contrée. Il nepouvait entrer dans une bourgade sans qu’on accourûtde tous côtés pour l’entendre et lui-faire guérir desmalades; l’aflluence était d’ailleurs la même dans leslieux inhabités. Partout il n’était bruit que de ces merveilles.Marc, i, 45; Luc, iv, 37; v, 15, 16. À Capharnaum,les miracles avaient quelque chose de plus saillant.C’est là que Jésus guérit un démoniaque, la belle-merede Pierre et le paralytique qu’il fallut descendre par letoit. Les circonstances de cette dernière guérison montrentque l’empressement des foules n’était pas moindredans la ville que dans les campagnes. Déjà aussi l’on voit,surgir l’opposition contre l’enseignement nouveau: des’pharisiens et des scribes se formalisent que Jésus o «eremettre les péchés. Matth., ix, 1-8; Marc, ii, 1-12;Luc, v, 17-26. Ils vont encore murmurer quand le Sauveur,après avoir appelé à sa suite le publicain Matthieu,ira s’asseoir à la table des pécheurs et laissera ses disciplesse dispenser des jeûnes institués par l’autorité desdocteurs. Matth., ix, 11-17; Marc, II, 13-22; Luc, v,27-39. — Ici se termine cette première mission galiléenne;car aussitôt après les derniers incidents, Jésus se rendà Jérusalem pour le «jour de fête». Joa., v, 1. Si cejour de fête est la Pâque, Notre-Seigneur aurait employépresque toute une année à parcourir la Galilée et à yprêcher. Sa prédication paraît d’ailleurs s’être concentréesur une donnée assez simple: la pénitence et laréforme des mœurs, comme moyen d’entrer dans leroyaume messianique. Les miracles qui l’accompagnaientdéterminaient les esprits à regarder Jésus comme leMessie et à croire en sa parole; la réforme intérieureétait aidée par la rémission des péchés qui résultait soitde la déclaration directe du Sauveur, soit du baptêmeadministré par ses disciples. L’impression que laissentles récits de cette première mission en Galilée, c’est quele Sauveur, procédant progressivement, avait tenud’abord à préparer les voies à une révélation plus complètede la vérité évangélique.

Seconde mission en Galilée.

Au retour de Jérusalem,

les disciples cueillirent quelques épis dans leschamps le jour du sabbat, et, à un sabbat suivant, Notre-Seigneurguérit un homme qui avait la main desséchée.Ces faits inspirèrent aux pharisiens de nouvelles plaintessur l’inobservation de la loi sabbatique et la résolutionarrêtée de perdre le Sauveur. Matth., xii, 1-14; Marc,n, 23-in, 6; Luc, vi, 1-11. Jésus se retira alors sur lesbords du lac de Tibériade; mais sa réputation était déjàsi célèbre qu’on accourait à lui, non seulement deGalilée, de Judée et de Jérusalem, mais encore de tousles pays qui avoisinaient la Palestine. Matth., iv, 24, 25;Marc, iii, 7-12; Luc, vi, 17-19. C’est à cette époquequ’il fit choix de douze disciples qu’il appella «apôtres».Voir Apôtres, 1. 1, col. 782-787. Il s’agissait donc désormaisde préparer l’organisation du «royaume de Dieu» en jetant les bases de l’Église. Matth., x, 2-4; Marc, iii, iUd

JESUS-CHRIST

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13-19, Luc, vt, 12-16. Mais, pour entrer dans ce royaume,il fallait se conduire d’après certains principes, parfoisassez différents de ceux qui faisaient loi dans le mondejuif, pour qu’il fût nécessaire d’en donner une vue d’ensemble,claire et saisissante. Les règles de la loi nouvellefurent formulées par le divin Maître dans un entretienmémorable, à la fois solennel et familier, qui estconnu sous le nom de «sermon sur la montagne». C’esten effet sur les flancs d’une montagne que saint Matthieu,v, 1, place la scène de cet entretien. Voir Béatitudes(Mont des), t. i, col. 1528-1531. Saint Luc, vi, 17, parled’une plaine, èrfk zinov TtsSivoO, ce qui peut s’entendred’un plateau situé sur les flancs de la montagne. Il sepourrait aussi que l’entretien ait eu lieu un peu plustôt, avant le dernier voyage à Jérusalem, comme il faudraitle conclure d’après la place que saint Matthieu luidonne dans son récit. Mais on sait que cet évangélistene s’astreint pas aussi exactement que saint Luc à l’ordrechronologique. Il est probable d’ailleurs que le diinMaître a répété plus d’une fois les mêmes enseignements,et l’on peut encore admettre que les deuxévangélistes rapportent des entretiens qui se ressemblentbeaucoup, mais qui ont été prononcés dans des occasionsdifférentes. NotreSeigneur avait devant lui, aupremier plan, ses nouveaux apôtres et ses disciples, et,au second plan, une foule accourue de tous les environs.A tous, il proposait une doctrine à croire, et aux premiersun enseignement moral à comprendre et à retenirde manière à pouvoir le prêcher plus tard. C’étaitdonc réellement comme la promulgation de la loi nouvelle,pour des âmes disposées par la première missiondu Sauveur. Néanmoins, le sermon sur la montagne estloin de fournir un code complet de la morale évangéhque;il n’en touche que quelques points principaux, sur lesquelsl’attention des auditeurs du divin Maître avaitsans doute plus particulièrement besoin d’être attiréeà cette période de son ministère public. L’instructiondébute par huit maximes appelées c< béatitudes» et quesaint Luc réduit à quatre. Ces maximes énoncent desvérités dont plusieurs ont dû sembler singulièrementparadoxales à ceux qui les ont entendues les premiers,mais qui, dès l’abord, caractérisent très nettement la différencequi existera entre ce rojaume messianique, telque Jésus-Christ entend l’établir, et celui dont les Israélitesse sont fait une conception arbitraire et conformeà leurs préjugés. La suite du discours contient des précepteset des conseils moraux qui se rattachent assezétroitement aux béatitudes. Cf. H. Lesêtre, N.-S. J.-C.dans son saint Évangile, Paris, 1892, p. 165-180. —Après cette instruction, le Sauveur continua à parcourirla Galilée. On le voit successivement à Capharnaum,où il guérit le serviteur d’un centurion, et à Naim, oùil opéra la première résurrection qu’aient racontée lesÉvangélistes. Matth., viii, 5-13; Luc, vii, 1-17. À ce momentintervinrent des disciples de Jean-Baptiste qui,dans sa prison, avait entendu parler des merveilles accompliespar Jésus et lui envoyait poser cette queslion: «Êtes-vous celui qui doit venir, ou devons-nous en attendreun autre?» Matth., xi, 3; Luc, vii, 19. Le Précurseuravait déjà solennellement reconnu en Jésus leMessie. Joa., i, 29-34; iii, 26-36. Pour admettre chez luiune hésitation ou une défaillance de la foi, par suite desennuis de son emprisonnement, il faudrait que la questionposée interdise toute autre interprétation. Or lesPères qui se sont occupés de ce passage ont été à peuprès unanimes à remarquer que la question a été posée,non pour exprimer un doute, mais pour provoquerune déclaration du Sauveur, qui rattachât à ce dernierles disciples de Jean, plus que jamais dévoués à leurmaître depuis qu’il était persécuté. Cf. S. Augustin,Serni., lxvi, 4, t. xxxviii, col. 432; Knabenbauer, Èvang.sec. Matth., Paris, 1892, t. i, p. 417-420. Notre-Seigneurrépondit à l’interrogation en revendiquant pour

lui-même les caractères qu’Isaïe avait assignés au Messie,et en montrant en Jean-Baptiste le précurseur,l’Élie prédit parMalachie. Matth., xi, 2-15; Luc, Ml, 1830. Par cette réponse, Jésus attirait sur son activité messianiquel’attention des disciples de Jean, et même àsupposer que le Précurseur ait eu quelque impatienceà voir fonder le grand «royaume de Dieu» qu’on attendait,elle donnait à entendre que le Sauveur s’occupaitde cette œuvre, mais dans les conditions qu’avait préditesIsaie et que lui-même il adoptait. Malgré la prédicationet les miracles du Sauveur, le succès ne répondaitpas toujours à ses efforts. Il y avait des villes quirepoussaient le royaume de Dieu. Matth., xi, 20-24. Parcontre, les âmes humbles et, à leur suite, des âmes pécheressesy entraient. Matth., xi, 25-30; Luc, vii, 3650. Le Sauveur se remit donc avec un nouveau zèle àparcourir villes et bourgades, Luc, viii, 1-3, poursuhides lors par des scribes et des pharisiens venus de Jérusalempour gêner une propagande vue de mauvais œilpar les autorités religieuses. Matth., xii, 24; Marc, iii,22. Parfois il était obligé d’avoir avec eux des discussionsdoctrinales analogues à celles qu’on lui imposait dansla capitale. Matth., xii, 25-37; Luc, xi, 16-26. Il tenaitpourtant à ne pas se départir de la forme de prédicationsimple et populaire qu’il avait adoptée en Galilée. Lessynoptiques lui font inaugurer à ce moment l’enseignementpar paraboles. Matth., xiii, 1; Marc, iv, 1; Luc,vm, 4. Il prenait soin d’ailleurs de donner à ses Apôtresla clef des paraboles, afin qu’à leur tour ils puissenttransmettre la doctrine contenue dans cette enveloppecomme le fruit dans son écorce. Quand il les jugeabien préparés par l’exemple de sa propre prédication,il les envoya à leur tour en mission, exclusivementdans la région galiléenne, non sans leur avoir donnéd’utiles avis sur la manière de se comporter et lesavoir munis du pouvoir de chasser les démons et deguérir les malades. Les Apôtres s’en allèrent sur l’ordredu Maître et exécutèrent heureusement ce qu’illeur avait prescrit. Matth., x, 1-xi, 1; Marc, vi, 7-13;Luc, ix, 1-6. — Le résultat de cette seconde missiongaliléenne était important. Jésus-Christ avait confirméson autorité messianique par de nombreux miracles,tormulé sa doctrine d’une manière plus complète, revêtude gracieuses paraboles les idées fondamentales du «rojaume des cieux», et enfin exercé ses Apôtres auministère auquel ils auraient à se consacrer après lui.La Galilée avait été parcourue dans tous les sens, Matth.,ix, 36-38; Marc, vi, 6, et le divin Maître s’y était dépensésans compter pour le succès de son œuvre.

La crise messianique en Galilée.

Au cours de

cette seconde mission du Sauveur, saint Jean-Baptisteavait été mis à mort par Hérode, et ce prince, interprétantavec ses idées superstitieuses les espérancesmessianiques dont il était bruit dans tout le pays, s’imaginaque Jean-Baptiste revivait en Jésus. Matth., xiv,1, 2; Marc, vi, 14-16. Quand les Apôtres furent revenusde leur mission, peu de temps après la mort de Jean-Baptisteet quelques jours seulement avant la Pàque, leSauveur passa avec eux au nord-est du lac de Tibériade.Il y fut suivi par une multitude de personnes qu’avaitattirées le désir de voir les prodiges opérés par Jésusen faveur des malades. Beaucoup d’entre eux, d’ailleurs,faisant route vers Jérusalem pour la Pâque, profitaientde leur passage aux environs de Capharnaum pour,» oîr celui dont on parlait tant de tous côtés. C’est enfaveur de cette foule que le Sauveur accomplit une premièremultiplication des pains dans le désert. Matth.,xiv, 13-21; Marc, vi, 30-44; Luc, ix, 10-17; Joa., vi,1-13. Ce miracle enthousiasma à tel point la foule qu’elles’apprêta à entraîner Jésus et a le proclamer roi de cegrand royaume messianique et temporel que tous attendaient.Jésus lit partir en avant par le lac ses Apôtres,trop enclins à partager des préjugés dans lesquels leur

intérêt personnel trouvait son compte. Lui-même lesrejoignit la nuit en marchant sur les eaux et se remit àparcourir les environs de Génésarelh en continuant àguérir les malades, même au simple contact de ses vêtements.Matth., xiv, 22-36; Marc, vi, 45-56; Joa., vi,14-21. La popularité de Jésus atteignait alors son apogéedans la région galiléenne; pour peu qu’il s’y fût prêté,tout le peuple se soulevait en sa faveur et saluait en luile roi de ses espérances, mais dans des conditions quele Sauveur ne pouvait accepter. L’occasion se présentatout aussitôt pour lui de remettre les esprits au point.Dans la synagogue de Gapharnaûm, on mit en parallèlele pain qu’il venait de multiplier et la manne du désert.Jésus expliqua à ses interlocuteurs qu’ils avaient à chercher,non le pain matériel et périssable, mais celui dela vie éternelle, la vérité qu’il enseignait, puis son corpset son sang qu’il donnerait un jour en nourriture. Cetteexplication les révolta. Au lieu d’un Messie disposé àréaliser leurs rêves de royaume temporel et de dominationuniverselle, ils ne trouvaient plus en face d’eux quedes promesses spirituelles et qu’un aliment surnatureldont l’idée même paraissait inconcevable. Bon nombred’entre eux se refusèrent à être plus longtemps les disciplesd’un Maître si peu conforme à leur attente. Lespréjugés de ces hommes ne leur permettaient pas devoir en Jésus le véritable Messie; ils travaillaient, avec unlamentable succès, à tourner de plus en plus l’opinioncontre lui. Mis en demeure de se prononcer à leur tour,les Apôtres restèrent fidèles au divin Maître. Joa., vi,22-72. Notre-Seigneur, à la suite de ces incidents, ne serendit pas à Jérusalem pour la Pâque; il se contentade continuer ses courses en Galilée. Joa., vii, 1. Dèslors cependant, les synoptiques le montrent beaucoupmoins occupé à instruire le peuple, qu’à se défendrecontre les pharisiens et à former ses Apôtres à leurfutur ministère. — Les émissaires venus de Jérusalemlui cherchent d’abord querelle au sujet des ablutions etdes pratiques instituées par les docteurs. Jésus leurrépond, instruit ses Apôtres sur ce sujet, puis quitte momentanémentle pays de Galilée, comme pour pouvoirs’occuper plus librement de l’instruction de ses Apôtres.Matth., xv, 1-20; Marc, vii, 1-23. De retour en Galilée,après avoir enjoint à ceux-ci de ne dire à personne qu’ilétait le Christ, Fils de Dieu, Matth., xvi, 20; Marc, viii,30; Luc, IX, 21, il retrouva en face de lui l’hostilitécroissante que suscitaient les autorités de la capitale. Ilen prit occasion pour faire à ses Apôtres une premièrerévélation de sa passion future. Cette révélation les décontenançasingulièrement, surtout quand le Maîtreajouta que, pour être ses vrais disciples, ils auraient, euxaussi, à porter leur croix. Matth., xvi, 21-28; Marc, viii,31-39; Luc, ix, 22-27. La transfiguration, qui suivit deprès, raffermit la foi, au moins chez les trois principauxApôtres. Mais, à la descente de la montagne, Jésus trouvales neuf autres entourés d’incrédules. Avant de guérir lemalheureux que ses Apôtres n’avaient pu soulager, iljugea à propos de manifester à cette population incroyanteet malveillante ce qu’il pensait d’elle. Matth.,xvii, 16; Marc, IX, 18; Luc, ix, 41. En fait, ses frères eux-mêmes,c’est-à-dire ceux de ses parents qu’il n’avait pasappelés à l’apostolat, n’avaient pas foi en lui, et le mondele poursuivait de sa haine. Joa., vii, 5, 7. Il quitta alorsla Galilée, comme à la dérobée, et se rendit secrètementà Jérusalem pour la fête des Tabernacles. Marc, ix, 29;Joa., vii, 10. — Humainement parlant, les six derniersmois passés en Galilée, de la Pàque à la fête des Tabernacles,avaient imprimé au succès de l’œuvre messianiqueun sérieux mouvement de recul. Jésus-Christ, auquel lesdeux missions précédentes avaient gagné le cœur desGaliléens, rencontrait désormais au milieu d’eux ladéfiance^ l’incrédulité et la malveillance. Tels n’étaientpas, sans doute, les sentiments de tous; mais, avec leurperfide habileté, les meneurs venus de Jérusalem

gagnaient aisément ceux dont les espérances se trouvaientruinées par la manière dont le Sauveur entendaitson rôle messianique. Cependant, à un point de vuesupérieur, le temps fut loin d’être perdu. Le divinMaître l’avait très utilement employé à l’instruction et àla formation de ses Apôtres, et, du moment qu’il voulaitsemer pour toute l’humanité et pour tous les siècles,il y avait médiocre intérêt à ce que la semence levâtplus ou moins heureusement dans le petit pays deGalilée.

Le dernier séjour en Galilée.

Après avoir célébré

à Jérusalem la fête de la Dédicace, le 25 du mois decasleu, c’est-à-dire au commencement de décembre,Notre-Seigneur revint en Galilée et y resta quelque temps.Matth., xvii, 21. Il prédit alors à nouveau sa passion,paya pour lui-même et pour Pierre l’impôt du didrachme,et fit à ses Apôtres deux recommandations, sur la simplicitéde l’enfant qu’il faut imiter et sur la tolérance enversles disciples de bonne volonté qui se mettaient àprêcher en son nom. Matth., xvii, 21-xviii, 5; Marc,ix, 30-40; Luc, ix, 44-50. Puis, avec ses Apôtres et uneescorte de disciples fidèles, il se mit en route pour Jérusalemoù, quelque trois mois après, allait se consommersur le Calvaire sa carrière messianique. Saint Luc,IX, 51-xviii, 14, est seul à raconter ce suprême vojage,quant à sa partie galiléenne, mais il le raconte avec uneassez grande richesse de détails. Le Sauveur avait-ildessein de traverser directement la Palestine du nordau sud, en passant par la Samarie, ou seulement de longerla frontière qui sépare la Galilée de la Samarie, ens’arrêtant tantôt dans l’une et tantôt dans l’autre? L’Évangélistene le dit pas. Voir Galilée, col. 88, et la carie.Toujours est-il qu’à sa dernière apparition sur le sol samaritain,on refusa de lui donner passage, par suite dela violente antipathie des gens du pays contre tous ceuxqui venaient de Jérusalem ou qui s’y rendaient. Luc,ix, 53. Le divin Maître dut donc cheminer de l’ouest àl’est, en se tenant sur le territoire galiléen. Il poursuivitpendant ce vojage son ministère évangélique, en instruisanttantôt ses disciples, tantôt les populations, eten multipliant les bienfaits et les miracles sur son passage.Tout d’abord, il choisit soixante-douze de ses disciples,leur donna des avis analogues à ceux qu’avaientjadis reçus les Apôtres, et les envoya deux par deux enmission devant lui, laissant ainsi à entendre que lesApôtres auraient à être aidés par des ministres inférieursdans la prédication de l’Évangile. Luc, x, 1-12. Cette mission,comme celle du Sauveur, rencontra des oppositions;ce furent ordinairement les plus humbles d’entre lepeuple qui accueillirent la bonne parole. Luc, x, 13-24;xi, 27-36. De là des reproches adressés aux villes infidèleset des comparaisons peu flatteuses pour ceux quine tiraient aucun fruit de sa prédication. Luc, x, 13-16;xi, 29-36. — La Sauveur, parfois reçu chez des amis,comme Marthe et Marie, Luc, x, 38-42, poursuivait aveczèle la formation de ses Apôtres et de ses disciples. Illeur adressa, au cours de ce voyage, ou leur répéta d’importantesinstructions sur la prière, Luc, xi, 1-13, surla providence du Père, Luc, xii, 22-54, sur la vigilance,Luc, xii, 35-48, sur le feu qu’il apportait lui-même à laterre, Luc, xii, 49-53, sur la fidélité au service de Dieu,Luc, xvi, 1-13, sur les scandales du monde, Luc., xvii, 1-2,sur la correction fraternelle, Luc, xvii, 3, 4, sur le bonet fidèle serviteur, Luc, xvii, 5-10, et encore sur la prière.Luc, xviii, 1-8. Quand l’occasion s’en présentait, il parlaitdirectement aux foules de la vanité des richesses,Luc, xii, 13-21, de la venue du Messie, Luc, XII, 54-59,de la nécessité de la pénitence, Luc, xiii, 1-9, du royaumede Dieu, Luc, xiii, 18-21, des conditions du salut, Luc,xiii, 22-30, des qualités requises pour devenir son disciple.Luc, xiv, 25-35. Il encourageait au repentir par laparabole de l’enfant prodigue, Luc, xv, 11-32, et à l’humilitépar celle du pharisien et du publicain. Luc, XVIK,

9-14. Il gardait si peu rancune aux Samaritains de nel’avoir pas reçu que, dans une autre parabole, il faisaitd’un Samaritain le modèle de la charité fraternelle. Luc,x, 25-37. Il continua d’ailleurs à côtoyer les frontièresde leur province, de sorte que, quand il guérit dix lépreux,ce fut un Samaritain, le seul du reste parmi lesdix, qui vint le remercier. Luc, xviii, 9-14. — Ce qui estsurtout à remarquer, pendant ce dernier voyage en Galilée,c’est la surveillance, ordinairement malveillante,que les scribes et les pharisiens exercent sur les démarcheset sur les paroles de Notre-Seigneur. Luc, xi, 53-54. Ils luicherchent querelle à propos d’un démon qu’il a chassé,Luc, xi, 14-26, ou des guérisons qu’il a opérées le jourdu sabbat. Luc, xiii, 10-17; xiv, 1-15. Ils tentent de l’éloigneren le menaçant d’une intervention d’Hérode. Luc,xiii, 31-35. Ils trouvent mauvais qu’il entre en relationsavec des pécheurs. Luc, xv, 1-10. Le divin Maître nedédaigne pas de les éclairer. C’est à eux qu’il adresseses paraboles du festin, Luc, xiv, 16-24, et du mauvaisriche. Luc, xvi, 19-31. C’est devant eux qu’il stigmatisel’hypocrisie et le respect humain, Luc., xii, 1-12, et qu’ilexplique les conditions de l’avènement du Christ. Luc,xvii, 20-37. C’est contre eux enfin qu’il s’élève avec force,pour pallier le mauvais effet que produisent sur lepeuple leurs discours et leurs exemples. Luc, xi, 37-54;xvï, 14-18. — Parvenu à la rive droite du Jourdain, leSauveur quitta la Galilée pour n’y plus reparaîtrequ’après sa résurrection. Durant son dernier séjour, ilavait continué son œuvre, malgré l’opposition de ses ennemis;la foi en sa mission divine avait perdu en étenduedans le pays, mais pour gagner en profondeur eten solidité dans le cœur de ses vrais disciples.

111. LES EXCURSIONS HORS DE LA PALESTINE. — 1° En

Samarie. — Bien que la Samarie fit géographiquementpartie de la Palestine, elle y formait comme une enclaveétrangère, entre la Judée et la Galilée. Voir Samarie.Notre-Seigneur traversa le pays au commencementde son ministère public. Il constata lui-même que lamoisson des âmes y arrivait à maturité. Joa., iv, 35.Mais il ne resta que deux jours en Samarie. Joa., iv,40. À la fin de son ministère, il sembla vouloir y revenir,mais en fut empêché par le mauvais vouloir des habitants.Luc, ix, 53. La semence évangélique ne fut doncpas jetée dans l’ensemble de ce champ par Notre-Seigneur.Cette œuvre fut réservée aux Apôtres. Act., i, 8;vin, 25.

Au pays des Géraséniens.

Pendant sa seconde

mission en Galilée, Notre-Seigneur traversa un jour avecses Apôtres le lac de Tibériade, sur lequel se déchaînaune furieuse tempête qu’il apaisa, Matth., viii, 23-27;Marc, iv, 35-40; Luc, viii, 22-25, et aborda sur la côteorientale. Voir Géraséniens (Pays des), col. 200-207.Là il guérit un possédé et permit à une légion dedémons d’entrer dans le corps de pourceaux qu’ils firentpérir. Son séjour fut très court, parce que les Gérasénienseffrayés le prièrent de s’en retourner. Matth.,vm, 28-34; Marc, v, 1-20, Luc, viii, 26-39.

En Phénicie.

Peu après la multiplication des

pains et l’éloignement d’un grand nombre de disciples,à la suite des déclarations faites par le divin Maître dansla synagogue de Capharnaum sur le caractère spirituelde sa mission, Joa., vi, 60-67, eut lieu l’excursion sur leterritoire phénicien. Matth., xv, 21; Marc, vii, 24, 31.’Notre-Seigneur ne s’y rendit pas pour prêcher l’Évangile,car il n’était envoyé qu’aux brebis perdues de lamaison d’Israël, Matth., xv, 21; il venait seulement pours’y dérober momentanément à l’empressement et aussiaux contradictions dont il était l’objet en Galilée. Marc,vu, 24. Le pays, placé sous la juridiction romaine, avaitpour villes principales Tyr et Sidon. Voir Phénicie. LeSauveur n’alla probablement pas jusqu’auprès de cescités païennes. Cf. Matth., xi, 21. Il se contenta de séjournerdans les régions les moins habitées. Son vœu

pourtant ne fut pas accompli. Sa renommée l’y avaitprécédé depuis longtemps, puisque déjà assistaient ausermon sur la montagne une foule de gens accourus deTyr et de Sidon. Matth., iv, 24; Luc, vi, 17. Quand saprésence eut été ébruitée, une femme païenne du paysvint demander la guérison de sa fille tourmentée par le,démon; elle implora le divin Maître avec tant de confianceet de persévérance qu’elle obtint ce qu’elle désirait.Matth., xv, 22-28; Marc, vii, 25-30. Tel fut le seulincident noté par les Évangélistes à l’occasion d’unséjour qui ne dut pas se prolonger beaucoup.

En Décapote.

On appelait de ce nom les villes et

la contrée situées sur la rive orientale du lac de Tibériade.Voir Décapole, t. ii, col. 1333-1336. Cette régionavait fourni à Notre-Seigneur beaucoup de ses auditeursen Galilée, Matth., iv, 25, et le démoniaque gérasénieny avait publié sa guérison. Marc, v, 20. C’est là que leSauveur se rendit après avoir quitté le pays phénicien.Matth., xv, 29; Marc, vii, 31. On lui amena aussitôt une,foule de malades qu’il guérit, entre autres un sourd-muet,et toute la population en fut transportée d’admiration.Matth., xv, 3CM31; Marc, vii, 32-37. Pour récompenserleur empressement, et aussi sans doute pour signifierque les dons promis aux Israélites étaient égalementdestinés aux païens et à tout l’univers, Jésus renouvelaen leur faveur le miracle de la multiplication des pains,dans des conditions analogues à celles qui s’étaient produitespeu auparavant en Galilée. Matth., xv, 32-38;Marc, viii, 1-9. Le divin Maître ne resta vraisemblablementque quelques jours dans ces parages.

En Gaulanitide.

C’était le pays situé au nord-est

du Jourdain; il faisait partie de la tétrarchie de Philippe.Voir Gaulon, col. 116-117. De la Décapole, Jésus,remonta vers le nord, aux environs de Dalmanutha.Matth., xv, 39; Marc, viii, 10. Voir Dalmanutha, t. ii,col. 1209-1211. Des pharisiens et des sadducéens, quen’avaient pas satisfaits les multiplications des pains, l’y,poursuivirent en réclamant un signe dans le ciel. Illeur répondit qu’ils n’auraient d’autre signe que celuide Jonas. Puis, redescendant vers le lac de Tibériade,il le traversa en barque. Matth., xvï, 1-12, Marc, viii,11-21. Arrivé à Bethsaide, où il ne voulait sans douteque passer, il guérit un aveugle, auquel il recommandade taire ce qui était arrivé. Marc, viii, 22-26. Ensuite,continuant à se dérober aux Galiléens, il remonta beaucoupplus au nord, jusque dans la région qui dépendaitde Césarée de Philippe. Matth., xvï, 13; Marc,vin, 27; voir Césarée de Philippe, t. ii, col. 450-456.Là, en récompense de la fermeté avec laquelle Pierresalua en lui le Christ, le Fils du Dieu vivant, il lui annonçaqu’il ferait de lui la pierre fondamentale et inébranlablede son Église. Matth., xvï, 13-19; Marc, viii,27-29; Luc, ix, 18-20. Faite en lieu païen, cette promesseindiquait que l’Église future ne serait pas pourles seuls Israélites, mais pour l’universalité des hommes.

— Les Évangélistes ne marquent pas le temps queNotre-Seigneur consacra à ces différentes excursionsen Phénicie, en Décapole, en Gaulanitide. Les incidentsque notent leurs récits auraient pu se dérouler en quelquesjours seulement. Il est à croire cependant queNotre-Seigneur a voulu se soustraire à la Galilée durantun temps beaucoup plus notable, puisqu’il entrait dansses vues de répondre à l’ingratitude et à l’incrédulitédes Galiléens par une plus grande réserve dans l’expansionde ses bienfaits. Les auteurs sacrés n’ont raconté,de ces excursions, que les faits principaux.

En Pérée.

On donnait ce nom au pays qui

s’étend à l’est du Jourdain, de la mer Morte au lac deTibériade. Voir Pérée. Notre-Seigneur y arriva au coursde son dernier voyage, lorsque, après avoir suivi de l’ouestà l’est la frontière qui sépare la Galilée de la Samarie,il franchit le Jourdain. Matth., xix, 1; Marc, x, 1; Joa.,x, 40. Ce pays lui avait aussi envoyé de nombreux audi

tenrs quand il parla snr la montagne. Matlh., iv, 23.Jésus Christ ne s’y contenta pas, comme dans les régionspaïennes de Phénicie et de Gaulanitide, de converseravec ses Apôtres. Il séjourna quelque temps, guérit lesmalades, instruisit les foules et gagna beaucoup de disciples.Matth., xix, 2; Marc, x, 1; Joa., x, 41, 42. Lespharisiens l’abordèrent de nouveau et le questionnèrentsur le divorce; le divin Maître en prit occasion pourfaire devant ses Apôtres une allusion élogieuse au célibatvolontaire. Matth., xix, 3-12; Marc, x, 2-12. Chemin faisant,il se plaisait à bénir les enfants, en recommandantd’imiter leur simplicité. Malth., xix, 13-15; Marc, x,13-16; Luc, xviii, 15-17. La rencontre d’un jeune hommevertueux, qui n’eut pas le courage de renoncer à tout,fut suivie d’une instruction sur la pauvreté évangéhqueet sur la récompense promise à ceux qui la pratiqueraient.Matth., xix, 16-30. Marc, x, 17-31; Luc, xviii, 1830. Saint Matthieu, xx, 1-16, place ici la parabole desouvriers envoyés à la vigne. Jésus était au delà du Jourdainquand, de Béthanie, Marthe et Marie lui envoyèrentannoncer la maladie de leur frère Lazare. Il demeuraencore deux jours en Pérée, puis se mit en route pouraller ressusciter son ami, qui était mort sur ces entrefaites.Joa., xi, 1-16. Il quitta alors la Pérée pour n’yplus revenir. — Le séjour du Sauveur dans ces différentescontrées situées hors de Palestine fut donc relativementcourt. Le divin Maître prépara du moins, parses miracles, l’évangéhsation future de ces régions; illes récompensa par sa présence de l’empressement aveclequel une partie de leur population était venue letrouver en Galilée. Ces pays lui offrirent d’ailleurs uneretraite quand il jugea à propos de répondre à l’incrédulitédes Galiléens par la soustraction momentanée deson enseignement et de ses bienfaits, pour se consacrerplus exclusivement à la formation de ses Apôtres.

IV. LE MINISTÈRE EN JUDÉE ET À JÉRUSALEM.

Bien

que résidant habituellement en Galilée, au cours de savie publique, Notre-Seigneur ne laissa pas de paraîtrede temps en temps à Jérusalem, ordinairement à l’époquedes^ grandes fêtes. Les synoptiques, dont les évangilesservirent de thème à la prédication apostolique, et qui,pour cette raison, se sont à peu près bornés aux récitset aux instructions plus populaires du ministère galiléen,ont passé presque entièrement sous silence les apparitionsdu Sauveur à Jérusalem. Ces dernières fontl’objet principal de l’Évangile de saint Jean. De là unesi notable dissemblance entre cet Évangile et les autres.La scène n’est plus la même. Les interlocuteurs surtoutsont absolument différents. Si la Galilée offrait au divinMaître une population simple et disposée à faire accueilà la bonne nouvelle, la Judée au contraire lui opposaitsa morgue, ses préventions contre un prophète venud’une province méprisée, son entêtement à suivre desusages ou à s’astreindre à des règles minutieuses qui,sous prétexte de vénération pour la loi divine, n’aboutissaientqu’à l’altérer ou même à la rejeter au second plan,enfin, son intransigeance à l’égard de toute doctrine, detoute forme de vie, de toute mission messianique endésaccord avec les idées reçues. De plus, c’est à Jérusalemsurtout que se rencontraient, à l’état militant, lesadeptes des deux grandes sectes juives: les pharisiens,scribes et docteurs, zélateurs de la loi dont ils s’étaientfait une conception arbitraire et étroite, attachés à leurspratiques de piété traditionnelles, portant avec impatiencele joug romain et attendant un Messie qui les endélivrerait, en réalisant au sens temporel et politiqueles antiques promesses, et, en face d’eux, les sadducéens,matérialistes avoués, nantis de toutes les charges lucratives,y compris le souverain pontificat, en bons termesavec les Romains dont l’autorité protégeait leur situation,et n’ayant aucun désir de voir surgir un Messiequi bouleverserait un étal de choses dont ils étaientpleinement satisfaits. Voir Pharisiens, Sadducéens.’Autour d’eux, et s’inspirant surtout des doctrines pharisiennes,vivait un. peuple fort différent des Galiléens,les Juifs ou habitants de la Judée. Ce peuple avait foi enses docteurs, mais il n’était pas inaccessible aux idéesélevées, ce qui fait que de temps en temps au moinsNotre-Seigneur recueillera de sa part de vraies marquesde sympathie. Enfin, à Jérusalem, le Sauveur avait àcompter avec le sanhédrin, la grande autorité religieusede la nation. Voir Sanhédrin. Le sanhédrin avait ledroit de réclamer ses titres de créance à quiconque seprésentait comme docteur, comme prophète, comme investid’une mission spirituelle et surtout comme Messie.Il n’avait pas manqué d’exercer ce droit quand Jésus fit,pour la première fois, acte d’autorité dans le Temple.Joa., ii, 18. À plusieurs reprises, les synoptiques nousmontrent Jésus épié et interrogé par des émissaires oudes représentants du sanhédrin. Luc, v, 21, 30; VI, 2,7; Marc, iii, 22; Matth., xii, 38; Marc, vii, 1; viii, 11;Luc, xiii, 14, 31; xvii, 20, etc. Dans un pareil milieu,Notre-Seigneur ne pouvait se comporter comme enGalilée. Avec les scribes et les docteurs de la loi, il luifallut exposer sa doctrine sous une forme dogmatiqueet abstraite, répondre aux objections de ses adversaireset déjouer toutes leurs subtilités. Ses miraclesdevaient aussi avoir une portée plus grande, par conséquentêtre accomplis dans des conditions telles qu’ilspussent servir de preuve à sa mission. Voilà pourquoidans l’Évangile de saint Jean, qui raconte le ministèrede Jésus à Jérusalem, les paraboles et les entretiensfamiliers font place à des expositions ou à des discussionsdoctrinales dont la plupart dépassaient de beaucoupla portée du simple peuple. L’Évangile à prêcher aumonde ne pouvait revêtir la forme qui convenait à desauditeurs experts dans la science religieuse. Aussi leSauveur passa-t-il la plus grande partie de son ministèrepublic en Galilée; il ne fit à Jérusalem que de courtsséjours, à l’époque des grandes fêtes, ainsi que saintJean le marque avec soin. Il y parut une première fois,comme nous l’avons vii, au début de sa prédication.Joa., ii, 13-Hl, 36. Voici ce qui se passa aux autres séjoursdu divin Maître dans la ville sainte ou en Judée.1° À la seconde Pâque.

Sa première visite avait eu

lieu à l’occasion de la fête de la Pâque. Joa., ii, 13. Laseconde se fit à l’occasion d’une fête que l’Évangélistedésigne par éopiîj ràv’IouSatwv, ou, dans beaucoup demanuscrits, ï| êopTîj, dies festus Judœorum, fête que l’oncroit communément être la Pâque, mais qui pourrait àla rigueur être une autre grande solennité. Au cours del’octave de la fête, Jésus fit un grand miracle le jour dusabbat. Il guérit un paralytique qui se tenait depuistrente-huit ans à la piscine probatique, et lui ordonnade s’en retourner chez lui en emportant son grabat.D’où émoi des Juifs, aux yeux de qui porter un fardeauétait violer le sabbat. Voir Bethsaide, 1. 1, col. 1723-1732.L’ordre d’agir ainsi fut vraisemblablement donné auparalytique pour attirer l’attention sur le miracle etprovoquer une explication. Jésus la fournit. Il se présentacomme Fils du Père, sans cesse en activité comme lePère, opérant des miracles pour attester sa filiationdivine, et investi par le Père du pouvoir déjuger vivantset morts. Pour appuyer ses affirmations, il fit appel àtrois preuves: le témoignage de Jean-Baptiste, sespropres miracles et les prédictions de l’Écriture accompliesen sa personne. Les docteurs d’Israël étaient insensibles à ces preuves; leur incrédulité pouvait être d’unfuneste exemple pour le peuple. Aussi le Sauveur leurreprocha-t-il de n’en croire qu’à eux-mêmes, sans vouloirmême se soumettre à la parole de Moise. Joa., v,1-47. Ainsi ce jour-là, le Sauveur déclara nettement auxautorités religieuses qui il était, et il indiqua les preuvessur lesquelles il appuyait sa parole, preuves dont tousles éléments se trouvaient aux mains des docteurs, etque ceux-ci pouvaient étudier et discuter à leur aise

Leurs préjugés orgueilleux les empêchèrent de conclure;mais saint Jean n’enregistre aucune réplique de leurpart, malgré le blâme direct qui leur fut adressé. Lascène décrite par l'Évangéliste a pu se passer toutentière dans l’espace d’une journée; il est possibletoutefois que le divin Maître soit resté à Jérusalem pendant toute l’octave de la fête. — À la Pâque suivante,celle qui précéda sa mort d’une année, Jésus-Christ nese rendit pas en Judée, parce que les Juifs voulaient letuer. Joa., vii, 1. Déjà, des sa première visite au Temple,le Sauveur, qui connaissait les Juifs, ne se fiait pas àeux. Joa., ii, 24. Apres le miracle de la piscine probatique, l’idée de la suppression de Jésus par une mortviolente devint tellement familière aux Juifs, que quand,à son retour de Jérusalem et probablement encore enJudée, il guérit le jour du sabbat un homme qui avaitla main desséchée, des pharisiens et des Hérodiens tinrent conseil ensemble pour aviser aux moyens de lefaire périr. Matth., xii, 14; Marc, iii, 6; Luc, vi, 11. LeSauveur était donc déjà condamné deux ans avant quele projet pût être exécuté, si la fête dont parle saintJean, v, 1, est la Pâque. Avec de pareils desseins dansl’esprit, les Juifs étaient-ils en état d’examiner impartialement la doctrine et les œuvres de Jésus?

À la fête des Tabernacles.

Cette fête se célébrait

le premier jour du mois de tisri, c’est-à-dire vers la finde septembre. On était donc alors à six mois environde la mort du Sauveur. Ses proches l’invitèrent à monteravec eux à Jérusalem, afin de s’y produire en public. Ilne voulut pas partir avec eux, sans doute parce qu’ilsne croyaient pas en lui, peut-être aussi parce que, sachant bien ce dont les Juifs étaient capables, il ne voulait arriver dans la ville sainte que quand les Galiléens,favorables en somme à sa personne et à sa cause, s’ytrouveraient en nombre pour tenir en respect ses adversaires. Joa., vii, 2-10. Cependant, à Jérusalem, on lecherchait avec d’autant plus d’empressement qu’il n’avaitpas paru à la Pâque précédente. Chacun émettait sonavis sur sa personne, mais rien ne se disait en public,à cause de la crainte qu’inspiraient les dispositions desJuifs. Joa., vii, 11-13. Au milieu de la fête, Jésus arrivaet se rendit directement au Temple. Il y parla de manière à émerveiller ses auditeurs, qui ne savaient d’oùlui venait tant de science. Il expliqua que cette sciencelui venait de son Père, au nom de qui il parlait. Puis,interpellant directement ses adversaires, il leur dit, enprésence de toute la foule: «Pourquoi cherchez-vous àme tuer?» Le miracle de la piscine, opéré un jour desabbat, était le prétexte. Pourquoi, pour obéir au Père,ne pouvait-il guérir le jour du sabbat, quand les Juifs,pour obéir à Moïse, donnaient la circoncision même cejour-là? Il n’y avait rien à répliquer à de telles observations. Les autorités du sanhédrin n’y songeaient d’ailleursen aucune manière. Tout leur souci était d’exécuter leursprojets homicides. À plusieurs reprises, ils envoyèrentdes hommes pour le saisir; mais ceux-ci n’osèrent lefaire, à cause de la foule qui remplissait le Temple. Car,à ceux qui partageaient les vues du sanhédrin se trouvaient mêlés en grand nombre des croyants, que les paroles du divin Maître avaient convaincus et qui, maintenant, disaient tout haut: C’est un prophète, c’est le Christ!Pour atténuer l’effet de ces adhésions, les pontifes et lespharisiens traitaient de foule ignorante et maudite ceuxqui croyaient en Jésus; ils proclamaient bien haut que leChrist ne pouvait venir de Galilée. Deux fois, pendantle cours des fêtes, et une troisième fois, le dernier jour,on tenta d’arrêter le Sauveur. Mais son heure n'étaitpas encore venue, parce que lui-même commandait lesévénements et rendait impuissants les efforts de sesadversaires. Les gardes qu’on envoyait pour le prendretombaient eux-mêmes en admiration devant ses paroles;ces hommes qui entendaient discuter les grands docteursd’Israël déclaraient nettement que personne ne parlait

comme Jésus. La fête se termina sans que le sanhédrinpût rien contre lui, sinon faire ressortir l’origine galiléenne qu’il lui attribuait et qui, d’après la prophétiede Michée, v, 2, paraissait, en effet, incompatible avec laqualité de Messie. Quant au Sauveur, il avait gagné denombreux disciples et posé la question messianiquedans de tels termes qu’il était impossible au sanhédrinde l'éluder. Joa., vii, 14-53.

Le lendemain du dernier jour de la fête, le Sauveur,qui avait passé la nuit au mont des Oliviers, revint aux Temple et se mit à enseigner le peuple accouru auprèsde lui. Les scribes et les pharisiens, piqués du reprochequi leur avait été fait de ne pas croire à Moïse, lui posèrent un cas qui, à leur sens, devait le mettre en mauvaise posture devant le peuple, quelque solution qu’ilapportât. Ils lui amenèrent à juger la femme adultère.L’affaire tourna à leur confusion et ils se retirèrent lesuns après les autres. Voir Femme adultère, t. ii, col.2199-2201. La discussion reprit bientôt après avecd’autres pharisiens, ceux-ci contestant la valeur du témoignage que Jésus se rendait à lui-même, et le Sauveur en appelant au témoignage que lui rendait sonPère. Cette discussion eut lieu près de la salle du trésor,à la droite du parvis des femmes. Voir Gazophylacium,col. 133-135. Il eût été facile de saisir le Sauveur dansces bâtiments intérieurs du Temple. Saint Jean, viii, 20,remarque qu’on ne le fit pas, toujours parce que sonheure n'était pas encore venue. Il continua donc à converser avec les Juifs. On lui demandait: c< Qui êtesvous?» Il répondit en confirmant ses précédentes déclarations. Il parla ensuite sur la liberté que la véritéévangélique devait apporter à tous. Ce fut le signal d’unescène des plus orageuses. Les Juifs étaient libres,disaient-ils, puisqu’ils avaient Abraham et Dieu mêmepour pères. Jésus répliqua que la paternité d’Abrahamentraînait l’imitation des œuvres d’Abraham, tandis quepar leurs pensées et leurs actes les Juifs se montraientplutôt les fils de Satan, homicide dès le commencement.Furieux de cette apostrophe, les Juifs traitèrent le Sauveur de samaritain et de possédé, et comme il en appelait à son Père et affirmait son antériorité à Abraham,ils prirent des pierres pour le lapider. Jésus se dérobaà leurs coups et sortit du temple. Joa., viii, 1-59.

Au sabbat qui suivit cette scène, Jésus reparut auTemple, accompagné de ses disciples. Il y guérit unaveugle-né, en frottant ses yeux avec un peu de boue eten l’envoyant se laver -à la fontaine de Siloé. Ce futgrande rumeur parmi les pharisiens, qui virent dansl’acte du Sauveur une violation flagrante du repos sabbatique. Ils n'étaient pas tous d’accord cependant, plusieurs d’entre eux concluant avec raison qu’il y avait la unmiracle, et qu’un pécheur ne peut faire de miracles. Onfit une enquête en règle, qui n’aboutit qu'à mettre enplus vive lumière la réalité du fait. Les pharisiens eurentbeau déclarer très haut qu’ils savaient que Jésus étaitun pécheur; l’aveugle guéri répondit avec beaucoup debon sens que, pour opérer de telles merveilles, il fallaitvenir de Dieu. Cf. D. Ebersbach, De mirac. piscin.Bethesdss, dans le Thésaurus de Hase et Lken, t. ii, p.486-493. Aux pharisiens qui se trouvèrent auprès de lui lemême jour, le divin Maître observa que, s’il rendait lalumière aux aveugles, il la faisait perdre à certainsvoyants. Les pharisiens comprirent que ce trait les concernait. Le Sauveur n’en poursuivit pas moins ses instructions au peuple. Il se présenta comme le bon pasteurenvoyé par le Père, en opposition avec les faux pasteurs,ces scribes., ces docteurs, ces pharisiens, qui avaientpris la direction spirituelle du peuple, mais se comportaient en brigands. Enfin, à la pensée des complotstramés contre sa vie, il déclara que, sur l’ordre de sonPère, il ne quitterait la vie que de sa propre volonté,pour la reprendre ensuite. Pendant ces quelques journées, au plus sept ou huit, le Sauveur avait encore tenté

d'éclairer les Juifs; il avait opéré un miracle éclatantqui devait les convaincre. On ne lui répondit que pardes invectives et par des violences. S’il ne périt pasen cette occasion, c’est qu’il était le maître et que,d’ailleurs, toutes ces scènes se déroulaient au milieud’une foule considérable qui intimidait les plus violents.Car si beaucoup disaient: «C’est un possédé du démon,un fou,» d’autres répliquaient: «Ses paroles ne sontpas celles d’un possédé, et puis le démon peut-il ouvrirles yeux des aveugles?» Joa., x, 1-21.

À la fêle de la Dédicace.

Cette fête, qui durait

huit jours, comme la précédente, commençait le 25 casleu,dans la seconde moitié de décembre. Voir Dédicace,t. ii, col 1339. Les récits évangéliques ne permettent pasde dire ce que fit Notre-Seigneur pendant les trois moisqui s'écoulèrent de la fête des Tabernacles à celle de laDédicace. Il ne resta certainement pas à Jérusalem, oùil était menacé de mort. Il revint probablement en Galilée, son séjour habituel, et y passa ces trois mois; ilest toutefois possible qu’il se soit retiré dans quelqueautre région solitaire, pour s’y occuper exclusivementde la formation de ses Apôtres. À la fête de la Dédicace,il reparut dans le Temple et se tint sous le portique deSalomon, parce qu’on était en hiver. Les Juifs l’entourèrent et lui posèrent la question: «Si tu es le Christ,dis-le nous clairement.» Jésus répondit de nouveau eninvoquant ses œuvres et en affirmant son unité avecle Père. Mais ce que demandaient les interlocuteurs,c'était moins une réponse qu’un prétexte à la violence.Ils saisirent des pierres pour le lapider. Le Sauveur lescontint par son attitude. Les Juifs l’avaient parfaitement compris; ils l’accusaient de blasphème parceque lui-même se disait Dieu, à quoi il répliqua: «Vousdites: Tu blasphèmes, parce que j’ai dit: Je suis leFils de Dieu. Si vous ne me croyez pas moi-même,ajouta-t-il, croyez à mes œuvres.» Les positions réciproques apparaissaient donc très nettes: d’un côté,Jésus se donnant comme Fils de Dieu et par conséquentcomme Messie, et prouvant son affirmation par ses miracles; de l’autre, les Juifs fermant obstinément les yeuxaux preuves proposées et persistant dans leur parti prisde regarder comme une imposture l’affirmation duSauveur. Ce jour^là encore ils essayèrent de mettre lamain sur lui; mais il leur échappa de nouveau. Joa., x,22-39.

À l’occasion de la résurrection de Lazare.


Après la fête de la Dédicace, le Sauveur retourna enGalilée, où il fit son dernier voyage aux confins dela Samarie, et de là passa en Pérée, où il reçut lanouvelle de la maladie de Lazare. Il repassa alors leJourdain et monta vers Béthanie. Le péril qu’il couraiten retournant près de Jérusalem était grand, d’où laréflexion de Thomas: «Allons, nous aussi, et mouronsavec lui.» Joa., XI, 16. La résurrection de Lazare s’accomplit dans les conditions les plus émouvantes et lesplus solennelles. Béthanie n'était qu'à trois quartsd’heure de Jérusalem, voir Béthanie, t. i, col, 1655-1660,et beaucoup de Juifs considérables étaient venus pouroffrir leurs condoléances à Marthe et à Marie. La guérison de l’aveugle-né avait laissé dans leurs esprits un vivant souvenir, Joa., xi, 37; la résurrection de Lazareen porta un grand nombre à croire en Jésus. Joa., xi,17-45. L’effet produit sur les membres du sanhédrinfut tout différent. Informés par quelques-uns des témoins du miracle, les pontifes, qui étaient sadducéens,firent valoir que la continuation des miracles finiraitpar tant agiter le peuple que les Romains interviendraient et ruineraient définitivement la nation. Caipheouvrit alors l’avis qu’un seul devait mourir pour toutle peuple, et, à dater de ce jour, on prépara les moyensde mettre à mort le Sauveur. Pour lui, en attendantl’heure prochaine de sa passion, il se retira avec ses disciples à Éphrem, dans les montagnes de Judée. Voir

Éphrem, t. ii, col. 1885-1889. Joa., xi, 46-54. Il faut noterque la mort tramée contre le Sauveur avait une apparence de légalité; elle était la conséquence de la sentence d’excommunication portée par le sanhédrin contrecelui que ce haut tribunal s’obstinait à regarder commeun violateur du sabbat et un blasphémateur. Voir Excommunication, t. ii, col. 2133-2134.

Au dernier voyage vers Jérusalem.

Le séjour à

Éphrem ne se prolongea guère au delà d’une semaineou deux; car la Pàque était proche et déjà beaucoupd’Israélites montaient à Jérusalem pour se disposer àla fête par les purifications légales. Voir Impureté légale, col. 860. On s'étonnait même déjà que Jésus nefût pas arrivé, tandis que les pontifes prenaient leursmesures pour que sa présence leur fût signalée aussitôt;en vue de son arrestation. Joa., xi, 55-56. Au jour quilui convint, le Sauveur partit secrètement d'Éphrem,au nord de la tribu de Benjamin, et se porta, vers lesud-est, dans la direction de Jéricho. Voir la carte,t. i, col. 1588. Il était accompagné de ses douzeApôtres auxquels il annonça de nouveau le sort qui l’attendait à Jérusalem. Ils ne pouvaient plus guère s'étonner d’une pareille annonce, après les tentatives dontils avaient été eux-mêmes les témoins. Cependant ils necomprirent rien à ce qui leur fut dit, ne pouvantsans doute concilier la possibilité d’une fin tragiqueavec ce qu’ils connaissaient de la puissance du Maître etavec les préjugés dont ils étaient imbus sur le règneéternel du Messie. Ils ne firent aucune attention à laprédiction d’une résurrection qui n’avait de raisond'être que si la mort précédait. Matth., xx, 17-19;Marc, x, 32-31, Luc, xviii, 31-34. Ils eurent cependantle sentiment de la fondation imminente du royaumemessianique, car deux apôtres, Jacques et Jean, appuyésde leur mère, demandèrent au Sauveur les deux placesprincipales dans son royaume. Les autres Apôtres furentindignés de cette requête. Pour tout remettre au point,le divin Maître leur expliqua que, dans son rojaume, laprimauté consisterait à servir les autres et à se dévouerpour eux. Matth., xx, 20-28; Marc, x, 35-45. À Jéricho,il guérit deux aveugles. L’affluence fut énorme pourle voir. Il descendit chez le chef des publicains,Zachée, dont il fit ainsi l’un de ses disciples. Commebeaucoup s'étonnaient qu’il eût pris gîte chez un pareilhôte, il déclara qu’il était surtout venu pour sauverceux qui périssaient. Il appuya cette déclaration par laparabole des mines ou talents, qui mettait en reliefle mauvais usage que les Juifs avaient fait des grâcesreçues et laissait entrevoir le châtiment réservé à ceuxqui allaient renier leur Messie et leur roi. Luc, xix, 11-28.Jésus se remit en route pour Jérusalem. Le sixièmejour avant la Pâque, au plus tard par conséquent laveille du sabbat, il arriva à Béthanie. Simon le lépreux lui offrit un festin, auquel furent conviés Lazare etdes disciples.Pendant le repas, Marie, sœur deMarthe, vintrépandre un vase de parfums sur la tête du Sauveur,sainte prodigalité qui excita les murmures de Judas età laquelle Notre-Seigneur donna sa pleine approbation.A la nouvelle de sa présence à Béthanie, un grandnombre de Juifs accoururent pour le voir et aussi pourcontempler Lazare, le ressuscité. Beaucoup d’entre euxcrurent encore en Jésus, ce qui suggéra aux princesdes prêtres l’idée de comprendre Lazare dans leur arrêtde mort. Matth., xxvi, 6-13; Marc, xiv, 3-9; Joa., XII, 1-11.Le lendemain, le Sauveur fit son entrée triomphaledans la ville sainte. — Si l’on compte les jours que NoireSeigneur passa à Jérusalem, à la première Pâque, quandil chassa les marchands du Temple, à la seconde Pâque,aux fêtes des Tabernacles et de la Dédicace, on voitque le nombre n’en excède guère quinze ou vingt, às’en tenir aux informations que fournit saint Jean. Letemps pendant lequel il fut, en dehors de Jérusalem,en contact aec la population de la Judée, ne paraît pas

avoir été beaucoup plus considérable. On comprendcette réserve du Sauveur. À Jérusalem, la prédicationde l'Évangile ameutait contre elle tous les préjugés,toutes les passions et toutes les haines, par le fait mêmeque Jésus-Christ ne répondait nullement à l’idée arbitraire et fausse que les docteurs juifs s'étaient faitedu Messie. Même avec les membres du sanhédrinles mieux intentionnés, comme Nicodème, l’enseignement du divin Maître devait prendre un tour dogmatiqueet s'élever à une hauteur qui ne lui permettait plusde garder la forme simple et populaire indispensable àune doctrine destinée au monde entier et à tous lestemps. Les docteurs de Jérusalem représentaient uneélite intellectuelle et religieuse avec laquelle Notre-Seigneur devait compter, puisqu’il fallait que sa doctrinesoutint l’assaut de toutes les forces de la raison humaine;mais cette élite ne se retrouverait pas communémenten face des prédicateurs de l'Évangile. Les simples etles ignorants formaient la grande masse de l’humanité:à eux convenait la doctrine du Sauveur telle qu’il laprêchait en Galilée. Il n'était donc pas nécessaire qu’ils’attardât dans des milieux cultivés comme Jérusalem;il suffisait qu’il y parût et y expliquât clairement sapensée. De plus, l’opposition des Juifs imposait à sonenseignement une allure polémique dont ne s’accommodait guère la sérénité habituelle de l'Évangile. Enfin, etc’est là une raison de toute gravité, dès que NotreSeigneur commença à enseigner publiquement, les autorités religieuses de Jérusalem, se sentant incapables delui tenir tête sur le terrain de la doctrine et des miracles,en vinrent de suite aux violences et aux tentativesde meurtre. Dans ces conditions, les séjours du Sauveur en Judée et à Jérusalem ne pouvaient être querares et rapides. Encore n’y vint-il qu'à l'époque desgrandes fêtes, quand les Galiléens s’y trouvaienten nombre, et chaque fois il opéra un grand miraclequi, en lui conciliant la faveur d’une bonne partie dela population, lui fit rencontrer en elle une protectioncontre les menées de ses ennemis. L’irrésistible puissance de sa volonté, maîtresse des hommes et desévénements, se servait de ces précautions naturellespour arriver à ses fins. Cf. Azibert, Étude historique surles huit derniers mois de la vie publique de N.S.,Paris, 1895.

V. Sa manière de vivre.

Un certain nombre detraits épars dans les récits évangéliques permettent dese faire quelque idée des relations habituelles et de lavie journalière de Notre-Seigneur pendant le cours deson ministère public, au moins en Galilée.

I. ses DELATIONS.

Avec sa mère.

Marie n’apparaît que rarement. 1. Aux noces de Cana, elle intervient

pour avertir son divin Fils que le vin va manquer. Jésus luifait entendre qu’il agira au moment opportun et l’appelle «femme», terme qui n’a rien que d’honorable en hébreu, et dont il se servira encore au Calvaire. Joa., xix,26. Elle comprend si bien sa pensée qu’elle recommandeaux serviteurs de faire tout ce qu’il leur dira. Joa., ii, 1-11.L’attitude du Sauveur est ici pleine de déférence poursa mère. Voir J. Bourlier, Les paroles de Jésus à Cana,dans la Revue biblique, 1897, p. 405-422. — 2. Quelquetemps après le sermon sur la montagne, un jour queNotre-Seigneur venait de répondre aux pharisiens quil’accusaient de chasser les démons par Béelzébub, unefemme s'écria dans la foule: «Heureuses les entraillesqui vous ont porté, les mamelles qui vous ont allaité!» A cette évocation du souvenir de sa mère, Jésus répondit: «Bien plus heureux ceux qui écoutent la parole de Dieuet la gardent!» ajoutant ainsi à la louange de celle quiétait sa mère par nature l'éloge plus délicat de celle qui,entre tous ses auditeurs, comprenait et gardait le mieuxsa parole. Luc, xi, 27, 28. — 3. Le mêmejour, pendantqu’il enseignait à l’intérieur d’une maison, on lui dit: «Voici dehors votre mère et vos frères qui vous cherchent.»

II reprit, en désignant ses disciples qui l'écoutaient: «Ma mère et mes frères, ce sont ceux qui écoutent laparole de Dieu et la pratiquent.» Matth., xii, 46-50;Marc, iii, 31-35; Luc, viii, 19-21. Cette seconde maternité appartenait encore à Marie plus qu'à tout autre. Lasainte Vierge n’apparaît plus dans l'Évangile jusqu’aujour de la passion du Sauveur. Il est probable qu’elle accompagnait habituellement son divin fils, quand ilcheminait avec ses disciples et les saintes femmes. Auxgrandes fêtes, elle ne dut pas manquer de le suivre àJérusalem. Voir Marie, mère de Jésus.

Avec ses parents.

Le Sauveur avait à Nazareth

des cousins qui sont appelés ses «frères», voir Frères,t. ii, col. 2403-2405, et des cousines qui sont appelées ses «sœurs *. Matth., un, 55, 56; Marc, vi, 3. À partJacques le Mineur, Simon et Jude, qu’il s'était attachesen qualité d’apôtres, la plupart de ses autres parentsne paraissent guère avoir compris sa mission. Un jourque, dans une maison, il était entouré d’une telle foulequ’il ne pouvait sortir pour prendre son repas, les siensvinrent le prendre en disant très irrespectueusement: «Vraiment, il est fou!» Marc, iii, 21. À Nazareth, onne les vit pas prendre parti pour le Sauveur méconnuet maltraité. Luc, iv, 28, 29; Matth., xiii, 57; Marc, vi, 3.Avant la fête des Tabernacles, ils lui conseillèrent d’alleren Judée pour se manifester et opérer ses prodiges, aulieu d’agir en cachette, c’est-à-dire en Galilée, loin ducentre intellectuel et religieux qui pouvait consacrer laréputation d’un homme. Il est vrai qu'à la Pâque précédente le Sauveur n'était pas monté à Jérusalem. Joa.,vu, 1. Saint Jean remarque que «ses frères ne croyaientpas en lui», ce qui signifie que, tout en reconnaissantla réalité de ses miracles et la célébrité que lui valaitson enseignement, ils ne le regardaient ni commeMessie, ni comme Fils de Dieu. Joa., vii, 2-7.

Avec ses Apôtres.

Notre-Seigneur les choisit luimême et travailla à leur formation. Ce choix n’eut lieu

qu’au bout d’une année, après la seconde Pàque; jusquelà, les futurs Apôtres restèrent au rang des disciples.Voir Disciples, t. ii, col. 1440. Ils accompagnaientpartout le divin Maître, et, outre les enseignements communs à tous, ils reçurent souvent des instructions oudes explications particulières. Matth., xiii, 10, 36; Marc,vu, 17; ix, 27, etc. Voir Apôtre, t i, col. 784. NotreSeigneur eut parfois à souffrir de la lenteur de leuresprit, Matth., xv, 17; xvi, 9, 11; Marc, vi, 52; vii, 18;vm, 17, 21; Luc, xviii, 34, et même de leur indiscrétion.Matth., xvi, 22, 23; xx, 20-22; Marc, viii, 32, 33; x, 35-39.4° Avec les saintes femmes.

À partir de la seconde

année de son ministère public, Notre-Seigneur fut accompagné dans ses courses apostoliques par de saintesfemmes, Marie-Madeleine, Jeanne, femme de Chusa,intendant d’Hérode, Susanne, «et beaucoup d’autres,qui le servaient avec leurs propres ressources.» Luc,vm, 1-3. Leur rôle était donc bien déterminé; pendantque le Sauveur et ses Apôtres parcouraient la Galilée,sans pouvoir songer ni au gîte, ni à la nourriture, cesfemmes dévouées pourvoyaient à tout à leurs propresdépens, avec une charité aussi discrète que généreuse.Parmi celles que ne nomme pas saint Luc, il faut sansdoute ranger en première ligne la Vierge Marie. À Mariede Béthanie se joignait aussi sa sœur Marthe. Pendant ledernier voyage de Galilée, les deux sœurs donnèrentl’hospitalité au Sauveur et à ses Apôtres dans une maisonqu’elles possédaient en ces parages. Luc, x, 38-42. EnJudée, sur le chemin d'Éphrem à Jéricho, la mère desfils de Zébédée, Jacques et Jean, s'était jointe aucortège du Sauveur. Matth., xx, 20, 21. Les saintes femmesse retrouveront pendant la passion et après la résurrection.5° Avec les enfants.

Le Sauveur témoigne aux

enfants une prédilection marquée. Il aime à les bénir,Matth., xix, 13-15; Marc, x, 13-16; Luc, xviii, 15-17,et à recommander qu’on les imite et qu’on les respecte 4463

JÉSUS-CHRIST

im

Matth., xviii, 2-6, 10; Marc, ix, 35, 30, 41. Voir Enfant,t. ii, col. 1789, 1790.

Avec les pécheurs.

Notre-Seigneur n’hésite pas

à les accueillir, à les instruire, à les traiter avec beaucoupde compassion et de bonté, afin de pouvoir ensuite leurpardonner leurs péchés. C’est ainsi qu’il procède avecla Samaritaine, Joa., iv, 7-27; avec le paralytique de Capharnaùm,Marc, ii, 5-9; avec le publicain Matthieu, àl’occasion duquel il déclare être venu non pour lesjustes, mais pour les pécheurs, Marc., ii, 14-17; Luc,v, 29-32; avec la pécheresse, Luc, vii, 37-50; avec lafemme adultère, Joa., viii, 3-11; avec Zachée. Luc, xxi,1-10. Aux pharisiens et aux scribes qui se scandalisentde cette condescendance, il révèle qu’il y a grande joieau ciel pour la conversion d’un seul pécheur, et racontela touchante parabole du prodigue. Luc, xv, 1-32.

Avec les pharisiens.

Vis-à-vis de ces hommes qui

avaient en grande partie la direction religieuse de lanation, Notre-Seigneur se montra condescendant, maisferme et même sévère, quand il le fallut. Il accepta troisfois de prendre son repas chez des pharisiens, bienqu’il ne fût pas toujours accueilli avec les égards qu’onne refusait à aucun hôte honorable, et que même là oncontinuât à l’épier et à lui tendre des pièges. Luc, vii,36-50; xi, 37-54; xiv, 1-24. Il y trouvait une occasion detravailler à la conquête de quelques âmes et à l’instructionou l’édification de beaucoup d’autres, d’autant plusque l’usage autorisait, même ceux qui n’étaient pasconviés, à pénétrer dans la salle du festin. Cf. Trench,Notes on the Parables, Londres, 1841, p. 299. Celan’empêchait pas cependant-le Sauveur d’adresser auxpharisiens de sévères reproches, surtout vers la fin deson ministère public, après qu’ils eurent tout fait pourentraver son œuvre et quand la sévérité resta le seulmoyen de convertir ceux que n’avait pu gagner la bonté.Luc, xi, 37-54; xvi, 13-18. Voir Pharisiens.

Avec la foule.

Cette foule se composait de gens du

peuple, parmi lesquels se trouvaient des pauvres, desinfirmes, des estropiés et des malades, quelquefois incapablesde se mouvoir eux-mêmes et transportés par desvoisins charitables. Cette foule était énorme autour deNotre-Seigneur. À celle que fournissait la Galilées’ajoutait celle qui accourait de la Judée, de la Pérée,de la Syrie, de l’Idumée, de la Phénicie et des bords dela mer. Matth., iv, 24, 25; Marc, iii, 7, 8; Luc, vi, 17.Divers mobiles agitaient cette foule qui se renouvelaitpartout où Jésus paraissait: la curiosité, le désir de voirdes miracles, d’en profiter pour soi-même ou d’en faireprofiter les autres, quelquefois la reconnaissance etaussi l’attrait surnaturel que le Fils de Dieu exerçait, àleur insu, sur les âmes simples et droites. Ces multitudes,en partie recrutées parmi les gentils, se montraientsouvent indiscrètes, sans que jamais le bon Maître seplaignît. Elles encombraient les maisons où il était entré,Marc, ii, 2; Luc, viii, 19; ne lui laissaient même pasle temps de prendre sa nourriture, Marc, iii, 20; vi, 31;se précipitaient sur lui, Marc, iii, 10; le pressaient, Marc,y, 24; le retenaient pour l’empêcher de s’en aller. Luc, IV,42. Il en était arrivé à ne plus pouvoir entrer dans lesvilles et se voyait obligé de rester dans la campagne, pourque la foule pût trouver placeautour de lui. Marc., 1, 45. Ellele suivait, même au prix de longues courses, jusquedans des lieux inhabités. Matth., xiv, 13-15; Marc, vi,31-34; Luc, ix, 10, 11; Joa., vi, 5, etc. Jésus éprouvaitun profond sentiment de compassion en voyant cesmilliers d’hommes qui le suivaient ainsi. Matth., xv, 32;Marc, vi, 31; viii, 2. Cette compassion n’était pas stérile;elle se traduisait par des guérisons et des miracles detoutes sortes. En Galilée, les multitudes se montraienttrès sympathiques au divin Maître; les notes discordantesvenaient ordinairement des pharisiens et des scribesenvoyés de Jérusalem. Dans la ville sainte, où Notre-Seigneurne se rendait qu’à lVpoque des grandes fêles,

les Juifs ne pouvaient aisément manifester la haine quianimait bon nombre d’entre eux contre lui; car l’élémentgaliléen s’y trouvant alors fortement représenté, iln’eût pas été prudent de violenter le Sauveur sous lesyeux de ses compatriotes. Luc, xxii, 2. Pour se faireune idée juste du dévouement surhumain de Jésus etde l’effet qu’il produisit sur les masses, il importe de sele représenter presque sans cesse entouré de ces foulesimmenses, se faisant écouter d’elles et multipliant enleur faveur, avec une imperturbable patience, les preuvesde sa puissance et de sa bonté.

II. SA vie journalière.

L’habitation.

Depuis

qu’il avait quitté Nazareth, Notre-Seigneur n’avait plusde demeure fixe. Capharnaum, que saint Matthieu, IX, 1,appelle «sa ville», était le centre principal d’oùrayonnait son activité. Voir Capharnaum, t. ii, col. 201203. Joa., Il, 12, Matin., iv, 13. Il est probable que, dtns

266. — Image antique du Christ. — Cimetière de S. Gaudioso àNaples. D’après Garrucci, Storia deW arte Christiana, t. IIpi. 104.

cette ville, quelque disciple avait mis une maison à sadisposition. Pendant ses courses apostoliques, Jésus trouvaitaisément l’hospitalité chez les habitants du paysqu’il visitait. Voir Hospitalité, col. 762. Il pratiquaitsans doute pour son propre compte les recommandationsqu’il faisait à ses Apôtres et à ses disciples: àl’arrivée dans une localité, demander quelle est la maisonhonorable, s’y présenter en disant: «Paix à cettedemeure,» et y rester durant tout son séjour en cemême lieu, sans passer de maison en maison. Matth., x,11, 12; Marc, vi, 10; Luc, IX, 4; x, 5-7. Mais biensouvent, quand il se retirait loin des villes et des bourgades,il pouvait dire que le Fils de l’homme n’avaitpas ou reposer sa tête, tandis que les chacals ont leurtanière et les oiseaux leur nid. Matth., viii, 20; Luc,ix, 58. À Jérusalem, il était reçu chez quelque autredisciple. Il en est un qui devint son hôte au moment dela dernière Cène. Matth., xxvi, 18; Marc, xiv, 13-15;Luc, xxii, 11, 12. Mais celui-là ne devait pas donnerhabituellement asile au Sauveur, puisque Judas ignorasa maison jusqu’au moment où il y pénétra. Notre-Seigneurlogeait vraisemblablement dans l’intérieur dela ville, quand Nicodème vint le trouver «de nuit».Joa., iii, 2. Des que la persécution devint plus mena

çante, au lieu de passer la nuit en ville, il se retirait lesçir sur la montagne des Oliviers, peut-être à Bethphagé,où on le connaissait bien. Joa., viii, 1; Matth., xxi, 2, 3;Marc, xi, 2, 3; Luc, xix, 30, 31.

Le costume.

Le Sauveur était vêtu comme le

commun des Galiléens, sans ces recherches et ces élégancespar lesquelles certains personnages attiraientsur eux l’attention. Matth., xi, 8; xxiii, 5. Il portaitsur la tête le kouffièh ou turban flottant, qui étaitd’usage invariable parmi ses compatriotes et que leclimat rendait indispensable, surtout en voyage. VoirCoiffure, t. ii, col. 828. Il avait une tunique sans couture,Joa., xix, 23, et le manteau un peu ample qu’uneceinture relevait et serrait autour des reins quand ilvoulait marcher. Voir Ceinture, t. ii, col. 392, 3°. Cesvêtements n’étaient pas tout blancs, car ils le devinrentà la transfiguration, Matth., xvii, 2, ni probablementrouges, cette couleur étant réputée luxueuse et plusspéciale au manteau militaire. Matth., xxvii, 28. VoirCochenille, , t. ii, col. 818, 3°, 4°. Le brun, le bleu etles rayures de couleur sur fond blanc étaient alorsd’usage commun, et l’on employait, à la confection desvêtements, surtout la laine, puis le fin et peut-être lecoton. Voir Étoffes, t. ii, col. 2036. Le Sauveur étaitchaussé de sandales retenues par des courroies. Matth.,m, 11; Marc, 1, 7; Luc, iii, 16; Joa., i, 27. VoirChaussure, t. ii, col. 633, 634. Un bâton lui servait desoutien pendant la marche et parfois de défense contreles animaux sauvages, surtout la nuit. Voir Bâton, 1. 1,col. 1509. Notre-Seigneur avait recommandé à ses Apôtresde s’en aller prêcher dans le plus simple appareil:rien qu’un bâton, pas de provisions, pas d’argent, pasde rechange pour la tunique ni les sandales. Matth., x,9; Marc, vi, 8, 9; Luc, IX, 3; x, 4. Ainsi procédait-ilvraisemblablement lui-même. Sur les traits du Sauveur,d’après les anciennes peintures, voir fig. 266 et 267, etBeauté, 1. 1, col. 1534; Philpin de Rivière, La physiologiedu Christ, Paris, 1899, p. 250-270. Pour l’iconographiedu Sauveur, voir E. von Dobschutz, Christusbilder.Untersuchungen zur cliristlichen Legenden, 2 in-8°,Leipzig, 1899 (bibliographie de la prosopographie depuis1649 jusqu’à nos jours, t. ii, p. 293**); F. X. Kraus,Iieal-Encyklopàdie, t. ii, p. 24; H. Detzel, ChrhtlichaIkonographie, 2 in-8°, Fribourg-en-Brisgau, 1894-1896,t. i, p. 75-93: E. Hennecke, Altchristliche Malerei, in-8°,Leipzig, 1896, p. 79-84; Ad. Beissel, Bilder aus derGeschichte der allchristhchen Kunst, in-8°, Fribourgen-Brisgau,1899.

La nourriture.

Le Sauveur se contentait naturellement

des aliments les plus communs, ceux qu’ilnomme lui-même dans une de ses instructions, le pain,le poisson, les œufs. Matth., vii, 9, 10; Luc, xi, 11, 12.Ce pain était ordinairement du pain d’orge et ces poissons,des poissons du lac de Tibériade, que les Apôtreseux-mêmes eurent de temps en temps l’occasion depêcher, que l’on faisait sécher et qui s’expédiaient ensuitedans tout le pays. Matth., xiv, 17; xv, 34; Marc,vi, 38; viii, 7; Luc, ix.13; Joa., vi, 9. Les Apôtres allaientquelquefois eux-mêmes chercher ces provisions, Joa.,IV, 8, et les emportaient avec eux quand il était nécessaire.Marc, viii, 14. Les saintes femmes pourvurenthabituellement à ce soin. Luc, viii, 3. Toutefois lesApôtres disposaient de quelque argent pour acheter lenécessaire en certaines circonstances. Joa., vi, 6, 7.Judas fut chargé de tenir la bourse et de faire certainsachats. Joa., xiii, 29. Le divin Maître accepta plusieursfois de prendre part à des repas plus importants. Matth.,ix, 9-17; Luc, vii, 36; xiv, 1; xix, 1-10; Joa., ii, 2;xii, 1-10. Comme il vivait de la vie commune et nepratiquait pas les mortiûcations extraordinaires de saintJean-Baptiste, certains esprits étroits se scandalisaientet l’appelaient «gourmand et buveur de vin», ainsiqu’il le remarque lui-même. Matth., xi, 19; Luc, vii, 34.

Le repos.

Il n’en est guère question dans la vie

publique du Sauveur. Quand il passe par la Samarie,il est fatigué du chemin et s’assied près du puits deJacob; mais c’est pour travailler aussitôt à l’instructionde la Samaritaine. Joa., IV, 6. Pendant une traverséedu lac de Tibériade, il dort dans la barque, la têteappuyée sur un coussin. Matth., viii, 24; Marc, iv, 38;Luc, viii, 23. Mais il passait aussi des nuits en prière,Luc, vi, 12, et il aimait à prier dans la solitude. Marc,1, 35; Luc, v, 16; xi, 1. C’était là son repos.

La prédication.

Elle fut l’occupation principale

du Sauveur pendant sa vie publique. Il faisait entendrepartout sa parole, au bord du lac, Matth., xiii, 1; Marc,iv, 1; du haut d’une barque, Luc, v, 3; dans la campagne,Matth., v, 1; Luc, vi, 17; dans les maisons,

+DEDONI.SDEIGAVDIO SVS FECITI267, — Image antique du Christ. — Cimetière de Pontien.D’après Garrucci, Storia deW arte Christiana, t. II, pl. 86.

Matth., xii, 46; Marc, ii, 2; et surtout dans les synagogues.Marc, i, 21; Matth., xii, 9; Joa., vi, 60, etc.Voir Synagogue.

VI. Dernière semaine de la vif. de Jésus. — Les sixderniers jours de la vie de Notre-Seigneur ont uneimportance extrême, parce que c’est pendant ces joursqu’il remplit, de la manière la plus imprévue, la plustragique et la plus émouvante, sa mission de Rédempteur.Aussi les Évangélistes sont-ils riches de détailssur cette courte période, saint Jean menant ici son récitparallèlement à celui des synoptiques, mais ajoutantbeaucoup de traits et surtout beaucoup de discoursdont ses devanciers, toujours tributaires des nécessitésde la prédication populaire, n’avaient pas fait mention.

I. LE PREMIER JOUR (DIMANCHE DES RAMEAUX). —

1° Le lendemain du festin chez Simon le lépreux, lequelavait eu lieu probablement le jour du sabbat, Joa., xii,12, Jésus partit de Béthanie pour Jérusalem. Les Juifs,croyants ou sceptiques, qui s’étaient rendus dans lapremière localité, Joa., xii, 9, le devancèrent et portèrentdans la ville sainte la nouvelle de son arrivée.A quelque distance du petit village de Bethphagé, voirBethphagé, 1. 1, col. 1706-1709, et Revue biblique, 1892,

p. 105-106, le Sauveur envoya prendre un ànon atlachéà une porte dans un carrefour, et en fit sa monture.Voir Ane, t. i, col. 570-571. Puis il commença à descendrela pente du mont des Oliviers pour remonterle flanc opposé de la vallée du Cédron. Il est à remarquer,et deux Évangélistes ne manquent pas de le faire,Matth., xxi, 4, 5; Joa., xii, 14-16, qu’une prophétie deZacharie, ix, 9, annonçait l’entrée, à Jérusalem, duMessie monté sur un ânon. La résurrection de Lazare,récemment opérée, avait procuré au Sauveur une popularitéplus grande que jamais. La foule l’accompagnadonc avec toutes les marques de respect qu’on prodigueà un triomphateur: les cris de joie, les manteaux étendussur la route en guise de tapis, les rameaux d’oliviersagités par toutes les mains. De Jérusalem, oùaffluaient déjà les pèlerins de la Pàque prochaine,d’autres vinrent en grand nombre au-devant de Jésus.Une multitude énorme l’escortait, en le saluant denoms qui, dans l’esprit de tous, désignaient le Messie:fils de David, celui qui vient au nom du Seigneur. Envain des pharisiens scandalisés lui demandèrent defaire cesser ces cris. II s’y refusa. Matth., xix, 9;Marc, xi, 1-10; Luc, xix, 29-40; Joa., xii, 12-19.

— 2° En approchant de la ville, Jésus se mit à pleurersur elle, et prédit le terrible sort qui lui était réservé,pour n’avoir pas voulu reconnaître son Messie. Luc,xix, 41-44. — 3° Arrivé à Jérusalem, il entra dans leTemple et jeta un coup d’oeil sur ce qui s’y trouvait.Mais comme c’était le soir et qu’il ne voulait pas resterdans la ville pendant la nuit, a cause des desseinsperfides de ses ennemis, il s’en retourna avec ses douzeApôtres à Béthanie, Matth., xxi, 17; Marc, xi, 11, oudans le voisinage. Luc, xxi, 37-38. Cette journée detriomphe exaspéra les pharisiens, qui constatèrent quetout le monde allait à Jésus. Joa., xii, 19.

il. le second jour (lundi saint). — 1° Le matin dece jour, Jésus reprit la route de Béthanie à Jérusalem.Chemin faisant, il eut faim et chercha des fruits sur unfiguier; mais il n’y trouva que des feuilles et le maudit.Voir Figuier, t. ii, col. 2239. Cette malédiction était symboliqueet tombait sur ces Juifs chez qui la frondaisondes pratiques traditionnelles abondait, mais qui ne portaientaucun fruit de vertu. Matth., xxi, 18, 19; Marc, xi,12-14. — 2° Entré dans le Temple, le Sauveur se mit endevoir d’y faire cesser les désordres qu’il avait constatésla veille. Il chassa de nouveau les marchands, accouruspour vendre aux étrangers les objets nécessaires à laPàque, et empêcha qu’on ne traitât la maison de’prièreen heu profane. Il alla alors jusqu’à accuser les Juifsd’en avoir fait une caverne de voleurs. Voir Changeursde monnaie, t. ii, col. 549; Commerce, t. ii, col. 888. À lapremière Pàque à laquelle il assista pendant sa vie publique,il avait déjà fait" une semblable exécution dansdes conditions qui supposaient, semble-t-il, des abus plusgrands. Joa., ii, 13-22. Ces abus avaient repris, avec laconnivence des grands-prêtres qui, devenus des hommesde lucre, permettaient aux marchands de s’installer avecdes animaux dans le parvis des gentils et ne manquaientpas de tirer avantage de cette concession sacrilège. VoirGrand-Prètre, col. 302. Une nouvelle ovation accueillitcette intervention du Sauveur. Des aveugles et des sourdsvinrent à lui et furent guéris, et les enfants recommencèrentà acclamer, comme la veille, le fils de David. Lesdesseins homicides du sanhédrin s’accentuèrent encore,mais la présence d’une foule nombreuse et sympathiqueautour de Jésus les mettait dans le plus grand embarras.Matth., xxi, 12-16; Marc, xi, 15-18; Luc, xix, 4548. —3° Peut-être faut-il assigner à ce même jour un incidentque saint Jean, xii, 20-36, est seul à relater. Des Grecs,venus dans le Temple pour adorer le Seigneur, commeil leur était permis de le faire dans le parvis des gentils,t’adressèrent à Philippe pour voir Jésus. Le Sauveur,sans parler directement à ces hommes, annonça publiquement la glorification dont il allait être l’objet de lapart de son Père. Comme pour confirmer cette prédiction,une voix se fit entendre du ciel et frappa les oreillesde la foule, qui crut à un éclat de tonnerre ou à l’interventiond’un ange. Notre-Seigneur ajouta que le momentétait venu où «le prince de ce monde», Satan, allait êtrejeté dehors, que, pour lui-même, il devait être élevé deterre pour attirer tout à lui. La foule comprit qu’il faisaitallusion à sa mort et en fut déconcertée, car on croyaitque le Christ devait demeurer éternellement. Le Sauveurse contenta d’inviter ceux qui l’écoutaient à profiter dela lumière qui ne luirait plus à leurs yeux que trèspeu de temps. Puis il se déroba à la foule et retournade nouveau du côté de Béthanie pour y passer la nuit.Joa., xii, 36; Matth., xxi, 17; Marc, xi, 19.

/II. LE TROISIEME JOUR (MARDI SAINT). — 1° Sur le

chemin, pendant le retour à Jérusalem, les Apôtres remarquèrentque le figuier maudit la veille était desséché.Notre-Seigneur leur expliqua qu’avec une foi vive ilspourraient non seulement produire un semblable effet,mais encore faire changer de place une montagne.Matth., xxi, 20-22; Marc, xi, 20-26. — 2° Les membres dusanhédrin attendaient Jésus dans le Temple. Sitôt qu’ilsl’aperçurent, ils vinrent à lui et, au sujet de ce qu’ilavait exécuté la veille en chassant les marchands, luiposèrent cette question devant le peuple: «En vertu dequel pouvoir agis-tu ainsi?» Le Sauveur avait déjà réponduplusieurs fois qu’il agissait par l’ordre de son Pèreet que ses miracles attestaient sa mission. Au lieu dele croire, ils avaient cherché à le saisir pour le mettreà mort. À des hommes qui avaient droit d’interroger,puisqu’ils étaient les docteurs d’Israël, mais qui, à cetitre, devaient savoir à quoi s’en tenir sur la mission deceux qui se présentaient au nom de Dieu, Jésus se contentade poser à son tour une question: «Dites-moid’abord de qui était le baptême de Jean, de Dieu ou deshommes?» Rien ne pouvait les embarrasser davantage.Dire: «Il est de Dieu,» c’était reconnaître la missiondivine de Jean-Baptiste et par conséquent la valeur dutémoignage qu’il avait rendu en faveur de Jésus-Christ;dire: «Il est des hommes,» c’était heurter de front laconviction du peuple qui regardait Jean-Baptiste commeun prophète. Ils crurent se tirer d’affaire en répondant: «Nous ne savons pas.» Par cette réponse, ils constataientdevant la foule leur ignorance en un sujet sur lequel leurdevoir les obligeait à instruire les autres; à quoi leurservait-il d’être docteurs et chefs religieux, s’il n’avaientpas d’avis sur un fait aussi grave? Jésus leur dit alors: «Je ne vous répondrai pas à ce que vous me demandez.» Incapables de juger Jean-Baptiste, comment pouvaientilsjugerJésus? Matth., xxi, 23-27; Marc, xi, 27-33; Luc,xx, 1-8. — 3° Le divin Maître expliqua alors, en troisparaboles, le rôle des Juifs dans la question messianique.La parabole des deux fils envoyés à la vigne montre lespharisiens qui font parade d’obéissance à Dieu et n’obéissentpas, tandis que les pécheurs et les pécheresses,d’abord indociles, accourent au royaume de Dieu. Nonseulement les chefs religieux de la nation refusent devenir au Messie, mais ils s’apprêtent à le faire mourir,comptant prendre pour eux l’héritage que le Père lui aassigné: c’est ce qu’explique la parabole des vigneronshomicides. Les princes des prêtres comprirent si bienle sens accusateur de cette parabole, qu’ils auraient misla main sur le Sauveur, si la crainte du peuple ne leseût retenus. Mais Jésus continua et, dans la parabole dufestin, fit voir que les gentils seraient substitués aux Juifsdans le royaume de Dieu. Matth., xxi, 28-xxii, 14; Marc,XII, 1-12; Luc, xx, 9-19. Les pharisiens’furent surtoutblessés dans leur orgueil quand le Sauveur leur préditque le royaume de Dieu leur serait ôté pour être transmisà une nation qui en tirerait profit. Il eut beau montrerque cette substitution était la conséquence de leurpropre conduite, prédite par l’Écriture, quand ils rejet

teraient la pierre angulaire sur laquelle Dieu entendaitbâtir. Nulle idée ne pouvait les révolter davantage quecelle de n’être plus le peuple de Dieu. — 4o Pour prendreune revanche publique sur le terrain qui avait entraînéleur’défaite au début de cette journée, les ennemisdu Sauveur revinrent, probablement dans l’aprèsmidi,et lui posèrent une série de questions destinées àl’embarrasser. Ce fut d’abord une question politique,formulée par les pharisiens et les hérodiens, celle du tributà César. Voir César, t. ii, col. 449; Impôts, col. 853.Il était délicat de prendre parti. Notre-Seigneur fit uneréponse telle que tout l’odieux de la question retombaSur ses interlocuteurs. Ceux-ci n’eurent plus qu’à setaire et à s’en aller. Matth., XXII, 15-22; Marc, XII, 13-17;Luc, xx, 20-27. La calomnie qu’ils formuleront bientôtdevant Pilate, Luc, xxiii, 2, montre assez quelle réponseils eussent désirée. — Voyant que ces premiers interrogateursétaient battus, des sadducéens, probablement desprinces des prêtres, qui n’admettaient pas la résurrection,apportèrent contre ce dogme une difficulté qui leurparaissait absolument insoluble. Le Sauveur leur répliquaen tirant de l’Écriture une démonstration de larésurrection. Des docteurs de la loi, présents à l’entretien,applaudirent la réponse, et les sadducéensrenoncèrent à se mettre en avant. Matth., xxii, 23-33;Marc, xii, 18-27; Luc, xx, 27-40. — Des pharisiensrevinrent alors et l’interrogèrent sur un pointqu’ils osaient bien mettre en discussion: «Quel est leplus grand commandement de la loi?» Jésus affirmaque c’est le premier, qui prescrit l’amour de Dieu, et lesecond, qui est tout semblable et prescrit l’amour duprochain. L’un des docteurs présents approuva cetteréponse et alla même jusqu’à ajouter, contrairement àl’opinion de la plupart des pharisiens, que l’amour duprochain a le pas sur les sacrifices. Cette affirmation luivalut du Sauveur cette assurance: «Toi, tu n’es pas loindu royaume de Dieu.» Personne n’osa plus, dès lors,interroger Jésus. Matth., xxii, 34-40; Marc, XII, 28-34.Lui-même alors prit les devants et leur demanda dequelle manière le Christ peut être le fils de David. Personnene sut que répondre. Matth., xxii, 41-46; Marc., xii,35-37; Luc, xx, 41-44. — 5o Une foule nombreuse suivaitavec attention tous ces débats et écoutait avidementles paroles du Sauveur. Marc, xii, 37. Même parmi lesprincipaux personnages, beaucoup croyaient en lui, maisn’osaient se déclarer, parce que le sanhédrin avait portéla peine de l’excommunication contre tous ceux qui, enJésus, reconnaîtraient le Christ. Joa., IX, 22. Le Sauveur,pour convaincre les hésitants et les incrédules, répétaitdonc qu’il parlait au nom de son Père, qu’il venait pourêtre la lumière et le salut du monde, et non pour lejuger actuellement, que l’écouter, c’était écouter sonPère et gagner la vie éternelle. Joa., XH, 37-50. L’aveuglementpersistait chez ceux-là même qui auraient dû serendre les premiers et conduire le peuple à son Messie.Ce soir-là, comme les jours précédents, aprè; avoir enseignédans le Temple, le Sauveur se retira sur la montagnedes Oliviers, du côté de Béthanie. De bon matin,le peuple était déjà dans le Temple, prêt à l’écouter.Luc, xxi, 37-38.

IV. LE QUATRIÈME JOUR (MERCREDI SAINT). — 1o Le

Sauveur revint au Temple le mercredi malin, commele donne à penser le texte de saint Matthieu, xxii, 46.Toutes ses exhortations aux Juifs avaient été à peu prèsvaines, surtout par la faute des scribes et des docteursqui égaraient le peuple. Le Sauveur, sans pitié désormaispour des hommes qui conduisaient les autres àleur perte, dénonça publiquement leur orgueil et leurcupidité, stigmatisant toutes leurs prétentions aux honneurset leur dureté pour les autres. Matth., xxiii, 1-12;Marc, xii, 38-40; Luc, xx, 45-47. Passant ensuite auxpharisiens, il maudit leur hypocrisie, leur avarice, leurformalisme étroit, leur mépris des grands préceptes du

Seigneur, leur cruauté meurtrière contre tous les prophètes;et, lançant à Jérusalem une dernière apostrophepleine de tendresse, il prédit aux Juifs que leur maison,leur ville serait abandonnée, c’est-à-dire rejetée de Dieuet privée de ses habitants. Matth., xxiii, 13^-38. Les scribeset les pharisiens ne répliquèrent pas. Ils tenaienten réserve des arguments d’une autre nature. — 2o Cemême jour, en effet, l’un des douze, Judas, poussé parle démon, vint trouver les princes des prêtres, et, pourtrente deniers, voir Denier, t. ii, col. 1380, s’engagea àleur livrer Jésus à la première occasion propice. Matth.,xxvi, 14-16; Marc, xiv, 10, 11; Luc, xxii, 3-6. — 3o CependantJésus, qui se trouvait dans le Temple pour ladernière fois, s’avança jusque dans le parvis des femmes,près du trésor. Voir Gazophylacium, col. 135. Là il eutl’occasion de faire ressortir la charité d’une pauvrefemme qui versait dans le trésor deux petites pièces demonnaie. C’était la vraie cl.arité, faisant contraste avecl’ostentation égoïste des pharisiens. Marc, xii, 41-44;Luc, xxi, 1-4. — 4o Jésus alors sortit du Temple;comme ses Apôtres lui en faisaient remarquer la superbestructure, il en prédit la ruine totale. Matth., xxiv, 1, 2;Marc, xiii, 1, 2; Luc, xxr, 5, 6. — 5o Arrivé au montdes Oliviers, le Sauveur s’assit, ayant en face de lui Jérusalemet le Temple» Un long entretien avec les Apôtrescommença. Ceux-ci, après avoir entendu prédire laruine du Temple, posèrent naturellement cette question: «Quand arriveront ces choses?» Jésus énuméra lessignes avant-coureurs de la ruine de Jérusalem et de lafin du monde. Voir Fin du monde, t. ii, col. 2263.Comme le premier événement est la figure du second,les Evangélistes passent insensiblement de l’un à l’autre.Certains traits d’ailleurs sont communs aux deux catastrophes.Saint Luc, qui écrivit à une époque plus voisinede l’accomplissement de la prophétie sur Jérusalem,distingue plus nettement que les deux autressynoptiques entre la ruine de la ville et la fin dumonde. Matth., xxiv, 4-35; Marc, xiii, 5-31; Luc, xxi,8-33. — Notre-Seigneur n’avait pas pour but de satisfairela curiosité des Apôtres. Aussi, après leur avoir annoncéles événements, les exhorta-t-il à s’y tenir préparés,et pratiquement à être toujours en mesure deparaître devant le souverain Juge. La parabole des dixvierges, puis celle des talents prêtèrent une forme concrèteaux conseils du divin Maître. Matth., xxiv, 36-xxv30; Marc, xiii, 32-37; Luc, xxi, 34-36. — Le Sauveuracheva en décrivant le jugement dernier, par lequeltout doit se terminer. Matth., xxv, 31-46. Voir Jugementdernier. Cet enseignement eschatologique ne futdonné qu’aux seuls Apôtres et à quelques disciples. —6o Ce même jour, après avoir terminé son long entretien,Jésus dit aux disciples: «Vous savez, dans deuxjours on fait la Pàque et le Fils de l’homme sera livrépour être crucifié.» Aux prophéties à échéance lointainesuccédait la prophétie à échéance immédiate. De soncôté, le sanhédrin se réunit chez Caiphe pour prendreses dernières résolutions. Mais on fut d’accord pouréviter un éclat le jour de la fête, de peur d’exciter desdésordres parmi le peuple. Matth., xxvi, 1-5; Marc, xiv, 12; Luc, xxii, 1, 2. Ce ne fut pas la volonté du sanhédrin,mais celle du Sauveur qui prévalut. Jésus fut jugé etmis en croix le jour de la fête, et il n’y eut pas de désordreparmi le peuple. — La fête de la Pàque attirait àJérusalem une foule énorme d’Israélites venus de toutesles contrées du monde. Josèphe, Bell. jud., III, xiv, 3,parle de trois millions d’hommes présents au momentde la fête des Azymes, et encore, Bell. jud., VI, ix, 3,de deux cent cinquante-six mille agneaux immolés dansle Temple à l’occasion de la solennité pascale. Or, ajoulet-il,on ne pouvait jamais être moins de dix, on étaitsouvent jusqu’à vingt pour manger chaque agneau. Ilse peut qu’il y ait quelque exagération dans ces supputations;mais encore faut-il tenir compte de tous les un

JÉSUS-CHRIST

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étrangers qui venaient à ce moment à Jérusalem et detous les Israélites présents dans la ville qu’une raisonou une autre empêchait de manger la Pàque. Au milieud’une si extraordinaire affluence, rien n'était plus à redouter qu’un soulèvement. C’est cependant à traverscette multitude que se déroulèrent les principales scènesde la passion du Sauveur, fait qu’il ne faut pas oublier,si l’on veut avoir une idée exacte du caractère grandiosede ces scènes et de la part prise par tout un peuple à lacondamnation de son Messie.

v. le cinquième jour (jeudi saint). — 1° Préparationde la Cène. — Le mercredi, le Sauveur avait dit à' sesApôtres: «Bans deux jours, ce sera la Pâque et le Filscfe l’homme sera livré et crucifié.» Matth., xxvi, 2. Lepremier jour des Azymes, d’après les synoptiques, lesApôtres demandèrent donc à Jésus où il voulait qu’onpréparât la Pâque. Au lieu de choisir Judas, qui, semblet-il, était ordinairement chargé de remplir les fonctionsde ce genre, Joa., xiii, 29, mais dont il fallait maintenant se défier plus que jamais, le Sauveur chargea Pierreet Jean de s’occuper des préparatifs. Pour que Judas nepût connaître à l’avance le lieu du rendez-vous, qu’illui eût été par trop facile d’indiquer aux princes desprêtres, Notre-Seigneur dit aux deux apôtres de suivresimplement un homme portant une cruche d’eau, qu’ilsrencontreraient à la porte de la ville. Le Cénacle, oùse célébra la dernière Cène, était situé à l’extrémité méridionale de Jérusalem, dans un lieu qui setrouvait à cette époque aussi éloigné que possible descentres d’agitation. Voir Cénacle, t. ii, col. 399-403. Leplus facile chemin pour y arriver en venant de la montagne des Oliviers descendait la vallée du Cédron etmenait en ville par la porte de la Fontaine. II Esd., xii,36 (hébreu). L’homme que les Apôtres rencontrèrent àcette porte remontait tout naturellement de la fontainede Siloé. Ils le rejoignirent d’autant plus aisémentqu’une différence de niveau de plus de quarante mètresséparait la fontaine du Cénacle, et que l’homme allaitlentement en montant la pente. Les Apôtres préparèrenttout dans le lieu indiqué. Le soir, le divin Maître y vintavec les douze pour célébrer la Pàque. — Sur le jouroù fut célébrée cette Pàque et sur le cérémonial qui futsuivi, voir Cène, t. ii, col. 408-417; Chronologie biblique,col. 734-736. Cf. Semeria, Le jour de la mort de Jésus,dans la Revue biblique, 1896, p. 78-87; Chwolson, Daslelzte Passamahl Christi, Saint-Pétersbourg, 1892.

Episodes divers.

Trois incidents remarquables

se produisirent au cours du festin. Comme ces incidentsse rapportent aux défaillances des Apôtres, saint Luc,xxil, 21-34, conformément à sa méthode historique, lesgroupe tous les trois ensemble en les rattachant au dernier, la prédiction du reniement de saint Pierre, quiest postérieure à l’institution de la sainte Eucharistie.Cf. H. Lesêtre, La méthode historique de S. Luc, dansla Revue biblique, 1892, p. 179-184. Mais les deux premiers sont antérieurs à cette institution. — Les Apôtrescommencent par se disputer sur une question de préséance, suite naturelle de la demande formulée naguèrepar les deux fils de Zébédée. Matth., xx, 20-28. NotreSeigneur leur déclare que, dans son royaume, la primauté consistera à servir les autres. Puis, joignant à laparole un exemple des plus inattendus, il prend le costume de l’esclave et se met à laver les pieds de ses Apôtres. Luc, xxii, 24-30; Joa., xiii, 1-17. Voir Lavementdes pieds. — On se remet ensuite à table et le Sauveurdénonce formellement aux douze la trahison de l’und’eux. Pour indiquer le traître à saint Jean, il tend unebouchée de pain trempé à Judas et lui dit: «Ce que tufais, fais-le vite.» Judas sort aussitôt; mais, à part saintJean, chacun croit qu’il est parti pour l’exécution d’unordre du divin Maître. Matth., xxvi, 21-25; Marc, xiv, 1821; Luc, xxii, 21-23; Joa., xiii, 18-30. Quand, le lendemain, Judas verra le résultat de sa trahison, il rapportera

aux grands-prêtres l’argent qu’il a reçu et ira se pendre endésespéré. Matth., xxvii, 3-10. Voir Judas Iscariote. —Le troisième incident n’a lien qu’après l’institution dela sainte Eucharistie, peut-être même, d’après saint Matthieu, xxvi, 30-35; Marc, xiv, 26-31, seulement après ledépart du cénacle. Notre-Seigneur ayant annoncé auxonze Apôtres qui restent qu’ils vont tous l’abandonner,Pierre s’opiniâtre à promettre une fidélité inébranlableet s’attire la prédiction de son triple reniement. Luc,xxii, 31-34; Joa., xiii, 36-38. Voir Pierre (Saint).

Institution de l’Eucharistie.

Vers la fin du festin pascal, Jésus institue la sainte Eucharistie, en changeant le pain et le vin en son corps et en son sang,

en les distribuant à ses Apôtres et en leur ordonnant defaire la même chose en mémoire de lui. Matth., xxvi,26-29; Marc, xiv, 22-25; Luc, xxii, 19-20. Voir Cêke,t. ii, col. 416, 417. Tout oblige à prendre dans le sensle plus littéral les paroles du Sauveur: «Ceci est moncorps, ceci est mon sang;» la solennité de la circonstance, dans laquelle Notre-Seigneur, qui se sait à laveille de sa mort, exprime ses volontés suprêmes, commetout homme le fait à pareille heure, dans un langagesimple et clair, Joa., xvi, 25, 29; les termes mêmes qu’ilemploie pour identifier ce qu’il donne avec son corpsqui va être livré et son sang qui va être versé pour leshommes; la mention de la «nouvelle alliance» quiserait de beaucoup inférieure à l’ancienne si, au lieud'être scellée par un sang véritable, elle ne l'était quepar un vin vulgaire; la conformité parfaite entre le dondu corps et du sang de Jésus comme nourriture et lapromesse si formelle qu’il en a faite antérieurement,Joa., vi, 48-58; l’insignifiance absolue de ce que le Sauveur, si puissant et si libéral, eût laissé à l’humanitérachetée, si le don n’eût consisté que dans un morceaude pain et un peu de vin rappelant son souvenir oufigurant sa personne; l’impossibilité littérale d’expliquerdans le sens d’un simple souvenir, d’une image ou d’uneligure les expressions si catégoriques et si claires dontse sert ici le divin Maître; enfin l’inconvenance suprêmequ’il y aurait à supposer que Notre-Seigneur, avec saprescience de l’avenir, ait pu laisser son Église croire àsa présence réelle sur la foi d’expressions dont la clartéeût constitué un piège pour ses disciples et pour tous lescroyants. Il est donc incontestable que Jésus a voululaisser aux hommes dans l’Eucharistie son corps et sonsang. Et ce qu’il a voulu, il a pu l’accomplir en vertude cette puissance dont ses miracles antérieurs ontfourni tant de preuves irréfragables. De même que laformule: «Le Verbe s’est fait chair,» suppose en lui lapersonne complète, divinité, âme et corps, ainsi lesexpressions: «Ceci est mon corps, ceci est mon sang,» entraînent dans l’Eucharistie la présence complète duVerbe incarné, divinité, âme, corps et sang, parce quedepuis la résurrection du Sauveur, tous les élémentsconstitutifs de sa personnalité sont inséparables. Rom.,VI, 9.

Discours après la Cène.

Après l’institution de

l’Eucharistie, Notre-Seigneur eut avec ses Apôtres unlong entretien pour épancher son âme dans la leur etleur transmettre ses derniers conseils. Les Apôtresétaient effrayés par toutes les allusions qui venaient d'êtrefaites à des événements tragiques et imminents. Pourles encourager, le Sauveur leur annonce qu’il retourneà son Père, mais que cependant il ne les laissera pasorphelins et leur enverra l’Esprit-Saint, chargé de continuer son œuvre sur la terre. Joa., xiv, 1-31. VoirEsprit-Saint, t. ii, col. 1968. Quittant alors la salle dufestin, Joa., xiv, 31, sans doute pour prendre le cheminde Gethsémani, il continua à leur parler. Il leur expliquace qu’est la vie surnaturelle, avec son double fruit,l’amour réciproque de Dieu et de l'âme et l’amour duprochain. Cette vie les aidera à triompher de la hainedu monde, qui les poursuivra comme elle a poursuiû

le Maître. Joa., xv, 1-27. D’ailleurs l’Esprit-Saint seralà pour les éclairer et les soutenir, et le Sauveur lui-même,dont ils vont pleurer la disparition, leur rapporterabientôt après la joie de sa présence, quand sa victoireaura été complète. Joa., xvi, 1-33. Jésus terminapar une sublime prière dans laquelle il demanda à sonPère sa propre glorification et ensuite toutes les grâcesnécessaires à ceux qu’il laissait au milieu d’un mondeméchant et maudit, ses disciples d’abord et ensuite tousceux qui viendraient après eux. Joa., xvii, 1-26.

Agonie du Sauveur.

Il arriva alors au pied du

mont des Oliviers, Matth., xxvi, 30; Marc, xiv, 26, dansle jardin de Gethsémani. Voir Gethsémani, col. 229-233.Là, en se mettant en face des péchés des nommes dontil assumait la responsabilité et des tourments qu’il allaitendurer, Jésus entra en agonie. Voir Agonie de Notre-Seigneur,t. i, col. 271-273. Un ange vint du ciel pourl’aidera subir victorieusement les assauts de la tristesse,de l’ennui et de la terreur qui l’assaillirent furieusement.Matth., xxvi, 36-46; Marc, xiv, 32-42; Luc, xxii, 39-46.

go Arrestation du Sauveur. — Le dernier événementde cette journée fut l’arrestation du Sauveur par unetroupe que conduisait Judas, et qui se composait d’unecohorte romaine, Joa., xviii, 3, et de serviteurs du Temple,munis de lanternes, de falots, de bâtons et de glaives.A ces subalternes s’étaient joints un certain nombre demembres du sanhédrin, même des grands-prêtres. Surces derniers, voir Grand-Prêtre, col. 303. Les princi-paux incidents de cette arrestation sont le baiser parlequel Judas désigne son Maître à la troupe, après avoirrecommandé de se saisir de lui et de le conduire avecprécaution; l’accueil amical que Jésus fait au traître etle reproche qu’il lui adresse; la double question qu’ilpose à la troupe et l’effroi que cause sa parole; l’ordrequ’il lui intime de laisser les Apôtres en liberté; l’apostropheaux grands-prêtres, aux fonctionnaires du Templeet aux anciens, qui n’osent répliquer un seul mot;la tentative inconsidérée de Pierre pour défendre leSauveur, la blessure de Malchus et sa guérison; le garrottementdu Sauveur et le départ pour Jérusalem; lafuite des Apôtres; la rencontre du jeune homme que latroupe veut arrêter et qui réussit a s’échapper. Matth.,xxvi, 47-56; Marc, xiv, 43-52; Luc, xxii, 47-55; Joa.,xviii, 2-11.

VI. LE SIXIÈME JOUR (VENDREDI SAINT). — Selon la

manière de compter des Juifs, ce jour avait commencéla veille au soir, à partir du coucher du soleil. Il comprenaitdonc déjà une bonne partie des faits que,d’après notre manière habituelle de diviser le temps,nous avons attribués au jeudi. C’est le vendredi que sedéroulent tous les événements de la passion du Sauveur.Sur la passion, voir Friedlieb, Archéologie de lapassion de N.-S. J.-C, trad. F. Martin, Paris, 1897;Ollivier, La Passion, Paris, 1891.

Jésus chez Anne.

Au milieu de la nuit, Notre-Seigneur

fut d’abord amené chez Anne, ancien grandprêtre,qui conservait encore ce titre sous son gendre,Caiphe, le grand-prêtre en exercice. Dans sa maisoneut lieu un premier interrogatoire, que beaucoup d’auteursconfondent avec celui qui se fit ensuite chezCaiphe, mais que saint Jean, xviii, 19-24, place formellementchez Anne. La halte chez ce pontife était justifiéepar l’influence prépondérante qu’il exerçait. VoirAnne 6, t. i, col. 630-632. Cependant c’était seulement àtitre officieux qu’Anne pouvait commencer l’interrogatoirede Jésus. Aussi le Sauveur opposa-t-il une sortede déclinatoire à ses questions en le renvoyant aux auditeursde sa doctrine prêchée dans les synagogues etdans le Temple, par conséquent toujours en public etdevant des hommes capables d’en témoigner. La brutalitéd’un valet qui intervint alors, sans doute avec l’assuranced’aller au-devant des désirs du pontife, ne servitqu’à faire ressortir la douceur du divin Maître. Anne

CICT. DE LA BIBLE.

envoya Jésus garrotté à Caïphe. Joa., xviii, 19-24. Lesdeux grands-prêtres logeaient dans des palais qu’on estimeavoir été distants l’un de l’autre d’environ 150 mètres,mais qui avaient une cour commune; la tradition lesplace sur le mont Sion. Voir Azibert, La nuit de laPassion chez Anne et Caïphe, dnns la Revue biblique,1892, p. 282-292.

Reniement de saint Pierre.

Trois fois, comme

l’avait prédit le Sauveur, Pierre renia son maître. Lepremier reniement eut lieu dans la cour d’Anne, oùl’Apôtre avait été introduit par saint Jean. On avaitallumé du feu, pour conjurer la fraîcheur de la nuit, etPierre, reconnu par une portière à la lueur du foyer,déelara qu’il n’était pas des disciples de Jésus. Matth.,xxvi, 58, 69-70; Marc, xiv, 54, 66-68; Luc, xxii, 54-57;Joa., xviii, 15-18. Les deux autres reniements, provoquéspar une servante et par plusieurs valets du grandprêtre,se produisirent dans la cour du palais de Caiphe,où l’on avait aussi allumé du feu. À sa première dénégation,Pierre joignit des serments. Aussitôt après letroisième reniement, le coq chanta et un regard deJésus fit rentrer l’Apôtre en lui-même. Matth., xxvi, 7175; Marc, xiv, 69-72; Luc, xxii, 58-62; Joa., xviii, 2527. Voir Coq, t. ii, col. 953.

Jésus devant Caiphe.

1. Pendant l’arrêt de

Notre-Seigneur chez Anne, le sanhédrin eut le tempsde se réunir chez Caiphe pour une séance, sinon légale,du moins plénière. Voir Caiphe, t. ii, col. 44-47; Sanhédrin;Dupin, Jésus devant Caïphe et Pilate, dans lesDémonst. évang. de Migne, 1852, t. xvi, col. 727-754,"Chauvin, Le procès de Jésus-Christ, Paris, 1901; Lémann,Valeur de l’assemblée qui prononça la peine demort contre Jésus-Christ, Paris, 1876. Jésus comparutdonc devant cette assemblée. On commença par produirecontre lui des témoins, mais seulement des témoinsà charge, dans le but avoué de justifier unecondamnation à mort. Les témoins étaient en nombre;mais ils ne s’entendirent pas, même les deux sur lesquelson avait compté le plus. Aussi, interpellé à son toursur les accusations de pareils témoins, Notre-Seigneurne daigna pas répondre. Caiphe lui posa alors la questioncapitale: «Es-tu le Christ Fils de Dieu? — Je lesuis,» répondit Jésus, et à cette affirmation il ajoutal’annonce qu’un jour ses juges le verraient venir sur lesnuées du ciel. Aussitôt Caiphe cria au blasphème, déchirases vêtements, voir Déchirer ses vêtements, t. ii,col. 1337, et demanda l’avis de l’assemblée. Tous répondirent: «Il mérite la mort!» Cette séance au milieude la nuit n’avait rien de légal. Il fallait attendrele jour pour tenir une séance régulière. Pendant lesdernières heures de la nuit, on abandonna Jésus à lagarde des serviteurs du grand-prêtre qui lui crachèrentau visage, lui donnèrent des soufflets, et, le traitant defaux Christ, lui voilèrent la tête et le frappèrent en luicriant de deviner les auteurs des coups. Matth., xxvi,57-68; Marc, xiv, 53-65; Luc, xxii, 63-65. — 2. Dès lelever du jour, on fit comparaître à nouveau Jésus devantle sanhédrin. Les témoins furent laissés de côté. À laquestion: «Es-tu le Christ?» le Sauveur, pour mettreen relief la mauvaise foi de ses juges, observa qu’on necroirait pas à sa parole. Il répéta néanmoins sa solennelleaffirmation de la nuit et la sentence de mort futrenouvelée. Matth., xxvii, 1; Marc, xv, 1; Luc, xxii66-71.

^° Jésus devant Pilate. — Pour devenir exécutoire,cette sentence devait être confirmée par le procurateurqui, depuis l’occupation romaine, avait seul à Jérusalemle jus gladii ou droit de mort. Il était absolument impossible,en pleine Pâque et en présence du procurateur,de procéder tumultuairement au supplice de Jésus,comme on le fit plus tard pour Etienne. Voir Etienne’(Saint), t. ii, col. 2035. Il fallut donc de toute nécessité serendre auprès de Pilate, pour en obtenir une sen--’III. - 47

tence conforme à celle du sanhédrin. Voir Pilate. Larésidence du procurateur était à l’autre extrémité de laville, à la citadelle Antonia, qui flanquait la partie septentrionaledu Temple. Voir Antonia, t. i, col. 712, 713.Pour y arriver, on eut donc à traverser toute la cité,dont les rues étroites regorgeaient déjà de la multitudedes pèlerins. Quoiqu’il fût encore d’assez bon matin,Piiate reçut le cortège, afin de se débarrasser au plustôt d’une affaire gênante, en un jour où la surveillancede la population occupait toute son attention. Mais leschoses n’allèrent pas aussi rapidement qu’il espérait. Depart et d’autre, on procéda d’abord avec une mauvaisehumeur marquée. «De quoi accusez-vous cet homme?» dit brusquement Piiate. «S’il n’était pas un malfaiteur,nous ne l’aurions pas amené,» répondirent les représentantsdu sanhédrin. Piiate alors interrogea directementJésus qu’on accusait de se faire roi des Juifs, desoulever la nation et d’empêcher de payer le tribut àCésar. Piiate était suffisamment informé par sa policepour être convaincu que ces griefs politiques ne reposaientsur rien. Voir Lémann, La police autour de lapersonne de Jésus-Christ, Paris, 1895. Il ne retint quel’accusation qui faisait de Jésus le «roi des Juifs», titreauquel s’attachait dans la pensée de tous l’idée des revendicationsnationales contre le joug des Romains. LeSauveur lui expliqua que son rojaume ne tirait pas sesressources «de ce monde», que ses moyens d’actionprovenaient d’ailleurs et que son but était de rendre témoignageà la vérité. Très sceptique sur une questiondont la solution lui paraissait aussi chimérique qu’inutile,Piiate sortit de son prétoire, où il avait fait comparaîtrele divin accusé, voir Prétoire, et déclara auxJuifs qu’il n’y avait en Jésus aucune matière à condamnation.Matth., xxvii, 11-14; Marc, xv, 2-5; Luc, xxiii,2-5; Joa., xviii, 29-38.

Jésus chez Hérode.

Apprenant que Jésus était de

Galilée, Piiate crut se délivrer d’une cause importuneen le renvoyant au jugement d’Hérode, venu à Jérusalempour les solennités pascales. Voir Hérode Antipas,col. 647-649. Notre-Seigneur ne daigna pas répondre aumeurtrier de Jean-Baptiste, et celui-ci le renvoya à Piiaterevêtu d’une robe blanche en signe de mépris. VoirCouleurs, t. ii, col. 1070.

6° Condamnation, de Jésus. — Le procurateur necroyait nullement à la culpabilité du Sauveur, auqueld’ailleurs s’intéressait sa propre femme; mais n’ayantpas assez d’énergie pour imposer sa volonté, il recourutà divers expédients pour sauver Jésus. Il proposa sadélivrance, en vertu d’une coutume nationale qui permettaitau peuple de faire mettre en liberté, à l’occasionde la Pâque, un prisonnier à son choix. Le peuple, quiassistait en foule énorme à toutes les péripéties du jugement,se laissa soudoyer par les agents du sanhédrinet, au lieu de choisir Jésus, réclama la délivrance dubrigand Barabbas. Voir Barabbas, . t. i, col. 1443. Matth.,xxvii, 15-23; Marc, xv, 6-14; Luc, xxiii, 13-23; Joa.,xviii, 39, 40. Comme ensuite on requérait la mise encroix de Jésus, Piiate commença par le faire flageller.Voir Flagellation, t. ii, col. 2282, 2283; Fouet,col. 2331. Les soldats de la cohorte en garnison à l’Antonia,voir Cohorte, t. ii, col. 827, 828, prirent ensuitele Sauveur, le couronnèrent d’épines, voir COURONNE,t. ii, col. 1086-1089, lui couvrirent les épaules d’unmanteau de pourpre, voir Cochenille, t. ii, col. 818, etl’accablèrent d’outrages. Après ces supplices, Piiate leprésenta aux Juifs, espérant que la vue d’un homme sicruellement châtié désarmerait leur fureur. Il n’en futrien. Les grands-prêtres et leurs complices entraînèrentla foule à crier plus fort que jamais: «Qu’il soit crucifié! «Attentifs aux hésitations de Piiate, ils le menacèrentd’en référer à l’empereur, s’il refusait de condamnerun homme qui, en se déclarant roi, s’insurgeaitcontre César. À cette menace, le procurateur céda;

monté sur son tribunal extérieur, voir Lithostrotos, ilprononça la condamnation de Jésus à la croix et le livraaux Juifs. Matth., xxvii, 24-30; Marc, xv, 15-19; Luo,xxiii, 24-25; Joa., xrx, 1-16.

Crucifiement.

Jésus reprit ses vêtements ordinaires

et fut chargé de porter, de l’Antonia jusqu’auCalvaire, l’instrument de son supplice, la croix, si accablanteque Simon le Cyrénéen dut être requis pour luivenir en aide. Voir Simon le Cyrénéen; Croix, t. ii,col. 1130-1134; Calvaire, t. ii, col. 77-87. Au Calvaire,on le fixa sur la croix avec des clous, voir Clou, t. ii,col. 810-812; les exécuteurs se partagèrent ses vêtementset tirèrent au sort sa tunique d’une seule pièce. VoirDÉ, t. ii, col. 1326; Sort, Tunique. On avait attaché ausommet de la croix le titre de la condamnation, rédigépar Piiate. A’oir Titre de la croix. Matth., xxvii, 31-38;Marc, xv, 20-28; Luc, xxiii, 26-38; Joa., xix, 16-21.

Mort du Sauveur.

1. Jusque sur la croix, Jésus

fut l’objet des moqueries des membres du sanhédrin,d’un des deux voleurs crucifiés à ses côtés, des soldatsqui l’avaient supplicié et de la foule. Il vécut ainsi prèsde trois heures. Mais la fureur de ses ennemis cédapeu à peu à l’effroi causé par les signes extraordinairesqui se produisirent alors. Voir Éclipse, t. ii, col. 1562.Pendant ce temps, Notre-Seigneur fit entendre septparoles. Quand on le clouait à la croix: «Père, pardonnez-leur,car ils ne savent ce qu’ils font.» Au larronrepentant: «En vérité, je te le dis, tu seras aujourd’huiavec moi en paradis.» À sa mère et à saint Jean: «Femme, voici votre fils. — Voici ta mère.» À sonPère: «Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’avez-vousabandonné?» Puis: «J’ai soif!» Enfin: «C’est accompli!» et: «Père, je remets ma vie entre vos mains.» Cf. Bellarmin, De septem verbis a Christo in cruceprolatis, Cologne, 1618. Ensuite Jésus expira en poussantun grand cri. Matth., xxvii, 39-50; Marc, xv,29-37; Luc, xxiii, 35-46; Joa., xix, 25-30. — 2. À la mortdu Sauveur, le voile du Temple se déchira, voir Voile,la terre trembla et les pierres se fendirent. Voir Calvaire,t. ii, col. 82. Le grand cri poussé par Jésus expirantétonna tellement le centurion de garde auprès dela croix, qu’il confessa publiquement la divinité duSauveur. Dès le soir même, on s’occupa de la sépulture,la mort étant constatée par le soldat qui, jugeant inutilede rompre les jambes d’un supplicié déjà mort, secontenta de lui percer le côté d’un coup de lance. VoirEau, t. ii, col. 1519, 7°, et Sang. Deux membres dusanhédrin, qui n’avaient pas pris part à la condamnationdu divin Maître, Joseph d’Arimalhie et Nicodème, semirent en devoir de détacher le corps de la croix, aprèsque le premier en eût obtenu l’autorisation de Piiate;puis ils l’ensevelirent, voir Embaumement, t.n, col. 1728;Ensevelissement, col. 1816, et Suaire, et le déposèrentdans le sépulcre neuf que Joseph d’Arimathie s’étaitpréparé pour lui-même près du Golgotha. Voir Jardin,col. 1133, et Sépulcre (Saint-). Les saintes femmes furenttémoins de ces derniers devoirs rendus au corps deJésus un peu hâtivement; car tout ce que racontent lesÉvangélistes au sujet de la sépulture dut être accomplientre le moment de la mort, à trois heures du soir, etl’apparition des premières étoiles, qui marquait le commencementdu sabbat et la cessation de tout travail.Matth., xxvii, 51-61; Marc, xv, 38-47; Luc, xxiii, 45-56;Joa., xix, 31-42. — 3. Pour bien comprendre plusieursdes termes dont se servent les Évangélistes en parlantde l’ensevelissement ou de la résurrection de Notre-Seigneur,il importe de se faire une idée exacte de lamanière dont étaient agencés les tombeaux des Juifs.Celui du Sauveur a été isolé de tout ce qui l’entouraitprimitivement et mis dans un tel état qu’il est impossibleaujourd’hui d’y retrouver trace des dispositionsantérieures. Il avait été creusé dans le roc même, pourl’usage de Joseph d’Arimathie; T1 n’avait pas encore scru un

JÉSUS-CHRIST

1478

quand le corps de Jésus y fut déposé. Matth., xxvii, 60;Marc, xv, 46; Luc, xxiii, 53; Joa., xix, 41. Il devaitcomprendre, comme les tombes qui appartenaient à despersonnages riches et importants, une première chambreou vestibule, dans lequel on accédait en descendantquelques marches, suivant la disposition du sol. Cf. Legendre,Le Saint-Sépulcre, Le Mans, 1898, p. 22-24.Dans ce vestibule ouvrait, par une porte ordinairementtrès basse, l’entrée du caveau proprement dit, danslequel on ne pouvait pénétrer et regarder qu’en se baissant.Joa., xx, 5, 11. Ce caveau n’avait pas de grandesdimensions. Il ne mesure actuellement que 2 ID 07 surl m 93. Une banquette de pierre y avait été ménagée poury déposer un corps; trois ou quatre personnes auraientpu à peine tenir ensemble dans l’espace qui restait libre.La grande préoccupation des anciens était de fermer leurstombeaux d’une manière qui ne permit pas au premiervenu de les ouvrir. Comme les Égyptiens, les Israélitesinventèrent dans ce but divers procédés ingénieux. À Jérusalem,en particulier, on employait parfois de grandespierres, en forme de meules, que l’on faisait roulerdevant la porte du caveau. M. de Saulcy, Voyage autourde la mer Morte, Paris, 1853, t. ii, p. 222, 223, a retrouvéces dispositions dans le Tombeau des Rois, et il les décritainsi: «Une fois descendu sur le sol du vestibule,on aperçoit au fond de la paroi de gauche une petite portefort basse, et par laquelle on ne peut passer qu’en rampant.C’est l’entrée des caveaux. Cette entrée, qui est aujourd’huilibre, était jadis déguisée avec soin…Un disquede pierre de grande épaisseur, roulant dans une rigolecirculaire, venait s’appliquer exactement contre la baie,et cette lourde pierre ne pouvait se mouvoir, sur le planincliné que lui offrait la rainure dans laquelle il setromait engagé, qu’à l’aide de la pression d’un levier,agissant de droite à gauche pour dégager la porte, et degauche à droite pour la clore… Il était facile de solliciter,à l’aide d’un levier dont le point d’appui se prenaitsur l’arête même de l’encastrement, le disque de pierre,forcé dès lors à se mouvoir, en montant à gauche de laporte, sur le plan incliné de la rainure circulaire…Une fois le disque de clôture ainsi chassé à gauche etcalé fortement, le passage devenait libre.» Actuellement, «le disque n’a pas conservé une position rigoureusementverticale ( par suite du peu de soin que l’on a misà l’écarter et à le caler.» Cf. G. Saintine, Trois ans enJudée, Paris, 1860, p. 224; Chauvet et Isambert, Syrie,Palestine, Paris, 1890, p. 328; Le Camus, Notre voyageaux pays bibliques, Paris, 1894, p. 445. Le tombeaudit des Hérodes (voir col. 647), découvert en 1891, étaitaussi fermé par une pierre ronde (fig. 267) qu’on y voitencore en place comme au Tombeau des Rois. Dansce dernier, on n’arrivait au disque de pierre que parun couloir auxiliaire, dissimulé dans l’aménagementde l’hypogée. Les dispositions étaient beaucoup moinscompliquées dans le tombeau de Notre-Seigneur; maisà coup sûr, un disque de pierre y avait été préparé,pour servir dans des conditions analogues à cellesqui viennent d’être décrites. Le corps du Sauveur unefois déposé dans le caveau, «on roula une grossepierre à la porte du monument,» ïcpo<mvi<rac Xc’ôovjj-lyoev trj fhipa, advolvit snxum magnum ad ostium.Matth., xxvii, ’60. Quand l’ange du Seigneur apparutau matin de la résurrection, il «fit rouler», àicex’jXicre,revolvit, la pierre de fermeture. Matth., xxvii, 2. Cependantles saintes femmes se disaient: «Qui nous fera rouler,àiroxuXt’ffet, revolvet, la pierre?» Et en approchant,elles virent que la pierre avait été roulée, àjcoxsxûÀto-uat,revolutum, Marc, XVI, 3, 4, â710xexuXi<r|iévov, reyoîufrujn.Luc, xxiv. 2. Ces verbes sont des composés de xviXtvSo),qui signifie «rouler». Le récit.évangélique montre quela tombe de Joseph d’Arimathie était toute prête à recevoirun corps; il n’y eut plus à se procurer, au derniermoment, que les objets nécessaires à l’ensevelissement.

VII. LE SEPTIÈME JOUR [SAMEDI SAINT). — C’était le

jour du sabbat, par conséquent du repos absolu. Lesamis du Sauveur se tinrent enfermés, se promettant deretourner au sépulcre dès le lendemain du sabbat, afinde compléter l’ensevelissement, trop sommaire à leurgré, du corps de Jésus. De leur côté, les membres dusanhédrin se réunirent et firent une démarche auprèsde Pilate, afin d’obtenir que le sépulcre fût gardé contretoute tentative d’enlèvement du corps par les disciples.Le procurateur les chargea de prendre ce soin eux-mêmes.Ils allèrent donc, mirent des scellés sur lapierre de fermeture et laissèrent des gardes. L’évangélistene dit pas si ces précautions furent prises dès lapremière heure du sabbat, le vendredi soir, ou seulementle lendemain au matin. Mais il était élémentaire,pour les représentants du sanhédrin, de s’assurer de laprésence du corps dans le sépulcre avant de mettre lesscellés sur la pierre qui le fermait. Il est inadmissible

268. — Porte du tombeau dit des Hérodes.D’après la Revue biblique, 1802, p. 270.

que la prudence et la haine des persécuteurs aient punégliger ce soin. Matth., xxvii, 62-66.

VII. La. Vie de Jésus bessuscité. — i. le jour de larésurrection. — Les apparitions du Sauveur ressuscitésont multiples en ce premier jour. Chaque Évangélisten’en raconte que quelques-unes; aussi les détails desdifférents récits paraissent-ils parfois difficiles à harmoniser.On y parvient cependant assez aisément en serrantles récits de près et en tenant compte de ce queles écrivains sacrés ont pu ou dû sous-entendre dansune narration aussi rapide. Cf. Loofs, Die Auferstehungsberichteund ihr Wert, Leipzig, 1898. Voici commenton peut établir l’harmonie des textes. — 1° Avantle lever du jour, les saintes femmes qui, la veille ausoir, après la clôture du sabbat, ont acheté des aromates,se mettent en route pour le sépulcre et y arrivent ausoleil levé. Chemin faisant, elles se demandaient qui leura. roulerait» la pierre, mais elles ignoraient qu’on eûtplacé des gardes. Matth., xxviii, 1; Marc, xvi, 1-3; Luc,xxiv, 1; Joa., xx, 1.-2° Pendant ce temps, un angeétait descendu du ciel, avait fait rouler la pierre, s’étaitassis non pas sur elle, ÈV ocOtoô, mais «au-dessusd’elle», èitâveo aùioO, et avait, par l’éclat de son aspect,mis en fuite les gardes terrifiés. Matth., xxviii, 2-i.Ceux-ci retournent à Jérusalem, mais ne sont pas rencontréspar les saintes femmes. — 3° Marie-Madeleine,Marie, mère de Jacques, et Salomé, en arrivant près dusépulcre, s’aperçoivent que la pierre a été écartée del’entrée. Aussitôt, Madeleine s’imagine que le corps duSeigneur a été enlevé; elle revient précipitamment surses pas pour en informer les Apôtres. Marc, xvi, 4;

Luc, xxiv, 2; Joa., xx, 1, 2. — 4° Les deux autresfemmes pénètrent dans le sépulcre et n’y voient pas leCorps. Pendant qu’elles se désolent, deux anges leurapparaissent, leur annoncent la résurrection et leurfont remarquer que Jésus l’avait prédit. Luc, xxiv,3-8. — 5° Jeanne et d’autres saintes femmes, Luc,xxiv, 10, avaient suivi de près les précédentes. Ellesarrivent aussi au tombeau. Des deux anges qui s’étaientmontrés à Salomé et à sa compagne, il n’y en a maintenantplus qu’un de visible. Les nouvelles arrivéesentrent à leur tour dans le vestibule qui précède lachambre sépulcrale. Elles aperçoivent l’ange qui estassis à droite. Elles sont saisies d’effroi; l’ange leurannonce la résurrection, leur montre le sépulcre videet leur commande de dire aux disciples et à Pierrequ’ils le verront en Galilée. Matth., xxviii, 5-7; Marc,xvi, 5-7. — 6° Cependant, Pierre et Jean, avertis parMadeleine, accourent. Ils entrent dans le sépulcre, nesont pas favorisés de la vue des anges, et constatent ladisposition régulière des linges, excluant l’hjpolhèsed’un enlèvement furtif et précipité. Joa., xx, 3-10. —7° Marie-Madeleine, qui est revenue à leur suite, resteprès du tombeau à pleurer. Jésus se montre à elle;mais elle le prend pour le jardinier et ne le reconnaîtenfin qu’au son de sa voix. Joa., xx, 16; Marc, xvi, 9.

— 8° Pendant ce temps, les saintes femmes qui avaientprécédemment quitté le tombeau, pleines d’épouvanteet de joie, se trouvent sur le chemin du retour, quandJésus leur apparaît et leur commande lui-même d’allerdire à ses frères qu’ils le verront en Galilée. Matth.,xxviii, 8-10; Marc, xvi, 8. — 9° Les saintes femmes etMarie-Madeleine vont successivement raconter auxApôtres ce qu’elles ont vii, mais elles ne sont pas crues.Marc, xvi, 10, 11; Luc, xxiv, 9-11. — 10° Jésus semontre longuement à deux disciples sur le chemind’Emmaus, voir Emmaus, t. ii, col. 1735-1748, converseet mange avec eux. Ceux-ci reviennent précipitammentpour apporter la nouvelle aux Apôtres. Marc, xvi, 1213; Luc, xxiv, 13-35. Le récit des deux Évangélistes,Marc, , xvi, 13, et Luc, xxiv, 34-35, suppose ici chez lesApôtres des alternatives de foi et de doute. — 11° Pierreest favorisé d’une apparition particulière dont le détailn’est pas donné. Seul avec Jean, Joa., xx, 8, il croitfermement à la résurrection. Luc, xxiv, 34. — 12° Enfin,sur le soir, et après le retour des disciples d’Emmaus,Jésus vient dans le cénacle, où sont rassemblés lesApôtres, moins Thomas; il se fait voir et toucher, leurdonne le pouvoir de remettre les péchés et mange devanteux. Marc, xvi, 14; Luc, xxiv, 36-43; Joa., xx, 19-25. —13° Ce même jour, dans la matinée, un fait d’un toutautre ordre s’était passé. Les gardes du tombeau avaientinformé les princes des prêtres de ce qui était arrivé. Onleur donna de l’argent pour dire que les disciples aaientenlevé le corps et on leur promit de les garantir contretoute difficulté de la part de Pilate. Matth., xxviii, 11-15.Saint Justin, Dialog. cum Tryphon., 108, t. VI, col. 727,atteste que les Juifs prirent soin de faire colporter leurmensonge dans tout l’univers. — Ce qui ressort trèsnettement des récits de ce premier jour, c’est que personne,parmi les Apôtres et les disciples de Notre-Seigneur,ne s’attendait à sa résurrection. Les saintesfemmes n’y croient que sur l’affirmation des anges. LesApôtres n’admettent pas ce qu’elles affirment avoir vu etentendu; ils ne se rendent que quand Jésus apparaîtvivant devant eux, et encore Thomas va-t-il récuser pendanthuit jours le témoignage de tous les autres. Aprendre les Évangiles dans leur rigueur, il n’y a doncnulle place pour une croyance s’insinuant par persuasionou par suggestion, puisque les témoins changentsubitement de conviction dans le cours d’une mêmejournée, et ne le font qu’à l’apparition de celui dontils niaient la résurrection l’instant d’auparavant. Voiraussi Évangiles (Concorde des), t. ii, col. 2111.

II. ENTRE LA RÉSURRECTION ET L’ASCENSION. — 1° Huit

jours après la résurrection, Jésus se montra de nouveaudans le cénacle et se fit toucher par Thomas, qui crutalors comme les autres Apôtres. Joa., XX, 26-29. — 2° Quelquetemps après, quand les disciples se furent rendusen Galilée, comme il le leur avait fait dire, Notre-Seigneursemontra à sept d’entre eux sur le rivage du lac de Tibériade.Saint Jean le reconnut le premier. Le Sauveurleur fit manger du pain et du poisson, puis, ayant demandé,par trois fois à Pierre s’il l’aimait, il lui confia lesoin de paître ses agneaux et ses brebis. Joa., xxi, 1-24.

— 3° Jésus apparut de nouveau aux onze sur une montagnede Galilée et leur donna ses instructions pour laprédication de son Évangile à travers le monde. Matth.,xxviii, 16-20; Marc, xvi, 15-18. — 4° Il est de toute évidenceque les apparitions de Jésus ressuscité en Galiléene sont pas toutes consignées dans les récits évangéliques.Le Sauveur avait fait dire à Pierre, comme chef deson Église et chargé de procurer l’exécution de ses ordres,et aux disciples venus à Jérusalem pour la Pâque,qu’il se montrerait à eux en Galilée, où il leur était commandéde se rendre. Matth., xxviii, 10. Les Évangélistesne rapportent que les apparitions aux Apôtres, auxquelsse trouvent joints trois disciples seulement. Joa., xxi, 2.Il est possible que beaucoup de disciples aient accompagnéles onze sur la montagne, car il est dit qu’alors «certains doutèrent», ce qui ne peut s’appliquer auxApôtres. Matth., xxvii, 17. Saint Paul complète les renseignementsfournis par les Évangélistes, quand il écritque le Seigneur s’est fait voir à Pierre, puis aux onze,ensuite à plus de cinq cents frères ensemble, enfin, àJacques et plus tard à tous les Apôtres, ce dernier nomcomprenant sans doute tous ceux qui, outre les onze,devaient être envoyés pour prêcher l’Évangile. I Cor. rxv, 5-7.

/II. l’ascension. — Le quarantième jour après sa résurrection,le Sauveur se retrouva avec ses Apôtres etdes disciples sur le mont des Oliviers. Il leur recommandade rester à Jérusalem jusqu’à la venue de l’Esprit-Saint,et leur donna ses avis suprêmes pour la prédicationde son Évangile à travers le monde. Puis, ils’éleva au ciel en leur présence. Quand il eut disparu,deux anges vinrent annoncer qu’il ne reviendrait plusvisiblement que dans une manifestation triomphale analogueà celle de son ascension. Marc, xvi, 19, 20; Luc,xxiv, 44-53; Act., i, 1-11. Voir Ascension, t. i, col. 10711073.

VIII. Enseignement de Jésus-Christ.

Si Jésus-Christvint sur la terre pour racheter les hommes par sa mort,il eut aussi le dessein de leur apprendre à profiter dela rédemption. Il prêcha donc une doctrine qui complétaitles révélations antérieures et visait à la foistoute l’humanité et tous les temps. Les vérités précédemmentacquises reçurent de lui leur confirmation etun plus complet développement. De nouvelles révélationsfurent ajoutées aux anciennes; des principes defoi furent posés, qui étaient destinés à fournir, dans lasuite des âges, de fécondes conséquences; en un mot,comme le disait le Sauveur lui-même, la «parole deDieu» fut une semence qui, tombée dans une bonneterre, devait rendre cent pour un. Toute la doctrinecatholique n’est que le développement de l’enseignementde Notre-Seigneur. Cf. Kewman, Histoire dudéveloppement de la doctrine chrétienne, trad. J. Gondon,Paris, 1848; de Broglie, Le progrès religieux,dans Religion et critique, Paris, 1896, p. 293-357. Cetenseignement est à étudier dans ses dogmes, dans sespréceptes, dans ses sources et dans la manière dont il aété présenté par le divin Maître.

I. l’enseignement dogmatique. — 1° La Sainte Trinité.— Jésus-Christ suppose accepté et indiscutable ledogme du Dieu unique et créateur. Marc, xii, 29, 32.Mais ce qui lui est propre, c’est la révélation complète et 1481

JÉSUS-CHRIST

— 1482

définitive du mystère de la sainte Trinité, que l’AncienTestament avait dû laisser presque totalement dans l’ombre.Il ordonne à ses Apôtres de baptiser tous les hommes «au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit»,JVIatth., xxviii, 19, mettant ainsi au même rang les troispersonnes divines. — 1. Le Père est le Maître souverainauquel tout obéit. Maith., xi, 25, 26; Luc, x, 21. C’estle Jéhovah de l’ancienne loi. Cependant Jésus-Christ veutque les hommes lui donnent le nom de Père. Matth., vi,9; Luc, xi, 2. En parlant de lui à ses disciples, il dithabituellement: «Votre Père, qui est dans les cieux.» Matth., v, 48; vi, 14; vii, 11; Marc, xi, 25, 26; Luc,xi, 13; xil, 32, etc. C’est un Père qui aime les hommes,Joa., iii, 16; xvi, 27, et qui prend soin d’eux avec unetendresse vigilante. Matth., VI, 32; x, 29; Luc, xii, 6, 7,28, 32; xviii, 7, 8. Sous la loi nouvelle, les rapports dece Père avec les hommes vont avoir un caractère bienplus marqué de tendresse et de libéralité. — 2. Le Fils,c’est Jésus-Christ lui-même, non plus dans le sens largeet imparfait, comme quand il est dit de certains hommes: «Vous êtes tous des fils du Très-Haut,» Ps. lxxxi (lxxxii),6, mais dans toute l’acception naturelle du mot. VoirFils de Dieu, t. ii, col. 2253-2257. Ce Fils ne fait qu’unavec le Père, Joa., xiv, 7; xv, 23, 24; xvi, 15; xvii, 10,21, mais il en est distinct par la connaissance, Matth.,xi, 27; Luc, x, 22, et par l’activité. Joa., v, 17-23. C’estdu Père qu’il a reçu sa mission. Joa., vii, 28; xii, 44-50;xiv, 31; xv, 10-15; xvi, 27; xvii, 3. Aussi, tandis que leshommes appellent Dieu «notre Père», Matth., vi, 9, luil’appelle constamment «mon Père», Matth., x, 32; Marc,vin, 38; Luc, ii, 49; Joa., ii, 16; v, 18; etc., commetenant à ce Père par une filiation tout autre que celledes hommes. Quoique s’étant uni par l’incarnation uneâme et un corps humain, il n’en reste pas moins le «Filsbien-aimé» du Père. Matth., iii, 17; xvii, 5; Marc, i, 11;Luc, iii, 22; ix, 35; Joa., iii, 35; v, 20, etc. Cependant,dans sa nature humaine qui est créée, il est inférieur auPère. Matlh., XX, 23; xxvi, 39; xxvii, 46; Luc, xxiii, 46;Joa., v, 30-32, 36; XIV, 28, etc. Ce titre de «Fils» quese donne par rapport à Dieu Jésus-Christ, en qui ils nevoient qu’un homme, révolte souverainement les Juifs,qui d’ailleurs entendent avec raison ce nom de «Fils» dans son acception la plus étroite. Joa., x, 36; xix, 7. —3. Le Saint-Esprit, que l’Ancien Testament ne nous faitpas connaître nettement comme personne, complète laTrinité. Notre-Seigneur dit de lui qu’il procède du Père,Joa., xv, 26, mais qu’en même temps il recevra de ce quiest au Fils. Joa., xvi, 15. C’est d’ailleurs le Fils qui l’enverrasur la terre pour compléter son œuvre. Joa., xv,26; xvi, 7, etc. Voir Esprit-Sacnt, t. ii, col. 1967-1969.2° Le Messie.

Jésus-Christ se présente lui-même

comme le Messie. Joa., IV, 26. Il est le Messie qui réaliseles prédictions des prophètes, mais il ne répond pas àl’idée que s’en sont faite les Juifs. Il lui faut donc redresserleurs préjugés. Ils disent que quand le Christ viendra,personne ne saura d’où il vient, tandis qu’on saitd’où est Jésus et qu’en conséquence il ne saurait être leMessie. Joa., vii, 27. Le Sauveur leur explique que, s’ilssavent qui il est et de quel pays il vient, ils ignorent savéritable origine et l’ignorent volontairement, puisque,malgré toutes les preuves qu’il leur fournit, ils refusentd’admettre qu’il vient du Père. Joa., vii, 28, 29.Us le croient venu simplement de Galilée et de Nazareth.Joa., 1, 46; vii, 41. Pour les éclairer, Jésus leur rappelleque le Messie est «fils de David», mais que David^l’appelle à l’avance son Seigneur, par conséquent unpersonnage qui lui est supérieur à lui-même. Matth.,xxii, 41-46; Marc, xii, 35-37; Luc, xx, 41-44. Ils n’osenttirer une conclusion qui ne cadrerait pas avec leursidées préconçues. Jésus-Christ s’applique à faire comprendreà ses disciples que le Messie promis doit êtreun Messie humble et souffrant, qui sera rejeté par lesautorités nationales et mis à mort par les gentils, auxquels les Juifs l’auront livré. Matth.. xvi, 20-23; xvii, 21,22; Marc, viii, 30-33; rx, 29-31; Luc, ix, 21, 22, 44, 45. «Mettez bien ces paroles dans vos cœurs,» dit-il à sesApôtres qui ne peuvent se faire à cette idée. Luc, ix, 44.Quelques jours avant sa mort, il renouvelle son avertissement,en observant que toutes ces choses ont été écritespar les prophètes au sujet du Fils de l’homme. Matth.,xx, 17-19; Marc, x, 32-34; Luc, xvii, 31-34. Enfin, la semainemême de sa passion, il dit à tous dans le Templeque le Fils de l’homme sera élevé de terre. Tous comprennentsi bien le sens de ses paroles qu’on lui répliqueaussitôt: «Nous avons entendu dire d’après la loique le Christ demeure à jamais.» Joa., xii, 32-34. LeSauveur n’insiste pas, parce que le malentendu ne peutêtre dissipé que par les faits. Plus tard, ceux qui le voudrontverront qu’en effet le Christ demeure à jamais,mais non de la manière qu’ils avaient rêvé. De fait, ilentrait dans les plans de la Providence que l’idée d’unMessie souffrant parût inacceptable au plus grand nombredes Juifs; c’était précisément la condition requisepour que ce Messie fût rejeté des siens et livré aux gentils.En accusant Jésus devant Pilate de se donner pourle «Christ roi», Luc, xxii, 2, les princes des prêtres ontl’intention avérée d’exciter les susceptibilités du procurateurpar le titre de «roi» qu’ils évoquent; mais lenom de «Christ» attribué à un homme d’aussi modesteapparence les révolte encore plus étrangement; c’estpourquoi ils protesteront avec tant de vivacité quandPilate écrira au sommet de la croix: «Jésus de Nazareth,roi des Juifs,» ce qui pour tous est synonyme de «Jésusde Nazareth, Messie». Joa., xix, 20 r 21.La suite des événementsa montré que, seul de son temps, le Sauveuravait eu la pleine intelligence des prophéties messianiques.Luc, xxiv, 26-27. Les JuiTs se regardaient commeune race privilégiée, vis-à-vis de laquelle Dieu était, pourainsi dire, plutôt débiteur que créancier, et qui avaitdroit, en vertu d’antiques promesses mal comprises, àrecevoir de lui un Messie glorieux et puissant qui associeraittous ses compatriotes à sa grandeur. La véritéétait tout le contraire de cette conception. Les Juifsavaient péché comme tous les hommes et péchaient encoreplus gravement que les gentils. Notre-Seigneur leleur répète pour abaisser leur orgueil. Joa., viii, 21, 24;ix, 41; xv, 22, 24; xvi, 9; xix, 11. Or le péché appelaitl’expiation, et l’expiation ne pouvait se faire sans le sacrifice.Voilà pourquoi le Sauveur, en présentant la coupeeucharistique à ses Apôtres, leur disait: «Ceci est monsang de la nouvelle alliance, qui sera versé pour beaucoupen rémission des péchés.» Matth., xxvi, 28. Toutel’idée messianique est dans cette formule, dans laquelleNotre-Seigneur parle du sang qui va être versé pour remettreles péchés des hommes, et leur permettra decontracter avec Dieu une alliance plus universelle, plusdurable et plus salutaire que l’ancienne.

Le royaume de Dieu.

1. Les Juifs comprennent

ce royaume comme ils ont compris le Messie, dans unsens tout terrestre. Aussi rejettent-ils avec indignationle «roi des Juifs» qu’on leur présente pauvre et humilié.Notre-Seigneur vient pour établir le «royaume deDieu» ou le a royaume des cieux», c’est-à-dire la royauté,le règne de Dieu sur la terre, paffiXet’a, regnum. Lesconditions dans lesquelles il l’établit sont aussi conformesau sens spirituel des prophéties que contraires àl’attente des Juifs, qui interprétaient ces prophéties dansle sens le plus grossier. Ils s’imaginaient que le royaumede Dieu serait inauguré tout d’un coup, avec grandéclat, comme quand un grand prince monte sur le trône.Luc, xix, 11. Un jour, des pharisiens demandent auSauveur: «Quand vient le royaume de Dieu?» Et il leurrépond: «Le royaume de Dieu ne vient pas de manièrequ’on puisse l’observer,» comme on observe les astres,uêtà itapaT^p^ccwî, «et on ne peut pas dire: le voiciici, le voici là.» Luc, xvii, 20, 21. Ce rojauine de Dieu,

c’est la puissance de Dieu s’eierçant sur les âmes pourles éclairer, les racheter, les sanctifier et les sauver.Cette puissance n’agit pas sur les âmes comme elle agitdans le monde matériel, où tout lui obéit sans résistance possible; elle réclame la foi, le consentement etle concours de ces âmes, dont elle respecte la libertéjusqu'à s’interdire de la léser, même pour assurer leursalut. Une royauté de cette nature ne peut donc s'établir que peu à peu, à mesure que les âmes mieux éclairées lui donnent leur adhésion. Aussi, quand NotreSeigneur commence à prêcher l'Évangile, il ne dit pas:Voici le royaume de Dieu, mais: «Le royaume de Dieuapproche.» Matth., IV, 17; x, 7; Marc, i, -15; Luc,x, 9, 10. Il n’y a pas de grandeurs temporelles à ambitionner dans ce royaume. Matth., xx, 21-28; Marc,X, 37-45. Ses sujets sont les pauvres, les persécutés, lesobéissants, Matth., v, 3, 10, 19; Luc, vi, 20, ceux quisont humbles et petits comme des enfants. Matth., xviii,3; xix, 14; Marc, x, 14; Luc, xviii, 16. Ce ne sont pasdes qualités passives que réclame le Sauveur, mais desvertus actives, le renoncement plus ou moins completaux jouissances et aux richesses, Matth., xix, 12, 23, 24;Marc, x, 23, 24, et surtout l’accomplissement de lavolonté du Père. Matth., vii, 21. C’est une nouvelle vie àlaquelle il faut renaître. Joa., iii, 3, 5. Dans ces conditions, Notre-Seigneur peut dire: «Le rojaune de Dieuest au-dedans de vous,» èv-rôç û[iwv, Luc, xvii, 21; ilréside dans les âmes, et un certain nombre d'âmes, disséminées au milieu du peuple d’Israël, ont déjà accueillice rojaume. Il faut le chercher avant toute autre chose.Matth., VI, 33; Luc, xii, 31. Depuis que JeanBaptiste acommencé à annoncer l’approche du règne de Dieu,de violentes oppositions se sont dressées contre lui,Matth., xi, 12; les scribes et les pharisiens, loin del’accepter pour eux-mêmes, ont tout fait pour empêcher les autres de le reconnaître. Matth., xxiii, 13. Néanmoins il se propage. Il y a même des membres du sanhédrin qui l’attendent, Marc, xv, 43, et des scribes quine sont pas loin du royaume de Dieu, Marc, xii, 34,tandis que, par la pénitence et le changement de vie,les pécheurs, les publicains et les courtisanes y entrentde suite et en grandnombre. Matlh., xxi, 31; Luc, xiii,29. Extérieurement, le règne de Dieu se manifeste parl’expulsion des démons, Matth., xii, 28; Luc, xi, 20,et par la prédication qu’en font les Apôtres et les disciples du Sauveur. Luc, ix, 2, 60. Voilà donc un royaumequi diffère radicalement du royaume de la terre, parson origine, Joa., xviii, 36, par ses moyens d’action, parson but. — 2. Le royaume de Dieu, par sa nature même,est un royaume toujours en formation. Il ne sera définitivement établi que quand le Sauveur aura complètement accompli sa mission. Luc, ix, 27. Mais sans cesseles disciples du Seigneur auront à répéter sur la terre: «Que votre règne arrive,» Matth., vi, 10; Luc, xi, 2,non seulement dans l’autre vie, mais en ce monde même,où le nom de Dieu doit être sanctifié et sa volonté accomplie comme au ciel. Pour mieux expliquer ce qu’ilentend par ce royaume, Notre-Seigneur se sert de paraboles, dont il donne ensuite l’explication à ses Apôtres,parce que ceux-ci doivent être initiés aux «mystères duroyaume des cieux», pour pouvoir travailler utilementà sa propagation. Matth., xiii, 11; Luc, viii, 10. L'élément constitutif de ce royaume spirituel, c’est la vérité,à laquelle Jésus est venu rendre témoignage, Joa., xviii,37, et la grâce, qui donne aux âmes une vie surnaturelle. La vérité et la grâce sont comme une semence,qui ne produit que selon les dispositions des âmes quila recueillent. Matth., xiii, 1-23. Quand cette semenceest jetée, l’ennemi du bien, Satan, vient aussi jeter lasienne, d’où mélange de bons et de mauvais dans leroyaume des cieux; le triage des uns et des autres nese fera utilement qu'à la moisson, au jugement. Matth.,xiii, 24-30; Marc, iv, 26-29. Le royaume des cieux,

d’abord semblable à une petite graine, doit se dévelop- 1per et devenir un grand arbre. C’est aussi un levain quiexerce son action sur toute la pâte. Matth., xiii, 31 35.Ces comparaisons sur le royaume des cieux donnentl’idée d’une société animée par un souffle divin, destinéeà comprendre dans son sein toute l’humanité, renfermant par conséquent un mélange d'âmes bonnes et mauvaises, et se développant d’une manière continuelle,puisque chaque génération humaine lui fournit un nouveau contingent à conquérir. Bien que spirituel, ceroyaume n’est pas invisible; il doit brillera tous lesveux comme la lampe placée sur le candélabre. Marc,iv, 21, 22; Luc, viii, 16, 17. Enfin, Notre-Seigneur donneà Pierre les clefs du royaume, Matth., xvi, 19, c’est-àdire la puissance à exercer dans ce royaume. Voir Clef,t. ii, col. 802, 803. Il ajoute que toutes les décisions dePierre seront ratifiées dans les cieux, c’est-à-dire parDieu lui-même. Le royaume des cieux ainsi décrit n’estautre que l'Église. Voir Église, t. ii, col. 1600. LesJuifs se croyaient tout droit à être les maîtres dans ceroyaume: il leur sera ôté et passera à d’autres hommesqui sauront le faire fructifier. Matth., xxi, 43. La massedes Juifs aura d’ailleurs vis-à-vis de ce royaume unesingulière attitude que le Sauveur caractérise prophétiquement dans plusieurs autres paraboles. La sociétéreligieuse issue de l’ancienne loi sera incapable d’apporter le moindre remède aux maux de la pauvre humanité blessée, comme le prêtre et le lévite qui passentsans s’arrêter devant la victime des brigands sur le chemin de Jéricho, Luc, x, 31, 32, comme le riche qui re&leinsensible à la misère du malheureux Lazare. Luc, xi,19-21. Appelés les premiers à prendre part au festin messianique, les Juifs dédaigneront de venir et se laisserontsubstituer les gentils, Luc, xiv, 17-24; Matth., xxii, 310, qu’ils mépriseront comme le pharisien méprisait lepublicain, Luc, xviii, 11-14, et dont ils seront jalouxcomme le fils aîné qui murmure de l’accueil fait par lepère au jeune prodigue repentant, Luc, xv, 25-32, etcomme les ouvriers de la première heure, qui se plaignentdu salaire accordé aux derniers venus. Matth., xx, 9-15.Bien plus, comme les vignerons homicides, ils voudrontaccaparer pour eux-mêmes le rojaume des cieux et croiront y réussir en mettant à mort le Fils du Père quivient pour le fonder. Matth., xxi, 37-40; Marc, xii, 1-9;Luc, xx, 13-16. Tous ces traits prophétiques se sontvérifiés au cours des temps, et, du vivant même desApôtres, le rojaume des cieux n’a pas eu d’ennemisplus acharnés que les Juifs. Act., iv, 1-7; v, 17-24; vi, 1215; vii, 56-59; viii, 1; xii, 1-4; xiii, 45-50; xiv, 18; xvii,5-8; xviii, 12; xxi, 26-36; xxiii, 12-21, etc. — 3. Leroyaume des cieux établi sur la terre a son prolongementsans fin dans l’autre vie. Luc, xxiii, 42. C’est là en effetqu’après le triage, le bon grain sera recueilli. Matth., xiii,30. Notre-Seigneur l’appelle le royaume de son Père,Matth., xxvi, 29; " Marc, xiv, 25; Luc, xxii, 16-18, et ily convie ses serviteurs fidèles. Luc, xxii, 29, 30. Ce serale royaume définitif, dont celui de la terre n’est que lapréparation, dont l’inauguration triomphale suivra lejugement final, Luc, xxi, 31, et qui deviendra la possession des vrais serviteurs de Dieu. Matth., xxv, 34.

La vie surnaturelle.

1. Ce n’est pas seulement

une société que Notre-Seigneur vient constituer, c’estune vie nouvelle qu’il communique aux âmes. «En luiest la vie, et cette vie est la lumière des hommes.» Joa, , I, 4. Il veut que par lui on ait la vie et que cettevie abonde. Joa., x, 10. Il ne s’agit évidemment pas dela vie naturelle, que les hommes possédaient avant savenue et qui, après lui, n’a pas différé de ce qu’elle étaitauparavant. C’est une vie spirituelle, dans laquelle ilfaut entrer par une nouvelle naissance, Joa., iii, 3-8, etdont lui-même est la source, jaillissante jusqu'à la vieéternelle. Joa., iv, 13, 14. Pour obtenir cette vie, il estnécessaire d’avoir la foi en Jésus Christ, qui seul peut

la donner. Joa., nr, ’36; v, 40; vi, 33; viii, 12; xx, 31.Cette foi elle-même ne devient pas le partage de l’hommesans le concours formel de sa bonne volonté. Il faut pratiquerla vérité pour venir à la lumière, Joa., iii, 21; ilfaut obéir à la volonté du Père pour devenir capable dediscerner la divinité de la doctrine évangélique. Joa.,vil, 17. Jésus est même le pain de vie, dont la foi senourrit pour produire et entretenir la vie surnaturelle.Joa., vi, 35. On participe à cette vie par l’union intimeavec le Sauveur, union qu’il compare lui-même à cellede la branche avec le cep de vigne. Joa., xv, 4-6. Cettevie n’existe pas par la foi seule; encore moins est-elleproduite par les pratiques de la loi ancienne, Joa., v,39; elle suppose la pureté de l’âme, Joa., xv, 3, 4, et lafidélité aux commandements. Malth., xix, 17. — 2. Notre-Seigneurprésente certains rites extérieurs comme destinésà produire dans les âmes la vie surnaturelle. Ilfaut tout d’abord renaître par l’eau et par le Saint-Esprit.Joa., iii, 5; Act., i, 5. De là deux premiers sacrementsde l’Église. Voir Baptême, t. i, col. 1435; Confirmation,t. ii, col. 919. Comme le péché est incompatible avec lavie surnaturelle, les Apôtres reçoivent le pouvoir de leremettre. Joa., xx, 22, 23. Voir Pénitence. Enfin l’Eucharistieest instituée comme pain de vie par excellence,qui fait vivre par Jésus-Christ, et sans lequel la vien’existe pas dans l’âme. Joa., vi, 48-59. — 3. De mêmeque le royaume des cieux sur la terre se continue parcelui qui est au ciel, ainsi la vie surnaturelle aboutit àla vie éternelle. Joa., vi, 55, 59; x, 28; xii, 25; xvii, 2.Jésus-Christ est ainsi la «vie» dans le sens le plus élevé,la vie divine communiquée aux âmes créées, dans lamesure que peut réaliser la puissance de Dieu. Joa.,xiv, 6.

La destinée humaine.

1. Le Sauveur ne vient

pas changer les conditions ordinaires de la vie naturelle.Il ne s’est point servi de sa science divine pour faireavancer les connaissances humaines. Il ne blâme pas cequi fait ici-bas l’occupation légitime des hommes; maisil exige qu’avant toute chose on fasse passer la recherchedu royaume de Dieu et de sa justice. Matth., vi, 33. Ilaccuse de folie celui qui ne pense qu’à jouir du bienqu’il s’est amassé. Luc, xii, 19, 20. Il faut qu’on lesuive, même en portant sa croix; autrement on perdson âme pour l’éternité. Malth., xvi, 24-28; Marc, viii,34-39; Luc, IX, 23-27. C’est le petit nombre qui règleainsi sa vie. Luc, XII, 32. Mais ceux qui s’égarent peuventencore, tant qu’ils sont en vie, s’accommoder avecla justice divine. Matth., v, 25. Aux Apôtres, qui demandentsi c’est seulement le petit nombre qui se sauvera,Notre-Seigneur ne répond que par un conseil pratique.Luc, xiii, 23, 24. Voir Élus, t. ii, col. 1708-1711. Entous cas, Dieu viendra prendre chaque homme à l’improviste;il faut donc se tenir prêt à paraître devant luiet à rendre compte de sa vie. Matth., xxiv, 42-50; Marc,xiii, 35-37; Luc, xii, 35-40. — 2. Au delà de la mort,l’homme aura à subir un jugement. Matth., xii, 36.Il y a des fautes qui pourront alors lui être remises,Matth., xii, 32; Marc, iii, 28-29, mais dontil lui faudrapayer la dette à la dernière rigueur. Matth., v, 25, 26.Voir Purgatoire. Les bons, même ceux qui auront euà subir cette expiation transitoire, obtiendront la vieéternelle dans le ciel, Matth., v, 12; xiii, 43; Luc, VI,

23, voir Ciel, t. ii, col. 754, 755, et les méchants serontenvoyés dans le lieu des tourments. Matth., v, 29, 30;Luc, xii, 5. Voir Enfer, t. ii, col. 1795, 1796. C’est alorsque Dieu exercera définitivement sa justice en récompensantceux qui auront souffert pour lui sur la terre,et en châtiant ceux qui n’auront songé qu’à jouir, aumépris de sa loi. Matth., v, 11, 12; Luc, vi, 22-25; xvi,

24, 25. — 3. Le monde lui-même aura une fin. Matth.,v, 18. Voir Fin du monde, t. ii, col. 2263, 2264. Lescorps ressusciteront pour se réunir à leur âme immortelle,Matth., xxii, 23-33; Marc, xii, 18-27; Luc, xx,

27-40; Joa., vi, 39-55; xi, 23-24, afin que le corps soitdésormais associé au sort final de l’âme. Joa., v, 28, 29.Voir Résurrection de la chair. Jésus-Christ paraîtraalors et jugera tous les hommes. Matth., xxv, 31-46. VoirJugement dernier. Ceux-ci seront renvoyés soit à la vieéternelle, soit au feu éternel. C’est uniquement pour fairearriver les hommes à la vie éternelle que le Sauveur estdescendu sur la terre et qu’il y a fondé son royaume.Matth., xviii, 11-14; Luc, xix, 10; Joa., iii, 15, 16; x, 28.Là est l’idée maltresse sur laquelle il a ordonné toute savie, ses œuvres et l’Église qu’il a laissée après lui. Cf.Dollinger, Le christianisme et l’Église, trad. Bayle,Tournai, 1863, p. 22-44; Wendt, Die Lehre Jesu, Gœttingue,1886.

II. l’enseignement moral. — 1° La morale prêchéepar Notre-Seigneur est dominée tout entière par certainsprincipes qui l’élèvent au-dessus de la morale mosaïqueet de toute morale humaine. Il professe d’abord qu’iln’est pas venu pour abolir la Loi, celle que Moïse avaitimposée aux Israélites, mais pour l’accomplir et la compléter,selon les deux sens du verbe TtÀi)pô(rai, adimplere.Matth., v, 17. Comme modèle de vertu et de sainteté, ilne propose rien moins que le Père céleste: «Soyezparfaits, comme votre Père céleste est parfait,» Matth.,v, 48, principe en vertu duquel chaque homme est obligéde tendre à la perfection qui est propre à sa nature. Ilrecommande ensuite de chercher avant tout le royaumede Dieu et sa justice, Matth., VI, 33, non par des actespurement extérieurs ni de vaines aspirations, mais parl’accomplissement de la volonté du Père. Matth., vii, 21.Le disciple de Notre-Seigneur a donc tout d’abord à fairerégner Dieu en lui-même, en accomplissant fidèlementce qui est juste et ce qui le rendra juste, c’est-à-dire latrès sage volonté de Dieu. Enfin, comme il vient pourperfectionner et enseigner la loi morale, Jésus-Christ sepropose lui-même en exemple, Joa., un, 15, et ajoute,pour encourager à le suivre: «Prenez mon joug survous et faites-vous mes disciples, car je suis doux ethumble de cœur. Vous trouverez alors le repos pour vosâmes, car mon joug est aimable et mon fardeau léger.» Matth., xi, 29, 30. Ces principes s’adressent à tous. Aceux que Dieu appelle à une plus haute perfection conviennentdes règles plus austères, que formulent lesconseils évangéliques. Voir Conseils évan&éliques, t. ii,col. 922-924.

2° Notre-Seigneur dégage nettement sa morale dessuperfétations et du formalisme dont les pharisiens etles docteurs avaient surchargé la loi ancienne. Il dit àses disciples: «Si votre justice n’est pas plus complèteque celle des scribes et des pharisiens, vous n’entrerezpas dans le royaume des cieux.» Matth., v, 20. Il reprocheà ces derniers de ne chercher que la puretéextérieure, de s’appliquer à des pratiques méticuleusesau détriment de la grande loi morale, d’accabler lesautres d’obligations intolérables, sans rien faire pour lesaider, Luc, xi, 39-46, de n’agir que pour être vus deshommes, Matth., vi, 16, en un mot de ressembler à dessépulcres blanchis, éclatants au dehors, pleins de corruptionau dedans. Matth., xxiii, 2-33. Le Sauveur réprouveénergiquement la conception et la pratiqued’une semblable morale. Il ne veut pas d’un peuple quihonore Dieu des lèvres, mais n’ait rien dans le cœur.Matth., xv, 7-9; Marc, vii, 6, 7. Dieu veut être adoré etservi «en esprit et en vérité», Joa., iv, 23, 24, c’est-à-direavant tout par les pensées, les sentiments et lesvolontés, l’acte extérieur n’ayant de valeur qu’autantqu’il est conforme à l’attitude de l’âme elle-même. Notre-Seigneurrecommande en conséquence de se tenir engarde contre les enseignements des scribes et des pharisiens,comme contre un ferment corrupteur. Matth.,xvi, 5-12; Luc, xii, 1-3. Chaque fois que l’occasion s’enprésente, il corrige publiquement leurs fausses interprétationsde lr loi divine. Les docteurs avaient rendu

., l’observation du sabbat presque impossible. Le divinMaître opère à dessein des miracles ce jour-là, et profite de leurs attaques pour montrer au peuple l’inconséquence et l’arbitraire de leurs prescriptions. Matth., xii,1-14; Luc, xiii, 14-16; xiv, 1-6; Joa., v, 10; vii, 23; ix,14, etc. Voir Sabbat. Cf. J. C. Wakins, Christi curatiosabbalhica, dans le Thésaurus de Hase et Iken, t. ii,p. 191-211. Il redresse également leur enseignementoutré au sujet de jeune, Luc, v, 33-35; du choix desaliments, Matth., xxiii, 24; Luc, x, 7; des ablutionsavant les repas, Matth., xv, 2, 11-20; Marc, vii, 2-5, 1523; du serment, Matth., xxiii, 16-22; du vœu. Matth., xv,3-9; Marc, vii, 9-13; voir Corban, t. ii, col. 958, etc.

3° Le premier principe de la morale de Jésus-Christest l’amour de Dieu par-dessus tout, Matth., x, 37, etl’amour du prochain. Matth., v. 23, 24, 44; Marc, xii,31; Luc, vi, 38; x, 25, etc. L’amour de Dieu commandel’obéissance à son égard, Matth., vii, 21; xii, 50; Marc,m, 35; Luc, viii, 21; la confiance en sa Providence,Matth., vi, 25-32; x, 29-33; Luc, xii, 4-12, 22-34; xviii,1-8; la prière venant du fond du cœur, Matth., VI, 7, 8;vil, 7-12; Marc, xi, 24; Luc, xi, 1-13; Joa., xvi, 23,24; la foi en Jésus-Christ, Joa., vii, 38; le respect de lamaison de Dieu. Matth., xxi, 12-17; Joa., ii, 16, etc.L’amour du prochain aura pour corollaires la tolérance, Marc, ix, 37-40; Luc, IX, 49, 50; le pardon desinjures, Matth., xviii, 21-35; l’aumône. Matth., VI, 2-4;Luc, XI, 41; xii, 33, etc. Cf. Ehrhardt, Der Grundcharakter der Ethik Jesu, Leipzig, 1895. L’obligation de sesauver soi-même a pour conséquences le renoncement,Matth., xvi, 24-26; Luc,-xiv, 25-35; la pénitence pourexpier les péchés passés, Matth., iv, 17; Luc, xiii, 3;Xv, 7-10; le jeûne et la prière pour écarter le démon,Marc, ix, 28; la vigilance, Luc, xii, 35-53; l’humilité.Matth., xviii, 2-5; xx, 26-28; Luc, xviii, 9-14; xxii,24, etc. Le mariage, constitutif de la famille, est ramenéà sa loi primitive. Matth., v, 32; xix, 1-12. Enfin, les devoirs envers l’autorité temporelle trouvent à la fois leurobligation et leur limite marquées dans cette formule: «Rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce quiest à Dieu.» Matth., xxii, 21. Tels sont en résumé lesprincipaux points de cette morale qui, tout en réclamantles actes extérieurs, tient par-dessus tout à ce que lessentiments intérieurs s’y conforment loyalement, et qui,assez tempérée dans ses exigences pour ne pas excéderles forces des plus faibles, aidés de la grâce, peut cependant conduire les âmes d'élite aux plus hauts sommets de la vertu, mais toujours a^ec la grâce de Dieu.Car c’est encore là ce qui établit une différence essentielle entre les préceptes du divin Maître et ceux queformulent les sages. Ces derniers peuvent conseiller,ils ne peuvent aider. Sans Jésus-Christ, la morale évangélique est impraticable; avec Jésus-Christ, intimementuni à l'âme par la vie surnaturelle, tout devient possible: «Celui qui demeure en moi, et moi en lui, portebeaucoup de fruits; mais sans moi vous ne pouvez rienfaire.» Joa., xv, 5. Cf. Pauvert, Vie de Jésus-Christ,Paris, 1867, t. ii, p. 133-267.

111. LES SOURCES DE L’ENSEIGNEMENT DE JÉSUS. —

1° L'Écriture Sainte. — Notre-Seigneur ajant déclaréqu’il ne venait pas abolir la Loi, mais la compléter,Matth., v, 17, il s’ensuit que la première source de sonenseignement a été la révélation faite antérieurementet contenue dans les Livres Saints. II a connu ces Livresà fond. Il les cite souvent, ou y fait de fréquentes allusions. Matth., iv, 1-11; x, 15; xii, 3; Marc, vii, 6; Luc,rv, 17-21, 25-27; xi, 30-32; xvii, 26; Joa., v, 39, 46; x,34, etc. Il sait les parcourir d’un bout à l’autre pourdémontrer le caractère messianique de sa personne.Luc, xxiv, 27. Enfin il ouvre l’intelligence de sesApôtres pour qu’ils comprennent les Écritures. Luc,Xxiv, 45, 46. Il possédait lui-même éminemment cequ’il communiquait ainsi aux autres. — Au temps de I

Notre-Seigneur, la Sainte Écriture n’existait que dansson texte hébreu et dans la version grecque des Septante. Or la langue parlée en Palestine à cette époqueétait une langue néo-hébraïque, connue sous le nomd’araméen ou de syro-chaldaïque. II Mach., vii, 8, 21, 27;xii, 37; xv, 29. Cf. Vigoureux, Le Nouveau Testamentet les découvertes archéologiques modernes, Paris, 1896,p. 26-39; Schûrer, Geschichte des judischen Volkes,t. ii, p. 18-20. Les lettrés comprenaient l’ancien hébreu;mais pour le peuple l’hébreu était devenu une languemorte. Aussi, dans les synagogues, après la lecture dela Loi et des Prophètes, avait-on soin de donner immédiatement une traduction des textes en araméen. NotreSeigneur lisait les Écritures dans le texte hébreu et,quand il enseignait dans une synagogue, il le traduisaitlui-même en langue vulgaire. Luc, IV, 20, 21. C’est dumoins ce que suppose le grand étonnement de sescompatriotes de Nazareth qui disaient: «D’où lui vientdonc cette science?» Matth., xiii, 54; Marc, vi, 2, etdes Juifs qui faisaient cette remarque: «Comment saitil donc les lettres sans les avoir apprises?» Joa., vii, 15.Le fait que dans les Évangiles les textes de l’AncienTestament, surtout ceux qu’allègue Notre-Seigneur, sontpresque toujours cités d’après les Septante, ne prouvenullement que le divin Maître se soit servi de cette version. La seule conclusion qu’on en peut tirer, c’est queles auteurs sacrés, s’adressant à des lecteurs qui parlaient grec et à des Juifs qui lisaient les Septante, ontemprunté à cette version les passages qu’ils avaient àciter. Cf. Richard Simon, Histoire critique du VieuxTestament, Rotterdam, 1685, p. 186; E. Bolil, Die altestamentliche Citate ins neuen Testament, Vienne, 1878;Chauvin, La Bible dans l'Église catholique, Paris, 1900,p. 5-8.

Le Sauveur n’emprunte rien aux hommes.

On

ne peut faire venir l’enseignement de Notre-Seigneurd’aucune source humaine. Ceux qui ne veulent voir enlui qu’un homme n’admettent pas, et avec raison, qu’ilait inventé de toutes pièces la doctrine qu’il a prêchée.Ils sont donc obligés de faire de lui le disciple soit deJean-Baptiste, soit des docteurs de son temps. Les faitscontredisent absolument cette supposition. — 1. La doctrine de Jésus ne vient pas de Jean-Baptiste. — LeSauveur n’a rien dû à son précurseur, saint Jean-Baptiste. Ce dernier n’avait eu aucune formation humaine;il était resté dans la solitude jusqu’au jour où il paruten public. Luc, I, 80. Pendant ce temps, Jésus habitaità Nazareth, sans qu’aucun rapport avec Jean-Baptistesoit mentionné. Matth., ii, 23; Luc, ii, 39, 52. Jean commença à prêcher sur les bords du Jourdain; il annonçacelui qui devait venir après lui. Mais Jésus ne suivit passes prédications; il ne parut près de lui que pour sefaire baptiser. Matth., iii, 13; Marc, i, 9; Luc, iii, 21.Il semble même que Jean, tout en sachant qui il était,Matth., iii, 14, n’avait pas de la mission du Sauveur uneconnaissance complète. Joa., i, 33. Le Précurseur prêchela pénitence; il le fait avec le zèle et un peu la rigueurdu prophète Élie, ainsi que l’ange l’a prédit, Luc, i, 17;mais sa mission se borne à préparer les hommes à lavenue du Messie. Matth., iii, 1-12; Luc, iii, 1-18. JésusChrist prêche aussi la pénitence, Marc, i, 15; il le fallait bien, puisque la première condition pour arriver au «royaume des cieux», c’est de se détacher du péché.Cependant ce n'était là qu’un prélude. La doctrine dudivin Maitre s'étend à tous les points de la croyance etdu devoir; loin d'être présentée avec cette sévérité dontJean-Baptiste devait user vis-à-vis d’hommes orgueilleux, qui pour la plupart avaient déjà abusé des donsdivins, la doctrine du Sauveur revêt d’ordinaire uneforme attrayante, propre à gagner les cœurs, non seulement dans la Judée, mais dans le monde entier auquelelle est destinée. En somme, entre Jean-Baptiste etJésus-Christ, il n’y a de rapport doctrinal que celui jqui

doit nécessairement exister entre un enseignement préparatoire et restreint à quelques points et un enseignement définitif et complet.— I.La doctrine de Jésusn’apasété empruntée aux Esséniens. — On a parfois affirmé queNotre-Seigneur avait emprunté au moins quelques traitsde sa doctrine aux Esséniens, qui, au rapport de Josèphe,£e2I.Jud., III, 'viii) 4, se trouvaient en grand nombre danstoutes les villes de Palestine. On manque de renseignements précis sur l’origine et la nature de la secte queformaient les Esséniens. Il semble que leurs pratiques etleurs idées n'étaient autres que celles des pharisiens, maispoussées à l’extrême. Ils pratiquaient le communisme,rejetaient le serment, prohibaient les onctions d’huile,se baignaient dans l’eau froide avant chaque repas, portaient des vêtements blancs, poussaient à un degré incroyable l’observation de la loi sabbatique et des lois depureté extérieure, s’abstenaient du mariage, ne faisaientjamais offrir au Temple de sacrifices sanglants, etc. Cf.Joséphe, Bell. jud., II, viii, 2-13; Schurer, Geschichtedes jûdischen Volkes, t. ii, p. 559-584. Les ressemblances entre les maximes et la manière de vivre desEsséniens et celles de Notre-Seigneur sont superficielles ou accidentelles. À la pureté extérieure qu’ilspréconisent, le Sauveur oppose très formellement lapureté intérieure; les renoncements qu’ils s’imposentrigoureusement font, dans la morale du divin Maître,l’objet de simples conseils adressés à un petit nombred'âmes d'élite. Quant aux formules esséniennes qui paraissent semblables à certaines sentences évangéliques,il reste toujours à se demander si elles sont, de la partdes Esséniens, des prêts ou des emprunts. Si mêmeelles étaient à leur usage avant la prédication évangélique, on ne voit pas pourquoi Notre-Seigneur auraitévité de s’en servir, dès lors qu’elles étaient justes; encore cette antériorité n est nullement certaine, et lessimilitudes ne portent que sur des points accessoires.Il est possible que Noire Seigneur ait assez souventrencontré des Esséniens. Ni lui, ni les Apôtres ne fontla moindre mention d eux, ce qui prouve que les Esséniens qui pouvaient être répandus dans le pays étaientconfondus pratiquement avec les pharisiens. — 3. Ladoctrine du Sauveur n’a pas été empruntée aux pharisiens. — À ceux-ci non plus le Divin Maître n’a rienemprunté. Sans doute, il est d’accord avec eux sur lesdoctrines qui sont vraies. Luc, xx, 39; Marc, xii, 28,34, etc. Mais sur les points de doctrine ou de moralequi caractérisent leur secte, il les combat ouvertement;c’est même à la persévérance avec laquelle il poursuitleurs traditions abusives ou erronées qu’il doit la hainedont il finit par être la victime. Il est certain d’autrepart que le Sauveur ne fréquenta jamais les écoles desdocteurs juifs. Joa., vii, 15. Il n’a donc été tributaired’aucun de ses compatriotes, d’aucun de ses contemporains, d’aucun même des sages qui l’avaient précédé. Ilest par conséquent vrai de dire: «Personne n’a étémoins de son temps que Jésus; personne n’a moinssubi l’influence de son milieu; personne n’a été plusaffranchi de préjugés et plus indépendant que lui.» Stapfer, La Palestine au temps de Jésus-Christ, Paris,1885, p. 472. Cf. Harnack, Dos Wesen des Christenthums, Leipzig, 1900, p. 21-24. Pour faire croire à unedépendance de la doctrine de Jésus-Christ par rapportà l’enseignement rabbinique, on a mis en parallélismeles sentences de l'Évangile et celles du Talmud. E. Soloweyczyk, La Bible, le Talmud et l’Evangile, trad.Wogue, Paris, 1875. La différence saute aux yeux. «Lemeilleur traité de la Mischna, le Pirke Abolh, est séparé par un abîme des préceptes de la morale évangélique.» Stapfer, La Palestine au temps de J.-C, p. 24.Cf. Frz. Delitzsch, Jésus und Hiilel, Erlangen, 1867.

3o La doctrine de Jésus lui vient de son Père.

La

vraie source de l’enseignement de Jésus-Christ, c’est larévélation directe qui lui a été faite par son Père; c’est

par conséquent l’illumination de sa sainte âme par ladivinité à laquelle elle était unie. Les synoptiquesdisent peu de chose à ce sujet, parce que l'Évangilequ’ils écrivent a été prêché dans un milieu où l’autoritédoctrinale du Sauveur s’imposait d’elle-même et s’appuyait d’ailleurs sur d’incessants miracles. Mais enJudée, à Jérusalem, au Temple, les représentants dusanhédrin ont le droit de demander à Jésus quel a étéson maître, d’où lui vient sa doctrine. Saint Jean, quiseul fait le récit du ministère public du Sauveur auprès des Juifs de la capitale, enregistre ses réponses.Elles sont décisives et fréquemment répétées. Tout d’abord, c’est Jean-Baptiste qui dit de Jésus: «Celui quivient du ciel est au-dessus de tous. Ce qu’il a vu etentendu, il l’atteste… Celui que Dieu a envoyé dit lesparoles de Dieu.» Joa., iii, 31-34. À la fête des Tabernacles, le Sauveur lui-même dit aux Juifs: «Ma doctrine n’est pas à moi, mais à celui qui m’a envoyé. Quiconque voudra obéir à sa volonté, reconnaîtra si ladoctrine vient de Dieu ou si je parle en mon proprenom. Quand on parle en son propre nom, on chercheà se glorifier soi-même; mais celui qui cherche lagloire de qui l’a envoyé, celui-là mérite d'être cru.» Joa., vii, 16-18. Au cours de la même fête, il dit encore: «Celui qui m’a envoyé mérite créance, et ce que j’aientendu de lui, c’est ce que je dis au monde… Ce quemon Père m’a enseigné, je le dis… Je vous ai dit lavérité que j’ai apprise de Dieu.» Joa., viii, 26, 28, 40. Lasemaine même de sa passion, il répète de nouveau dansle Temple: «Je n’ai pas parlé en mon nom, mais lePère qui m’a envoyé m’a ordonné ce que je dois direet prêcher… Aussi ce que je dis, je le dis conformémentà ce que m’a dit le Père.» Joa., xii, 49, 50. À sesApôtres, le jeudi saint, il renouvelle les mêmes protestations: «Les paroles que je vous dis, je ne les dis pasde moi-même… L’enseignement que vous avez entendun’est pas de moi, mais de mon Père qui m’a envoyé.» Joa., xiv, 10, 24. «Je vous appelle mes amis, parce quetout ce que j’ai entendu de mon Père, je vous l’ai faitsavoir.» Joa., xv, 15. «"Père, … les paroles que vousm’avez dites, je les leur ai transmises.» Joa., xvii, 8.Qu’on n’imagine pas cependant que saint Jean soit seulà rappeler de pareils témoignages. On en trouve untout aussi net et tout aussi démonstratif sous la plumede saint Matthieu, xi, 27, et de saint Luc, x, 22: «Touteschoses m’ont été transmises par mon Père. Personnene connaît le Fils que le Père, personne ne connaît lePère que le Fils, et celui auquel le Fils aura bien voulule révéler.» C’est l’affirmation de l’identité de sciencedans le Père et dans le Fils. Il était difficile de reveniravec plus d’insistance sur une même affirmation. NotreSeigneur tenait manifestement à ce qu’aucune équivoquene subsistât sur ce point capital: sa doctrine ne venaitpas des hommes, mais uniquement de Dieu.

4o La science de Notre-Seigneur.

On peut se demander dans quelle mesure la science divine a été

communiquée à l'âme de Notre-Seigneur. Les textesévangéliques ne fournissent pas les renseignementsdésirables pour faire la lumière complète sur cettequestion. Nous avons vu plus haut que le texte desaint Luc, ii, 52, parlant d’une croissance «en sagesse» de l’enfant Jésus, est suffisamment justifié par l’idéed’une manifestation progressive de la sagesse, d’aulentplus que, dans un texte précédent, ii, 40, l'Évangélistea déjà dit que le divin Enfant était «plein de sagesse»,comme il le montre dans son apparition au Temple.Notre-Seigneur, il est vrai, déclare à ses Apôtres queni les anges, ni lui-même, ne connaissent le jour etl’heure du jugement. Matth., xxiv, 36; Marc, xiii, 32.Quelques auteurs en ont conclu qu’en réalité NotreSeigneur a ignoré l'époque du jugement. Cf. Schell,Katholische Dogmatik, Wurzbourg, 1893, t. iii, p. 142147. Mais on enseigne communément que l’ignorance

dont il est parié ici a pu n’être que relative, et par rapportà ceux qui interrogeaient. Le renseignement demandéne faisait pas partie des choses que le Sauveuravait à révéler. Cf. Petau, De incarnatione Verbi, XI,I, 1-15. La réponse serait donc, pour le fond, analogueà celle que le divin Maître fit à ses Apôtres au matin deson ascension: «Ce n’est pas à vous de sa^ir les tempsni les moments que le Père tient en son pouvoir.» Act., i, 7. II est certain que l’âme de Notre-Seigneur,créée et finie, n’était pas capable d’une science infinie.Du moins était-elle capable de puiser directement dansla science divine les connaissances qui se rapportaientà la mission rédemptrice. Or Jésus donne les détailsles plus circonstanciés sur les derniers jours du mondeet sur le jugement; il déclare que le Père lui a «toutremis entre les mains», Joa., xiii, 3; qu’entre autrespouvoirs, il lui a assigné celui d’exercer tout jugement,particulièrement à la fin des temps. Joa., v, 22, 27;Matth., xxiv, 31. Comment donc ne saurait-il pasl’époque du jugement qu’il doit présider lui-même?D’ailleurs, à prendre le texte à la rigueur, ce ne seraitpas seulement le Verbe incarné dont l’âme serait privéede cette connaissance, ce serait le «Fils», la secondepersonne de la sainte Trinité, pour laquelle le «Père» aurait un secret. On comprend très bien que Notre-Seigneurait refusé aux hommes la connaissance del’époque à laquelle finira le monde. Pour couper courtà toute question, il donne une réponse négative, quidoit être prise dans un sens analogue à celui qu’onprête à ces autres paroles: «Je ne monte pas (à Jérusalem) pour ce jour de fête,» Joa., vii, 8, alors quequelques jours après, le Sauveur se mit en route.Rien, dans l’Evangile, ne s’oppose donc à ce que l’onreconnaisse en Notre-Seigneur une science puisée directementà la source infinie de l’omniscience divine;science aussi grande que pouvait la comporter uneâme créée, la plus parfaite de toutes les âmes par sonunion personnelle avec la divinité; science enfin quine pouvait recevoir du dehors que la notion expérimentalede ce qui était déjà connu par intuition directe enDieu même.

IY. LA MÉTHODE D’ENSEIGNEMENT DU SAUVEUR. —

Notre-Seigneur n’avait pas à prêcher sa doctrine auxseuls hommes de son pa^s et de son temps. Son enseignements’adressait à l’humanité entière. Il importaitdonc qu’il fût présenté sous une forme accessible àtous les esprits. De là les caractères particuliers de laprédication du Sauveur.

Jésus enseigne en maître.

Tout d’abord, Notre-Seigneur

parle en maître. «Vous avez appris qu’il aété dit aux anciens… et moi je vous dis…» Matth., v,22, 28, 32, 34, 39, 44, etc. Si on lui objecte ce queMoïse a établi, il substitue son autorité à celle de Moise.Matth., xix, 7-9; Marc, x, 4-9. Si l’on fait difficultépour admettre son enseignement, loin de l’atténuer, ille répète avec plus de force. Joa., vi, 41-65. Pour énoncerplus énergiquement certains principes, il les faitprécéder de la formule: «En vérité, en vérité, je vousle dis.» Matth., v, 18; Marc, iii, 28; Luc, iv, 24; Joa.,i, 51, etc. Voir Amen, t. i, col. 475. Et ce n’est pas seulementquand il est en face des Galiléens et qu’il n’aguère d’opposition à redouter qu’il procède ainsi. S’ils’adresse aux Juifs de Jérusalem et aux plus hautesautorités religieuses, il affirme avec la même assurance.Joa., viii, 16, 44-47, 58; Marc, xi, 17; Luc, xix, 46;Matth., xxvi, 55, 64, etc. Cette attitude tranchait singulièrementavec la "méthode familière aux docteurs juifs,qui citaient toujours les dires d’autres docteurs plus oumoins célèbres, opposaient leurs décisions les unes auxautres, subtilisaient sur leurs sentences et n’arrivaientjamais à se faire une conviction personnelle d’accord àla fois avec la loi divine et avec le bon sens. C’est l’impressionque donne à chaque page la lecture du Talmud.

Aussi Notre-Seigneur disait-il des docteurs de sontemps: «Laissez-les; ce sont des aveugles conduisantdes aveugles.» Matth., xv, 14. Quant à lui, il faisaitl’admiration des foules par sa manière de les enseigner. «Car il les instruisait comme ayant autorité, etnon comme leurs scribes et les pharisiens.» Matth.,vn, 29. Quelquefois l’admiration faisait pousser à sesauditeurs des exclamations enthousiastes. Luc, xi, 27.On l’écoutait toujours volontiers, Marc, xii, 37, etmême les habitués du Temple, qui avaient l’occasioncontinuelle d’entendre parler les docteurs, ne pouvaients’empêcher de faire cette remarque: «Jamais hommen’a parlé comme cet homme!» Joa., vil, 46. Il étonnaitsurtout les docteurs par l’aisance et l’autorité avec lesquellesil tranchait les cas qu’ils lui posaient pourl’embarrasser. Rien de plus surprenant pour ses ennemis,mais aussi rien d’aussi péremptoire que ses réponses surle jeûne, Luc, v, 34; sur le repos du sabbat, Matth., XII,3, il; sur l’expulsion des démons, Matth., XII, 26, 27;sur l’impureté extérieure, Marc, vii, 18-23; sur le cas dela femme adultère, Joa., viii, 7; sur sa divinité, Joa., x,32-38; sur son autorité, Marc, xi, 29-33; sur le tributà César, Matth., xxii, 21; sur la résurrection, Luc, XX,34-36; sur le premier commandement de la loi. Marc,xii, 29-31. C’est bien ainsi que devait parler au milieudes hommes le Fils unique, qui est au sein du Père, etqui venait raconter ce qu’il y avait appris. Joa., i, 18.

2° Jésus parle avec la connaissance du fond des cœurs.

— Le merveilleux à-propos avec lequel le Sauveur parlaità ses interlocuteurs s’explique par le don qu’ilavait de lire dans les consciences les pensées et lessentiments qui s’y cachaient. Les Évangélistes en fontsouvent la remarque. Il ne se servait d’ailleurs de cedon que pour éclairer les âmes et appliquer aux mauxdont elles souffraient le remède convenable. «Il connaissaittous les hommes, et il n’était pas besoin qu’onlui rendît témoignage de qui que ce fût; il savait bienlui-même ce qu’il y avait au dedans de l’homme.» Joa., Il, 24, 25. C’est ainsi qu’il voit clairement ce qu’ily a dans la conscience de Nathanæl, Joa., i, 47; de laSamaritaine, Joa., iv, 18; des gens de Nazareth. Luc,IV, 23. Il surprend dans le cœur des disciples les idéesqu’ils se font sur le levain des pharisiens, Matth.,xvi, 7, 8; Marc, viii, 16, 17; sur la primauté qu’ilsambitionnent, Marc, ix, 33, 34; Luc, îx, 47; sur la.sainte prodigalité de Madeleine. Marc, xiv, 4. Les dispositionsperfides de Judas lui sont connues longtempsà l’avance. Joa., vi, 71; xiii, 21; Luc, xxii, 48. Quantaux pharisiens malveillants, il lit leurs pensées au fondde leur cœur et y répond, avec une précision qui lesdéconcerte, au sujet de la rémission des péchés, Matth.,ix, 4; Marc, ii, 8; Luc, v, 22; de la pécheresse repentie,Luc, vii, 39, 40; de l’intervention de Beelzébub,Matth., xii, 25; Luc, xi, 17; du pain de vie, Joa., vi,62; des ablutions avant le repas, Luc, XI, 38, 39; del’orgueil, Luc, xviii, 9, 10; du déniera pajerà César.Matth., xxii, 18; Marc, xii, 15; Luc, xx, 23, etc. LesApôtres eux-mêmes lui en rendent d’ailleurs le témoignage: «Nous savons que vous connaissez tout, sansqu’il soit besoin qu’on vous interroge; c’est ce qui faitque nous croyons que vous êtes venu de Dieu.» Joa., ,xvi, 19, 30.

3° Jésus adapte son enseignement à l’intelligencede ses auditeurs. — Ce qui caractérise encore la méthodede Notre-Seigneur, c’est l’adaptation parfaite de saparole à la portée de toutes les intelligences humaines.Il vient apporter au monde les mystères les plus sublimeset la morale la plus élevée. Tous comprennent,tant il y a de clarté, de simplicité, de noble familiaritédans son exposition. À la suite du sermon sur la montagne,par exemple, «les foules sont dans l’admirationsur sa doctrine,» Matth., vii, 28, parce que tous les auditeurssont émerveillés d’avoir pu<très facilement saisir un.

enseignement si substantiel et si élevé. Sans nul doute,le Sauveur qui était né Juif vivait suivant les usages desa nation, parlait la langue de son pajs, prêchait dansun milieu tout israélite et exerçait son ministère dansun cadre palestinien, au sein d’une nature qui a sa physionomie originale et très nettement caractérisée. Il fallait qu’il s’imposât tout d’abord aux hommes de son temps.Aussi ceux qui parlaient sa langue et vivaient de sa viedevaient-ils trouver à son enseignement un charme etune saveur qu’il n’a pas été permis aux autres hommesde goûter. Luc, iv, 22. Cf. Wiseman, Mélanges religieux,scientifiques et littéraires, trad. Bernhardt, Paris, 1858,p. 149-152. Un caractère trop impersonnel eût été unobstacle au succès de la doctrine auprès des contemporains qu’il fallait gagner les premiers. Néanmoins,indépendamment de cet intérêt particulier que la paroledu divin Maître devait avoir pour ses compatriotes, ellegarde pour tous les hommes de tous les temps descharmes tels que les esprits les plus simples en ont l’intelligence et en gardent un souvenir vivifiant, tandis queles esprits cultivés s’y passionnent et n’en peuvent mesurer ni l'élévation, ni la profondeur. Cela tient en grandepartie à la forme si claire et si familière que Notre-Seigneur a bien voulu donner à sa divine doctrine. L'Évangile, il est vrai, a ses obscurités. Les unes tiennent ànotre propre ignorance des choses du temps où il a étéprêché. Les autres sont voulues. Il y a certains enseignements qui ne sont pas destinés à tous, mais ne concernent que des âmes privilégiées. Notre-Seigneur enavertit alors ses auditeurs: «Qui a des oreilles pour entendre, entende.» Matth., xi, 15; xiii, 9, 43; Marc, IV,9, 23; vii, 16; Luc, viii, 8; xiv, 35. «Tous ne comprennent pas cette parole, comprenne qui pourra.» Matth.,xix, 11, 12. «Qui lit, comprenne.» Matth., xxiv, 15;Marc, xiii, 14. Il ne suit nullement de là que NotreSeigneur ait eu une doctrine ésotérique, à la manière decertains philosophes de l’antiquité qui réservaient leurenseignement à quelques initiés. Le Sauveur parlait pourtous les hommes. S’il prenait parfois à part ses disciplespour leur expliquer ses paraboles ou leur faire des révélations que la masse du peuple n'était pas alors en étatde porter, ce n'était pas pour qu’ils fissent de ces véritésun trésor caché. «Ce que vous avez entendu à l’oreille,prêchez-le sur les toits,» Matth., x, 27, leur commandaitle divin Maître. Aussi peut-il dire en toute vérité au grandprêtre: k J’ai parlé publiquement au monde, j’ai toujours enseigné dans la synagogue et dans le Temple oùtousse réunissent, je n’ai rien dit en secret.» Joa., xviii,20. D’autre part, on n’a pas davantage le droit de conclureque tout ce qui a été dit par le Sauveur a été consignédans les Évangiles. Rien n’autorise à le prétendre. SaintJean, xx, 30; xxi, 25, dit positivement le contraire en ce quiconcerne ses actes: il y a toute probabilité que cetteaffirmation doit s'étendre aussi aux paroles, et que sid’autres Évangélistes avaient été suscités par Dieu aprèsles quatre premiers, ils auraient pu nous transmettredes discours du divin Maître qui resteront à jamais ignorés. Il ne faut donc pas s'étonner que certaines penséeset certaines prescriptions du divin Maitre ne nous soientparvenues que par voie de tradition. Cf. Curci, Lezionisopra i quattro Evangeli, t. v, p. 173; Lescceur, JésusChrist, Paris, 1888, p. 31-48. — Sur les paroles attribuées à Notre-Seigneur et conservées en dehors desÉvangiles canoniques, voir A. Resch, Agrapha, Leipzig,1889; Aussercanonische Paralleltexte zu den Evangelien, Leipzig, 1893; A<5f* 'Ihi<to3, Sayings of Our Lorddiscovered and ediied by B. P. Grenfell and A. S. Hunt,Londres, 1897; A. Harnack. Uber die jûngst entdektenSpr «cve/esM, Fribourg-en-Brisgau, 1897; Revue biblique,1897, p. 501-515; 1898, p. 129; Batiffol, Les Logia dupapyrus de Behnésa, dans le IV' Congres scient, internat, des catholiques, Fribourg, 1897, II» sect., p. 103117.

Enseignement par paraboles.

Ce qui par-dessus

tout rend l’enseignement de Notre-Seigneur éminemment concret, intelligible, populaire et attachant, c’estl’emploi qu’il fait de la parabole. Voir Parabole. Rienne saisit mieux l’esprit que ce petit récit pittoresque,emprunté aux réalités ordinaires de la vie et, par comparaison, servant d’illustration aux idées supérieures.Les antiques peintures de la vallée du Nil nous expliquent,bien mieux que tous les textes, les mœurs des anciensÉgyptiens Les paraboles jouent un rôle analogue parrapport aux doctrines évangéliques. Représentant desscènes qui se produisent sans cesse dans tous les pays,elles portent avec elles et leur propre explication et cellede la doctrine dont elles sont comme l’enveloppe. Ordinairement, ce sont des récits, d'étendue plus ou moinslongue, dont la signification est ensuite transposée dufait raconté à l’idée qu’il s’agit de faire comprendre etretenir. Plus rarement le récit porte sa morale en luimême, sans qu’il soit besoin d’en faire l’application à unautre ordre d’idées. C’est le cas des paraboles du bonSamaritain, du riche insensé, du pauvre Lazare, du pharisien et du publicain. Les paraboles ne se lisent quedans les synoptiques; saint Jean n’en transcrit aucune,bien que Notre-Seigneur en ait raconté plusieurs à Jérusalem même. On comprend que le quatrième Évangéliste, qui ne reproduit guère que les discussions dogmatiques du Sauveur avec les Juifs, ne soit pas revenusur des enseignements plus populaires, déjà consignésdans les trois Évangiles antérieurs. Le nombre précisdes paraboles est seulement de vingt-neuf, si l’on s’entient aux paraboles proprement dites, en laissant de côtéles allégories et les simples comparaisons.

1. Les paraboles évangéliques.

Elles se présententen trois groupes bien distincts. — Premier groupe deparaboles. — Il comprend huit paraboles, se rapportanttoutes au «royaume des cieux», par conséquent à lasociété nouvelle que Jésus-Christ travaille à fonder etqui, après la Pentecôte, deviendra l'Église. Ces parabolessont les suivantes: 1° le semeur, Matth., xiii, 1-23;Marc, iv, 1-20; Luc, viii, 4-15, se rapportant au travailde la prédication évangélique plus ou moins fructueux,suivant les dispositions des âmes sur lesquelles il s’opère;— 2° le froment et l’ivraie, Matth., xiii, 24-30, révélantl’effort tenté par la puissance du mal pour dénaturerl'œuvre du semeur; — 3° le grain de sénevé, Matth., xiii,31-32; Marc, iv, 30-32; Luc, xiii, 18-19, marquant ledéveloppement que prendra la société nouvelle; — 4° leJevain, Matth., xiii, 33; Luc, xiii, 20-21, symbolisantl’influence salutaire du «royaume des cieux» au milieude l’humanité; — 5° la semence qui croît d’elle-même,Marc, iv, 26-29, signifiant les progrès futurs de l'Église,par la seule grâce invisible de Dieu; — 6° le trésor caché, Matth., xiii, 44, qui est la grâce du royaume des cieuxà laquelle il faut tout sacrifier; — 7° la perle précieuse,Matth., xiii, 45-46, dont la signification est la même; —8° enfin la seine, Matth., xiii, 47-49, qui indique dansl'Église le mélange des bons et des méchants, jusqu’autriage qui se fera au jugement. Ces paraboles sont assignées par saint Matthieu à la période du ministère publicqui suivit le sermon sur la montagne.

Second groupe de paraboles. — Elles sont rapportéespar saint Luc dans le récit du dernier voyage en Galiléeet en Pérée. Elles portent sur les conditions requises pourfaire partie du «royaume des cieux». Yoici ces paraboles: 1° le bon Samaritain, Luc, x, 25-37, nécessitéde la charité effective envers le prochain, même ennemi;— 2° le serviteur sans miséricorde, Matth., xviii, 23-35,obligation de pardonner les injures; — 3° l’hôte nocturne, Luc, xi, 5-8, efficacité de la prière instante adressée à Dieu; — 4° le riche insensé, Luc, xii, 16-20, foliede celui qui ne songe qu'à l’acquisition des biens terrestres; — 5° le figuier stérile, Luc, xiii, 6-9, résistance àla grâce; — 6° les invités au festin, Luc, xiv, 16-24,

mépris des inspirations de la grâce et danger de se voirsubstituer des âmes plus dociles; — 7° la brebis perdue,Luc, xv, 3-7; Matth., xviii, 12, 13, désir qu’a Dieu desauver les pécheurs; — 8° la drachme perdue, Luc, xv,8-10, même enseignement; —9° l’enfant prodigue, Luc,xv, 11-32, miséricorde de Dieu envers le pécheur qui seconvertit et blâme au fidèle qui en serait jaloux; —10° l’intendant malhonnête, Luc, xvi, 1-13, habileté avec, laquelle il faut se servir des biens de ce monde en vuede l'éternité; — 11° le mauvais riche et le pauvre Lazare,Luc, xvi, 19-31, compensations qui, dans l’autre vie,rétabliront la justice selon les mérites de chacun; —12° le mauvais juge et la veuve, Luc, xviii, 1-8, assurance que Dieu vengera ses serviteurs contre leurs ennemis; — 13° le pharisien et le publicain, Luc, xviii, 9-14,l’orgueil et l’humilité en face de Dieu; — 14° les ouvriersenvoyés à la vigne, Matth., xx, 1-16, petit nombre desâmes d'élite en regard des âmes peu généreuses au ser. vice de Dieu. VoirÉLDS, t. ii, col. 1710. — Ces paraboles. disent aux enfants du royaume des cieux ce qu’il fautéviter: la dureté envers le prochain, l’attachement auxbiens de la terre, la résistance à la grâce, la jalousie,l’insensibilité envers le pauvre, l’orgueil, la lâcheté auservice de Dieu; et ce qu’il faut pratiquer: l’amour duprochain, l’assiduité à la prière, la docilité à la grâce, leretour à Dieu quand on l’a abandonné, l’habileté à travailler pour son salut, la patience dans les maux en vuedes biens éternels, la confiance en Dieu, l’humilité et lezèle généreux au service du Seigneur. — Ces parabolessont d’intérêt général. Mais, bien que devant s’appliquerà tous les temps, elles prenaient vis-à-vis des Juifs rebelles un sens tout particulier. Ceux-ci devaient se reconnaître dans le lévite et le prêtre qui abandonnent leblessé que soignera le Samaritain, dans le figuier stérile,dans les invités qui refusent de venir au festin, dans lefils aîné jaloux de l’accueil ménagé au prodigue, dansl’intendant infidèle, dans le riche insensible, dans lepharisien orgueilleux, dans les ouvriers de la première. heure qui murmurent contre les derniers venus.

Troisième groupe de paraboles. — Les paraboles dela troisième série appartiennent aux derniers jours de lavie de Notre-Seigneur. 1° La parabole des mines, Luc,XIX, 11-27, racontée à Jéricho, se rapporte au bon usagequ’il faut faire des grâces de Dieu, parce qu’il en demandera compte un jour. Elle a en même temps pour butde montrer que le royaume de Dieu ne va pas se manifester immédiatement. Enfin elle fait allusion à la démarche que les princesdes nations soumises aux Romainsétaient obligés d’aller faire à Rome avant d'être autorisésà régner, à la requête que les Juifs avaient adressée jadisà Auguste pour empêcher Àrchélaus de succéder à Hérode, voir Archélaus, t. i, col. 927, et aussi au refusque les Juifs vont opposer au règne de leur Messie et auchâtiment qui en sera la conséquence. — 2° La paraboledes deux fils envoyés à la vigne, Matth., xxi, 28-32, meten regard les Juifs qui n’entrent pas dans le «rojaumedes cieux», après l’avoir désiré, les pécheurs et bientôtles gentils qui y entrent en foule, après l’avoir méconnu.— 3° La parabole des vignerons homicides, Matth., xxi,33-46; Marc, XII, 1-12; Luc, xx, 9-19, est une lugubrepeinture des mauvais traitements que les Juifs ont infligés aux anciens prophètes que Dieu leur avait envoyés,de la sentence de mort que le sanhédrin va proférercontre le Fils même de Dieu et de la punition qui attendla nation ingrate. Le Sauveur faisait entendre cette dernière parabole trois jours avant sa mort. Les princes desprêtres en comprirent le sens et n’en devinrent que plusfurieux. — 4° La parabole des noces royales, Matth., xxil,1-14, reproduit celle des invités au festin, Luc, xiv, 16-24,avec cette différence que les premiers invités ne se contentent pas de ne point venir; ils mettent à mort ceux quileur rappellent l’invitation. — Les deux dernières paraboles sont adressées aux seuls disciples. — 5° Celle des

dix vierges, Matth., xxv, 1-13, vient à l’appui de cet enseignement qu’il faut se tenir prêt à paraître au jugement de Dieu. — 6° Celle des talents, Matth., xxv, 14-30,ressemble à celle des mines, et montre qu’en se tenantprêt pour le jugement, il faut travailler pour mériter larécompense. Les cinq vierges folles qui manquent l’entrée dans la salle du festin, le serviteur négligent quine fait pas valoir son talent et accuse son maître d'êtredur, représentent encore le peuple juif, infidèle à sa mission. Ces six dernières paraboles, dont cinq sont postérieures à l’entrée solennelle à Jérusalem, ont donc uneportée significative; elles constituent comme un dernieravertissement adressé aux Juifs sur les conséquences dudéicide qu’ils vont commettre.

Autres paraboles. — Toutes les paraboles dont ledivin Maître s’est servi n’ont pas été reproduites par lesÉvangélistes. En dehors de celles qu’ils transcrivent,quelques autres sont brièvement indiquées, comme celledes deux débiteurs, Luc, vii, 40-41; d’autres ne sontprobablement représentées que par une comparaison;la plupart ne nous ont pas été conservées. Saint Matthieu,xiii, 34, constate, en effet, qu’au moins après le sermonsur la montagne, Jésus «ne parlait aux foules qu’en paraboles». Saint Marc, iv, 33, 34, dit avec plus de détail: «C’est ainsi qu’il leur adressait la parole, avec de nombreuses paraboles comme celles-ci, selon ce qu’ils pouvaient entendre. Il ne leur parlait pas sans paraboles,mais à part il expliquait tout à ses disciples.»

2. Sens profond et multiple des paraboles.

II està remarquer que quand Jésus commence à parler enparaboles, les disciples s’en étonnent et lui disent: «Pourquoi leur parlez-vous en paraboles?» Matth., xiii,10. Notre-Seigneur leur explique alors que les paraboles sont destinées à voiler son enseignement de manièreque ses auditeurs ne soient plus à même de le saisirdans toute sa portée. Matth., xiii, 11-17; Marc, IV, 10-12;Luc, viii, 9, 10. À cette époque de sa vie publique, lesGaliléens commençaient en effet à montrer moins dedocilité à l'égard du Sauveur. Circonvenus par les pharisiens et les scribes, ils deviennent de plus en plus réfractaires à l’idée d’un Messie humble et doux et d’un «rojaume des cieux» purement spirituel. Us ne sontplus dignes d’avoir la confidence des secrets divins. LeSeigneur leur parlera encore de temps en temps sans paraboles, comme le montre la suite de l'Évangile. Toutefois,en ce qui concerne «les mystères du royaume des cieux»,il ne leur sera plus parlé qu’en paraboles, afin qu’ilsvoient et entendent, mais sans voir ni comprendre leprincipal, dont les vrais disciples auront seuls la révélation. Les paraboles ont donc à ce point de vue, pourles contemporains du Sauveur, le caractère d’un châtiment, d’une restriction voulue dans les révélations divines. Elles ne sont pas totalement inintelligibles; autrement l’on ne comprendrait pas comment le Sauveur leseût dites devant toutes sortes d’auditeurs. Chacune renferme un enseignement particulier qu’il est assez facilede saisir et une leçon dont on peut se faire l’applicationpersonnelle. Mais le sens plus général qui se rapportaitau «royaume des cieux», cette description prophétiquedes destinées de l'Église et de l’attitude que la masse desJuifs devait prendre en face des gentils convertis, devenait pour le grand nombre un mystère dont ils nesoupçonnaient même pas qu’il fût question dans les paroles du divin Maître. Parfois cependant ce sens supérieurde la parabole était tellement manifeste que des auditeurs avisés s’en apercevaient. C’est ainsi que les princes des prêtres et les pharisiens se reconnurent dansla parabole des vignerons homicides. Matth., xxi, 45;Marc, xii, 12; Luc, xx, 19. Mais d’autres fois, il fautfaire attention à la formule initiale: «Le royaume descieux est semblable…» pour se rendre compte de cesens supérieur. Matth., xiii, 44-45. Cette formule n’existepas toujours, comme, par exemple, dans la parabole du

prodigue. Luc, xv, 11. Mais si, dans cette parabole, onvoulait s’en tenir à l’application morale individuelle,toute la fin du récit, qui relate la conduite du fils aîné,Luc, xv, 25-32, semblerait un hors-d œuvre sans grandeportée intelligible. L’ensemble des paraboles constitueainsi comme une histoire prophétique qui expliqueles destinées de l'Église, tout en ménageant à chaqueâme en particulier les plus hautes leçons de la moralechrétienne. Le Sauveur seul pouvait parler ainsi, seul ilpouvait enfermer dans les mêmes récits les prophétiesles plus saisissantes de vérité pour ceux qu’il voulaitinitier aux secrets divins, et les instructions du charmele plus pénétrant pour la direction morale des hommesde tous les temps et de tous les pays.

Sur les paraboles, voir Maldonat, Comment, in IVEvang., Pont-à-Mousson, 1597; Salmeron, Sermon, inparabol., Anvers, 1600; Unger, De parabol. Jesu natura,interpretatione, etc., Leipzig, 1828; Lisco, Die ParabelnJesu, Berlin, 1831; Ed. Greswell.JS’acposifion of theParabtes, Londres, 1839; Trench, Notes on the Parables,Londres, 1841; Wiseman, Mélanges religieux, scientif. et httér., trad. Bernhardt, Paris, 1858, p. 8-67; Buisson, Paraboles de l'Éiiangile, 1849; Guthrie, The Parables, W&; Stier, Reden des Hen-n/1865-1874; W. Arnot,The Parables of our Lord, 2e édit., Londres, 1883;W. Beyschlag, Die Gleichnissreden des Rerrn, Halle,1875; H. W. J. Thiersch, Die Gleichnisse Çhristi nachihrer moralischen und prophetischen Bedeutung betrachtct, 2e édit., Francfort-s.-M., 1875; H. Tamm, DerRealismus Jesu in seiner Gleichnissen, Iéna, 1886;S. Gobel, Die Parabeln Jesu, Gotha, 1880; Curci, Lezioni sopra i qualtro Evangeli, t. ii, p. 453-467; Bruce,The parabolic Teaching of Christ, Londres, 1882; Bacuez, Manuel biblique, Paris, 1886, t. iii, p. 400-426;Julicher, Die Gleichnissreden Jesu, Fribourg-en-Brisgau, 1886; Id., Die Gleichnissreden Jesu in Allgemeinen,Fribourg-en-Brisgau, 1888; Id., Auslegung der Gleichnissreden der drei ersten Evangelien-, Fribourg-enBrisgau, 1899; A. Freystedt, Die Gleichnisse des Rerrn,Predigten, Leipzig, 1896; I. Stockmeyer, Exegelische.und praktische Erklarung ausgewâhlter Gleichnisse Jesu Vorlesungen, Bàle, 1897.

IX. Sa divinité.

Quand il s’agit de Jésus-Christ, laquestion capitale à résoudre est celle de sa divinité.S’il n’est pas Dieu, l’Ancien Testament est un livre sansobjet défini et sans conclusion. Quant à l'Évangile, ildevient tellement inexplicable, qu’il faut en atténuertous les traits pour qu’il ait quelque sens. Par contre,ces livres entendus dans leur signification naturelle ethistorique fournissent une démonstration invincible dela divinité de Jésus-Christ. Il sort de ces écrits troispreuves qui, séparées l’une de l’autre, n’auraient qu’unevaleur relative, mais qui, réunies, forment l’ensemble leplus convaincant qu’on puisse désirer. Les prophéties accomplies et les miracles opérés prouvent péremptoirementque Jésus-Christesttout au moins l’envoyé de Dieu;ils iraient même parfois jusqu'à prouver logiquement sadivinité. Mais entre les deux se place l’affirmation solennelle de Jésus-Christ sur sa divinité; affirmation qui,appuyée d’une part sur les prophéties accomplies en sapersonne, de l’autre, sur les miracles opérés, démontreque celui qui est manifestement envoyé par Dieu, et queDieu ne cesse d’autoriser par les miracles qu’il lui faitopérer, est vraiment Dieu lui-même, puisqu’il l’affirme.I. les prophéties.

1° Prophéties concernant Jésus' Christ. — 1. Parmi les prophéties qui concernent le Messie, il en est qui fixent le temps et les circonstances desa venue, et d’autres qui tracent à l’avance les caractères de sa personne et de sa mission, quelques-unesseulement laissent entendre qu’il sera Dieu. Ps. ii, 7;xlv (xliv), 7; Is., ix, 6. Mais ces dernières sont rares.Elles ne pouvaient d’ailleurs constituer un signe pour reconnaître le Messie; elles affirment seulement et comme

en passant, pour ne pas dévoiler trop clairement aux anciens un mystère qui devait rester pour eux dans uneombre discrète, que celui qui est promis et qu’on attendsera Dieu. Or toutes les prophéties messianiques que nousavons énumérées plus haut, col. 1430, se sont exactement vérifiées en Jésus-Christ. Cf. S. Justin, ûialog.cum Tryphon., 49-53, 66, 77, 78, 85, 91, 98, t. vi, col.586-594, 627, 655-663, 675-679, 691, 706; Freppel, SaintJustin, Paris, 1869, p. 386-391; Pascal, Pensées, édit.Guthlin, Paris, 1896, p. 170-215. Jésus-Christ et les prophéties se sont éclairés mutuellement. Les prophétiesont permis de reconnaître en Jésus le Messie promis,l’envoyé de Dieu, et Jésus-Christ a fait comprendre lesprophéties, en réalisant dans sa personne des caractèresqui paraissaient tout d’abord inconciliables et en démontrant quel sens, littéral ou spirituel, il fallait attribueraux oracles messianiques. L’argument à tirer de l’accomplissement des prophéties est de telle importanceque, pour conserver ces textes antiques, la Providencea perpétué et perpétuera jusqu'à la fin des temps, Rom.,xi, 25, 26, le peuple juif, dans les conditions les plusanormales, au milieu de tous les autres peuples, auxmœurs desquels il s’accommode sans rien perdre de soncaractère national et en s’assurant une prospérité matérielle qui est une des conditions nécessaires de sadurée. «Si les Juifs eussent été tous convertis par Jésus-Christ, nous n’aurions plus que des témoins suspects; et s’ils avaient été exterminés, nous n’en aurionspoint du tout.» Pascal, Pensées, p. 210. — 2. Pour êtredémonstratif, il faut que l’accomplissement des prophéties messianiques ne puis «e être attribué à aucune causenaturelle. — a) Tout d’abord, cet accomplissement n’estpas fortuit. Si les prophéties portaient seulement que leMessie naîtrait à Bethléhem et serait crucifié, il pourraitse rencontrer assez facilement un homme qui réalisâtces deux conditions. Si on en ajoute une troisième, que! a naissance aura lieu à telle époque donnée, déjà la réalisation par le hasard de l'événement prédit devient beaucoup plus improbable. Mais ce ne sont pas seulement deuxou trois traits, c’est un portrait compliqué, avec des centaines de particularités importantes, qui a été tracé àl’avance par les prophètes et auquel correspond de pointen point la figure de Jésus-Christ. Il est absolument impossible de ne voir là qu’une coïncidence fortuite; ce serait contraire à toutes les règles du bon sens. — 6) Onne peut dire non plus que Jésus-Christ n’est que lerésultat naturel de tout un mouvement d’idées et d’inspirations créé par les prophéties. Les événements évangéliques ne seraient alors que le produit de la penséeprophétique, la pensée ayant tendance naturelle à seréaliser dans les faits. Deux raisons historiques, endehors des autres, s’opposent radicalement à l’acceptation de cette théorie. C’est d’abord que la prophéties'était arrêtée quatre cents ans avant Jésus-Christ.I Mach., ix, 27. «Après quatre cents ans d’interruption,paraissent Jean-Baptiste d’abord et ensuite Jésus-Christ.Est-ce une idée admissible que celle d’un mouvementde pensée et d’opinion qui s’arrête pendant quatre centsans et qui, au bout de ce temps, se remet à marcherbrusquement, pour arriver d’un bond plus haut qu’il nes’est élevé jusque-là? N’est-il pas certain qu’un mouvement qui s’interrompt ainsi périt entièrement?» DeBroglie, Questions bibliques, Paris, 1897, p. 368. D’autrepart il est certain que tout effet est de même nature que sa^cause. Comment donc des prophéties interprétées partoute une nation dans le sens d’un Messie temporel etglorieux, auraient-elles suscité dans cette même nationun Messie spirituel et souffrant? La contradiction seraitd’autant plus flagrante que, pendant les quatre centsans qui ont précédé Jésus-Christ, à défaut de prophétiesnouvelles, il n’y avait plus à fermenter dans les espritsque les anciennes prophéties entendues dans un sensgrossier et étroit qui n’a rien de commun avec ce que

le Sauveur est venu réaliser. — c) Quant à l’idée queNotre-Seigneur aurait lui-même adapté sa vie aux donnéesdes prophéties, afin de se faire passer pour leMessie, on ne peut s’y arrêter sérieusement. «Il n’estpas au pouvoir d’un homme de choisir son lieu denaissance, de naître à Bethléhem plutôt qu’à Rome ouailleurs, de naître de la race d’Abraham, de la tribu deJuda, de la maison de David, de paraître au tempsmarqué par Jacob, par Daniel et par Aggée, de fairedes miracles, d’obtenir la foi d’une grande partie dugenre humain, de se faire adorer dans le monde, deressusciter après sa mort, d’être glorifié comme le Dieutout-puissant et éternel; et cela, parce que c’était prédit!» Freppel, Saint Justin, Paris, 1869, p. 390. — d) Il nereste donc qu’une explication possible de l’accord quiexiste entre les prophéties et la vie du Sauveur; c’estque Dieu, qui a inspiré les prophètes, a réglé l’existencede Jésus-Christ de telle façon qu’elle répondît exactementau programme qu’il en avait tracé à l’avance. Ilsuit de là en toute rigueur que Jésus-Christ est l’envoyéde Dieu, le Messie promis. — e) En rigoureuse exégèse,on peut tirer des prophéties une conclusion plus décisiveencore. Plusieurs d’entre elles en effet attribuentla divinité au Messie promis. Il est écrit au Psaume ii,7: «Jéhovah m’a dit: Tu es mon Fils, je t’engendreaujourd’hui.» Il ne s’agit pas là d’un fils adopté, commequand il est question de Salomon, II Reg., vii, 14, maisd’un fils engendré, yâlad, par conséquent d’un filsde la même nature que celui qui l’engendre. Le Psaumexlv (xliv), 4, 8, célèbre un héros qui est le Messieet auquel il donne le nom de Dieu. Isaie, vii, 14, appellele Fils de la Vierge Emmanuel, «Dieu avec nous,» et ailleurs, IX, 6, plus directement encore, lui attribue lenom de Dieu. Des différentes descriptions de la Sagesse,en laquelle on reconnaît le Messie futur, on peut aussiconclure que ce Messie aura tous les caractères de ladivinilé. Prov., viii, 22-31; Sap., vii, 24-26; Eccli., xxiv,1-31, etc. Cf. Scheeben, Handbuch der kalholischenDogmatik, Fribourg, 1875, t. ii, p. 522. C’est du reste enfaisant appel aux textes prophétiques de l’Ancien Testamentque l’auteur de l’Épitre aux Hébreux, I, 3-13, établitla divinité du Sauveur. Suivant la coutume deson temps, il allègue même en faveur de cette thèsecertains textes qui n’ont pas ce sens littéral, mais quin’en avaient pas moins force probante pour les Juifsauxquels il s’adressait. Il va de soi que ces textes se rapportenttoujours en quelque manière à Jésus-Christ, autrementle Saint-Esprit n’en aurait pas inspiré l’application.— f) Il ne paraît pas cependant que Notre-Seigneurait voulu établir sa divinité personnelle parles textes prophétiques. Ce qu’il veut prouver par lesÉcritures, c’est la divinité de sa mission. S’il renvoieles Juifs aux écrits sacrés et à Moïse, Joa., v, 39, 46,c’est uniquement pour démontrer qu’il est venu «aunom du Père», Joa., v, 43, qu’il est son envoyé authentique,réalisant dans sa personne et dans sa vie toutce qui a été annoncé par les anciens prophètes. La conclusionprincipale et inattaquable à tirer de l’accomplissementdes prophéties est donc celle-ci: Jésus-Christ estle Messie envoyé de Dieu.

2o Prophéties faites par Jésus-Christ.

Notre-Seigneur

a annoncé lui-même à l’avance et avec uneextrême précision, un certain nombre de faits qu’on nepouvait prévoir humainement et qui se sont accomplisde point en point. Ces faits sont les suivants: — 1. Sapassion, avec ses principales circonstances: la part qu’yprendra le sanhédrin, Matth., xvi, 21; xvii, 12; xx, 18;Marc, viii, 31; x, 33; Luc, ix, 22; la trahison de Judas,Joa., vi, 71; xiii, 26; Matth., xxvi, 21-25; Marc, xiv,18-21; Luc, xxii, 21, 23; l’abandon par les Apôtres,Matth., xxvi, 31; Marc, xiv, 27; Joa., xvi, 32; le reniementde Pierre, Matth., xxvi, 33-35; Marc, xiv, 29-31;Luc, xxii, 34; Joa., xiii, 38; la comparution devant

les gentils, Matth.; xx, 19; Marc, x, 33; Luc, ix,44; xviii, 32; les outrages, les tourments et particulièrementla flagellation, Matth., xx, 19; Marc, x,34; Luc, xvil, 25; xviii, 32; enfin la mort, et la mortsur la croix, Matth., xvi, 21; xvii, 22; xx, 19; xxi, 39;Marc, viii, 31; ix, 31; x, 34; Luc, ix, 22; xviii, 33,que le Sauveur appelle une «élévation» comme celledu serpent d’airain. Joa., iii, 14; viii, 28; xii, 32. Cf. P.Schwartzkopff, Die Weissagungen Jesu Christi von seinemTode, Goettingue, 1895. — 2. Sa résurrection. Dèsle début de sa vie publique, Notre-Seigneur se compareà un temple que l’on détruira, mais qu’il relèvera entrois jours. Joa., ii, 19. Il annonce que, comme Jonasqui fut trois jours et trois nuits dans le ventre dumonstre, il sera trois jours et trois nuits dans le seinde la terre, Matth., xii, 40; xvi, 4; Luc, xi, 29, 30, etqu’ensuite il reparaîtra ressuscité et vivant. L’expressiontrois jours et trois nuits n’implique nullement unespace de temps de trois fois vingt-quatre heures. Selon lamanière habituelle de compter des Juifs, elle marqueseulement trois journées, dont la première et la troisièmepeuvent n’être représentées que par quelquesheures. Cf. Esth., iv, 16; v, 1; Tob., iii, 10, 12; I Reg.,xxx, 12-13. Voir F. Baringius, De tribus diebus et tribusnoctibus comnwrat. Christi m cord. terne, dans leThésaurus de Hase et Iken, p. 220-227. Dans les passagesoù il prédit sa passion, le Sauveur ajoute qu’il ressusciterale troisième jour. Matth., xvi, 21; xvii, 22; xx, 19;Marc, viii, 31; ix, 30; x, 34; Luc, ix, 22; xviti, 33.Cette prédiction était si connue que les princes desprêtres prirent des mesures en conséquence. Matth.,xxvil, 63. — 3. Son ascension. Le Sauveur y fait allusiondeux fois. Joa., vi, 63; vii, 34. — 4. La venue duSaint-Esprit. Notre-Seigneur l’annonce à ses Apôtres, Joa.,xiv, 16, 26, et leur recommande, après sa résurrection, dene pas quitter la ville avant qu’il ait été envoyé. Luc, xxiv,49. — 5. Les destinées de l’Église, telles qu’elles sontdécrites dans les paraboles sur le «royaume descieux»,voir plus haut, col. 1494, et spécialement la promesse queles puissances de l’enfer ne prévaudront pas contre elle,Matth., xvi, 18, toutes choses que l’histoire du monde.n’acessé de vérifier jusqu’à ce jour. —6. La ruine de Jérusalem,Le Sauveur décrit l’événement près de quarante ansà l’avance, avec des détails qu’on ne pouvait humainementprévoir et qui se vérifièrent: l’apparition des fauxmessies, Matth., xxiv, 4, 5; Marc, xiii, 5, 6; Luc, xxi,8; cf. Imposteur, col. 851; Josèphe, Ant. jud., XX, v, 1;vin, 6, 10; Bell. jud., II, xiii, 5; IV, iii, 14; VI, v, 2;les bruits de guerre et de révoltes, Matth., xxiv, 6;Marc, xiii, 7; Luc, xxi, 9; cf. Josèphe, Ant. jud., XVIII,ix, 1; XX, iii, 3; v, 3, 4; Bell. jud., II, xii, 1, 2; lespestes, les famines, les tremblements de terre, Matth.,xxiv, 7; Marc, xiii, 8; Luc, xxi, 11; cf. Famine, t. ii,col. 2175; Josèphe, Ant. jud., III, xv, 3; XX, ii, 5; v, 2;Bell. jud., VI, v, 3; Tacite, Annal., xiv, 27; xv, 22; lespersécutions infligées aux Apôtres, Matth., xxiv, 9;Marc, xiii, 9; Luc, xxi, 12; cf. Act., iv, 3; v, 18, 27, 41;vi, 12; vii, 58; viii, 1; ix, 2; xii, l, 2; xiii, 50, etc.; la prédicationde l’Évangile dans le monde entier, Matth., xxiv,14; Marc, xiii, 10; avant la ruine de Jérusalem, lesApôtres se dispersèrent en effet à travers le monde et yprêchèrent Jésus-Christ; les Actes mentionnent spécialementles missions de saint Paul en Asie Mineure et enGrèce, et enfin sa prédication à Rome, Act., xxviii, 30,31; l’abomination de la désolation dans le lieu saint,Matth., xxiv, 15; Marc, xiii, 14, c’est-à-dire la présenceautour de la ville sainte, Luc, xxi, 20, et dansJérusalem même" des aigles idolâtriques de l’armée romaine,ce qui eut lieu quand Cestius Gallus, à la têted’une armée de vingt-cinq à trente mille hommes, occupaà Jérusalem le quartier de Bézétha, puis hésita àdonner l’assaut et se retira, Josèphe, Bell. jud., II, xix,4-6; voir Abomination de la désolation, t. i, col. 70

73; la fuite des chrétiens vers les montagnes, avec laplus grande promptitude possible, Matth., xxiv, 16-20;Marc, xiii, 14-18; Luc, xvi, 21-23; Josèphe, Bell. jud.,II, XX, 1, raconte qu’après la retraite de Cestius Gallus,on s’attendit en Judée à un puissant retour offensif desRomains, et qu’alors «un grand nombre de Juifs demarque s’enfuirent de la ville comme on se sauve à lanage d’un navire sur le point de sombrer»; enfin,toutes les horreurs du siège de Jérusalem, les discordesciviles, les assauts, la famine, la prise et la ruine de lacité. Matth., xxiv, 21; Marc, xui. 19; Luc, xxi, 24; cf.Josèphe, Bell. jud., IV, ix-VI, ix; F. de Saulcy, Lesderniers jours de Jérusalem, Paris, 1866, p. 200-420.

— 7. La ruine du Temple. Le Sauveur prédit qu’il n’enresterait pas pierre sur pierre. Matth., xxiv, 2; Marc,mi, 2; Luc, xxi, 6. Josèphe, Bell. jud., VII, i, 1, ditqu’après la prise de Jérusalem, Titus ordonna de détruirede fond en comble la cité et le Temple, et quetout fut si bien nivelé qu’on aurait eu peine à croirequ’il avait existé à cet emplacement une ville habitée.Plus tard, la tentative de Julien l’apostat pour releverle Temple ne servit qu’à procurer l’accomplissementplus complet de la prophétie du Sauveur. Cf. AmmienMarcellin, Rer. gest., xxiii, 1; Socrate, Hist. eccl., iii,20, t. lxvii, col. 429; Sozomène, Hist. eccl., v, 22, t.lxvii, col. 1284; S. Jean Chrysoslome, Adv. Judœos, v,11, t. xlviii, col. 901; Théodoret, H. E., iii, 15, t. lxxxii,col. 1112. — Ces prophéties du Sauveur, si complètementjustifiées par les faits, seraient une preuve de sadivinité, si l’on pouvait démontrer rigoureusementqu’il ne les a pas faites par l’inspiration d’un autre,mais en vertu de la connaissance personnelle qu’il possédaitde l’avenir et de sa propre puissance pour régirles événements. Les prophètes ne parlaient pas en leurnom; ils faisaient précéder leurs oracles de cet avertissement:Voici ce que dit le Seigneur. Jésus-Christ, aucontraire, parle toujours sans faire appel à aucune inspirationqui soit étrangère à sa personne. Néanmoins, siune preuve rigoureuse de sa divinité ne peut être tiréede ses prophéties, quand on les considère isolément, il estune autre conséquence qui s’impose logiquement: celuiqui a fait de telles prophéties était nécessairement uninspiré de Dieu, un envoyé de Dieu, un ami de Dieu,quelqu’un dont Dieu entendait expressément autoriserles paroles et les actes. Cf. Lescœur, Jésus-Christ, p.302-328; Hettinger, Apologie du christianisme, trad.franc, Paris, 2e édit., t. ii, p. 305-360.

II. l’affirmation du sauveur. — Cette affirmation estcomme la clef de voûte de la question. À vrai dire, eneffet, on ne peut être assuré que Dieu est là présent dansune nature humaine, que s’il dit lui-même: Je suis Dieu,et si tout, dans son caractère, dans ses actes, dans lesdifférentes circonstances de son apparition, atteste quecelui qui parle ainsi ne trompe pas. Or les prophétiesaccomplies par Jésus-Christ, celles qu’il a faites lui-mêmeet qui ont été véritiées par les événements, nousproment déjà tout au moins que, jusqu’à la fin de sa vie,Jésus-Christ a eu Dieu même pour inspirateur, pourami, pour garant, et que par conséquent il disait lavérité, surtout sur ce qui pouvait intéresser plus particulièrementla cause et l’honneur de Dieu. Or voici ceque Jésus-Christ a laissé dire ou a dit de sa proprepersonne.

1o Les appellations.

1. Il s’est donné formellement

comme le Messie, Joa., iv, 26, et s’est appliqué à lui-mêmedes passages de l’Écriture concernant le Messie,Luc, iv, 18-21, spécialement dans une circonstance oùJean-Baptiste lui envoyait demander solennellement s’ilétait «celui qui doit venir». Matth., xi, 4-6; Luc, vii,22, 23. — 2. Il s’est laissé attribuer, sans jamais protester,des appellations qui, dans la pensée de tous, désignaientle Messie: «roi d’Israël,» Luc, xix, 38; Joa.,J, 49; xii, 13; xviii, 37; «fils de David,» Matth., îx.

27; xv, 22; xx, 30, 31; xxi, 9, 15; Marc, x, 47. 48; xi,10; Luc, xviii, 38, 39; « «elui qui vient au nom du Seigneur.» Matth., xxi, 9; Marc, xi, 10; Luc, xix, 38;Joa., xii, 13. Voir plus haut, col. 1425. Lui-même sedonne très fréquemment le titre de «Fils de l’homme», qui, tout en le caractérisant comme l’homme parexcellence, est encore un des noms attribués au Messie.Voir Fils de l’homme, t. ii, col. 2258-2260. — 3. Il donneà entendre qu’il est plus grand qu’Abraham, Joa., viii,53, 56, que Moise, Matth., xix, 8-9, que Salomon et Jonas.Matth., xii, 41, 42; Luc, xi, 31, 32. — 4. Il se dit habituellementl’envoyé du Père, Joa., v, 36, 37, 43; vi, 39,40, 58; viii, 16, 18, etc.; il appelle Dieu son Père, Luc,h, 49; Joa., ii, 16; v, 17, 43; vi, 32, 40, 66; viii, 27, etc.;il approuve qu’on lui donne les noms de Maître et deSeigneur. Joa., xiii, 13, 14. Quand on observe que Dieuseul peut remettre les péchés, il les remet, Marc, ii,7, 10; Luc, v, 21, 24; vii, 48, 49; il s’affirme comme lemaître du Sabbat, Matth., xii, 8; Marc, ii, 28; Luc, vi,5, et fait remarquer à Pierre qu’en sa qualité de «Fils» il n’aurait pas à pær l’impôt du Temple. Matth., xvii,24, 25. — 5. Dès le début de son ministère public, ilse laisse décerner par Nathanæl le nom de Fils deDieu. Joa., i, 49. Les Apôtres, Matth., xiv, 33, et Marlhe,Joa., ’xi, 27, le lui attribuent aussi. Par deux fois, il approuvePierre qui l’appelle «le Christ, Fils de Dieu»,Joa., vi, 70, «le Christ, Fils du Dieu vivant.» Matth.,xvi, 16; Marc, viii, 29; Luc, ix, 20. — 6. Enfin, dansquatre circonstances mémorables, il se proclame lui-mêmeFils de Dieu. À l’aveugle-né qu’il a guéri et quilui demande quel est le Fils de Dieu, Jésus répond: «Tule vois, c’est celui qui te parle.» Joa., ix, 35-37. AuxJuifs qui l’interpellent dans le Temple en lui disant: «Si tu es le Christ, dis-le-nous clairement,» il répliqueen invoquant le témoignage de son Père, dont ildit: «Moi et le Père nous ne sommes qu’un,» et ilse plaint qu’on l’accuse de blasphème parce qu’il a dit: «Je suis le Fils de Dieu.» Joa., x, 24, 30, 36. La nuit quiprécède sa mort, Jésus-Christ comparait deux fois devantle sanhédrin rassemblé, qui représente la suprêmeautorité religieuse de la nation. Une première fois, legrand-prêtre Caïphe se lève et lui dit: «Je t’adjurepar le Dieu vivant de nous dire si tu es le Christ, leFils de Dieu.» Et Jésus repond: «Vous l’avez dit, jele suis.» Et pour qu’on ne s’y trompe pas, en prenantdans un sens incomplet le nom de «Fils de Dieu»,il avertit ses juges qu’ils le verront assis à la droite duDieu tout-puissant et venant sur les nuées du ciel.Matth., xxvi, 63-64; Marc, xiv, 61-62. Quand les membresde ce même sanhédrin lui demandent de nouveau: «Tu es donc le Fils de Dieu?» il répond encore: «Vous le dites, je le suis.» Luc, xxii, 70. Cette doubledéclaration a d’autant plus d’importance qu’elle estprovoquée par l’autorité compétente et qu’elle entraîneune sentence de mort. — 7. Notre-Seigneur, qui a ainsiparlé devant le sanhédrin, ne répond pas quand c’estSatan, Matth., iv, 3, 6; Luc, iv, 3, 9, ou quand cesont des moqueurs, Matth., xxvii, 40, qui lui demandentde prouver par des miracles inutiles qu’il est le Filsde Dieu. Il n’a pas à renseigner le démon sur ce point,voir Démon, t. ii, col. 1372-1373, et aux Juifs, il ménageun miracle plus grand que sa descente de lacroix, sa résurrection. — 8. Notre-Seigneur se laissedonc donner et prend lui-même le nom de Fils de Dieudans son acception totale et absolue. Voir Fils de Dieu,"Y ii, col. 2254. Si on l’avait mal compris, il aurait corrigéla fausse interprétation, comme firent plus tard Paul etBarnabe quand ils furent pris pour des dieux. Act., xiv,12-15. Si lui-même avait faussé ou exagéré la vérité,Dieu ne lui eût accordé ni le don de prophétie, ni celuides miracles.

2o Les conséquences.

1. Il suit de là qu’il est impossible

de restreindre sa filiation divine au sens d’une

simple filiation adoptive, comme celle qui convient auxserviteurs de Dieu, à des degrés plus ou moins élevés.Voir Fils de Dieu, t. ii, col. 2257. Les textes s’opposentà cette interprétation. Quand, par exemple, Pierre déclareau nom des Apôtres ce qu’il reconnaît en Jésus, ._ il prétend bien le mettre au-dessus de Jean-Baptiste,d’Élie, de Jérémie et des prophètes. Ainsi il l’appellele Christ, et non pas seulement un fils de Dieu, commepouvaient l’être ceux qu’on vient de nommer, mais «le Fils du Dieu vivant», 6 uiôç toO ©eoû. En approuvantsa réponse, le Sauveur évoque le souvenir, non seulementdu Père qui est dans les cieux, mais de son Pèreà lui, 6 it*-ri)p (iou. Puis, il établit une sorte de parallèleentre la situation qu’il fait à Pierre et celle que Pierre luia reconnue: Pierre aura dans l’Église un caractère unique,qui le mettra hors de pair, de même que Jésus-Christ aune filiation supérieure à toutes les filiations adoptives.Matth., xvi, 14-18. Les termes par lesquels est annoncéela naissance du Sauveur ne peuvent pas davantage serestreindre à une filiation adoptive. L’ange déclare àMarie que l’enfant qu’elle mettra au monde sera «Filsdu Très-Haut» et «Fils de Dieu». Luc., i, 32, 35. Sices termes étaient isolés, on pourrait se demander s’ilne faut pas les entendre d’une filiation par adoption.Mais le contexte indique en quel sens autrement précisl’enfant sera Fils de Dieu. Il n’aura point de père sur laterre. Avis est donné à Marie que cette naissance seral’œuvre du Saint-Esprit, du Très-Haut, Luc, 1, 35, et àJoseph que l’enfant à naître de Marie est du Saint-Esprit.Matth., i, 20. L’adoption divine suppose un être déjàexistant, qu’elle élève à un degré de particulière et surnaturelleunion avec Dieu. Mais ce que porte Marie estYevv/)6èv èx IIvsû|jiaToç êcflov, «engendré par le Saint-Esprit.» Matth., i, 20. Or engendrer marque une filiationnaturelle et non une filiation adoptive. Saint Jean, x,24, 30, rapporte les paroles par lesquelles le Sauveurexplique lui-même cette filiation: il est «Fils de Dieu» en ce sens que le Père et lui ne font qu’un. Si l’adoptionétablit des rapports d’intimité entre l’adoptant etl’adopté, elle n’établit pas l’unité entre l’un et l’autre.C’est donc une filiation naturelle que Notre-Seigneurrevendique pour lui-même; c’est cette filiation quecomprennent les Juifs et les membres du sanhédrin,quand ils condamnent à mort Notre-Seigneur parce qu’ils’est fait Fils de Dieu. S’il ne se fût agi que d’une filiationadoptive, le Sauveur s’en serait expliqué nettement,il eût détrompé ses juges, et ceux-ci n’eussent pu luitenir rigueur de s’attribuer une prérogative que chaquepieux Israélite pouvait revendiquer pour lui-même.Ceux qui refusent d’admettre la divinité de Jésus-Christs’efforcent d’entendre dans ce dernier sens le nom deFils de Dieu que lui donne l’Évangile. Cf. Soloweyczyk,La Bible, le Talmud et l’Évangile, p. 179-181. — 2. Il nesaurait être question d’une simple filiation d’ordre intellectuel,provenant de la connaissance de Dieu. Cette connaissanceserait, dit-on, «la sphère dé la filiation divine,» seul genre de filiation auquel aurait prétendu le Sauveurquand il dit: «Personne ne connaît le Fils, si ce n’estle Père, et personne ne connaît le Père, si ce n’est leFils, et celui à qui il voudra bien le révéler.» Matth., XI,27; Luc, x, 22. Cf. Harnack, Dos Wesen des Christenthums,p. 81. Qui ne voit que ce texte, même si on l’isoledes autres textes synoptiques et de tous ceux de saintJean, ne se prête nullement à une semblable restriction?La teneur des termes y est telle que le Père est placédans les mêmes rapports vis-à-vis du Fils, que le Filsvis-à-vis du Père. Si le Fils n’a qu’une filiation intellectuelleet par conséquent une divinité très improprementdite, la divinité et la paternité du Père ne sont pas d’unautre ordre, et dès lors c’est Dieu même qui disparaît./II. les miracles. — 1° Leur variété. — Notre-Seigneura opéré un très grand nombre de miracles. Aplusieurs reprises, les Évangélistes signalent, sans entrer

dans le détail, des guérisons d’une fouie de malades etde possédés. Matth., iv, 23; viii, 16, 17; xii, 15; xv, 30,31; Marc, i, 32-34; iii, 10-12; Luc, iv, 40, 41; v, 17;vi, 18-19; ix, 11. Saint Jean, XX, 30, termine son évangileen disant que Jésus-Christ «a fait beaucoup d’autresmiracles» qui ne sont pas consignés dans son livre,et il ajoute hyperboliquement que le monde ne contiendraitpas les écrits que l’on rédigerait au sujet de cequ’il a fait. Joa., xxi, 25. Le caractère miraculeux, surhumainet divin de ces actes n’est pas contestable. S’ilen est quelques-uns qu’on a pu essayer, sans succès d’ailleurs,d’expliquer naturellement, la plupart ne sontmême pas susceptibles d’une pareille tentative, et suffisentau but que se proposaient les Évangélistes en lesracontant. Voir Miracle. Les miracles du Sauveur sontde différentes sortes. On peut distinguer: a) Les miraclessur les choses de la nature: ils sont au nombre dedix: 1° le changement de l’eau en vin à Cana, Joa., ii,1-11; 2° et 3° les deux pêches miraculeuses, Luc, v, 1-11;Joa., xxi, 1-13; 4° la tempête apaisée, Matth.,-vm, 23-27;Marc, iv, 35-40; Luc, viii, 22-25; 5° la marche sur leseaux, Matth., xiv, 25-31; Marc, vi, 48; Joa., vi, 19; 6° ledidrachme trouvé dans la bouche du poisson, Matth., x,

23-26; 7° le figuier desséché, Matth., xxi, 18, 19; Marc,xi, 12, 14-20; cf> J. C. Goesgenius, De ficu maledicta,dans le Thésaurus de Hase et Iken, t. ii, p. 417-424; 8° et9° les deux multiplications des pains, Matth., xiv, 1321; xv, 32-39; Marc, vi, 30-44; viii, 1-10; Luc, ix, 1017; Joa., vi, 1-13; 10° la transfiguration. Matth., xvii, 113; Marc, ix, 1-12; Luc, ix, 28-36; voir Transfiguration.— b) Les expulsions des démons du corps despossédés. Voir Démoniaques, t. ii, col. 1375. — c) Lesguérisons de toutes sortes de maux. Voir Guérison, col.360-361. — d) Les résurrections du fils de la veuve deNaim, Luc, vii, 11-17; de la fille de Jaïre, Matth., ix,18-26; Marc, v, 22-43; Luc, viii, 41-56; de Lazare, Joa.,xi, 1-45, et la propre résurrection du Sauveur lui-même.Matth., xxviii, 6. — e) Il convient aussi de tenir comptedes miracles qui ont été opérés, sinon par Jésus-Christpersonnellement, du moins à cause de lui, pour accréditersa mission divine: les apparitions des anges à différentesépoques de sa vie, Matth., i, 20; ii, 13, 19; iv,11; xxviii, 2, 5; Marc, i, 13; Luc, I, 26-38; ii, 9, 10, 13,15; xxii, 43; xxiv, 23; Joa., xx, 12; l’étoile des Mages,Matth., ii, 2; la voix du Père à son baptême, Matth., iii,17; Marc, i, 11; Luc, iii, 22, à sa transfiguration, Matth.,xvii, 5; Marc, ix, 6; Luc., ’ix, 35, et dans le Temple,Joa., xii, 28; l’apparition de l’Esprit-Saint sous formede colombe, Matth., iii, 16; Marc, i, 10; Luc, iii, 22;Joa., i, 32; l’apparition de Moïse et d’Élie, Matth., xvii,3; Marc, IX, 3; Luc, IX, 30; les ténèbres pendant quele Sauveur était en croix, Matth., xxvii, 45; Marc, xv,33; Luc, xxiii, 44-45, cf. S. Kissling, De labore solis,laborante sole justitise, dans le Thésaurus de Hase etIken, t. ii, p. 364-380; le déchirement du voile du Temple,Matth., xxvii, 51; Marc, xv, 38; Luc, xxiii, 45; letremblement de terre et la fente des rochers, Matth.,xxvii, 51; la résurrection et l’apparition de plusieursmorts. Matth., xxvii, 52, 53. Cf. do Broglie, Problèmeset conclusions de l’histoire des religions, Paris, 1885,p. 310351.

Leur signification.

a) On pourrait remarquer

d’abord que Notre-Seigneur opère ses miracles par sapropre initiative, en vertu d’une puissance qui résideen lui. Il n’a pas besoin de prier longuement commeÉlie, III Reg., xvii, 19-22, ou comme Elisée, IV Reg., iv,33-35, pour ressusciter un mort. Ce n’est pas au nomd’un autre que, comme les Apôtres, Act., iii, 6, il opèredes guérisons. Agissant de cette manière, Notre-Seigneurprouve vraiment qu’il est Dieu, puisqu’il accomplit parlui-même des actes dont Dieu seul a la puissance. De cequ’avant de ressusciter Lazare, il remercie son Père del’avoir exaucé, comme il l’exauce toujours, Joa., xi, 41

42, il ne suit nullement qu’il ne soit vis-à-vis de Dieuque dans les termes de créature à Créateur, comme parexemple, Moïse, qui opère aussi de grandes merveillespar l’ordre de Dieu. Exod., vil, 1-6. Mais, comme Verbeincarné, il rapporte à son Père et sa mission et les miracles par lesquels il la prouve. Néanmoins, cette autonomie thaumaturgique n’est pas toujours évidente; iln’y a d’ailleurs aucune nécessité à l’admettre pour arriver sûrement à démontrer la divinité du Sauveur. — b)La principale, signification des miracles, c’est la preuvequ’ils apportent à la parole de Jésus-Christ affirmant sadivinité. C’est pour cela qu’ils sont appelés par les Évangélistes <r/)[ieïa, signa, «témoignages.» Tel est en effet l’undes sens principaux du mot grec <r/]jieïov. Thucydide, II,42; Platon, Cratyl., 395; Tint., 71; Respubl., 368; Sophocle, Œdip. Rex, 710, 1059; Electr., 21, etc. Cettesignification apparaît dès le récit du miracle de Cana.Joa., ii, 11. Notre-Seigneur y accomplit le premier deses <jï)HEta. Ceux qui suivent sont, comme celui-ci, donnésen preuve de la mission et de la véracité du Sauveur.Aux envoyés de Jean-Baptiste qui lui demandent qui ilest, il se contente de faire remarquer les miracles qu’ilopère. Matth., xi, 2-6; Luc, vii, 18-23. S’il maudit lesvilles de Corozaïn, de Bethsaide et de Capharnaùm, c’estqu’on n’y a pas tenu compte de ses miracles. Matth., xi,20-24; Luc., x, 13-15. À la vue de ses miracles, les foulesconcluent naturellement à une intervention de Dieu.Matth., ix, 8; Marc, ii, 12; Luc, v, 26; vii, 16; Matth.,ix, 33; Joa., vi, 14; Luc, ix, 44; Matth., xiv, 33, etc.Le centurion, témoin des merveilles qui se passent auCalvaire, tire lui-même la vraie conclusion: «C'étaitréellement le Fils de Dieu!» Matth., xxvii, 54; Marc,xv, 39; Luc, xxiii, 47. — C’est surtout saint Jean quifait des miracles la preuve de la divinité du Sauveur, luiqui termine son Évangile en disant: «Ceux-ci ont étémis par écrit afin que vous croyiez que Jésus est le ChristFils de Dieu.» Joa., xx, 31. En dehors des deux miracles qui figurent l’Eucharistie, celui de Cana et la multiplication des pains, il n’en raconte que trois autres,mais avec grand détail, pour que le récit ait toute sa valeur probante. Il les choisit parmi ceux qui ont été opérés sous les yeux mêmes des Juifs, la guérison du paralytique à la piscine Probatique, Joa., v, 1-47, celle del’aveugle-né, à sa sortie du Temple, Joa., ix, 1-41, et enfinla résurrection de Lazare à Béthanie, en présence d’ungrand nombre de Juifs. Joa., xi, 1-46. Il semble queNotre-Seigneur veuille faire allusion à ces trois miraclessi importants, quand il dit à ses Apôtres dans le discoursaprès la Cène: «Je suis la voie, la vérité et la vie,» Joa., xiv, 6; voie, il fait marcher le paralytique; vérité,il éclaire l’aveugle de naissance; vie, il ressuscite le mort.Saint Jean rapporte ensuite les discussions dont cesmiracles ont été l’occasion, et les conclusions que ledivin Maître en a tirées. Ainsi, en guérissant le paralytique et en lui commandant d’emporter son grabat lejour du sabbat, Notre-Seigneur montre qu’il est le maître du sabbat. Comme ensuite il compare son activité àcelle de son Père, les Juifs comprennent parfaitement-qu’il dit que «Dieu est son Père, se faisant ainsi l'égalde Dieu». Joa., v, 18. Le Sauveur en appelle alors formellement à ses miracles pour prouver sa mission: «Les œuvres que mon Père m’a données à accomplir,les œuvres mêmes que je fais rendent de moi ce témoignage que c’est le Père qui m’a envoyé.» Joa., v, 36.Du reste, les Juifs, imbus de tous leurs préjugés, n'étaientpas faciles à satisfaire sous ce rapport, puisqu'à la suitede la multiplication des pains, alors que le Sauveur seprésente comme l’envoyé du Père, ils en sont encore àlui dire: «Quel miracle fais-tu, pour qu’en le voyantnous croyions en toi? Qu’opères-tu?» Joa., vi, 30. —Quand il vint à Jérusalem pour la fête des Tabernacles,le peuple disait: «Le Christ, quand il viendra, fera-t-ilplus de miracles que celui-ci n’en fait?» Joa., vii, 31.


Le Sauveur opéra alors, encore un jour de sabbat, laguérison de l’aveugle-né, qui fut l’objet d’une enquêtesi minutieuse de la part du sanhédrin. Cf. Vigouroux,Les Livres Saints et la critique rationaliste, 5e édit, 1901,1. 1, p. 76-84. L’aveugle guéri raisonnait fort juste quand ildisait: «Si cet homme ne venait pas de Dieu, il n’auraitrien pu faire.» Joa., IX, 33. On disait ensuite dans latoule: «Est-ce le démon qui peut ouvrir les yeux desaveugles?» Joa., x, 21. À la fête de la Dédicace, on luidemanda de nouveau de prouver sa mission. Il répondit: «Les œuvres que je fais au nom de mon Père rendenttémoignage de moi.» Les Juifs voulant le lapider parceque lui, homme, voulait se faire Dieu, il ajouta: «Sivous ne voulez pas me croire, croyez à mes œuvres,afin de reconnaître et de croire que le Père est en moiet moi dans le Père.» Joa., x, 25, 33, 38. Au bord duJourdain, où il se retira, la foule vint à lui en remarquant que «Jean n’avait fait aucun miracle». Joa., x,41. — La résurrection de Lazare acheva la démonstration que le Sauveur voulait fournir aux Juifs. «Pèredit-il avant d’opérer le miracle, je vous rends grâcesde m’avoir exaucé. Pour moi, je savais bien que vousm’exaucez toujours; mais à cause du peuple qui est là,j’ai parlé, afin qu’ils croient que vous m’avez envoyé.» Joa., xi, 42. Il s’appliqua ensuite à attirer l’attentionde ses Apôtres sur la valeur probante de ses miracles. «Le Père qui réside en moi est l’auteur de mes œuvres.Ne croyez-vous pas que je suis dans le Père et que lel'ère est en moi? Croyez-le du moins à cause des œuvreselles-mêmes.» Joa., xiv, 10-12. «Si je n’avais pas faitau milieu d’eux des œuvres qu’aucun autre n’a faites, ilsne seraient point coupables.» Joa., xv, 24. — Ainsil’intention du Sauveur est manifeste: ses miracles sontavant tout des arff.f.%, des preuves, non toujours directement de sa divinité, mais de sa mission et de lavérité de sa parole. Cf. Curci, Lezioni sopra i qualtroEvangeli, t. ii, p. 299. Or cette parole, dont il veut imposer la créance, c’est celle-ci: Je suis l’envoyé du Père,je suis le Fils de Dieu. Si cette parole n'était pas l’expression d’une vérité absolue, Dieu ne l’aurait pas accréditéejusqu'à la fin, en maintenant à celui qui la répétait lepouvoir d’opérer les plus éclatants miracles.Les prophéties d’une part, .les miracles de l’autre, nous apparaissent dès lors, comme les deux solides et puissants contreforts sur lesquels s’appuie l’affirmation de JésusChrist, se présentant aux hommes comme Fils de Dieu.— c) Les miracles servent encore de preuves à des vérités particulières. Jésus-Christ, pour faire voir qu’il a lepouvoir de remettre les péchés, guérit un paralytique.Matth., ix, 6; Marc, ii, 10, 11; Luc, v, 24. Pour montrer qu’il est le maître du sabbat, Matth.. xii, 8, il affected’opérer des guérisons ce jour-là. Parce qu’il est venupour jeter dehors le prince de ce monde, Satan, Joa., XII,31, il commence par le chasser du corps des hommes.Maître de l’espace comme de toute la nature, il guéritles malades à distance. Joa., IV, 50-52; Matth., xv, 28;Marc, vii, 30; Luc, xvii, 14. Venu pour être le «painde vie», Joa., VI, 35, 48, il multiplie les pains au désert.Parce qu’il est «la résurrection et la vie», Joa., xi, 25,il ressuscite des morts. Mais plus que ses autres attributs, c’est surtout sa grande miséricorde, Matth., xv, 32;Marc, vi, 34; viii, 2, sa bonté, sa qualité de rédempteurque Notre-Seigneur tient à démontrer en guérissant tantde malades, en semant tant de miracles sur son passage,en devançant lui-même les prières qu’on pourrait luiadresser, Luc, vil, 13-15; Joa., v, 6; etc., en intervenant même, comme à Cana, dans des conditions où lemiracle, qui n’est point appelé par une extrême nécessité, n’en manifeste que mieux sa gracieuse bonté.Chaque miracle constitue donc la démonstration dequelque attribut du Sauveur. Aussi refuse-t-il de fairedes miracles réclamés par la simple curiosité. Il éconduit les scribes et les pharisiens qui demandent un

III. - 43

miracle dans le ciel. Matth., xii, 38, 39; Luc, xi, 16.En eussent-ils cru davantage? «S’ils n’écoutent ni Moïseni les prophètes, ils ne croiront pas même si quelqu’unressuscite d’entre les morts,» Luc, xvi, 31, dira le Sauveurlui-même. Il refuse de faire tomber le feu du cielsur la ville des Samaritains qui ne veulent pas le recevoir,Luc, ix, 55, 56, parce que ce miracle eût été encontradiction avec sa mission de Sauveur. Enfin il neveut ni appeler à son secours les douze légions d’anges,Matth., xxvi, 53, ni descendre de la croix, Matth., xxvii,40, 42; Marc, xv, 32, parce que ces miracles eussentempêché sa passion et par conséquent la rédemptiondes hommes. Cf. Trench, Noteson the Miracles, Londres,1847; Pauvert, La vie de N.-S. J.-C, t. i, p. 21-98;Vigouroux, Les Livres Saints et la critique rationaliste,1901, t. i, p. 65-84; Vallet, Les miracles de l’Évangile,Paris, 1901.

Leur symbolisme moral.

Outre leur double

signification directe, visant la véracité des paroles duSauveur et la réalité de quelqu’un de ses attributs, lesmiracles, ainsi que l’ont souvent exposé les Pères del’église, apparaissent encore comme des figures symboliquesdes merveilles de l’ordre surnaturel. Ils sontainsi en action ce que les paraboles sont en récit. C’estNotre-Seigneur lui-même qui suggère cet ordre d’idéespar la relation étroite qu’il établit entre les miraclesqu’il opère et certaines institutions de la loi nouvelle.Ainsi, après la première pêche miraculeuse, Jésus dit àquatre de ses disciples: «Je vous ferai pêcheursd’hommes.» Matth., iv, 19; Luc, v, 1-10. À la suite dela seconde pêche, il dit à. Pierre: «Pais mes agneaux,pais mes brebis.» Joa., xxi, 6-17. La pêche miraculeuseest donc une leçon de choses, un symbole de la pêchedes âmes, de l’apostolat. Ce miracle a ainsi une analogieavec la parabole de la seine. Matth., xiii, 47-48. Labarque qui porte les Apôtres sur le lac de Tibériade estassaillie par la tempête ou fatiguée par le vent contraire,pendant que Jésus dort ou qu’il est absent; Jésuss’éveille ou apparaît soudain, et le calme renaît. Marc,IV, 38, 39; vi, 47-50. Cette barque, c’est l’Église sur la meragitée de ce monde: inactif en apparence et invisible,Jésus est toujours là pour veiller sur elle. Les guérisonsdes aveugles figurent l’arrivée des âmes à la lumièrede la foi, par la docilité à la parole du Sauveur et parla grâce du baptême. Après avoir obtenu la vision corporelle,l’aveugle-né se prosterne devant le Fils de Dieuen disant: «Je crois, Seigneur.» Joa., ix, 38. La visionnaturelle est l’image de la vision par la foi. Les maladiesde toute nature, la lèpre, la mort, figurent le péchéavec toutes ses conséquences. Notre-Seigneur guérittous ces maux et même ressuscite les morts pour symboliserles guérisons et les résurrections spirituelles quis’opéreront dans son Église par le sacrement de pénitence.Lui-même signale la relation qui existe dans sapensée entre la guérison du paralytique et la rémissiondes péchés. Luc, v, 20-24. La promesse de l’Eucharistieest trop étroitement liée au miracle de la multiplicationdes pains pour que le symbolisme de ce miracle puisseêtre contesté. La transsubstantiation a sa figure dans lemiracle de Canà. Cf. Wiseman, Mélanges religieux,scient, et littér., p. 84-147.

iv. la résurrection. — La résurrection est le miraclecapital du Sauveur; c’est aussi celui sur lequelles évangélistes ont donné le plus de détails. — 1° Notre-Seigneura prédit plusieurs fois qu’il ressusciterait letroisième jour après sa mort. Matth., xvi, 21; xvii, 9, 22;xx, 19; xxvi, 32; Marc, viii, 31; ix, 8, 9, 30; x, 34;xiv, 28; Luc, ix, 22; xviii, 33. Il indique même sonséjour de trois jours et trois nuits au tombeau commedevant être le signe incontestable de sa mission. Matth.,xii, 39, 40; Luc, xi, 29. — 2° Les Juifs ont parfaitementcompris que Notre-Seigneur avait promis de ressusciterau bout de trois jours. Aussi prirent-ils toutes les précautions commandées par la prudence humaine pours’assurer contre toute intervention des disciples. Matth.,xxvii, 62-66. La mort du Sauveur avait du reste étéconstatée par le centurion, Marc, xv, 44, et le sépulcre,taillé dans le roc vif, Matth., xxvii, 60, ne se prêtait àaucune effraction souterraine. Ces circonstances ruinentles hypothèses qu’on a faites soit d’un enlèvement ducorps, soit d’un retour à la vie de celui qui n’était pasmort quand on l’ensevelit. Cf. Vigouroux, Les LivresSaints et la critique rationaliste, t. ii, p. 111-118, 535541. — 3° La résurrection se produisit au temps marqué.Les gardes placés près du tombeau furent les premierstémoins des phénomènes merveilleux qui l’accompagnèrent.Le sanhédrin les paya libéralement pour direque les Apôtres avaient enlevé le corps. Matth., xxviii,11-15. Si cette accusation eût été fondée, les Apôtresauraient été poursuivis sans délai et les gardes auraientété sévèrement punis pour avoir sommeillé au lieu deveiller. — 4° Les quatre Évangélistes racontent différentesapparitions du Sauveur. On a voulu mettre leursrécits en contradiction les uns avec les autres, supposer,d’après ceux-ci, que les apparitions n’ont eu lieu qu’enGalilée, d’après ceux-là, qu’il ne s’en est produit qu’àJérusalem, etc. Cf. Rohrbach, .Die Berichte uberdievuferstehungJesuChristi, Berlin, 1898. Nous avons vu plushaut, col. 1478, que les quatre récits peuvent se combinersans grande difficulté et sans qu’on ait à tourmenterles textes. Cf. Fleck, Sanctorum quatuor Evange-Uorumconcordia, Rixheim, 1881, p. 173-178. Il est vraiqu’avant sa mort le Sauveur avait dit à ses Apôtresqu’après sa résurrection il les précéderait en Galilée,Matth., xxvi, 32; Marc, xiv, 28, que les saintes femmesreçoivent l’ordre de dire aux disciples et à Pierre queJésus ressuscité les précédera en Galilée, où ils le verront,Matth., xxviii, 7; Marc, xvi, 7, et qu’enfin leSauveur répète personnellement le même avis. Matth.,xxviii, 10. Il est également vrai que saint Matthieu neparle pas des apparitions aux Apôtres à Jérusalem, etque saint Marc ne mentionne les apparitions d’Emmauset du cénacle que dans sa finale contestée par plusieurs.Mais saint Matthieu exclut si peu les apparitions deJérusalem, qu’après avoir rapporté les paroles de l’angeaux saintes femmes: «Voici qu’il vous précède enGalilée, c’est là que vous le verrez,» il raconte immédiatementl’apparition dont Jésus les favorisa sur lechemin. Matth., xxviii, 7, 9. Quand il dit ensuite queles onze disciples s’en allèrent en Galilée, a sur la montagneque Jésus leur avait marquée,» Matth., xxviii, 16,ne suppose-t-il pas une apparition précédente danslaquelle le Sauveur leur a assigné ce rendez-vous particuliersur la montagne? Ces mentions de la Galiléedans les récits de la résurrection s’expliquent d’ellesmêmes.On voit que Jésus n’apparaît à Jérusalem qu’auxApôtres et peut-être à un petit nombre de disciples.il ases raisons four ne se montrer qu’en Galilée à lagrande masse de ses disciples restés à peu près fidèles.Il le leur fait donc dire par les saintes femmes, etPierre est averti nommément, parce qu’en sa qualité dechef déjà reconnu, il aura à transmettre cet avertissementà tous les intéressés. — La distinction entre deuxtraditions différentes sur le fait de la résurrection,l’une galiléenne, représentée par saint Matthieu et parsaint Marc (moins sa finale), qui ne «connaissent» queles apparitions en Galilée, l’autre hiérosolymitaine, représentéepar saint Luc et saint Jean, qui «connaissent» des apparitions à Jérusalem, n’a donc qu’un fondementspécieux. Pour que la conclusion négative fût logique,il faudrait établir au préalable que «connaître» et «raconter» sont une même chose, que saint Matthieu etsaint Marc n’ont rien connu au delà de ce qu’ils ont raconté,et que, parmi tant d’épisodes ayant trait auxmanifestations du divin ressuscité, les Évangélistesétaient obligés soit de tout raconter, soit de s’en tenir

aux mêmes détails, sous peine de voir le silence desuns érigé en contradiction irréductible contre le récitdes autres. En disant formellement qu’«après sa passionil s’est montré à eux par beaucoup de manifestations(xsx(/, ripioi;, «témoignages probants» ), leur apparaissantpendant quarante jours», Act., i, 3, saint Lucmontre assez clairement que les récits évangéliques dela résurrection sont loin d’être complets. Les divergencessignalées dans les récits, apparition d’un angeou de deux anges, assis ou debout dans le tombeau ouhors du tombeau, etc., sont sans importance. N’est-ilpas naturel que dans une scène aussi mouvementée etaussi merveilleuse, les principaux acteurs aient changémaintes fois d’attitude, et que les témoins aient reproduitles faits tels qu’ils se déroulaient sous leurs yeuxau moment où ils en étaient le plus vivement frappés?

— 5° Notre-Seigneur n’apparaît à aucun de ses ennemis.Ils n’en sont pas dignes et il n’a pas à leur imposerune foi dont ils n’ont pas voulu quand ils avaient tousles éléments désirables pour croire. D’ailleurs ceux quine croyaient ni à Moïse ni aux prophètes auraient encoretrouvé des raisons pour conclure contre l’apparitiond’un mort ressuscité. Luc, xvi, 31. — 6° Au lieud’aller au-devant de l’idée d’une résurrection de leurMaître, les Apôtres font les plus grandes difficultéspour l’admettre. En voyant le tombeau vide, Madeleinecroit à un enlèvement du corps, Pierre garde le silence,Jean seul commence à croire; mais c’est des Écritures,et nullement de la promesse du Sauveur, que semblelui venir la pensée de la résurrection. Joa., xx, 6-9.Les saintes femmes se rappellent les paroles deNoire-Seigneur, mais seulement quand les anges ontappelé leur attention sur ce point. Luc, xxiv, 7, 8.Quand elles-mêmes racontent aux Apôtres qu’elles ontvu le Seigneur vivant, on traite leur récit de folie et onne les croit pas. Luc, xxiv, 11.0n ne croit guère davantagele récit des deux disciples d’Emmaus. Marc, xvi,13. Aussi Notre-Seigneur apparaissant aux onze dans lecénacle leur reproche-t-il leur incrédulité et la duretéde leur cœur. Marc, xvi, 14. À son tour, Thomas récusele témoignage de tous les autres et veut voir ettoucher pour croire. Joa., xx, 25. Enfin, en Galilée, ilsemble que, des disciples ne croyaient pas encore à laréalité de la résurrection, malgré toutes les assurancesqu’avaient pu donner les témoins oculaires. Matth.,xxviii, 17. Loin donc de trouver des prédispositions dansl’esprit des Apôtres et des disciples, la croyance à larésurrection s’y est heurtée au contraire à une oppositionqui n’a cédé que devant une irréfutable démonstration.— 7° La résurrection de Jésus-Christ n’a pasété purement idéale. Le Sauveur s’est laissé voir ettoucher, Luc, xxiv, 39, 40; Joa., xx, 20, 27; il a mangésous les yeux de ses Apôtres, Luc, xxiv, 42, 43; il afait les actes d’un vivant, Joa., xxi, 5, 6, 9-13; Luc,xxiv, 15-17, 25-31, tout en gardant à son corps glorieuxle privilège d’échapper aux lois de la matière. Luc,xxiv, 31; Joa., xx, 19, 26; Luc, xxiv, 51. — 8° Le faitde la résurrection n’a pas été discrètement conservédans le souvenir de quelques disciples. Il a été publiédans tout l’univers comme l’événement principal detoute l’histoire évangélique et le fondement même de lafoi chrétienne. Act., i, 22; ii, 24, 31; iii, 15, 26; iv, 2,10, 33; v, 30; x, 40, 41; xiii, 30, 34, 37; xvii, 3, 18, 31;xxvi, 23. Saint Paul dit même que «si le Christ n’estpas ressuscité d’entre les morts, notre foi est vaine».I Cor., xv, 14, 17. — La résurrection, historiquementindéniable, met donc le sceau à la démonstration de ladivinité du Sauveur. Il avait prédit qu’il ressusciterait;il est ressuscité; il a ainsi confirmé la vérité de toutesses paroles: donc il est vraiment le Fils de Dieu. Cf.Hooke, De vera religione, dans le Cursus theol. deMigne, 1853, t. iii, col. 44-64; Sherlock, Les témoinsde la résurrection de J.-C, dans les Démonst. évang.

de Migne, 1843, t. vii, col. 527-594; West, Observationssur l’histoire de la résurrection de J.-C., ibid., t. x,col. 1023-1172; Freppel, Confér. sur la divinité de Jésus-Christ,Paris, 1873, p. 211-232; Lescœur, La scienceet les faits surnaturels contemporains, Paris, 1897,p. 10-23, 94-102.

V. LE CARACTÈRE DE JÉSUS-CHRIST.

Si Jésus-Christest vraiment le Fils de Dieu, on doit trouver dans savie des vertus morales et un héroïsme du bien quirépondent à l’idée qu’on peut se faire d’un Dieu incarné,vivant à la manière des hommes. C’est précisémentce que l’Évangile permet de constater, au delàmême de ce qu’on pouvait attendre.

Sa sainteté.

En lui, d’abord, est la sainteté parfaite,

a) Il peut, sans que personne ne relève le défi,dire dans le Temple: «Qui de vous me convaincra depéché?» Joa., viii, 46. Les démons eux-mêmes sontforcés de reconnaître en lui le «Saint de Dieu». Marc,i, 24; Luc, iv, 34. Sans doute, ses ennemis l’accusentd’être un «samaritain», d’être possédé du démon,Joa., viii, 48, d’être un «pécheur», Joa., ix, 24, unblasphémateur, Matth., xxvi, 65; Marc, xiv, 64, unviolateur du sabbat, Joa., IX, 16, un «malfaiteur»,Joa., XVIII, 30, un perturbateur, Luc, xxill, 5, un «séducteur». Matlh., xxvii, 63. On sent bien que cesont là des calomnies dictées par la haine. Quand Pilatele condamne, c’est en disant: «Je suis innocent du sangde ce juste,» Matth., xxvii, 24, et quand les membres dusanhédrin réclament sa mort, c’est en répétant la sentencequ’ils ont déjà proférée à leur tribunal: «Nous avonsune loi, et d’après cette loi il doit mourir, parce qu’ils’est fait Fils de Dieu.» Joa., xix, 7. Le seul reprocheque ses ennemis les plus acharnés ont pu lui adressera donc été de s’être attribué ce qui lui appartenait, ladivinité. — b) La sainteté du Sauveur n’est pas seulementnégative. Elle se manifeste en lui par les plussublime vertus. C’est d’abord une attention de tous lesinstants pour honorer son Père et procurer sa gloire.Il s’y applique dès son enfance. Luc, ii, 49. Il lui rendvraiment le culte «en esprit et en vérité», Joa., iv, 23,que ce Père réclame. Il se tient vis-à-vis de lui dansune dépendance absolue. Joa., v, 20, 30; vii, 16, 17;xii, 49, 50; xiv, 10. Il fait en tout sa volonté, Joa., v,30, viii, 29; c’est là sa nourriture, Joa., lv, 34, mêmequand cette volonté lui impose les plus durs sacrifices.Matth., xxvi, 42; Joa., xviii, 11. Il honore son Père,Joa., viii, 49; il fait respecter sa maison, Joa., ii, 16; ilpeut lui dire en toute assurance à la fin de sa vie: «Je vous ai glorifié sur la terre,» Joa., xvii, 4, carc’est à lui qu’il a rapporté fidèlement toute sa prédicationet tous ses miracles. Il ne cesse de le prier, Marc,i, 35; vi, 46; Luc, iii, 21; v, 16; vi, 12; ix, 18, 28;xi, 1; xxii, 32, 41; Matth., xxvi, 36, 39, 42, 44, etapprend aux hommes à le prier sous le nom de «Père».Matth., VI, 9. Il lui rend grâces de tontes ses bontés.Matth., xi, 25; xiv, 19; xv, 36; Marc, viii, 6; xiv, 23;Luc, xxii, 17; Joa., vi, 11; xi, 41, 42, etc. En un mot,il l’aime, comme un tel fils peut aimer un tel père.Joa., xiv, 31. Sa grande douleur est de se sentir abandonnéde lui pendant sa passion, Matth., xxvii, 46;Marc, xv, 34; sa grande joie est de pouvoir remettreson âme entre ses mains. Luc, xxiii, 46.

Amour de Jésus pour les hommes.

Il dépasse

tout ce qui s’est jamais vu sur la terre, puisque c’est cetamour qui a poussé le Fils de Dieu à se faire homme,avec le plein agrément du Père. Joa., iii, 16. Pendanttrente ans, le Sauveur manifeste cet amour en prenantpour lui la pauvreté, le travail et les obligations communesaux plus humbles des hommes. Puis, quandl’heure est venue pour lui de se manifester au monde,il se dépense pour l’instruction et le salut de tous, et entoute vérité «passe en faisant le bien et en guérissanttous ceux qui étaient sous l’empire du démon». Act., x,

38. Il a une compassion sans bornes pour toutes lesmisères corporelles; il use de son pouvoir miraculeuxpour guérir tous les malades, délivrer tous les possédéset ressusciter les morts. Les misères morales émeuventson cœur bien davantage encore. Les pauvres pécheurssont l’objet de toutes ses prévenances, tels la Samaritaine,Joa., iv, 7-27, le publicain Matthieu, Matth., ix,9-13, Marie-Madeleine, Luc, vii, 37-47; Zachée, Luc,XIX, 1-10; il a pour eux tous les pardons. Luc, v, 20;Joa., viii, 2-11, etc. Sa tendre compassion à leur égarda son émouvante expression dans la parabole de l’enfantprodigue. Luc, xv, 11-32. Les enfants attirent son cœurpar leur simplicité et leur innocence. Matth., xviii, 1-5;xix, 13-15; Marc, x, 13-16; Luc, xviii, 15. Aux pauvresGaliléens, aussi bien qu’aux docteurs de Jérusalem, ilprodigue ses enseignements. Matth., xi, 5; Luc, vii,22. Ses pires ennemis ne sont pas exclus de sonamour, Matth., xxiii, 37; Luc, xxil, 51, et même pendantqu’ils le crucifient, il implore leur pardon. Luc,xxiii, 34. S’il se montre parfois sévère à l’égard desscribes et des pharisiens, on s’aperçoit que c’est surtoutà cause des préjugés qu’ils sèment dans le peuple pourl’empêcher d’arriver à la vérité et au salut. Matth., xxiii,4, 13, 15. «Venez à moi, vous tous qui peinez et quiêtes surchargés, et je vous referai!» Matth., xi, 28. Telest le sentiment d’amour et de compassion qui pénètretoutes les pages de l’Évangile. Le Sauveur ne s’en tientpas là. Après avoir dit que «la perfection de l’amour,c’est de donner sa vie pour ceux qu’on aime», Joa.,xv, 13, il réalise de son plein gré le vœu de Caiphe: «Il est utile qu’un.homme meure pour le peuple,plutôt que le peuple ne périsse.» Joa., xi, 50. Il vaau-devant des supplices qu’il lui eût été si facile d’éviter,Matth., xxvi, 53, il affronte en silence tous lesoutrages, il se laisse déshonorer devant tout un peuple,condamner comme un malfaiteur; il répand sonsang et donne sa vie pour les hommes. Matth., xxvi,28; Marc, xiv, 24; Luc, xxii, 20. Cf. Dupanloup, Histoirede N.-S. J.-C., Paris, 1870, p. xi-lix. Ce principed’amour pour les hommes s’étendait, dans l’intention- de Notre-Seigneur, non seulement aux choses qui concernentle salut des âmes, mais encore à tout ce quiintéresse le bonheur de la vie présente, pour les sociétéscomme pour les individus. Matth., vi, 33; Luc, xii, 31.3° Jésus modèle de toutes les vertus.

Enfin, considéré

en lui-même, le divin Maître nous apparaît commele type surhumain de toutes les vertus. Rien de heurté,de violent, d’irritant dans sa conduite; tout, au contraire,est mesuré, harmonieux et d’une parfaite dignité. Sajeunesse se passe dans l’obéissance, Luc, ii, 51, et letravail. Matth., xiii, 55. Dans sa vie publique, une largepart est faite à la pénitence, Matth., IV, 2, à la pauvreté,Matth., viii, 20; Luc, viii, 3; ix, 58, à l’humilité, Matth.,xii, 16; Marc, i, 25, 43, iii, 12; Luc, xviii, 19; Joa.,vm, 50; xiii, 4, 5, sans cependant que les habitudes decette vie tranchent trop violemment dans le milieuoù il se trouve. Mr.tth., xi, 18; Luc, vii, 34. Son autoritépersonnelle est irrésistible. Matth., iv, 19; ix, 9.Elle se manifeste par une fermeté sereine et inébranlableen face des contradicteurs et des ennemis, Matth.,xxvi, 55; Marc, v, 40; Luc, iv, 30; xiii, 32; Joa., h. 19;vu, 33; viii, 48, 49; x, 32, et par une intrépidité aussicalme qu’énergique en face du danger. Matth., xxvi, 46;Marc, xiv, 42; Joa., xi, 8. Sa patience au milieu desindélicatesses de son entourage, des froissements, desaffronts, des souffrances, est vraiment surhumaine.Matth., xxvi, 33-35; Luc, xxii, 68; xxiii, 9; Joa., xviii,23. Pendant les longues heures de sa passion, il porteaux dernières limites la possession de.soi-même, leC-dme et la présence d’esprit au milieu de la conspirationla plus odieuse qui fût jamais, la résignationdans l’humiliation la plus profonde et les tortures lesplus imméritées, la sérénité d’âme même entre les bras

de la croix. Toutes les actions de sa vie ont été régléesavec une admirable prudence. Matth., xvii, 9; cf. Luc., xiii,27-29; xxi, 8. La douceur de ses procédés est merveilleuse,Matth., xii, 19-20; Luc, ix, 54-56, et il apportedans ses rapports avec les autres une gracieuseté incomparable.Matth, , xx, 22; Marc, v, 32-34; xii, 43; Luc,x, 41-42; xix, 9; Joa., i, 47; iv, 7; v, 6; ix, 35-36, etc.Rien de plus délicat que sa manière d’adresser desreproches, Luc, xxii, 61; Joa., viii, 8, et quand il apparaîtquelque dureté dans ses paroles, c’est toujours l’indiced’une précieuse compensation qui se prépare.Matth., xv, 24-28; xvi, 23; Marc, ix, 18; Joa., iv, 48.Cette égalité de caractère, cette possession de soi sontd’autant plus remarquables que, dès le début de sonministère public, le Sauveur se voit en butte à unehostilité sauvage qu’exaltent, an lieu de la désarmer,les miracles de bonté qu’il ne cesse d’opérer. On saitcomment les gens de Nazareth procédèrent à son égardquand il reparut au milieu d’eux. Luc, iv, 29. À laseconde Pàque, les Juifs commencent à le traiter enennemi, à cause du miracle de la piscine Probatique.Joa., v, 16. Au retour, quand il a guéri dans une synagoguel’homme à la main desséchée, les pharisienscomplotent déjà sa mort de concert avec les hérodiens.Matth., xii, 14; Marc, iii, 6; Luc, vi, 11. Dès lors, desscribes sont envoyés de Jérusalem pour le traquer partoutoù il va et s’efforcer d’inspirer aux Galiléens lahaine irraisonnée qui anime les Juifs contre lui. Marc,m, 22. De la sorte le divin Maître vit, parle et agit dansune atmosphère de suspicion et d’hostilité sourde quieût suffi à aigrir ou du moins à décourager l’âme lamieux trempée. Et pourtant rien ne lui fait perdre soncalme, rien ne lasse sa patience, et si son cœur estblessé par tant d’ingratitude, sa compatissante générositéne laisse échapper aucune occasion de s’exercer.Tout se résume par le don qu’il fait de lui-même auxhommes en instituant son Eucharistie la veille même desa mort, au moment où il sait que les complots ourdiscontre lui vont aboutir à une exécution violente. Il voyaitau fond même des cœurs toutes les haines accumuléescontre sa personne et contre son œuvre. Il n’en tientcompte que pour se dévouer avec plus de magnanimité.Tel était le Sauveur, vivant à la manière des hommessans doute, puisqu’il s’était fait homme, mais pratiquantles plus merveilleuses vertus, de manière à charmer tousceux qui vivaient près de lui, montrant aux plus parfaitsun idéal qu’ils ne peuvent atteindre, et aux plussimples un modèle qu’il ne leur est pas permis de trouverhors de leur portée. Cette vie est digne d’un Dieulait homme; loin de constituer une objection à l’affirmationde celui qui s’est dit Fils de Dieu, elle en corroborela vérité; et si, du temps du Sauveur, «le peuple entierse réjouissait de tout ce qu’il faisait avec tant degloire,» Luc, xiii, 17, l’humanité, qui ne retrouve queson portrait dans l’Évangile, a pour lui la même admirationjoyeuse que les Galiléens. Cf. Bougaud, Le christianismeet les temps présents, Paris, 1877, t. ii, p. 610619; Lescœur, Jésus-Christ, p. 239-267; de Place, Jésus-Christ,sa divinité, son caractère, son œuvre et soncœur, Paris, 1875; de Broglie, Problèmes et conclusionsde l’histoire des religions, p. 334-340; d’Hulst, Caièmede Notre-Dame, 1895, Retraite.

IX. Jésus-Christ d’après l’enseignement des Apôtres.

— Après la Pentecôte, les Apôtres ont prêché Jésus-Christà travers le monde. Leur pensée sur le diinMaître nous est parvenue, consignée dans les Actes desApôtres, les Épîtres et l’Apocalypse. De ces écrits, nouspouvons donc tirer la confirmation, l’interprétation etles conclusions des récits évangéliques.

l. la vie du sauveur. — 1° Jésus-Christ est préparépar Dieu dés l’origine du monde, Rom., i, 4; I Pet., i,20; Apoc, xiii, 8; c’est lui qu’attendent les patriarcheset qu’annoncent Moise et les prophètes. Act., iii, 21-25;

xxvi, 22-23; xxviii, 23; Gal., iii, 14; I Pet., i, 10, 11.Les anciennes institutions le figurent, Rom., xv, 8;

I Cor., x, 4; en un mot, il est «la fin de la Loi», Rom.,x, 4, elle n’a pas d’autre raison d’être que lui. — 2° Autemps marqué, Je Fils de Dieu prend une nature humainequi fait de lui notre frère, Heb., Il, 16-17; ilnaît de la race d’Abraham, Gal., iii, 16, de Juda, Heb.,vu, 14, et de David, Rom., i, 3; ix, 5; Apoc, xxii, 16,et il a une mère comme les autres hommes. Gal., iv, 4.

— 3° La prédication du Sauveur est précédée par cellede Jean-Baptiste, Àct., xiii, 23, 24; lui-même paraît ensuite,annonce l’Évangile et opère une foule de merveillesbienfaisantes. Act., x, 36, 38; ii, 22; cf. iv, 10; xx,35. Il se transfigure sur la montagne sainte. II Pet., i,16-18. Il institue la sainte Eucharistie. I Cor., xi, 23-29;X, 16; cf. I Pet., ii, 3. Puis il se livre volontairement à lamort. Il Cor., xiii, 3, 4; Phil., ii, 7-11; Heb., xii, 2. Ilest trahi par Judas, Act., i, 16, condamné par Pilate,Act., iv, 27, 28; I Tim., .vi, 13; mais ce sont les Juifsqui réclament sa mort et qui en sont responsables. Act.,h, 23; iii, 12-20; v, 30; x, 39; xiii, 27-29; I Thés., ii, 15.

II meurt sur la croix. Act., x, 39; Heb., v, 7; xiii, 12.

— 4° Après sa mort, Jésus-Christ descend aux enfers,pour annoncer la rédemption aux âmes des justes,Eph., iv, 9, 10; I Pet., iii, 19. — 5° Jésus-Christ ressuscitele troisième jour. Act., i, 13; ii, 24-32; iii, 26; x,40, 41; xiii, 30-37; I Cor., xv, 3-8, 20; Gal., i, 1; II Tim.,il, 8; Heb., xiii, 20. C’est surtout cette résurrection queles Apôtres prêchent au monde, comme l’événement capitalde la vie du Sauveur. Act., i, 21, 22; iv, 2, 33;xvii, 18; Rom., iv, 24. — 6° Jésus ressuscité ne peutplus mourir. Rom., vi, 9. Il est monté au ciel et siège àla droite de Dieu. Act., i, 4-11; ii, 33-36; Heb., iv, 14;x, 12, 13. — 7° Pendant sa vie mortelle, le Sauveur adonné l’exemple des vertus, de la charité, Eph., iii, 18-19;

I Joa., iii, 16, de la douceur et de l’humilité, II Cor., x, l,de l’obéissance, Heb., v, 8, de la pauvreté volontaire, II Cor.,vin, 9, du renoncement. Rom., x, 3; Heb., xii, 2; I Pet.,n, 23.

n. sa divinité. — 1° Jésus-Christ a Dieu pour Père.Rom., xv, 6; I Cor., i, 3; xi, 3; xv, 28; II Cor., i, 3; xi,31; Eph., i, 3, 17; Col., i, 13; I Pet., i, 3; 1 Joa., v, 9,10. — 2° Il est le Fils de Dieu. Act., viii, 37; IX, 20;

II Cor., i, 19; Heb., i, 5-13; I Joa., iv, 15; v, 5; II Joa.,i, 3. — 3° Il s’est incarné pour venir en ce monde. I Tim.,m, 16; Tit., ii, 11, 12; Heb., ii, 11-13; x, 5-9; I Joa., i,1-3; iv, 2, 3; v, 20; II Joa., 7. Il y est venu envoyé parson Père, Rom., viii, 3; Gal., iv, 4; Heb., 1, 1, 2; I Joa.,iv, 9, 14, pour ruiner les œuvres du démon, I Joa., iii,8, et pour racheter les péchés de l’homme. I Joa., iii, 5.

— 4° Jl a en sa personne tous les attributs de la divinité.Il est l’image du Dieu invisible, II Cor., iv, 4; Col., i,15; voir Image, col. 843; il est la vérité absolue, Eph.,iv, 21; I Joa., v, 6, et il possède toute science. Col., ii,3. Par son incarnation, il devient le chef de toute lacréation, mais toujours supérieur à toutes les créatures,même aux anges. 1 Cor., xv, 47; Col., i, 15-17; ii, 10;Heb., i, 4; iii, 3; Judae. 4. Il est l’égal de Dieu, Phil., ii,6, et la plénitude de la divinité réside en lui. Col., i, 19;il, 9; cf. I Joa., ii, 23; v, 1. Aussi ne peut-on proférer dignementson nom qu’avec la grâce du Saint-Esprit.I Cor., xii, 3.

m. le rédempteur. — 1° Pour racheter les hommespar sa mort, Jésus-Christ a fait œuvre de puissance et aremporté la victoire contre les démons. I Cor., i, 18,23-24; xv, 57; Col., ii, 14-15; Heb., ii, 14-15. 2° C’est le Père qui a voulu que son Fils souffrit pour lerachat des hommes. Rom., iii, 24, 25; viii, 32; Heb., ii,10; I Joa., iv, 10. — 3° Jésus-Christ est donc mort pournous. Act., xvii, 3; Rom., v, 9; xiv, 15; I Cor., i, 30;v, 7; viii, 11; Gal., ii, 20; Eph., v, 2; I Pet., i, 18-19;H, 21. — 4° Il est mort pour tous les hommes. Rom., v,6; II Cor., v, 14-15; I Tim., ii, 6; iv, 10; I Joa., ii, 2;

Apoc., v, 9. — 5° Il s’est fait ainsi notre Sauveur. Rom.,v, 21; Tit., i, 4; II Pet., i, 1, 11; ii, 20; iii, 2. - 6° Il aracheté l’homme du péché, Rom., iv, 25; Gal., i, 3, 4;Eph., i, 7; I Tim., i, 15; Tit., ii, 14; Heb., IX, 1315,28; I Pet., ii, 24; iii, 18; I Joa., i 7; iii, 5; Apoc., i, 5,et de la servitude de l’ancienne loi. Rom., vii, 4; viii, 2;xiv, 14; Gal., ii, 4, 21; iii, 13; iv, 31. — 7° Il nous aainsi réconciliés avec Dieu. Rom., v, 10, 11; I Cor., xv,22, 45; II Cor., v, 16-19; Col., i, 20, 22; Eph., ii, 13-16;iv, 32; Heb., v, 9; x, 10, 14; I Pet., iii, 22; II Pet., ii, l.

— 8° Enlin, il nous fait participer à sa propre résurrection,en nous méritant la grâce d’une vie nouvelle,Rom., vi, 4; Col., iii, 1, 12; I Pet., i, 3, 4; iii, 21, et ennous préparant pour l’avenir une résurrection effective.Rom., viii, 11; xiv, 9; I Cor., vi, 14; xv, 12; II Cor.iv, 14.

IV. le médiateur.

Le Sauveur avait dit: «Personnene vient au Père que par moi.» Joa., xiv, 6. C’estla conséquence nécessaire de l’incarnation et de la rédemption.La médiation du Sauveur est une doctrinesur laquelle les Apôtres insistent fortement. — 1° Jésus-Christest le médiateur entre Dieu et les hommes, c’estpar lui que nous avons accès auprès du Père, et c’estlui qui intercède sans cesse pour nous. Rom., viii, 34;ICor., iii, 22, 23; viii, 6; II Cor., iii, 4; Eph., ii, 17, 18;I Thés., i, 3; I Tim., i, 1; II, 5; Heb., IV, 15, 16; vil,22, 25; ix, 24; xii, 24. — 2° En conséquence, il est lepontife choisi par Dieu même pour remplacer tous lesprêtres de l’ancienne loi, et offrir le seul sacrificeagréable au Seigneur et salutaire aux hommes. Heb., iii,1-2; v, 5-6, 10-11; vi, 20; vii, 20-26; viii, 1, 2, 6; ix,11, 12, 25, 26. — 3° Par lui, nous sommes appelés à lafoi et au service de Dieu. Eph., i, 11-16; Phil., iii, 14;I Tim., i. 9, 10; I Pet., v, 10; Judæ 1. — 4° En son nomnous est donné le baptême. Act., ii, 38; viii, 12; x, 48;Rom., vi, 3. — 5° Par lui nous obtenons la rémission despéchés, après le baptême, comme en le recevant. Act., ii,38; v, 31, 32; x, 43; xiii, 38-39; Rom., v, 21; vi, 11; vil,24-25; I Cor., vi, 11; II Cor., v, 20, 21; Heb.. ii, 17, 18;

I Joa., ii, 1. 12. — 6° C’est encore en son nom ques’opèrent les miracles qui accréditent la prédicationapostolique. Act., iii, 6; iv, 29, 30; ix, 34; xvi, 18. —7° Par la grâce du médiateur nous triomphons desennemis spirituels. II Cor., i, 8; ii, 14; Apoc, xii, 11.

— 8° Tous les biens de l’ordre surnaturel nous arriventpar Jésus-Christ, la grâce, Rom., v, 15; I Cor., i, 4-5;Eph., i, 6; ii, 5-7; Phil., i, 11; la foi, II Cor., iv, 6l’espérance, Col., i, 27; II Thés., ii, 15, 16; II Tim., i,1; Tit., iii, 4-7; la justification, Rom., iii, 24; v, 1, 9;vm, 30; I Cor., vi, 11; Gal., ii, 16; Tit., m. 7; la paix,

II Cor., i, 2; Eph., yi, 23; I Tim., i, 2; II Tim., i, 2;Heb., xiii, 20; la filiation divine avec ses glorieux avantages.Rom., viii, 17; I Cor., i, 9; Gal., iv, 4, 5; Eph.,i, 4, 5; II Thés., ii, 12, 13; Heb., iii, 14; II Pet., i, 4. 9° C’est enfin le médiateur qui assure notre salut. Act.,rv, 10-12; xv, 11; Rom., v, 17; vi, 23; viii, 1; I Thés.,v, 9; II Tim., ii, 10; Judæ 21; Apoc, xxi, 27; xxil, 14.Saint Paul résume en un mot tous ces dons de la munificencedivine: «Dieu qui n’a point épargné sonpropre Fils, mais qui l’a livré pour nous tous, commentne nous aurait-il pas donné toutes choses avec lui?» Rom., viii, 32.

y. le christ et l’église. — Le «royaume des cieux»,que Jésus-Christ est venu fonder, devient. pour lesApôtres 1’«Église», par laquelle toutes choses serontrenouvelées dans le Christ. Eph., i, 10. — 1° Jésus-Christest la pierre fondamentale de l’Église. Eph., Il,20-22; I Pet., ii, 4, 5. Il est le roi de ce nouveauroyaume, Act., xvii, 7; Col., i, 18; Apoc, v, 10; le pasteurde ce troupeau, I Pet., ii, 25; v, 4; la tête de cecorps dont les fidèles sont les membres, I Cor., xv, 23;Eph., i, 22, 23; iv, 15, 16; v, 23, 24; Col., i, 24; le filsde famille dans cette maison. Heb., iii, 6. — 2° Jésus

Christ aime et traite l’Église comme son épouse. Eph.,v, 25-30; Apoc, xxi, 9-11. — 3° C’est lui qui choisit despasteurs pour son Église. Rom., i, 5, 6; Gal., i, 1;Phil., iii, 12; Eph., iv, 11-14; II Cor., viii, 23; I Tim.,I, 12. — 4° Ces pasteurs ont à prêcher Jésus-Christ.Act., iv, 18; v, 42; viii, 35; ix, 27; xviii, 4; xxviii, 31;II Cor., iv, 5; Gal., iii, 1; Phil., i, 18; Eph., iii, 10, 11;II Thés., i, 12; Col., ii, 2.-5° Ils commandent au nomde Jésus-Christ. I Cor., v, 3-5; II Cor., x, 5.

VI. LE CHRIST ET LE CHRÉTIEN.

1° Il faut tout

d’abord avoir la foi en Jésus-Christ, et appuyer cettefoi, non par les œuvres de l’ancienne loi, mais par «lesbonnes œuvres que Dieu a préparées pour que nous lesaccomplissions». Eph., ii, 8-10; Act., xvi, 31; xx, 21;Rom., iii, 22, 26; v, 1-2; x, 9; Gal., ii, 16-17; iii, 22,26; Eph., iii, 11, 12; I Pet., i, 8; I Joa., iii, 23; v,11-13. — 2° Il faut ensuite imiter les exemples de Jésus-Christ,pour arriver à lui ressembler. Rom., vi, 6-8;vm, 29; xiii, 14; I Cor., iv, 16; xi, 1; Gal., iii, 27; Col.,il, 6-7; Phil., ii, 5; Heb., xii, 3-4; I Pet., iv, 1; I Joa.,H, 6. — 3° Il faut l’aimer. I Cor., xvi, 22; I Tim., i, 14;II Tim., i, 13; I Joa., iv, 19. — 4° Il faut travailler etsouffrir pour Jésus-Christ. Act., v, 4041; xv, 25-26;xxi, 13; II Cor., xii, 9-10; Gal., i, 10; ii, 19; vi, 14;Col., i, 24; Phil., iii, 7-10; Heb., xiii, 12-13; II Tim.,il, 3; iii, 12; I Pet., iv, 13-14. — 5° À ces conditionsJésus-Christ habite dans le chrétien. Rom., viii, 9, 10;II Cor., xiii, 5; Col., iii, 16; Eph., iii, 17; I Thés., v,10; I Joa., ii, 24; Apoc, iii, 20. — 6° Il y vit. I Cor., ii,15-46; iv, 10-11; Gal., ii, 19-20; Col., iii, 2-4; Phil.,I, 21-23. — 7° Il y grandit. I Cor., iii, 9-10; Gal., IV,19; Il Pet., iii, 18. C’est ainsi que l’œuvre sanctificatricedu Sauveur, propagée et appliquée par l’Églisedans laquelle il réside, vit et agit, arrive jusqu’à chaqueâme en particulier pour l’élever à une vie supérieure etla conduire à la vie éternelle.

VII. LE REGNE DE JÉSUS-CHRIST.

1° Après tout Ce

qu’il a fait sur la terre pour la gloire de son Père etpour le salut des hommes, le Sauveur mérite tout honneuret toute gloire. Rom., ix, 5; Heb., Il, 9; I Pet., iv,11; II Pet., iii, 18; Apoc, i, 5-6; vii, 10. — 2° II est leRoi des rois et le Seigneur des seigneurs. Apoc, xvii, 14.Son empire s’étend sur le ciel, sur la terre et sur lesenfers. Phil., ii, 10; Apoc., v, 12, 13. Il est «le premieret le dernier», le principe et la fin de toutes les créatures,Apoc, l, 17; ii, 8; iii, 14; le maître de tout,même de la mort et de l’enfer, Apoc, i, 18; iii, 7; leSaint, le Vrai, le Fidèle, Apoc, iii, 7; xix, 11; le puissantvainqueur de tous les ennemis de son régne, Apoc,xix, 14-16; la lumière et la joie des habitants du ciel.Apoc, vii, 15-17; xxi, 23. — 3° Il aura un second avènementpour juger tous les hommes. Alors les élémentsdu monde seront bouleversés, II Pet., iii, 12; les mortsressusciteront,! Thés., iv, 15; Eph., v, 14; Phil., iii, 20,21; le Christ apparaîtra sur son tribunal, devant lequelseront cités tous les hommes, I Thés., i, 10; Heb., ix,28; II Cor., v, 10; I Tim., vi, 14-15; Apoc, i, 7; Rom.,xiv, 10; Tit., ii, 13; il jugera les vivants et les morts.Act., x, 42; xvii, 31; Rom., ii, 16; II Tim., iv, 1, prononcerala sentence de malédiction éternelle contre lesméchants, II Thés., i, 7-9; ii, 8; Jud., 6, et la sentencede bénédiction en faveur de ceux qui l’auront connu etservi sur la terre. I Cor., i, 7, 8; II Cor., i, 14; Phil.,i, 6, 10; Col., iii, 24; I Thés., ii, 19; iii, 13; iv, 16; v,23; II Thés., i, 10; ii, 1; I Pet., i, 7, 13; iii, 22; I Joa.,il, 28; Jud., 24, 25. — 4° Dès lors ce sera le règne éternelde JésusChrist, roi incontesté de toute la création,I Pet., iii, 22; Apoc, xi, 15; Eph., i, 19-21, associant àson bonheur et à sa gloire ceux qui lui auront été fidèles.Apoc, xix, 7-9.

C’est ainsi que Jésus-Christ remplit toute l’histoire deson nom, de son action et de sa personne. Annoncé désla chute d’Adam, il est attendu par le peuple israélite,

il vient sur la terre, vit et meurt au milieu des hommes,leur laisse après lui sa doctrine, ses exemples, sa grâce,son Église, sa présence cachée, et enfin continue auciel son éternelle vie, à laquelle il associe la nature humainequ’il a prise dans l’incarnation et qu’il fera partagerà ceux qui auront voulu vivre ici-bas de ses enseignementset de sa grâce. Seul un Dieu pouvait ainsiremplir le monde de son action et de sa gloire.

X. Ce que disent de Jésus-Christ les anciens historiensPROFANES. — Quatre écrivains profanes font unetrès courte mention de Jésus-Christ. — 1° Josèphe, quidit un mot du supplice infligé par Hérode à «Jean surnomméRaptiste», Ant. jud., XVIII, v, 2, et de la condamnationportée par le grand-prêtre Ananus contre «Jacques,frère de ce Jésus qui était appeléChrist». Ant. jud.,XX, ix, 2, ne pouvait guère passer complètement soussilence le Sauveur lui-même. Il lui a en effet consacréun court paragraphe ainsi conçu: «En ce temps futJésus, homme sage, s’il faut toutefois l appeler unhomme. Car il opéra des œuvres étonnantes, et fut lemaître des hommes qui reçoivent avec plaisir la vérité.Il entraîna à lui beaucoup de Juifs et beaucoup de Grecs.C’était le Christ. Rien que Pilate, sur la dénonciationdes premiers d’entre nous, l’eût condamné à la croix,ceux qui l’avaient d’abord aimé ne s’en désistèrent pas.Il leur apparut en effet le troisième jour vivant de nouveau,comme les divins prophètes l’avaient annoncé àson sujet, ainsi que mille autres merveilles. Jusqu’à cejour subsiste la tribu des chrétiens, qui tire son nomde lui.» Ant. jud., XVIII, iii, 3. Ce passage a été l’objetde nombreuses et vives controverses. Il est difficile decroire que Josèphe n’ait rien dit de Jésus dans son histoire,mais on peut admettre que ce texte a été interpolépar une main chrétienne. Les mots en italiques représententceux qui paraissent avoir été ajoutés dans le textegrec. Il a été cité pour la première fois parEusèbe,H. E., i, U, t.xx, col.ll7; Ztem. ev., iii, 5, t.xxii, col. 221,et ensuite par saint Jérôme. De viris illuslr., xiii,t. xxiii, col. 631. Voir Daubuz, Pro testimonio FI. Josephide Jesu Christo, Londres, 1706. Parmi les auteursqui se sont occupés du texte de Josèphe, les unssoutiennent son authenticité: Bohmert, Veber des FI.Josephus Zeugniss von Christo, Leipzig, 1823; Langen,Judenthum in Palastina, Fribourg-en-Brisgau, 1866,p. 440; Studien und Kritiken, 1856, p. 840; Kneller,FI. Josephus ûber Jésus Christus, dans les Slimmenaus Maria-Laach, 1897, p. 1-19, 161-174, etc.; d’autres lejugent interpolé: G. A. Muller, Christus bei Josephus FI.,Inspruck, 1895; Th. Reinach, Josèphe sur Jésus, dans laRevue des Études juives, 1897, p. 1-18; Revue biblique,1898, p. 150-152, etc.; enfin, quelques auteurs croient àson inauthenticité totale: Schurer, Geschichte des jùdischenVolkes, Leipzig, t. i, 1901, p. 544-549, adopte cedernier sentiment en remarquant que Josèphe, qui tenaità ne point froisser les Romains, a dû passer soussilence tout ce qui rappelait les espérances messianiqueset conséquemment ne rien dire de Jésus dont ilne pouvait parler comme d’un simple moraliste.

2° Tacite, Ann., xv, 44, parlant des supplices infligésaux chrétiens sous Néron, s’exprime ainsi: «L’auteurde ce nom, le Christ, avait souffert le supplice, sous’lerègne de Tibère, par ordre du procurateur Ponce-Pilate.Momentanément réprimée, la funeste superstition sedéchaînait à nouveau, non seulement à travers la Judée,le berceau du mal, mais dans la Ville même.» Il estpossible que l’historien se soit inspiré du texte primitifdç Josèphe. Mais comme il se montre beaucoupplus hostile que l’écrivain juif, il est plus probable qu’ila puisé ses renseignements dans les documents officiels,auxquels il ajoute les appréciations courantes du mondepaïen. Sur le texte de Tacite, cf. Douais, dans la Revue desquestions historiques, iS85, p. 336-397; Boissier, Comptesrendus de l’Académie des inscriptions, 26 mars 1886.

3° Suétone, Claud., [25, est beaucoup moins renseigné. U dit seulement que l’empereur Claude «chassade Rome les Juifs qui se livraient à des désordres continuels à l’instigation de Chrestus». Les Juifs sont icides chrétiens poursuivis par des Juifs, ou des Juifs poursuivant des chrétiens à raison de leur foi. On croit communément que Suétone a écrit Chrestus pour Christus.Voir Aquila, t. 1, col. 809; Claude, t. ii, col. 798; Allard, Histoire des persécutions pendant les deux premiers siècles, Paris, 1892, p. 20.

4° À la mention de ces historiens peut encore s’ajouter le simple mot de Pline le Jeune, Ep., x, 97, écrivantà Trajan que les chrétiens prétendent se réunir certainsjours pour «chanter ensemble un hymne au Christcomme à un dieu».

XI. Bibliographie. — Il y a d’abord à consulter surJésus-Christ les commentateurs des quatre Évangiles, signalésàla fin des articles Jean(Saint), col.1190, Luc(Saint1,Marc (Saint), Matthieu (Saint); puis les traités théologiques De incarnatione, spécialement S. Thomas, Sum.theol., iii, q. i-lix, et Petau, De incarnatione Verbi, 1.ii-xiii. Principaux auteurs qui ont écrit spécialement surla vie du Sauveur: 1° Catholiques: Ludolphe le Chartreux, Vita Christi, Strasbourg, 1474, souvent rééditée;de Ligny, Histoire de la vie de J.-C, Paris, 1830; Sepp,Dos Leben Christi, Ratisbonne, 1843, traduite en français par C. de Sainte-Foi, La vie de N.-S. J.-C, Paris,1861; Foisset, Histoire de J.-C, Paris, 1863; Lecanu,Histoire de N.-S. J.-C, Paris, 1863; L. Veuillot, Vie deN.-S. J.-C, Paris, 1864; Wallon, Vie de N.-S. J.-C,Paris, 1865; Pauvert, La vie de N.-S. J.-C, Paris, 1867;H. Coleridge, The Life of our Life, Londres, 1869, traduit en français par Petit et Mazoyer, La vie de notreVie, Paris, 1888-1895; Dupanloup, Jftstoire de N.-S. J.-C,Paris, 1870; Schegg, Sechs Bûcher des Lebens Jesu, Fribourg-en-Brisgau, 1874; Dehaut, L'Évangile expliqué,défendu, médité, Paris, 1875; Grimm, Das Leben Jesunach den vier Evangelien, Ratisbonne, 1876; Bougaud,Jésus-Christ, t. H dans Le christianisme et les tempsprésents, Paris, 1877; Ch.Fouard, Xa vie deN.-S. J.-C., Paris, 1880; E.Le Camus, Lavie deN.-S. J.-C, Paris, 1883;Bidon, Jésus-Christ, Paris, 1891; H. Lesêtre, N.-S. J.-Cdans son saint Évangile, Paris, 1892; Fretté; N.-S.JésusChrist, Paris, 1892; Pègues, J.-C. dans l'Évangile, Paris, 1898; Fomari, Délia vita di Gesù Cristo, Rome, 1901.— 2° Protestants: Hase, Das Leben Jesu, Leipzig, 1835;Neander, Das Leben Jesu Christi, Hambourg, 1845;Lange, Life of Christ, Edimbourg, 1854; de Pressensé,Jésus-Christ, son temps, sa vie, son œuvre, Paris, 1866;Keim, Geschichte Jesu von Nazara, Zurich, 1867; Plumptre, Christ and Christendoni, Londres, 1867; Farrar, Li/eof Christ, Londres, 1864; Wittichen, Das Leben Jesu,Iéna, 1876; Geikie, The Life and Words of Christ, Londres, 1877; Thomson, Word, Work and Will, Londres,1879; B. Weiss, Das Leben Jesu, Berlin, 1882; Edersheim,The Life and Times of Jésus the Messiah, Londres,1883; Beyschlag, Leben Jesu, Halle, 1885; Schmidt,

Geschichte Jesu, Bâle, 1899.

H. Lesêtre.

JETA (hébreu: mai» et nia», Yûttâh et Yuttah; Septante: 'Iôâv, Jos., xv, 55; T «vû, Jos., xxi, 16; Alexandrinus: 'IeTra), ville sacerdotale de la partie montagneusede la tribu de Juda. Jos., xv, 55; xxi, 16. Dans ce dernier passage, elle est énumérée parmi les villes sacerdotales, mais elle est omise dans la liste parallèlede I Par., vi, 57-59. Son nom primitif s’est conservé.Elle s’appelle aujourd’hui Yutta, gros village identifiépar Seetzen en 1807. Il est situé à vingt-cinq kilomètresenviron de Beit-Djibrin, l’ancienne Éleuthéropolis{dix-huit milles d’après Eusèbe et S. Jérôme, Onomastica særa, Gœtlingue, 1870, p. 133, 266), et dans le voisinage d’Hébron, deKurmul (Carmel de Juda), de Ma’inMaon) et de Tell ez-Zif (Ziph), sur une éminence. Les

maisons sont en pierre; un certain nombre d’habitantsvivent néanmoins sous la tente. Aucune source; on n’apoint d’autre eau que celle des citernes antiques. Les alentours sont extrêmement pierreux. On y remarque de touscôtés d’anciens pressoirs taillés dans le roc et, au sud, destombeaux également taillés dans le roc vif. Quelquesoliviers et des figuiers poussent au midi du village; àl’ouest il y a un petit bosquet d’oliviers. Malgré l’ariditédu sol, les gens de Jeta sont riches en troupeaux: brebis,chèvres, chevaux, bœufs, ânes et chameaux. Survey ofwestern Palestine, Memoirs, t. iii, 1883, p. 310, 380;Ed. Robinson, Biblical Researches, 1841, t. ii, p. 195, 628;2e édit., t. i, p. 495; t. ii, p. 206.

La Vulgate l’appelle Jeta dans Jos., xxi, 16, et Jotadans Jos., xv, 55. Jeta est simplement mentionnée dansl’Ancien Testament, Jos., xv, 55, comme appartenantau territoire de Juda, et Jos., xxi, 16, comme villesacerdotale. Mais elle a acquis une certaine notoriétédepuis qu’Ad. Reland, Palsestina, 2 in-8°, Utrecht, 1714,t. ii, p. 870, a émis l’hypothèse, acceptée par un certain nombre de savants, que la Yuttâh de Josué est lapatrie de saint Jean-Baptiste. «Je soupçonne, dit-il, quecette ville est mentionnée par saint Luc, i, 39, qui l’appelletoSàic 'IoûSoc, le io étant transcrit par un A. C’est la patrie de Jean-Baptiste. Son père étant prêtre, où pourrons-nous chercher plus convenablement sa maison et sonhabitation que dans une ville sacerdotale, telle qu'étaitJuta, 'IoijToe? Jos., xxi, 16. Sa position convient également: èv Jpsivîj, dans la région montagneuse, car, Jos.,xv, elle est jointe à Hébron et aux autres villes des montagnes de Juda. Je n’ajouterai rien sur Bethzacharia,qu’une tradition ancienne affirme être la patrie de saintJean et qui ne paraît pas avoir été placée dans un lieubien différent de celui qu’Eusèbe indique comme lesite de Juta. Je pense que cette conjecture recevra l’approbation de tous ceux qui examineront avec soin lesparoles de saint Luc; ils verront que si nous expliquons7tôXtv 'Io05a, comme on le fait ordinairement, par villede Judée, il ne sera pas question d’une ville particulière, ce qu’on a le droit d’attendre, et il n’y aura guèrealors rien de plus obscur dans tout l'Évangile de saintLuc, ainsi que l’a reconnu Papebrock, traitant de la patriede saint Jean dans les Acta sanctorum, junii t. iv,p. 703.» Ces arguments ont été jugés plausibles par uncertain nombre d’exégètes. C. Fouard, La vie de N.-S.Jésus-Christ, 1882, t. i, p. 21-22. Ils sont loin cependantd avoir convaincu tout le monde. Voir Careij, t. ii,col. 260-266; Jean-Baptiste, col. 1156; E. Le Camus.La Bible et les études topographiques, dans la Bévuebiblique, 1892, p. 107-109; Germer Durand, ibid., 1894,p. 444 (en faveur de Bethzacharia); Séjourné, ibid., 1895,p. 260-261; Fillion, évangile selon saint Luc, 1882,p.48; V. Guérin, Judée, t. i, p. 83-103, t. iii, p. 205-206;Survey of western Palestine, Memoirs, t. iii, 1883, p. 19,60-61. F. Vigouroux.

    1. JÉTÉBA (hébreu Yotbâh##


JÉTÉBA (hébreu Yotbâh, «bonté, agrément;» Septante: 'Ietéëa; Alexandrinus: 'IsxaxâX), patrie de Messalémeth, femme de Manassé et mère d’Amon, rois deJuda. IV Reg., xxi, 19. Sa situation est complètementinconnue. On peut seulement supposer qu’elle étaitdans le royaume de Juda. Plusieurs l’identifient, maissans preuves et avec peu de vraisemblance, à Jétébatha.

    1. JÉTÉBATHA##

JÉTÉBATHA (hébreu: Yotbâtàh; Septante: 'E T egaŒx; Alexandrinus: 'IersSaSav, 'IereBiOa), campementdes Israélites dans le désert, mentionné Num., xxxiii,33-34, et Deut., x, 7, entre Gadgad, col. 32, et Hébrona,col. 542. Sa position est inconnuee t l’on en sait seulementce que nous apprend l’auteur sacré, que e'étaitune «terreabondante en eau >. Deut., x, 7. On peut admettre, néanmoins, d’après le contexte, que Jétébatha n'était pas bien

loin de la pointe septentrionale du golfe Élanitique.Quelques commentateurs croient, mais sans preuves, queles Israélites campèrent à deux reprises différentes àJétébatha.

JETH (hébreu: Yahaf, voir Jàijath 2, col. 1105; Septante: ’Iéè), lévite, descendant de Gersom, fils de Lobniet ancêtre d’Asaph. I Par., vi, 20.

    1. JETHÉLA##

JETHÉLA (hébreu: Jtlâh; Septante: Ec), a8â; Alexandrinus.-’Ie6Xex), ville de la tribu de Dan. La situation deJéthéla est douteuse. Elle était dans le voisinage d’Aïalon,d’Élon et de Thammatha, d’après le seul passage del’Écriture où elle est nommée. Jos., xix, 42. Selon lesexplorateurs anglais de la Palestine, Survey of westernPalestine, Memoirs, t. iii, 1883, p. 43, ce serait probablementla ruine appelée aujourd’hui Beit Tûl, à cinqkilomètres environ au sud-est de Yalo (Aïalon). On ytrouve des restes de fondations. Ibid., p. 86. Voir Dan2, t. ii, col. 1233.

    1. JÉTHER##

JÉTHER (hébreu: Yéfér), nom, dans la Vulgate, decinq Israélites et d’une ville de Juda. Sans le texte original,six personnages portent le nom de Jéther. Lesixième, qui est le plus ancien de tous, Jéthro, est appeléYéfér dans l’Exode, IV, 18. Le nom de Jéther a en hébreuà peu près les mêmes consonnes, mais il est ponctué autrement:Yaffîr.

1. JÉTHER (Septante: Ms8Ép), fils aîné de Gédéon.Lorsque son père eut atteint les rois madianitesZébéeetSalmana qu’il poursuivait après les avoir vaincus, ildemanda à son fils de les tuer pour venger le sang deses parents que ces princes avaient massacrés sur leThabor, mais Jéther n’était encore qu’un enfant et il n’eutpas le courage de tirer son épée. Jud., viii, 20. Il péritplus tard avec ses frères (Joatham ayant échappé seulau carnage), par ordre d’Abiméiech, fils de Gédéon etd’une femme de second rang, originaire de Sichem. Jud.,vm, 31; ix, 5.

2. JÉTHER (Septante: ’Iedlp), père d’Amasa et beau-frèrede David, dont il avait épousé la sœur Abigail. Voircependant Abigail 2, t. i, col. 49. II Reg., xvii, 25;III Reg., ii, 5, 32; I Par., ii, 17. Le texte hébreu l’appelle,II Sam., xvii, 25, Ytra’, forme que la Vulgate a renduepar Jetra. La nationalité de Jéther est douteuse, àcause de la discordance des différents textes, qui le font,les uns originaire de Jezræl, les autres simplementIsraélite, les autres enfin Ismaélite. D’après la Vulgate,II Reg., xvii, 25, il était «de Jezræl», mais l’hébreuporte en cet endroit «Israélite». Cette dernière leçonest, il est vrai, fort suspecte, parce qu’on ne s’expliquepas pourquoi l’auteur sacré ferait remarquer que Jétherétait Israélite, dés lors qu’il vivait en Israël et épousaitune Israélite. D’après I Par., ii, 17, Jéther était Ismaélite;cette lecture est préférée par la plupart descritiques. La leçon Jezraélite a néanmoins pour elle,outre la Vulgate, l’édition sixtine des Septante.

S. JÉTHER (Septante: ’Ie6ép), fils atné de Jada, de latribu de Juda, dans la branche d’Hesron. Il mourut sanspostérité. I Par., ii, 32.

4. JÉTHER (Septante: ’IeJlp), fils d’Ezra, de la ribude Juda. I Par., iv, 17.

5. JÉTHER (Septante: ’IsBrjp), chef d’une famille de latribu d’Aser. I Par., vii, .38. Quelques commentateurspensent qu’il est le même que celui qui est appelé Jéthranau }. 37.

6. JÉTHER (hébreu: Yattir; Septante: ’Isôsp, re8<ip),

ville sacerdotale située dans la tribu de Juda. Elle estnommée, Jos., xv, 48, comme faisant partie du territoirede Juda, et Jos., xxi, 14 et I Par., vi, 58 (hébreu,42), comme ayant été donnée aux descendants d’Aaron.Dans I Reg., xxx, 27, Jéther est mentionnée parmi lesvilles à qui David envoya une part du butin pris sur lesAmalécites, lorsqu’il les poursuivit et les battit pour leurenlever les dépouilles de Siceleg. Deux des soldats deDavid, qui étaient allés se joindre à lui pendant la persécutionde Saul, Ira et Gareb (voir ces noms), étaientprobablement de Jéther. Voir Jéthrite, col. 1521. Dansla liste de Josué, xv, 48, Jéther fait partie du groupe de lapartie montagneuse de Juda, entre Samir et Socoth, etnon loin de Dabir. Eusèbe et saint Jérôme, Onomasticasacra, édit. Larsow et Parthey, 1862, p. 232, disent quec’était de leur temps une localité importante, située aumilieu du Daroma, près de Malatha, à vingt milles romainsd’Éleuthéropolis (Beit-Djibrin), et habitée seulementpar des chrétiens. Ed. Robinson, Biblical Besearches,2e édit., t. i, p. 494, l’a identifiée avec le’Attir actuel, et cette identification est assez généralementadmise comme probable (Fr. Buhl, Géographiedes alten Palàstina, 1896, p. 164), quoique leain initial du nom actuel soit difficile à expliquer etqu’elle ne soit pas à vingt milles romains (29 tln 600) deBeit-Djibrin comme le dit Eusèbe, mais à vingt-quatre(35 lm 500). Si l’on admet l’identification, il faut reconnaîtreune erreur de chiffres dans Eusèbe.’Attir est àseize kilomètres au nord de Tell el-Mihl (Molada) et àdix-neuf kilomètres environ au sud-ouest d’Hébron. Sesruines sont sur deux collines peu élevées. «La collineorientale, dit V. Guérin, Judée, t. iii, p. 198, était le sitede la ville proprement dite. Les maisons qui la couvraientétaient pour la plupart bâties en pierre de taille d’unappareil moyen. Un certain nombre d’entre elles sontencore debout. Voûtées intérieurement, elles offrent àl’extérieur l’apparence d’une petite construction carréesurmontée d’une terrasse. Quant aux voûtes de ces mo-’destes habitations, elles sont généralement cintrées; quelques-unesnéanmoins sont encore ogivales. Un caveaucreusé dans le roc servait à chaque famille de magasinsouterrain.» On remarque çà et là des tronçons de colonnes.Sur la colline occidentale gisent quelques fûtsmutilésde colonnes monolithes, au milieu des débris,d’un édifice qui doit avoir été une église chrétienne.Au bas, du côté de l’est, est un birket ou piscine. VoirSurvey of western Palestine, Memoirs, t. iii, p. 404,408. F. Vigourobx.

    1. JÉTHETH##

JÉTHETH (hébreu: Yéféf; Septante: ’ltU?; Aleœandrinus: ’Ieëép, dans Gen., xxxvi, 40; ’Ie9é9, dans I Par.,i, 51), un des chefs Çallûf) d’Édom, dans la généalogiede la postérité d’Ésau.

    1. JETHMA##


JETHMA.(hébreu: Itmâh; Septante: ’IeGa^â), Moabitequi s’attacha à la fortune de David et fut l’un de ses.vaillants soldats. I Par., xi, 46.

    1. JETHNAM##

JETHNAM (hébreu: Ifnân; Septante: ’Aaoptwvae’v;Alexandrinus: ’ISvaÇîç; dans le premier mot Itnân estamalgamé avec le nom d’Asor qui précède dans le texte, etdans le second, avec Ziph qui suit; la recension de Lucienportait exactement’I8vôv, Zei’ç), ville de la tribu de Juda,dans le Négeb. Jos., xv, 23. Elle était dans la partie méridionalede Juda et près du désert, du côté de Cadès, .mais le site n’en a pas été retrouvé.

    1. JÉTHRAAM##

JÉTHRAAM (hébreu: ’I(re’âm; Septante: ’IîŒpocaiLet’Is9paâ(x), le sixième fils de David, né à Hébron. Samère s’appelait Égla. II Reg., iii, 5; I Par., iii, 3. Soanom est écrit Jéthraham dans ce second passage.

    1. JËTHRAHAM##


JËTHRAHAM. Voir Jéthraam.

    1. JÉTHRAI##

JÉTHRAI (hébreu: Yéatraî; Septante: ’Ie6pf), lévite,fils de Zara, de la descendance de Gersorn. Il étaitprobablement le chef des Gersonites lorsque David organisale service du sanctuaire. I Par., vi, 21. Il est peut-êtrele même que l’Athanaï du ꝟ. 41, qui est indiqué danscet endroit comme le fils de Zara.

    1. JETHRAM##


JETHRAM, orthographe, dans laVulgate, Gen., xxrvi,26, du nom d’nn Horréen qui est écrit plus correctementJéthran dans I Par., i, 41. Voir Jéthran 1.

    1. JÉTHRAN##

JÉTHRAN (hébreu: Itrân), nom d’un Horréen etd’un Israélite.

1. JÉTHRAN (Septante: ’I6p<Jv et’Isepâu.), Horréen,fils de Dison, qui habitait le mont Séir avant qu’Ésause fût rendu maître du pays. Gen., xxxvi, 26; 1 Par., i,41. La Vulgate écrit son nom Jéthramdans Gen., xsxvi,26.

2. JÉTHRAN (Septante: ’IeOpdt et’IeOép), de la tribud’Aser, fils de Supha, I Par., vil, 37, père de Jéphoné,de Phaspha et d’Ara, si le Jéther du ji. 38 est le mêmeque le Jéthran du jꝟ. 37, comme c’est généralement admisVoir Jéther 5, col. 1519.

    1. JÉTHRÉENS##

JÉTHRÉENS (hébreu: hay-Itri; Septante: ’Apai;Vulgate: Jethrei), famille de Juda comptée parmi les famillesde Cariathiarim. I Par., ii, 53. La Vulgate rendailleurs par Jethrxus et Jethrites le mot hébreu qu’ellerend ici par Jethrei. Voir Jéthrite.

    1. JÉTHRITE##

JÉTHRITE (hébreu: hay-îtrl; Septante: 4’EOipato;,ô’Eôevaîoç, h’Ieôpt; Vulgate: Jethrites, Jethrseus, Jethrei),descendant de Jéther ou originaire de la ville deJéther. Les mots hébreux formés par la désinence’, «,désignent tantôt la descendance généalogique, tantôt lelieu d’origine. L’Écriture parle des Jethrites, de la tribude Juda (Jethrei) comme formant une tamille de Cariathiarim,I Par., ii, 53, et de deux Jethrites qui vivaientdu temps de David. Il est difficile dans ces passages dechoisir entre cette double signification hébraïque; riendans le contexte ne permet de préciser. Deux des soldatsde David, Ira et Gareb, sont appelés «Jethrites» (Jethrseus, Jethrites), II Reg., xxiii, 38; I Par., xi, 40,soit qu’ils fussent fils d’un Jéther, soit qu’ils fussent nésdans une ville du même nom. Voir Gareb 1, col. 105.Nous savons seulement par I Par., ii, 53, que les Jethritesou Jéthréens (Vulgate: Jethrei) étaient de latribu de Juda et par I Reg., xxx, 27, que David, pendantla persécution de Saul, avait habité dans les paragesde la ville de Jéther, ꝟ. 31, et avait envoyé à ses habitantsune partie du butin pris sur les Amalécites. Voiraussi Ira 1, col. 921, Jairite.coI. 1111, et Jéthréens.

    1. JÉTHRO##

JÉTHRO (hébreu: Yîtrô ou Fêter; Septante: ’IoGo’p),le beau-père de Moise. — 1° Une difficulté se présentetout d’abord au sujet de l’identité du personnage qui paraitavoir porté différents noms. Il est dit, Exod., ii, 18,que Moïse épousa Séphora, fille de Raguel, le madianite.Ailleurs, le beau-père, hôtên, de Moïse est appelé Jéthro,prêtre de Madian. Exod., iii, 1; iv, 18. Enfin, Hobabest aussi nommé le fils de Raguel le madianite et lebeau-père, hôtên, de Moïse. Num., x, 29; Jud., iv, 11.Voir Hobab, col. 725. Comme Hobab est formellementprésenté en qualité de fils de Raguel, il faut, pour concilierles textes, prendre hô(ên dans un autre sens quecelui de beau-père. La chose est possible en hébreu, oùles noms qui désignent la parenté comportent généralementune grande latitude de sens. Voir Fils, t. ii,col. 2252; Frère, col. 2403. D’ailleurs en araméen et enarabe, hatan, en assyrien hatanu, désignent à la fois larelation de beau-père à gendre et celle de mari à beaufrère. Cf. Buhl, Gesenius* Handwôrterb., Leipzig, 1899,p. 288. Hobab a donc été vraisembablement non le beau-père,mais le beau-frère de Moïse. Quant à Raguel, c’estle même personnage que Jéthro, puisque l’un commel’autre est madianite et beau-père de Moïse, et que cettedouble qualité est rappelée, sous les deux noms différents,à quelques versets de distance. Exod., ii, 18; III,1; IV, 18. Comme Jéthro était prêtre de Madian, il neserait pas impossible que le mot re’û'êl, ’Pafou^X, Raguel,qui veut dire «ami de Dieu», indiquât sa fonction,de même que l’expression rê’éh hanvmélék, «amidu roi,» est le titre d’une dignité à la cour. II Reg., xv,37; xvi, 16; III Reg., iv, 5. Voir Ami 2, 7°, t. i, col. 479.Josèphe, Ant. jud., II, xiii, 1; III, m; iv, 1, 2, se serttoujours du nom de Raguel pour désigner le beau-pèrede Moise. Il ajoute que Raguel s’appelait aussi’lztitfa.Xoc,Ant. jud., ii, xil, 1. Ce dernier nom résulte peut-êtrede la combinaison des deux mots hnt7-t~iTy, yétér-re’û'êl,devenus par contraction’îHWiri’, yéfr’û'él, et ensuite, parsubstitution d’un î à un i, biwiiv, yé(eg’û'el. Cf. deHummelauer, In Exodura, Paris, 1897, p. 42. Toujoursest-il que l’identité de Raguel et de Jéthro doit êtremaintenue.

2° Jéthro était prêtre de Madian. Exod., ii, 16; iii, 1-Quandil vint retrouver Moise dans le désert, il bénitJéhovah des merveilles qu’il avait accomplies en faveurd’Israël, le proclama supérieur à tous les dieux et ensuiteoffrit des sacrifices à Élohim. Exod., xviii, 9-12. Il fautconclure de là que Jéthro était prêtre du vrai Dieu,comme Melchisédech. La dignité sacerdotale était attachéeà sa qualité de père de famille, conformément àl’usage patriarcal. À la suite des récits qui lui sont faits,il reconnaît la supériorité de Jéhovah sur tous les dieux,ce qui n’implique nullement que son sacerdoce fût idolâtrique.S’il en eût été ainsi, l’écrivain sacré n’eûtsans doute pas insisté si complaisamment sur ce sacerdoce.Il ne suit pas de là non plus que Jéthro fût unadorateur de Jéhovah. Il adore Dieu, tel qu’il le connaîtpar sa raison et par les traditions patriarcales; il salueen Jéhovah ce Dieu unique, en tant que protecteur etDieu spécial des Hébreux; mais il n’est pas appelé lui-mêmeà l’honorer au même titre et il se contente d’offrirses sacrifices à Élohim. Moïse, Aaron et les anciensd’Israël approuvent son culte en y prenant part, ce qu’ilsn’auraient pu faire si Jéthro eût été un prêtre idolâtrique.Exod., xviii, 12. Si, d’autre part, Jéthro avait honoré defaux dieux avant de connaître Moïse, il est à croire quel’écrivain sacré eût mentionné sa conversion au monothéisme,avant de parler de son sacrifice à Élohim.

3° En quittant la cour du pharaon, Moïse s’était réfugiédans le pays de Madian. Voir Madian. Il y rencontrales sept filles de Jéthro, qui venaient puiser de l’eau à lafontaine et qu’il défendit contre des bergers insolents.Le père, reconnaissant de ce service, offrit l’hospitalitéà Moïse et ensuite lui donna en mariage Séphora, l’unede ses filles. Pendant que Moïse faisait paître les troupeauxde son beau-père, Dieu l’appela à Horeb et luicommanda d’aller délivrer ses frères en Egypte. Exod.,n, 15-ui, 2. Moise prit donc congé de Jéthro, qui lui répondit: «Va en paix!» Exod., iv, 18. — Moïse avait passéla mer Rouge avec tout son peuple et venait de vaincreles Amalécites, quand Jéthro, au récit de tout ce quis’était passé, vint au-devant de son gendre. Il amenaitavec lui Séphora, qui avait quitté son mari avant l’arrivéeen Egypte, Exod., iv, 24-26, et les deux fils de Séphora,Gersam et Éliézer. L’entrevue fut cordiale, malgréle mécontentement que Séphora avait dû manifestercontre Moïse en revenant chez son père. Exod., xviii, 1-7.Voir Séphora. Moïse raconta tout ce que Dieu avait faitpour son peuple. Jéthro prévoyait sans doute que leshommes de sa tribu ne tarderaient pas à se heurter auxHébreux, que la lutte éclaterait entre les deux peuples,Num., xxv, 16-18; xxxi, 3-12, et que les Madianites

pourraient partager le sort des Amalécites. II lui importaitdonc personnellement de s’assurer les bonnes grâcesd’un homme devenu aussi puissant que son gendre. Ilapplaudit à tout ce que Moïse lui raconta, bénit Jéhovah,le Dieu d’Israël, des merveilles accomplies pour châtierla méchanceté des Égyptiens et offrit à Dieu un sacrificedont Moïse et les principaux d’Israël mangèrent aveclui les victimes. Exod., xviii, 1-12. Jéthro ne se bornapas à ces félicitations. Le lendemain, il fut témoin del’emploi que Moïse fit de la journée entière à régler lesdifférends de son peuple. Il trouva cette manière d’agirpeu pratique; les plaignants attendaient indéfinimentleur tour et Moïse s’épuisait à donner tant de consultations.Jéthro lui conseilla donc, avec l’autorité que luiconférait l’âge, le sacerdoce et la parenté, de se réserverla haute direction du peuple et le jugement des affairesles plus importantes, mais de confier le règlementdes détails de l’administration et de la justice à deschefs de mille, de cent, de cinquante et de dix. L’établissementde cette hiérarchie judiciaire aurait pour heureuxeffet de permettre à Moise de suffire à sa tâche etau peuple de parvenir à sa destination. Moïse suivit leconseil qui lui était donné et tout le monde s’en trouvabien. Jéthro n’attacha pas son sort à celui des Hébreux.Il quitta Moïse et retourna dans son pays. Exod., xviii,13-27. À partir de ce moment, il n’est plus fait mentionde Jéthro. Mais son fils Hobab et ses descendants héritèrentde ses sentiments et se rendirent utiles auxHébreux, durant leur séjour dans le désert. Num., x,29-32; Jud., i, 16; iv, 11, 17; I Reg., xv, 6. Voir Hobab,col. 725, et Cinéen, i, 3*, t. ii, col. 768.

H. Lesêtre.

    1. JETHSON##

JETHSON (Codex Vaticanus: AEx|ji<iv; Alexandrinus:reSswv), ville lévitique, située à l’est du Jourdain,dans la tribu de Ruben, et donnée aux Méraritesd’après la Vulgate. Jos., xxr, 36. Ce nom est probablementaltéré, car il ne se rencontre nulle part ailleurs,pas même dans la Vulgate dans le passage parallèle deIPar., vi, 77-79. Le ꝟ. 36 lui-même dans lequel nous letrouvons diffère dans tous les anciens teites. Cf. C. Vercellone,Varias lectiones Vulgatse lahnse, Rome, 1864,t. ii, p. 68-70. «Ce verset, dit Calmet, Commentairehuerai, Josué, 1720, p- 301-303, ne se lisait point dansles anciens exemplaires hébreux des Massorètes, nidans le fameux manuscrit d’Hillel (col. 712), ni dans lecorps de l’édition de Venise, ni dans plusieurs anciensmanuscrits latins, quoiqu’on le trouve dans quelquesautres plus nouveaux… On voit encore des manuscritshébreux où il manque quelques mots de ce verset.Enfin ce passage est transposé dans quelques’éditionslatines où les villes de la tribu de Gad qui furent cédéesaux lévites sont marquées avec celle de Ruben. Il y atoute apparence que saint Jérôme n’avait pas ce passagedans ses exemplaires hébreux et que, s’il l’a mis danssa version latine, il l’a pris sur le grec des Septante,auquel sa traduction est tout à fait semblable [exceptéque Dekmôn y figure au lieu de Jethson], mais non pasau texte hébreu, comme on le verra ci-après. Les Septantepouvaient l’avoir lu dans les anciens livres hébreuxde leur temps, ou peut-être l’ont-ils tiré des Paralipomènes(I Par., vi, 78-79), pour suppléer ce qui manquaitici. Mais ce qui peut faire croire qu’il était autrefoisdans l’hébreu, c’est que la version des Septanten’est pas tout à fait semblable au texte hébreu des Paralipomènes,et que dans la somme des douze villes quifurent données aux Mérarites, celles de Ruben y sont nécessairementcomprises, car sans elles il n’y en auraitque huit. Le syriaque semble avoir aussi ajouté ce passageà ses exemplaires, puisqu’il le place avant lesꝟ. 34et 35 qui comprenaient les villes détachées de Zabulonpour être données aux Lévites. Tout ce mélange et toutesces variétés prouvent visiblement que les anciens ma-.Buscrits originaux ont été mal conservés en cet endroit. I

Voici l’hébrea de ce passage comme il se lit dans noséditions communes: «Et de la tribu de Ruben, Bézer et «ses faubourgs (ou ses champs); Jazar et ses faubourgs; «Cédémoth et ses faubourgs; Méphaath et ses faubourgs, «ce qui fait quatre villes.» Les Paralipomènes portent: «Et au delà du Jourdain, vis-à-vis de Jéricho, à l’orient «du Jourdain, [on leur donna] de la tribu de Ruben, «Bézer dans le désert, et ses faubourgs; Jaza et ses faubourgs;Cadémot et ses faubourgs; Méphaat et ses faubourgs;» ce qui est, comme on voit, assez différent denotre texte hébreu. Les Septante approchent beaucoupplus de l’hébreu des Paralipomènes, mais ils ne lui sontpoint encore semblables. Les voici à la lettre: «Et les «villes du Jourdain, Jéricho de la tribu de Ruben, une «ville de refuge pour celui qui a tué; Bosor et ses champs, «Jazeret ses champs; Cedzonet ses champs; Masphaa et «ses champs, quatre villes. «Enfin, notre Vulgate estdifférentede tous ces textes en ce qu’elle met cinq villes,savoir Bosor, Misor, Jazer, Jethson et Masphaath, etqu’aussitôt après elle n’en compte que quatre, et quedans la totalité des villes de Mérari elle n’en reconnaîtque douze. Mais Aquila et Symmaque ont cru que Misorde cet endroit signifie simplement la plaine ou le désertdans lequel Bosor était située, et, en effet, on trouvequelques passages (Deut., iv, 43; Jos., xx, 8; Jer., xlviii,21) où Misor est pris dans ce sens, lorsqu’on parle despays où était située la ville de Bosor et quelques autresvilles des campagnes de Moab.» Par tout ce qui précède,on voit que Jethson tient dans Jos., xxi, 36, la placequ’occupe Cadémoth dans les autres textes et dans lepassage parallèle I Par., vi, 79. Il faut donc vraisemblablementlire ici Cadémoth, ville dont le site est inconnu.Voir Cadémoth, t. ii, col, 12. Les critiques reconnaissentd’ailleurs généralement que le ꝟ. 36 de Josué, xxi, estauthentique et que Rabbi Jacob ben Chajim le supprimaà tort, sur l’autorité de Kimchi et de la grande Massore,dans son édition de la Bible rabbinique (1525). VoirA. Knobel, Numeri, Deuteronomium und Josua, 1861,p. 474; Frd. Keil, Biblisches Commentar, Josua, 1874,p. 168. F. Vigouroux.

    1. JÉTHUR##

JÉTHUR (hébreu: Yetûr; Septante r’Iexoùp, ’lerrovp;Vulgate: Jethur, Jetur), descendant d’Ismæl qui fut lepère des Ituréens. Gen., xxv, 15; I Par., i, 31. Voirliurée,col. 1039.

    1. JÉTRA##

JÉTRA (hébreu: l(ra’; Septante: ’Ie6sp, II Reg.,xvii, 25; ’Ioèo’p, I Par., ii, 17), père d’Amasa, qu’il eutd’Abigail, sœur de David. Il fut donc beau-frère de Davidet oncle de Joab, d’Abisai et d’Asæl, les trois filsde Servia. Était-il Ismaélite ou de Jezræl ou bien est-ilqualifié simplement d’Israélite? C’est là un point controversé,à cause du désaccord des anciennes versions etdu texte original lui-même, qui a deux leçons différentes,II Reg., xvii, 25 et I Par., ii, 17. Voir Jezrahélite,col. 1544, et Abigaïl 2, t. i, col. 49. Dans III Reg., ii,5, 32, il est appelé Jéther. Voir Jéther 2, col. 1519.

JEU (hébreu: iâfraq; grec: itac’Çeiv; latin: ludere, «jouer» ), action de jouer, amusement, divertissement.

— 1° Amusements des enfants et des adultes. — Les enfantschez le peuple juif, comme partout, se livraientaux amusements de leur âge et il est plusieurs foisfait allusion à leurs jeux dans la Bible. «Les rues dela ville sont remplies de jeunes garçons et de jeunesfilles jouant dans les rues,» dit Zacharie, viii, 5. Cf. Job,xxi, 10. Les enfants s’amusaient aussi avec des animaux.Il est fait allusion à ces jeux dans Job, XL, 24 (xli, 5).Dieu demande à son serviteur s’il jouera avec le crocodilecomme avec un oiseau ou s’il l’attachera pour l’amusementdes jeunes filles. Ils imitaient aussi les cérémoniesdes mariages et des funérailles, comme le fontles enfants d’aujourd’hui. Matth., xl, 16; Luc, vii, 32.

Voir Le Camus, Les enfants de Nazareth, in-12, Paris,1900. Saint Paul fait allusion aux jeux de l’enfance,quand il dit que, devenu homme, il a laissé de côté leschoses enfantines. I Cor., xiii, 11. — Parmi les amusementscommuns aux enfants et aux adultes était enpremière ligne la danse; c’est pourquoi ce jeu est désigné,entre autres expressions, par le mot sihaq, formepihel de éâhaq, «jouer, o Voir Danse, t. ii, col. 1286. LesHébreux s’amusaient aussi à se poser des énigmes. Jud.,xiY, 12; Ezech., xvii. Voir Énigme, t. ii, col. 1807.Comme tous les Orientaux, ils préféraient la conversationaux jeux qui donnent du mouvement.

2o Jeux grecs et romains.

Les jeux publics, c’est-à-dire

les spectacles qui consistaient dans des exercicesd’adresse, des combats d’athlètes et d’animaux, étaienttout à fait contraires aux mœurs juives, aussi l’érectiond’un gymnase pour des exercices de ce genre par Jasonfut-il considéré comme un acte de paganisme. I Mach.,i, 14; II Mach., ix, 12-14. Voir Gymnase, t. iii, col. 369.L’érection par Hérode le Grand d’un théâtre et d’unamphithéâtre à Jérusalem, Josèphe, Ant. jud., XV, viii,1, à C Jsarée, Ant. jud., XV, ix, 6, Bell. jud, ., i, xxi, 8,et à Béryte, Ant. jud., et l’institution dans ces mêmesendroits de jeux quinquennaux comprenant les concourshabituels d’athlètes, les courses de chars et des combatsde bêtes féroces, furent vus de très mauvais œil parles Juifs. Ant. jud., XV, viii, 1. — Dans le Nouveau Testament,il est souvent fait allusion aux jeux de cirque.Saint Paul en particulier emprunte plusieurs comparaisonsaux usages observés dans ces jeux. Act., xx, 24;Rom., ix, 16; I Cor., ix, 24-27; Gal., ii, 2; v, 7; Eph.,vi, 12; Philip., i, 30; ii, 16; iii, 12-14; Col., ii, 1;I Thess., ii, 2; I Tim., iv, 8; vi, 12; II Tim., ii, 5;iv. 7-8; Heb., x, 32, 33; xii, 1, 2. Pour l’explication desdétails voir Athlète, t. i, col. 1222. E. Beurlier.

    1. JEU DE MOTS##

JEU DE MOTS, similitude phonétique entre desmots différents, recherchée par un écrivain pour rendreune pensée plus saillante ou plus facile à retenir. LesOrientaux aiment ces formes de langage et l’on entrouve bon nombre d’exemples dans la Sainte Écriture.On en distingue de plusieurs sortes.

1o Dans les allitérations, l’auteur affecte de répéter lesmêmes lettres ou les mêmes syllabes. La bénédiction deGad par Jacob contient une suite de jeux de mots:

Gâd gedûd yegûdénnû

venu yâgud’âqêb. «Gad, l’armée’l’attaquera, et lui-même lui attaquerale talon.» Gen., xlix, 19. Voir aussi ꝟ. 8, 13, 14, 16, 22.Samson dit aux Philistins:

Lûlê’hara&tèm be’(glati

là mesâ’fém hidâfi, «Si vous n’aviez pas labouré avec ma génisse, vous-n’auriez pas trouvé mon énigme.» Jud., xiv, 18. LesPhilistins disent à leur tour:

Nâtan’êlohénû bfyâdênû’êp àimSôn’ôyebênû. «Notre Dieu a livré en nos mains Samson, notreennemi.» Jud., xvi, 23. Sur le passage de David, vainqueurde Goliath, on répète:

Hikkâh Sâ’ûl bâ’âlâfâv

ve-Dâvtd benbboâv. «Saùl a frappé ses mille, et David ses dix mille.» I Reg., xviii, 7. Ces assonnances, avec recherche de larime, se remarquent dans les dictons populaires de tousles pays. Souvent l’allitération existe entre les deuxmots principaux d’une sentence. «Le nid, qên, du Cinéen,qaîn, sera ravagé.» Num., xxiv, 21. «L’hommecomprend en insensé, nâbûb illâbêb.» Job, xi, 12. «Demande, et je te donnerai les peuples pour ta possession,na&àîâfe’fcô, et les extrémités de la terre pourton domaine, ’âhuzzâfékâ.» Ps. ii, 8. «Que l’hommequi vient de terre, ’érés, ne persiste pas à terrifier, ’âros.» Ps. x, 18. «Beaucoup le verront, yîr’û, et lerévéreront, yîrd’û.» Ps. xli (xl), 4. Cette allitérationentre les deux verbes râ’âh, «voir,» et yârê’, «révérer,» se rencontre encore Ps. lui (lu), 8, et Zach.,ix, 5. «La courtisane a oublié, sâkafrâh, l’alliance deson Dieu, c’est pourquoi sa maison penche, sâhâh, versla mort.» Prov., ii, 18; cf. iv, 18. — La recherche del’assonnance, sous ses différentes formes, est fréquentedans les prophètes: «Il attendait l’équité, niîspât, etvoici la violence, miSpâh, la justice, sedâqâh, et voici xdes cris de détresse, se’âqâh.» Is., v, 7. «Pour leurdonner un diadème, pe’êr, au lieu de cendre, ’êfér.» Is., lxi, 3. Le Seigneur dit à Jérémie: «Que vois-tu,Jérémie? Je répondis: Je vois une branche d’amandier,Saqêd. Et Jéhovah me dit: Tu as bien vu car jeveille, Soqêd, sur ma parole pour l’exécuter.» Jer., i,11, 12. On lit encore dans Jérémie, vi, l: Biteqô’a fîq’ùSôfâr, «dans Thécué sonnez de la trompette.» DansOsée, ii, 12: «Je détruirai son figuier, fêênàdh, dontelle dit: C’est mon salaire, ’éfenâh.» Le même prophètejoue ainsi sur le nom d’Éphraim: Yafrî’, «ilest fertile.» Ose., xiii, 15. Joël, i, 15, compare le malheurau désastre, Sod, qui vient du Tout-Puissant,êdddai. Pour dire: «Galgala sera menée captive,» Amos,v, 5, se sert des trois mots suivants: Gilgdl gâlohigléh. On trouve dans Michée: Bdko’al-fibkû, «nepleurez pas dans Acco,» et immédiatement après: lo’yâs’àh yôUbéf sa’ândn, «elle ne sort pas l’habitante deZaanan,» Mich., i, 10-11. Dans ce passage, Michée fait,sur dix noms de villes, autant de jeux de mots. VoirAccho, iii, t. i, col. 110. Sophonie, ii, 4, dit de même: ’Azzâh’âzzûbâh, «Gaza sera détruite.» Mais les allitérationsles plus remarquables sont celles de Danielprononçant la sentence contre les juges iniques qui ontcalomnié Susanne. L’histoire de Susanne n’existe quedans le texte grec. Au vieillard qui prétend avoir vuSusanne ûtio s/ïvov, sub schino, «sous un lentisque,» Daniel répond: L’ange du Seigneur (r/tuct as yiuov,scindet te médium, «te coupera par le milieu.» À celuiqui dit l’avoir vue ûjtb ïcpivov, sub pnno, «sous unchêne,» Daniel répond: L’ange du Seigneur va itp! <rat(ré (ié(iov, ut secet te médium, «te fendre en deux.» Dan., xiii, 54-59. On ne peut dire si le jeu de mots aexisté en hébreu ou en chaldéen, si le texte grec letraduit littéralement ou s’il se contente de le rendrepar des équivalents. Ce qui est certain, c’est qu’en hébreudes assonnances analogues sont possibles, parexemple, entre le nom de l’arbre appelé firzdh, probablementune sorte de chêne, Is., xliv, 14, et le verberâzdh, «faire périr,» Soph., ii, 11; entre’éldh, nomd’une espèce de térébinthe, Gen., xxxv, 4, et le verbe’âldh, «maudire.» D’autres exemples ont été cités parles commentateurs. La traduction syriaque a conservéle jeu de mots, mais en employant des termes différents:pîsteqâ, , n pistachier,» elpesak, «couper;» rimmônà’, «grenadier,» et rum, «enlever.» Cf.Frz. Delitzsch, DeHabac. prophet. vita atque setate, Leipzig, 1842, p. 102;Trochon, Daniel, Paris, 1882, p. 11-12; Vigouroux, Susanne,dans les Mélanges bibliques, 1 }’édit., p. 477-483.2o Les écrivains sacrés jouent encore sur les mots enrépétant le même terme, quelquefois sous des formesdifférentes, dans une même phrase. Job, xxx, 3, parlede malheureux dans des déserts qui sont déjà Mâh, «dénudation,» et mes’ô'âh, «dévastation.» On lit auPs. xxxvi (xxxv), 10: Be’ôrkâ mr’éh’ôr, «à ta lumièrenous verrons la lumière,» et au Ps. cxxv (cxxiv), 4:Hètibàh laltobim, «fais du bien aux bons.» Un touranalogue, suivi d’une allitération, se trouve au Ps. cxxii(cxxi), 6, 7: èâ’àlû selôm YerûSdldim, * implorez la

paix pour Jérusalem;» «que la paix, selôm, soit danstes murs, et la tranquillité, salvàh, dans tes palais.» Les Proverbes, xxx, 33, offrent on exemple curieux deces sortes de répétitions:

Jlffe hâlâb yôs? Iiém'âh,Umis 'afydsi' dâm,Umîs 'affayim yôyi' rib. «La pression du lait amène la crème, la pression dunez amène le sang et la pression de la colère amène laquerelle.» Isaie a une prédilection pour ces jeux demots. En voici plusieurs exemples: 'tm lo' ta'âmînûkî lo' fa'âmênû, «si vous ne croyez pas, vous ne résisterez pas.» Is., vii, 9. Le verbe 'aman a le double sensde «avoir la foi» et «être solide». «Jéhovah te lancera, metaltélkd, avec une force virile, taltêlàh; il t’enveloppera comme une pelote, 'otkâ 'atôh, roulant il tefera rouler comme une balle, sânôf isnofkà senêfdh.» Is., XXII, 17, 18. Bogdim bdgâdû ûbégéd bogdim bâgâdû, «les pillards pillent, c’est un pillage que les pillardspillent,» Is., xxiv, 16, manière de dire que tout n’estque pillage et que les pillards sont incorrigibles. LesIsraélites pervertis se moquent en ces termes des recommandations du prophète: $av lâsav sav lâsav, qâvlâqâv qâv Idqâv, le'îr Sâm ze’ir Sâm, «précepte surprécepte, précepte sur précepte, règle sur règle, règlesur règle, un peu par-ci, un peu par-là.» Is., xxviii, 10.Hâyefdh (â'ânyyâh va'ânyyâh, «il y aura plainte etgémissement.» Is., xxix, 2. Voici un dernier exempledans lequel les mots se correspondent: «Malheur auravageur, sôdêd, non ravagé, Mdûd, au pillard, bôgêd,non pillé, bâgdû; quand tu auras fini d'être ravageur,Sôdêd, tu seras ravagé. fûésad; quand tu auras finid'être pillard, bôgêd, on te pillera, îbgedû.» Is., xxxiii,1. Dans Jérémie, le jeu de mots devient plus compliqué.L’exemple suivant présente une répétition de mots et desassonnances de syllabes: «Revenez, subû, chacun dela voie mauvaise, hârâ'âh, et de la malice, ro’a, de vosactions, ma' allêkém, et vous habiterez, Sebû, sur laterre, hâ' âdâmâh, que le Seigneur a donnée à vous età vos pères, la' âbôtékém.» Jer., xxv, 5. Mais le cas le^ plus curieux se présente dans une phrase en chaldéenque le prophète insère dans l’un de ses oracles, et queles Israélites devront retenir pour l’opposer aux tentations d’idôlatrie: '

Elâhayyâ' di-Semayyâ' ve’arqâ' là 'âbadù,yê'badû mê'ar'â' ûmin-(ehô{Semayyâ' 'êlléh. «Les dieux qui les cieux et la terre n’ont pas fait disparaîtront de la terre et de dessous les cieux, eux.» Jer,x, 11. On remarquera la singulière contexture de cettephrase. Le dernier terme «eux» répond au premier «les dieux»; l’avant dernier «de dessous les cieux»,au second «les cieux», et ainsi du reste. Il y a de plusune assonnance très accentuée entre 'âbadû et yébadû.Il fallait cette construction artificielle et mnémotechnique pour que les Israélites pussent garder dans leursouvenir cette sentence en une langue qui leur étaitétrangère, bien qu’analogue à la leur.

3° Les jeux de mots sont plus rares dans le Nouveau Testament. Les deux principaux à signaler consistent plutôt en métaphores destinées à symboliser deschoses supérieures. Notre-Seigneur voit Simon etAndré qui pèchent, et il leur dit: «Venez, je ferai devous des pêcheurs d’hommes,» âXieïç àv6pw ?r&>v, piscatores hominum. Il est clair que le mot «pêcheur» prend un sens très différent quand, au lieu de l’appliquer aux poissons, on l’applique aux hommes. — Quandle divin Maître voit Simon, frère d’André, pour la première fois, il lui dit: c On t’appellera Céphas, Krjçïc.» Joa., 1, 43. Le nom araméen kêfâ', correspond à l’hébreu kêf, à l’assyrien kâpu, et ces trois mots signifient «pierre». Plus tard, Notre-Seigneur lui dit: * Tu es

kêfâ', et sur ce kéfd je bâtirai mon Église.» Matth.,xvi, 18. En grec et en latin, il faut faire passer le motdu féminin, xézpot., pelra, au masculin, flérpoc, Petrus,tandis qu’en araméen le mot reste le même, comme dureste en français où le genre ne se manifeste que dansl’adjectif. Le Sauveur change le nom de Simon en celuide Céphas pour le mettre en harmonie avec la vocationde son apôtre. C’est ainsi qu’autrefois Dieu avait changéle nom d’Abram en Abraham et celui de Jacob en Israël; c’est ainsi encore que le pharaon d’Egypte avaitdonné à Joseph un nouveau nom. Gen., xli, 45. D’ailleurs on cherchait souvent, dans l’Ancien Testament, àétablir une relation entre le nom donné à l’enfant etcertaines circonstances qui attiraient l’attention à sanaissance. Voir Nom. Des jeux de mots proprement ditsse rencontrent dans d’autres passages: Atjxoi xort Xotpoé,Luc, xxi, 11; àmivéTouç, àmivTSTouç, Rom., i, 31, etc.Voir Vigouroux, Manuel biblique, 11e édit., t. ii, n° 604,p. 283.

4° Il y aurait grave erreur à ne voir que futiles jeujcd’esprit dans ces formes de langage que recherchentparfois les écrivains sacrés. Ces allitérations et ces assonnances marquaient avec succès la ressemblance oul’opposition des choses et servaient à les graver dans lamémoire. «Tant qu’une nation, dit Herder, a plus desensations que de pensées, tant que le langage est pourelle dans la bouche et dans l’oreille, au lieu de nes’adresser qu’aux yeux par la forme des lettres, tantqu’elle a peu ou point de livres, ces assonnances luisont aussi nécessaires qu’agréables. C’est une source desouvenirs où les peuples neufs puisent cette concisionénergique, cette justesse et cette rapidité d’expressionqui devient impossible dès qu’on trace des lettres pourexprimer sa pensée. Il serait ridicule, extravagant, dechercher à imiter les locutions hébraïques dans leslangues modernes, mais il serait tout aussi ridicule, toutaussi extravagant, de blâmer la naïveté du langage, lesconcordances du son et de la pensée qui établissent unlien harmonieux entre l’oreille et l'âme, et qui caractérisent l’enfance d’un peuple.» Herder, Histoire de lapoésie des Hébreux, trad. Carlowitz, Paris, 1851, p. 464.— Voir W. Gesenius, Lehrgebaude der hebrâischen.

Sprache, in-8°, Leipzig, 1817, p. 856; G. W. Hopf, Allitération, Assonam, Reim in der Bibel, in-8° Erlangen, 1883.

H. Lesêtre.

    1. JEUNE##

JEUNE (hébreu: sâm, et une fois ta'ânît, I Esd., rx,5, substantif correspondant à l’expression 'innâh nafsô,TometvoOv viv’t/vyr(v, affligere animant suam, Lev., XVI,29, 31, etc.; chaldéen: tevât; Septante: v^triet’a; Vulgate:jejunium), abstinence de tout aliment pendant un tempsprolongé, ordinairement pendant tout un jour.

La loi du jeûne.

1. Le dixième jour du septième

mois, c’est-à-dire à la fête de l’Expiation, tout Israélitedoit «affliger son âme». Lev., xvi, 29, 31; xxiii, 27, 32;Num., xxix, 7. Voir Expiation (Fête de l'), t. ii, co!.,2137. L’expression «affliger son âme» signifiait «jeûner», ainsi qu’il résulte du simple nom de «jeûne» donné à la fête de l’Expiation. Act., xxvii, 9; Josèphe,Ant.jud., lll, X, 3; S. Jérôme, Ep. cxxx, ad Demetriad.,10, t. xxii, col., 1115. D’après Lev., xxiii, 32, la fêtecommençait le neuvième jour au soir et se prolongeaitjusqu’au lendemain soir. Le texte sacré semble comprendre le jeûne dans les mêmes limites; un simplejeûne dedouze heures eût, en effet, constitué une pénitenceassez légère. — 2. Outre ce jeûne obligatoire et public,la Loi prévoyait des jeûnes facultatifs et privés, puisqu’elle stipule que si une femme a fait vœu d' «affligerson âme», il appartient au mari de ratifier ou d’annulerce vœu. Num., xxx, 14.

L’esprit de la loi.

Le jeûne ne comportait pas

une simple privation d’aliments, comme celle que s’imposaient les Égyptiens. Hérodote, ii, 40; iv, 186. L’exprès

sion dont se sert le législateur, Hnnâh nafsô, signifie «affliger» et «humilier son âme», c’est-à-dire privermomentanément sa vie de tout ce qui peut en fairel’agrément et l’orgueil. Cette expression se rapporte doncau but moral et religieux du jeûne, tandis que le motsôm ne s’applique qu’à l’acte en lui-même. Or, selon sacoutume, si la Loi prescrit une pratique afflictive, c’estpour arriver à produire dans le cœur même des sentimentscorrespondants de deuil, de repentir et de renoncement,autant que l’homme en est capable.- C’est pourcela qu’elle fait du jeûne comme la caractéristique de lafête de l’Expiation, dans laquelle les Israélites avaientsurtout à se repentir de leurs péchés. Cl. Bàhr, Symbolikdes mosaischen Cultus, Heidelberg, 1839, t. ii,p. 674. D’ailleurs 1’& affliction de l’âme» comprenaitencore, outre la privation d’aliments, celle de toutes leschoses agréables à la vie, le bain, les onctions, leschaussures, l’usage du mariage, etc. Siphra, 252, 2. Dansquelques circonstances plus graves, on ajoutait mêmeAi jeûne certaines démonstrations extérieures, on revêtaitle cilice, on déchirait ses vêtements, on répandaitde la cendre sur sa tête, etc. En un mot, toutes les abstentionset toutes les démonstrations auxquelles on sesoumet naturellement sous l’empire d’une profonde douleur,on les reproduisait à des jours donnés, non seulementpour signifier, mais encore pour exciter intérieurementle repentir du péché. Un passage d’Isaie nousfournit à la fois la description des pratiques extérieuresdes Israélites qui jeûnaient, et l’indication des sentimentsque le Seigneur exigeait d’eux. Les Israélites seplaignent que Dieu n’a pas égard à leur jeûne: «Pourquoijeûner si tu ne le regardes même pas? Pourquoihumilier notre âme si tu n’y prends pas garde?» EtDieu répond: «C’est que, le jour de votre jeûne, vousn’en faites qu’à votre volonté et vous exigez tout de vosmercenaires. En jeûnant, vous ne rêvez que disputes etquerelles, que brutalités et coups de poing. Vous nejeûnez pas comme il le faudrait en un pareil jour, pourque voire voix soit entendue là-haut. Est-ce là le jeûneque j’aime, le jour où l’homme afflige son âme? Inclinerla tête comme un jonc, et se coucher sur le sac et lacendre, est-ce là ce qui s’appelle un jeûne, un jour quiplaise au Seigneur? Voici le jeûne que je veux: Brisezles chaînes injustes, relâchez les courroies du joug, pourrenvoyer libres tous les opprimés et cesser toute espècede tyrannie. Partagez votre pain avec l’affamé, recueillezchez vous les malheureux sans asile, couvrez celui que-vous voyez sans vêtement et ne dédaignez pas celui quiest votre propre chair.» Is., lviii, 3-7. À la pratiqueafflictive du jeûne, il fallait donc joindre les œuvres dejustice et de miséricorde. Jérémie, xiv, 12, dit que leSeigneur ne veut tenir aucun compte des jeûnes et dessupplications de ceux qui lui sont infidèles. L’Ecclésiastique,vu, 19, recommande d’«affliger beaucoup sonâme, puisqu’il y aura le feu et le ver pour punir l’impie»;par conséquent il faut jeûner et faire sérieusement pénitenceen ce monde pour éviter le châtiment futur. Ilajoute: «L’homme qui jeûne pour ses péchés et lescommet de nouveau, à quoi sert son humiliation et quiexaucera sa prière?» Eccli., xxxiv, 31. Le repentir etleferme propos sont donc inséparables du jeûne. La prière «st encore un des éléments qui doivent s’y joindre. Tob.,m, 8.

Les jeûnes publics extraordinaires.

Outre le

jeûne de la fête de l’Expiation, des jeûnes publics étaientordonnés en certaines circonstances. Ainsi tout le peuple,ou du moins une partie notable du peuple jeûne pourexpier certaines fautes générales, I Reg., vii, 6; Jer.,xiv, 12; xxxvi, 9; Bar., i, 5; Joël, i, 14; ii, 15; II Esd.,IX, 1; avant d’entreprendre la guerre, Jud., xx, 26; IIPar., xx, 3; II Mach., xiii, 12; à la mort d’un roi, I Reg.,xxxi, 13; I Par., x, 12; pour détourner un malheurpublic, Judith, iv, 8, 12; Esth., iv, 3, 16, etc. Le prophète Joël, i, 12-n, 17, décrit ce qui se passait dans lesdeuils publics qui étaient accompagnés de jeûne. VoirDeuil, t. ii, col. 1399. C’est ainsi qu’au nom d’Achab,Zézabel fit publier un jeûne pour expier un blasphèmecalomnieusement imputé à Naboth, qu’on fit périr pourprendre sa vigne. III Reg., xxi, 8-14. — On lit dans laprophétie de Jonas, iii, 5, 7, qu’un jeûne public de pénitencefut imposé à tous les habitants de Ninive, du pluspetit au plus grand, et que l’obligation porta même surles animaux. Le jeûne imposé aux animaux n’est là quepour marquer la rigueur de la pénitence. Virgile, Eclog.,v, 25-26, fait de même jeûner les quadrupèdes à la mortde Daphnis.

Les jeûnes particuliers.

Ces jeûnes sont pratiqués

pour les raisons les plus diverses. David jeûnetout un jour à l’occasion de la mort de Saul, II, Reg., 1,12; il jeûne, plus tard, pour obtenir la guérison de sonenfant malade, mais il cesse le jeûne, comme inutile,aussitôt que l’enfant a fini de vivre. II Reg., XII, 16, 2123. Réprimandé par Élie, le roi Achab jeûne et détournede sa personne la vengeance divine. III Reg., xxi, 27-29.Les Psalmistes jeûnent en esprit de pénitence et pourappeler le secours de Dieu. Ps. lxviii (lxix), 11; cvm(cix), 24. L’un d’eux jeûne quand il voit ceux qui sontautour de lui tomber malades. Ps. xxxiv(xxxv), 13. Sara,fille de Raguel, jeûne trois jours et trois nuits pourobtenir que Dieu la délivre des obsessions du démon.Tob., iii, 10. Esther, xiv, 2, jeûne et prie pour que leSeigneur protège son peuple contre les projets homicidesd’Aman. Daniel, IX, 3, jeûne pour que l’époque de lavenue du Messie lui soit révélée. Esdras jeûne et faitjeûner pour s’assurer un heureux retour à Jérusalem.I Esd., viii, 21. Il jeûne de nouveau pour déplorerles mariages des Juifs avec des femmes étrangères.I Esd., x., 6. Enfin Néhémie jeûne en apprenant lesmalheurs de ses compatriotes. II Esd., i, 4. On jeûnaitdonc non seulement à la suite des malheurs passés,mais encore en vue d’obtenir les biens et d’écarter lesmaux de l’avenir. Il y avait même des Israélites qui prolongeaientle jeûne pendant de longues périodes; telleJudith qui, veuve depuis trois ans et demi, jeûnait continuellementà l’exception de certains jours. Judith, viii,6. Telle encore Anne la prophétesse qui, veuve de bonneheure, jeûnait depuis ce temps et atteignait ses quatrevingt-quatreans. Luc, ii, 37. Il arrivait aussi parfoisqu’on s’engageait à jeûner jusqu’à ce que telle ou tellechose fût accomplie. Tob., vii, 10; Act., xxiii, 21.

Les jeûnes institués après la captivité.

À cette

époque, de nouveaux jeûnes viennent s’ajouter à celuidu septième mois. Zacharie, vii, 5; viii, 19, parle dejeûnes le quatrième, le cinquième, le septième et le dixièmemois. Il est question d’un autre jeûne établi ensouvenir des événements qui s’étaient passés du tempsd’Esther, la veille de la fête des Phurim. Esth., ix, 31.Voir Phurim. La tradition juive, Geni. Jer., Taanith, 68,assigne ainsi l’origine des jeûnes mentionnés par Zacharie:jeûne du quatrième mois, le 17 thammouz, enmémoire du jour où furent brisées les tables de la loi,et où plus tard cessa le sacrifice perpétuel; jeûne ducinquième mois, le 9 ab, en souvenir de la ruine duTemple; jeûne du septième mois, le 3 tischri, en mémoiredu meurtre de Godolias, IV Reg., xxv, 25; jeûnedu dixième mois, le 10 tébeth, pour rappeler le siège etla prise de Jérusalem par les Chaldéens. Cependant leRosch hasschana, 18, 5, rapporte ce dernier événementau 9 tamnuz. Saint Jérôme, In Zachar., ii, 8, t. xxv,col, 1475, établit ainsi, d’après les Juifs eux-mêmes, la significationde ces quatre jeûnes: jeûne du quatrièmemois, pour rappeler les tables de la Loi, brisées parMoïse, Exod., xxil, 19, et la démolition des murs de Jérusalempar les Chaldéens, Jer., iii, 14; jeûne du cinquièmemois, pour rappeler d’abord la sédition des! Hébreux au retour des explorateurs de Chanaan et le

long voyage au désert qni en fat la conséquence, Num.,siv, 1-25, ensuite l’incendie du Temple par Nabuchodonosor et par Titus, et le massacre des Juifs à Béthersous Adrien, voir Béther, t. i, col. 1684; jeûne duseptième mois pour le meurtre de Godolias et la dispersion des derniers habitants de Jérusalem, IV Rcg., xxv,25, 26; jeûne du dixième mois, en mémoire du jour oùEzéchiel et les Juifs captifs apprirent la ruine du Temple,arrivée au cinquième mois. Ezech., xxiv, 1. On voitqu’aux raisons assignées à l’institution des quatre jeûnes,à l'époque de Zacharie, s’en ajoutèrent d’autres dans lasuite des temps. — À l'époque évangélique, les Juifsobservaient des jeûnes tous les mois. Voici la liste de cesjeûnes et des causes qu’on leur assignait: Nisan, 1,mort des fils d’Aaron; 10, mort de Marie; 26, mort deJosué. Jjar, 10, mort d’Héli; 28, mort de Samuel.Sivan, 23, schisme des dix tribus; 25, meurtre de dixmartyrs par les Romains; 26, supplice par le feu deB. Chanina. Thammouz, 17, destruction des tables de laloi, prise de Jérusalem et cessation du sacrifice perpétuel. Ab, 1, mort d’Aaron; 2, interdiction de l’entréedans la Terre promise; 9, ruine du premier et du secondTemple; 18, extinction de la lampe occidentale sousAchaz. Elul,%, mort des explorateurs de la Terre-Sainte.Tischri, 3, mort de Godolias; 5, emprisonnement duB. Akiba; 7, sentence contre les adorateurs du veaud’or; 10, fête de l’Expiation. Marcheschvan, 6, cécité deSédécias. Casleu, 28, le livre sacré brûlé par le roiJoakim. Tébeth, 8, traduction du Pentateuque en grecsous PtoléméePhiladelphe; 9, mort d’Esdras; 10, siègede Jérusalem par les Chaldéens. Schebat, 5, mort desanciens, Jud., ii, 7; 20, réunion de tout Israël contreBenjamin. Jud., xx, 20, 21. Adar, 7, mort de Moïse; 9,désaccord entre Hillel et Schammai; 13, jeûne d’Esther.Cf. Beland, Antiquilates sacrée, Utrecht, 1741, p. 273275; C. Jken, Antiquitates hebraicx, Brème, 1741,p. 148-150. — Le sanhédrin ordonnait encore d’autresjeûnes: trois jours, s’il n’avait pas encore plu au 17marcheschvan; trois autres jours à la nouvelle lune decasleu, si la pluie n'était pas venue; encore trois jours,y si le mois de casleu se passait sans pluie, et ensuitetoute une semaine. Les synagogues particulières prescrivaient aussi des jeûnes locaux, pour écarter les afflictionsqui menaçaient une ville ou un village. Taanith, n. Cf.Josèphe, Tila, 56. — Enfin, par pure dévotion, les Juifszélés, surtout les pharisiens, jeûnaient régulièrementdeux fois la semaine, le deuxième et cinquième jour,lundi et jeudi. On attribuait à Esdras l’institution de cesjeûnes hebdomadaires. JBabyl. Baba Kama, i. 82, 1,Le choix des deux jours indiqués s’inspirait de cettesupposition que Moïse serait monté sur le Sinai le cinquième jour et en serait descendu le second jour. Taanith, II, 9; Jerus. Megillah, ꝟ. 75, 1. Le pharisien de laparabole se vante de jeûner deux fois la semaine. Luc,xviii, 12. À l’exemple des pharisiens, les disciples de Jeanjeûnaient ces mêmes jours, et ils s'étonnaient que lesdisciples de Jésus n’en fissent pas autant. Matth., ix, 14-15;Marc, ii, 18; Luc, v, 33. Il est à noter que la dévotionn'était pas toujours seule à inspirer ces jeûnes. On voyaitdes Juifs s’y astreindre pour des motifs tout futiles, parexemple, se procurer des rêves agréables, arriver à deviner le sens d’un songe, conjurer un présage funeste, etc.6° Les règles du jeûne judaïque.

On constate dans

la Sainte écriture des jeûnes de trois jours et de troisnuits consécutifs sans aucune réfection, Esth., iv, 15;cf. Tob., iii, 10; de sept jours, I Reg., xxxi, 13; I Par.,x, 12; cf. IV Esd., v, 13; vi, 31; de trois semaines,avec abstention de tout mets délicat, Dan., x, 3; et dequarante jours. Exod., xxiv, 18; III Reg., xix, 8; Matth.,iv, 2. Ces derniers, il est vrai, ne comportent aucuneréfection et sont miraculeux; ce sont les jeûnes deMoïse, d'Élie et de Notre-Seigneur. Le jeûne ordinaired’un jour durait vingt-quatre heures, d’un soir à

l’autre. On s’abstenait de tout aliment jusqu’au soir,£<>; êirapaç. II Reg., i, 12; iii, 35; Josèphe, Ant.jud., III, x, 3. Le soir commençait au moment oùl’on pouvait apercevoir au ciel trois étoiles moyennes,ce qui fait dire à Tertullien, Dejejun., 16, t. ii, col. 977,que, pour terminer leur jeûne, les Juifs «soupirentaprès l’ordre d’une étoile lente à paraître». Des docteurs relâchés enseignaient cependant que le jeûne denuit ne signifiait rien, et que l’on pouvait manger etboire jusqu'à ce que l’orient fût éclairé. Taanith, ꝟ. 64,3. C’est ce que font aujourd’hui les musulmans pendantleur jeûne du ramadan. — Il y avait certains jours oùl’on devait s’abstenir de jeûner. Judith, viii, 6, suspendait son jeûne les jours de sabbat, de néoménies et defêtes juives. Cet exemple fit loi. Taanith, t. 66, 1. — Lesfemmes enceintes ou nourrices et les enfants étaient dispensés du jeûne. On les soumettait cependant aux septjeûnes prescrits par le sanhédrin et à celui du 9 ab, ensouvenir de la destruction du Temple. Taanith, i, 6. —Les jours de jeûne, on s’abstenait des choses accessoiresqui contribuent à l’agrément de la vie. Dans le jeûnesimple, il était encore permis de s’oindre et de se lærle visage. Un jeûne plus sévère ne pouvait s’accommoderde ces soins corporels. Matth., vu; Yoma, viii, 1, Jerus.Maasar Scheni, ꝟ. 53, 2; Schabbath, ꝟ. 12, 1, 16-18;Dan., x, 3. Dans le jeûne le plus rigoureux, on ne saluait même plus ses amis, et l’on se répandait de lacendre sur la tête et sur le visage. Taanith, i, 4-7;il; Yuchasin, ꝟ. 59. Schurer, Geschichte des jûdischenVolkes, Leipzig, 1898, t.ii, p. 489-491. Saint 3éiôme, Epist.,xxxix, ad Paulam, 3, t. xxii, col. 470, parlant du jeûnedes Juifs de son temps, écrit: «Us pleurent, vont piedsnus, se roulent dans la cendre et couchent sur uncilice. Et pour compléter la superstition, d’après le riteparfaitement futile des pharisiens, ils prennent ensuitepour premier aliment des lentilles, afin de montrer parquel mets ils ont perdu leur droit d’aînesse.» — Sur lejeûne chez les Juifs, voir les traités du Talmud Yomaet Taanith; Reland, Antiquitates sacræ, p. 270-275;lken, Antiquitates hebraic», p. 147-151, 243-246.

Le jeûne dans le Nouveau Testament.

NotreSeigneur se refuse à astreindre ses disciples à tous les

jeûnes qu’ont institués les docteurs juifs. Ces prescriptions font partie des traditions humaines et des fardeauximpossibles à porter que le divin Maître réprouve siénergiquement. Le jeûne est une pratique de deuil etde pénitence; il ne convient donc pas que les discipless’y livrent pendant que l'Époux est avec eux. Le jeûnene sera pourtant pas proscrit de la loi nouvelle. NotreSeigneur ajoute aussitôt, en effet, que quand il ne seraplus là, ses disciples jeûneront.Matth., ix, 14, 15; Marc,il, 18-20; Luc, v, 33-35. Lui-même donne l’exemple,Matth., iv, 2; Marc, i, 13; Luc, iv, 1, et c’est pour honorer son jeûne dans le désert que l'Église a institué lecarême ou jeûne de quarante jours. Le Sauveur enseigneaussi à ses Apôtres que certains démons ne peuvent êtrechassés que par le jeûne et la prière. Matth., xvii, 20;Marc, ix, 28. Mais il veut que, quand on jeûne, on se dispense des démonstrations extérieures que recherchaientles pharisiens hypocrites. Le chrétien qui jeûne doitavoir le visage lavé et soigné, de manière que les hommesignorent sa pénitence. Matth., VI, 16, 17. — Après laPentecôte, la pratique du jeûne fut familière aux chrétiens. Pendant qu’on jeûne, le Saint-Esprit fait connaître sa volonté sur Saul et Barnabe, et c’est encore'après avoir jeûné que les Apôtres ordonnent ces deuxdisciples. Act., xiii, 2, 3. SaintPaul jeûnait fréquemment.II Cor., vi, 5; xi, 27. Les chrétiens devaient égalementjeûner, bien que les auteurs sacrés ne le mentionnent pasformellement. Cette pratique, recommandée parl’exemplemême de Notre-Seigneur, Matth., iv, 2, était une des conditions nécessaires de la vertu de mortification et du combatcontre les convoitises de la chair. A. Lesêtre.

    1. JEUNESSE##


JEUNESSE, temps de la vie qui s'écoule entre l’enfanceet l'âge mûr.

I. Noms divers.

1° Be^urîtn, vsôtyic, juventus,Eccle., xi, 9; xii, 1, la jeunesse dans toute sa force; lebafyôr, v£<xv(<x{, veavîoxoç, juvenis, Deut., xxxii, 25;Ruth., iii, 40; Is., lxii, 5, etc., est le jeune hommedans tout son développement, de bâl, tar, «choisir,» d’où «homme d'élite», dans l’ardeur de la jeunesse,Buxtorf, Leocicon hebr. et chald., Bâle, 1655, p. 70, àmoins que ce mot ne vienne d’un autre radical bâhar,analogue à celui qui a donné aux guerriers assyriensleur nom de bal}ûUiti.Buiil, Hebr. undaram. Handwôrterbuch,Leipzig, 1899, p. 99. — 2' Yaldût, veÔTï);, adolescentia,Eccle., xi, 9, 10, et dans le sens collectif, Ps.ex (cix), 3, de yâlad, «engendrer, «par conséquent lajeunesse qui se rapproche encore de l’enfance. Le yéléd,TcaiSt’ov, uaiSàpiov, vs «v£o, xo;, puer, adolescens, Gen.,xiv, 23; xlii, 22; III Reg., xii, 8; Dan., i, 4, etc., est lenom donné à Joseph déjà âgé de plus de seize ans;aux jeunes conseillers qui étaient du même âge queRoboam, et avaient par conséquent une quarantained’années, IV Reg., xiv, 21; aux compagnons de Daniel,I, 4, etc. — 3° Nô'ar, v£<5nr|ç, adoïescentia, juventus,seulement dans des textes poétiques. Job, xxiii, 25;Ps. lxxxviii (lxxxvh), 16; Prov., xxix, 21. — Ne'ûrim,veôty);, adoïescentia, juventus, pubertas, l'âge où l’onpeut se marier. Ps. lxxi (lxx), 5, 17; Prov., v, 18; Is.,liv, 6; Mal., ii, 14, etc. — Ne'ûrôf, vs6ty)c, adoïescentia.Jer., xxxii, 30. — Ces trois substantifs se rattachentau mot na’ar, qui veut dire «enfant», maisaussi «jeune homme», vcavtdxo;, icaiSipiov, adolescens,puer. Gen., xxxiv, 19; xli, 12; Is., iii, 4, etc. Salomon,au début de son règne, à l'âge d’au moins vingt ans,puisqu’il mourut vieillard après quarante ans de règne,III Reg., xi, 4, se nomme lui-même un na’ar qâlon,TOtiSâpiov (xtxpâv, puer parvulus. III Reg., iii, 7. Lajeune fille est appelée wa’ardft, veâvi?, ira15£<jxYi, xopântov,puella. Jud., xix, 4; Ruth, ii, 6; Am., ii, 7; Esth., ii,3, etc. — 4° 'Âlûmîm, ve6r/|i;, adoïescentia, Job, xx, 11;xxxiil, 25; Ps. lxxxix (lxxxviii), 46; Is., uv, 4, de’dfam, «être fort,» d’après certains lexicographes. Mais il fautremarquer que 'âlam n’a ce sens qu’en arabe; enhébreu, il signifie toujours «cacher, être caché». Delà vient le nom du jeune homme, 'élém, za.vim.oç, puer,appliqué à David après sa victoire sur Goliath, I Reg.,xvii, 56, et le nom de la jeune fille, 'almâh. "Voir 'Almah,t. i, col. 390. — 5° èafyârôl, de éaJyar, «aurore,» l’aurorede la vie, la jeunesse. Eccle., xi, 10; lxx: avotoe;Vulgate: voluptas. Les versions paraissent avoir lu sikhârôn,Y «ivresse» des plaisirs qui produit la déraison.— 6° Les noms de bên, Mç, filius, «fils,» Cant.,il, 3; Prov., x, 45, et de bat, Ou-râTep, filia, «fille,» Gen., xxx, 13; Canl., ii, 2; Judith, xii, 9; Is., xxxii, 9,servent aussi à désigner le jeune homme et la jeunefille. — Enfin l’adolescent est encore appelé gâdêl, degddal, «grandir,» wopsud(jisvoç, ixeîÇtov, proficiens,crescens. I Reg., ii, 26; II Par., xvii, 12.

II. Jeunes gens et jeunes filles mentionnés dans laBible. — 1° La Sainte Écriture mentionne, à différentstitres, un certain nombre de jeunes gens: Joseph, dontla jeunesse fut remplie d'événements remarquables,Gen., xxxix, 10; voir Joseph; David qui, encore jeunehomme, tua Goliath et parut à la cour de Saul, I Reg.,xvii, 42, 55, voir David, t. ii, col. 1311-1314; Jéroboam,devenu dans sa jeunesse intendant des gens de corvéesous Salomon, II Reg., xi, 28; les «fils des prophètes»,jeunes gens qui s’instruisaient dans les écoles de prophètes,IV Reg., v, 22, voir écoles des prophètes, t. ii,col. 1567; le jeune homme que le prophète Elisée envoyapour sacrer Jéhu, IV Reg., ix, 4-10; Daniel prenant,à l'âge de seize à dix-huit ans, la défense de Susanne,Dan., xiii, 45; voir Daniel, t. ii, col. 1248; les troiscompagnons de Daniel qui, jetés dans la fournaise, chantèrent le cantique appelé Canticum trium pueroruni,Dan., iii, 51-90 (le texte les appelle cependant gubrin,viri); les sept frères Machabées qui souffrirent si vaillammentle martyre sous Antiochus Ëpiphane, II Mach.,vil, 4-40; les vingt jeunes hommes qui accomplirentdes hauts faits sous Judas Machabée contre les Syriens.II Mach., x, 35-38. — Dans le Nouveau Testament, il ya à signaler le jeune homme que Notre-Seigneur regardeavec amour, mais qui n’a pas le courage du renoncementcomplet, Matth., xix, 16-22; Marc, x, 17-22;Luc, zviii, 18-23; le jeune homme de Naïm que Jésusressuscite, Luc, vii, 14; le prodigue qui abandonne sonpère, Luc, xv, 12; le jeune homme qui suit Notre-Seigneurau commencement de sa Passion, Marc, xiv,51; Saul, encore adolescent, veavîaç, adolescens, quiassiste au martyre de saint Etienne, Act., vii, 57 (59);le jeune Eutyque qui, à Troade, s’endort et tombe parla fenêtre pendant un discours de saint Paul, Act., xx,9; enfin cet autre jeune homme, neveu de saint Paul,qui dénonce au tribun romain le complot tramécontre l’Apôtre par des Juifs fanatiques. Act., xxiii,15-22. — 2° Les jeunes filles sont naturellement moinsen vue dans la Sainte Écriture, parce que c’est seulementquand elles étaient mariées qu’elles pouvaientjouer un rôle capable d’attirer l’attention. D’ailleurselles se mariaient fort jeunes et n'étaient guère à même,avant leur mariage, de prendre une sérieuse initiative.On doit signaler cependant, parmi celles qui se sont faitremarquer pendant qu’elles étaient jeunes filles, Dina,fille de Jacob, Gen., xxx, 21; la fille du Pharaon quisauva Moïse, Exod., ii, 5; la fille de Jephté, Jud., xi, 34;Axa, fille de Caleb, Jos., xvi, 16; Thamar, fille de David,II Reg., xiii, 1; la fille de Jaire, Matth., ix, 18; etenfin Salomé, fille d’Hérodiade. Matth., xiv, 6. Voir cesnoms.

III. Fonctions assignées aux jeunes gens.

1° AJérusalem, III Reg., xii, 8, et à Babylone, Dan., i, 10, desjeunes gens sont élevés à la cour pour devenir ensuiteles officiers du prince. D’autres sont écuyers, I Reg.,xiv, 16; courriers. II Reg., i, 5-16, etc. Ils vont à laguerre, II Mach., x, 35, et les jeunes et élégants cavaliersd’Assyrie charment Ooliba, qui personnifie lesfemmes de Jérusalem. Ezech., xxiii, 12. — 2° Commeles missions qui réclament de l’agilité et de la vigueursont ordinairement confiées à la jeunesse, II Reg.,xvii, 17-21, les anges, actifs et puissants mandataires deDieu, sont habituellement représentés sous la forme dejeunes hommes. Ainsi en est-il de l’archange Raphaël,quand il s’offre à conduire le jeune Tobie, Tob., v, 5;des anges qui apparaissent à la tête de l’armée de JudasMachabée, II Mach., ii, 26; de l’ange qui se montreaux saintes femmes au tombeau de Notre-Seigneur.Marc, xvi, 5. — 3° Mais les jeunes gens ne sont pasaptes à remplir l’office de conseillers. Pour avoir écoutéses compagnons d'âge, Roboam perdit les dix tribus surlesquelles avaient régné David et Salomon. III Reg.,xii, 8. — 4° La jeunesse n’est cependant pas un obstacleau ministère sacré. À Timothée, qui a été ordonnéévêque à un âge relativement jeune, saint Paul recommandede rendre sa jeunesse respectable par ses vertus.I Tim., iv, 12. Voir Timothée.

IV. Conseils a la jeunesse.

1° L’homme est portéau mal dès sa jeunesse. Gen, , viii, 21. Cet âge paraitêtre celui de la joie, mais cette joie n’est que vanité.Prov., xx, 29; Eccle., xi, 9, 10. Le jeune homme succombeparfois aux plus graves tentations. Prov., vii, 713. De là des «péchés de jeunesse» dont on se repenttoute sa vie. Job, xiii, 26; xx, 11; Ps. xxiv (xxv), 7. —2° Comme l’homme suit toute sa vie la voie qu’il a prisependant sa jeunesse, Prov., xxii, 6; le jeune hommedoit écouter les leçons de la sagesse, Prov., i, 4;Eccli., vi, 18; s’appliquer de bonne heure à la pratiquedu bien, Eccle., xi, 9; se souvenir de son Créateur.

Eccle., xii, l; discipliner sa vie, Eccli., xxx, ll; se corrigerpar la fidélité aux commandements, Ps. cxviii (cxix),9, et savoir porter le joug. Lam., iii, 27. — 3° Le jeunehomme trouvera une sauvegarde et une joie dans la fondationd’une famille. Il chérira l’épouse de sa jeunesse,Prov., v, 18; Is., liv, 6; Mal., ii, 15, et la jeune épouseelle-même, si aile devient veuve et ne peut persévérerdans un saint veuvage, devra se remarier. I Tim., v,11-14. — 4° Il convient à la jeunesse de louer Dieu,Ps. cxlviii, 9; de chercher sa joie dans le Seigneur,Ps. xliii (xlii), 4; de parler peu dans sa propre cause,Eccli., xxxii, 10; d’être soumise aux vieillards, I Pet., v,5; d’amasser pour ses vieux jours, Eccli., xxv, 5, et surtoutde se montrer énergique dans le service de Dieuet la lutte contre le démon. I Joa., ii, 13, 14. — 5° Unejeunesse ainsi employée méritera l’éloge qui en est faitau livre de la Sagesse, iv, 8-16: «La vieillesse respectablen’est pas celle qui se prolonge et se comptepar le nombre des années: pour l’homme, la sagessetient lieu de cheveux blancs et une vie sans tache vautun âge avancé…» Le juste, «même s’il meurt prématurément,a fourni une longue carrière… Le juste quimeurt est la condamnation des impies qui survivent, etla jeunesse enlevée rapidement celle des longues années

du méchant.»

H. Lesêtre.

    1. JÉZABAD##

JÉZABAD (hébreu: Yôzâbâd, «Jéhovah adonné;» Septante: ’ItoaÇagâO), Benjamite, de Gadéroth, qui s’attachaà David, pendant que celui-ci demeurait à Siceleg,et se distingua par sa bravoure. I Par., xii, 4. — Septautres Israélites portent le nom de Yôzabâd dans le texteoriginal, mais la Vulgate appelle cinq d’entre eux Jozabad,I Par., xii, 20 (deux dans ce verset); II Par., xxxi,13; xxxv, 9, et les deux derniers Jozabed, I Esd., viii, 33;X, 22, 23 (celui du ꝟ. 23 est probablement identique avec leJozabed de II Esd., viii, 7, et xi, 16). Dans tous ces noms,l’élément initial Yehôvâh est abrégé en Yo. Enfin troisautres noms propres hébreux ne diffèrent de ceux-là quepar l’emploi du nom sacré Yehô au lieu de Yô. La Vulgatea transcrit ces trois noms de Yehôzâbâd par Jozabad,IVReg., xii, 21, etIIPar., xxiv, 26; I Par., xxvi, 4;JI Par., xvii, 18.

i. JÉZABEL. (hébreu: ’îzébél; Septante: ’IsÇaê^, ’IeÇaëa), femme du roi d’Israël Achab. — C’était uneprincesse phénicienne, fille du roi des Sidoniens, Ithobaall", qui était en même temps grand-prêtre de l’Astarthésidonienne. Cf. Astarthé, t. i, col. 1182; Ménandre,dans Josèphe, Cont. Apion., i, 18. Il est vraisemblableque le mariage de Jézabel avec Achab futménagé par le père de ce dernier, Amri, qui comptaitainsi s’assurer une alliance avantageuse contre les Syriens,de plus en plus envahissants. Voir Amri, t. i,col. 526. La présence de Jézabel à Samarie y introduisitle goût du luxe phénicien et des habitudes raffinées quel’on n’y connaissait pas encore. Mais le pire fut que lanouvelle reine, fanatique des dieux de son pays, décidaAchab à les adopter et à les servir avec elle. Baal eutdonc son temple et son autel à Samarie même, et l’Astarthéphénicienne y fut également installée. III Reg.,xv, 31, 32. Le premier avait à son service quatre centcinquante prêtres, et la seconde quatre cents, qui étaiententretenus aux frais de Jézabel. III Reg., xviii, 19. Leprophète Élie s’éleva énergiquement contre cette invasiondu culte de Baal. Il provoqua sur le Carmel la réunionde tous les prêtres qui desservaient le temple de l’idole,et, après la démonstration publique de leur impuissanceet de celle de leur dieu, les fit massacrer. III Reg.,xviii, 40. Cette exécution pouvait servir de représaillesaux meurtres des prophètes ordonnés par Jézabel.Abdias, intendant du palais d’Achab, en avait caché eten nourrissait cent dans des cavernes, pour les soustraireà la cruauté de la reine, III Reg., xviii, 4, 13;

car beaucoup d’antres avaient déjà péri par son ordre.Jézabel entra en fureur en apprenant ce qui s’était passéau Carmel, et elle menaça de mort le prophète, quis’enfuit dans le royaume de Juda. III Reg., xix, 1-3. Lareine joua aussi le rôle le plus odieux dans l’affaire dela vigne de Naboth. Achab désirait acquérir, par achatou par échange, cette vigne qui était contigue à sonpalais; mais Naboth refusait d’aliéner l’héritage de sespères. Jézabel intervint alors. Elle écrivit aux principauxde la ville, au nom d’Achab et en revêtant les lettres dusceau royal, pour leur commander de suborner deuxfaux témoins, qui accuseraient Naboth d’avoir mauditDieu et le roi: puis, en conséquence de ce crime, onlapiderait Naboth. C’est ce qui fut fait. Jézabel invitaensuite le roi à venir prendre possession de la vigne.Mais Élie apparut, sur l’ordre du Seigneur; il annonçaà Achab les maux qui se déchaîneraient sur toute samaison, et lui prédit que les chiens lécheraient sonsang dans le champ même de Naboth et dévoreraientJézabel près du rempart de Jezraèl. III Reg., xxi, 1-29.Voir Achab, t. i, col. 121, 124. Jézabel fut le mauvaisgénie d’Achab qu’elle excitait au mal et dont elle réussità faire l’un des princes les plus impies et les plus abominablesqui aient régné sur Israël.

Après la mort d’Achab, Jézabel resta toute-puissantesur ses deux fils, Ochozias et Joram, qui régnèrent l’unaprès l’autre. Le premier imita la conduite de son pèreet de sa mère. III Reg., xxii, 53. Joram ne fut pasmeilleur. L’influence malfaisante de Jézabel s’exerçamême sur le royaume de Juda, par sa fille Athalie, quiépousa Joram, roi de Juda. Voir Athalie, t. i, col. 1207.La vengeance divine atteignit enfin Jézabel, commel’avait prédit Élie, et comme Elisée le fit rappeler àJéhu. IV Reg., ix, 7-10. Quand celui-ci, après avoir tuéJoram, rentrait à Jezraèl, Jézabel, parée de son mieux(voir Antimoine, t. i, col. 672), comme pour en imposerau nouveau roi, se mit à la fenêtre d’une tour. De là,elle interpella ironiquement Jéhu en lui disant: «Estcela paix, nouveau Zambri, assassin de son maître?» Zambri, en effet, avait tué le roi d’Israël, Éla, et n’avaitlui-même régné que pendant sept jours. III Reg., xvi,10-18. Jéhu leva la tête et demanda: «Qui est pourmoi, qui?» Deux ou trois eunuques se présentèrentet il leur dit: «Jetez-la en bas.» Jézabel fut donc précipitée,son sang rejaillit sur la muraille, Jéhu et sescompagnons la foulèrent aux pieds de leurs chevaux.Après avoir pris son repas dans le palais, Jéhu ordonnade l’enterrer, car elle était fille de roi. Mais les chiensavaient dévoré son cadavre, et il n’en restait que lesextrémités des pieds et des mains. IV Reg., ix, 30-37.Ainsi se vérifiaient à la lettre les prophéties d’Élie etd’Elisée. — Le nom de Jézabel est resté synonyme de débauche,d’impiété et d’idolâtrie. Saint Jean donne le nomde Jézabel à une femme qui se dit prophétesse et propage,dans la ville de Thyatire, les pratiques de l’impureté et

de l’idolâtrie. Apoc, ii, 20-23.

H. Lesêtre.

    1. JÉZABEL##


2. JÉZABEL, nom donné dans l’Apocalypse, ii, 20-23,à une femme de Thyatire, fausse prophétesse qui imitaitl’impiété et les crimes de Jézabel, femme d’Achab.Saint Jean annonce à «l’ange de Thyatire» que ceuxqu’elle a séduits seront punis et mis à mort, s’ils nefont pas pénitence. Voir Jézabel 1.

    1. JÉZATHA##

JÉZATHA (hébreu: Vayezdfâ’; Septante: Za60u0aïo;),le dixième et dernier des fils d’Aman. Les Juifs le firentpérir à Suse avec tous ses frères. Esth., ix, 9. Les Septanteet la Vulgate ont vu dans le Va initial la conjonction «et» et l’ont par conséquent supprimé dans lenom même.

    1. JÉZER##

JÉZER, nom, dans la Vulgate, d’un Israélite et d’uneville qui portent un nom différent en hébreu.

1. JÉZER (héhreu: ’Pézêr; Septante: ’A X iéÏEp), filsaîné de Galaad, de la tribu de Manassé, et chef de lafamille des Jézérites. Num., xxvi, 30. Dans Jos., xvii, 2,et dans I Par., vil, 18; cf. Jud., vi, 34; viii, 2, il estappelé Abiézer. Voir Abiézer 1, t. i, col. 47.

2. JÉZER (hébreu: Ya’âzër; Septante.: ’Iartp), villede refuge située dans la tribu de Gad. I Par., vi, 8. LaVulgate l’appelle ailleurs Jazer. Voir Jazer, col. 1150.

1, JÉZÉRITE (hébreu: hâ-’î'ézri; Septante: *A X isÇept;Vulgate: Jezerilsè), famille de Manassé descendantde Jézer. Voir Jézer 1. Num., xxvi, 30. Gédéonappartenait à cette famille. Dans l’histoire de ce juged’Israël, la Vulgate, Jud., vi, 11, 24; viii, 32, l’appelle «la famille d’Ezri». Voir EzRi, t. ii, col. 2164. — Le nomdes Jézérites descendant de Manassé est différent enhébreu et dans la Vulgate de celui de Jézérite, par lequelest distingué Samaoth. Voir Jézérite 2.

2. JÉZÉRITE (hébreu: hay-lzrah; Septante: &’Ieopaé; Vulgate: Jézérites), nom patronymique deSamaoth, le cinquième chef de l’armée de David, quiétait de service au cinquième mois de l’année, à la têtede vingt-quatre mille hommes. I Par., xxvii, 8. Le termehébreu hay-lzrah est probablement identique au mothaz-zarhi qu’on lit au même chapitre, f Il et 13 (Vulgate:Zarahi et Zarai) et signifie que Samaoth appartenaità la famille de Zara ou Zaré, de la tribu de Juda.Dans les Nombres, xxvi, 20, les descendants de Zarasont appelés par la Vulgate Zareitæ.

    1. JÉZIA##

JÉZIA (hébreu: Izzîyâh; Septante: ’AÇ( «), descendantde Pharos, un des sept membres d’une famillequi avaient épousé des femmes étrangères. Esdras lesobligea à les répudier. I Esd., x, 25.

    1. JEZLIA##

JEZLIA (hébreu: Izli’âh; Septante: ’UlXiac,Alexandrinus: ’E ?Xi(4), Benjamite, fils d’Elphaal, quihabitait à Jérusalem. I Par., viii, 18.

    1. JÉZONIAS##


JÉZONIAS, nom de trois Israélites et d’un Réchabite.La Vulgate écrit uniformément leur nom Jezonias.Dans le texte hébreu, leur nom, quoique identique aufond, est écrit, tantôt Ya’âzanyâh, tantôt Ya’âzanyâhû,et une fois, par abréviation: Yezanyâkû. Ce nomsignifie: «que Jéhovah exauce!»

1. JÉZONIAS (hébreu: Ya’âzanyâhû, IV Reg., xxv,23; Yezanyâhù, dans Jérémie; Septante: ’Ieïovîaî,IV Reg., xxv, 23; ’EÇovîaç, Jer., xlvii, 8[xl, 8]; ’AÇapiaç,Jer., xlix, 1 [xlii, 1]), fils d’Osaïas, Jer., xui, 1, le Maachatite.IV Reg., xxv, 23, Jer., xl, 8. C’était probablementun des chefs de troupes qui avaient réussi às’échapper de Jérusalem, assiégée par l’armée de Nabuchodonosor,au moment où l’ennemi allait s’emparer dela ville. Lorsque Godolias eut été nommé gouverneur dela Judée par le roi de Babylone, Jezonias avec plusieursautres se rendit auprès de lui à Masphath et en fut fortbien accueilli. Après que Godolias eut été tué parlsmahel,fils de Nathanias (voir Ismahel 2, col. 994), Jezonias sejoignit à Johanan pour poursuivre le meurtrier et luienlever son butin. À la suite de ces événements, il engageases compatriotes, malgré les exhortations de Jérémie,à s’enfuir en Egypte pour échapper à la vengeance deNabuchodonosor qu’il redoutait. Son avis fut suivi et leprophète fut emmené de force en Egypte. IV Reg., xxv,23-26; Jer., XL, 8; xlii, 1; xlui, 1-7. Dans ce dernierpassage, J. 2, le nom de Jezonias paraît être altéré enAzarias, dans l’hébreu, les Septante et la Vulgate. VoirAzarias 29, t. i, col. 1302. La forme Azarias so trouveaussi dans les Septante, non seulement Jer., L, 2 (xliii,2), mais aussi xlix (xlii), 1.


2. JÉZONIAS (hébreu: Ya’âzanyâh; Septante: ’Iex ^?’Jer., xlii [xxxv], 3), Réchabite, fils de Jérémieet petit-fils d’Habsanias. Il était le chef des descendants deRéchab, à l’époque où le prophète Jérémie interrogea cesderniers dans le temple de Jérusalem et les proposa enexemple aux Juifs. Jer., xxxv, 3. Voir Réchabites.

3. JÉZONIAS (héhreu: Ya’âzanyâhû; Septante: ’IeX» 1 "’*? > Alexandrinus: ’l£^ovîaç), fils de Saphan, chefdes soixante-dix anciens d’Israël, qui, un encensoir à lamain, rendaient un culte sacrilège aux idoles représentéessur le mur du parvis du temple de Jérusalem,Dieu révéla leur infidélité à Ézéchiel dans une vision.Ezech., viii, 11.

4. JÉZONIAS (hébreu: Ya’âzanyâh; Septante: ’Iexovîaç), fils d’Azur, un des chefs du peuple qui luidonnaient de mauvais conseils du temps d’Ézéchiel et àqui le prophète annonça qu’il périrait par l’épée. Ezech.,xi, 1-12.

    1. JEZRA##

JEZRA (hébreu: Yahzêrdh; Septante: ’EÇipà; Alexandrinus: ’IeÇpi’aç), prêtre, de la seizième famille sacerdotale,celle d’Emmer. I Par., IX, 12. Il paraît être lemême que celui qui est appelé Ahazi dans II Esd., xi, 13.Voir Emmer, t. ii, col. 1763; Ahazi, t. i, col. 290.

    1. JEZRAËL##

JEZRAËL (Izre’é'l, «Dieu sème» ou «semence deDieu» ), nom de deux villes et d’une plaine de Palestine,Voir aussi Jezrahel.

1. JEZRAËL (Septante: ’hÇpaéX, ’IeÇpaiiX, ’IaÇ-fa;Alexandrinus: ’Eapaé, ’I&ÇpaéX, etc.), ville de la tribud’Issachar (fig. 269). Jos., xvii, 16. Son nom a subi dansle cours des âges des modifications bien diverses, maison peut néanmoins toujours reconnaître la forme primitive.Le livre de Judith, I, 8, etc., en fait en grec’EirSpTiXwv; Eusèbe, Onomast., 1862, p. 230, ’Eo8pa-/]>ii;le Pèlerin de Bordeaux le transforme en Stradela, Itinerarium,Patr. lai., t. viii, col. 790; Guillaume de Tyr,Hist. rer. transm., xxii, 266 (Patr. lai., t. cci, col. 881),en Parvum Gerinum, etc. La forme indigène actuelleest Zera’în, Zer’in. Le yod initial est tombé et la terminaisonel a été changée en iii, de même que dansBéthel qui est devenu Beilin. Pour l’histoire de cesnoms, voir Ed. Robinson, Biblical Researches, 1e édit.,t. iii, p. 163-165. La Vulgate écrit Jezræl dans Jos.,xvii, 16 (plaine); xix, 18 (ville), et dans Jud., vi, 33(plaine); et partout ailleurs, Jezrahel (soit la plaine soitla ville). Cf. G. Kampffmeyer, Aile Namenim heutigenPalâstina, dans la Zeitschrift des Deutschen PalastinaVereins, 1893, t. xvi, p. 42.

I. Description.

Nous avons visité l’antique Jezraèlle 25 avril 1899. Cette ville qui a eu un moment d’éclatsous le règne d’Achab est complètement déchue de sasplendeur. On n’y trouve même aucune ruine de l’époquejudaïque. Ce n’est aujourd’hui qu’un misérable petitvillage, composé d’une trentaine de masures basseset malpropres, construites en pisé, sur des monceaux dedécombres, et disséminées çà et là, sans aucun ordre,sur la partie occidentale d’un petit plateau qui s’abaissede ce Côté par une pente très douce vers la plaine. Mais,quelle que soit la dégradation actuelle de Zera’in, le siteest resté admirable. Voir la carte d’Issachar, col. 1008. «Au centre à peu près du village, sur un petit monticule,s’élève une maison de forme carrée, semblable àune tour, où réside le scheikh (fig. 270). Très dégradée,comme la plupart des autres maisons, elle paraît d’originearabe; mais elle a pu succéder à une constructionplus ancienne. De son sommet, on jouit d’une vue trèsétendue: à l’est, on embrasse toute la vallée quis’étend entre le petit Hermon au nord, aujourd’hui leDjebel ed-Dhahy, et le Gelboé, actuellement Djebel

III. - 49

Fûkâ’ah, au nord; c’est l’ancienne vallée de Jezraél.On aperçoit très distinctement le Tell Beisan, c’est-à-direl’ancienne acropole de Bethsan. Au delà du Jourdain,l’horizon est borné, de ce même côté, par lesmontagnes de l’antique pays de Galaad. À l’ouest, sedéroule l’immense plaine de Jezræl ou d’Esdrelon, dontla fertilité est justement renommée, et qui servit tant defois de champ de bataille à des armées si diverses.Encadrée entre les montagnes de la Galilée et de laSamarie, elle présente à la vue une surface très étendue,boursouflée par de faibles ondulations et parseméeçà et là de petits monticules.» Victor Guérin, Samarie,t. i, p. 311-312. La montagne conique du Thabor estcachée par le Djebel ed-Duhy (mont Moréh), maison voit Sunem sur le flâne de ce dernier et un peuplus loin, à gauche, el-Fûléh, où le 16 avril 1799 le

vée de 109 mètres au-dessus de la fontaine de’Aîn-Djalûd.Jezræl était donc facile à défendre et difficileà attaquer.

A l’avantage de sa situation, Zera’in joint celui deposséder de l’eau en abondance, richesse d’autant plusinappréciable qu’elle est plus rare en Palestine. A1 500 mètres à l’est, au pied d’un des rochers du Gelboé,jaillit le’Ain Djalûd, probablement l’ancien Harod,l’une des plus belles sources du monde. Voir Harod,col. 421. Plus près du village, à une vingtaine de minutes,également à l’est, à mi-chemin entre le’Atn-Djalûdet Zera’in, au milieu de rochers de basaltenoir, couverts de lichens rougeâtres, est une autre^ource,appelée’Ain el-Maitéh, «la source morte,» parcequ’elle avait disparu lorsque, au moyen d’excavations,on la fit reparaître en 1834. Elle forme un rukseau con2C9. — Vue de Zera’in. D’après une photographie.

général Bonaparte, avec 3000 Français, battit plus de30000 Turcs. Plus au nord, on peut apercevoir les maisonsblanches les plus hautes qui s’étagent sur la collinede Nazareth. À l’ouest se détache sur le Carmel la crêteA’el-Mahraqah, le lieu traditionnel du sacrifice du prophèteÉlie; directement au sud pointent, dans un berceaude verdure et de palmiers, les dômes blanchis et lesminarets de Djénin (Engannim), et par derrière, formantle fond du tableau, se dressent les montagnes dela Samarie. Cf. Esdrelon, t. ii, col. 1945.

La position de Jezræl n’est ni moins forte ni moinsimportante que belle et pittoresque. Bâtie sur une colline,en partie artificielle, qui forme le dernier contrefortnord-ouest du mont de Gelboé, à la ligne de faîte quisépare le bassin de la Méditerranée de celui du Jourdainet de la mer Morte, au sud du Djebel ed-Dhahy, eUe estla clef de la route qui conduit de l’est du Jourdain, deDamas et de Bethsan (Scythopolis) à la vaste et fertileplaine à laquelle elle a donné son nom, et, de là, en Galilée,en Phénicie, au Carmel et en Samarie. Elle estaccessible au sud et à l’ouest; à l’est, une coupuresépare le plateau de Zera’in du Gelboé et une routepasse en cet endroit entre la ville et la montagne. Aunord, la pente est raide et escarpée. La colline est éles.dérable abondant en petits poissons. C’est probablementla «Fontaine de Jezræl» de l’Écriture. I Reg.,xxix, 1. Son eau est douce comme celle du’Aïn Djaloud.Un puits, appelé Bir es-Souweid, existe aussi au nordde Zera’in. Enfin, au milieu du village même, on remarquebeaucoup de citernes abandonnées, qu’on estimeau nombre d’environ trois cents. Elles avaient été évidemmentcreusées afin que la ville n’eût pas à souffrirdu manque d’eau en cas de siège.

Nous savons par l’histoire de Naboth qu’on cultivaitla vigne sur les coteaux de Jezraél. III Reg., xxi, 1. Lesvignobles étaient sans doute à l’orient, car on y voitencore des pressoirs taillés dans le roc. Tous les environssont fertiles, mais mal cultivés. Les cactus y abondentet y forment des haies impénétrables. Autour duvillage, nous avons remarqué plusieurs de ces amoncellementsoù s’entassent, depuis des siècles, des cendres,des immondices et des détritus de toute sorte qui finissentpar atteindre une assez grande hauteur. C’est surun amas de débris semblables, qu’on appelle aujourd’huimezbelé, que s’était réfugié Job frappé de la lèpre. Job,il, 8. Voir Cendres, t. ii, col. 408.

II. Histoire.

Le* nom de Jezræl apparaît pour lapremière fois dans l’Écriture parmi les villes qui furent

données à Issachar dans le partage de la Terre Promise.Jos., xii, 18. — Du temps des Juges, les Madianites et lesAmalécites qui venaient par Bethsan pour piller Israëlcampèrent auprès de Jezræl et c’est là qu’ils furent battuspar Gédéon. Jud., vi, 33. — Saul avait réuni ses troupesau même endroit, près de la fontaine de Jezraël, I Reg.,xxix, 1, dans la dernière guerre qu’il soutint contre lesPhilistins et où il perdit la vie. I Reg., xxxi, 1-6. Cettefontaine était le’Ain el-Maitéh ou, d’après quelques-uns,le’Ain Djalùd: non seulement ce voisinagelui fournissait en abondance l’eau dont il avait besoin,mais il garantissait en même temps son armée contretoute attaque du côté du sud en l’abritant derrière le

surveiller la vallée orientale et toute la plaine, faisaitaussi partie du palais royal. IV Reg., ix, 17; Josèphe,Ant. jud., IX, vi, 4. Dans le voisinage, plutôt sansdoute que dans la ville même, la reine Jézabel, phénicienned’origine, avait élevé un temple à la déesse chananéenneAstarthé et établi de nombreux prêtres deBaal. Cf. III Reg., xviii, 19; IV Reg., x, 11. Plusieursdes événements qui nous sont connus de la vie d’Achabet de Jézabel, s’accomplirent à Jezræl. Le roi s’y renditdu mont Carmel, après le triomphe d’Élie sur lesprêtres de Baal. III Reg., xviii, 45. C’est là qu’était lavigne de Naboth, qu’Achab convoita pour en faire undes jardins de son palais. Naboth ayant refusé de la lui

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270. — La tour de Zera’in. D’après une photographie.

mont Gelboé. Les Philistins occupaient la ville mêmede Jezræl. IReg., xxix, 11. Quand ils se furent retirés,après leur campagne, elle resta fidèle- à la famille deSaul et reconnut pour roi Isboseth. II Reg., ii, 9. — Iln’est plus question d’elle jusqu’au temps d’Achab. C’estsous ce roi et sous son successeur Joram, qu’elle acquitle plus de célébrité et d’éclat. La situation de Jezrælrendait faciles les relations de cette ville avec la Phénicied’où la reine Jézabel était originaire. Elle devintdonc la résidence préférée du roi Achab et de sa femmeet ils l’embellirent à l’envi. Ce prince y construisit unpalais, qui était situé dans la partie orientale de la ville,cf. III Reg., xxi, 1; IV Reg., ix, 25, 30, 33, et adossé auxremparts. «La maison d’ivoire,» III Reg., xxii, 39, y entaisait probablement partie. Elle était ainsi appelée àcause des incrustations d’ivoire qu’on y admirait et celuxe attira sur elle les malédictions du prophète Amos,m, 15; vi, 4. Le palais où habitait la reine était attenantà celui du roi, près de la porte de la ville; des fenêtres,on voyait la route qui conduisait de Bethsan à Jezraël.IV Reg., ix, 30-31. Une haute tour, d’où l’on pouvait

vendre, il périt, lapidé, par la perfidie de la cruelle Jézabeljet c’est là qu’Élie prophétisa au roi et à la reine lechâtiment de leur crime. III Reg., xxi. Quelques exégètessupposent que Naboth fut jugé et exécuté à Samarie,mais le texte sacré semble bien dire que le crimefut commis à Jezræl même. III Reg., xxi, 1; Josèphe,Ant. jud., VIII, xv, 6. Voir Naboth. — Le fils d’Achab,Joram, qui fut son second successeur, continua à résiderà Jezræl. C’est là qu’il reçut la visite d’Ochozias,roi de Juda. IV Reg., viii, 29; ix, 6. Pendant queles deux princes se trouvaient réunis, une sentinelleaperçut soudain, du haut de la tour de Jezræl, dontnous avons parlé plus haut, la venue d’une troupe etl’annonça à Joram. Le fils d’Achab, soupçonnant une révolte,envoya aussitôt à sa rencontre un premier messager,et, celui-ci ne revenant pas, un second qui ne revintpoint davantage. La sentinelle annonça au roi cettenouvelle défection et ajouta: «On dirait la marche deJéhu, fils de Namsi, car il avance avec furie.» Inquiet,pris de peur, Joram ordonne d’atteler promptementson char et il part aussitôt au-devant de Jéhu, avec

Ochozias, roi de Juda. Il n’eut pas le temps d’aller bienloin. Le fils d’Achab et l’usurpateur de sou royaume,Jéhu, ministre de la vengeance divine, se rencontrèrentdans le champ même de Naboth, contigu au palais. «Est-ce la paix, Jéhu?» lui demanda aussitôt Joramqui se sentit perdu en le voyant. «Quelle paix? lui réponditJéhu, tant que durent les prostitutions et lesmaléfices sans nombre de Jézabel, ta mère!» Incapablede se défendre, Joram tourna bride et s’enfuit en criantà Ochozias: «Trahison, Ochozias!» Mais Jéhu tenditson arc et il frappa Joram entre les épaules; la flèchesortit par le cœur et le fils d’Achab tomba dans son charen s’affaissant sur les genoux. Jéhu dit alors à Badacer,un de ses officiers: «Prends-le et jette-le dans le champde Naboth de Jezræl, car souviens-toi [que lorsque moiet toi, nous suivions à cheval, à côté l’un de l’autre,Achab, son père, Jéhovah prononça contre lui cette sentence:Aussi certainement que j’ai vu hier le sang deNaboth et le sang de ses fils, je te rendrai la pareilledans ce même champ, a dit Jéhovah. Prends-le donc etjette-le dans le champ, selon les paroles de Jéhovah.» IV Reg., IX, 14-26. Le premier acte de cette sanglantetragédie venait de s’accomplir; un second allait lesuivre. Nous avons vu que le palais royal était sur lerempart même de la ville. De la vigne de Naboth, devenuejardin royal, Jéhu entra dans Jezræl. Jézabell’ayant appris, se peignit les yeux (voir Antimoine, t. i,col. 472), orna sa tête et se mit à regarder par la fenêtre.Au moment où Jéhu franchissait la porte, la vieille etfière reine, bravant l’usurpateur, lui cria: «Est-ce lapaix, [nouveau] Zambri, assassin de son maître?» Illeva les yeux vers la fenêtre, et demanda: «Qui est pourmoi? qui?» Et deux ou trois eunuques se penchèrent(à la fenêtre). «Jetez-la en bas,» leur dit-il. «Ils la jetèrentet son sang rejaillit sur la muraille et sur les chevaux.Il la foula alors aux pieds; puis il entra, mangeaet but, et il dit: Allez voir maintenant cette maudite etenterrez-la, car elle est fille de roi. Ils allèrent doncpour l’enterrer, mais ils ne trouvèrent plus d’elle que.le crâne, les pieds et les paumes des mains.» Selon laprophétie d’Élie, elle avait été dévorée par les chiens.IV Reg., ix, 30-37. Ils sont nombreux et sans maîtres,dans ce pays, , et ils n’ont pour nourriture que les débrisqu’on jette des maisons et les cadavres des animauxmorts. Dès qu’une proie de ce genre leur estlivrée, ils accourent rapidement de toutes parts en multitude,et au bout de très peu de temps, nous en avonsété témoin en plusieurs circonstances, il ne reste plusqu’un squelette complètement décharné. Ce spectacleest fréquent, par exemple, à Iskenderîyéh (Alexandrette)où les nombreuses caravanes de chameaux, qui y arriventd’Alep et de fort loin au delà, perdent souvent à leurarrivée des chameaux épuisés par la fatigue du voyage.A Zera’in même, nous avons vii, au milieu des débrisqui forment les mezbelé, les carcasses de plusieurs animauxdomestiques, chameaux, bœufs ou ânes, quiavaient été dévorés par les chiens. Ochozias, roi deJuda. s’étant enfui de Jezræl, fut poursuivi et blessé etil mourut de ses blessures. IV Reg., ix, 27-28; II Par.,xxil, 6-9. La mort de Jézabel fut suivie du massacredes soixante-dix fils d’Achab qui furent égorgés à Samarie.On apporta leurs têtes à Jéhu, et, selon l’usageoriental, il les fit exposer en deux monceaux à la portede la ville. IV Re~., x, 1-10. Le nouveau roi fit égalementpérir tout ce qui restait de la maison d’Achab àJezræl, ses officiers, ses familiers et les prêtres de sesidoles. IV Reg., x, 11. Il quitta alors cette ville quivenait d’être inondée de tant de sang pour se rendre àSamarie, IV Reg., x, 12, et avec lui sembla disparaîtrela gloire de Jezræl (884 avant J.-C. d’après la chronologieordinaire). — Aucun roi n’y fit plus sa résidence etl’Ecriture n’en parle plus que dans la prophétie d’Osée.Sous le régne de Jéroboam II, arrière-petit-fils de Jéhu,

Osée ayant eu un fils, «Jéhovah lui dit: Donne-lui lenomde Jezræl, car encore un peu de temps et je châtieraila maison de Jéhu pour le sang répandu à Jezrælet je mettrai fin au royaume de la maison d’Israël. Ence jour-là, je briserai l’arc d’Israël dans la vallée de-Jezræl... Grande sera la journée de Jezræl.» Ose., i,4-5, 11 (hébreu, i, 4-5; ii, 3). Le Messie seul sèmera unesemence nouvelle qui sera véritablement «Jezræl à lasemence de Dieu». Ose., ii, 22 (hébreu, 24). Cf. Matth.,xin, 3. — Le nom de Jezræl ne reparaît plus qu’accidentellementet défiguré, à l’époque des croisades. En 1183’,les croisés, attirés par l’abondance de ses eaux, campèrentprès de cette ville et en repoussèrent Saladin.’Guillaume de Tyr, Hist., xxil, 26-27, t. cci, col. 881, 884.En 1217, les croisés passèrent à Jezræl pour se rendrepar la vallée à Bethsan, Fr. Wilken, Geschichte derKreuzzûge, Leipzig, 1808-1832, t. ii, part, ii, p. 144.Depuis lors, son nom ne se lit que dans les récits despèlerins et des voyageurs. Voir Jezrahélite. — Cf. Ed.Robinson, Biblical Researches, 1™ édit., t. iii, p. 161168; 2e édit., t. ii, p. 318-325; A. P. Stanley, Sinai andPalestine, 1877, p. 349; V. Guérin, Samarie, t. i, p. 310;G. A. Smith, Historical Geography of the Holy Land y1894, p. 356, 381. F. Vigouroux.

    1. JEZRAEL##


2. JEZRAEL, ville de la tribu de Juda, dans la partiemontagneuse de son territoire, non loin du Carmel etde Ziph. Jos., xv, 56. Le site n’a pas été retrouvé. Lapremière femme de David, Achinoam, était de Jezrælde Juda. I Reg., xxvii, 3, etc. Voir Jezrahélite. Les-Qussstioneshebraiese in librum I Paralipomenon, II, 55,t. xxiii, col. 1570, disent faussement qu’elle était deJezræl, patrie de Naboth.

    1. JEZRAEL##


3. JEZRAEL, plaine de la Palestine. Ce nom désignela partie de la grande plaine qui sépare la Samarie-delaGalilée, mais il s’applique plus spécialement à laipartie qui est située entre le mont Gelboé et le petitHermon. Jos., xvii, 16; Jud., vi, 33; III Reg., iv, 12;Ose., i, 5. Dans le livre de Judith, la version grecque atransformé le nom de la plaine de Jezræl en celui d’Esdrelon,sous lequel elle est universellement connue.Voir Esdrelon, t. ii, col. 1945.

    1. JEZRAHEL##

JEZRAHEL (hébreu: Izre’é'l), nom de personne etde ville. La Vulgate -écrit ordinairement Jezrahel, etquelquefois Jezræl. Voir Jezræl, col. 1538.

1. JEZRAHEL (Septante: ’IeCpo^X), de la tribu deJuda, fils d’Étam, c’est-à-dire du fondateur de cette ville.I Par., IV, 3. Le passage où il est nommé est obscur,et, d’après plusieurs commentateurs, tronqué. Les unsconsidèrent Jezrahel comme un nom de personne, les.autres comme un nom de lieu.

2. JEZRAHEL (Septante: ’IeÇpetift), nom donné par leprophète Osée à son fils aîné, pour signifier que Dieuvengerait «le sang versé à Jezrahel sur la maison deJéhu» et qu’il «briserait l’arc d’Israël dans la vallée deJezrahel». Ose., i, 4.

    1. JEZRAHÉLITE##

JEZRAHÉLITE (hébreu: Izre’ê'lî; féminin:Jzre^’lip; Septante: ’IeÇpaijXî-nriç; féminin: ’IeÇpaïjXÎTCç;Vulgate: Jezrahelita, Jezrahelites; féminin: Jezraheliteset Jezrahelitis), originaire de Jezrahel. Le masculinest employé pour désigner la patrie de Naboth,III Reg., xxi, 1, 4, 6, 7, 15, 16; IV Reg., ix, 21, 25, et leféminin pour désigner la patrie d’Achinoam, femme deDavid. I Reg., xxvii, 3; xxx, 5; II Reg., ii, 2; iii, 2;I Par., iii, 1. Naboth était de Jezræl d’Issæhar et Achinoamde Jezræl de Juda.

    1. JEZRAÏA##

JEZRAÏA (hébreu: l^ra^yâh, «que Jéhovah fasse

-briller», omis dans les Septante), lévite, chef du chœur-des chantres, lors de la dédicace solennelle des mursde Jérusalem du temps de Néhémie. H Esd., xii, 41.

JIM, ville de Juda, qu’on écrit tantôt Jim, tantôt Iim.Jos., xv, 29. Voir Iim, col. 840,

JOAB (hébreu: Yô’âb, «Jéhovah [est] père» ), nom detrois Israélites.

1. JOAB, chef d’armée sous le règne de David. —Joab était fils de Sarvia, sœur de David; il avait deuxfrères, l’un plus âgé, Abisai, et l’autre plus jeune, Asæl.I Par., ii, 16. Il était donc neveu de David, et l’oncomprend, dès lors, que celui-ci ait réservé une fonctionimportante dans son armée à Joab, dont il connaissaitd’ailleurs la bravoure et l’habileté. — 1° Joab est nommépour la première fois, comme frère d’Abisai, pendantla persécution de Saul, 1 Reg., xxvi, 6, mais il n’entrepersonnellement en scène qu’au moment où David estproclamé roi à Hébron, après la mort de Saul. Abner,chef de l’armée de Saul, avait, de son côté, fait proclamerroi Isboseth, fils de Saul. À qui des deux resteraitla royauté sur tout Israël? On ne pouvait le décider quepar les armes. Joab, à la tête des gens de David, etAbner vinrent au-devant l’un de l’autre et se rencontrèrentprès de l’étang de Gabaon, occupant chacun unerive opposée. Voir Gabaon, col. 18-21. On convint d’abordd’un combat singulier, dans lequel douze hommesde chaque parti lutteraient les uns contre les autres.Le combat fut si acharné que les vingt-quatre championsse frappèrent mutuellement à mort. Une telle issue necomportant aucune solution, les deux armées en vinrentaux mains. Abner fut battu, mais Asæl périt de sa mainen le poursuivant de trop près. Voir Asæl, t. i, col.1054. Joab et Abisai continuèrent la poursuite et nes’arrêtèrent que sur la demande d’Abner, lorsque leshommes de Benjamin vinrent se grouper autour dufugitif. Abner marcha toute la nuit et passa le Jourdain.Joab revint à son camp et constata que dix-neuf dessiens manquaient, tandis que les partisans d’Abneravaient perdu trois cent soixante hommes. Il alla ensuiteensevelir Asæl dans le sépulcre paternel, à Bethléhem,et regagna Hébron. II Reg., ii, 13-32.

La mort d’Asæl laissa au cœur de Joab une violenterancune. La loi du goel l’obligeait, d’ailleurs, à vengerla mort de son frère. Voir Goel, IV, 2°, 2, col. 262.A quelque temps de là, pendant que Joab et les gensqu’il commandait étaient à la poursuite de brigandsétrangers, Abner vint trouver David et lui fit sa soumission.Quoiqu’il abandonnât le fils de Saùl par dépitet par colère, le roi l’accueillit honorablement; il luioffrit un grand festin et le laissa aller pour faire reconnaîtresa royauté dans tout Israël. À son retour, Joabapprit l’entrevue. La haine qui l’animait contre Abnerne lui permit pas de comprendre la franchise de sadémarche. D’ailleurs, avec son caractère entier et dominateur,il ne pouvait lui plaire qu’un guerrier decette valeur se mit au service de David et le supplantâtpeut-être lui-même. Il alla donc aussitôt trouver le roi «t lui reprocha d’avoir laissé partir en liberté un hommequi, à son avis, n’était venu que pour espionner. Puis,sans rien dire à David, il envoya des messagers à lasuite d’Abner pour le prier de revenir. Quand celui-cifut arrivé à Hébron, Joab le prit à part, comme pour luiparler en secret, et il le mit à mort. Le texte sacré ditexpressément qu’il tua son ennemi «pour venger le-sang de son frère Asaël», II Reg., iii, 27, et les coutumesdu temps lui donnaient le droit d’agir ainsi; ellesautorisaient tous les moyens de faire périr le meurtrierd’un de ses proches, comme le savait fort bien Abner,II Reg., ii, 22, qui eut le tort de l’oublier en cette circonstance. Quelque odieux que nous paraisse le guetapens et quelque blâmable que fût l’ambition de Joab,il faut, pour être juste envers lui, reconnaître les circonstancesatténuantes de son acte. David, apprenantce meurtre qui ne pouvait que nuire à sa cause, etcraignant d’être soupçonné de complicité, protesta énergiquementde son innocence et maudit Joab et sa maison.Cette dernière malédiction avait sa raison d’être,puisque Abisaï, lui aussi, comme goêl de son frèreAsæl, avait contribué à cette vengeance. David prit lesvêtements de deuil, assista aux funérailles de la victimeà Hébron, ne voulut prendre aucune nourriture de lajournée et, dans un chant funèbre qu’il composa enl’honneur d’Abner, traita de «méchants» ceux quil’avaient tué. Voir Abner, t. i, col. 63-66. Le peuplecomprit que David n’était pour rien dans ce meurtre;celui-ci constata de son côté que si Joab et Abisaï luiavaient rendu des services, ils les lui faisaient payerbien cher et que tout était à redouter pour lui de leurinsolente influence «Ces gens, les fils de Sarvia, dit-il,sont vraiment trop brutaux. Que Jéhovah fasse payerle mal à qui le commet!» II Reg., iii, 22-39.

2° Cependant, les qualités militaires de Joab étaienttelles que David ne put se dispenser de les utiliser.Quand il devint roi reconnu de tout Israël et qu’il constituason administration, Joab fut établi officiellementchef de l’armée. II Reg., viii, 16. Il avait dû prendrepart aux campagnes dirigées directement par Davidcontre les Jébuséens, les Philistins, les Moabites, lesSyriens et les Iduméens. II Reg., v, 6-25; viii, 1-14.Le titre du psaume lx (lix), 2, lui fait honneur de lavictoire sur les Iduméens. Quand, ensuite, Hanon, roides Ammonites, maltraita les envoyés de David, Joabfut chargé d’aller le mettre à la raison. À son arrivéeprès de Rabbath-Ammon, la capitale ammonite, Joabaperçut l’armée ennemie rangée en avant de la ville, et,plus bas, dans la plaine, une armée de Syriens que leroi Hanon avait pris à sa solde. En habile tacticien, ildivisa aussitôt ses troupes en deux corps, garda avec luil’élite de son armée pour attaquer les Syriens au nombrede trente-trois mille, et confia le reste à Abisai, quidevait opérer contre les Ammonites. L’un et l’autreconvinrent de se porter mutuellement secours, au casoù les ennemis l’emporteraient. Joab, en effet, comprenaitque l’affaire serait rude, et il disait: «Que Jéhovahfasse ce qu’il jugera bon!» Les Syriens furent enfoncésles premiers par Joab, et leur déroute entraîna celledes Ammonites. Voir Ammonites, t. i, col. 496. Joab netenta pas d’assiéger ces derniers dans leur ville et ilrevint à Jérusalem. Adarézer, roi de Soba, l’un de cesprinces sjriens qui étaient venus au secours d’Ammon,ne se résigna pas à sa défaite; à la tête d’une nouvellearmée, il entreprit de la venger. David en personne,après avoir mobilisé «tout Israël», vint le joindre aude la du Jourdain, le battit complètement et lui ôta touteidée de coalition avec les Ammonites. Voir Adarézer, 1. 1,col. 212. II Reg., x, 6-19; I Par., xviii, 1-13.

3° L’année suivante, David voulut régler définitivementle compte des Ammonites. Joab, chargé d’allermettre le siège devant Rabbath-Ammon, commença parravager le pays ennemi, I Par., xx, 1, et ensuite procédaaux opérations du siège. Pendant qu’elles se poursuivaient,David, qui était resté à Jérusalem, commitson crime avec Bethsabée, et, pour le cacher, résolutd’en commettre un autre contre Urie. Joab se prêta avecune coupable docilité au meurtre de ce vaillant hommeet à la triste comédie qui était destinée à voiler le complot.Le siège de Rabbath continua cependant. Joabs’empara d’abord de la «ville des eaux,» ou ville basse,dont l’occupation rendait intenable la ville haute, carcette dernière se trouvait ainsi privée d’eau et n’avaitplus aucun moyen de se ravitailler. Josèphe, Ant. jud.,VII, vii, 5. Voir Rabbath-Ammon. Puis, par un scrupulede délicatesse qui étonne quelque peu de sa part, ou

plutôt probablement avec une arrière-pensée de courtisan,Joab envoya dire à David d’accourir pour prendrela ville, afin que l’honneur de la victoire revint au roiet non au chef de l’armée. David arriva avec de nouvellestroupes, présida à la dernière attaque de Rabbathet s’en rendit maître. Il s’empara de la couronne royaleet fit un grand butin. Puis il plaça les habitants de Rabbathet des autres villes ammonites «sur des scies, destraîneaux, des haches de fer et des moules à briques»,c’est-à-dire qu’il les réduisit en esclavage et les préposaà ces différents outils, pour qu’ils devinssent, auservice d’Israël, scieurs de pierres, bûcherons, briquetiers,etc. Voir Aire, t. i, col. 326; Fodr, t. ii, col. 2338;Hachb, col. 389; II Reg., xi, 1-xii, 31; I Par., xix,1-19. Près de deux années s’écoulèrent, entre le crimede David et la naissance du second fils de Bethsabée.L’historien enclave le récit de cet épisode entre le commencementdu siège de Rabbath et la prise de la villepar David. Il ne s’ensuit nullement que le siège ait duréplus d’une saison. Nul doute que l’historien n’ait tenuà raconter tout d’un trait ce qui se rapportait à l’unionde David et de Bethsabée. Si le siège s’était prolongéaussi longtemps, il en eût fait mention.

4* Joab eut l’occasion d’intervenir auprès du roi pourprocurer le retour d’Absalom, le plus âgé des (ils survivantsde David; à cause de ce droit d’aînesse, le rusépolitique entrevoyait le successeur de David et il tenaità se ménager d’avance ses bonnes grâces. Absalom étaiten fuite depuis trois ans, à cause du meurtre de sonfrère Amnon. Quand le mécontentement de David paruts’apaiser, Joab envoya au roi une femme de Thécué qui,sous forme d’apologue (voir Apologue, 2°, 1. 1, col. 779),introduisit la cause d’Absalom. David reconnut aussitôl,dans cette démarche, l’inspiration de Joab. Il permit leretour d’Absalom, que Joab lui-même alla chercher àGessur et ramena à Jérusalem, mais, pendant deux ansencore, David refusa de le recevoir. Par deux fois, Joabse déroba aune nouvelle intervention; il finit par sedécider, sur les instances d’Absalom, et ménagea uneréconciliation entre le roi et son fils. II Reg., xiv, 1-33."Absalom profita de son retour en grâce pour intrigueret chercher à supplanter son père. Celui-ci fut bientôtobligé de quitter Jérusalem et de mener la vie d’unfugitif, pendant que son fils s’emparait du pouvoir et lepoursuivait lui-même jusqu’au delà du Jourdain. Ilfallut en venir aux armes. Absalom avait mis à la têtede ses troupes Amasa, un fils qu’Abigail, sœur de David,avait eu d’un étranger, et que son oncle avait tenuà l’écart depuis le commencement de son régne. Davidorganisa ses partisans en trois corps, dont il donna lecommandement à Abisai, à Joab et à Éthai. Il recommandapar-dessus tout à ces trois chefs d’épargner Absalom.La bataille se livra dans la forêt d’Éphraim.Absalom, vaincu, s’enfuit sur un mulet et resta pris,par la chevelure, aux branches d’un térébinthe. Avertide l’accident, Joab accourut et, malgré les observationsqu’on lui fit, planta trois javelots dans le cœur d’Absalomet le laissa achever par ses écuyers. II Reg., xviii,1-15. On ne peut dire à quelle inspiration obéit Joab enfaisant périr Absalom. L’Écriture ne nous apprend pascomment il était devenu l’ennemi de celui qu’il avaitfait rappeler. Voulait-il, par cette mort, mettre tout d’uncoup fin à la révolte? Craignait-il qu’Absalom, s’il survivaitet plus tard devenait roi, lui tînt rigueur de ladéfaite qu’il venait de lui infliger? Il est difficile derépondre, mais il est certain que la mort d’Absalomparaissait la condition nécessaire d’une paix durable.

5° La mort d’Absalom changea en deuil, pour David,ce jour de victoire. Comme il s’attardait à pleurer sonfils, Joab entra brusquement chez lui et lui tint ce langage: «Tu fais aujourd’hui la honte des serviteurs quit’ont sauvé la vie. Tu aimes ceux qui te haïssent et tu

hais ceux qui t’aiment. Je le rois bien, tu serais contentsi Absalom vivait et si nous étions tous morts. Lève-toidonc, sors et parle au cœur de tes serviteurs. Autrement,je le jure par Jéhovah, il ne restera pas un seulhomme avec toi cette nuit.» David ne répondit rien àcette arrogante sommation; mais, à dater de ce jour, ilvit le sang de son fils couvrir celui d’Abner sur la mainde Joab. À son neveu Amasa, qui avait dirigé les troupes,rassemblées contre lui, il fit offrir le commandement deson armée, en remplacement de Joab. II Reg., xix, 1-13.Une nouvelle révolte, celle de’Séba, de Benjamin, détachadu roi tout Israël, hormis la tribu de Juda. Amasa,le nouveau chef militaire, chargé de réunir les troupes, ,tarda à exécuter sa mission. David eut alors recours àAbisai, qui partit à la poursuite de Séba. Joab, la rancuneau cœur, méditait sa vengeance. Il accompagnaitson frère. Amasa arriva de son côté avec les troupesqu’il avait pu réunir, et la jonction des deux corps sefit près de la grande pierre de Gabaon. Alors Joab s’avançavers Amasa pour lui demander de ses nouvelleset l’assassina avec une épée qu’il tenait cachée sous ses.vêtements. Voir Amasa, t. i, col. 442. Reprenant ensuitele commandement de l’armée, que ne pouvait lui refuserson frère, il continua la poursuite de Séba, qu’ilvint assiéger à Abel-Beth-Maacha. Voir Abel-Beth-Maacha,t. i, col. 31. Pour obtenir que la ville fûtépargnée, les habitants lui jetèrent la tête de Séba.Joab revint à Jérusalem auprès du roi. Il garda le commandementde l’armée, que David jugea impolitique delui retirer, après le nouveau service qu’il venait derendre. II Reg., xx, 1-23.

6° Le roi l’éloigna momentanément de Jérusalem,malgré ses justes observations, pour l’envoyer faire ledénombrement de la population israélite, opération quidura près de dix mois et qui fut désapprouvée de Dieu.II Reg., xxiv, 2-10; IPar., xxi, 1-7. Fidèle à se ménagerlafaveur du successeur présumé de David, Joab s’entenditavec le grand-prêtre Abiathar, afin d’assurer cettesuccession à Adonias, fils que David avait eu immédiatementaprès Absalom et qui prétendait faire valoir sondroit d’aînesse. Mais le roi ne mettait pas Joab dans laconfidence de ses desseins. Celui-ci se trompa danscette intrigue et n’aboutit qu’à hâter la proclamation deSalomon. III Reg., i, 7-48. La condamnation de Joab estinscrite dans le testament de David à Salomon: «Tusais ce que m’a fait Joab, fils de Sarvîa, ce qu’il a faità deux chefs de l’armée d’Israël, à Abner et à Amasa.Il les a tués, il a versé en pleine paix le sang de laguerre, il a mis le sang de la guerre sur la ceinture deses reins et sur la chaussure de ses pieds. Agis selonta sagesse et ne laisse pas ses cheveux blancs descendreen paix dans la tombe.» Joab méritait le châtiment.David, qui avait eu le malheur de le prendre pour complicedans le meurtre d’Urie, n’osa le lui infliger. Illaissa ce soin à son fils. La prudence exigeait d’ailleursquecelui qui avait tant fait souffrir le père, et qui avaitposé la candidature d’Adonias, fût mis hors d’état denuire au nouveau roi. L’exil d’Abiathar par Salomonavertit Joab du sort qui le menaçait lui-même. Il courutau tabernacle et saisit les cornes de l’autel, pourassurer son inviolabilité. Voir Corne, t. ii, col. 1010.Salomon envoya Banaïas pour le tuer. Joab refusa desortir et Banaïas le frappa au lieu même où il s’était,réfugié. On l’enterra dans la maison qu’il possédait audésert de Juda. III Reg., ii, 5, 6, 28-35. Cf. II Reg., xiv,30; I Par., ii, 54; et Ataroth 6, t. i, col. 1206. C’estainsi que périt misérablement celui qui eût pu se faireun nom si glorieux en Israël. Quelques historiens ontreproché à David d’avoir été jaloux des talents militairesdu chef de son armée, mais celui-ci ne fournit que tropde motifs de plainte à son oncle. Pour servir son ambition,Joab avait mis en œuvre la cruauté et l’hypocrisie;il n’avait reculé devant aucune atrocité, même à

l’égard ds ses cousins, Absalom et Amasa. Si grandsqu’ils aient été, ses services militaires n’ont pu faire oublierl’indignité de plusieurs de ses actes. Joab avaitles talents qui constituent le guerrier; il manqua des

qualités qui font l’homme.

H. Lesêtre.

2. JOAB (Septante: ’ïoSêâê; Alexandrinus: ’Iwâ6),fils de Saraïa, descendant de Cénez, de la tribu de Juda.Il était père ou chef de la vallée des Artisans (hébreu:Gô’hârâsîm; Vulgate: Vallis artificum). I Par., iv, 14.Le Pseudo Jérôme dit, Qusest. heb. in Par., t. xxiii, col.1372, d’après la tradition juive, que «Joab est appelé pèredes artisans, parce que ce furent ses fils qui devinrentarchitectes de la maison du Seigneur «.Cette explicationparait fort suspecte. La «Vallée des Artisans» est nomméeune seconde fois dans II Esd., xi, 35. Voir Vallée desArtisans.

3. JOAB (Septante: ’Iuâë), chef d’une des famillesqui revinrent de la captivité avec Zorobabel, au nombrede 2812, en y comprenant la famille de Josué. Les deuxfamilles réunies sont appelées «fils de Phahath-Moab».I Esd., ii, 6(vm, 9); II Esd., vii, 11. Voir Phahath-Moab.

    1. JOACHAZ##

JOACHAZ (hébreu: Yehô’abaz; Septante: ’l<oà-/*0<nom de quatre Israélites dans la Vulgate. Le nom duquatrième diffère, dans le texte hébreu, du nom des troispremiers, par la manière dont le nom sacré initial estabrégé, mais il est, au fond, le même, et a toujours lamême signification: «Jéhovah possède.»

    1. JOACHAZ##


1. JOACHAZ, roi d’Israël. Il était fils de Jéhu, auquelil succéda sur le trône de Samarie. Son règne duradix-sept ans (856-810 avant J.-C, d’après la chronologievulgaire; 815-799, d’après les chronologistes qui s’appuientsur les documents assyriens). Pendant ce temps,Joas régnait à Jérusalem. Joachaz resta fidèle aux traditionsschismatiques de Jéroboam. Il eut à compter avecle roi de Syrie, Hazæl, qui lui infligea de grandsdésastres et réduisit l’armée israélite à l’état de «lapoussière qu’on foule aux pieds». Plusieurs villesd’Israël restèrent aux mains du vainqueur et ne furentrecouvrées que par Joas, fils de Joachaz. Voir Hazæl,col. 460. Quand Joachaz eut été ainsi châtié de son idolâtrieet de celle de son peuple, le Seigneur donna auxenfants d’Israël un libérateur; ils échappèrent aux mainsdes Syriens et habitèrent dans leur tente comme auparavant.Ce libérateur, d’après quelques-uns. ne fut autreque le roi assyrien, Rammanirar III, qui tint Hazæl enrespect, en attendant que les circonstances lui permissentd’assiéger Damas et de réduire le roi de Syrie soussa domination. Cf. Maspero, Histoire ancienne des peuplesde l’Orient classique, Paris, t. iii, 1899, p. 101-102.D’après l’opinion commune, ce fut Joas, roi d’Israël,fils et successeur de Joachaz, IV Reg., xiii, 25, ou JéroboamII, fils et successeur de Joas. IV Reg, xiv, 25. Lapuissance de Joachaz fut néanmoins amoindrie considérablement.Le vainqueur ne lui permit plus d’avoir quecinquante cavaliers, dix chars et dix mille hommes depied. À sa mort, Joachaz fut inhumé à Samarie avec sespères. IV Reg., xiii, 1-9. Elisée prophétisait pendant

son règne en Israël et lui survécut.

H. Lesêtre.

    1. JOACHAZ##


2. JOACHAZ, quatrième fils du roi de Juda, Josias.

I Par., iii, 25. Lorsque le roi Josias eut péri à Mageddo,en voulant s’opposer au pharaon d’Egypte, Néchao II,venu pour s’emparer de la Syrie, le peuple prit pour roi(610 avant J.-C), à sa place, son fils Joachaz. Ce dernieravait pourtant un frère, Joakim, plus âgé que lui dedeux ans, mais qui n’était pas de la même mère, et quirégna après Joachaz. À la suite de Joakim, régna Sédécias,frère de Joachaz par la même mère, appelée Amital.

II aurait été de treize ans plus jeune que son aîné, s’il

n’y a pas d’altération de chiffre dans II Par., xxxvi, 11;mais d’autre part, I Par., iii, 15, le fait plus âgé queJoachaz. Joachaz est appelé ailleurs du nom de Sallûm,Sellum, nom déjà porté par un roi d’Israël qui n’avaitrégné qu’un mois. IV Reg., xv, 13. On a pensé queJérémie, xxii, 11, donne ce nom à Joachaz à cause dela brièveté de son règne. Mais le nom de Sellum estindiqué, I Par., iii, 15, comme celui d’un des fils deJosias. Il faut donc en conclure qu’en devenant roi,Sellum crut devoir prendre le nom de Joachaz, demême que son frère Éliakim dut changer le sien encelui de Joakim. IV Reg., xxiii, 30-34. Le sacre deJoachaz est expressément mentionné, IV Reg., xxiii,30, sans doute parce qu’il ne succédait pas régulièrementà son père. La royauté de Joachaz ne fut pas dugoût de Néchao. Ce pharaon, à son second passage enPalestine, au retour de sa campagne victorieuse enSyrie, fit venir Joachaz à Rebla et l’emmena prisonnieren Egypte. Ézéchiel, xix, 2-4, fait allusion à cette captivité.Joachaz avait-il combattu à Mageddo aux côtés deson père Avait-il été investi d’une certaine autoritépar Josias et désigné pour lui succéder, de préférence àJoakim? On ne le sait. Toujours est-il que Néchao mitJoakim à la place de son frère plus jeune, comme pourimposerle respect du droit d’aînesse et en même tempsde sa propre suzeraineté, et il trappa le pays d’une fortecontribution. IV Reg., xxiii, 31-34; II Par., xxxvi, 1-3.Joachaz n’avait régné que trois mois. On comptait, àJérusalem, que l’exil de Joachaz ne serait pas définitif.Jérémie, xxii, 10-12, déclara que cette espérance étaitillusoire: «Ne pleurez pas celui qui est mort (Josias)et ne vous lamentez pas à son sujet. Mais pleurez celuiqui s’en va, car il ne reviendra plus, il ne reverra plusle pays de sa naissance. Ainsi parle Jéhovah sur Sellum,fils de Josias, roi de Juda… Il mourra dans lepays où on l’emmène captif.» Joachaz mourut, en effet,

en Egypte. Voir Néchao.

H. Lesêtre.

3. JOACHAZ (hébreu: Yehô’ahaz; Septante: ’OxoÇfaç),fils de Joram, roi de Juda. Il est dit II Par., xxi, 17,que des pillards philistins et arabes tuèrent tous les filsde Joram et ne lui laissèrent que Joachaz le plus jeune.Plus loin, II Par., xxii, 1, l’historien raconte que leshabitants de Jérusalem donnèrent pour successeur àJoram son plus jeune fils, Ochozias, le seul survivantde ses entants. Ce Joachaz est donc le même qu’Ochozias.Quelques commentateurs ont supposé qu’il avait prisce dernier nom en montant sur le trône. D’autres remarquentque le nom de Joachaz ne diffère de celuid’Ochozias que par la transposition des lettres et qu’ilest, au fond, le même. Plusieurs, enfin, supposent qu’ily a là une erreur des copistes. Les Septante lisent’O/oÇfa;, tandis que la Vulgate reproduit la leçon de

l’hébreu. Voir Ochozias 2.

H. Lesêtre.

4. JOACHAZ (hébreu: Yo’àfyâz; Septante: ’luxi/xÇ),père de Joha, historiographe ou chroniqueur de Josias,roi de Juda. II Par., xxxiv, 8.

    1. JOACHIN##


JOACHIN, roi de Juda, ainsi appelé par la Vulgatedans IV Reg., xxiv, 6, 8, 12, 15; xxv, 27; II Par., xxxvi,8, 9; Jer., lii, 31. Il est appelé ailleurs Jéchonias. VoirJéchonias, col. 1210.

    1. JOACIM##


JOACIM, nom de deux Israélites dans la Vulgate.Voir Joakim.

1. JOACIM (hébreu: Yôyâqîm, forme contractée deYehôyaqîm, «que Jéhovah élève, affermisse!» Septante: ’Iwax{[i.), grand-prêtre, fils de Jésus ou Josué, etpetit-fils de Josédec, père d’Éliasib, qui lui succéda dansle souverain pontificat. Il était contemporain de Néhémie.II Esd., xii, 10, 12, 26.

1551

JOACIM — JOAKIM

1552

2. JOACIM (Septante
lugxtp.), grand-prêtre, contemporain

de Judith, qui alla avec les anciens du peupleà Béthulie féliciter l’héroïne de sa victoire. Judith, xv,9 (grec, 8). À la place de ce nom, on trouve, dans Judith,iv, 5, 7, 11, celui d’Éliachim, qui n’en diffère que par lenom de Dieu (’El dans ce dernier; Yô, forme abrégée deYehôvâh dans le premier). Les Septante l’appellent partoutM<oax! [».

    1. JOADA##

JOADA (hébreu: Yehô’addâh, «Jéhovah orne;» Septante: ’IaSi; Alexandnnus.’IwiaSâ), fils d’Ahazet père d’Alamath, d’Azmoth et de Zamri. Il descendaitde Saül par Méribbaal ou Miphiboseth. I Par., viii, 36.Dans la liste généalogique de I Par., jx, 42, Joada estappelé Jara, par suite du changement de deux lettressemblables, d et r. Voir Jara 2, col. 1128.

    1. JOADAN##

JOADAN (hébreu: Yehô’adin dans II Par., xxv, 1;Yehô’addàn dans IV Reg., xiv, 2; Septante: ’IwaSift; ’Iwaêalv), femme du roi Joas et mère d’Amasias, quidevint roi de Juda. Elle était de Jérusalem. IV Reg.,xiv, 2; II Par., xxv, 1.

JOAH (hébreu: Yô’ah), nom de deux lévites dans laVulgate. Trois autres Israélites portent le même nomen hébreu, mais la version latine a donné à leur nomune orthographe différente. L’un d’eux est appelé Joaha,un autre Joahé et le troisième Joha. Voir ces mots.

1. JOAH (Septante: 'Ia>âê), lévite, de la branche deGersom, fils ou petit-fils de Zamma et père d’Addo.I Par., vi, 21. Certains commentateurs pensent queJoah est le même qu’Éthan, donné au ꝟ. 42 comme lefils de Zamma, mais il est possible qu’il y ait quelquenom omis dans ce dernier passage.

2. JOAH (Septante: IwSaiS; Alexandrinus: ’Iwâ),lévite, fils de Zemma et père d’Éden, de la famille deGersom. Il prit part à la restauration et à la purificationdu temple de Jérusalem sous le règne d’Ezéchias. II Par.,

x xxix, 12.

    1. JOAHA##

JOAHA (hébreu: Yô’âff, voir Joah; Septante: ’Itaàft; Alexandrinus: ’Iuaâ), lévite, de la branche deCoré, le troisième fils d’Obédédom. Il vivait du tempsde David et fut chargé avec ses frères de la garde de laporte méridionale de la maison de Dieu, ainsi que dela garde de la maison des’Asuppîm (Vulgate: seniorumeoncilium). I Par., xxvi, 4, 8, 15. Voir Asuppim, t. i,col. 1197.

    1. JOAHÉ##

JOAHÉ (hébreu: Yffali, voir Joah; Septante: ’Idxxç; dans Isaïe: ’ïiaây}, fils d’Àsaph, scribe ouhistoriographed’Ezéchias, roi de Juda. Il était vraisemblablementde la tribu de Lévi. Ezéchias l’envoya, avecÉliacim et Sobna, auprès du Rabsacès, l’ambassadeur deSennachérib, pour parlementer avec ce dernier prèsde l’aqueduc de la piscine supérieure, sur le chemin duChamp du Foulon (t. ii, col. 529). IV Reg., xviii, 18, 26,37; Is., xxxvi, 3, 11, 22.

    1. JOAKIM##

JOAKIM (hébreu: YeMyàqîm, «que Jéhovah élève,affermisse» ), nom de cinq Israélites, mais le nom dedeux d’entre eux est écrit Joacim, II Esd., xii, 10, 12,26, et Judith, XV, 9, dans la Vulgate, quoiqu’il soit étymologiquementle même.

1. JOAKIM (Septante: ’Loaxi’ii, ’Iwaxsi’n)’dix-huitièmeroi de Juda (609-598 avant J.-C). Il était fils deJosias par Zébida. Il succéda à son frère Joachaz, filsde Josias par Amital, qui, bien que plus jeune que luide deux ans, fut proclamé roi à la mort de son père.Voir Joachaz 2, col. 1549. Néchao détrôna Joachaz au bout

de trois mois pour mettre â sa place le fils de Zébida.Celui-ci s’appelait primitivement Éliacim, ’Êlyâqim, «que Dieu a constitué.» Néchao changea son nom enYehôyâqîm, «que Jéhovah élève,» comme pourfaire entendre que le roi qu’il lui plaisait d’établirdevait être considéré comme établi par Jéhovah, le Dieuparticulier de Juda. Joakim avait alors vingt-cinq ans.Dès le début de son règne, il fut obligé de payer au pharaonune forte contribution d’or et d’argent. Afin des’acquitter, il lui fall ut imposer au peuple de durs impôtset, pour en assurer la rentrée, déterminer avec soin lapart que chacun avait à fournir. IV Reg., xxiii, 33-36.Malgré les exigences de Néchao, le roi, sa cour et bonnombre de ses sujets se persuadaient que sa dominationvalait mieux pour eux que celle du monarque chaldéen.D’autre part, le secours de Dieu n’était plus comptépour rien. Vivant à leur gré dans tous les désordres, lesprincipaux de la nation s’imaginaient que leur situationdemeurerait inexpugnable et que leur Temple ne cesseraitjamais d’être pour eux la garantie de leur inviolabiliténationale. Dès le commencement du règne, lérémieintervint pour dissiper ce fol espoir. Dans le parvismême du Temple, il vint proclamer que si l’on ne faisaitpénitence, le Temple et la ville seraient un jourruinés et maudits. Il y eut grand émoi parmi les grandset parmi le peuple. Les cris de mort retentirent contrele prophète, et les juges s’assemblèrent à la Porte neuvedu Temple pour le condamner. Jérémie affirma qu’ilavait parlé au nom du Seigneur et il renouvela sesappels à la pénitence. On se rappela que, sous Ezéchias,Michée avait fait entendre d’aussi graves prophétiescontre Jérusalem, sans qu’on tentât rien contre lui.Ahicam, fils de Saphan, qui avait eu la confiance deJosias, prit la défense de Jérémie et empêcha qu’on lelivrât aux énergumènes qui voulaient le mettre à mort.Un autre prophète, Urie, fut moins heureux. Menacépar Joakim pour avoir prédit, comme Jérémie, les malheursdu pays, il se sauva en Egypte. Saisi par les émissairesdu prince, il fut ramené devant lui pour êtrefrappé de l’épée, et son cadavre fut jeté avec ceux dumenu peuple. Jer., xxvi, 1-24.

Dès le début de son règne, Joakim se montra leprince impie et méchant qu’il devait être pendant onzeans. Il suivit les pires exemples de ses prédécesseurs,IV Reg., xxiii, 37, et commit toutes les abominations.II Par., xxxvi, 8. Jérémie nous renseigne à ce sujet dansce portrait qu’il a laissé du prince: «Malheur à celuiqui bâtit sa maison par l’injustice et ses chambres parl’iniquité; qui fait travailler son prochain sans le pajer,sans lui donner son salaire; qui dit: Je me bâtirai unemaison vaste et des chambres spacieuses; qui y percedes fenêtres, y met des lambris de cèdre et la peint enrouge! Affermiras-tu ta royauté, parce que tu te comparerasau cèdre? Ton père ne mangeait-il pas, ne buvait-ilpas, tout en pratiquant la justice et l’équité? Alors il futheureux? Il jugeait la cause du pauvre et de l’indigent,et il s’en trouva bien. N’était-ce pas me connaître? ditJéhovah. Toi, lu n’as d’yeux et de cœur que pour la cupidité,pour verser le sang innocent, pour opprimer etfaire violence!» Et le prophète concluait par cette terribleannonce: «Voici ce que dit Jéhovah au sujet deJoakim, fils de Josias, roi de Juda: On ne dira pas delui en pleurant; Hélas! mon frère; hélas! ma sœur. Onne se lamentera pas sur lui en disant: Hélas! seigneur;hélas! prince. Il aura la sépulture d’un âne, il seratraîné et jeté hors des portes de Jérusalem.» Jer., xxii,13-19. Joakim ne connut que plustard cet oracle. Leprophète, qui venait d’échapper au danger, l’eût sûrementpayé de sa vie.

Cependant le roi de Babylone n’était pas d’humeur àlaisser Néchao maître incontesté de la Syrie. Nabopolassar,alors trop âgé pour entreprendre une campagnemilitaire, confia à son fils, Nabuchodonosor, le soin de

refouler le pharaon jusque sur les rives du Nil. Néchao’,prit l’offensive et se porta à la rencontre de l’arméechaldéenne jusque dans le voisinage de l’Euphrate.Complètement battu à Charcamis (605), voir Charcamis,t. ii, col. 585, il s’enfuit en hâte vers sa frontière. Jérémie,xlvi, 1-12, salua ironiquement sa défaite commecelle d’un ennemi de Juda. Dès le commencement durègne de Joakim, en effet, il avait préconisé la soumissionau roi de Babylone comme le seul moyen d’échapperaux vengeances que celui-ci exercerait contre ceuxqui chercheraient à lui tenir tête. Jer., xxvii, 1-11. Lavictoire de Charcamis fit tomber toute la Syrie sous ladomination chaldéenne. Nabuchodonosor, qui s’étaitmis en marche pour commencer sa campagne, dès latroisième année de Joakim, vint jusqu’à Jérusalem, assiégeala ville et la prit. C’est à cette occasion que lejeune Daniel fut emmené en captivité avec plusieursautres jeunes gens de noble race. Dan., i, 1-3. Joakimfut bien obligé de se soumettre au joug. Mais le roichaldéen ne put assurer solidement sa conquête. Lamort de son père et la nécessité d’affermir son autoritéroyale au centre même de son empire le l’appelèrentpresque aussitôt à Babylone. En racontant la conquêtede la Syrie par Nabuchodonosor, Josèphe, Ant.jud., X,vi, 1, en excepte la Judée. Si ce renseignement a quelquevaleur, il permet au moins de supposer que la soumissionde la Judée fut de courte durée et que, sitôt lesChaldéens disparus, Joakim reprit son indépendance.

Jérémie comprit le danger. Saisi de douleur, il répétaitla menace du Seigneur: «Ce que j’ai bâti, je ledétruirai; ce que j’ai planté, je l’arracherai, c’est-à-diretout le pays.» Jer., xlv, 4. Parlant plus clairementencore cette même année, qui était la quatrième deJoakim, il proclama devant l’assemblée l’oracle qui annonçaitque tout le peuple de Juda serait captif à Babylonependant soixante-dix ans. Jer., xxv, 1-11. Le prophètene dit rien de l’effet produit sur l’assistance parcette révélation. Les grands n’y crurent pas sans doute,assurés qu’ils se croyaient, grâce à leurs combinaisonspolitiques, de pouvoir conserver leur indépendance, ens’appuyant sur l’Égjpte. Leur confiance reposait d’ailleurssur ce double fait que, depuis Charcamis, Nabuchodonosorétait occupé à surveiller ses puissants etdangereux voisins de la Médie, et que, d’autre part, Néchao,réorganisant sa flotte, se mettait en mesure dejeter des troupes dans les ports du littoral syrien. C’étaità ce dernier qu’allaient toutes les sympathies de Joakimet de sa cour, malgré les avertissements de Jérémie. Nabuchodonosorfinit par s’émouvoir de ce qui se passaiten Palestine. La huitième année de Joakim, il se décidaà intervenir de nouveau. IV Reg., xxiv, 1. Cf. Maspero,Histoire ancienne des peuples de l’Orient, t. iii, p. 536.Josèphe, Ant. jud., X, vi, 1, raconte que le roi de Babylonese présenta à la tête de son armée, menaçant d’envenir aux hostilités si Joakim ne s’engageait à lui payertribut. Celui-ci se hâta de s’exécuter, éloigna le monarqueà prix d’argent et se mit en mesure de payer le tributdemandé.

Provisoirement satisfait de ce dénouement, Joakim continuasa vie d’impiété, d’oppressions et de violences. Deson côté, le peuple suivit l’exemple du prince et restaadonné à tous les vices que, tant de fois déjà, lui avaientreprochés les prophètes. Jérémie ne se résigna pas à cettecoupable insouciance. Il voulut frapper un grand couppour essayer de ramener ses concitoyens à une pénitencesalutaire. Il dicta donc à son disciple, Baruch, toutes lesprophéties que Dieu lui avait inspirées depuis le temps.de Josias; puis, sur son ordre, Baruch alla les lire publiquementdans le Temple, un jour du neuvième moisoù l’on célébrait un jeûne solennel. Tout le peuple entenditla terrible lecture. Instruits de ce qui venait dese passer, les grands voulurent aussi se faire lire l’écritprophétique. Profondément émus de telles révélations,

ils déclarèrent qu’ils en informeraient le roi; mais, enattendant, ils conseillèrent à Baruch et à Jérémie de secacher. Le roi, à son tour, envoya chercher le rouleaude Baruch, et se le fit lire dans sa chambre où brûlaitun brasier, car l’on était en hiver. Quand il eut entendutrois ou quatre colonnes du rouleau, Joakim entra enfureur, saisit l’écrit, le lacéra avec le canif du scribe eten jeta les débris dans le brasier. On comprend son emportement,quand le lecteur arriva à l’apostrophe, Jer.,xxii, 13-19, qui le visait personnellement. Il commandaaussitôt d’arrêter Baruch et Jérémie; mais on ne put lestrouver. Informé de la scène qui venait d’avoir lieu aupalais, Jérémie dicta à nouveau toutes ses prophéties, ety ajouta cet autre oracle: «Sur Joakim, roi de Juda, tudiras: Ainsi parle Jéhovah: Tu as brûlé ce livre en disant:Pourquoi y as-tu écrit ces paroles: Le roi de Babyloneviendra, il ruinera ce pays et en fera disparaîtrehommes et bêtes? C’est pourquoi voici ce que dit Jéhovahsur Joakim, roi de Juda: Personne de sa race nesera assis sur le trône de David, et son cadavre sera jetédehors à la chaleur du jour et au froid de la nuit. Je lechâtierai, lui, sa race et ses serviteurs, à cause de leursiniquités: je ferai tomber sur eux, sur les habitants deJérusalem et sur tous les hommes de Juda tous les mauxdont je les ai menacés, sans qu’ils m’aient écouté.» Jer.,xxxvi, 1-31. Cette nouvelle prophétie ne fut sans doutepas montrée au roi, qui n’eût pas manqué d’exercer deplus vives poursuites contre leur auteur. — Dans l’hébreuet la Vulgate, les faits que raconte ce chapitre sontdatés de la quatrième et de la cinquième année de Joakim.Jer., xxxvi, 1, 9. Les Septante les datent de la quatrièmeet de la huitième; Josèphe, Ant. jud., X, vi, 2,de la cinquième. Il peut sembler tout d’abord étonnantque Jérémie ait écrit tant de prophéties la quatrième annéede Joakim, Jer., xxv, 1; xxxvi, 1; xlv, 1; xlvi, 2, etqu’il n’ait plus élevé la voix pendant les sept dernièresannées du règne. Il est peu probable aussi que le prophètese soit tu, quand il constata que la seconde apparitionde Nabuchodonosor n’avait rien changé dans laconduite du prince et de ses sujets. Il y aurait doncquelque raison d’adopter ici le chiffre des Septante etde rapporter à la huitième année de Joakim, dans l’hiverqui suivit la seconde campagne de Nabuchodonosor, lascène de la lecture et du brasier. Outre que les chiffressont souvent sujets à caution dans les textes bibliques,par le fait des copistes, on conçoit que, dans ce cas particulier,on ail aisément pu lire, à cause de la ressemblancedes lettres, ntnort, hàmîU, «cinquième,» oumême >y! 3°i, rebi’i, «quatrième,» au lieu de >j>dw,semînî, «huitième.» Quant au jeûne dont il est parlédans ce passage comme ayant été célébré le neuvièmemois, c’était un jeûne extraordinaire, peut-être prescritpar le grand-prêtre pour conjurer les malheurs destemps. Le jeûne annuel avait lieu le septième mois. VoirJeune, col. 1529.

Les tendances égyptiennes du roi et de la cour ne firentque s’accuser à la suite de la seconde apparition duroi de Babylone à Jérusalem. Du reste, Joakim inclinaitnaturellement à entrer dans les vues politiques de Néchao,auquel il devait son trône. Les choses allèrent siloin dans ce sens que, trois ans après la dernière expéditionchaldéenne, Joakim en vint à se révolter ouvertementcontre son suzerain, sans doute en lui refusantle tribut. Les généraux chaldéens entrèrent aussitôt encampagne. Ils renforcèrent leurs troupes de contingentssyriens, moabites et ammonites et parurent devant Jérusalem.Le livre des Rois n’indique pas le résultat dela guerre. Il insiste seulement sur le caractère providentielde cette calamité, déchaînée pour punir Juda detous les crimes commis, particulièrement sous le roiManassé. IV Reg., xxiv, 1-6. Le livre des Paralipomènes,plus explicite, raconte que Nabuchodonosor vinten personne à Jérusalem, ce qui laisse supposer que le

roi chaldéen amena de nouveaux renforts pour vaincreune résistance dont ses généraux ne pouvaient triompher. D’après les Septante et la Vulgate, Joakim auraitété chargé de chaînes et conduit à Babylone. Le textehébreu dit seulement que Nabuchodonosor le chargeade chaînes «pour le conduire à Babylone». II Par.,xxxvi, 5-7. Ce projet ne fut pas exécuté, pour une raisonque le texte sacré n’indique pas. Josèphe, Ant. ]ud., X,vi, 3, dit que Joakim reçut pacifiquement Nabuchodonosor à Jérusalem, persuadé qu’il n’avait rien à redouterde lui, mais qu’une fois entré dans la ville, le monarquechaidéen mit à mort les plus distingués d’entre les habitants, et parmi eux le roi lui-même, dont il fit jeter lecadavre hors des murs sans sépulture. Ensuite il établitroi Joachin (Jéchonias), fils de Joakim, et emmena aveclui à Babylone trois mille captifs, au nombre desquelsse trouvait le jeune Ézéchiel. Ce récit de Josèphe assigneà Joakim une fin conforme à ce que, par deux fois, avaitprédit Jérémie. xxii, 18, 19; xxxvi, 30. Il est dit ailleursque Joakim «se coucha avec ses pères». IV Reg., xxiv,5. Mais cette expression peut signifier soit simplementqu’il mourut, soit qu’après le départ de Nabuchodonosorson cadavre fut recueilli et enseveli dans le tombeau des

rois par les soins de son fils.

H. Lesêtre.

2. JOAKIM ('IwotxEîji), grand-prêtre (6 Eepeyc), fils dusouverain pontife Helcias, contemporain de Jérémie etde Baruch. Il était resté à Jérusalem et les captifs deBabylone lui envoyèrent de l’argent pour les sacrificeset le service du sanctuaire. Baruch, i, 7.

3. JOAKIM ('iMaxss’ij), Juif déporté à Babylone, maride Susanne, distingué par son rang et par ses richesses.Dan., xiii, 1, 4, 6, 28, 29, 63. Les vieillards qui accusèrent Susanne fréquentaient sa maison et avaient ainsileurs entrées dans son parc. jr. 15-16, 26. Joakimrendit grâces à Dieu, ꝟ. 63, lorsque sa femme eut étéjustifiée, par la sagesse de Daniel, de leurs accusationscalomnieuses. Quelques exégètes ont supposé que cepersonnage important n'était autre que le roi Joakim.

^ Voir Joakim 1.

    1. JOANNA##

JOANNA ('ImswS;), fils de Résa, un des ancêtresde Jésus-Christ. Luc, iii, 27. L'Évangéliste le donnecomme petit-fils de Zorobabel. Il est possible qu’il soitle même que l’Hananias mentionné comme fils de Zorobabel (en prenant «fils» dans le sens de petit-fils).I Par., iii, 19. 'I(i) «w3; peut être la transcription grecquede Ifànanyâh. Voir Hananias 1, col. 414.

    1. JOARIB##

JOARIB (hébreu: Yehôyàrîb; Septante: 'Iùiapîg), orthographe, dans II Esd., xi, 10, et dans I Mach., ii, 1, duprêtre qui est appelé dans les Paralipomènes Joiarib.Voir Joiarib.

JOAS (hébreu: Yô'ds, écrit aussi Yehô'âs, les deuxformes étant employées indifféremment en hébreu pourdésigner le même personnage; Septante: 'Itoâç), nom enhébreu de sept Israélites. Joas5 est appeb’parla VulgateSecurus. En revanche, un huitième Israélite qu’elleappelle Joas, I Par., vii, 8 (voir Joas 6), porte en hébreuun nom différent.

1. JOAS, père de Gédéon, descendant de Manassé,de la famille d’Abiézer. Jud., vi, 11, 29; vii, 14; viii, 29,32. Il n’avait pas été fidèle au service du vrai Dieu etavait élevé un autel à Baal, mais lorsque son fils, aprèsavoir été appelé à délivrer son peuple de la servitude desMadianites, eut renversé l’autel idolâtrique et coupéVaschérah, Joas prit sa défense contre les autres membresde sa tribu. Jud., vi, 29-32. Voir Gédéon, col. 146.

2. JOAS, fils d’Amélech, d’après la Vulgate. III Reg.,

xxir, 26: II Par., xviii, 25. On croit assez communémentque Aniéléch, regardé comme un nom propre par saintJérôme, est en réalité un nom commun, ham-mélék, «leroi,» et qu’il faut traduire le texte original ainsi: «Joas,fils du roi,» c’est-à-dire d’Achab, roi d’Israël. D’aprèscette explication, Joas aurait été un des jeunes fils de ceprince qui lui aurait confié, ainsi qu'à Amon, gouverneur de Samarie, l’administration du royaume, pendantqu’il conduisait lui-même son armée contre RamothGalaad. Avant son départ, Achab donna l’ordre à l’un et àl’autre de retenir en prison le prophète Michée, fils deJémia, qui lui avait prédit qu’il périrait au siège deRamoth. Voir Amélech 1, t. i, col. 473, et Michée, filsde Jémia.

3. JOAS, roi de Juda (877-837 d’après la chronologieordinaire; 837-798 d’après la chronologie assyrienne). Ilétait fils d’Ochozias, qui fut mis à mort par l’ordre deJéhu. À la mort d’Ochozias, sa mère, Athalie, fit périrtoute la descendance de son fils, afin de monter ellemême sur le trône de Juda. Joas, le plus jeune filsd’Ochozias, à peine âgé d’un an, fut soustrait au massacre par sa tante, Josabeth, et ensuite tenu caché pendant six ans dans le Temple. La septième année, legrand-prêtre Joi’ada révéla sa présence, le fit proclamerroi, le sacra et suscita ainsi une sorte de conspirationdans laquelle Athalie périt à son tour. Voir Athalie, t. i,col. 1207, 1208. Joiada profita de la proclamation dunouveau roi pour faire jurer au peuple fidélité enversle Seigneur, détruire le culte de Baal, qu’Athalie avaitinstallé jusque dans le Temple, et rétablir toutes chosesdans les conditions réglées par le roi David.

Le jeune Joas subit naturellement l’influence dugrand-prêtre auquel il devait le trône. Il demeura fidèleau Seigneur tant que cette influence s’exerça sur lui.Devenu plus grand, il se préoccupa des travaux de réparation et d’entretien que réclamait le Temple, et ilordonna aux prêtres de consacrer à ces travaux l’argentqui provenait des offrandes. La vingt-troisième annéede son règne, Joas constata qu’il n’avait pas été tenucompte de ses ordres. Il s’en plaignit à Joiada et résolutde décharger les prêtres d’un soin dont ils s’acquittaientsi mal. Un coffre fut placé dans le Temple pour recevoir les offrandes. Quand il paraissait plein, un officierdu roi et un représentant du grand-prêtre le vidaient.Les sommes ainsi recueillies servirent à payer les ouvriers employés aux réparations de l'édifice. Celles-citerminées, on consacra les sommes qui restaient disponibles à la fabrication d’ustensiles d’or et d’argent destinés au Temple.

Joiada s'éteignit à un âge très avancé. Voir Joiada.Après sa mort, certains chefs de Juda acquirent auprèsdu roi l’influence qu’avait eue le grand-prêtre et ils enfirent mauvais usage. Joas, qui paraît avoir manqué decaractère, se laissa persuader par ses nouveaux conseillers. Il permit de rétablir le culte d’Astarthé et desidoles, à la place du culte du vrai Dieu. En vain desprophètes firent entendre leurs voix. Le fils même deJoiada, Zacharie, ne fut pas écouté. Joas poussa l’ingratitude jusqu'à le faire lapider dans le Temple, crimequi suscita une horreur dont Notre-Seigneur lui-mêmeévoque le souvenir. Matth., xxiii, 35; Luc, xi, 51. Lamême année, par un juste châtiment de Dieu, le roi deSyrie, Hazæl, monta contre le royaume de Juda, s’empara de Geth et serait arrivé jusqu'à Jérusalem, si Joasne l’avait arrêté en lui envoyant tous les objets précieuxqui avaient été consacrés dans le Temple par ses prédécesseurs et par lui-même, et tout ce que renfermaientle trésor du sanctuaire et le trésor royal.

Celte défaite et cette humiliation affectèrent profondément le roi. Les partisans de Joiada et de Zacharie reprirent courage et deux serviteurs de Joas, Zabad etJozabad, se faisant les exécuteurs d’une haine générale,

regorgèrent dans son lit. Il laissa après lui un nom simaudit qu’on lui refusa l’honneur d’être enterré dansle tombeau des rois; on se contenta de l’inhumer dansla cité de David. Joas avait régné quarante ans. Le dernierquart de son règne fut assez criminel et assez malheureuxpour faire oublier les années de prospérité quil’avaient commencé. IV Reg., xi, 1-xii, 21; II Par., xxii,10-xxiv, 26. Joas fut contemporain du prophète Eliséeet peut-être aussi du prophète Joèl. Son nom est omis,comme celui d’Ochozias et d’Amasias, dans la généalogiede Notre-Seigneur en saint Matthieu.

H. Lesêtbe.

1 4. JOAS, roi d’Israël (840-824 selon la chronologie ordinaire;798-783 selon la chronologie assyrieune). Il étaitfils de Joachaz, auquel il succéda la trente-septième annéede Joas, roi de Juda. On eut ainsi pendant trois ansdeux rois du même nom à la tête des deux royaumesdivisés. Joas, roi d’Israël, suivit, comme ses prédécesseurs,les traditions du premier roi schismatique, Jéroboam;il entretint son peuple dans les pratiques idolâtriquesqui, lui semblait-il, étaient la sauvegarde de1 autonomie d’Israël. Il fut néanmoins un prince énergiqueet habile, comme le prouvent les deux guerres qu’ilentreprit et qui se terminèrent pourlui par des victoires.C’est sous son règne que mourut le prophète Elisée.Joas le visita pendant sa dernière maladie et reçut delui, sous une forme symbolique, l’annonce des succèsqu’il devait remporter contre les Syriens. Voir Elisée,t. ii, col. 1695. En effet, quand Hazæl mourut et que sonfils Bénadad III lui succéda, Joas attaqua ce dernier, lebattit à trois reprises et rentra en possession des villesqu’Hazaêl avait enlevées à son père Joachaz.

A Joas de Juda avait succédé son fils Amasias. Voulantentreprendre une campagne contre les Iduméens, cedernier chercha à fortifier son armée en prenant à sasolde, pour cent talents d’argent, des guerriers d’Israël.C’est le seul exemple d’une armée mercenaire que nousoffre l’histoire de cette époque. Un prophète l’engagea àrenoncer à un pareil concours. Les guerriers d’Israëlfurent donc congédiés. Mais, bien que la solde déjà verséeleur eût été laissée, ils se montrèrent fort courroucésdu mépris qu’on semblait faire de leur valeur et, en retournantchez eux, ils pillèrent les villes de Juda, depuisSamarie jusqu’à Béthoron, et y tuèrent trois mille personnes.

Revenu victorieux de sa guerre contre les Iduméens,Amasias proposa à Joas une alliance ou une guerre: «Viens et voyons-nous!» Joas répondit par le dédai-’gneux apologue du cèdre et du chardon (voir Apologue,t. ], col. 778) et ajouta: «Tu as battu les Iduméens etton cœur s’enorgueillit. Jouis de ta gloire et reste cheztoi.» Voir Amasias, t. i, col. 44^-445. Amasias insistant,Joas partit en campagne contre lui, le défit à Bethsamèset le fit prisonnier. Puis, il le reconduisit ironiquementà Jérusalem, dans les murs de laquelle il fit pratiquerune brèche de cent coudées, de la porte d’Éphraïm à laporte de l’Angle. Il laissa la vie et le trône à son rival;mais il s’empara des quelques trésors du Temple quirestaient encore dans la maison d’Obédédom et de ceuxqui se trouvèrent dans la maison du roi. Puis, emmenantavec lui des otages, il s’en retourna à Samarie.Dans cette campagne contre Juda, il fit preuve à la foisd’habileté et de modération. Joas ne régna que seize ans,mais son règne procura profit et gloire à Israël. Il futenterré à Samarie, dans le tombeau de ses pères. IV Reg.,

xiii, 10-xiv, 16; II Par., xxv, 6-24.

H. Lesêtre.

5. JOAS, descendant de Sélah, de la tribu de Juda.La Vulgate n’a pas conservé son nom sous sa formehébraïque, mais l’a appelé Secutiis, «ferme,» selon sasignification étymologique. Elle a traduit d’ailleurs égalementtous les autres noms propres du même verset.1 Par., iv, 22. Voir Incendiaire, col. 864.

6. JOAS (hébreu: Yô’as), le second des neuf fils deBéchor, qui était lui-même le second fils de Benjamin etle petit-fils de Jacob. I Par., vii, 8. Son nom est différenten hébreu de celui des autres Joas.

7. JOAS, second fils de Samaa, de Gabaath, de latribu de Benjamin. Avec son frère Athiézer, il alla sejoindre à David pendant la persécution de Saùl et futun de ses vaillants soldats. I Par., xii, 3.

8. JOAS, un des intendants du roi David. Il étaitchargé de la garde des approvisionnements d’huile.

I Par., xxvil, 28.

    1. JOATHAM##

JOATHAM (hébreu: Yô(âm; Septante: 'la>âfa v),nom d’un roi de Juda et de deux autres Israélites. Celuidu roi est écrit quelquefois Joathan et c’est aussi l’orthographequ’a adoptée la Vulgate pour le troisième.

    1. JOATHAM##


1. JOATHAM, le plus jeune fils de Gédéon. Jud., ix, 5.

II réussit à échapper au massacre de ses soixante-neuffrères, égorgés par ordre d’Abimélech à Éphra, t. ii,col. 1869, et étant monté sur le mont Garizim, il annonçaaux habitants de Sichem, par l’apologue des arbres (voirApologue, t. i, col. 778), le sort que leur réservait latyrannie du fils dénaturé de Gédéon qu’ils venaient demettre à leur tête. Jud., ix, 7-20. Il s’empressa alorsd’aller se réfugiera Béra 2, ꝟ. 21 (t. i, col. 1604) et l’on nesait plus rien de son histoire.

    1. JOATHAM##


2. JOATHAM, onzième roi de Juda, depuis le schisme(757-741 avant J.-C, d’après la chronologie ordinaire;750-735, d’après la chronologie assyrienne). Il était filsd’Ozias. Quand celui-ci fut entré dans le sanctuaire, afinde brûler des parfums sur l’autel, et eut été frappé de lalèpre, pour s’être ingéré dans un ministère qui appartenaitexclusivement aux prêtres, son fils Joatham dut loremplacer dans l’accomplissement des fonctions publiques.Il prit le gouvernement du palais et jugea lepeuple, pendant que le malheureux Ozias restait confinédans une demeure écartée. Voir Ozias. Joatham n’eutpas à remplir longtemps son office de vice-roi, car iln’avait que vingt-cinq ans quand il commença à régner,à la mort de son père. Il fut un roi bon et pieux, commeavait été Ozias avant sa funeste ingérence dans le sanctuaire;il eut soin de ne pas s’immiscer dans les fonctionsréservées aux prêtres. II Par., xxvi, 16; xxvii, 2.Cependant, malgré sa piété, les hauts lieux continuèrentà subsister. Le peuple y offrait des sacrifices et des parfumset la perversion générale s’accentuait. C’est contreelle que protestèrent les prophètes qui se firent entendredu temps de Joatham, Isaie, i, 1, Osée, i, 1, et Michée,i, 1. — Joatham fut grand bâtisseur. Il construisit laporte supérieure du Temple. II Par., xxvii, 3. Josèphe,Ant. jud., IX, xi, 2, parle de portiques et de vestibulesélevés dans le Temple, de réparations aux parties enruine des murs de la ville, auxquels furent ajoutées degrandes et fortes tours. Le texte sacré dit que ces dernierstravaux furent exécutés sur la colline d’Ophel, ausud de la ville. II Par., xxvii, 3. Des cités furent encorebâties dans la montagne de Juda, et, dans les bois, des.châteaux et des tours. II Par., xxvii, 4. Le roi ne faisaitd’ailleurs que continuer les entreprises de son père.II Par., xxvi, 9-10. — Joatham eut à faire la guerrecontre le roi des Ammonites. Il le vainquit et lui imposaun tribut de cent talents d’argent, dix mille cors de fromentet autant d’orge. Ce tribut lui fut payé pendanttrois ans. De son temps, Rasin, roi de Syrie, et Phacée,roi d’Israël, se préparèrent à envahir le royaume de Juda.Les fortifications, construites par Ozias et Joatham,avaient sans doute été élevées en prévision de cette inva. sion. Il ne paraît pas cependant que celle-ci se soit pro-Iduite du vivant de Joatham; ce fut son fils Achaz qui «ut à la subir. La faveur divine fut donc assurée entoutes choses à Joatham, en récompense de sa fidélité.Après un règne de seize ans, ii mourut et fut ensevelidans la cité de David. Il fleg., xv, 32-38; II Par.,

xxvii, 1-9.

H. Lesêtre.

    1. JOATHAN##


1. JOATHAN, orthographe du nom de Joatham, roi<le Juda, dans IV Reg., xv, 5, 7; I Par., iii, 2; v, 17;Is., i, 1; vii, 1; Ose., i, 1; Mich., i, 1. Voir Joatham 2.

    1. JOATHAH (voir Joatham)##


2. JOATHAH (voir Joatham), second fils de Johaddaï,êe la tribu de Juda. I Par., ii, 47.

JOB, nom, dans la Vulgate, d’un Israélite et dupatriarche de la terre de Hus. Ils portent en hébreu unnom différent.

1. JOB (hébreu: Yôb; Septante: ’Ao-oup; Alexandrinus: ’Iao-ovip), troisième fils d’Issachar et petit-filsde Jacob. Gen., xlvi, 13. Dans I Par., vii, 1, il est appeléJasub. Voir Jasub 1, col. 1144.

2. JOB (hébreu: av», ’Yôb, «adversaire;» Septante: ’Lié), patriarche de la terre de Hus (fig. 271). Savie nous est connue seulement par le livre qui porte sonnom et dont nous montrerons plus loin le caractère

271. — Job. D’après Fra Bartolommeo. Galerie des UfTizi àFlorence. Voir aussi Blaie, The Book of Job, invented andengraved, in-f —, Londres, 1825.

3. JOB (LIVRE DE). — I. GENRE LITTÉRAIRE ET PLAN

sommaire. — 1° Poème didactique. — Le Livre de Jobparticipe du drame, de l’épopée et du genre lyrique: il sehistorique. «Il y avait dans la terre de Hus un homme I rapproche du drame par sa forme dialoguée, sa strucappeléJob. Cet homme était pieux, juste, craignant I ture interne et les caractères bien soutenus des personoffrait à Dieu des holocaustes pour ses enfants, dont lavie désœuvrée et dissipée lui causait des craintes. Satan,jaloux de sa vertu, qu’il attribue à l’égoîsme, jure d’envenir à bout et, dans une réunion des fils de Dieu (desanges) qui se tenait en présence de Jéhovah, il demandela permission de l’éprouver. Dieu y consent. Alors lescalamités fondent sur le saint homme. Ses bœufs et sesânesses sont emmenés dans une razzia de Sabéens; lefeu du ciel, la foudre, extermine ses troupeaux avecleurs gardiens; les Chaldéens enlèvent à main arméeses chameaux et leurs conducteurs; un ouragan renversela maison où sont réunis ses dix enfants qui périssentdans les décombres. En recevant ces nouvelles, arrivéescoup sur coup, Job fait cette sublime réponse: «Nu jesuis sorti du sein de ma mère et nu je retournerai dansle sein (de la terre). Ce qu’il m’avait donné, le Seigneurl’a repris: béni soit le nom du Seigneur! En tout cela,Job ne pécha point et ne dit rien d’insensé contreDieu.» Job, i, 21-22. Sur une nouvelle permission d’enhaut, Satan, furieux de sa défaite, se remet à l’œuvre.A Dieu, qui lui vantdit la patience inaltérable de Job,il avait dit: «Peau pour peau; l’homme donnera tousses biens pour conserver sa vie; mais étendez la main,touchez ses os et sa chair et nous verrons s’il ne vousmaudira pas en face.» Job, ii, 4-5. En conséquence, Jobest frappé d’un mal terrible qui le rend à charge à lui-mêmeet aux autres. Sa femme insulte à ses souffranceset lui conseille de blasphémer. Il est inébranlable. Troisde ses amis, venus pour le consoler, se tiennent ensilence auprès de lui, sept jours et sept nuits durant,témoignant par leurs larmes et leur attitude quelle partils prennent à sa douleur. Enfin, quand Job commenceà exhaler ses plaintes ils sortent de leur mutisme. Unediscussion s’engage où les amis cherchent à prouverque tous les maux terrestres sont le châtiment decrimes antérieurs, tandis que Job proteste avec énergiede son innocence et finit par réduire au silence sesinterlocuteurs, sans cependant trouver lui-même le motde l’énigme. Cette solution, autant que la raison humainepeut la découvrir, sera suggérée par un jeune assistant,EUti. Dieu termine le débat en distribuant des reprochesaux trois amis, des éloges tempérés de blâme àJob. Celui-ci s’humilie devant le Seigneur, reconnaît saprésomption et promet d’en faire pénitence. Le bonheurrentre dans sa maison; ses nombreux amis lui apportentà l’envi des présent?; sa fortune d’autrefois s’accroîtdu double. Il possède à la fin quatorze mille brebisou chèvres, mille paires de bêtes à corne, mille ânesses.Il eut sept fils et trois filles: l’une d’elles s’appelaYemîmâh (Vulgate: Dies), col. 1248, la seconde, Qeçi’âh(Vulgate: Cassia), t. ii, col. 337, la troisième, Qérénhap-pûk (Vulgate: Coimu stibii, «Corne d’antimoine» ),t. ii, col. 1012. Job vécut encore cent quarante ans et ilvit ses petits-fils jusqu’à la quatrième génération. Uneaddition apocryphe à la traduction grecque des Septanteidentifie faussement Job avec le roi édomite Jobab. VoirJobab 2, col. 1579. — Sur la patrie de Job, voir Hus(Terre be), t. iii, col. 782-783. — Sur la maladie deJob voir Éléphantiasis, t. ii, col. 1663. — Sur le fumierde Job voir Cendre, t. ii, col. 407, 3°; Vigouroux, Manuelbiblique, ll’édit., 1902, t. ii, p. 293. F. Prat.

Dieu et fuyant le mal. Il avait sept fils et trois filles; etsa fortune comprenait sept mille têtes de menu bétail( ?ô’n), trois mille chameaux, cinq cents paires de grosbétail (bâqâr), cinq cents ânesses et de très nombreuxserviteurs. C’était le plus grand (le plus puissant et leplus riche) des Orientaux.» Job, i, 1-3. Chaque jour il

nages; les parties en prose, épilogue et prologue, luidonnent un faux air de poème épique; enfin, certainsdiscours des trois amis, d’Éliu, de Job, surtout de Dieu,atteignent au lyrisme le plus sublime. Cependant, àproprement parler, le livre de Job n’est pas un drame,car il manque de ce qui est essentiel au drame, c’est-à

dire une intrigue que les événements embrouillentd’abord, puis dénouent; ce n’est pas davantage uneépopée, car la narration, très brève par rapport aureste, n’est pas le fond du poème, mais seulement uncomplément accessoire quoique essentiel; de mêmel’expression lyrique des sentiments n’est pas le but del’auteur, elle n’est que l’effet spontané de son éloquencenaturelle, de son exubérante imagination etde la facilité avec laquelle il s’identifie à ses personnages.Job est la production puissante d’un génie créateur,une œuvre littéraire grandiose qu’il serait oiseuxet puéril de vouloir ramener aux règles édictées parAristote, ou faire rentrer dans quelqu’un des genresusités chez les littérateurs indo-européens. Tout cequ’on peut dire, c’est que l’écrivain se propose avanttout d’instruire et que son ouvrage appartient, par làmême, au genre didactique.

Beauté littéraire.

On est unanime à l’admirer. «La langue du livre de Job est l’hébreu le plus

limpide, le plus serré, le plus classique. On y trouvetoutes les qualités du style ancien, la concision, la tendanceà l’énigme, un tour énergique et comme frappéau marteau, cette largeur de sens éloignée de toutesécheresse, qui laisse à notre esprit quelque chose àdeviner, ce timbre charmant qui semble celui d’un métalferme et pur.» Renan, Le livre de Job, étude prélim.,in-8°, Paris, 1859, p. xxxvi. Cornill, Einleitung, 4e édit.,in-8°, Fribourg-en-Brisgau, 1896, p. 233, appelle Job 6 lacouronne des livres sapientiaux, une des plus merveilleusescréations de l’esprit humain». Tout y décèle,avec une puissance et une richesse de conception extraordinaires,un art consommé qui s’étend jusqu’aux moindresdétails. Les caractères, par exemple, sont parfaitementsoutenus. Éliu est jeune, impétueux, diffus, pleinde pensées qui s’embarrassent mutuellement et ne trouventpas d’expression adéquate; avec cela, sensé, bienveillant,généreux. Les trois amis de Job, dont le rôleest presque identique, ne se ressemblent pourtant paset représentent trois nuances bien tranchées. Éliphazest âgé, grave, jaloux de sa réputation de sagesse héréditaire;mais la contradiction l’offense, l’irrite et le faitsortir de lui-même. Baldad est d’âge moyen, riche etbien né, présomptueux et arrogant; il ne fait guère querépéter les raisons du précédent, en y ajoutant cependantde beaux développements poétiques. Sophar est fougueux,emporté, loquace, insolent, emphatique, sûr delui, comme il sied à un jeune homme. — La forme estsi imagée, le tour si vif, la pensée si noble, le ton siéloquent, que ce dialogue, stationnaire pour ainsi dire,ne cause au lecteur aucune fatigue.

Divitiondu livre.

Voici maintenant la structure

extérieure et pour ainsi dire le squelette du poème. Ilcomprend: 1° un Prologue (en prose). — Prospérité etépreuves de Job, i-n; 2° le Dialogue de Job et de te*trois ami*, m-xxzi, qui forme la majeure partie dulivre et renferme: 1. le prélude: Plaintes de Job, iii, etS. multiple discussion entre Job et ses amis. I— diia.ittion.— a) Discours d’Éliphaz, iv-v, et réponse de Job,vi-vn. — b) Discours de Baldad, viii, et réponse de Job,ix-x. — c) Discours de Sophar, xi, et réponse de Job,xii-xrv. — // discussion. — a) Reprise d’Éliphaz, xv,et réplique de Job, xvi-xvii. — 6) Reprise de Baldad,xviii, et réplique de Job, xix. — c) Reprise de Sophar,xx, et réplique de Job, xxi. — /// ditcuttion. — a) Dernierassaut d’Éliphaz, xxii, repoussé par Job, xxiii-xxiv.

— b) Quelques mots de Baldad, xxv; Job riposte, xxvi.

— c) Monologue de Job, xxvii-xxxi. — 3° Interventiond’Éliu, xxxii-xxxvii. — 4° Théophanie et discourt deJéhovah, xxxviii-xli. — 5° Épilogue (en prose). Les troisamis sont blâmés et Job est récompensé, xi.n.

II. Cakonicité, autorité. — 1° Place dans le canon.

— Aucun doute ne s’étant jamais produit, ni parmi lesJuifs ni parmi les chrétiens, sur la canonicité du livre

de Job, il est superflu d’insister sur ce point. — La placeoccupée par le livre de Job dans le canon est très variable.Dans la Bible hébraïque, il fait partie des Hagiographes(Kefûbîm) et suit les Psaumes, quand ceux-civiennent après un autre livre des Kefûbim, ou bien lesProverbes, quand les Psaumes commencent la série. Engrec. Job précède maintenant les Psaumes et suit immédiatementles livres historiques; il en est de mêmeen latin, dans l’édition officielle de la Vulgate, mais lesmanuscrits anciens, tant grecs que latins, lui donnentcomme d’ailleurs aux autres livres, les places les plusdiverses. Voir, pour les manuscrits hébreux et grecsRyle, The Canon of the Old Testament, in-8°, Londres,1892, p. 281; pour les latins, S. Berger, Hittoire de laVulgate, in-8°, Paris, 1893, p. 331-339. Chez les SyriensJob venait après le Pentateuque.

Caractère historique de Job.

L’opinion mentionnée

dans le Talmud (Baba bathra, t» 15), que c Job n’ajamais existé et n’est pas un être réel mais une parabole»,ne fut jamais dominante même parmi les Juifs, aussicette affirmation fut-elle plus tard modifiée ainsi: c Jobn’a existé que pour être une parabole.» Tous les Pères,sans exception, regardent Job comme un personnagehistorique. Ils en ont pour garant l’Écriture même.Ézéchiel, xiv, 14, 20, range Job, à côté de Noé et deDaniel, au nombre des saints dont les vertus seraientimpuissantes à conjurer le courroux divin. Pour ne riendire de Tobie, ii, 12-15, où Job n’est nommé que dansla Vulgate, saint Jacques, v, 11, écrit aux fidèles: i Vousavez entendu (raconter ou lire) la patience de Job etvous avez vu quelle fin le Seigneur (mit i ses épreuves),car le Seigneur est clément et miséricordieux.» Aussil’Église latine fait-elle mention de Job au martyrologe,le 10 mai, et l’Église grecque le 6 mai. Cf. Acta sanetorum,maii t. ii, p. 492; pour les textes des Pères,cf. Knabenbauer, Commentar, 1888, p. 12-13.

Vérité historique du Livre de Job.

Si tout le

monde à peu près s’accorde à reconnaître l’existenceréelle de Job, les protestants sont très divisés sur lavaleur historique du livre. Les uns n’y voient qu’un purroman (Reuss, Hengstenberg, Merx); d’autres y découvrentun noyau historique assez léger (Cheyne, Budde);d’autres encore augmentent un peu la dose d’histoire,tout en laissant prédominer la fiction (Delitzsch, Driver,Davidson, etc.). — Il est clair que Job et ses amis neparlaient point en vers et il n’est pas probable qu’un dialogueimprovisé, reproduit tel quel, présentât cet ordre,cette régularité de plan, cet enchaînement admirabledans le développement du sujet. Une conversation n’estpas une thèse, ni une suite de monologues. Aussi,depuis Huet, les interprètes catholiques admettent-ilssans difficulté c que Job et ses amis n’ont prononcé quele fond du discours qu’on leur met â la bouche et queladiction [entendue dans le sens le plus large] appartientà l’auteur sacré». Le Hir, Le Livre de Job, in-8°,Paris, 1873, p. 232. La part exacte de l’auteur reste impossibleà déterminer. Saint Thomas, Expotit. in Job,Opéra, Parme, t. xiv, p. 126, pense que la théophaniepeut n’avoir été qu’une révélation intérieure projetée audehors. À plus forte raison, la scène où Satan est représentédans le conseil de Dieu est-elle dramatisée, pourmettre en relief cette double vérité que le démon estjaloux de la vertu de l’homme, mais qu’il ne peut letenter sans la permission de Dieu. Tout le monde accordeaussi que les chiffres exprimant la fortune de Job, soitavant soit après l’épreuve, sont des nombres ronds. Il ya également, on ne doit pas le méconnaître, dans le récitdes malheurs fondant coup sur coup sur le saint homme,un procédé artificiel que l’on peut ne pas prendre à larigueur de la lettre. Quatre fois, un serviteur, le seuléchappé au désastre, vient porter son triste message,juste au moment où le précédent achève de s’acquitterdu sien. Néanmoins, comme il s’agit d’événements sur

naturels, l’objection n’est pas péremptoire. Il faut endire autant des autres difficultés soulevées par les rationalistes: le miracle admis, les impossibilités s'évanouissent; il convient seulement, selon l’axiome théologique,de ne pas multiplier les miracles sans nécessité.

Autorité relative des diverses parties.

i. Celivre étant canonique, c’est-à-dire inspiré, on doit regarder comme divin tout ce que l’auteur dit lui-même oufait dire à Dieu: soit le prologue et l'épilogue, avec lediscours de Jéhovah, i-ii; xxxviii-xlii. — 2. L’examendu poème montre que l’auteur met ses pensées dans labouche d'Éliu. Ce dernier parle après tous les autres,pour donner une solution nouvelle que personne neréfute, que personne ne conteste. Job semble en êtresatisfait, puisqu’il n’y répond pas; Dieu n’y trouve rienà reprendre. Dans ces conditions, le discours d'Éliu doitêtre regardé aussi comme d’autorité divine, xxxii-xxxvii.— 3. Pour les autres interlocuteurs, la question est plusdélicate. On ne peut guère qu’appliquer ce principe général: dans un drame ou dans un dialogue, l’auteurapprouve et fait sien ce dont tous les interlocuteursconviennent et qui est ainsi placé hors de toute controverse; par exemple, ici, le dogme de la providence, dela bonté, de la sagesse, de la toute-puissance, de lascience infinie de Dieu. — 4. Job est repris par Éliu,xxxiii, 8-12, et par Dieu, xxxviii, 2, et il se blâme luimême, xxxix, 33-35 (xl. 3-5); xlii, 3, mais peut-être lereproche et le désaveu portent-ils moins sur le fond quesur la manière. Ses plaintes sont excessives, ses parolesinconsidérées, ses apostrophes trop violentes; mais lathèse qu’il soutient est juste et, en définitive, Dieu luidonne raison. C’est pourquoi plusieurs Pères allèguentsans difficulté, comme témoignage scripturaire, les paroles de Job. S. Augustin, Ad Oros. contra Prise,et Orig., 9, t. xlii, col. 676; S. Jérôme, Contra Pelag.,Il, 4, t. xxiii, col. 563. En tout cas, le danger d’erreurdoit être limité aux assertions contestées jusqu’au boutpar les amis ou désapprouvées par Dieu et par Éliu. —5. Restent les trois amis contre lesquels «s’allume lecourroux de Dieu pour n’avoir pas proféré des parolesde vérité comme Job», xlii, 7. II ne s’ensuit pas que toutsoit faux dans leurs discours. Saint Paul, I Cor., iii, 19,cite un mot d'Éliphaz, avec un passage des Psaumes,sous la formule ordinaire des citations bibliques: «Caril est écrit: Je prendrai les sages dans leur ruse;» texte emprunté à Job, v, 13. Mais l’Apôtre a qualité pourdiscerner infailliblement ce qui, dans ces discoursmêlés de vrai et de faux, a la sanction de l’auteur inspiréet, par conséquent, de Dieu. Quoi qu’en pense saintAugustin, Ad Oros., 9, t. xlii, col. 676, ce discernementest souvent difficile à tout autre.

III. État dd texte, versioks, métrique. — Dans cesdernières années, le texte du livre de Job a été l’objetde nombreux travaux. Les critiques sont généralementd’avis que la conservation du texte est satisfaisante,surtout pour un écrit si difficile à comprendre. Outreles commentateurs, ont surtout travaillé à rétablir letexte, avec des critères fort différents: A. Merx, DasGedicht von Hiob, 1871, Iéna, p. lvii-lxxxviii; F. Hitzig,Das Buch Hwb, Leipzig, 1874; G. H. Bateson Wright,TheBook ofJob, Londres, 1883; C. Siegfried, The Book ofJob (Bible polychrome), Leipzig, 1895; G. Béer, Der Textdes Bûches Hiob, Marbourg, 1895 et 1897; enfin Bickell etLey dans les ouvrages mentionnés plus loin. Les principaux secours pour la restitution du texte primitif sont,avec le sens et le contexte, les versions et la métrique.1° Versions.

Celles qui dérivent du grec, telles quel’italique, la syriaque et la copte, nous aident seulementà rétablir le texte des Septante. La Vulgate, dont toutJe monde s’accorde à reconnaître les grands mérites,représente un original très voisin du texte actuel. Ellepermet cependant de faire quelques corrections de détail. Cf. Kaulen, Einleilung, 3e édit., Fribourg-enBrisgau, 1890, p. 304. — Par contre, les Septante s'éloignent notablement de la recension massorétique. Plusieurs passages ressemblent moins à une traductionqu'à une paraphrase. Il y a surtout des omissionsnombreuses, évaluées par saint Jérôme, Prsefat. in Job,t. xxviii, col. 1080, à sept ou huit cents stiques (versus), et par Hésychius ou l’auteur, quel qu’il soit, d’unouvrage inédit intitulé Hypothèses in libros sacros, dansG. Bickell, De indole ac ratione versionis Alexandrinsein interpretando libro Jobi, Marbourg, 1862, p. 30, à sixcents stiques, sur 2200 que contient le livre entier de Job.Origène, Epist. ad Afric, t. xi, col. 55, témoigne qu’ila dû suppléer souvent, d’après l’hébreu, trois, quatre, etmême quatorze ou seize et jusqu'à dix-neuf stiques quimanquaient à la version des Septante. Avant d’entreprendre sa traduction sur l’hébreu, saint Jérôme avaitajouté à l’ancienne version, en les notant d’un astérisque,les passages omis; c’est l'édition dont saint Augustin fitusage, sans tenir compte des signes diacritiques. Cessignes ont disparu de presque tous les exemplaires etn’ont été conservés que dans deux manuscrits grecs(Colbert 1952 de Paris, et Vatic. 346), deux manuscritslatins de la correction de saint Jérôme (codex de Marmoutiers édité par Martianay et réimprimé par Migne,t. xxix, col. 59-114, et un manuscrit de la Bodléienne,cod. Lat. 24 26), enfin le texte sj ro-hexaplaire de l’Ambrosienne (édité en phototypie, par Ceriani, Milan, 1874).Plus tard, Ma r Bsciai a découvert à Rome, dans la bibliothèque du musée Borgia, une traduction copte-sahidiquede Job, sans les additions hexaplaires, éditée par Ciasca(Sacror. Bibl. fragmenta CoptoSahidica Musei Borgiani, Rome, 1889, t. II). Ciasca évalue les omissions desSeptante à 376 stiques, Bickell à 373, Dillmann à 400.C’est presque le cinquième du livre. Il est donc extrêmement important de savoir quelle est la valeur de laversion grecque et quel parti on en peut tirer pour lacritique du texte. — E. Hatch, Essays xii Biblical Greek,Oxford, 1889, a défendu les Septante avec plus de conviction que de bonheur. Il a été appujé par G. Bickell,Das Buch Hiob nach Anleitung der Strophik und derSeptuagmta, Vienne, 1894, jadis très défavorable auxSeptante. Ces deux savants sont à peu près seuls deleur avis et à juste titre. En effet, un examen attentifmontre que: 1. Le traducteur grec rendait le texte defaçon très lâche ou passait simplement ce qu’il ne comprenait pas. — 2. Il omettait, de parti pris, tout ce quilui paraissait faux, blasphématoire, injurieux à la providence. — 3. Il n’a aucun sentiment du parallélismepoétique et.fond souvent en un deux hémistiches. —4. Il se propose manifestement d’abréger. Dans lesquatre premiers chapitres, pas d’omissions; dans lesdix suivants, presque pas; les suppressions commencent en grand au second ejele de discours, quand lesinterlocuteurs, reprenant la parole, répètent plusieursde leurs arguments. Le rôle d’jiliu est particulièrementmaltraité: on devine pourquoi. Au contraire, les discours de Dieu sont respectés. — Dans ces conditions, ilserait téméraire de s’autoriser trop facilement des Septante pour corriger ou pour mutiler le texte hébreu etla Vulgate.

Métrique de Job.

Les lois de la poésie hébraïque, si elles étaient exactement connues, rendraientd’immenses services au critique. Malheureusement, lesinnombrables études sur la nature des vers hébreux, enparticulier dans le livre de Job, ne font que se réluteret se détruire les unes les autres. On convient que lapoésie diffère de la prose, non seulement par le styleet par le parallélisme des membres, mais encore parun rythme, sensible à l’oreille la moins exercée. Maisquand il s’agit de spécifier, les auteurs se partagententre trois systèmes principaux, dont l’un, presqueabandonné aujourd’hui, pèse les syllabes (comme engrec, en latin, en arabe), tandis que le second les

compte (comme en français, en syriaque, en persan), etque le troisième, ne considère que l’accent. — Se sontoccupés ex professo de la métrique de Job: Meri, DasGedicht von Hiob, Iéna, 1871; Bickell, Cartnina Vet.Testant, melrice, Inspruck, 1882, outre un grand nombred’articles dans la Zeitschrift fur kathol. Theol. etdans la Wiener Zeitschrift fur die Kunde des Morgent andes,où il a notablement modifié son premier système;Ley, Die metrische Beschaffenheit des BûchesHiob, dans les Theologischen Studien und Kritiken,Gotha, 1895, p. 635; 1897, p. 7; Grimme, Metrisch-kritischeEmendationen zum Bûche Hiob, dans la TùbingerTheol. Quarlalschrift, Ravensburg, 1898, p. 100. Voir,pour l’exposé des systèmes et la bibliographie complète,J. Doller, Rhythnius, Metrik und Strophik in der biblischhébr. Poésie, Paderborn, 1899. Plusieurs éruditsestiment que le rythme hébreu est quelque chose desut generis, dont il faut renoncer à trouver le pendantdans les autres littératures. Vetter, Die Metrik des BûchesJob, Fribourg-en-Brisgau, 1897, p. 57-60, a spécialementétudié le vers de Job; il le fait consister en une certainedisposition de coupes ou césures sans un nombrefixe de syllabes. Tout vers comprend deux ou trois césuresprincipales qui en font un distique ou un tristique.Le stique, à son tour, est partagé en deux par une césuresecondaire. Les césures, tant principales que secondaires,correspondent à une pause. L’intervalle entre deuxcésures forme un groupe tonique, dominé par un seul accentprincipal. Les autres règles sont assez compliquées.Budde, Dos Buch Hiob, Gœttingue, 1896, p. v, exprimedes doutes sur la valeur de tous les systèmes proposés.En somme, en dehors du parallélisme, la nature du vershébreu et la division strophique des poèmes nous sontencore trop peu connues pour servir bien utilement à lacorrection et à la reconstitution du texte.

IV. Age et auteur du poème.

1° Opinions diverses.

— Il n’est point de livre dans l’Écriture dont la date aitdonné lieu à des opinions plus discordantes.’Tandis queles uns le font remonter jusqu’aux temps de Moïse, lesaiftres le font descendre jusqu’à l’époque des Machabées.On renonce aujourd’hui à chercher le nom du poète,car aucun indice ne permet de le reconnaître, ni mêmede le deviner avec quelque vraisemblance. Autrefois ondésignait Moïse, ou Salomon, ou Job lui-même, ouÉliu, ou un ami de Job, ou Isaie (Godurc), ou un Iduméenanonyme (Grotius). Voir Knabenbauer, Comment,in Job, Paris, 1886, p. 14. De nos jours, tout l’effort dela controverse se porte, non sur l’attribution, mais surl’âge approximatif du poème; sans résultats bien décisifs,il faut en convenir. L’origine mosaïque, malgré le nombreet la valeur de ses anciens défenseurs, doit être définitivementabandonnée. Cf. Cornely, Introductio, Paris,1887, t. ii, part. II, p. 48. Au sujet de la date probable, laplus grande variété d’opinions règne parmi les critiques.Dans l’impossibilité de les énumérer toutes, contentons-nousd’indiquer les principales. — Driver, Introduction,4e édit., Edimbourg, 1892, p. 405, estime que ce livre nepeut guère être antérieur à Jérémie et date probablementdu temps de la captivité. Les preuves qu’il endonne sont les suivantes: 1. Connaissance de la Loi,qui semble se trahir çà et là, xxii, 6; xxiv, 9 (gages);xxii, 27 (vœux); xxiv, 2 (bornes); xxxi, 9-11 (procédure).— 2. État social avancé, hiérarchie, XXX, 1-8; laporte où se traitent les affaires publiques, xxix, 7; xxxi,21. — 3. La période de foi aveugle a fait place au doute,à la discussion, à la spéculation. — 4. État de misère etde désordre général. Il est question de nations détruites,de peuples exilés, xii, 17. — 5. La perfection de laforme, la puissance du souffle poétique, le développementordonné et progressif d’une idée supposent un âgede haute culture littéraire. — 6. La forme développéede la morale et de la théodicée. En dehors de Job, Satann’est nommé que dans Zach., iii, 1-2, et dans I Par.,

xxi, 1. — 7. Le vocabulaire contient un mélange de motsaraméens et quelques arabismes. Tout cela indique,d’après lui, une époque à peu près contemporaine dusecond Isaïe. — Cornill, Einleituny in das A. T., 4e édit.,Fribourg-en-Brisgau, 1896, p. 239-241, sans s’arrêter àune date précise, prétend que le livre de Job doit être:1. postérieur à Jérémie, parce que Job, iii, dépend deJer., xx, 14-18; — 2. postérieur à Ezéchiel, car si Ezéchielavait connu Job il n’aurait pas pu écrire son chapitrexviii; — 3. postérieur aux Proverbes, car Job, xv,7, suppose Prov., viii, 25. — Kautzsch, Abriss der Geschichtedes alttesm. Schrifttums, Leipzig, 1897, p. 181,place, avec un point d’interrogation, la composition deJob, en regard de l’année 332. — Budde, Dos BuchHiob, 1896, p. xxxix-xlvi, après avoir critiqué assezlonguement les autres opinions, se prononce, commeKuenen, pour l’année 400. — Duhm, Das Buch Hiob,Fribourg-en-Brisgau, 1897, p. ix, opine pour la premièremoitié du Ve siècle. Plusieurs des arguments deDriver et de Cornill portent à faux, d’autres sont peuconcluants.

Date probable.

Faute d’indices plus certains, on

en est réduit à la déterminer d’après le style et par lacomparaison avec les autres écrivains dont l’âge estconnu; or, on sait combien ces appréciations sont délicates,subjectives et partant sujettes à l’erreur. Les rapportsdu livre de Job avec les autres livres sont nombreux,mais le plus souvent il s’agit de pensées oud’expressions que deux auteurs peuvent fort bien avoirtrouvées indépendamment. On pourrait presque reconstruirela troisième lamentation, par exemple, avec desfragments de Job, cf. Royer, Die Eschatologie des BûchesJob, Fribourg-en-Brisgau, 1901, p, 57-65: cela tient surtoutà l’analogie du sujet. La comparaison avec les Psaumes,assez curieuse parfois, ne mène à rien d’assuré, soitparce que la date du Psaume est douteuse, soit parce quele rapport de dépendance n’est pas établi. Il y a entreles deux parties d’Isaie et Job des coïncidences frappantes:Job, iii, 8; XL, 25, et Is., xxvii, 1 (Léviathan);Job, xx, 16; XL, 15, et Is., xxx, 6 (Béhémoth et la Vipère);Job, xxvi, 12-13, et Is., li, 9-10 (Rahab le Dragon); Job,ix, 23, et Is., xxviii, 18 (le Fléau). Comparez encore: Job,xii, 14, et Is., xxii, 22; Job, xiv, 2, et Is., xl, 6-8; Job,xiv, 11, et Is., xix, 5; Job, xix, 8, 12, etls., xxix, 3; Job,xxx, 26, et Is., lix, 9. Il est cependant impossible de direde quel côté est la priorité; on peut seulementsoutenir que les deux écrivains respiraient la mêmeatmosphère intellectuelle; mais la différence est grandeentre eux: l’auteur de Job est psychologue et se plaîtdans l’examen des difficultés et des antinomies, tandisqu’Isaie est surtout théologien et contemple les contradictionsapparentes du haut des principes les plus élevés.Les rapports de Job et de Jérémie méritent plus d’attention.Comparez surtout: Job, iii, 3-13, , 20-22; x, 1819, et Jer., xx, 14-18; Job, xxr, 7-15, et Jer., xii, 1-4; Job,xxix, 12-20, et Jer., xxii, 3-4, 15-16; Job, xxxi, 24-25, etJer., xv, 10, 15-16. La comparaison est toute à l’avantagede l’auteur de Job. Ses tableaux sont tracés avec unesûreté de main, une vigueur de pinceau et une originalitéd’invention qui ne trahissent en rien l’imitateur.Et s’il faut qu’il y ait réminiscence d’un côté ou del’autre, il sera toujours beaucoup plus naturel de lamettre du côté du prophète qui, comme on sait, doittant à ses devanciers. — Le chapitre XXVm de Job, quirenferme le célèbre éloge de la sagesse, rappelle Prov.,i-ix, et Baruch, iii, 9-iv, 4, dont le sujet est identique. Onpeut rapprocher avec intérêt Prov., iii, 13-15; viii, 10-11,de Job, xxviii, 15-19, mais aucune conclusion n’en ressortiranettement sur la date relative des deux passagesen question. — Il faut donc se contenter de soutenir quele livre de Job appartient à l’âge d’or de la littératurehébraïque. Seulement cet âge d’or couvre une assezlongue période et l’on ne voit pas de quel droit on en

exclurait l’époque d’Isaïe. Mais on a autant de peine às’imaginer notre auteur contemporain de Jérémie oud’Ezéchiel qu’à placer, par exemple, Joinville auxviie siècle ou Bossuet au xrxe. «Un homme qui a quel. que tact et qui est versé dans la littérature hébraïque nepourra jamais se persuader qu’une poésie si originaleet si sublime appartienne à un temps où le dépérissementde la langue et l’état dégénéré du peuple n’ontproduit, au point de vue littéraire, que de pâles refletsdes anciens et une poésie généralement médiocre.» LeHir, Le livre de Job, 1873, p. 240. On fixera donc lacomposition de Job entre Salomon et Ezéchias. Beaucoupd’auteurs préfèrent le début da cette période etregardent l’auteur de Job comme contemporain de Salomon:S. Grégoire de Nazianze, Orat., xix, 5, t. xxxv,col. 1061; S. Jean Chrysostome, Synopsis, t. lvi, col. 362,les catholiques Cornely, Knabenbauer, Welte, Danko,Kaulen, Vigouroux, Zschokke, Lesêtre, etc.; les protestantsHavernick, Hahn, Frd. Keil, Schlottmann, Frz.Delitzsch, etc.

V. Unité d’auteur, intégrité. — D’après certains critiques,le noyau primitif du livre, beaucoup plus réduitque le poème actuel, se serait accru peu à peu par d’importantesinterpolations. Siegfried, par exemple, TheBook of Job, Leipzig, 1893 (Bible polychrome), séparedu poème les parties suivantes: 1. Interpolations polémiquesdirigées contre la tendance du poème: vii,

— 1-11; xiv, 1-2, 6-12, 13-22; xxviii, xxxii-xxxvii. —

2. Corrections destinées à rendre la doctrine orthodoxe;xii, 7; xiii, 1; xxi, 16-18; xxiv, 13-24; xxvii, 7-23. —

3. Doublets ou compositions parallèles: xii, 4-6, XVII,11-16; XL, 6; xiii, 6: — 1° Prologue et épilogue, i-ii,xlh, 7-17. — Ces deux parties soni regardées commeinterpolées par Stuhlmann, Bernstein, Knobel, Studeret Cheyne (au moins l’épilogue). On a quelque peine àconcevoir leurs raisons. Sans le prologue, le poème est,non seulement incomplet et mutilé, mais totalement incompréhensible.On ne connaît ni la cause des plaintesde Job, ni le motif de la présence des trois amis, ni lesujet de la discussion; on ignore en un mot tout ce qu’ilfaudrait savoir pour s’intéresser au débat et en suivre lefil. À première vue, l’épilogue est moins indispensable;néanmoins le lecteur s’attend à un dénouement et ilserait déçu s’il n’apprenait ce qu’il advint du juste éprouvé.Aussi les critiques les plus avancés (Driver, Cornill,Siegfried, etc.) sont-ils maintenant favorables à l’authenticité.Du moins admettent-ils, comme Budde etDuhm, que le poète a connu le récit en prose, appelépar eux livre populaire ( Volksbuch); et l’a pris pour basede son travail. — 2° D’autres contestent le caractère primitifde xxvii, 11-xxviii, 28, sous prétexte que Job yabandonne sa thèse pour embrasser celle de ses amis.Mais, cette objection reposant sur une erreur d’exégèse,l’analyse du poème suffit à la résoudre. — 3° On a ditque XL, 15-xli, 26 (béhémoth et léviathan), n’est qu’uneamplification oiseuse de ce’qui précède. En réalité,cette description ne répète rien; elle est en gradationavec le reste et, si on la supprime, le second discoursde Dieu ne comprendra que huit versets assez insignifiants,XL, 7-14: ce qui est inadmissible. — 4° Presquetoute la controverse se porte aujourd’hui sur le discoursd’Éliu, xxxi, xxxvii, déclaré interpolé après coup par laplupart des critiques protestants et rationalistes. Commeils en appellent surtout à la valeur cumulative de leursarguments, nous allons les exposer en bloc. — l. Manquede liaison avec le reste. — Éliu n’est mentionné ni dansle prologue ni dans l’épilogue. Job ne lui répond pas.Jéhovah répond à Job par-dessus le discours d’Éliu etsans en tenir compte. — 2. Forme du discours. — Sousle rapport de la langue, de la pensée, de l’art, les discoursd’Éliu sont fort inférieurs au reste du poème. Contrairementaux autres interlocuteurs, Éliu parle de Job à latroisième personne, au lieu de s’adresser directement à

lui. — 3. Sujet du discours. — Éliu n’ajoute rien d’essentielaux raisons des trois amis. Ce qu’il peut ajoutern’est pas en rapport avec la solution de l’auteur. Laharangue d’Éliu déflore le discours de Jéhovah et le rendà peu près superflu; elle va droit contre les idées dupoète, savoir que la souffrance du juste est un mystère.Telles sont les raisons accumulées par Stuhlmann,Eichhorn, Delitzsch, etc., et bien résumées par Driver,Introd. to the Liter. of the O. T., 4e édit., 1892, p. 403405, qui les fait siennes. — La réponse à ces difficultésest aisée. Pour qu’on ne l’accuse pas de parti pris, nousl’empruntons à deux critiques peu suspects, Cornill,Einleitung in dos A. T., 4e édit., 1896, p. 235-238, etBudde, Dos Buch Hiob, 1896, p. xvii-xxi. — 1. L’auteurn’avait aucun motif de nommer Éliu dans le prologue,où il n’a point affaire. Il est introduit en son

lieu et suffisamment annoncé par la mention répétée

d’un auditoire assistant aux débats, xvii; 9, xviii, 2;xxx, 1. Job n’avait pas à lui répondre, puisque, dansl’intention du poète, l’analyse en fait foi, Éliu a raison.Dieu, pour la même cause, n’avait ni à le blâmer ni àl’approuver: l’approbation ressort du dialogue même. —2. Éliu parle de Job à la troisième personne parce qu’ilne le prend pas seul à partie; il en veut aussi aux troisamis, qui n’ont pas su prouver leur thèse. Voilà pourquoiil s’adresse aux spectateurs et les fait juges de sesraisons. On ne peut nier, qu’au point de vue du style etde la diction, le rôle d’Éliu ne soit moins achevé. Maisce manque de fini peut être intentionnel. L’auteur apartout grand soin de faire parler ses personnages selonleur âge, leur rang, leur caractère. En mettant en scènecet impétueux adolescent, ne lui a-t-il pas prêté à desseindes discours prolixes, un ton emphatique, des raisonnementsembrouillés? D’ailleurs le lexique de cemorceau n’a rien de bien spécial. Après une étude approfondie,Budde, Beitrâge zur Erklârung des BûchesUiob, 1876, est arrivé à cette conclusion: Au pointde vue linguistique, l’authenticité du discours d’Éliudemeure très possible. Cornill et Wildeboer souscriventpleinement à ce verdict; Kuenen lui-même déclareque l’objection tirée du style est désormais bienaffaiblie. En continuant à étudier Job, Budde a remarquéque toute la seconde moitié, xxii-xli (à l’exception deschapitres xxix, xxxi, xxxviii et xxxix), est beaucoupmoins soignée que la première. Il attribue ce fait à deuxcauses: a) La fatigue de l’auteur qui se traduirait pardes négligences, des obscurités, des répétitions. Leschapitres exceptés ci-dessus, qui forment des épisodesindépendants, auraient pu être composés plus tôt et insérésensuite dans le poème. 6) Le mauvais état du texte,dont la seconde moitié a beaucoup plus souffert auxmains des copistes et des critiques, témoin les Septante,que la première. Le discours d’Éliu regardé commemoins important a particulièrement souffert. — 3. L’analysemontrera que les objections rangées sous le troisièmechef n’ont rien de fondé. Ce qu’Éliu ajoute auxdiscours des amis c’est la vraie cause des souffrances,que les amis ne soupçonnent pas. La harangue d’Éliun’est pas rendue inutile par l’intervention de Jéhovahcar Jéhovah n’explique pas la raison de la souffrance,mais enseigne à l’accepter avec résignation, même si l’onn’en voit pas la raison, parce que cette raison doit exister.Enfin, supposer que la solution d’Éliu est contraire àcelle du poète c’est admettre a priori et sans la moindrepreuve que le poète est un sceptique, dont l’unique butest de montrer que le problème agité par lui ne comportepas de solution: idée aussi contraire à la vraisemblancequ’à la tournure d’esprit des Sémites.

VI. Exégèse.

Sens littéral.

Le livre de Job

étant un dialogue, il faut lui appliquer les règles d’interprétationpropres au dialogue; car l’inspiration nechange pas la nature d’une œuvre littéraire. Or, dansun dialogue, la pensée de l’auteur ressort du conflit

d’idées échangées entre les interlocuteurs. Parfoisl’écrivain fait de l’un des personnages son porte-parole:dans notre poème, nous l’avons vii, c’est Éliu qui remplitce rôle. En tout cas, les choses admises sans discussionpar tous les interlocuteurs, comme ici la providence,la justice, la puissance, la sainteté de Dieu,contiennent certainement la pensée de l’auteur. Pourl’exégète, il importe peu que le dialogue soit fictif ouréel, ainsi que saint Thomas l’a très bien remarqué:au contraire, s’il est fictif, le sens en ressortira avecplus de netteté et de certitude; car on sera sûr querien d’oiseux, d’étranger au sujet, ne se mêle au développementrégulier des idées et des caractères. D’ailleurs,même dans un thème historique, l’écrivain intelligentélague les digressions inutiles, rétablit l’ordresouvent troublé par le hasard de la conversation, en unmot prête à ses personnages non pas exactement cequ’ils ont dit mais ce qu’ils devaient dire. — 2° Sensspirituel. — Pour regarder Job comme le type deNoire-Seigneur, nous avons l’autorité de plusieurs Pèreset des analogies frappantes. Des deux côtés: 1. dignitéprincière, 2. épreuves imméritées, 3. éloignement apparentde Dieu, 4. souffrances du corps, 5. agonie del’âme, 6. abandon des amis et des proches, 7. Sataninvesti du pouvoir de tenter et de persécuter, 8. plaintescausées par l’excès des douleurs, 9. résignation, forceet humilité dans la souffrance, 10. récompense et gloirefinales. Cf. Tirin, Comment., édit. de Turin, 1882, t. ii,p. 712. Mais en dehors du Christ, aucune autre figureprophétique bien caractérisée et sur laquelle on soitd’accord n’exisle dans ce livre. Dans les trois filles deJob, la glose voit les trois vertus théologales; Nicolas deLyre, la Trinité; saint Bruno, les trois parties du monde.Pour saint Éphrem, l’onagre figure Satan; pour saintGrégoire, c’est le Verbe incarné; pour saint Augustin,c’est le vrai serviteur de Dieu. Et ainsi des autres détails.Ces incertitudes et ces contradictions nous montrent queles explications mystiques, dont les anciens commentairessont remplis, sont moins des sens typiques ouspirituels que des sens accommodatices, légitimes sansdoute et même louables s’ils nourrissent la piété et portentà l’édification, mais sans valeur aucune pour l’intelligencedu texte sacré.

VII. Sujet du livre.

Opinions diverses.

Le livre

de Job appartenant au genre didactique, tout en ayant laforme d’un drame, doit renfermer une idée dominanteet développer une thèse. Saint Thomas, dans le Prologuede son Expositio in Job, Opéra, édit. Vives, 1875, t. xviii,p. 1, croit que l’objet de l’auteur est de démontrer laprovidence. Mais, comme le fait justement remarquerNicolas de Lyre, le sujet d’un dialogue ne saurait être cedont tous les interlocuteurs conviennent, autrement ledialogue n’aurait pas lieu: or, tous sont pleinement d’accordsur le dogme de la providence. — Nicolas de Lyrelui-même, suivi par Cordier, Estius et plusieurs autres,n’est guère plus heureux, en soutenant que le poème apour but de combattre la fausse persuasion où étaientles Juifs que tous les biens et les maux terrestres sont lefruit de leurs bonnes ou de leurs mauvaises actions. Lafausseté de cette opinion ressort déjà nettement du prologueet, si la discussion n’avait pas d’autre objet, elle seraitfinie avant de commencer. — Il faut opposer la même objectionaux auteurs (Meinhold, Scharer, Schlottmann,Ràbiger, Szold, Preiss) qui formulent ainsi la thèse dulivre: ; Y a-t-il sur la terre une vertu désintéressée? C’estlà l’objet de la gageure céleste et le point de départ detout le récit, mais ce n’est nullement le sujet du dialoguelui-même. — La grande majorité des écrivains modernes,qu’ils soient catholiques, protestants ou rationalistes,énoncent parfaitement le problème: Quelle est lacause des maux de cette vie? ou, d’une manière plusspéciale et en appliquant la thèse à la situation de Job:Pourquoi le juste souffre-t-il? Seulement la solution


est très différente suivant les* auteurs. — Un groupeconsidérable de théologiens protestants (Michælis,Ewald, Dillmann, Delitzsch) cherche la réponse à laquestion proposée dans le rôle de Job et c’est alors, soitl’espérance de la vie future qui ferait contrepoids auxmaux de cette vie, soit cette sage maxime, que, dansnotre ignorance des conseils de Dieu, il faut les adoreret nous taire. Bien que ces deux idées puissent être deséléments partiels de solution, ce n’est pas la solutionmême. En effet, l’existence d’une vie future ne supprimepas le problème des maux de cette vie et l’obligationde nous soumettre aux décrets de Dieu ne nous enmontre pas la sagesse. Aussi Job, après avoir expriméles pensées ci-dessus, continue à se plaindre et à chercher,ch. xxix-xxxi: preuve qu’il n’a pas trouvé cequ’il cherche. — D’autres écrivains, presque tous rationalistes(Bertholdt, Eichhorn, Knobel, Vatke, Arnheim,Steudel, Hirzel, Renan, Kuenen, Merx, Hitzig,Studer, Reuss, Cheyne, Smend, Bruch, Meier, Bleek, etc.,d’après Budde, Dos Buch Hiob, 18%, p. xxviii), unanimesà rejeter comme apocryphe le discours d’Éliu,demandent la solution finale au discours de Jéhovah, quipeut se résumer ainsi: L’homme doit s’abstenir descruter les sages mais insondables conseils de Dieu. End’autres termes: Si le problème a une solution, elleest inaccessible à l’homme. Avec ces prémisses, on étaitautorisé à considérer l’auteur de Job comme un sceptique.Mais il est étrange et invraisemblable que lepoète ait dépensé tant de travail et de génie pour aboutirà cette conclusion que sa question n’a pas de réponseet que son problème est une énigme.

Sentiment commun des catholiques.

Le problème:

Pourquoi le juste souffre-t-il? est non seulementénoncé mais résolu. Cf. Vigouroux, Manuel bibl.,11° édit., t. ii, p. 288; Cornely, Introductio II, II, p. 44;Lesêtre, Le Livre de Job, Paris, 1886, p. 15; Knabenbauer,Comment, in Job, Paris, 1886, p. 9; Zschokke,Hist. ant. Testam., 3e édit., Vienne, 1888, p. 241; Welte,Das Buch Job, Fribourg, 1849, p. xiv; Kaulen, Emleilung,3° édit., 1890, p 298. Plusieurs protestants, notammentceux qui admettent l’authenticité des discours d’Éliu, telsque Budde, Cornill, Wildeboer, Kamphausen, Stickel,sont, en substance, du même avis; seulement quelques-unsétablissent une distinction inutile et peu justifiéeentre le but de l’ouvrage populaire (parties en prose) etcelui du poème. — C’est dans le discours d’Éliu qu’ilfaut chercher la solution. Les trois amis s’en tiennent àl’opinion vulgaire que la vertu est toujours récompenséedès ici-bas et par conséquent nient l’existence même duproblème. Job, ignorant la cause de ses épreuves, nepeut opposer à leurs fausses théories que ses protestationsd’innocence. Le lecteur, il est vrai, est dans unesituation plus favorable et connaît en partie le mot del’énigme: enpartie seulement, car la cause des malheursde Job est trop spéciale pour l’étendre et la généraliser.Éliu parait. L’auteur, qui met dans la bouche de cetinconnu sa propre doctrine, le représente comme unadolescent, peut-être pour montrer que la solution n’estpas si ardue, qu’elle n’exige qu’un esprit droit et loyal.Les peines de ce monde ne sont pas uniquement vindicatives;elles sont encore médicinales. Elles sont unantidote contre la présomption et l’orgueil; elles purifientde ces fautes vénielles dont nul homme n’estexempt. — À ces causes générales que la raison aperçoit,il faudrait en ajouter une autre: la tentation dudémon permise par Dieu. C’est la principale dans lecas présent; mais les interlocuteurs ne peuvent lasoupçonner. Le lecteur plus instruit en tire cette leçonque, même dans l’obscurité des voies de Dieu, il convientà l’homme de croire à la sagesse divine et del’adorer.

VIII. Analyse du dialogue et progrès de la discussion.— i.mosologuedejob, m. — Job maudit le jour

III. - 50

de sa naissance, 1-10; il Implore la mort, 11-19; il voudrait n'être jamais né- 20-26. Par la violence de sesplaintes il donne à ses amis, jusque-là silencieux, l’occasion d’entrer en scène. La discussion s’engage et se développe en une suite de discours, où les trois amis parlent tour à tour, dans l’ordre suivant: Éliphaz, Baldad,Sophar. Chaque attaque est suivie de la réplique de Job.Le troisième cycle est incomplet, à cause du silence deSophar.

u. première discussion, iv-xiv. — 1° Premier discours d'Éliphaz. — 1. Dans un excrde insinuant, il rappelle à son ami qu’il ne devrait pas s’abandonner audésespoir, lui qui a consolé tant d’infortunes, IV, 1-7.Puis il expose nettement sa thèse: L’expérience prouve,ꝟ. 8-11, et il sait par révélation, ꝟ. 12-16, que tout hommeest coupable et mérite des châtiments divins, iv, 17-v, 7.Que Job reçoive sa peine sans regimber, en baisant lamain qui le frappe! Dieu se laissera fléchir, car il exalteceux qui s’abaissent. Discours admirable de tact, d'élégance, de noblesse et de poésie, mais partant d’unefausse hypothèse: la culpabilité de Job. — 2. Job riposteavec aigreur. Ses maux sont intolérables et ses plaintesrestent bien au-dessous de ses malheurs, vi, 1-12. Sesamis, dont il espérait quelque consolation, l’ont trompécomme un torre’nt gonflé par les pluies d’orage qui sedessèche aussitôt et se perd dans le sable, ꝟ. 13-23. Puisqu’ils l’accusent, qu’ils lui montrent ses iniquités, ꝟ. 2430. Cela dit, il laisse derechef un libre cours à sesplaintes et ne demande à Dieu qu’un moment de répit,vu, 1-2.

2° Premier discours de Baldad, — 1. Croyant ou feignant de croire que Job accuse Dieu d’injustice, il relève vivement ce prétendu blasphème, viii, 1-7. Les anciens sages nous l’apprennent: les méchants sont punis dès ici-bas, leur prospérité n’est qu’un leurre; aucontraire, le juste reçoit sa récompense, ꝟ. 8-22. —2. C’estpar l’ironie que Job lui réplique. S’il ne s’agit qued’exalter les attributs de Dieu, Job saura renchérir encore sur les dithyrambes de ses amis, IX, 1-21. Mais cen’est pas le point en litige:

Il n’importe. C’est pourquoi je dis:

Dieu frappe également 16 juste et l’impie.

Si un fléau sévit soudain,

Il se fait un jeu d'éprouver l’innocent.

La terre est livrée aux mains de l’impie;

Il couvre la face du juge (il l’aveugle).

N’en est-il point ainsi? Qu’est-ce donc? ix, 22-24.

Voilà la vraie question. Puis, d’un ton plus calme, Jobrenouvelle ses plaintes, ix, 25-x, 7. Ses regrets s’aviventau souvenir des anciennes faveurs reçues de Dieu, ꝟ. 819. Il termine en implorant un moment de répit, )>. 2022.

Premier discours de Sophar.

1. Il répète, avec la

fougue et la violence de la jeunesse, les arguments deses amis. Il s’indigne d’entendre Job protester de soninnocence, XI, 1-6; Dieu est la sagesse même et ses voiessont insondables, ꝟ. 7-12; Job n’a qu'à s’y soumettre sanschercher à les scruter. Un repentir sincère ramènera lebonheur, ꝟ. 13-20. — 2. Job ne répond pas directementà Sophar, mais il prouve par de nombreux exemples quela distribution des biens et des maux sur la terre n’estpas conforme à la théorie des trois amis, xii. Qu’ils cessentdonc de défendre par des mensonges la cause de Dieu,xiii, 1-12. Job, s’adressant à Dieu lui-même, lui demandela solution de ses doutes, jr. 13-28. Il conclut par unepathétique description de la misère et de la vanité del’homme, xiv, 1-22.

m. deuxième discussion, xv-xxi. — Le dialogue devient plus serré et la discussion fait un grand pas. Lestrois amis, descendant des généralités, ne prouvent plusleur thèse par les seuls arguments a priori, tels que lesattributs de Dieu, sa bonté (Éliphaz), sa justice (Baldad),sa sagesse (Sophar); ils entament le vif du sujet et soutiennent explicitement leur fausse théorie: Tout impieest châtié ici-bas, tout juste est récompensé.

1° Second discours d'Éliphaz. — Outré de se voir contredit, il perd toute mesure, xv, 1-11. Il accuse formellement son ami d’impiété, . de présomption, d’entêtement,d’orgueil, ꝟ. 12-16; et dépeint, avec les plus sombrescouleurs, la vie misérable de l’impie, sa mort prématurée et aussi, fait assez rare dans l’Ancien Testament, lesremords de sa conscience, 1. 17-35:

Un bruit effrayant frappe ses oreilles;Au sein de la paix, il craint l’ennemi.La nuit, il désespère de revoir le jour,Il se voit par avance la proie du glaive, xv, 21-22.

— Sans relever autrement que par le mépris ces insinuations outrageuses, Job expose de nouveau ses malheurs immérités, xvi, 1-16:

Pourtant mes mains n’ont pas commis l’injustice,Et ma prière (ma religion) était pure.

Malgré tout, il reste persuadé qu’il a un témoin au cielet un défenseur là-haut. Non qu’il espère trouver justiceen ce monde. Pour lui tout est fini sur terre. Plusd’espoir, plus d’illusion. Il n’a qu'à descendre au se'ôl,où peut-être il goûtera un peu de repos, xvi, 18-xvii, 16.

Second discours de Baldad.

1. Il ne fait, en

somme, que répéter sous une autre forme l’argumentation d'Éliphaz. II affirme et ne prouve pas. Néanmoinsce morceau, d’un style très imagé et plein de mouvement,atteint la plus haute éloquence, quoique l’exagération ledépare un peu, xviii. — 2. En présence de ses amis conjurés contre lui, de Dieu même qui semble l’abandonner, Job paraît accablé et consterné. Mais tout à coupsa confiance renaît. La perspective d’un rédempteur,qui le vengera après la mort et réparera les ruines deson corps, lui rend l’espoir. Il emprunte pour l’exprimer le style prophétique, xix.

Second discours de Sophar.

1. Rivalisant de lyrisme

avec ses prédécesseurs, Sophar décrit la misère du pécheur, sa fin lamentable et prématurée, sa destructiontotale, xx. — 2. Job, pour le réfuter, en appelle à l’expérience de tous les jours. On voit l’impie heureux surla terre, au milieu de ses blasphèmes dont il se faitgloire. Loin d'être puni de son vivant, il est quelquefois honoré des hommes après sa mort, xxi.

IV. TROISIEME discussion, xxii-xxxi. — Battus sur leterrain des faits, comme sur celui des principes, les troisamis se rejettent sur cette position nouvelle dont rienne peut les tirer: Job est coupable, puisqu’il est punide Dieu. On voit le sophisme: ils supposent précisément toute la question. D’indirecte qu’elle était, l’attaquecontre Job devient directe et fournit au saint homme unebelle occasion de se justifier.

1° Troisième discours d'Éliphaz. — 1. C’est Éliphaz,comme le plus grave des trois, qui se charge du réquisitoire. Partant de ce faux principe que toute souffranceest un châtiment, il en conclut hardiment, non sansquelque ironie, que Job est châtié pour ses crimes sansdoute et non pour ses vertus. Ces crimes, il ne craintpas de les énumérer: cruauté, avarice, injustices, fautesordinaires des grands de la terre. Il termine par uneexhortation à la pénitence, gage assuré d’un meilleuravenir, xxii. — 2. Job ne répond pas directement aux malveillantes insinuations de son accusateur. Il voudrait,dit-il, plaider sa cause devant Dieu même qui reconnaîtrait son innocence, xxiii. Mais la thèse d'Éliphazest en contradiction avec les faits. Dans les campagnesdésertes, comme dans les cités populeuses, souvent l’impie triomphe et le criminel prospère jusqu'à la mort,

XXIV.

' 2° Troisième discours de Baldad. — 1. Par la concision et l’insignifiance de sa réponse, Baldad montre queles trois amis sont à bout d’arguments et que, par suite,le débat est terminé. Baldad se borne à répéter, presque

mot pour mot, des pensées déjà exprimées par Éliphaz:Dieu est le très haut, le tout-puissant, devant qui la lunen’a pas d'éclat, les étoiles pas de clarté; commentl’homme, pourriture, comment le fils de l’homme, verde terre, prétendrait-il être juste en présence de Dieu?xxv. — 2. Job a déjà plus d’une fois renversé ce sophisme. Sans y revenir, il se contente d’exalter, entermes magnifiques, la puissance etla majesté du Créateur. Ce n’est pas sans une secrète ironie à l’adresse deBaldad qui se flattait de lui apprendre une chose si bienconnue de lui, xxvi.

Discours de Job après la cessation des attaques de sesamis. — Après avoir répondu à Baldad, il y a un moment de silence. Job semble attendre que le troisièmeinterlocuteur, Sophar, dont c’est le tour de parler, aitajouté son mot. Sophar se tait, témoignant par son silence qu’il n’a plus rien à dire. Job reprend donc etaffirme, avec plus d'énergie que jamais, son innocence.Tout à coup on l’entend changer de Ion et soutenir exactement la thèse de ses adversaires, xxvii, 13-23. Ce phénomène a été expliqué de différentes façons. Job seconvertirait à la théorie de ses interlocuteurs, ou l’accepterait du moins comme la règle ordinaire de la Providence; mais ce qui précède, comme ce qui suit,dément cette hypothèse. Quelques-uns ont vu dans lepassage en question le troisième discours de Sophar,changé de place par un scribe distrait. Mais l'économiedu dialogue fait voir que si Sophar s’est abstenu de parler à son tour c’est qu’il ne devait point parler. L’explication la plus simple et la plus naturelle est que Jobrésume les arguments de ses amis. Il l’indique assez entète du morceau, xxvii, 12-13:

Vous autres, vous savez tout cela;Pourquoi donc disputez-vous en vain?(Vous dites): Voici le sort réservé au méchant,Le destin qui attend l’oppresseur, etc.

Ce serait le moment de donner sa propre solution;mais, s’il voit très bien le faible de l’argumentationadverse, il n’a à lui opposer qu’un simple démenti.Pour lui aussi, la distribution des biens et des maux icibas est un mystère. L’homme fouille les entrailles dela terre pour en retirer l’or et le diamant, xxviii, 1-11;mais où trouvera-t-il la sagesse, c’est-à-dire l’intelligencedes conseils de Dieu? xxviii, 14-15:

L’abîme dit: Elle n’est point en moi;

La mer dit: Elle n’est point ici.

Elle ne s’achète pas au prix de l’or,

On ne l'échange pas contre de l’argent, etc.

Dieu seul la connaît et la révèle à l’homme, ꝟ. 28:

Craindre Adonaï, voilà la sagesse;S'éloigner du mal, voilà l’intelligence.

Dans les trois chapitres suivants, Job met en contrasteson passé, dont il fait la plus fraîche et la plus riantepeinture, xxix, avec les tristesses, les misères et leshumiliations de l’heure présente, xxx. Il termine parun saisissant parallèle entre sa conduite et la loi morale qui a été la règle de toute sa vie, xxxi. Ce dernierchapitre est fort remarquable, comme résumé poétiquede la loi naturelle.

V". intervention d'éliu. — 1° Bouillant et impétueux, comme il sied à un adolescent, Éliu ne peut pluscontenir sa colère. Il l’a réprimée jusqu’ici par égardpour l'âge des interlocuteurs, mais maintenant il fautqu’elle éclate. Éliu en veut aux amis de Job de n’avoirpu trouver aucune solution raisonnable; il reproche àJob d’avoir fait sonner trop haut son innocence, xxxii, 1xxxiii, 7. Cet exorde diffus, un peu embrouillé, peint auvif l'état d’esprit d’un homme en colère. Job veut-il connaître la raison d'être de la souffrance? Eh bien! Dieuinstruit les hommes par des songes prophétiques, xxxiii,14-18, par la maladie et la douleur, ꝟ. 19-22, et par ses

messagers, ꝟ. 23-28. Dieu renouvelle à plusieurs reprisesces avertissements salutaires, ꝟ. 29-30:

Afin de retirer l’homme de la ruinePour qu’il voie la lumière des vivants.

2° Dans un second discours, Éliu prouve que l’homme,alors même qu’il n’arriverait pas à comprendre les voiesde Dieu, ne devrait pas douter de sa justice souveraine,xxxrv. — 3° Un troisième discours montre que la piétéest toujours utile et le mal toujours nuisible à l’homme,xxxv. — Le discours final d'Èliu a pour but avoué devenger la Providence, xxxvi, 1-5. Dieu n’abandonne pasle juste, il ne perd pas de vue le méchant, ꝟ. 5-8. Il lesforce par les tribulations à reconnaître leurs fautes,1. 10:

H les rend attentifs a ses avisEt les porte à s'éloigner du mal.

Et pour résumer tout cela: Dieu instruit l’homme parle revers, xxxvi, 15. Éliu termine en célébrant longuement la sagesse et la puissance divines qu’il exhorteJob à adorer en silence, xxxvi, 22-xxxvii, 24. — Ainsi,contrairement aux affirmations des trois amis, les peinesde ce monde ne sont pas uniquement vindicatives, ellessont quelquefois médicinales; elles ont pour but de purifier l’homme de ses souillures, de l’instruire de sa faiblesse et de le préserver des dangers futurs, surtout dela présomption et de l’orgueil.

VI. THÉOPBANIE.

Bien qu'Éliu soit le porte-parolede l’auteur et qu’il assigne aux souffrances des causesautres que les péchés commis, si bien que Job, aprèss'être révolté contre les sophismes des trois amis, ne'trouve plus maintenant un mot à répliquer, la questionn’est pas encore entièrement résolue à la satisfaction dulecteur. Éliu a marqué en général les causes possiblesdes tribulations, il n’a pas rencontré la cause spécialeet réelle des malheurs de Job, à savoir l’envie de Satanet son insolent défi. Cette cause, ni Éliu, ni Job, ni personne ne la connaît; le lecteur seul est mis dans laconfidence et, tout en approuvant les raisons du fils deBarachel, il sent qu’il y manque quelque chose. Dieupourrait achever de convaincre Job par des argumentsirréfutables et lui révéler le drame céleste, mais il estcontraire à la dignité de Dieu de discuter avec l’homme,et d’ailleurs il convient que ce dernier soit tenu dansl’ignorance des décrets divins pour que sa foi ait plusd’exercice et de mérite. C’est pourquoi Jéhovah, du seinde la nuée, accable Job de questions insolubles, afin delui faire toucher du doigt les bornes étroites de sonesprit et la nécessité d’acquiescer sans murmure, sansdiscussion, aux dispositions d’en haut, lors même qu’onn’en comprend pas la sagesse et l’opportunité. — Dansun premier discours, il passe en revue les merveilles dela création, xxxviii, 1-38, sur la terre, ꝟ. 4-18, et dansles cieux, ꝟ. 19-38, les miracles de la provideuce dansla nature animée, le lion, ꝟ. 39-40, le corbeau, ꝟ. 41, lochevreuil, xxxix, 1-4, l’onagre, ꝟ. 5-8, le buffle, ꝟ. 9-12,l’autruche, jt. 13-18, le cheval, ꝟ. 19-25, le faucon, #. 2630. Job confesse qu’il a parlé inconsidérément de chosesqui le dépassent, ꝟ. 33-35 (hébreu, xl, 3-5). — Pourachever de le confondre, Dieu l'invite ironiquement àprendre le gouvernement du monde, pour y faire régnerl’ordre et la justice, xl, 1-9. Mais le pourra-t-il, lui, impuissant et désarmé devant deux monstres qui ne sontqu’un jouet dans les mains de Dieu, Béhémoth (l’hippopotame) et Léviathan (le crocodile)? xl, 10-xli, 25(hébreu, xl, 15-xii 26). Job répète son humble aveu ety joint cette déclaration qui clôt le poème, xlii, G:

C’est pourquoi je me condamne
Et je fais pénitence dans la cendre et la poussière.

IX. Doctrine.

Plaintes de Job.

Pour les justifier, saint Grégoire recourt à l’allégorie. Job pleureraitle sort du genre humain, il maudirait le jour de sa nais

sance à cause du péché originel, etc. — Pineda voit dansces lamentations l’expression d’une charité parfaite. Ilmontre comment, dans le délire de la passion, les amantss’accusent d’injustice et de cruauté, appellent la mort,maudissent le destin. — Les Juifs, suivis en cela parbeaucoup de protestants et de rationalistes modernes,ne craignent pas de dire que Job a blasphémé et qu’ilest tombé dans le désespoir. Mais cette opinion est inconciliable avec les éloges dont les saints Pères comblent Job et avec la manière dont Dieu le traite aprèsl'épreuve. — Cherchons l’explication ailleurs. 1. La perfection de l’Ancien Testament n’est pas celle du Nouveau.L’amour de la croix, le désir des injures, sont des vertusréservées aux disciples du Crucifié. Il ne faut pas lesdemander aux patriarches, encore moins à un juste vivant sous la loi naturelle. Du reste on ne doit pas viserà tout excuser en Job, puisque Dieu le reprend et qu’ilreconnaît lui-même sa faute. — 2. Le langage de Jobest poétique. Hyperboles, prosopopées. adjurations à lamort, à l’enfer: autant de figures que la poésie tolèreet que la prose repousserait. Le lecteur attentif rétablitla balance et remet tout au point. — 3. En exhalant sesplaintes, Job n’a pas seulement en vue d’alléger sespeines; il veut prouver à ses amis la grandeur de sesmaux. Les mœurs orientales autorisent, en pareil cas,des cris de désespoir, des exagérations qui nous semblentdépasser toute mesure, si on les passe au crible d’unerigide théologie. — 4. C’est plutôt la psychologie qu’ilfaut consulter. Une douleur extrême, en diminuant laréflexion et la liberté, suggère des paroles peu d’accordavec la froide raison. D’ailleurs, n’oublions pas que lelangage de Job n’est pas proposé sans réserve à notreimitation. Tout ce qu’on peut faire c’est d’en atténuer lahardiesse et d’en expliquer l’imprudence.

Science de la nature.

Aucun autre livre sacré

n’offre autant de points de contact avec les sciences profanes. On trouve dans Job des allusions à l’astronomie,ix, 7-9; xxxviir, 31-33. à la cosmologie, xxvi, 7-10, à lamétéorologie, xxxvi, 27-32; xxxvii, 3-6, 9-13, 21-22;-xxxviii, 1-11, au travail des mines, xxviii, 1-11, etc.,surtout à la zoologie, xxxix-xli. On a toujours admiréla description du cheval, xxxix, 19-25, de l’hippopotame(Béhémoth), xl, 15-24. et du crocodile (Léviathan), 25-32;celles de l’onagre, xxxix, 5-8, de l’autruche, 13-18, del’aigle, 27-30, ne révèlent pas une observation moinsfine ni un art moins achevé. De plus, l’auteur de Jobtire continuellement ses comparaisons et ses métaphoresdes arts ou des sciences naturelles, de la gravure, de lamusique, de l’agriculture, de la géographie, de la médecine, etc., et c’est ce qui rend son style si brillant, sivarié et si pittoresque. Rien de plus saisissant, parexemple, que la peinture des caravanes trompées par lemirage, vi, 15-20.

Morale.

Elle est résumée au chapitre xxxi qui

est en quelque sorte l’examen de conscience de Job. Ily énumère les principaux devoirs des grands de cemonde et se rend le témoignage de les avoir fidèlementremplis. Il a évité les fautes contre la pureté, xxxi,1-4, contre la justice, ꝟ. 5-15 (fraude, ꝟ. 5-6, vol, ꝟ. 7-8,adultère, ꝟ. 9-12, oppression des faibles, ꝟ. 14-15), contrela charité, ꝟ. 16-23 (refus de l’aumône, ꝟ. 16-18, méprisdes pauvres, ꝟ. 19-20, violences, ꝟ. 22-23); il a évité aussiles péchés d’avarice, ꝟ. 24-25, de superstition, ꝟ. 26-28,d’envie, *. 29-30, d’inhospitalité, ^. 31-32. d’orgueil, ꝟ. 33,de pusillanimité en présence du devoir, ꝟ. 34. Ce chapitre, qui rappelle l’abrégé de morale contenu aupsaume xv (xiv), a sa contrepartie dans le réquisitoired'Éliphaz contre Job, xxii, 2-11 (usure, ꝟ. 6, dureté envers les malheureux, ꝟ. 7, rapines, ꝟ. 8, oppression desveuves et des orphelins, ꝟ. 9, présomption orgueilleuse,

The’cdicée.

Tout le monde sait qu’elle est très

développée dans le livre de Job. La descriptior de la

nature et des attributs de Dieu remplit presque la moitié du poème. Jamais peut-être, sauf dans Isaïe et lesPsaumes, n’ont été plus magnifiquement célébrées lapuissance de Dieu, ix, 5-10; xxvi, 5-14, sa sagesse,xxviii, 20-28, sa justice, xxxvi, 5-11, sa prudence,xxxiv, 21, xxiii, 10, sa perfection incompréhensible, xi,7-9.

5* Job et les fins dernières. — Il serait très intéressant d'étudier de près les idées du livre de Job surla vie, sur la mort, sur le se'ôl, sur l’au-delà avec seschâtiments et ses récompenses. Mais ce travail, pourêtre utile, exigerait de trop longs développements. Cf.J. Royer, Die Eschatologie des Bûches Job, dans lesBiLlische Studien, Fribourg-en-Brisgau, 1901. Le textele plus intéressant et le plus ardemment discuté est Job,xix, 23-27.

Qui me donnera que mes paroles soient écrites?

Qui me donnera qu’elles soient tracées dans un livre,

Gravées sur le plomb avec un poinçon de fer,

Sculptées sur le roc (pour durer) à jamais?

Oui, moi je sais que mon goel est vivant,

Et qu'à la fin il surgira sur la poussière (du tombeau);

Et quand ma peau sera tombée en pièces, ceci (arrivera)

Que de (ou loin de) ma chair je verrai Dieu.

Moi, je le verrai pour moi,

Mes yeux le verront et non pas un autre.

Mes rems défaillent dans mon sein!

Voir pour l’exégèse de ce passage: Rose, Étude surJob, xix, 25-27, dans la Revue biblique, 1896, p. 39-55;Patrizi, De mterpret. Script, sacrée, Rome, 1844, t. ii,237-253; Corluy, Spicilegium, Gand, 1884, t. i, p. 278296, etc. — Clément Romain, 1 Cor., 26, t. i, col. 265;Origène, In Matth., xxii, 23, t. un, col. 1565; saint Cyrille de Jérusalem, Catech., xviii, 15, t. xxxiii, col. 1036;saint Épiphane, Ancorat., 99, t. xliii, col. 196; saintAmbroise, In Psalm. cxrni, serm. x, t. xv, col. 1336,saint Jérôme, Epist. ad Paulin., lui, 8, t. xxii, col. 545,y voient une preuve de la résurrection. Au contraire,saint Jean Chrysostome, Epist. u ad Olympiad., 8,t. lui, col. 565, nie que Job connût la résurrection.Saint Justin, Athénagore, saint Irénée, Tatien, Didymed’Alexandrie, saint Isidore de Péluse, Théodoret, saintJean Damascène, et en général les Pères grecs, ayantà parler de la résurrection, n’invoquent pas le témoignage de Job, mais c’est parce qu’ils ne pouvaient pasen soupçonner la portée et le véritable sens, la versiongrecque, la seule qu’ils eussent entre les mains, ayantmal traduit et dénaturé Job, xix, 23-27. Pour saintChrysostome, en écrivant sa lettre, peut-être n’avait-ilpas notre passage présent à l’esprit; d’autant plus que,dans son commentaire, il paraphrase ainsi la pensée deJob: Puisse Dieu ressusciter ma peau qui a souffert toutcela! Il ajoute: «Job n’ignorait donc pas, à mon avis,la résurrection des corps; à moins qu’on ne dise que ladélivrance de ses maux était la résurrection (qu’il espérait).» T. lxiv, col. 621. Les versions anciennes sontégalement favorables à l’opinion qui trouve dans le textede Job l’expression de la résurrection; toutefois, beaucoup moins clairement que la Vulgate. Cette exégèseest confirmée par les faits suivants: 1. Job n’attend plusrien de ce monde; il regarde sa mort comme prochaineet assurée, du reste, il ne conserve plus aucun espoir icibas, x, 20-22; xiv, 13; xix, 10. — 2. La solennité de cequi précède, xix, 23-24, et de ce qui suit, 28-29, prometau lecteur quelque chose d’extraordinaire. C’est le tondes grandes prophéties messianiques. Voir Vigouroux,La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., t. iv,p. 596-601. — En tout cas, l’annonce de Job ne se vérifiepas dans la théophanie, car Dieu ne surgit pas sur lapoussière (du tombeau) mais parle du sein de la nue;d’ailleurs la théophanie était tout à fait imprévue etinespérée.- — 4. Notez encore l’expression «mon œil leverra» qui expliquée je verrai Dieu» et qui serait enPage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome III.djvu/816 Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome III.djvu/817

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